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Délégation pour l’union européenne

Séance du 16 juillet 2008 à 15h00

Résumé de la séance

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  • OMC
  • présidence

La séance

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Le Président Pierre Lequiller s'est déclaré heureux de recevoir Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat chargée du commerce extérieur, à la veille de la réunion qui se tiendra le 21 juillet prochain à l'initiative de M. Pascal Lamy, directeur général de l'Organisation mondiale du commerce, afin de tenter de mettre un terme aux négociations du cycle de Doha. Nous souhaiterions avoir des précisions sur la position française sur ce dossier. Dans quelle mesure la question des négociations à l'OMC a pesé sur les résultats au référendum sur le traité de Lisbonne en Irlande ? Par ailleurs, le gel des négociations sur le cycle de Doha serait-il l'occasion de relancer le programme bilatéral de négociations commerciales et quel est l'état d'avancement des négociations commerciales avec des pays comme le Canada ou l'Inde. Enfin, afin de recadrer le débat, il a déclaré comprendre le dialogue que l'on peut qualifier de « viril » qui s'est engagé entre le Président de la République française et le commissaire au commerce Peter Mandelson. En effet, il n'est pas obligatoire d'aboutir à un accord coûte que coûte et il incombe à M. Peter Mandelson de suivre la position définie par le Conseil et non l'inverse.

PermalienAnne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat chargée du commerce extérieur

, s'est dite investie d'une responsabilité particulière, au service de l'Europe. Depuis le 1er juillet, la présidence de l'Union européenne confère à la France, main dans la main avec la Commission, le devoir d'être à l'écoute des intérêts européens et de trouver les voies qui les composent, ou les transcendent, pour forger une position commune, qui, chaque fois qu'elle peut s'exprimer, renforce non seulement l'Europe dans le monde, mais aussi la France en Europe. La ministre assume cette responsabilité avec conviction car tout le monde connaît son engagement pour la construction européenne.

Comme la ministre a eu l'occasion de le dire hier devant les membres de la commission du commerce international du Parlement européen, à Bruxelles, la France se prépare à ce rôle depuis plusieurs mois, et en matière de commerce international, la présidence française de l'Union européenne commence sans répit, car le directeur général de l'OMC, M. Pascal Lamy, a convoqué le 21 juillet une conférence ministérielle, qui réunira une trentaine de pays, représentatifs de l'ensemble des sensibilités des 152 Etats membres.

Ce dossier, la France l'aborde comme les autres dossiers européens, avec le même état d'esprit collectif, et avec le même souci de débat politique.

Comme le Président de la République l'a constaté à Strasbourg, l'Europe a souffert d'un manque de débats. Dans quelles conditions le libre échange est-il avantageux pour l'Europe ?L'accord qui se dessine à Genève remplit-il ces conditions ?

Le débat démocratique doit s'emparer de ces questions en Europe, car, malgré la technicité du commerce international, il est temps de remettre une dose de politique dans ce processus.

Comme lui a dit récemment un ministre asiatique, il ne faut pas laisser ces négociations en pilotage « automatique ».

L'échéance du 21 juillet comporte des risques. Il reste beaucoup de sujets à régler. Lors du Conseil « Affaires générales » du 26 mai dernier, une vingtaine d'Etats membres ont montré leurs inquiétudes ou leurs interrogations quant à la tournure actuelle des négociations. Le rôle de la présidence du Conseil sera donc de veiller à ce que les discussions conduisent à un rééquilibrage du cycle de Doha en faveur des intérêts européens, conformément aux conclusions du Conseil « Affaires générales » de mars dernier.

In fine, il faut bien garder à l'esprit que les Etats membres devront se prononcer à l'unanimité sur un accord à l'OMC. Dans ces conditions, autant garantir une adhésion au fil de l'eau de l'ensemble du Conseil, plutôt que d'exposer une Commission qui avancerait sans être adossée au politique. L'objectif de la présidence française est donc de renforcer ainsi l'assise politique du négociateur européen, et non de l'affaiblir, comme certains l'ont pensé.

