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Commission des affaires économiques

Séance du 25 octobre 2011 à 12h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • SMIC
  • permanent
  • salaires

La séance

Source

Dans le cadre de la commission élargie, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Francis Saint-Léger, les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du mardi 25 octobre 2011,sur le site Internet de l'Assemblée nationale).

À l'issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».

La commission est tout d'abord saisie de l'amendement CE 1 de M. Bernard Reynès.

PermalienPhoto de Bernard Reynès

Je souhaite tout d'abord rappeler que cet amendement bénéficie du soutien du Gouvernement, qui a déposé un amendement identique pour la séance publique. Je remercie d'ailleurs le ministre de l'agriculture pour le soutien qu'il a apporté à cette initiative. À l'origine de cette initiative, il y a avant tout le problème de l'emploi dans le secteur agricole. Du fait des problèmes de trésorerie, d'endettement et de diminution des marges, l'emploi est en effet devenu une véritable variable d'ajustement. Le dispositif que je propose consiste, en complément de l'allégement général sur les bas salaires, à exonérer les entreprises agricoles de leurs autres cotisations légales et conventionnelles de façon à réduire de 1 € le coût de l'heure de travail des salariés permanents au niveau du SMIC. Cette exonération s'appliquera à tous les salaires compris entre 1 SMIC et 1,4 SMIC. Dégressive, elle sera maximale pour une rémunération annuelle inférieure ou égale à 1,1 SMIC et s'annulera pour une rémunération annuelle supérieure ou égale à 1,4 SMIC. J'ai bien entendu l'exposé de M. Jean Gaubert mais si l'exonération dégressive était allée jusqu'à 1,6 SMIC, cela aurait coûté 29 millions d'euros supplémentaires et si l'exonération maximale était allée jusqu'à 1,2 SMIC, cela aurait encore coûté 80 millions d'euros. La mesure proposée a au moins le mérite d'exister et constitue un geste fort envers le monde agricole. Par ailleurs, nous essayons dans une certaine mesure d'éviter le piège de la trappe à bas salaires.

Je veux remercier MM. Charles de Courson, Jean Dionis du Séjour et Jacques Remiller qui m'ont accompagné à Bruxelles pour défendre ce dispositif devant la Commission européenne, afin de parer une éventuelle décision de non compatibilité avec la réglementation européenne. Nous avions envisagé initialement une exonération s'appliquant à l'ensemble des producteurs mais uniquement de ceux-ci. Cependant, la Commission nous a signalé qu'il y avait dans ce cas un risque d'assimilation à une aide d'État. C'est pour cette raison que nous avons élargi le dispositif à toutes les personnes qui sont assujetties à la MSA et que nous avons mis un palier - ce dispositif est aussi adaptable aux entreprises, à concurrence de 20 personnes par entreprise.

Il n'a pas l'ambition à lui seul de relancer la compétitivité de notre agriculture mais il répond à un besoin urgent et la mesure sera d'ailleurs applicable, si elle est adoptée, dès le 1er janvier 2012. Dans le rapport que j'ai remis récemment au ministre de l'agriculture, j'ai souligné l'urgence d'ouvrir le chantier de l'harmonisation des charges en Europe, dont l'écart est actuellement de 1 à 20. Mais nous ne pouvons laisser nos agriculteurs disparaître en attendant de parvenir à cet objectif. En conclusion, cet amendement est le résultat de longs mois de travail et de concertation et il nous permet d'apercevoir le bout du tunnel, sans pour autant nous aventurer sur le registre de la distorsion de concurrence. C'est d'abord d'emploi qu'il s'agit !

PermalienPhoto de Serge Poignant

L'action qu'a menée Bernard Reynès n'était pas simple et je veux sincèrement le féliciter du résultat auquel elle aboutit. Un gros travail a été fait avec bon nombre de nos collègues, qui sont du reste cosignataires de l'amendement, en concertation avec le ministre, le Gouvernement et la commission des finances. Je soutiens moi-même pleinement ce dispositif qui doit permettre d'alléger le coût de la main d'oeuvre pour aider notre agriculture.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Je souhaite insister sur la dimension sociale de la mesure proposée. Nous avons en effet un vrai problème de précarisation de l'emploi agricole. Les mesures prises jusqu'à présent sur le travail occasionnel ont entraîné beaucoup d'employeurs à substituer des travailleurs occasionnels à des travailleurs permanents et cette mesure a précisément le mérite de rétablir un équilibre entre les travailleurs en CDI et les travailleurs occasionnels.

