La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Monsieur le président, j'ai l'honneur de poser la première question de cette année 2012. Vous me permettrez donc, au nom de mon groupe, de vous présenter tous nos voeux de santé et de bonheur, ainsi qu'à toute la représentation nationale, au Gouvernement et à l'ensemble des Français. (Applaudissements sur divers bancs.)
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
L'année 2011 a connu de belles avancées pour nous, centristes : l'adoption de la règle d'or, la suppression du bouclier fiscal, la taxation des hauts revenus, la position du Président de la République et du Gouvernement sur l'Europe et sur la protection de la zone euro.
L'année 2012 démarre sous les meilleurs auspices, puisque le Président de la République a pris l'initiative de taxer, en France tout d'abord, les transactions financières. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.) Cette mesure nous satisfait pleinement, nous, centristes, puisque nous avions déposé de nombreux amendements allant dans ce sens.
C'est une mesure courageuse. La France s'honore en en prenant l'initiative. Elle permet de pointer les dérèglements nombreux liés au monde de la finance, notamment dans la crise que l'on connaît aujourd'hui : il était anormal qu'une TVA soit prélevée notamment sur les produits alimentaires et qu'il n'y ait aucune taxe sur les mouvements des capitaux.
Cette mesure doit prendre une dimension européenne. On ne peut donc que se réjouir de la position de la Chancelière Angela Merkel, qui a donné, à titre personnel, un avis favorable à cette disposition pour la zone euro.
Pouvez-vous vous engager, monsieur le ministre, à ce que la France mette tout en oeuvre pour convaincre, à défaut des vingt-sept États de l'Union, à tout le moins les dix-sept pays de la zone euro d'appliquer cette taxe qui, j'en suis sûr, aura un effet dissuasif, notamment sur la spéculation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le président Lachaud, merci de votre question. Merci de votre engagement de longue date en faveur de cette taxe sur les transactions financières. Merci du soutien que vous apportez au Président de la République depuis de nombreuses années et singulièrement depuis la crise de 2008, où le Président Nicolas Sarkozy a été aux avant-postes de la conquête pour la mise en place d'un dispositif visant à faire en sorte que le système financier contribue à réparer les dommages qu'il a lui-même causés avec le développement d'une industrie financière qui s'est emballée avec subprimes et Lehman Brothers. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Il faut y voir l'aboutissement d'un long combat, dont la France peut s'honorer.
La France a été aux avant-postes dans la négociation au sein du G20. Sous l'impulsion décisive du Président de la République, le président Obama lui-même – nous savons les réticences structurelles, voire culturelles des Américains à l'égard de ce type de taxe – a accepté le principe d'une contribution du secteur financier à la résorption de la crise. C'est la raison pour laquelle, dans le cadre du G20, nous allons poursuivre les discussions sous la présidence mexicaine.
C'est la raison pour laquelle, dès cette année, à l'échelle européenne, nous allons prendre l'initiative de la mise en oeuvre opérationnelle de cette taxe sur les transactions financières.
Le Président de la République en a parlé avec la Chancelière en début de semaine. Je me rendrai moi-même jeudi soir à Berlin pour discuter des détails pratiques de la coopération franco-allemande, sur les modalités, l'objectif et le calendrier à définir en partage.
Vous savez que la directive européenne actuellement en discussion porte sur une assiette large – les actions, les obligations et les produits dérivés – avec un taux faible.
Ce que je peux vous dire, c'est que la France sera le premier pays, cette année, à mettre en oeuvre cette taxe sur les transactions financières. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, le Président de la République a récemment déclaré : « la période actuelle offre à notre pays l'opportunité de prendre des mesures qu'il n'aurait jamais acceptées en dehors d'une période de crise ». Parmi ces mesures figure la TVA sociale, qu'il envisageait déjà en 2007 et qu'il croit pouvoir nous ressortir aujourd'hui dans des conditions telles qu'il s'agit d'un véritable déni de démocratie.
Le transfert du financement de la sécurité sociale des cotisations vers la TVA faussement dénommée « sociale », impôt le plus injuste puisqu'il s'applique à tous au même taux sans tenir compte des revenus, remet en réalité en cause le pacte social républicain de financement solidaire mis en place à la Libération et fondé sur un prélèvement direct à la source sur les richesses créées par le travail dans les entreprises.
Seul le MEDEF saute de joie devant ce nouveau cadeau qui, nous explique sans rire Mme Parisot, permettra d'alléger le coût du travail, donc d'augmenter les salaires et de créer des emplois en améliorant nos performances économiques. Une fable cynique quand 108 milliards d'euros d'exonérations de cotisations sociales accordées au patronat depuis 2007 n'ont pas empêché une augmentation de 1 million du nombre de chômeurs dans la même période !