Quelle est notre analyse de la situation ?

En matière agricole, l'Europe a déjà beaucoup concédé. Les négociations du cycle d'Uruguay, conclues avec les accords de Marrakech ont, pour la première fois, fait rentrer l'agriculture dans le champ couvert par les disciplines de l'OMC. Elles se poursuivent dans le cadre du présent cycle, à la demande, des pays en développement, qui pour certains tendent à limiter le cycle à cet enjeu, comme les travaux de la Délégation l'ont bien mis en évidence. Ceux-ci veulent que les Etats-Unis et l'Europe éliminent les subventions à l'exportation, baissent leurs tarifs douaniers, et encadrent plus strictement les soutiens internes au secteur agricole.

Or, l'Europe agricole s'est beaucoup réformée ; elle a fourni les efforts qui lui étaient demandés. Dans le cadre de la politique agricole commune, elle a accepté l'élimination progressive de ses subventions à l'exportation. Elle a concédé des baisses de tarifs importantes. Mais pour la France, l'Europe a atteint ses lignes rouges. Le dernier texte Falconer, du nom de l'ambassadeur néo-zélandais qui préside aux négociations, n'a pas sensiblement changé la donne. La plus grande vigilance est requise, afin de préserver nos filières sensibles (sucre, fruits et légumes, volaille et boeuf) et de garder toutes les marges de manoeuvre nécessaires à la réforme de la PAC en 2013, et au bilan de santé de la PAC, cette année. D'autres Etats membres ont une sensibilité sur le coton, par exemple.

Que dire, par contraste, des Etats-Unis qui viennent d'adopter des lois sur l'agriculture et l'énergie autorisant des montants de subventions incompatibles avec les perspectives d'un accord à l'OMC ? Le Congrès américain, nous dit-on, serait prêt à modifier cette loi. Mais cela introduit un grand doute. Plusieurs pays partagent ce sentiment. En outre, la question des soutiens au coton continue d'opposer les pays africains et les Etats-Unis !

Que dire du Brésil, qui soutient à outrance le développement des biocarburants, au risque de mettre en péril la préservation de la forêt amazonienne ?

En matière industrielle, les attentes européennes sont fortes, car les marchés émergents, où nos entreprises vont chercher des relais de croissance, maintiennent des barrières importantes aux échanges. Mais ces attentes sont déçues.

En effet, comme vous le savez, les négociations à l'OMC ne portent pas sur les tarifs effectivement appliqués, mais sur les plafonds tarifaires que chaque Etat s'engage à ne pas dépasser. Or, en l'état, les négociations ne conduiront pas à une réduction telle de ces plafonds qu'ils viennent mordre suffisamment sur les droits de douane effectivement imposés aux frontières. Tout au plus peut-on y voir une garantie contre le risque de leur relèvement ultérieur.

Les dérogations à la formule de réduction de droits donnent peu de possibilités de réduire les pics tarifaires qui ferment certains marchés à l'industrie européenne. Beaucoup d'industriels ont donc exprimé leur déception.

Les dernières propositions de M. Don Stephenson, l'ambassadeur canadien qui préside à ce chapitre des négociations, ne constituent pas le saut qualitatif suffisant qui pourrait emporter notre adhésion. Au contraire, puisqu'il affaiblit considérablement la portée de la « clause anti-concentration », que la Commission avait proposée afin de limiter les échappatoires.

Le report à une étape ultérieure des négociations sur les services, qui ne feront que débuter la semaine prochaine, sont un point supplémentaire de déception, alors que nos intérêts y sont majeurs.

Enfin, malgré un soutien croissant des pays en développement, les demandes européennes d'une meilleure protection internationale des indications géographiques, qui permettent de valoriser la qualité des produits de terroirs européens, ne sont pas encore prises en compte.

C'est pourquoi, comme l'a dit le Président de la République: « le compte n'y est pas ».

L'Europe a toujours joué un rôle de leader dans la défense et la promotion du système commercial multilatéral. L'Europe n'a pas de leçons à recevoir sur les questions de développement. Ceci ne signifie pas que nos intérêts offensifs et défensifs doivent être sacrifiés.

