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Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Séance du 30 juin 2010 à 12h00

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La Commission entend M. François Baroin, ministre du Budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, sur le rapport préalable au débat d'orientation des finances publiques

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Mes chers collègues, nous accueillons aujourd'hui M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, sur le rapport préalable au débat d'orientation des finances publiques.

Cette année, ce débat, sur le fondement de l'article 50-1 nouveau de la Constitution, donnera lieu à une déclaration du Gouvernement suivie d'un vote, qui n'engagera pas la responsabilité du Gouvernement. Je tiens toutefois à préciser que le président de l'Assemblée aurait souhaité que, se fondant sur un autre article de la Constitution, le Gouvernement engageât sa responsabilité à cette occasion, du fait que ce débat, organisé mardi prochain, sera manifestement pour lui l'occasion de présenter une nouvelle trajectoire des finances publiques.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Le prochain débat d'orientation budgétaire s'inscrit dans un contexte singulier, en particulier parce que ce sera la première fois que nous appliquerons l'article 50-1 de la Constitution, qui permet au Gouvernement de faire, s'il le décide, une déclaration suivie d'un vote n'engageant pas sa responsabilité. La représentation nationale, par la voix de son président, a pu porter un regard différent sur ce débat. Le Gouvernement a décidé de recourir à cet article nouveau, désireux qu'il était de respecter un engagement qu'il avait pris lors de la conférence sur les déficits publics du 20 mai 2010, au cours de laquelle il a annoncé le triptyque suivant : monopole d'examen des dépenses fiscales dans le cadre de la loi de finances, révision constitutionnelle – j'y reviendrai à propos du rapport Camdessus – et vote du Parlement sur les engagements de la France vis-à-vis de ses partenaires européens.

Cette année, nous vous proposons de vous prononcer sur des engagements qui ont été pris précédemment, anticipant, de cette façon, la norme des années à venir, c'est-à-dire des débats d'orientation des finances publiques régulièrement suivis de votes et des projets de lois de finances pluriannuelles.

La crise n'a pas seulement mis à mal l'économie mondiale : elle est venue nous rappeler avec acuité la nécessité de veiller à la maîtrise des finances publiques. La crise grecque et les incertitudes concernant les pays de la zone euro dont les finances publiques sont trop fragiles nous ont permis de renforcer la solidarité européenne – l'Europe avance souvent par des crises –, sans que cela atténue en rien la rudesse des défis qui nous attendent. Nous avons aujourd'hui entre nos mains la soutenabilité présente et à venir de nos finances publiques. Il s'agit d'un vrai rendez-vous au regard de l'histoire budgétaire. Jamais depuis trente ans des mesures de cet ordre n'ont été prises. Du reste, on n'a jamais procédé à une réduction de deux points de déficit, même lors de la qualification pour l'euro. Nous n'avons, il est vrai, jamais atteint un tel niveau de dettes et donc subi une telle pression.

Le débat d'orientation des finances publiques est pour moi l'occasion de vous présenter la situation actuelle des comptes publics, de vous faire part de nos choix futurs et de réaffirmer les engagements que nous avons pris au plan européen dans le cadre de notre programme de stabilité. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité un vrai débat.

L'année 2010 sera le point de départ de nouvelles mesures placées sous le signe d'une extrême vigilance dans la gestion des ressources publiques. Plus profondément, j'aspire à un changement des mentalités et des habitudes vis-à-vis de la dépense publique. Ce sentiment est partagé, me semble-t-il, aussi bien à gauche qu'à droite : la sphère publique n'est pas une corne d'abondance ; les temps sont durs ; inverser la tendance et se montrer plus raisonnable engagent notre responsabilité. D'aucuns évoqueront la rigueur : il s'agit plutôt de discipline et de sagesse budgétaires : il ne convient pas de dépenser plus que l'on a. Si on appelle le plan français plan de rigueur, doit-on parler de coup de massue pour les plans adoptés par le Royaume-Uni ou l'Espagne ? Si les mots ont un sens, il convient de les replacer dans le contexte de chaque pays.

Si l'État se doit d'être à la hauteur des circonstances, si nous devons agir de manière responsable, c'est qu'avec les choix que nous faisons aujourd'hui, nous jouons l'avenir de nos enfants. La trajectoire que nous prévoyons de suivre pour les années à venir sera donc serrée.

Notre préoccupation, en 2010, est d'accompagner la reprise tout en étant au rendez-vous des objectifs de finances publiques que nous avons fixés : je vous confirme d'ores et déjà qu'ils seront tenus. En effet, accompagner la reprise, c'est assurer la mise en oeuvre d'une part des dispositions du plan de relance tout en prévoyant leur arrêt progressif, d'autre part du programme d'investissement d'avenir, prévu dans la première loi de finances rectificative pour 2010.

Pour être au rendez-vous de nos objectifs de finances publiques, nous devons remplir trois conditions : tenir notre objectif de déficit public à 8 % du PIB et la dépense de l'État au niveau prévu par la loi de finances – « zéro volume » –, respecter l'objectif national des dépenses maladie voté par le Parlement. Sur ces trois points, au vu de la situation actuelle des recettes et des dépenses, nous sommes en ligne avec nos objectifs.

Dès 2011 et pour trois ans, notre stratégie visera à infléchir les déficits publics par un nouvel élan de la maîtrise de la dépense, en vue de les ramener à 3 % du PIB en 2013, conformément aux engagements pris devant nos partenaires européens.

Notre programme de stabilité prévoit une réduction du déficit d'environ cinq points de PIB sur trois ans, ce qui représente quelque 100 milliards d'euros, dont une partie proviendra du rattrapage des recettes fiscales après la crise et une autre de la non-reconduction de certaines des mesures prises en 2010 qui n'avaient pas vocation à être pérennes – je pense notamment aux mesures de relance ou au surcoût de la taxe professionnelle. Au-delà de ce rattrapage attendu, notre stratégie portera sur de nouvelles mesures d'économie dans la période 2011-2013, en vue de contenir à 0,6 % seulement au cours de cette même période l'évolution en volume de la dépense publique. La réduction de la croissance de ces dépenses faisait déjà partie des engagements du Gouvernement en 2007 : elle devient aujourd'hui plus cruciale encore. J'ai eu l'occasion de m'exprimer sur les raisons qui ont conduit le Gouvernement à choisir ce levier : notre pays atteint déjà l'un des niveaux de prélèvements obligatoires les plus élevés au monde. Toute hausse généralisée d'impôts nuirait à la compétitivité de notre économie et compromettrait la reprise. C'est donc de manière résolue que, dans le cadre de la préparation budgétaire, l'axe d'intervention vise la dépense.

J'insiste sur ce point car nous ne gagnerons pas notre pari sans l'implication de tous les acteurs publics. Dans le cadre du budget pluriannuel, le Gouvernement a décidé d'infléchir réellement l'accroissement des dépenses de l'État. C'est un objectif sans précédent. Les dépenses seront stabilisées en valeur pour les trois prochaines années, hors pensions et charge de la dette. Le Gouvernement consentira un effort à hauteur de 10 % sur toutes les dépenses de fonctionnement et d'intervention d'ici à 2013. Il ne s'agira donc plus de suivre l'inflation, comme les années précédentes. Afin d'atteindre cet objectif, l'État devra réduire son train de vie grâce aux outils de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, comme les chantiers interministériels, qui comprennent notamment la rationalisation des achats, le perfectionnement des systèmes d'information ou la réorganisation des concours : 150 mesures ont été présentées ce matin en conseil des ministres, qui sont évidemment d'inégale valeur. Je noterai, outre la centralisation sous un seul numéro – le 3939 – de toutes les activités de service et l'évolution de l'utilisation d'internet appliquée à tous les dispositifs administratifs, les mesures relatives à l'immobilier, au parc automobile, à l'évolution du train de vie ou à la suppression de 100 000 postes de fonctionnaires dans le cadre des départs à la retraite. La première vague de RGPP a déjà permis à l'État d'économiser 7 milliards d'euros ; on devrait en économiser 10 milliards grâce à la deuxième vague.

Nous souhaitons également procéder à un réexamen de toutes les dépenses d'intervention, qui représentent 66 milliards d'euros, afin de dégager 10 % d'économies. Pour la première fois, nous demanderons aux 655 opérateurs de l'État de fournir un effort équivalent à celui de ce dernier : ils entreront donc dans le périmètre d'intervention de la réduction des dépenses publiques. Il convient tout autant de respecter les statuts que de mettre fin à certaines habitudes. Les obligations de transparence seront renforcées, notamment en matière de gestion du parc immobilier public des opérateurs, qui, par voie de circulaires, se verront contraints d'entrer dans le champ d'application des économies.

