La Commission poursuit l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009 et procédé, à l'examen des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » : transports routiers, ferroviaires, fluviaux et maritimes ; vote sur l'article 60 rattaché, et vote sur les comptes spéciaux « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » et « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres » ;
Nous allons d'abord examiner les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » concernant les transports routiers, ferroviaires, fluviaux et maritimes, puis nous nous prononcerons sur l'article 60 rattaché.
Le délai exceptionnellement réduit entre la transmission du projet annuel de performances et la présentation de mon projet de rapport, sous la forme de la note de synthèse qui vous a été remise, implique que mon rapport sera complété d'ici à la discussion en séance publique.
Le champ couvert est très large, puisqu'il comprend les cinq programmes suivants : « Infrastructures et services de transport », « Sécurité et circulation routières », « Sécurité et affaires maritimes », « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité », « Information géographique et cartographique », ainsi que le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » et le compte de concours financiers « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres ».
Les demandes de crédits pour le programme « Infrastructures et services de transport » sont en phase avec les conclusions du Grenelle de l'environnement. Les crédits de paiement de l'action n° 10 « Infrastructures de transport collectifs et ferroviaires » augmentent en effet de 45 % par rapport à 2008, traduisant ainsi sur le plan budgétaire la politique de redéploiement modal. L'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF, recevra ainsi à cet effet une subvention de 1,2 milliard d'euros en 2009. Cette subvention sera de 1,1 milliard d'euros en 2010 et sera ramené à 0,2 milliard d'euros en 2011. À cette date, on escompte que la taxe sur les poids lourds se substituera à la subvention budgétaire et pourvoira aux besoins de financement de l'AFITF. En réalité, le calendrier d'application de la taxe sur les poids lourds est irréaliste, celle-ci ne pouvant prendre significativement le relais de la subvention budgétaire dès 2011.
Se posent cependant des questions de fond, à commencer par le retard à la signature du contrat de performance entre RFF et l'État qui va modifier la structure des subventions de ce dernier. Le président de RFF attire depuis de nombreux mois l'attention sur les difficultés de son établissement, sur les plans stratégique et financier, et nous arrivons à la fin de l'année sans qu'il ait reçu de réponse. Par ailleurs, l'État compte profiter de l'augmentation des péages acquittés par la SNCF à RFF pour baisser sa subvention de régénération. Certes, dans la perspective du contrat de performance, cela ne porte pas à conséquence puisque RFF sera destinataire d'une subvention globale mais, le plan n'étant pas encore signé, la réalité est actuellement une diminution de cette subvention, contradictoire avec les objectifs du Grenelle de l'environnement.
Une autre question de fond est celle de la faisabilité, dans le contexte de crise actuel, d'un certain nombre de projets du Grenelle de l'environnement, et donc de l'utilisation des moyens de l'AFITF. L'État a dégagé des fonds pour le Grenelle et cherche à créer un effet de levier en mobilisant des partenariats public-privé, mais les entreprises de travaux publics et les institutions financières que j'ai rencontrées sont assez perplexes quant à la réalisation concrète des projets. L'État aura sans doute à procéder à des réévaluations.
Le programme 207 « Sécurité et circulation routières » marque une progression insignifiante. Certes, les derniers chiffres de la sécurité routière sont excellents, mais il faut veiller à ne pas perdre l'impulsion. Or, même si le programme « Radars » connaît une augmentation sensible, il ne peut pas financer, par exemple, les campagnes de communication dont la sécurité routière a absolument besoin.
Le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes » est affecté par un important travail de réorganisation du ministère sur ce sujet. La nouvelle articulation de l'administration n'est pas encore achevée et il est donc prévu que les dépenses restent stables jusqu'en 2011, mais ce choix devra être confronté aux objectifs du Grenelle de l'environnement.
Le programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » connaît une augmentation importante, destinée notamment à l'aide aux associations du secteur.