C'est pourquoi la substance doit primer sur le calendrier. D'autant plus qu'il faut bien voir à quel point ce calendrier est inconfortable.

Pour bien préciser les choses, si un compromis politique était trouvé, techniquement il faudrait encore au moins 6 mois de travail pour le transcrire juridiquement. Cela signifie que l'objectif affiché de conclure avant la fin 2008 semble hors de portée. Mais alors, comment éviter un télescopage avec les élections américaines et une remise en cause des modalités par le Congrès démocrate?

Quel est le message prioritaire que la présidence française souhaite transmettre aux Européens ?

C'est de montrer que l'Europe peut les protéger. Mais le Président de la République a été clair devant le Parlement européen, protection ne signifie pas protectionnisme. La France, qui est un pays exportateur et investisseur à l'étranger n'a rien à gagner au protectionnisme. En matière commerciale, cela veut dire que la France adhère pleinement à la nécessité d'une OMC qui joue un rôle fondamental dans la régulation du commerce international, avec une efficacité unique parmi les organisations internationales grâce à l'organe de règlement des différends. Mais cela veut dire aussi que l'Europe ne doit pas être naïve – les autres ne le sont pas –, et qu'elle doit se donner les moyens de veiller à un meilleur équilibre dans les négociations.

Au bout du compte, la ministre souhaite faire en sorte que l'Europe puisse aborder cette négociation incertaine les yeux ouverts, sans naïveté, et avec une pleine conscience politique de ses intérêts.

S'agissant des accords bilatéraux de l'Union européenne, sous présidence française, la conclusion de plusieurs accords de libre-échange est envisageable. Ces accords ne sont pas des substituts à un accord multilatéral. Ils permettent d'aller à la fois plus vite et plus loin, puisqu'ils couvrent des sujets comme la propriété intellectuelle, les barrières non tarifaires, l'investissement, par exemple.

Avec la Corée, il est possible que les négociations aboutissent sous présidence française. Il reste bien sûr des difficultés à surmonter, notamment dans le secteur automobile. Il y a une autre négociation qui pourrait progresser sous présidence française, c'est l'accord UE-Conseil de coopération des Etats du Golfe, à condition de trouver la bonne articulation avec les clauses politiques auxquelles nous souscrivons tous. Plusieurs sommets avec de grands pays émergents (Afrique du Sud, Inde, Russie, Brésil, Chine) donneront lieu à des développements économiques.

Mme Anne-Marie Idrac aimerait aussi contribuer au renouveau des réflexions sur les relations de l'UE avec les pays développés : le sommet UE-Canada constituera une bonne occasion à cet égard. Avec ce pays, la France réfléchit aux contours d'un accord de « nouvelle génération », englobant notamment les marchés publics, l'investissement et la propriété industrielle.

Au-delà de ces négociations, la vision globale des priorités françaises en matière commerciale pour le semestre à venir, que la ministre a exposée hier au Parlement européen, s'articule autour de deux axes : un commerce loyal et un commerce durable.

Le commerce loyal, c'est d'abord un accent mis sur la propriété intellectuelle, et sur l'idée de réciprocité.

Le commerce durable, c'est la priorité française accordée à l'environnement. L'encadrement des émissions de CO2 ne doit pas conduire à détériorer la compétitivité des entreprises européennes par rapport à des concurrents qui ne seraient pas soumis à la même ambition.

La ministre a ajouté à ces priorités une préoccupation générale de prendre en compte la dimension sociale du commerce international.

La ministre a espéré avoir donné un aperçu des défis qui sont devant nous et face auxquels le soutien et les orientations des parlementaires sont déterminants.

PermalienPhoto de Jean-Claude Fruteau

a remercié la ministre de sa présentation et a souligné qu'il n'avait pas de désaccord avec les enjeux de la présidence française de l'Union européenne en matière de commerce extérieur et sur la problématique des négociations à l'OMC.