La RGPP, qui est un des piliers importants de la réduction des dépenses, a également une utilité transversale. Dans le cadre du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, 100 000 emplois ont été supprimés lors de la première RGPP et 100 000 le seront d'ici à 2013. Il convient également de mentionner les réformes d'implantation territoriale, la fusion de la DGFiP, qui connaîtra cette année sa conclusion statutaire, la création de Pôle Emploi, les différentes fusions ou encore la réduction au plan régional des cartes judiciaire et militaire. Le dispositif dans lequel nous entrons nous permettra de valoriser toutes ces sources d'économies. En 2012, le nombre des agents de l'État redeviendra équivalent à ce qu'il était au début des années quatre-vingt-dix : entre 2011 et 2013, près de 5 % des effectifs de l'État seront donc supprimés pour un gain annuel de quelque 1,5 % des dépenses, lequel correspond au gain de productivité observé dans le secteur des services. Le gain brut total dépassera les 3 milliards d'euros. Je tiens à préciser que le principe de faire bénéficier les agents de 50 % des économies induites par le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite sous forme d'amélioration de leur situation financière sera reconduit dans le cadre du prochain budget triennal.

Nous procéderons, pour la sécurité sociale, de la même façon que pour l'État, c'est-à-dire en associant réforme et maîtrise serrée de la dépense.

En ce qui concerne les dépenses d'assurance maladie, nous nous engageons à ramener la progression de l'ONDAM à moins de 3 % lors de la période 2011-2013 : 3 % en 2011 – nous ferons mieux si c'est possible –, 2,9 % en 2012 et 2,8 % en 2013. Des innovations récentes, comme les agences régionales de santé qui doivent permettre d'améliorer le lien entre la ville, l'hôpital et le médico-social, ou des projets de réforme des hôpitaux nous permettront de renforcer l'efficacité de l'assurance maladie. Par-delà les réformes de structures, il convient également de trouver des outils nous permettant de respecter l'ONDAM : à cette fin, nous avons largement repris les conclusions du rapport Briet. Le seuil d'alerte, aujourd'hui fixé à 0,75 %, sera progressivement abaissé à 0,5 % d'ici 2012 ou 2013. De plus, le rôle du comité d'alerte sera étendu : il se prononcera désormais ex ante sur la construction de l'ONDAM et son rôle de veille dans l'exécution de l'ONDAM sera renforcé. Une fraction des dotations sera mise en réserve dès le début de l'année.

La réforme majeure au coeur de notre stratégie de maîtrise des dépenses publiques n'en demeure pas moins la réforme des retraites. Nous l'avons voulue profonde et juste. Préservant le système par répartition, elle permettra à nos enfants d'avoir les mêmes chances que les générations qui les ont précédés.

Cette réforme devrait permettre aux régimes de retraite d'atteindre l'équilibre dès 2018. Elle générera un gain d'1,2 point sur le déficit structurel à l'horizon 2020 et quelque 9 points de PIB sur la dette publique au même horizon. La réforme des retraites peut être contestée dans sa philosophie ou son esprit : il ne faut pas oublier qu'elle a pour objectif de répondre au problème démographique et que, je le répète, son incidence en termes de maîtrise de nos déficits publics sera importante.

Nous ne réussirons pas notre pari sans partager les efforts. C'est la raison pour laquelle les transferts de l'État aux collectivités locales seront stabilisés en valeur durant les trois prochaines années. La réforme des collectivités en cours de discussion au Parlement aidera à rendre plus efficace la dépense locale. Je vous confirme un moratoire sur les normes réglementaires, hors normes européennes, que l'État impose aux collectivités : en effet, ces normes pèsent sur leurs dépenses. Le Gouvernement souhaite parallèlement renforcer la péréquation à l'intérieur de l'enveloppe des concours de l'État. C'est une mesure à laquelle je tiens particulièrement. Je sais que le rapporteur général m'apportera un soutien puissant dans ce domaine.

L'effort en 2011, qui s'inscrit dans une perspective triennale, doit être conforté par une réorientation de la dépense publique. Des garanties en la matière doivent être données à la fois au pays et à nos partenaires. La commission créée le 28 janvier par la conférence nationale sur le déficit, présidée par M. Michel Camdessus et dont le président de la commission des finances et le rapporteur général étaient membres, a rendu son rapport relatif à l'inscription dans la Constitution de la règle d'équilibre des finances publiques. Ce remarquable rapport aborde chaque question technique en soulignant les différentes réponses possibles et en indiquant des préférences. Un consensus s'est déjà établi autour de certaines propositions, notamment celle qui vise à confier le monopole des dispositions relatives aux recettes fiscales et sociales aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale. C'est une règle à la fois utile et vertueuse pour conserver une approche cohérente de l'évolution des recettes de l'État et de la sécurité sociale. C'est la raison pour laquelle nous l'avons d'ores et déjà mise en oeuvre dans le cadre de la circulaire du Premier ministre du 4 juin 2010.

Le contenu de la règle constitutionnelle d'équilibre est un enjeu majeur. Nous y sommes attachés. Le sujet mérite d'être discuté et approfondi. Sous l'autorité du Premier ministre, nous consulterons prochainement les présidents de groupe, les acteurs essentiels en matière de finances publiques que sont les membres de la commission des finances des assemblées et les partis politiques. Ces consultations, qui ne feront pas l'objet d'un calendrier précis, se dérouleront à l'automne, parallèlement à l'examen de la loi de finances, l'objectif étant de définir les contours d'un éventuel consensus politique autour de l'adoption d'une révision constitutionnelle. Le calendrier devra toutefois être compatible avec les « grands événements » de l'année 2012.

Telle est le coeur de notre stratégie générale pour les trois prochaines années. Dès 2011, le redressement de nos finances publiques est impératif. Nous sommes face à deux enjeux, aussi importants l'un que l'autre : d'un côté engager avec détermination la réduction des déficits publics ; de l'autre accompagner la reprise de l'activité. En 2011, l'objectif intangible et incontournable est de ramener les déficits publics à 6 %. Toutes les mesures budgétaires seront mises en oeuvre pour l'atteindre. Il conditionne la matrice du débat d'orientation budgétaire en matière de dépenses. En ce qui concerne les recettes, les derniers arbitrages seront rendus à la fin du mois d'août ou au début du mois de septembre.

Nous voulons nous concentrer sur les dépenses de toutes natures, y compris les dépenses fiscales et les niches sociales les plus favorables à la croissance et à l'emploi, sans remettre en cause celles qui concernent les personnes les plus en difficulté. J'ai demandé à l'inspection générale des finances d'étudier l'incidence réelle de chacune de ces dépenses sur l'emploi, ce qui nous permettra d'avoir une vision précise des effets réels des dispositifs dérogatoires au droit commun en matière fiscale, et de connaître d'éventuels abus, contournements ou optimisations. En la matière, le ministre du budget est ouvert à toutes les idées. Je vous propose un point de départ ambitieux, avec l'espoir que le partage de cette ambition soit vertueuse pour les finances publiques. Toutefois, les mesures qui favorisent l'emploi ou protègent tant les publics fragiles en termes d'âge et de handicap que les attributaires de minima sociaux constitueront une ligne rouge. En matière de niches fiscales, l'objectif de suppression n'en reste pas moins de réaliser 8,5 à 10 milliards d'euros de recettes pour 2011 : il peut être atteint et nous ne doutons pas du concours du Parlement à cette fin. Nous travaillons sur deux pistes : le rabot et le bouquet. Le bouquet sera constitué des niches qui seront supprimées tandis que le rabot sera le dispositif transversal. Il ne s'agira pas pour nous de raboter de vieilles fleurs. Cette mesure nous est simplement apparue à la fois comme la plus efficace pour atteindre l'objectif et la plus acceptable par l'opinion. Dans la logique du rabot, aucun public particulier, à l'exception, je le répète, des publics fragiles, ne sera épargné par l'effort général.

L'année 2011 sera donc pour l'État la première année d'un budget triennal caractérisé par une rupture dans la progression de la dépense. Le « zéro valeur », hors charge de la dette et pensions, suppose un effort sans précédent de chacun, qui sera tout d'abord fourni par les collectivités locales. J'ai évoqué la stabilisation en valeur des concours de l'État hors FCTVA, qui s'appliquera en 2011 comme sur l'ensemble du « triennal », conformément à ce que le Président de la République a annoncé à l'occasion de la conférence du 20 mai dernier.

Cet effort devra également être fourni par l'Union européenne, à laquelle nous contribuons à travers un prélèvement sur les recettes de l'État. Alors que l'ensemble des États européens conduisent des politiques courageuses de maîtrise de leurs dépenses, qu'ils ont organisé eux-mêmes la solidarité de pays en difficulté, comme la Grèce, et qu'ils en assument les conséquences financières, je ne trouve pas acceptable que la Commission demande pour 2011 un budget en hausse de plus de 6 %. Nous le redirons à Bruxelles aux côtés des autres États membres soucieux de modération budgétaire. Les efforts demandés à nos concitoyens doivent permettre de réduire les déficits ; ils n'ont pas pour objet de financer une dépense européenne galopante.