Le programme 159 « Information géographique et cartographique » connaît une hausse significative, correspondant à la subvention versée à l'IGN. Un nouveau contrat de performance de l'IGN est par ailleurs en cours d'élaboration. Les prévisions de déficit du dispositif du bonus malus pour le développement des véhicules propres sont de 250 millions pour 2008 et de 300 millions pour 2009, sans compter une moins-value probable de perception de TVA – je suis en train de travailler sur le sujet. Nous devrons rappeler au Gouvernement l'engagement très clair qu'il avait pris concernant la familiarisation du bonus malus et nous assurer, de façon générale, que la fiscalité écologique n'aboutisse pas à une pénalisation des familles.
Dans le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », l'action des deux programmes 751 « Radars » et 752 « Fichier national du permis de conduire » se poursuit.
Enfin, l'article 60 sur la taxe due par les poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures a pour objet à la fois d'actualiser le dispositif expérimenté en Alsace et d'instaurer à plus long terme une taxe sur l'ensemble du territoire. D'aucuns considèrent que le taux envisagé est élevé au regard du niveau des péages autoroutiers. Il faudra se pencher sur la question – au passage, je rappelle qu'une des ressources nouvelles de l'AFITF réside dans l'augmentation de 150 % de la redevance acquittée par les sociétés d'autoroute. L'entrée en vigueur du dispositif est prévue le 31 décembre 2011 au plus tard. La complexité du système allemand de Toll Collect suffit à montrer que cet horizon est un minimum. Imaginer que la taxe puisse se substituer intégralement dès 2011 à la subvention budgétaire me paraît totalement irréaliste.
Le produit attendu en France est de 1 milliard d'euros. Le coût de fonctionnement est en Allemagne d'un tiers de la recette, mais avec un important dispositif de contrôle qui me paraît très sur-évalué selon notre conception.
La mise en place technique en Allemagne a été problématique. Le dispositif fonctionne-t-il maintenant correctement ?
Oui. Pour ce qui est du nôtre, tout n'est pas encore décidé. Il faudra notamment s'assurer que notre système soit compatible avec celui d'autres pays, et éventuellement que le boîtier de paiement puisse aussi remplir d'autres fonctions, utiles par exemple aux transporteurs. Le débat est en cours avec la profession, sur plusieurs questions : quelles compensations sont-elles prévues ? La taxe figurera-t-elle en bas de facture, avec des sanctions pénales de non-application ? Et, si la taxe était répercutée, ce qui satisferait les transporteurs, se poserait alors le problème du niveau d'impôt des entreprises. Le Grenelle de l'environnement avait prévu d'instaurer cette taxe à fiscalité constante. Or il s'agit en l'état actuel de1 milliard d'euros d'impôt supplémentaire, sans contrepartie.
L'idée était d'aboutir à un carburant professionnel au niveau communautaire, ce qui implique une caisse de péréquation entre les pays, dont la France, qui ont des taux supérieurs à la moyenne et ceux qui sont en dessous. Autrement dit, ceux qui, ayant mieux géré leurs finances, ont des impôts moins élevés refusent de payer pour les autres. Le dossier n'avance donc pas. En outre, la taxe était censée remplacer la dotation budgétaire de 1,2 milliard à l'AFITF, mais elle ne rapportera qu'un milliard brut et 700 millions nets. Le compte n'y est donc pas, sans compter qu'elle ne sera sans doute pas prête pour 2011.
Le Gouvernement a beaucoup hésité entre mettre en oeuvre cet amendement, et donc respecter la loi, ou attendre pour pouvoir se couler dans le dispositif national. Finalement, pour des raisons économiques que l'on peut comprendre, il a décidé de commencer avec l'Alsace pour 2010. Je me propose naturellement de suivre cette mise en place.
Mais on peut faire une expérience en Alsace sans généralisation ensuite. Les Lorrains craignent fortement de subir le même report de trafic que l'Alsace au moment de l'instauration de la taxe en Allemagne.
La mise en place de la taxe en Allemagne a causé un report évident de trafic vers l'Alsace. Nous pensons que l'expérimentation en Alsace prévue par l'« amendement Bur » ne fera que déplacer le problème, mais il est absolument indispensable de l'appliquer dans les meilleurs délais pour soulager la population alsacienne.
Si l'on se contente de reprendre le système allemand, oui, mais cela nous fait courir le risque de nous caler sur ce système, y compris du point de vue économique et industriel, pour l'ensemble du dispositif national qui sera réalisé par la suite.