Un autre point mérite d'être souligné : nous sommes allés à Bruxelles, en tant que parlementaires, recueillir l'avis préalable de la Commission européenne sur un projet d'amendement. Cette démarche est tout à fait novatrice et nos interlocuteurs ont apprécié le souci d'« euro-compatibilité » que nous avions. Du reste, il existe aujourd'hui une vraie réflexion, au niveau communautaire, sur le financement de la protection sociale.

Je veux également rappeler que nous avons dû ajuster le dispositif pour tenir compte des observations de la direction générale de l'agriculture et du développement rural. Nous voulions à l'origine faire porter la mesure exclusivement sur la production, c'est-à-dire sur les exploitations. Finalement, nous la faisons porter aussi sur les CDD, mais dans la limite de 20. La date d'entrée en vigueur demeure subordonnée à l'accord des instances communautaires mais je pense que nous avons mis toutes les chances de notre côté.

Une dernière précision sur le vote, hier en fin de journée, de l'article d'équilibre. Les trois recettes que nous avions prévues dans la première partie atteignaient finalement 235 millions alors même que nous n'avons ouvert que 210 millions sur le budget de l'agriculture. Le différentiel de 25 millions est « passé » à la réduction du déficit budgétaire. J'aurais préféré que cette somme nous permette de passer de 1,4 à 1,6 SMIC. Cela nous mettrait en cohérence avec l'actuel taux plafond des « amendements Fillon ».

Enfin, nous sommes bien entendu conscients du risque, avec ces systèmes, de créer des trappes à bas salaires. C'est pour cela que nous avons prévu qu'il n'y ait pas de dégressivité entre 1 et 1,1 SMIC.

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je vous remercie, monsieur le président. Je crois effectivement, je l'ai d'ailleurs mentionné tout à l'heure, qu'il s'agit d'un vrai problème. Je voudrais néanmoins faire quelques observations. Je regrette tout d'abord que le groupe SRC n'ait pas été associé aux discussions et réflexions sur l'élaboration de ce dispositif.

Le sujet d'aujourd'hui nous renvoie à la dichotomie travail permanent travail non permanent. S'agissant du travail non permanent, le problème a déjà été résolu, grâce à un accord consensuel. On nous propose aujourd'hui d'examiner la problématique du travail permanent. Un point essentiel de ce débat est celui des plafonds d'exonération. Hier, lors d'une réunion, à laquelle participait également Mme Erhel, des légumiers de notre région nous ont dit réduire au minimum leurs effectifs de salariés non permanents, et privilégier l'emploi de salariés permanents. La réglementation n'a pas eu d'impact sur leur position. En outre, leurs permanents ayant de l'ancienneté perçoivent une rémunération supérieure à 1,4 fois le montant du SMIC et ne se sentent à ce titre pas concernés par le dispositif que vous proposez. En revanche, la taxation du fioul utilisé comme carburant, qui va rapporter 35 millions d'euros, va les affecter. Ce dispositif fera donc des gagnants et des perdants au sein même de la profession agricole.

Ensuite, il faut souligner que le poids des personnels permanents n'est pas aussi discriminant pour la compétitivité que celui des personnels non permanents. Dans des secteurs tels que ceux se trouvant dans ma circonscription, les salaires ne représentent que 10% des coûts alors que le prix de l'alimentation du bétail en représente lui 55%. Peut-être serait-il plus opportun de considérer une mesure pour alléger le prix de l'alimentation du bétail ?

Je suis par ailleurs convaincu que ce dispositif est une véritable « trappe à bas salaires ». Les exploitants se trouvant dans une situation financière difficile auront tendance à diminuer les salaires d'ouvriers pourtant présents dans leur entreprise depuis des années afin de bénéficier de la mesure que vous proposez.

Cet amendement introduit une nouvelle taxe, la trente-et-unième depuis 2007. L'impôt sur le revenu a été diminué, mais au profit de nouvelles taxes, imposant des bases différentes.

Enfin, je reste sceptique quant à l'euro- compatibilité de ce dispositif. Vous avez déclaré avoir reçu des assurances de la part de la Commission européenne, mais elles ne se traduisent pas dans l'exposé sommaire de l'amendement. Dans le passé, les agriculteurs ont été amenés à rembourser à plusieurs reprises des aides illégales, je ne voudrais pas que ce soit le cas une fois encore.