J'ai déjà évoqué les règles transversales qui nous ont servi de matrice pour la construction de ce budget : elles seront mises en oeuvre sans faiblesse car, loin d'être de simples principes généraux, elles constituent un plan d'action immédiat, lequel se traduira notamment par la poursuite du « 1 sur 2 », qui nous permettra d'économiser plus de 30 000 emplois dès 2011, et par un effort d'économies de 10 % sur trois ans pour les dépenses de fonctionnement et d'intervention. Cet effort suppose que nous envoyions un signal crédible dès la première année : c'est pourquoi la moitié du chemin sera parcourue dès 2011.

Je le répète : le Gouvernement ne remettra pas en cause le RSA ni l'ensemble des minima sociaux. Il ne s'agit pas d'un budget de rigueur au sens où il frapperait tous les publics sans distinction et prévoirait une augmentation des impôts. De la même manière, nous ne réduirons pas les crédits consacrés à l'hébergement d'urgence – ils augmenteront même par rapport à 2010. Nous voulons un budget juste et équitable.

En matière d'investissements aussi, nous devons envoyer un signal fort. Certes, l'investissement, c'est l'activité, mais nous ne pouvons pas tout faire. Redresser les finances publiques, c'est le premier préalable pour soutenir la confiance et la croissance. Nous stabiliserons la subvention budgétaire prévue pour les infrastructures de transport. Le budget triennal 2011-2013 procèdera également à un moratoire sur le lancement de nouveaux grands équipements, notamment de nature culturelle. C'est un choix difficile mais responsable. Le contexte économique et financier nous conduit, de plus, à revisiter nos engagements pluriannuels. C'est la raison pour laquelle le budget 2011 prévoira une stabilisation en valeur des moyens de défense, avec une légère remontée en 2012 et 2013, pour un total de ressources inférieur de quelque 1,3 milliard d'euros aux prévisions de la loi de programmation militaire. Les économies réalisées par la Défense sur son fonctionnement, conformément à la démarche du livre blanc, devront permettre de dégager des marges pour préserver les programmes d'équipement. De plus, la cession de bâtiments et la vente de fréquences constitueront des sources de recettes. Grâce à cet effort, nous pourrons continuer d'augmenter le budget de la recherche et de l'enseignement supérieur, qui demeure la priorité du Gouvernement. Il s'agit de réussir le pari de l'autonomie pour les universités, qui, à cette fin, bénéficieront de moyens de fonctionnement renforcés et échapperont, comme les organismes de recherche, à toute suppression d'emplois pour l'ensemble de la période 2011-2013.

Nous poursuivrons également le renforcement des effectifs de l'administration pénitentiaire, ainsi que celui des juridictions dans le contexte de la réforme de la procédure judiciaire.

Trois leviers permettront de ramener le déficit public de 8 à 6 % du PIB et de réaliser ainsi 40 milliards d'euros d'économie. Le premier, pour 15 milliards, sera la non-reconduction de mesures prises pour 2010 qui n'avaient pas vocation à être pérennes – il s'agit, je le rappelle, des mesures de relance et du surcoût de la taxe professionnelle. Le deuxième, évalué à 11 milliards, sera constitué par le rattrapage des recettes fiscales en lien avec le retour de la croissance. Une grande majorité des recettes a en effet suivi la contraction de l'activité – baisse de 60 % de l'impôt sur les sociétés et de 30 % des droits de mutation en raison de la chute du marché immobilier. L'histoire récente nous a permis de vérifier la grande élasticité du modèle français à la baisse, nous la vérifierons sans aucun doute à la hausse. Troisième et dernier pilier : l'effort partagé de l'ensemble des acteurs de la dépense publique à hauteur de 14 milliards d'euros. Le gel en valeur des dépenses de l'État et des concours aux collectivités territoriales rapportera 7 milliards d'euros, auxquels il convient d'ajouter 1 milliard lié au gel des concours de l'État aux collectivités locales et 1 milliard économisé sur le fonctionnement de l'État et des opérateurs. Une meilleure maîtrise de la masse salariale, notamment le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, permettra d'économiser 1 milliard d'euros supplémentaire. Enfin, un effort de quelque 4 milliards d'euros sera effectué sur les dépenses d'intervention et les pensions de l'État.

La sphère sociale contribuera pour l'autre moitié de l'effort de redressement. La réforme des retraites rapportera 4,5 milliards d'euros. La reprise de la dette sociale par la CADES permettra de contribuer à hauteur de 3,2 milliards d'euros à l'effort de consolidation. Une réunion aura lieu ce soir avec les membres de la commission. Enfin la fixation de l'ONDAM à 2,9 sera l'occasion de réaliser un peu moins de 3 milliards d'euros d'économie. Il convient en réalité de réaliser un effort supérieur à 7 milliards d'euros pour neutraliser les conséquences de l'évolution tendancielle des dépenses sociales, qui conduit à une dégradation spontanée du déficit public.

Monsieur le président, comme vous l'avez rappelé vous-même, conformément à l'article 50-1 de la Constitution, le débat de mardi prochain donnera lieu à un vote du Parlement.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je tiens à clarifier plusieurs questions de procédure.

Tout d'abord, un plan de stabilisation a été transmis par les autorités françaises à Bruxelles à la fin du mois de janvier, plan que le débat de mardi prochain permettra de présenter au Parlement en séance plénière. Monsieur le ministre, ce plan de stabilisation fera-t-il bien l'objet d'une loi de programmation triennale dès l'automne ? La loi de programmation des finances publiques, votée en février 2009, étant devenue totalement obsolète, il est tout à fait indispensable, par respect pour les institutions autant que pour la clarté du débat démocratique, que le Parlement soit saisi d'un nouveau projet de loi de programmation, qui soit cohérent à la fois avec le programme de stabilité transmis à Bruxelles à la fin du mois de janvier et avec la position que le Gouvernement, soutenu par sa majorité, défendra la semaine prochaine lors du débat d'orientation budgétaire.

Il serait par ailleurs surprenant que la loi de finances initiale pour 2011 et la loi de financement de sécurité sociale ne soient pas cohérentes avec cette loi de programmation triennale. Pouvez-vous nous confirmer qu'elles le seront, monsieur le ministre ?

Enfin, vous avez vous-même évoqué la circulaire du Premier ministre visant à ce que la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale aient désormais le monopole de la dépense fiscale. Or le Sénat a adopté dans le cadre de la loi de modernisation agricole et avec l'accord, semble-t-il, du Gouvernement, une nouvelle niche fiscale, que j'ai découverte à l'occasion de l'examen d'amendements dans le cadre de l'article 40. Lors de l'examen du texte par l'Assemblée nationale, le Gouvernement demandera-t-il l'annulation de cette disposition votée par le Sénat afin de tenir l'engagement oral qu'il a pris et de respecter la circulaire du Premier ministre ?

Je ne reviendrai pas sur le débat relatif à l'élasticité, que nous aurons en séance publique. S'agissant de la dépense fiscale, nous avons eu trois chiffres : 6 milliards d'euros sur trois ans, puis 8,5 milliards, enfin 10 milliards. Dois-je comprendre que, dans le cadre des arbitrages qui ont été rendus récemment, les économies liées aux dépenses fiscales seront bien de 10 milliards d'euros ? Par ailleurs, l'effort portera-t-il uniquement sur ce que l'administration fiscale définit comme « dépenses fiscales », alors même que c'est elle qui décide de façon arbitraire ce qui en relève et ce qui relève de la modalité de calcul de l'impôt, ou portera-t-il également sur cette dernière ? En effet le bouclier fiscal, la baisse de la TVA pour le transport de voyageurs ou le régime de succession pour l'assurance-vie sont considérés non comme de la dépense fiscale mais comme de simples modalités de calcul de l'impôt, alors qu'il s'agit, en toute évidence, de dépenses fiscales. L'assiette des modalités de calcul de l'impôt est de 80 milliards d'euros et celle de la dépense fiscale de 73 milliards. Si l'objectif d'économie doit passer de 6 à 10 milliards d'euros, il serait peu compréhensible d'ignorer l'assiette de 80 milliards...

Enfin, vous avez rappelé l'effort à fournir en ce qui concerne l'immobilier de l'État, notamment de la Défense : je laisserai les rapporteurs spéciaux, qui viennent d'informer la commission des finances des résultats de ces deux dernières années, vous donner leur sentiment sur le sujet, encore que je le devine…

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur le ministre, le président de la commission vous a interpellé sur la mise en place de différentes règles de gouvernance en matière de finances publiques. Pour ma part, je tiens à vous féliciter des évolutions majeures de ces dernières semaines. Ainsi, pour la première fois, à l'occasion du débat d'orientation budgétaire mardi prochain et de l'examen du projet de loi de programmation en septembre, le Parlement pourra avoir connaissance du programme de stabilité et prendre position sur celui-ci. Voilà dix ans que les gouvernements successifs envoient à Bruxelles des programmes de stabilité sans que le Parlement en soit informé ! Il s'agit donc d'une rupture majeure.

