La Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a procédé à l'audition de Mme Jacqueline Laufer, professeur de sociologie au groupe HEC.
Madame, vous êtes professeur de sociologie au groupe HEC et directrice adjointe d'un groupement européen de recherche du CNRS : « Marché du travail et genre en Europe ».
Quel bilan tirez-vous des lois sur l'égalité professionnelle de 2001 et de 2006 ?
Comment, selon vous, la question de l'égalité professionnelle est-elle appréhendée par les entreprises et par les syndicats ?
Quelles stratégies préconisez-vous pour développer une plus grande mixité au sein des équipes de management, dans un contexte économique qui n'est pas des plus favorables aux femmes ? On nous répond souvent que la volonté d'y parvenir se heurte à un nombre insuffisant de femmes potentiellement en mesure de siéger dans les conseils. La Norvège elle-même, qui a imposé un quota de 40 % de femmes dans les conseils d'administration, n'a pas les mêmes résultats dans les exécutifs. Mais je remarque que si les lois sur l'égalité professionnelle ne sont pas appliquées dans l'entreprise, plus on montera dans la hiérarchie, moins on aura de chance de trouver des femmes aux postes de direction.
Ces deux thèmes : le bilan des lois sur l'égalité professionnelle et la place des femmes dans les équipes de management ont été au centre de mes travaux.
J'ai conduit, avec Rachel Silvera, une recherche sur une quarantaine d'accords négociés, collationnés auprès des syndicats et de l'Observatoire sur la responsabilité sociétale des entreprises. L'analyse de ces accords nous a convaincues du changement d'optique des entreprises. Vous avez mentionné les lois de 2001 et de 2006. Une comparaison s'impose avec la loi de 1983, bien que les actions positives – dont elle avait introduit le concept – aient plutôt concerné les femmes peu qualifiées que les femmes dirigeantes.
Ce sont les femmes de la base qu'il faut faire monter dans la hiérarchie. Je me réfère souvent au cas de PSA, où certaines ouvrières sont devenues agents de maîtrise, puis cadres.
L'optique des accords de 2001 est fondamentalement différente de celle des accords de 1983. Les accords de 2001 sont consensuels, ils sont généralement signés par l'ensemble des syndicats, comme l'a été l'accord interprofessionnel de 2004.
En effet. C'est un accord très riche, qui recommande notamment des actions positives.
Les accords de 2001 se caractérisent par la volonté des acteurs d'appliquer le droit, qui est souvent rappelé dans les préambules. Bien que cela choque les juristes, il faut négocier des accords pour appliquer le droit, afin qu'il ne reste pas lettre morte.
On y mentionne également que l'emploi féminin est une source de performance pour l'entreprise.
Ces accords témoignent d'une volonté de couvrir l'ensemble de la gestion du personnel : recrutement, formation, évaluation professionnelle, promotion, articulation entre responsabilité familiale et responsabilité professionnelle. Ils invitent à jeter un regard nouveau sur les politiques des ressources humaines et à se poser certaines questions – par exemple : ces politiques sont-elles dénuées de stéréotypes ? Prennent-elles en compte la situation particulière des femmes ? Enfin, ils évoquent l'accès des femmes aux responsabilités, ce qui n'était pas du tout le cas auparavant.
Ce thème est devenu légitime. Même les partenaires sociaux considèrent que la question de l'égalité professionnelle ne concerne plus seulement les ouvrières et les employées, mais également les femmes cadres, qu'il y a un problème en ce domaine et qu'il convient de l'examiner.
Ces accords abordent aussi la question de la neutralisation du congé de maternité (qui a été reprise dans la loi de 2006). Cela signifie que l'on peut concilier maternité et travail et que la maternité n'est pas fatalement une cause d'inégalité professionnelle. C'est fondamental. Il est inscrit, symboliquement et pratiquement, que maternité et travail ne sont pas antinomiques et qu'ils doivent s'articuler dans une perspective d'égalité de traitement et d'égalité des chances. Aujourd'hui encore, certains stéréotypes ont la vie dure, notamment celui qui consiste à dire que si les femmes se trouvent dans des situations inégales, c'est en raison de leurs choix familiaux.