Mais le dispositif proposé pour 2010 en Alsace est différent de celui qui est envisagé au niveau national. Il va donc devoir changer, en Alsace, au bout d'un an ?
Le dispositif s'appliquera en Alsace sur moins de véhicules, avec un taux moins élevé. Dès lors qu'il s'agit d'une expérimentation, cela ne me paraît pas présenter de sérieuses difficultés.
Mais un problème important se pose pour la profession des transporteurs, qui est la première à subir le choc de la crise économique. Il faudra très rapidement voir comment alléger d'un autre côté leur prix de revient.
Si le taux prévu pour l'Alsace est plus faible, c'est aussi parce que cette taxe va avoir un impact sur le coût du transport par rapport à d'autres marchandises sur le reste du territoire. D'où l'intérêt de l'expérimentation.
Compte tenu de la polémique que cette mesure suscitera sans aucun doute, il faudra vérifier qu'elle sera applicable dès 2010.
S'agissant des autres programmes, quelle appréciation peut-on porter sur la qualité du service public, c'est-à-dire sur le rapport entre les moyens et les indicateurs de performance ?
Le « bleu » est arrivé trop tard pour que l'on puisse réaliser un travail suffisant sur les indicateurs.
On constate dans ce budget, comme d'habitude, un décalage entre les investissements prévus et réalisés. Quel est le taux de réalisation sur plusieurs années ?
Il faut savoir que des investissements qui auraient dû s'achever fin 2006 sont encore en cours d'exécution, dans le domaine ferroviaire comme dans le domaine routier ! Par ailleurs, le rapporteur spécial a souligné que la subvention de 1,2 milliard à l'AFITF à partir du programme 203 figure dans deux colonnes à la fois, et que le total des moyens disponibles n'est pas égal à la somme des crédits budgétaires et des fonds de concours. Une clarification s'impose avant le vote du budget.
Le budget général verse 1,2 milliard à l'AFITF, laquelle les reverse à l'État sous forme de fonds de concours. Pourquoi ne pas supprimer tout bonnement la subvention ?
Concernant les infrastructures routières enfin, le PDMI, le programme de développement et de modernisation des itinéraires, qui devait être prêt pour le printemps 2007, n'est toujours pas disponible. Où en est-on ?
On croit en l'AFITF ou on n'y croit pas. Certains pensent que faire transiter ces crédits de 1,2 milliard par l'Agence les protège des régulations et les garantit dans le temps, mais ce n'est déjà plus le cas dans les perspectives qui nous sont présentées. L'AFITF sert à recevoir des ressources venant de l'extérieur. Ce n'est qu'une caisse intermédiaire, sans pouvoir d'appréciation. Plus on fait transiter des crédits importants par elle, plus on court le risque de changer sa nature. Je n'y suis pas favorable, parce que je pense que l'État doit assumer sa politique.
Pourquoi ne pas proposer par amendement de supprimer la subvention de 1,2 milliard, et donc de majorer les crédits routiers du budget de l'État et de réduire le fonds de concours d'autant ? Et pourquoi ne pas dissoudre complètement l'AFITF ? Le Gouvernement a fait un effort très important pour rendre ce budget plus lisible, en dissolvant de nombreuses structures ou en réévaluant des chapitres toujours sous-dotés, par exemple. Rebudgétiser l'AFITF irait dans le même sens.
Je suis d'accord pour présenter la première solution par amendement. Pour le reste, il ne vous aura pas échappé que l'AFITF a de fervents partisans…
Mais l'AFITF a-t-elle encore un intérêt, maintenant que les autoroutes sont privatisées et qu'elle ne perçoit plus leurs dividendes ? Il faut choisir entre deux solutions : supprimer la subvention et garder l'AFITF, mais ramenée à ses recettes propres, ou la supprimer et rebudgétiser ses recettes et ses dépenses, ce qui rendrait le budget plus lisible.