Voilà aussi des décennies que les lois adoptées sont truffées d'exonérations fiscales ou sociales. Or, au début du mois de juin, le Premier ministre a adressé à tous les membres du Gouvernement une circulaire imposant que, dans les projets de loi à venir, les mesures d'exonération soient réservées aux seules lois de finances et de financement de la sécurité sociale. C'est, là encore, un progrès considérable.

De même, nous avons adopté pour la première fois en février 2009 une loi de programmation pluriannuelle qui doit être révisée en raison de la crise et vous proposez de le faire en septembre prochain. Le rapport de la commission Camdessus propose parallèlement de donner une force juridique constitutionnelle à certains éléments des lois de programmation pluriannuelle, ce qui nécessitera une réforme de la Constitution – du reste, la circulaire du Premier ministre, que j'ai évoquée précédemment, exige elle aussi une réforme de la Constitution afin de bénéficier d'une assise juridique suffisante. Le rapport Camdessus propose notamment que, dans la loi de programmation, des éléments normatifs président aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale annuelles : il prévoit, d'un côté, un plafond de dépenses normatif, pouvant faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité des lois de finances et de financement et, de l'autre, un plancher protégeant les recettes dans le cadre des mesures nouvelles. Je me réjouis des progrès considérables en termes de règles de bonne gouvernance que, grâce à vous, nous réalisons. J'espère que ces progrès feront l'objet du même consensus qu'en 2000, lorsque nous avons soutenu la démarche conduisant à la loi organique relative aux lois de finances de 2001, que nous sommes très heureux d'avoir adoptée.

Le débat d'orientation des finances publiques – autre innovation – revêtira, quant à lui, une solennité particulière puisqu'il sera l'occasion d'appliquer une nouvelle disposition de la Constitution, l'article 50-1, qui permet d'organiser un débat public et de le faire suivre d'un vote – je remercie le Gouvernement d'avoir fait ce choix.

Mes questions concerneront uniquement l'année 2011 qui, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, sera marquée par une diminution du déficit public de huit à six points de PIB pour un effort de quelque 40 milliards d'euros, un objectif que vous avez qualifié à l'instant d'« intangible » et d'« incontournable » puisqu'il est « le coeur de la stratégie ».

Compte tenu de l'évolution probable des taux d'intérêt et de l'augmentation du stock de dettes, quelle peut être l'augmentation de la charge de la dette en 2011 par rapport à 2010 ? Notamment, quel sera l'impact de l'emprunt national dans cette augmentation ? Je rappellerai que lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative, qui a mis en place le grand emprunt de 35 milliards d'euros, le coût en était évalué dès 2011 à 1,2 milliard d'euros.

Vous prévoyez de geler au niveau actuel la charge des pensions : comment y parviendrez-vous ?

S'agissant des prélèvements sur recettes, il n'est pas acceptable que l'Union européenne ait augmenté le sien de 1 milliard d'euros en 2009, comme nous avons pu le constater lors de l'examen du projet de loi de règlement. L'augmentation de 6 % que vous avez évoquée serait, quant à elle, inadmissible. Comment comptez-vous bloquer une telle augmentation du prélèvement de l'Union européenne ? Vous avez en effet raison : les mêmes efforts, qui sont demandés aux États, doivent être fournis par Bruxelles.

Pouvez-vous nous confirmer que l'augmentation de la charge constituée par les pensions, le prélèvement de l'Union européenne et les intérêts de la dette, en raison de l'augmentation mécanique des crédits, rend suffisant le choix « zéro valeur » pour toutes les autres dépenses ? Ou conviendrait-il de faire mieux que « zéro valeur » ? Je pense à la masse salariale des fonctionnaires en activité, qui représente 85 milliards d'euros. En effet, alors que le « 1 sur 2 » a été pratiqué en 2009, on a observé une augmentation de 800 millions d'euros entre l'exécution 2008 et l'exécution 2009 et de 600 millions entre la prévision en LFI 2009 et l'exécution 2009. L'objectif, par-delà le « 1 sur 2 », d'une reconduction en valeur en 2011 de la masse salariale est-il réalisable ? Si oui, comment peut-il être atteint ?

S'agissant des autres économies, les 15 milliards, qui doivent être réalisés chaque année pendant trois ans pour atteindre les 45 milliards d'euros annoncés par le Premier ministre d'ici à 2013, sont répartis entre l'État, la sécurité sociale et les collectivités locales. S'agissant des dépenses de l'État, vous avez annoncé une baisse de 10 % d'ici à 2013. Or le Premier ministre a dit dans un courrier que la moitié de cette baisse serait réalisée en 2011. Comment vous y prendrez-vous pour les dépenses d'intervention, qui s'élèvent à 66 milliards d'euros, alors même que vous avez indiqué que l'effort ne concernerait pas l'hébergement d'urgence ou les minima sociaux ? Sur quel poste ferez-vous porter l'effort ? S'agissant des dépenses de fonctionnement, une baisse de 5 % représente un effort important, qui est bien documenté par la RGPP : confirmez-vous que l'effort s'appliquera également aux opérateurs ?

En matière de recettes, d'ici au débat d'orientation des finances publiques, il conviendrait de clarifier l'articulation des différentes problématiques : réforme des retraites, niches fiscales et sociales, CADES et diminution des déficits.

Si je me réfère au programme de stabilité et aux déclarations du Premier ministre, les 100 milliards d'euros d'économies annoncés entre 2011 et 2013 permettront de passer d'un déficit de huit points de PIB en 2010 à un déficit de trois points en 2013 – je rappelle qu'un point de PIB représente 20 milliards. La répartition annoncée par le Premier ministre serait la suivante : 45 milliards de baisse de la dépense et 35 milliards liés à l'élasticité des recettes, dans le cadre du retour de la croissance. Or le programme de stabilité évalue cette élasticité à 1 point de PIB, à savoir quelque 20 milliards d'euros. Pourrions-nous savoir comment vous décomposez recette spontanée – en vous fondant sur 2001 – et phénomène d'élasticité ?

Enfin, le Premier ministre a annoncé un effort de 5 milliards d'euros de réduction des niches fiscales et sociales dès les projets de loi de finances et de financement pour 2011. Le volet fiscal et social des retraites porte, lui, sur 3,7 milliards d'euros de recettes supplémentaires. S'agissant des recettes en provenance des entreprises, le Gouvernement s'est engagé, dès le début de l'année, à compenser les effets de la décision prise par le Conseil constitutionnel d'annuler la taxe carbone, qui était remboursée aux ménages, euro pour euro, mais compensée, pour les entreprises, par la baisse de la taxe professionnelle. Comme celle-ci a eu lieu, il reste donc, entre les ménages et les entreprises, un déséquilibre fiscal de 1,7 à 1,8 milliard d'euros de créances au profit de ces dernières. Quant à l'annulation par le Conseil constitutionnel du régime particulier de contribution économique territoriale applicable aux titulaires de BNC employant moins de cinq salariés, elle conduit à une perte de recettes de l'ordre de 500 à 600 millions d'euros. Que prévoit le Gouvernement en la matière ? Nous devrons du reste nous interroger sur la fiscalité des entreprises dès le projet de loi de finances pour 2011 – Alain Claeys et Jean-Pierre Gorges ont remis, à ce propos, un excellent rapport sur le crédit d'impôt recherche.

Si nous ajoutons aux cinq milliards d'euros de réduction des niches fiscales, 3,7 milliards liés à la réforme des retraites et 2,2 milliards de recettes à rétablir en raison de l'annulation par le Conseil constitutionnel de diverses dispositions, la reconstitution de recettes s'élève à 10,8 milliards d'euros, chiffre qui est proche de celui que vous avez annoncé. Cette méthode de calcul, qui part des seuls engagements du Gouvernement, vous paraît-elle adéquate ? Les dispositions fiscales liées à la réforme des retraites sont-elles, à vos yeux, imputables en diminution de l'effort de réduction des niches fiscales et sociales ou s'y ajoutent-elles ? Comment arrivez-vous à plus de 10 milliards d'euros ?