Ces accords marquent donc un net progrès. On dispose malheureusement de peu de moyens pour évaluer leur incidence concrète. Le service des droits des femmes a dégagé un budget, mais il est nécessaire d'aller beaucoup plus loin dans l'évaluation de ces pratiques. Il est fondamental que les entreprises qui développent des pratiques novatrices puissent faire l'objet de rapports de recherche, de colloques, de débats.
La CGPME nous a dit qu'elle manquait d'outils d'évaluation. Nous devons investir davantage dans la recherche et la confrontation des bonnes pratiques.
Je peux d'autant plus en témoigner que j'anime depuis quelques années un club « égalité mixité », dans le cadre de l'ANVIE, l'Agence nationale de valorisation interdisciplinaire des sciences humaines et sociales auprès des entreprises. Elle est financée par les entreprises et l'actuel président de son conseil d'administration est M. Bailly, de La Poste.
Nous faisons venir des experts, des chercheurs français et étrangers. Le club réunit cinq fois par an une bonne quinzaine d'entreprises. Ces réunions sont appréciées des entreprises, on s'y renseigne sur ce qui fait ailleurs, on échange les cartes de visite, etc.
Ainsi, au-delà de la négociation d'accords, qui est fondamentale, au-delà de la recherche qui permet d'évaluer les bonnes pratiques, se développe toute une activité d'évaluation, d'animation, d'échanges autour de la question de l'égalité professionnelle. On peut contribuer à structurer la réflexion en matière d'égalité professionnelle en multipliant les occasions, pour les entreprises, d'échanger entre elles.
En 1980, lorsque j'ai publié : « La féminité neutralisée ? Les femmes cadres dans l'entreprise », l'idée même d'un réseau de femmes aurait fait bondir tout le monde, y compris les femmes cadres. Mais l'époque a changé et effectivement ces réseaux se développent.
En 2005, lorsque j'ai organisé des auditions pour discuter d'un éventuel quota de 20 % de femmes dans les conseils d'administration, c'était la révolution ! On me faisait savoir que je ne comprenais rien à l'entreprise. Aujourd'hui, les mêmes personnes approuvent la fixation d'un quota de 40 %. Il ne faudrait pas que les femmes adoptent les mêmes pratiques que les hommes, et multiplient les mandats dans les conseils d'administration, comme c'est le cas en Norvège. En France, le nombre est limité à cinq. À ce propos, Mme Agnès Touraine, que nous avons auditionnée, nous a déclaré qu'elle siégeait dans un conseil d'administration d'une société en Angleterre, et je me demande s'il faut le prendre en compte.
En Norvège, nous avons rencontré une avocate qui a abandonné son métier : elle est administratrice de plus de dix entreprises.
En Norvège, des entreprises de conseil ont exploité le créneau du recrutement des femmes ? Où les trouver ? Comment les convaincre ?
L'organisation patronale norvégienne a fait un travail considérable à la suite de l'adoption de cette loi pour faire émerger des femmes à promouvoir et pour les accompagner.
Je voudrais revenir sur le problème posé par la rareté des femmes dans les cercles dirigeants.
Les réseaux sont devenus des partenaires à part entière. Les études de GEF (Grandes Écoles au Féminin), publiées tous les deux ans, sont passionnantes. Cercle Interelles est un réseau très dynamique ; le 8 mars, il a réuni une quantité impressionnante de jeunes femmes. Il faut donc s'appuyer sur les réseaux existants et ne pas hésiter à créer de temps en temps un événement autour de cette question particulière de la mise en oeuvre de l'égalité professionnelle dans les entreprises.
Vous m'avez interrogée sur l'accès des femmes aux conseils d'administration et aux organes de direction. S'agissant des conseils d'administration, le fait de fixer un quota de 40 % de femmes peut avoir une vertu politique symbolique et répondre à la lenteur des évolutions. S'agissant de la direction des entreprises, les dynamiques sont différentes : il ne s'agit plus de geste politique, mais de gestion de l'entreprise. Comment constituer des viviers de femmes potentiellement appelées à diriger des entreprises ? Comment créer les conditions permettant aux femmes concernées de suivre le parcours qui les amènera à des postes de direction impliquant un certain profil et exigeant une certaine expérience ?