L'AFITF ne devait être alimentée que par des ressources extrabudgétaires. Dès lors que les sociétés d'autoroute ont été cédées, tout a changé. Par doctrine, l'administration de Bercy est totalement opposée à ce que des crédits d'investissements sortent de son contrôle. Elle a préféré abandonner les sociétés d'autoroute plutôt que de laisser une véritable autonomie à l'AFITF. Maintenant, il faut choisir entre doter l'Agence de ressources propres, sans aucune contribution du budget de l'État, ou la faire disparaître.
Le rapporteur spécial pourrait déposer les deux amendements dans le cadre de l'article 88 du Règlement. Mais on ne peut pas continuer à subventionner une agence pour qu'elle reverse ses crédits à l'État, sauf à vouloir absolument ralentir la consommation des crédits !
Je suis tout à fait d'accord.
En ce qui concerne le PDMI, les crédits de l'action « Entretien et exploitation du réseau routier national » sont en augmentation de 26,5 % pour les autorisations d'engagement et en baisse de 3,8 % pour les crédits de paiement. Le PDMI lui-même ne devrait être disponible qu'après la loi sur le Grenelle de l'environnement, pour des raisons de phasage politique, mais certaines opérations routières sur le réseau national peuvent être réalisées avant sa sortie. Quoi qu'il en soit, si le Gouvernement a semblé hésiter quelque temps à élaborer une telle programmation, il y semble désormais décidé.
Enfin, les taux de réalisation des investissements figureront dans mon rapport écrit.
Au moment du transfert aux départements des routes nationales, on nous avait promis que les collectivités territoriales ne seraient plus sollicitées pour les infrastructures routières, mais elles le sont quand même. Les crédits budgétaires de l'État ne peuvent donc pas être analysés seuls : certes, ils augmentent, mais ils ne servent à rien tant que les négociations sur les PDMI ne sont pas engagées ! Or, en Midi-Pyrénées par exemple, nous en sommes encore au contrat de plan 2000-2006 et rien n'est prévu pour l'avenir. Sans le concours des collectivités territoriales, les travaux n'avanceront pas. Or, compte tenu de la situation économique, l'État doit être prêt pour avancer le plus rapidement possible.
Les négociations ne sont effectivement pas ouvertes, puisque le Gouvernement ne s'est vraiment décidé pour les PDMI que récemment et qu'il ne veut pas de télescopage entre les discussions opérationnelles et les engagements généraux du Grenelle de l'environnement.
J'en viens aux infrastructures ferroviaires : la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux figure parmi les priorités. Pourtant, le niveau de participation des régions n'est pas encore arrêté ! La région Midi-Pyrénées est sollicitée pour financer cette ligne. Des départements et des communautés d'agglomération qui ne sont en rien concernés le sont. Pourquoi pas la région Île-de-France ? On nous demande de participer au prorata des populations.
Sauf que la solidarité est toujours du même côté. Sous prétexte que Lourdes est très fréquentée, on demande au département des Hautes-Pyrénées une participation bien supérieure aux autres. On arrive à des situations ubuesques.
M. Charles de Courson, président. La première ligne qui a eu le concours des collectivités territoriales est le TGV Est. L'argument valait déjà à l'époque.
Bien sûr ! Et encore plus depuis 2004, puisque l'État est censé s'occuper de ces sujets. En tout état de cause, ce projet de plus de 17 milliards et qui contribuera au désenclavement de tout le sud-ouest de la France est inscrit comme prioritaire, mais aucune disposition financière n'existe.
Le projet de loi « Grenelle 2 » doit prévoir un schéma d'infrastructures qui devrait faire l'objet d'un débat au Parlement, dont j'espère qu'il sera plus productif que celui de 2003. Mais aujourd'hui, la plupart des acteurs considèrent que la LGV Le Mans-Rennes sera réalisée avant Tours-Bordeaux.
En tout état de cause, des départements et des communautés d'agglomération qui ne sont absolument pas concernés par ces lignes n'ont pas à être sollicités pour leur financement.
Deux autres questions : où en est le transfert des parcs de l'équipement ? Quand les décrets concernant la répartition du produit des radars paraîtront-ils ?
Je ne peux pas vous répondre s'agissant des radars, mais cela figurera dans le rapport spécial. Quant aux parcs de l'équipement, ils relèvent dorénavant de la compétence de M. Pélissard.