Enfin, l'effort de reconstitution de recettes portera-t-il uniquement sur certains impôts – impôt sur le revenu, impôt de solidarité sur la fortune, impôt sur les sociétés – ou concernera-t-il également l'imposition indirecte, laquelle a le mérite de jouer dès l'année suivante, contrairement aux impôts directs pour des motifs de non-rétroactivité ? J'ai évoqué la mise en place d'un taux réduit. Dans le cadre de la présentation de mon rapport annuel sur la loi fiscale, je m'interroge sur l'envolée des coûts d'exonération de TIPP, en particulier au titre des biocarburants. La révision des niches fiscales exclut-elle des sujets qui seraient tabous ou allez-vous, comme nous le souhaitons, procéder à un inventaire exhaustif ?

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je tiens à préciser que les demandes, faites au Gouvernement, d'organiser un débat d'orientation budgétaire suivi d'un vote sur le fondement de l'article 50-1 de la Constitution, de présenter un projet de loi de programmation triennale dès l'automne et de soumettre les lois de finances et de financement de la sécurité sociale à cette loi de programmation triennale ont été faites conjointement par le rapporteur général et par le président de la commission des finances.

Il en a été de même de la demande de réserver exclusivement aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale les dépenses fiscales et sociales. C'est pourquoi je suppose que le rapporteur général appuiera ma demande visant, monsieur le ministre, à ce que votre collègue chargé de l'agriculture dépose, lors de l'examen du projet de loi de modernisation agricole à l'Assemblée, un amendement tendant à supprimer la niche fiscale que les sénateurs ont introduite dans le texte, alors même qu'ils l'ont examiné après la publication de la circulaire du Premier ministre interdisant ce type de pratique. Si nous voulons établir une bonne gouvernance, il serait du plus mauvais effet que le premier projet de loi examiné par le Parlement à la suite du premier acte posé de cette nouvelle gouvernance fût l'occasion d'une violation des instructions données. Je souhaite, monsieur le rapporteur général, que vous m'aidiez à obtenir du Gouvernement qu'il applique sans attendre les directives qu'il édicte, directives qui s'appliquent également au Sénat.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué la transmission d'une dette à la CADES : comptez-vous allonger la durée d'amortissement de la CADES ou la doter des ressources nécessaires pour assumer cette nouvelle dette ?

Enfin, s'agissant de la masse salariale des fonctionnaires, avez-vous décidé de geler les rémunérations des fonctionnaires dans le cadre des nouvelles dispositions visant à rétablir les finances publiques ?

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Ces dispositions reprennent en effet le programme de stabilité envoyé il y a quelques mois à la Commission européenne, mais nous ne pouvions pas faire mieux. La procédure suivie a un sens dans la mesure où elle indique la nouvelle direction et associe le Parlement, par son engagement et par son vote, aux mesures que le Gouvernement français propose. Cela dit, il n'est pas douteux qu'il faudra revoir les questions de calendrier, tant dans les échanges entre Bruxelles et Paris qu'à l'échelle européenne. Le Parlement national doit pouvoir se prononcer en temps et en heure sur ce que la France dit qu'elle va faire. Il faut donc réduire le décalage.

Je confirme qu'une loi pluriannuelle sera déposée, probablement au début du mois d'octobre.

Je confirme aussi, en matière de dépense fiscale, l'objectif d'une réduction de 8,5 à 10 milliards d'euros, et notre volonté intangible de réserver le « monopole fiscal » aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale. J'avoue ne pas avoir suivi le détail des arguments développés au Sénat pour créer la dispense fiscale que vous évoquez, monsieur le président. En tout état de cause, le Gouvernement sera très ferme dans sa volonté d'appliquer le principe du monopole. Vous avez raison de souligner que c'est une question de crédibilité.

Il n'existe aucune question taboue en ce qui concerne les dépenses fiscales, à l'exception, je le répète, de ce qui pourrait toucher les publics fragiles.

La charge de la dette, monsieur le rapporteur général, est estimée à 42,5 milliards d'euros en 2010 et, dans l'hypothèse où les taux actuels – 0,29 % à court terme, environ 3,40 % à trois ans – se maintiendraient, à 45,4 milliards d'euros en 2011, soit une progression de moins de 3 milliards. Chacun sait, cependant, que l'on ne retrouvera jamais dans l'histoire une période aussi avantageuse. Le risque est que la sortie de crise ne provoque une augmentation du coût des matières premières, une poussée de l'inflation et une tension à la hausse sur les taux d'intérêt.

Quant à l'impact du grand emprunt, l'évaluation du projet de loi de finances rectificative – 1,2 milliard d'euros – est inchangée.

La charge des pensions est estimée à 35 milliards d'euros en 2010 et à 36,6 milliards en 2011, soit une progression de 1,6 milliard d'euros. Néanmoins, la réforme des retraites permettra une économie d'environ 300 millions d'euros dès 2011, et de 1,2 à 1,3 milliard à l'horizon 2013.

En 2010, les prélèvements en faveur des collectivités locales s'élèveront à un peu plus de 53 milliards d'euros et la prévision pour 2011 est de 52,9 milliards.

Nous prévoyons enfin que le prélèvement européen passera de 18,1 milliards d'euros en 2010 à 18,2 milliards en 2011. Les négociations à Bruxelles seront difficiles mais il est tout de même incroyable que la Commission demande à tous les pays de se serrer la ceinture tout en proposant pour elle-même une augmentation de 6 % !

Les prélèvements sur recettes seront donc globalement stables, avec une augmentation de 1,4 milliard d'euros au cours des trois années du programme.

Les dépenses de personnel devraient passer de 82,1 milliards d'euros en 2010 à 82,7 milliards en 2011 ; les autres dépenses de 121,5 à 120,9 milliards. Le total, 203,6 milliards, est parfaitement stable d'une année à l'autre.

L'augmentation des dépenses de personnel est due à des raisons essentiellement techniques, à savoir le rebasage des crédits de personnel des ministères à hauteur de la surexécution constatée et la diminution des départs à la retraite constatée dans toutes les administrations l'année dernière. La crise n'est certainement pas étrangère au fait que beaucoup de gens ont préféré retarder leur départ à la retraite pour amortir le choc.

J'en viens à l'évolution des dépenses fiscales. Le plan de stabilité prévoyait une réduction de 2 milliards d'euros chaque année à compter de 2011. L'estimation actuelle de 8,5 à 10 milliards d'euros tient à ce que l'on a déjà pris en compte pour les retraites les données que l'on avait en perspective.

S'agissant de la dette sociale, plus de 50 milliards d'euros sur 87 sont liés à la crise. Nous avons donc l'intention de proposer un allongement de quatre ans de la durée de vie de la CADES, qui sera ainsi maintenue jusqu'en 2025. À cette fin, je présenterai en Conseil des ministres un projet visant à modifier la loi organique. Je sais que l'opposition n'y est pas favorable, mais nous n'avons pas d'autre choix que cet allongement modeste, qui s'ajoute aux mesures annoncées par le ministre du travail concernant le Fonds de réserve des retraites et aux 3,2 milliards d'euros nécessaires pour revenir à l'équilibre en 2020, que nous financerons par une partie des dispositions relatives aux niches fiscales.

C'est en additionnant ces mesures que l'on atteint les 8,5 milliards d'euros. Pour ma part, je pense que l'on arrivera à 10 milliards d'euros lors de l'examen des recettes à la fin de l'été.

Contrairement à ce dont on a accusé le Gouvernement, le « zéro valeur » hors dette et pensions est plus contraignant que le « zéro volume » : il représente un effort supplémentaire de réduction des dépenses de près d'un milliard d'euros.

Le rattrapage des recettes fiscales et la question de l'élasticité sont l'objet d'un débat entre spécialistes. Il est incontestable qu'il y a une élasticité de 20 milliards d'euros : aucun modèle économique n'avait prévu la chute de 20 milliards d'euros qu'a connue l'impôt sur les sociétés. Depuis le début de l'année, la croissance est convalescente. Les rentrées de l'IS permettent de confirmer que nous serons en ligne sur les 1,4. Le phénomène est le même pour la TVA, contrairement à un sentiment répandu.

Cette élasticité nous permet de croire à la perspective ambitieuse de croissance de 2,5 % que nous avons fixée pour l'année prochaine. Nous savons que l'opposition la conteste. Mais ce n'est pas une estimation au doigt mouillé ! L'OCDE a établi pour sa part une prévision de 2,1 %, un institut arrive même à 2,7 %. Bref nous croyons à l'objectif de 2,5 % et nous nous donnons les moyens de l'atteindre. Il va de pair avec l'objectif de passer de 8 à 6 % de déficit. Si d'aventure nous étions amenés à réviser les éléments de croissance au mois d'août, je reviendrais naturellement devant vous pour vous indiquer la façon dont nous accompagnerions le dispositif. Par exemple, une croissance qui ne serait pas de 2,5 mais de 1,8 % nous contraindrait à trouver 6 milliards d'euros de plus.