Beaucoup d'entreprises s'attachent à développer des pratiques de gestion des carrières permettant aux femmes d'avoir des parcours plus équilibrés, de ne pas être cantonnées dans la communication, d'acquérir une expérience commerciale, financière, etc. Malgré tout, même dans ces entreprises, le plafond de verre subsiste.
Pour certaines femmes, franchir le « plafond de verre » les place en situation de très grande minorité et leur fait prendre des risques importants. Dans le cadre d'une étude menée pour la DARES, j'ai interviewé de nombreuses femmes qui étaient sur le point de franchir ce plafond. J'ai pu apprécier ce qu'on appelle le « poids de la rareté », qui conduit à un cercle vicieux : plus les femmes sont rares, plus elles ont l'impression d'être observées, et plus elles se disent que certains postes sont trop coûteux, non en raison des compétences qu'ils supposent, mais sur le plan psychique et familial.
Les femmes elles-mêmes sont réticentes, parce que le niveau de direction est majoritairement masculin, et que les conditions ne sont pas favorables à sa féminisation : de très longues heures de travail, une très grande mobilité, beaucoup de déplacements professionnels, etc.
Malgré la volonté de certaines entreprises d'avancer, les difficultés subsistent et la proportion de femmes aux postes de direction reste extrêmement faible. Mais il faut faire très attention aux moyennes car les différences sont grandes selon les secteurs et les entreprises. Le secteur des produits de grande consommation a beaucoup progressé. Chez L'Oréal, il y a maintenant beaucoup de femmes aux postes de direction. Évidemment, chez Bouygues ou dans le bâtiment, il y en a moins.
Aucune recherche n'a été menée sur l'égalité professionnelle dans les PME, ni sur leurs équipes dirigeantes, du point de vue du genre. On ne connaît donc pas leur situation, ce qui est très regrettable. Il faut lancer des appels d'offre, mener des recherches, en prenant la taille comme critère fondamental, si l'on veut pouvoir débattre de ces questions.
Elle n'a pas un regard de sociologue ou de gestionnaire. Nous avons vraiment besoin d'équipes de recherche, pour obtenir suffisamment d'informations – même si nous disposons de certaines données par l'INSEE ou la DARES sur l'emploi des femmes.
On pourrait comprendre comment les entreprises, et les PME en l'occurrence, déclenchent des démarches en matière d'égalité, quelles difficultés elles rencontrent pour y parvenir, quelles actions elles souhaitent privilégier, et connaître la situation des équipes dirigeantes des PME. Sauf erreur, on n'a pas encore mené de recherches sur ce secteur.
Vous siégez au Conseil supérieur de l'égalité professionnelle (CSEP). Est-ce qu'il se réunit souvent ?
Non, même si les discussions y sont très intéressantes. Dans ce conseil, siègent des personnalités qualifiées, des experts, des fonctionnaires du ministère, du service du droit des femmes et de l'égalité, etc. Mais, par définition, les personnalités qualifiées sont très occupées et il ne peut pas se réunir tous les jours.
Sans être plus fréquentes, les réunions pourraient porter sur des objets un peu différents. Par exemple, une fois par an, nous pourrions analyser les progrès réalisés dans le domaine de l'égalité professionnelle, ne pas se contenter d'étudier le projet de loi qui nous est soumis – et qui est déjà pratiquement décidé – mais faire l'inventaire des thèmes sur lesquels il faudrait que la science progresse et sur lesquels il convient de lancer des appels d'offre. La recherche est en effet nécessaire pour faire avancer l'action.
Le CSEP est un outil qui, malheureusement, n'a pas été mis suffisamment en valeur, ni utilisé ces dernières années.
Il a été sollicité par le ministre Xavier Bertrand au moment de la conférence sur l'égalité professionnelle, en 2007.
Mais, entre 2002 et 2007, il semble qu'il ne se soit pas réuni ! Il s'agit pourtant d'un lieu privilégié pour traiter des questions d'égalité professionnelle.
