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Intervention de Georges Ginesta

Réunion du 8 octobre 2008 à 10h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Ginesta, Rapporteur spécial :

Le budget de la sécurité civile a fort peu évolué depuis quatre ans, et en tout cas pas dans un sens favorable. Les crédits consacrés au secteur dépassent 5,5 milliards d'euros, mais l'État n'en finance que 965 millions, dont 415 au titre du ministère de l'intérieur. Les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) ont dépensé plus de 4,2 milliards d'euros en 2007, les sapeurs-pompiers de Paris 300 millions et les marins-pompiers de Marseille presque 100 millions. Le total est bien supérieur aux budgets de la culture ou de l'agriculture, et proche de ceux du logement ou de la justice.

Dans la programmation pluriannuelle 2009-2011, les crédits d'État de la sécurité civile sont relativement stables. Ils permettent de financer la rénovation du réseau national d'alerte et de renforcer les moyens de lutte contre les menaces terroristes. La mutualisation des bases d'hélicoptères de la sécurité civile et de la gendarmerie est très utile. Le projet annuel de performances pour 2009 prévoit 448 millions d'euros en autorisations d'engagement et 421 millions d'euros en crédits de paiement. Le fonds d'aide à l'investissement, doté de 24 millions d'euros, pratique encore trop le saupoudrage au détriment des grands projets d'investissement. Les dépenses de carburant et de produits retardants ont été recalculées en fonction de la consommation des dernières années, mais les crédits des colonnes de renfort et des secours d'extrême urgence ne permettraient pas de faire face à des crises graves. Il est vrai qu'en ces matières le budget s'adapte en fonction des circonstances.

La coopération interministérielle doit être renforcée, avec le ministère de l'intérieur comme chef de file. Les services de secours aux personnes – SDIS, SAMU et ambulanciers – ont convenu d'un référentiel commun en vue d'une meilleure articulation et d'une plus grande maîtrise des coûts. Par exemple, les SDIS transportent encore trop de victimes à la place des SAMU ou des ambulanciers. En attendant, l'assurance maladie paye les astreintes des ambulances qui ne sont pas utilisées.

Les comptes de gestion des SDIS ont augmenté seulement de 2 % en 2007 par rapport à 2006, mais la réorganisation comptable intervenue en 2007 a pu avoir des conséquences sur ce taux. Néanmoins, depuis l'achèvement de leur départementalisation en 2001, leurs dépenses ont augmenté de 45,8 % pour seulement 8,4 % d'interventions supplémentaires. Les incendies représentent 8 % des opérations, et le secours 65 %. En pratique, les sapeurs-pompiers ne sont donc plus des « soldats du feu ». Le coût des SDIS représente, en moyenne, 79 euros par habitant – et non par contribuable, puisque les SDIS sont financés par les impôts locaux. Dans certains départements, cette charge par habitant peut être supérieure à la taxe d'habitation.

De telles augmentations deviennent difficilement supportables pour nos concitoyens et grèvent d'autres secteurs tout aussi prioritaires de l'action locale. Il faut faire une pause. Les sapeurs-pompiers professionnels des SDIS étaient 38 700 en 2007 – sans compter les bataillons militaires de Paris et de Marseille – soit 10 000 de plus qu'il y a dix ans. Les casernes sont encore principalement organisées sur la base de gardes de vingt-quatre heures, alors qu'il y a peu d'interventions entre vingt-trois heures et six heures du matin. Avec une moyenne de 95 gardes par an, les sapeurs-pompiers professionnels sont absents de leur lieu de travail 270 jours par an. Remplacer ce système par des gardes de douze ou de huit heures assurerait une meilleure présence et réduirait les ruptures de rythme. Par ailleurs, un très grand nombre de sapeurs-pompiers professionnels exercent des vacations, exonérées d'impôt, en tant que volontaires, et leur taux d'encadrement est extrêmement élevé par rapport à celui de l'armée, par exemple.

Dans notre pays, la grande politique régalienne de sécurité civile est donc définie au niveau national, mais gérée et financée au niveau des collectivités territoriales. On ne peut donc examiner isolément le milliard d'euros que lui consacre l'État. Certes, ce sont les conseils généraux qui votent les crédits des SDIS mais, si le même problème apparaît dans cent départements différents, il devient un problème national qu'il appartient au Parlement de résoudre. La revue générale des politiques publiques ne s'est pas encore penchée sur le problème, mais force est de constater que notre sécurité civile n'a pas de pilote.

Plusieurs points fondamentaux de la loi de modernisation de la sécurité civile ne sont pas appliqués. Ainsi, l'État se contente de définir une doctrine d'emploi et de coordonner des moyens opérationnels, sans s'intéresser à leur coût ; la Conférence nationale des services d'incendie et de secours ne s'est plus réunie depuis décembre 2007 ; les regroupements de SDIS, envisagés dans le but de mutualiser les moyens, attendent toujours et la commission nationale chargée d'examiner des mesures portant sur le régime des gardes n'a toujours pas présenté son rapport, qui était prévu pour le 1er juin 2007.

La loi de finances pour 2007 a permis, à mon initiative, l'instauration d'une stratégie de performance des SDIS, avec des objectifs et indicateurs permettant la comparaison entre eux. Le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale propose, lui, d'étendre les compétences des préfets de zone de défense et de sécurité. Il faut saisir cette opportunité pour renforcer leur rôle en matière de sécurité civile. L'État doit reprendre la main. La gestion décentralisée a montré ses limites, dont la dérive budgétaire des SDIS est la conséquence. Quant aux crédits du budget de l'État, je vous propose de les voter.

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