Pour ce qui est de la réduction de 5 % des 66 milliards d'euros de crédits d'intervention, je puis vous dire, pour en avoir discuté avec mes collègues du Gouvernement, qu'il y a de la marge. C'est essentiellement une question de changement de mentalité, de tropisme. S'il faut même aller un peu plus loin que 5 %, je crois que l'on pourra y arriver, aussi bien pour des « coups partis » que pour des dispositifs que l'on maintient sous perfusion mais qui, à l'évidence, ne correspondent plus à rien si ce n'est à l'habitude, quand ils n'ont pas tout simplement échappé au regard !

En ce qui concerne la qualification de « dépense fiscale », monsieur le président Cahuzac, j'ai demandé à mes services de tout mettre sur la table, y compris les dispositifs considérés aujourd'hui comme des modalités de calcul de l'impôt. Tout sera examiné. Je ne peux préjuger de ce qui sera maintenu, raboté ou supprimé, puisque nous ne parlons à l'heure actuelle que du volet dépenses. Lorsque nous aborderons le volet recettes, nous n'écarterons aucune question.

S'agissant du salaire des fonctionnaires, une négociation se tiendra cet après-midi. En tant que ministre du budget, j'ai déjà indiqué que j'étais favorable à une maîtrise salariale. Mais c'est le ministre de la fonction publique qui assumera les choix politiques du Gouvernement en la matière.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Pour allonger la durée de vie de la CADES, il faudra modifier une disposition organique d'origine parlementaire que notre collègue Jean-Luc Warsmann avait introduite en 2004, à une époque où la majorité souhaitait établir des règles fermes pour éviter la fuite en avant en matière de déficits sociaux. La modification de cette règle que l'on présentait alors comme intangible ne crédibilise pas la démarche du Gouvernement pour instituer de nouvelles règles !

PermalienPhoto de Jérôme Chartier

J'aborderai pour ma part les questions de gouvernance.

Le groupe de travail présidé par M. Raoul Briet compte donner un caractère réglementaire au comité de pilotage de l'ONDAM. Est-ce une piste que vous suivrez ? Comment ce comité s'articulera-t-il avec le comité d'alerte ? Envisage-t-on une fusion ?

Comptez-vous venir régulièrement devant notre commission pour faire le point de la façon dont les opérateurs de l'État s'acquittent de l'obligation de respecter les objectifs de réduction des déficits ?

S'agissant du pilotage de la dette, vous soulignez à juste titre que les taux d'intérêt actuels sont les plus faibles que l'on ait connus depuis que l'État recourt massivement à l'emprunt, c'est-à-dire depuis les années 1980. Alors que l'on peut anticiper une hausse possible, 36 % de la dette de l'État est à moins de deux ans. Donnerez-vous comme orientation à l'agence France Trésor de passer progressivement à une maturité d'emprunt plus longue afin de stabiliser le risque d'augmentation du service de la dette ? Si le spread français, voire le spread allemand, venait à s'envoler, cela effacerait tout ou partie de l'effort de réduction des déficits.

S'agissant de la stabilisation de la dépense, le Gouvernement a-t-il évalué la marge de manoeuvre budgétaire nette qui resterait en 2011 après les réductions réalisées et les dépenses non reconduites – hors plan de relance bien entendu ?

Je me félicite moi aussi de la circulaire du 4 juin et je suis curieux du sort que vous réserverez à la disposition introduite par le Sénat dans le projet de loi de modernisation agricole.

La démarche de réduction des déficits publics est largement conditionnée par l'alerte que les marchés ont donnée au sujet du financement de la dette publique globale, laquelle caractérise principalement les États occidentaux. Aux États-Unis, on estime que la réduction des déficits coûtera 0,5 % de croissance, mais sur une croissance estimée à 3 %. Le Gouvernement veillera-t-il à éviter toute réduction ou suppression de dispositif pouvant avoir un effet direct sur la croissance ? Notre démarche très vertueuse de réduction des déficits ne doit pas, d'un autre côté, pénaliser la croissance.

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

La réduction des déficits est affaire de volonté politique. Ce n'est pas en édictant des procédures, des règles que l'on avance dans ce domaine. Ce que vous annoncez au sujet de la prolongation de la CADES, monsieur le ministre, en apporte la démonstration.

Une réduction des déficits de 2 % est « du jamais vu », dites-vous. On réserve en général cette formule à des constats, pas à des prévisions ! À l'heure actuelle, ce qui est « du jamais vu », c'est un déficit structurel atteignant 5 % du PIB. On n'a jamais vu non plus de programmation envoyée à Bruxelles qui fût respectée.

J'aurais aimé que votre rapport comporte, comme il est de tradition, une évaluation du déficit structurel réalisée par Bercy. Pour apprécier la qualité de votre prévision de réduction du déficit, nous devons connaître la part du spontané et la part du structurel. Nous persistons à penser, sur la base des calculs effectués par la Cour des comptes et par d'autres institutions, que le déficit structurel est de l'ordre de 5 %, ce qui représente les deux tiers du déficit total. Si l'on y ajoute les mesures de relance, comme le font les institutions internationales, on passe à 6 %.

Pour ce qui est de la réduction des déficits, vous procédez à la hache. Cela s'est déjà produit avec la RGPP, qui aurait pu être une réflexion intelligente sur la façon d'accroître l'efficacité de l'action publique et de réduire la dépense mais qui a été éclipsée par le dogme du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux. Aujourd'hui, nous pourrions procéder à une « révision générale des niches fiscales ». En choisissant de les raboter, vous optez pour une méthode plus rapide, certes, mais qui risque d'être inefficace et qui touchera les populations de façon inéquitable. Dans son rapport sur le plafonnement des niches fiscales, notre commission relevait déjà que les seules personnes à ne pas être concernées par ce plafonnement sont les bénéficiaires du bouclier fiscal. Quel paradoxe ! Que comptez-vous faire à ce sujet ?

Par ailleurs, si l'on en croit l'OFCE, une réduction effective de 1,5 % des déficits publics se traduirait par 1,5 % de croissance en moins. Le multiplicateur est de l'ordre de 1 dans tous les modèles français. Les modèles du ministère des finances ne doivent pas être différents, à moins d'avoir profondément changé en peu de temps ! Il faudrait donc, pour atteindre l'objectif de 2,5 % de croissance, que la croissance spontanée soit à 4 %. Je doute fort que le contexte le permette et je crains que l'on ne se situe plutôt aux alentours de 1 %. Si, comme vous le dites, il faut compenser toute perte de recettes fiscales par de nouvelles mesures, la politique de rigueur qui s'ensuivra devra être de grande ampleur.

Enfin, vous classez la prime pour l'emploi parmi les niches fiscales alors que la niche « Copé », dont le coût s'élevait à 2,5 milliards d'euros en 2008, à 8 milliards en 2009, et dont la suppression engendrerait une économie considérable, figure parmi les modalités de calcul de l'impôt. Vous attaquerez-vous aux dispositifs de ce type, qui permettent aux entreprises de plus de 2 000 salariés de ne payer en moyenne que 13 % d'impôt sur les sociétés au lieu de 33 % ?

PermalienPhoto de Charles de Courson

En matière de gouvernance, le Gouvernement va dans la bonne direction. Encore un petit effort cependant : établissons la règle d'or de l'équilibre de fonctionnement.

Le service de la dette augmentera d'environ 4,2 milliards d'euros l'année prochaine, les pensions de 1,5 milliard. La progression sera donc, malgré le « zéro valeur » appliqué aux autres dépenses de l'État, de 5,7 milliards d'euros, soit 1,7 %. Dans ces conditions, le redressement est impossible.

D'autre part, se fonder sur une prévision de croissance de 2,5 % par an dans les trois années qui viennent n'est pas raisonnable. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est ce que l'on trouve dans les documents que le Gouvernement a produits ces dernières années et qui estiment la croissance potentielle à 1,7 ou 1,8 %. L'investissement productif a fortement chuté et il n'y a pas de reprise forte. Dans ces conditions, j'aimerais savoir quels seront les efforts supplémentaires à consentir en matière de dépenses si la croissance est inférieure aux prévisions.

Dans le domaine de la sécurité sociale, le Gouvernement va dans le bon sens en matière de retraites et l'estimation de l'ONDAM à 2,9 % paraît raisonnable.

Mais qu'en sera-t-il du bouclage global ? D'après mes calculs, les prélèvements obligatoires augmenteraient d'au moins 1,3 % l'année prochaine et la dépense publique reculerait d'un point par rapport au PIB – je rappelle qu'elle dépassera les 56 % cette année.

PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Avez-vous chiffré les conséquences négatives que ce plan d'économie de 100 milliards d'euros en trois ans aura sur l'emploi, étant entendu que la progression budgétaire de 0 % en valeur équivaut à une diminution en volume ?