Sa création même signifiait que l'égalité professionnelle était un objectif complexe, qui renvoyait à des notions multiples et nécessitait la mise en oeuvre de très nombreuses logiques d'action, qu'elles soient juridiques, administratives, qu'elles relèvent de la gestion ou du dialogue social.
Je pense qu'il faudrait revoir la façon dont on conçoit les missions du CSEP – ce n'est pas une question de personnes, ni de clivage politique droite-gauche.
Vous avez publié un article intitulé : L'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes est-elle soluble dans la diversité ? Pourriez-vous nous en dire un mot ?
Dans cet article, j'ai voulu réfléchir à la question des relations entre égalité et diversité, à un moment où l'on voit monter en régime le thème de la diversité. Nombre d'acteurs, de think tanks et d'instances se sont mobilisés autour de la diversité, bien plus d'ailleurs qu'ils ne l'avaient jamais fait autour de l'égalité professionnelle. Cela dit, les phénomènes de discrimination et de racisme associés à cette question avaient rarement été étudiés, au point que l'on assiste peut-être, comme le disent les psychanalystes, à une sorte de « retour du refoulé ». Quoi qu'il en soit, le thème de la diversité s'est imposé après la crise des banlieues, et les entreprises y ont pris une grande part.
Un certain nombre d'accords de diversité, qui ne sont pas encore très nombreux, ont été conclus à partir de l'accord national interprofessionnel dans lequel il est précisé que tous les motifs de discrimination sont en cause : l'origine, bien sûr, mais aussi le sexe. D'où une certaine tension entre accords d'égalité et accords de diversité, l'égalité pouvant s'apprécier dans la diversité, et la diversité dans l'égalité !
D'aucuns pensent que la promotion de la diversité s'oppose à la lutte contre les discriminations. Certains ne veulent même pas du terme de « diversité », qui nous détournerait de l'objet principal, la lutte contre les discriminations. Mais je n'ouvrirai pas ce débat, qui nous mènerait trop loin. Reste qu'il y a une corrélation entre égalité, égalité professionnelle et diversité.
On pourrait craindre que l'on ne parle plus d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes pour ne plus parler que de diversité – le sexe étant une des dimensions de cette diversité qui s'apprécie à travers 17 facteurs de discrimination, la loi française de 2001 étant particulièrement généreuse en ce domaine
L'égalité professionnelle est souvent présente dans les accords de diversité ; certains disent même qu'elle en est le premier thème. Comme les entreprises ont davantage l'habitude de traiter de l'égalité, on peut se demander si le traitement de l'égalité professionnelle ne sert pas d'apprentissage pour traiter d'autres formes de discrimination.
En d'autres termes, lorsqu'on a bien travaillé les questions liées à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, on est mieux armé, en tant qu'entreprise, pour aborder les questions liées à la diversité. Il n'y a donc aucune raison de dissoudre l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans la diversité. Il faut développer les politiques d'égalité professionnelle et utiliser cette expérience pour traiter les autres questions liées à la diversité.
Ne croyez-vous pas que le problème de la diversité se résoudra plus rapidement que celui de l'égalité professionnelle ?
Franchement, non. La question de la diversité est très compliquée. Les facteurs de diversité sont nombreux.
Il me semble pourtant que le problème de la diversité, du moins de la diversité liée à l'origine, devrait se résoudre plus vite car à partir du moment où la question est posée, la mauvaise conscience joue.
Tandis qu'on a moins mauvaise conscience à bloquer une femme à raison de son sexe, habitués que l'on est, depuis des siècles, à côtoyer l'inégalité qui s'exerce contre les femmes ! Il y a d'ailleurs très peu de plaintes pour discrimination de la part des femmes, notamment par rapport au nombre de plaintes pour discrimination à raison de l'origine. Il reste énormément de progrès à faire pour développer la « conscientisation », à la fois des femmes elles-mêmes, des acteurs de l'entreprise et des partenaires sociaux, sur l'ensemble des discriminations que peuvent subir les femmes.