Il a cependant attiré l'attention de la ministre sur trois points :

- il est très important de remettre en cause le postulat imposé par l'OMC et jamais revisité selon lequel la libéralisation du commerce est la condition indispensable du développement des pays pauvres. En effet, malgré cette évolution, ceux-ci s'appauvrissent de façon considérable du fait du néocolonialisme de certains pays émergents ;

- le groupe de travail de la Délégation présidé par M. Hervé Gaymard sur le bilan de santé de la politique agricole commune, auquel il a participé, a montré que l'agriculture sera un élément essentiel du débat qui va s'engager à partir du 21 juillet prochain.

Comme le Président de la République et le Gouvernement le disent à juste titre, l'Europe a déjà fait, contrairement à certains pays, beaucoup d'efforts en matière agricole en réformant la PAC pour se conformer aux règles de l'OMC. Il ne subsiste que quelques points encore en discussion et des pays, comme le Groupe de Cairns et les Etats-Unis continuent à mettre l'Europe en accusation tout en maintenant des dispositions contraires aux règles de l'OMC.

En matière agricole, le compte n'y est certainement pas et il faut donc tenir une position ferme ;

- l'inquiétude des producteurs de bananes est très grande devant le projet de réduction des droits de douane de 30 %. L'objectif affirmé est de régler de cette façon un contentieux avec les pays d'Amérique du sud mais cela n'apportera aucune solution aux conditions environnementales et sociales de la production de ces pays.

Il faut donc qu'une intervention soit effectuée dans ce domaine afin d'éviter cette diminution des droits de douane.

PermalienPhoto de Alfred Almont

a considéré que les perspectives de la présidence française de l'Union européenne dans ce domaine étaient bonnes et a mis l'accent sur l'avenir des régions ultrapériphériques en marquant son accord avec les remarques de M. Jean-Claude Fruteau.

Aussi bien à Bruxelles qu'à Genève, on considère qu'un accord sur la banane est nécessaire pour parvenir à un accord général sur le cycle de Doha. Il faut donc s'alarmer du fait qu'il est prévu de diminuer le droit actuel de 176 euros par tonne à 150 euros pour arriver à 116 euros en 2015, ce qui revient à condamner les productions tant de nos régions ultrapériphériques que celles des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP).

Les conséquences de la signature d'un tel accord seraient que les producteurs communautaires demanderaient des aides à la Commission et que les pays ACP n'accepteraient pas le compromis de Doha. La France et la Commission européenne sont donc les seules autorités à pouvoir faire échec à cette stratégie de l'OMC.

La baisse du tarif douanier entraînerait celle des prix sur le marché communautaire et donc celle des revenus des producteurs communautaires qui devrait alors être compensée par des aides. Si cela n'était pas le cas, tous les progrès effectués depuis quelques années en matière, notamment, de diminution de l'emploi des pesticides, d'amélioration de la qualité ou d'efforts commerciaux, seraient réduits à néant.

La disparition de cette culture qui représente 40 000 emplois dans l'Union européenne serait une véritable catastrophe économique et sociale. Elle constitue par exemple 58 % de la production agricole de la Martinique, 15 % à la Guadeloupe, 33 % aux Canaries et 20 % à Madère. Cela entraînerait une désorganisation de l'aménagement du territoire, une augmentation du chômage et, par voie de conséquence, une amplification des problèmes de la drogue et de l'immigration clandestine dans la zone des Caraïbes.

Il est donc crucial de savoir si la France sera en mesure de faire échec à ces projets lors du Conseil « Affaires générales et relations extérieures » du 18 juillet prochain.