En particulier, quelles seront les conséquences de la baisse de 10 % des dépenses de fonctionnement et d'intervention, de la stabilisation concernant les infrastructures de transport et de la stabilisation des concours aux collectivités locales ? Ces mesures auront une incidence non seulement sur l'emploi public, mais aussi sur l'emploi privé.

La Cour des comptes a démontré que les déficits tiennent à deux raisons essentielles. D'abord la crise, pour environ 50 milliards d'euros. Or les responsables de la crise, ce sont les banques, les spéculateurs, les marchés financiers, les paradis fiscaux. Ensuite, pour les deux tiers, le défaut de recettes budgétaires. Les cadeaux fiscaux représentent aujourd'hui 70 à 75 milliards d'euros, sans compter l'évasion fiscale. Alors qu'il faut s'attaquer à ces deux causes, vous vous en prenez à ceux qui ne sont absolument pas responsables de la situation : fonctionnaires, retraités, collectivités locales, services publics... En vous trompant à ce point de cible, il est douteux que vous obteniez des résultats. Au lieu de soigner un cancer financier, vous soignez un rhume de cerveau !

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Les questions du président Cahuzac et du rapporteur général couvraient un large spectre et je crois avoir déjà apporté de nombreuses informations.

Au sujet de l'ONDAM, nous mettons en place le dispositif mentionné par M. Chartier. Pour ce qui est des opérateurs de l'État, j'ai déjà donné la réponse.

S'agissant du déficit structurel que vous estimez à 5 %, monsieur Muet, il est pourtant incontestable que la dégradation est essentiellement due à la surréaction des recettes à la baisse, donc qu'elle est liée à la crise. Le débat peut se prolonger longtemps...

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Nous voudrions disposer d'une évaluation de Bercy. Par le passé, le ministère a toujours calculé les déficits structurels.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Le déficit structurel est de l'ordre de 3 à 3,5 % du PIB. Notre objectif de retour à 3 % en 2013 correspond justement à ce déficit. Notre plan a une cohérence, nous ne mentons pas et nous n'essayons pas d'endormir nos interlocuteurs. Au sujet des retraites, refuser de reconnaître que le déficit est celui que l'on prévoyait pour 10 ou 15 ans plus tard, c'est ne pas accepter de voir la réalité de l'impact incroyable de cette crise.

De même, je ne soutiens nullement qu'il est glorieux d'allonger la durée de vie de la CADES, mais nous n'avons pas le choix : l'impact de la crise sur le déficit de 87 milliards d'euros représente plus de 50 milliards d'euros.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

C'est le bouclier fiscal qui ne vous laisse pas le choix.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Ou l'intégration des prélèvements sociaux à l'intérieur du bouclier.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Avec le bouclier, vous ne pouvez pas augmenter les impôts.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Nous intervenons d'abord et essentiellement sur les dépenses.

La hausse des prélèvements obligatoires dont vous faites état, monsieur de Courson, n'est pas étonnante puisque le calcul de ces prélèvements se fait par rapport à la richesse nationale et que les prélèvements ont baissé comme jamais l'an dernier. Ils remonteront sans doute l'année prochaine pour revenir à un niveau normal.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Probablement.

En ce qui concerne la gestion des taux par l'AFT, le différentiel de 0,25 point entre le taux à trois mois et le taux moyen a permis un gain de plus d'un milliard d'euros sur la charge de la dette en 2010. Globalement, les positions que prend l'AFT correspondent à ce qui se fait dans les autres pays : tout le monde a profité de la baisse des taux à court terme.

Les 100 milliards d'euros que vous évoquez, monsieur Sandrier, se répartissent en 35 milliards de recettes issues de la croissance, 15 milliards de non-reconduction des mesures de relance, 10 milliards de réduction des niches et 40 milliards d'économies. Pour plus de détail, je vous renvoie à mes réponses au président et au rapporteur général.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Le débat d'orientation budgétaire, dites-vous, est consacré aux dépenses et nous parlerons ultérieurement des impôts. Je trouverais plus sage que ce débat porte également sur les recettes, d'autant que nous nous inscrivons dans une perspective triennale.

La circulaire qui réserve l'exclusivité des mesures fiscales et sociales au PLF et au PLFSS prévoit-elle, ou non, une exception pour les lois de programmation ?

Autant vous avez été clair au sujet des objectifs de baisse des dépenses, autant vous avez été discret quant au montant de l'augmentation des impôts. Pourriez-vous éclairer notre commission ? Quels sont les chiffres actuels ?

On ne peut distinguer, dans les 40 milliards évoqués, la part de l'augmentation des impôts...

PermalienPhoto de Hervé Mariton

À ma connaissance, le Gouvernement n'a pas dit qu'il n'y en aurait pas. Du reste, la réduction des niches fiscales est une augmentation d'impôt et il y aura d'autres hausses dans le cadre de la réforme des retraites.

Je suis favorable au bouclier fiscal mais défavorable à l'implication de l'impôt dans la réforme des retraites. Sur le terrain, les réactions à l'évolution de la fiscalité des plus-values et à la suppression de la franchise, qui touchent directement les classes moyennes et les classes moyennes-supérieures, me conduisent à demander au ministre ce qu'il entend mettre en oeuvre pour faire porter cette augmentation sur les catégories bénéficiant du bouclier fiscal.

En matière de dépenses, comment la discipline très pertinente qui nous a été présentée sera-t-elle appliquée aux opérateurs, et pour quel montant escompté ?

Vous annoncez également un moratoire sur les normes, à l'exception des normes européennes. Comment le mettrez-vous en oeuvre ? Comment faire en sorte que les normes européennes ne se trouvent pas surdéveloppées en France, comme c'est parfois le cas ?

Votre objectif est de revenir à 3 % de déficit en 2013, en conformité avec la norme du traité de Maastricht. Mais le traité pose d'autres conditions : que l'endettement ne dépasse pas 60 %, pour une croissance de 5 %. Pour l'heure, nous ne respectons aucun de ces taux, si bien que l'on peut se demander quel est le sens de l'objectif de 3 % en 2013.

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

L'objectif posé pour 2013 présente un risque déflationniste inquiétant. Entre 2005 et 2007, les finances publiques ont été tenues dans ce pays. Il est regrettable qu'elles ne l'aient pas été davantage par la suite. Rappelons que la menace de déflation s'est trouvée au coeur des débats du G20 qui s'est tenu le week-end dernier. Vous parlez de 6 milliards d'euros supplémentaires à trouver si la croissance s'élève à 1,8 et non à 2,5 %. On risque de s'engager alors dans une spirale déflationniste très dangereuse.

Bien que l'on ne parle plus d'impôt mais de dépense fiscale, je souhaiterais savoir selon quel périmètre on remettra en question le bouclier fiscal.

Par ailleurs, après la circulaire du Premier ministre, un débat approfondi sur toutes les questions de procédure serait profitable à notre commission. Une réforme constitutionnelle visant à interdire les déficits me paraît surréaliste : avec un tel dispositif, comment aurions-nous pu trouver les financements qui nous ont été nécessaires pour faire face à la crise actuelle ?

Pour ce qui est de la cohérence budgétaire à l'échelle européenne, comment associer les parlements nationaux aux programmes de stabilité et à la définition des objectifs européens de façon satisfaisante et le plus en amont possible ? Alain Lamassoure et plusieurs autres personnalités ont déjà fait des propositions en ce sens.

Enfin, je trouve dommage que l'on fasse toujours de l'Europe, et singulièrement de la Commission européenne, un bouc émissaire. Il ne pourra pas y avoir de gouvernance et de stratégie économiques à l'échelle européenne avec un budget de l'Union qui représente moins de 1 % du PIB de l'ensemble de l'Europe. On ne peut parler de gouvernance économique d'un côté et entretenir cette attitude malthusienne de l'autre. Sans doute y a-t-il des ressources propres à trouver, sans doute y a-t-il des transferts de compétences à réaliser entre les États et les institutions européennes, mais arrêtez de faire de l'Europe un bouc émissaire !

PermalienPhoto de Jean-Louis Dumont

Vous avez mentionné les publics fragiles et les habitations qui leur sont dédiées. Au titre des recettes nouvelles, il semble que vous souhaitiez obtenir des bailleurs sociaux une contribution de 350 millions d'euros à un taux de 2 % et sur une assiette – le chiffre d'affaires – dont la définition inquiète : est-ce le loyer, est-ce le loyer et la redevance, est-ce la quittance ?

PermalienPhoto de Marc Goua

La baisse des dotations de l'État de 5 puis de 10 % aura-t-elle des conséquences sur la politique de la ville ?

Le dogme selon lequel les opérateurs doivent être logés à la même enseigne que l'État s'apparente à une politique de gribouille : au lieu de recruter des employés de l'État, on accorde la possibilité de prendre des contractuels, ce qui coûte beaucoup plus cher. Qu'en sera-t-il en 2011 ?