Si l'on compare les accords égalité et les accords diversité, on s'aperçoit que, dans les accords égalité professionnelle, on s'occupe très peu d'un phénomène pourtant fondamental : l'inégalité entre les femmes. Il est plus facile d'y trouver des mesures sur l'accès des femmes aux responsabilités que des mesures sur la précarité ou le temps partiel, qui concernent pourtant de très nombreuses femmes.
Je partage votre point de vue. Dans notre rapport de 2003, nous étions partis de l'idée que si l'on ne gère pas le problème de l'égalité dans l'éducation, on ne le gérera pas, plus tard, dans l'entreprise ; et que si on ne le gère pas au bas de l'échelle dans l'entreprise, on ne le gérera pas en haut de l'échelle.
On pourrait avoir l'impression que les accords sont passés par les grandes entreprises – bien outillées, avec des spécialistes, des partenaires sociaux stabilisés dans leur rôle –, qui constituent des isolats privilégiés. On pourrait avoir l'impression que les accords concernent surtout les femmes cadres, sans trop se préoccuper des femmes les moins qualifiées, ni de celles qui travaillent dans les PME. La négociation sur l'égalité professionnelle couvrirait donc une partie seulement des problèmes d'inégalité que rencontrent les femmes dans notre société.
Nous assistons à un phénomène de « polarisation ». On ne peut plus parler de femmes en général, mais de catégories de femmes : les femmes diplômées, les cadres, les femmes d'origine diverse, etc. La catégorie « femmes » est de plus en plus difficile à appréhender dans sa globalité, et il faut constater que la mise en oeuvre de l'égalité professionnelle n'échappe pas à une telle fragmentation. Nous avons à nous interroger sérieusement à ce propos. Des chantiers sont déjà en place sur « travail, genre et société », sur « le RSA et le genre ».
Une autre question me préoccupe beaucoup : comment les femmes seront-elles traitées pendant cette crise économique ? Pour le moment, celle-ci frappe surtout les emplois industriels, mais le risque existe que bientôt les emplois tertiaires soient frappés, où les femmes sont nombreuses.
On parle toujours des jeunes. On ne parle jamais des femmes qui sont confrontées à la précarité : parents isolés, femmes travaillant à temps partiel, femmes de l'immigration, etc. La situation risque d'être extrêmement difficile pour celles qui ont entre trente-cinq et cinquante, voire soixante ans. Je suis très inquiète et j'aimerais bien que les chercheurs puissent s'exprimer là-dessus.
La crise soulignera une situation à deux vitesses : politique d'égalité professionnelle pour les femmes qui ont un emploi dans les entreprises de grande taille, dualisation du marché du travail, etc.
Moins de visibilité, moins d'objectifs à but stratégique, fragmentation des publics et des dispositifs eux-mêmes, interrogation générale et non sexuée : voilà à quoi il faut s'attendre. Aux chercheurs d'en mesurer l'impact.
Les accords de diversité concernent fréquemment la diversité sociale. Il faut dire que le sujet moins polémique et que la diversité sociale, ou plutôt l'inégalité sociale peut être un facteur de rassemblement. Ceux qui traitent de diversité à raison de l'origine se rendent bien compte que les discriminations qui sont liées à l'origine sont en général couplées avec des questions d'inégalité sociale.
Or, les accords d'égalité professionnelle font peu de place à l'inégalité. Rares sont ceux qui abordent la situation des femmes travaillant à temps partiel – choisi ou subi alors que certains accords de diversité en parlent. En fait, l'inégalité sociale serait peut-être mieux abordée par les accords de diversité que par les accords d'égalité professionnelle. Quoi qu'il en soit, nous devons réfléchir à l'inégalité sociale qui frappe certaines catégories de femmes.
Il serait intéressant de proposer au Conseil supérieur de l'égalité professionnelle, où siègent des syndicalistes, des entreprises et des chercheurs, de lancer cette réflexion et de travailler sur les accords. Il examinerait les problèmes qu'a pu rencontrer telle entreprise, les raisons pour lesquelles elle n'a pas abordé telle ou telle question, etc. Je ne suis pas une fanatique des « bonnes pratiques », mais c'est au cours des débats de ce type que l'on peut développer une nouvelle problématique et une nouvelle logique d'action.