Dans ces conditions, le groupe SRC s'abstiendra sur cet amendement. Il soulève un vrai problème, mais le débat doit être résolu d'une autre manière. Le paiement de charges sociales devrait s'effectuer sur les revenus, et non pas exclusivement sur les revenus du travail.

PermalienPhoto de Bernard Reynès

Je voudrais reprendre un certain nombre de points qui viennent d'être évoqués. D'abord, s'agissant de la taxe sur le fioul rouge, et je m'exprime sous le contrôle de M. Charles de Courson, qui connaît très bien le sujet, il me semble qu'elle se situe à 1,5 centime d'euro par litre de fioul rouge. Pour une exploitation de 100 hectares, cela représente 200 euros en moyenne.

Ensuite, certaines entreprises rémunèrent effectivement leurs employés à 1,6 ou 1,7 fois le montant du SMIC. Il faut s'en réjouir car la compétitivité de l'agriculture française repose en partie sur la qualité de ses employés. Là, où je ne rejoins pas M. Gaubert, c'est que le problème intervient en amont, au moment de l'embauche. La part des embauches en CDI ne représente que 4 % dans l'agriculture alors qu'elle représente près de 20 % pour les autres secteurs économiques. Il s'agit donc bien d'un problème qualitatif.

Par ailleurs, je voudrais relativiser la portée des débats au sujet de la taxation des sodas. Elle ne représente que 2 centimes d'euros sur une canette de 33 centilitres.

S'agissant de l'euro- compatibilité, la démarche et le contenu même de la proposition ont été bien reçues par la Commission européenne. Cette dernière nous a donné des pistes de réflexion pour améliorer le dispositif et nous les avons étudiées. Les discussions se poursuivront néanmoins évidemment entre le Gouvernement et la Commission.

PermalienPhoto de Francis Saint-Léger

Il s'agit d'un avis favorable. C'est un dispositif qui est en effet très attendu par les agriculteurs. Il permet de résoudre en partie la distorsion de concurrence concernant le coût du travail permanent qui s'exerce à l'échelle européenne au détriment des exploitants agricoles français. C'est un problème que nous avions souligné lors de la discussion de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche puisque l'article 38 disposait que le Gouvernement devait dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, remettre aux assemblées parlementaires un rapport sur le coût du travail permanent en agriculture.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Je vais donc mettre aux voix pour avis cet amendement de M. Bernard Reynès.

L'amendement CE 1 est adopté, le groupe SRC s'abstenant.

Puis la Commission, suivant l'avis de M. Francis Saint-Léger, rapporteur pour avis, a donné un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».

AMENDEMENT EXAMINÉ PAR LA COMMISSION

Amendement CE 1 présenté par M. Bernard Reynès :

Article additionnel après l'article 48,

Insérer l'article suivant :

I.- Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L'article L. 741-4-1 est abrogé ;

2° L'article L. 741-15-1 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 741-15-1.- I.- Les employeurs relevant du régime de protection sociale des professions agricoles sont exonérés du paiement de la part patronale des cotisations et contributions mentionnées au II dans la limite de vingt salariés agricoles employés en contrat à durée indéterminée par entreprise.

« Pour les employeurs appartenant à un groupe tenu de constituer un comité de groupe en application du I de l'article L. 2331-1 du code du travail, la limite de vingt salariés s'apprécie au niveau du groupe. »

« II.- Les cotisations exonérées en application du I sont les suivantes :

« 1° La contribution prévue au 1° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles ;

« 2° La cotisation due au titre du fonctionnement du service de santé et de sécurité au travail prévue au deuxième alinéa de l'article L. 717-2 du présent code ;

« 3° La cotisation de la retraite complémentaire obligatoire des salariés versée aux institutions de retraite complémentaire mentionnées au I de l'article L. 727-2 du présent code ;

« 4° La cotisation due au titre du fonds national d'aide au logement prévue au 1° de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale ;

« 5° La cotisation versée à l'Association pour la gestion du fonds de financement, rendue obligatoire, en application des articles L. 911-3 et L. 911-4 du code de la sécurité sociale, par l'arrêté du 14 mars 2011 portant extension et élargissement de l'accord national interprofessionnel du 25 novembre 2010 portant prorogation de l'accord du 23 mars 2009 sur les régimes complémentaires de retraite AGIRC et ARRCO ;