Merci à Charles de Courson de m'avoir remplacé à la présidence pendant la réunion du groupe de travail sur la modification du Règlement.
J'ai regretté au début de la séance, monsieur le président, de n'avoir obtenu les projets annuels de performances que moins de quarante-huit heures avant la présentation de mon rapport.
La Commission adopte l'article 60 rattaché.
Elle adopte également les comptes spéciaux « Contrôle et sanction automatisés des infractions du code de la route » et « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres ».
Le budget de la sécurité civile a fort peu évolué depuis quatre ans, et en tout cas pas dans un sens favorable. Les crédits consacrés au secteur dépassent 5,5 milliards d'euros, mais l'État n'en finance que 965 millions, dont 415 au titre du ministère de l'intérieur. Les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) ont dépensé plus de 4,2 milliards d'euros en 2007, les sapeurs-pompiers de Paris 300 millions et les marins-pompiers de Marseille presque 100 millions. Le total est bien supérieur aux budgets de la culture ou de l'agriculture, et proche de ceux du logement ou de la justice.
Dans la programmation pluriannuelle 2009-2011, les crédits d'État de la sécurité civile sont relativement stables. Ils permettent de financer la rénovation du réseau national d'alerte et de renforcer les moyens de lutte contre les menaces terroristes. La mutualisation des bases d'hélicoptères de la sécurité civile et de la gendarmerie est très utile. Le projet annuel de performances pour 2009 prévoit 448 millions d'euros en autorisations d'engagement et 421 millions d'euros en crédits de paiement. Le fonds d'aide à l'investissement, doté de 24 millions d'euros, pratique encore trop le saupoudrage au détriment des grands projets d'investissement. Les dépenses de carburant et de produits retardants ont été recalculées en fonction de la consommation des dernières années, mais les crédits des colonnes de renfort et des secours d'extrême urgence ne permettraient pas de faire face à des crises graves. Il est vrai qu'en ces matières le budget s'adapte en fonction des circonstances.
La coopération interministérielle doit être renforcée, avec le ministère de l'intérieur comme chef de file. Les services de secours aux personnes – SDIS, SAMU et ambulanciers – ont convenu d'un référentiel commun en vue d'une meilleure articulation et d'une plus grande maîtrise des coûts. Par exemple, les SDIS transportent encore trop de victimes à la place des SAMU ou des ambulanciers. En attendant, l'assurance maladie paye les astreintes des ambulances qui ne sont pas utilisées.
Les comptes de gestion des SDIS ont augmenté seulement de 2 % en 2007 par rapport à 2006, mais la réorganisation comptable intervenue en 2007 a pu avoir des conséquences sur ce taux. Néanmoins, depuis l'achèvement de leur départementalisation en 2001, leurs dépenses ont augmenté de 45,8 % pour seulement 8,4 % d'interventions supplémentaires. Les incendies représentent 8 % des opérations, et le secours 65 %. En pratique, les sapeurs-pompiers ne sont donc plus des « soldats du feu ». Le coût des SDIS représente, en moyenne, 79 euros par habitant – et non par contribuable, puisque les SDIS sont financés par les impôts locaux. Dans certains départements, cette charge par habitant peut être supérieure à la taxe d'habitation.
De telles augmentations deviennent difficilement supportables pour nos concitoyens et grèvent d'autres secteurs tout aussi prioritaires de l'action locale. Il faut faire une pause. Les sapeurs-pompiers professionnels des SDIS étaient 38 700 en 2007 – sans compter les bataillons militaires de Paris et de Marseille – soit 10 000 de plus qu'il y a dix ans. Les casernes sont encore principalement organisées sur la base de gardes de vingt-quatre heures, alors qu'il y a peu d'interventions entre vingt-trois heures et six heures du matin. Avec une moyenne de 95 gardes par an, les sapeurs-pompiers professionnels sont absents de leur lieu de travail 270 jours par an. Remplacer ce système par des gardes de douze ou de huit heures assurerait une meilleure présence et réduirait les ruptures de rythme. Par ailleurs, un très grand nombre de sapeurs-pompiers professionnels exercent des vacations, exonérées d'impôt, en tant que volontaires, et leur taux d'encadrement est extrêmement élevé par rapport à celui de l'armée, par exemple.