PermalienPhoto de Robert Lecou

a souhaité intervenir sur la viticulture, qui a toujours été un secteur très porteur à l'exportation. La France a toujours été un grand producteur viticole. Dans la région du Languedoc-Roussillon, les vignerons ont engagé une vraie révolution et se sont résolument orientés vers la qualité en introduisant de nouvelles méthodes de vinification et en améliorant leurs modes de commercialisation. Pour autant, ils connaissent une grave crise qui se traduit notamment par un risque d'arrachages massifs. D'ores et déjà, les paysages sont en train de changer. La concurrence des pays émergents, qui n'utilisent pas les mêmes méthodes et qui disposent d'une force de frappe supérieure sur le plan du marketing, sans parler des différences de tarifs sur les produits phytosanitaires, met en cause la position de la France. Cette concurrence se ressent au sein même de l'Europe et l'on peut se demander dans quelle mesure la France pourra tirer son épingle du jeu.

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

a souhaité connaître la position de la ministre sur le plan du Président José Manuel Barroso relatif à l'aide à l'agriculture aux pays pauvres. En matière de viticulture, il a estimé que le problème relève principalement de la politique nationale du ministère du commerce extérieur, car la France a de vraies difficultés à pénétrer les marchés extérieurs qui se développent. Il ne faut pas se replier sur les appellations d'origine et la qualité mais s'ouvrir à une démarche nouvelle afin de développer une force de frappe centrée sur ces marchés émergents.

Il a également souhaité connaître l'impact réel de la parité euro-dollar sur les difficultés du commerce extérieur et se demande si elle n'est pas, en fait, un argument pour cacher nos faiblesses.

PermalienPhoto de Gérard Voisin

a ajouté que, en matière de viticulture, les problèmes franco-français et les lourdeurs de la production ont mis la France en difficulté. Il a approuvé la position développée par M. Daniel Garrigue.

S'agissant d'Ubifrance, il a souhaité connaître la position de la ministre sur la proposition de changement avec un appui sur les chambres de commerce. Les services économiques des ambassades françaises font un travail remarquable mais sont souvent englués dans un système archaïque qui freine leur force de frappe. Cette situation peut-elle évoluer grâce à la réforme d'Ubifrance ?

La ministre, en réponse aux différentes questions posées, a indiqué qu'ainsi que l'a fait remarquer M. Jean-Claude Fruteau, sur l'OMC, le lien entre libéralisation et développement relève quasiment de la philosophie du développement. Si la libéralisation ne suffit évidemment pas au développement, ce qui frappe dans les négociations est que beaucoup de pays pauvres la considèrent comme une base indispensable, en quelque sorte comme une espèce de « must ». Ainsi, la dernière déclaration de la FAO met en exergue l'idée qu'il est urgent d'achever le cycle de Doha dans lequel les pays émergents jouent, bien sûr, un rôle important. Elle a ajouté que la France avait souvent du mal à faire passer ses idées dans les think tanks et les milieux de réflexion. C'est ainsi que l'idée que l'agriculture ne soit pas incluse dans le cycle de négociations multilatérales a été très mal comprise, dans le sens où l'on craint une fermeture des marchés.

En ce qui concerne les accords APE, il est nécessaire que la sécurité alimentaire y figure explicitement. Il est par ailleurs indispensable dorénavant de bien différencier les pays émergents des autres pays en développement.

S'agissant du secteur de la banane, il n'est évidemment pas possible de se désintéresser des régions ultrapériphériques. Il apparaît qu'un accord séparé poserait problème pour l'Union européenne. Chronologiquement, le premier accord de partenariat économique est celui avec les Caraïbes, qui pourrait peut-être être signé avant la fin du mois de juillet.

L'initiative du président de la Commission pour les pays pauvres est très intéressante et va dans le sens des actions engagées par le Président de la République. Sans que cela soit subordonné à la signature des accords, il convient de trouver comment le Fonds européen pour le développement peut accompagner le développement des pays pauvres.

En matière de viticulture, la question centrale en France est celle du caractère contraignant du registre. Dans les autres pays européens est défendue l'idée d'une extension du champ des indications géographiques. Il existe un vrai danger à voir nos parts de marché diminuer face aux nouveaux producteurs sur les marchés internationaux. La force d'impact française doit se concentrer sur les marques car nos concurrents ne cherchent pas à aller dans les détails. Si le système français est performant pour le très haut de gamme, il n'est pas adapté au milieu et au bas de gamme. Les regroupements sur la qualité qui se sont effectués en Languedoc-Roussillon donnent espoir, tout comme le travail de Sopexa. Il s'agit de bien s'organiser, comme c'est le cas en Italie par exemple.