« 6° La cotisation due au titre de l'assurance contre le risque de non paiement des salaires prévue à l'article L. 3253-18 du code du travail ;

« 7° La contribution due au titre de l'assurance chômage prévue à l'article L. 5422-9 du code du travail ;

« 8° La participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue prévue à l'article L. 6331-1 du code du travail ;

« 9° La cotisation versée à l'Association nationale pour l'emploi et la formation en agriculture, rendue obligatoire, en application de l'article L. 2261-15 du code du travail, par l'arrêté du 15 septembre 2006 portant extension d'un avenant à l'accord collectif national de travail sur l'emploi dans les exploitations et entreprises agricoles ;

« 10° La cotisation versée au conseil des études, recherches et prospectives pour la gestion prévisionnelle des emplois en agriculture et son développement, dénommé PROVEA, rendue obligatoire, en application de l'article L. 2261-15 du code du travail, par l'arrêté du 28 octobre 2002 portant extension d'un accord collectif national de travail sur les saisonniers, sur diverses dispositions sur les contrats à durée déterminée et sur l'organisation de la gestion prévisionnelle de l'emploi en agriculture ;

« 11° La cotisation versée à l'Association pour le financement de la négociation collective en agriculture, rendue obligatoire, en application de l'article L. 2261-15 du code du travail, par l'arrêté du 26 mars 1992 portant extension d'un accord national relatif à l'organisation de la négociation collective en agriculture.

« III.- L'exonération mentionnée au I est calculée chaque année civile, pour chaque salarié dans la limite d'effectifs mentionnée au I. Son montant est égal au produit de la rémunération annuelle, telle que définie à l'article L. 741-10, par un coefficient. Ce coefficient est déterminé par application d'une formule fixée par décret. Il est fonction du rapport entre la rémunération du salarié et le salaire minimum de croissance lesquels sont appréciés selon les modalités prévues au III de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Ce coefficient est maximal pour les rémunérations inférieures ou égales au Smic majoré de 10%. Il est dégressif à compter de ce niveau de rémunérations puis devient nul pour les rémunérations égales au Smic majoré de 40%.

« IV.- Cette exonération est cumulable avec le bénéfice de la réduction dégressive de cotisations prévue à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ainsi qu'avec la déduction forfaitaire prévue à l'article L. 241-18 du même code.

« V. – Les caisses de mutualité sociale agricole versent à leurs attributaires, pour le compte de l'État, les sommes correspondant aux cotisations et contributions exonérées en application des dispositions des I à III.

« VI. - Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret. ».

II – Le 1er alinéa du VI de l'article L. 241-13 est complété par les mots suivants : « et avec l'exonération prévue à l'article L. 741-15-1 du code rural et de la pêche maritime.

III - Les dispositions du présent article s'appliquent aux cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2012.

IV. - Les dispositions du présent article s'appliqueront dès lors que la Commission européenne aura confirmé que cette mesure est compatible avec l'article 107.1 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 25 octobre 2011 à 12 h 30

Présents. - Mme Catherine Coutelle, M. Jean-Pierre Decool, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Yannick Favennec, M. Jean Gaubert, M. Jean Grellier, M. Louis Guédon, M. Michel Lejeune, Mme Annick Le Loch, M. Louis-Joseph Manscour, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Marie Morisset, M. Germinal Peiro, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. Bernard Reynès, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Francis Saint-Léger, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alfred Trassy-Paillogues, Mme Catherine Vautrin

Excusés. - M. Bernard Brochand, M. Jean-Michel Couve, M. Jean-Marc Lefranc

Assistaient également à la réunion. - Mme Brigitte Barèges, Mme Gisèle Biémouret, M. Joseph Bossé, M. Jean-Claude Bouchet, M. Gérard Charasse, M. André Chassaigne, Mme Marianne Dubois, M. Paul Durieu, Mme Martine Faure, M. Michel Grall, M. Guénhaël Huet, M. Robert Lecou, M. Jean Mallot, M. Gérard Menuel, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, Mme Sylvia Pinel, M. Didier Quentin, Mme Catherine Quéré, M. Jacques Remiller, M. François Rochebloine