Dans notre pays, la grande politique régalienne de sécurité civile est donc définie au niveau national, mais gérée et financée au niveau des collectivités territoriales. On ne peut donc examiner isolément le milliard d'euros que lui consacre l'État. Certes, ce sont les conseils généraux qui votent les crédits des SDIS mais, si le même problème apparaît dans cent départements différents, il devient un problème national qu'il appartient au Parlement de résoudre. La revue générale des politiques publiques ne s'est pas encore penchée sur le problème, mais force est de constater que notre sécurité civile n'a pas de pilote.
Plusieurs points fondamentaux de la loi de modernisation de la sécurité civile ne sont pas appliqués. Ainsi, l'État se contente de définir une doctrine d'emploi et de coordonner des moyens opérationnels, sans s'intéresser à leur coût ; la Conférence nationale des services d'incendie et de secours ne s'est plus réunie depuis décembre 2007 ; les regroupements de SDIS, envisagés dans le but de mutualiser les moyens, attendent toujours et la commission nationale chargée d'examiner des mesures portant sur le régime des gardes n'a toujours pas présenté son rapport, qui était prévu pour le 1er juin 2007.
La loi de finances pour 2007 a permis, à mon initiative, l'instauration d'une stratégie de performance des SDIS, avec des objectifs et indicateurs permettant la comparaison entre eux. Le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale propose, lui, d'étendre les compétences des préfets de zone de défense et de sécurité. Il faut saisir cette opportunité pour renforcer leur rôle en matière de sécurité civile. L'État doit reprendre la main. La gestion décentralisée a montré ses limites, dont la dérive budgétaire des SDIS est la conséquence. Quant aux crédits du budget de l'État, je vous propose de les voter.
Je partage cette vision assez négative du tableau. En milieu rural en tout cas, une fois qu'on a appelé les pompiers, puis le SAMU, qui ont tous deux répondu que ce n'était pas à eux d'intervenir, on est très vite désemparé. Une partie de la hiérarchie des sapeurs-pompiers utilise en ce sens les incompréhensions qui existent entre les conseils généraux et les préfectures. Or ce sont des vies qui sont en cause. Manifestement, les maires s'interrogent sur le rapport entre les crédits qu'ils accordent et l'efficacité qu'ils en retirent, et ils commencent à considérer qu'ils ont de sérieux problèmes concernant la sécurité de leurs concitoyens. Si le rapporteur constate des dysfonctionnements, ou à tout le moins un manque de performance, il est temps de réagir.
Je me pose beaucoup de questions sur la gouvernance du secteur : depuis qu'on a inversé les rôles des conseils généraux et des municipalités, on a l'impression que de moins en moins de décisions sont prises, que chacun se focalise dans son coin sur ses propres problèmes, et que l'on fait ce qu'on veut au niveau local des orientations nationales. D'autant que la responsabilité a beau appartenir désormais aux conseils généraux, ce sont les mêmes qu'auparavant qui payent – les payeurs ne sont donc pas les décideurs, et n'ont guère de moyens de contrôle.
La fiscalité propre peut être une bonne solution : en matière d'ordures ménagères ou d'eau, par exemple, nos concitoyens comprennent bien le fonctionnement du système. La sécurité civile pourrait suivre le même principe.
Les représentants des sapeurs-pompiers professionnels posent eux-mêmes la question de la gouvernance et du coût du service. On aurait sans doute déjà avantage à clarifier l'ensemble du dispositif, tout en reconnaissant que les communes ont leur mot à dire.
Je m'associe entièrement aux propos de M. Dumont. Il est indispensable pour la sécurité de nos concitoyens de redéfinir la gouvernance du système. Lorsque l'on appelle le 18, par exemple – et peu de gens connaissent la différence avec le 15 –, les pompiers sont censés s'entendre avec le SAMU. Mais, la plupart du temps, ils se déplacent d'office alors qu'il y a des ambulances en astreinte dans les hôpitaux de vingt heures à huit heures du matin, payées 300 euros la nuit par l'assurance maladie !