Sur le sujet de l'internationalisation, il faut aussi s'intéresser aux investissements étrangers en France et français à l'étranger, qui sont très importants car l'économie française est caractérisée par la force de ses entreprises de service. Au Japon, les discussions ont porté sur le moyen de lever des obstacles non tarifaires et de développer les investissements japonais en France. Les accords doivent porter sur un champ plus large que la seule question des droits de douane.

Les deux tiers des exportations françaises concernent les pays de la zone euro et la question de la parité euro-dollar est centrale pour les entreprises qui vendent en dollars, tel Airbus. La compétitivité française à l'exportation repose sur d'autres outils comme l'innovation, le crédit d'impôt recherche, les pôles de compétitivité ou encore les dispositions de la loi LME sur les délais de paiement pour les entreprises et l'assouplissement des règles dans le cadre de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, afin de dynamiser les petites et moyennes entreprises. L'idée d'un travail collectif et uni est peut-être en train de se concrétiser et c'est heureux car il existe en France une tendance à gaspiller les énergies dans les discussions internes parfois dérisoires face aux enjeux et à nos vrais compétiteurs.

Cette idée d'un travail collectif qui existait déjà précédemment se concrétise, comme l'illustre l'accord passé entre Ubifrance et les chambres de commerce à l'étranger, lequel vise à promouvoir la compétitivité de la France grâce aux avantages comparatifs de son commerce extérieur et que les chambres de commerce peuvent connaître en identifiant les entreprises innovantes et exportatrices.

En ce qui concerne le projet de réforme d'Ubifrance, il doit d'abord lui permettre d'accompagner les PME dans les salons et de favoriser leur développement. A cet égard, l'objectif ambitieux est de créer, dans cinq ans, 10 000 entreprises supplémentaires, ce qui mérite d'être souligné puisque le nombre d'entreprises exportatrices tend actuellement à diminuer. Cette réforme qui s'inscrit dans le cadre de la réforme générale des politiques publiques (RGPP) peut être qualifiée d'exemplaire, compte tenu des difficultés qu'elle a dû surmonter. En outre, il s'agit de fournir aux PME un outil, au demeurant peu coûteux, analogue à celui qui existe en Allemagne, en Italie et au Royaume-Uni, destiné à leur permettre de bénéficier d'un accompagnement.

Quant aux missions économiques, toutes les enquêtes effectuées auprès des entreprises leur sont très favorables et il s'agit de leur rendre hommage. Leur réforme a visé à distinguer leurs missions d'accompagnement des PME et leur rôle régalien, ce dernier touchant à la diplomatie économique, à l'information du Gouvernement, au benchmark. Dans la majorité des pays, une distinction est établie entre Ubifrance et les missions commerciales. Au demeurant, l'article 8 du projet de loi LME autorise la création de bureaux d'Ubifrance à l'étranger et confirme le rattachement de ces bureaux dans la RGPP.

Au total, il importe de rassembler les forces de l'ensemble des acteurs à l'heure où la France est confrontée au renchérissement du coût de ses importations, consécutif à celui du prix du pétrole et à la diminution de ses exportations du fait du ralentissement de l'activité mondiale. Il s'agit de s'appuyer sur des organismes comme OSEO ou la COFACE, dont le champ d'application sera élargi aux entreprises innovantes.

L'enjeu des négociations a été évalué par le directeur général de l'OMC dans un article récent à 1 pour mille du PNB mondial et à 4 pour mille du commerce mondial. Pour l'Union européenne dont la part dans le commerce mondial est très importante, cet enjeu revêt une dimension très politique et nécessite une vision d'ensemble.

Le Président Pierre Lequiller a remercié la ministre pour son exposé et ses réponses et a déclaré que la Délégation suivra avec beaucoup d'attention les négociations qui débuteront le 21 juillet 2008.