PermalienPhoto de Yves Censi

Si la récession a été moindre en France que dans les autres pays européens, c'est aussi en raison d'une politique fiscale en faveur de la croissance. Nous souhaiterions néanmoins pouvoir mesurer l'efficacité de cette politique sur l'accroissement de la valeur ajoutée et sur l'emploi.

En matière d'emploi à domicile et d'aide à la personne, on sait qu'il existe des seuils au-delà desquels les mesures s'apparentent à des effets d'aubaine, mais en deçà desquels on risque de porter atteinte à l'emploi. Avons-nous aujourd'hui les moyens de déterminer précisément l'impact du dispositif en vigueur ?

Comme vous l'avez souligné, les ruptures dans le domaine fiscal peuvent avoir un effet négatif sur la croissance quels que soient les seuils.

Cela dit, il existe une niche sociale dont on sait qu'elle n'a aucun effet positif sur la croissance : je veux parler des 35 heures. Le Gouvernement entend-il mettre cette question à l'ordre du jour de la discussion budgétaire pour 2011 ?

Dans l'éducation nationale, 60 % des économies tirées du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux ont été affectés à la revalorisation du traitement des agents. Le Gouvernement maintiendra-t-il cette répartition en 2011 ?

Enfin, confirmez-vous que le programme n° 143 Enseignement technique agricole ne relèvera plus de l'Éducation nationale dans le budget de 2011 ?

PermalienPhoto de René Couanau

Je reste un peu sur ma faim, monsieur le ministre. Je relève une grande différence entre le degré de précision des chiffres que vous nous apportez et la valeur de l'engagement que le Gouvernement va demander à la majorité, à savoir un quasi-vote de confiance.

À titre d'exemple, j'ai l'impression que l'effort en matière d'investissement pour l'avenir se concentre sur l'excellence dans les études supérieures et néglige complètement ce qui en fera la valeur, c'est-à-dire l'enseignement scolaire. Sans aller jusqu'à demander une sanctuarisation des dépenses de l'Éducation nationale, qui présenterait l'inconvénient d'être dépourvue de caractère dynamique, nous voulons savoir, après avoir reçu les rapports de la Cour des comptes, de la mission Attali – pour peu qu'on y trouve de l'intérêt – et d'autres organes, si l'on accordera en 2011 la priorité à la lutte contre l'échec scolaire. Il s'agit d'un investissement d'avenir qui concerne aussi bien la croissance que la justice et l'équilibre social.

Au terme du débat, on va me demander d'approuver une politique générale. Or, sur ce point-là, je ne peux être d'accord.

S'agissant du gel des dotations aux collectivités territoriales, on trouve dans votre rapport des formules magnifiques : « La mise en oeuvre de la réforme des collectivités territoriales, de même que le moratoire sur les normes réglementaires qui leur sont imposées, fourniront aux collectivités locales de nouveaux outils pour mieux maîtriser leurs dépenses. » Mais quels sont donc ces outils et en quoi permettront-ils la maîtrise des dépenses ? Nous ne pouvons laisser passer de telles phrases !

Vous avez également évoqué l'abandon ou le report de certains grands investissements culturels. Pourrions-nous avoir des précisions ?

Ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses questions que soulèvent votre rapport, votre intervention, et le vote qui nous sera demandé.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Monsieur Mariton, vous semblez tenir à me faire dire que le Gouvernement augmente les impôts. Ce n'est pas le cas. Le taux d'imposition des particuliers et le taux de la TVA n'augmentent pas. Parler d'une réduction des dépenses fiscales à hauteur de 10 milliards d'euros n'est pas une fausse pudeur, une feuille de vigne sur le sexe de Bercy : c'est la réalité. Une exonération d'impôt est une forme de dépense, même si elle n'est pas budgétaire. Elle correspond au choix d'accompagner des politiques publiques sans prélever d'impôt.

La grande différence avec l'impôt, c'est qu'aucune loi n'oblige le contribuable à bénéficier d'une niche fiscale. Si nous augmentions les taux, tout le monde devrait payer. En d'autres termes, nous revenons sur des dépenses fiscales qui correspondaient à des choix dont nous n'avons plus les moyens. Nous l'assumons. Qu'il en résulte une augmentation des recettes, c'est le but. Je suis bien conscient qu'il y a une différence avec le modèle britannique, le modèle espagnol et peut-être même le modèle allemand.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Si l'on suit votre logique, augmenter la TVA ne revient pas augmenter les impôts car on n'oblige personne à consommer...

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Pour ce qui est du volet recettes, je crois qu'on n'a jamais été aussi précis dans un débat d'orientation budgétaire. Les arbitrages interviendront à la fin du mois d'août et je viendrai en présenter tous les détails devant votre commission. Je souligne que nous sommes dès maintenant plus précis, plus affirmatifs, plus méthodiques.

Je ne suis pas anti-européen, monsieur Garrigue. Je remarque seulement que Bruxelles demande d'un côté des mises sous surveillance et de l'autre une hausse de plus de 6 % de son budget, en grande partie pour augmenter le traitement de ses hauts fonctionnaires. Il ne faut pas exagérer !

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Ma question portait sur la gouvernance et la stratégie économiques.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Le ministre a raison : la demande correspond essentiellement à des besoins de fonctionnement, en raison de statuts proprement inimaginables.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Nous ne pensons pas que le dispositif proposé ait un caractère déflationniste, au contraire. Si les déficits et la dette créaient de la croissance, cela se saurait ! Jamais nous n'avons été aussi endettés et jamais nous n'avons connu une croissance aussi faible. Alors que le taux d'épargne privée est considérable – 17 % –, nous croyons que la levée du doute dans l'esprit des Français aura des effets vertueux. La réforme des retraites apporte une première réponse aux doutes sur l'avenir à long terme. Les mesures budgétaires apportent une réponse aux doutes sur l'avenir immédiat. Est-ce politiquement courageux, audacieux ? L'histoire le dira. Nous croyons en tout cas que c'est nécessaire et que c'est une question de responsabilité. Une action sans faiblesse aura un impact sur la consommation. Cette relance par la confiance suppose beaucoup de travail de la part de tous.

Je répondrai personnellement à M. Jean-Louis Dumont, qui ne peut assister à la fin de cette audition.

En matière d'aide à la personne, monsieur Censi, les arbitrages ne sont pas encore rendus. Il est évident que l'on ne touchera pas aux publics fragiles – handicapés, personnes âgées... Pour les autres emplois à domicile, je constate que le plafond n'est pas toujours atteint et je n'ai pas d'états d'âme à affirmer qu'il faudra passer le rabot d'une manière ou d'une autre. Je ne vois pas pourquoi les personnes qui ont les moyens d'avoir une aide à domicile ne participeraient pas à l'effort général, d'autant que l'on restera à un niveau de prestation qui permettra de favoriser l'embauche.

L'enseignement technique agricole est un sujet compliqué. Nous sommes sur la ligne du transfert que vous évoquez.

Je vous confirme également que la politique de non-remplacement d'un départ sur deux de la prochaine programmation triennale conservera le principe de la restitution, sous forme de bonification, de 50 % des économies réalisées. Il s'agit d'une réforme difficile. Si la fonction publique l'a acceptée, c'est aussi parce que nous avons respecté cet engagement. Il y aura moins d'agents, mais mieux payés. L'objectif est que l'État devienne un meilleur employeur.

Je comprends votre déception, monsieur Couanau, sans tout à fait la partager. Je ne peux que vous encourager à faire confiance au Gouvernement, ou du moins à votre ancien voisin...

PermalienPhoto de René Couanau

J'en viendrais presque à souhaiter que peu d'amis entrent au Gouvernement !

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Merci, monsieur le ministre.

Je propose à la Commission d'autoriser la publication du rapport d'information du rapporteur général en vue du débat d'orientation des finances publiques.

La Commission autorise la publication du rapport d'information du rapporteur général en vue du débat d'orientation des finances publiques.

Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 30 juin 2010 à 12 heures

Présents. - M. Pierre Bourguignon, M. Michel Bouvard, M. Jérôme Cahuzac, M. Thierry Carcenac, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Yves Censi, M. Jérôme Chartier, M. Alain Claeys, M. René Couanau, M. Charles de Courson, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Jean-Louis Dumont, M. Nicolas Forissier, M. Daniel Garrigue, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, Mme Arlette Grosskost, M. Laurent Hénart, M. François Hollande, M. Jean-François Lamour, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Patrice Martin-Lalande, M. Pierre-Alain Muet, M. Henri Nayrou, Mme Béatrice Pavy, M. Jean-Claude Sandrier, M. Michel Sapin, M. François Scellier, Mme Isabelle Vasseur

Excusés. - M. Dominique Baert, M. Jean-Claude Flory, M. Jean Launay, M. Jacques Pélissard, M. Michel Vergnier

Assistait également à la réunion. - M. Pascal Terrasse