Je suis également d'accord avec M. Gorges : il faut connaître la dépense réelle. J'ai demandé à faire figurer à titre indicatif, dans le décompte des impôts locaux, le coût par habitant des sapeurs-pompiers. Bercy a refusé sous prétexte que ce serait trop compliqué, mais ça ne l'est pas plus que de calculer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ! Les Français doivent savoir exactement ce qu'ils payent, d'autant que la dépense n'est pas maîtrisée par les départements et encore moins par les communes. Il faut aussi que le préfet de zone intervienne davantage dans la coordination des secours.
Nous sommes arrivés au bout du système de la départementalisation. Le nombre des sapeurs-pompiers professionnels, hors Paris et Marseille, est tout de même passé en ordre de grandeur de 28 000 à 38 000 pour le même nombre d'interventions ! Il est vrai qu'ils n'assurent plus que 95 jours de garde par an, contre 135 il y a dix ans.
Sur des sujets aussi délicats, qui renvoient à des problèmes de compétence et de responsabilité financières, pourquoi ne pas demander au Premier ministre une mission conjointe des diverses inspections générales concernées ?
Peut-être le texte sur la clarification des compétences qu'on nous annonce apportera-t-il quelques réponses, mais il me semblerait de toute façon souhaitable que le Parlement, outre les inspections générales, travaille sur la question. La Cour des comptes pourrait nous y aider.
Le rapporteur spécial soulève une série de très graves questions. En ce qui concerne la gouvernance, on s'égare depuis vingt ans. Le problème est que le ministère de l'intérieur veut diriger une politique qu'il ne finance pas à plus de 10 %, et que la direction de la sécurité civile est peuplée de pompiers qui définissent les règles et les normes et négocient dans le dos des élus des dossiers tels que les revalorisations indiciaires ou le temps de travail. Les élus sont bons pour payer. C'est absolument fou !
Le fonds d'aide à l'investissement est un exemple désastreux. En pratique, on envoie en préfecture des dossiers qui remontent ensuite à la préfecture de zone, à laquelle vingt SDIS se rendent alors pour négocier quelques euros. Mais il y a bien plus grave : le temps de travail, par exemple. J'ai dû me battre sur tous les plans. D'abord, je refuse que ce soit le nombre minimal de gardes qui soit retenu dans la fourchette prévue par le décret. Ensuite, contrairement au rapporteur spécial, je suis favorable au système des 24 heures. Il faut rappeler que les sapeurs-pompiers qui sont logés doivent des jours de travail en contrepartie de la gratuité de leur logement – 25 jours dans mon département, mais 10 ou 15 dans d'autres. La plupart des sapeurs-pompiers ne veulent pas abandonner ce système des 24 heures. Je ne le veux pas non plus car cela coûterait 30 % plus cher aux départements.
Nous avons négocié des équivalences pour les heures de nuit. À Reims, le centre le plus actif de mon département, les pompiers sortent une nuit sur deux – souvent une sur trois ailleurs – et, sur la totalité d'une année, le temps opérationnel journalier moyen est, entre la sonnerie et la rentrée à la caserne, de deux heures dix-sept ! Les pompiers dorment une nuit complète sur deux, voire deux sur trois et, sinon, ils travaillent deux heures dix-sept dans la nuit !
Je suis également favorable à ce que les sapeurs-pompiers professionnels aient des contrats de volontaire : cela nous permet de faire des économies, en ce qui concerne la formation, par exemple.
Il faut absolument faire savoir au Gouvernement qu'il doit être mis fin à cette hausse des coûts. On n'en peut plus ! Il faut le dire, et obtenir un engagement de sa part !
Il ne faut pas jeter le doute sur l'ensemble de la profession, ni sur les volontaires qui s'engagent dans cette oeuvre remarquable, mais un des problèmes majeurs de la gouvernance est que le management des structures est assuré par des gens qui ne sont pas préparés, ni par leur formation, ni par leur expérience professionnelle, à gérer de tels budgets.
Encore une fois, il pourrait s'agir d'un très beau sujet pour une mission d'évaluation et de contrôle, en collaboration avec la Commission des lois.
La Commission adopte les crédits de la mission « Sécurité civile ».