Ces exonérations n'ont pas davantage conduit à des augmentations de salaires dans un pays où un salarié sur deux gagne moins de 1 500 euros par mois, ni freiné le rythme des délocalisations.
Qui paiera cette augmentation de la TVA ? Celles et ceux qui subissent déjà la hausse des prix de l'alimentation, des transports, du gaz, des mutuelles, et j'en passe.
Monsieur le Premier ministre, jusqu'où envisagez-vous d'aller dans votre entreprise de saignée des citoyens de ce pays ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Allez-vous écouter les 64 % de nos concitoyens qui rejettent cette augmentation de la TVA et renoncer à cette ultime régression sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la députée, la première des injustices, aujourd'hui, dans notre pays, c'est le chômage. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est aussi la première préoccupation des Français. Alors, le Gouvernement a une stratégie pour l'emploi (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), une stratégie constante depuis cinq ans.
Pour améliorer la formation de nos jeunes, nous avons fait adopter la réforme de l'Université. Pour dynamiser l'innovation, nous avons institué le crédit impôt recherche. Pour favoriser l'investissement, nous avons supprimé la taxe professionnelle.
Pour sauver nos entreprises stratégiques, nous avons créé le Fonds stratégique d'investissement.
Alors oui, nous avons une stratégie pour l'emploi et cette stratégie nous allons la poursuivre.
Le Président de la République l'a dit, aujourd'hui il n'est plus supportable que l'intégralité de nos dépenses de solidarité soit supportée par le travail et l'emploi. Alors oui, nous allons baisser le coût du travail.
Nous allons baisser le coût du travail pour que nos produits soient moins chers, pour qu'ils soient produits en France, pour garder nos usines en France, pour réindustrialiser la France.
Contre le chômage, notre stratégie, c'est l'action ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre chargé des transports, la France est une grande puissance économique, notamment grâce à la qualité de ses infrastructures de transport, qu'elles soient terrestres, ferroviaires ou maritimes. Dans cet esprit, la défense du Pavillon France est une cause qui doit nous animer sur tous les bancs de notre hémicycle.
C'est exactement le sens de l'action du Président de la République et du Gouvernement dans le dossier SeaFrance. Depuis plusieurs semaines, en effet, le Gouvernement est mobilisé pour étudier, avec les salariés, toutes les possibilités de préserver l'emploi et l'activité maritime de cette compagnie.
Le schéma de SCOP, porté par certains représentants du personnel, a été attentivement examiné et même encouragé. Par ailleurs, des entreprises se sont manifestées pour prendre leur part à ce sauvetage.
Hier, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation définitive, avec cessation d'activité, de la compagnie maritime. Pour les salariés, dont l'emploi est en jeu, il convient de rester mobilisés pour trouver des solutions.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire comment le Gouvernement compte accompagner les anciens salariés de l'entreprise et favoriser la pérennité de cette activité maritime ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député, quand, hier, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la cessation d'activité de SeaFrance, le Gouvernement a bien eu conscience que c'était 872 familles qui perdaient un travail, et ce malgré sa totale mobilisation.
Le Premier ministre, Jean Leonetti, Nathalie Kosciusko-Morizet et moi-même sommes allés plaider ce dossier à Bruxelles, où des aides ont été refusées par le commissaire à la concurrence, l'un de vos amis socialistes espagnols, mesdames, messieurs. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Malgré cela, nous avons essayé, avec l'entreprise Louis Dreyfus, de concevoir un plan pour recaser, vous le savez, 600 personnes. Ce plan a été refusé à cause de l'attitude du syndicat local.
Mais, aujourd'hui, tout cela, c'est de l'histoire ancienne. Notre devoir, c'est de retrouver un emploi pour chacun des 872 salariés de SeaFrance.
Nathalie Kosciusko-Morizet est en ce moment à Calais pour rencontrer les représentants du personnel. J'étais ce matin avec le président de la SNCF et le président de Pôle emploi et j'ai eu un contact avec le président d'Eurotunnel. Sachez que nous explorons toutes les pistes qui nous permettront de proposer un emploi digne à chacun de ces 872 salariés. La SNCF, dès demain, proposera 500 emplois à ces salariés. Le groupe Louis Dreyfus a déjà dit qu'il était prêt à prépositionner deux bateaux avec 300 emplois. Enfin, j'étais encore il y a quelques minutes avec Jacques Gounon, le président d'Eurotunnel, pour explorer une nouvelle piste.
Dans ce dossier, le Gouvernement est déterminé à trouver une vraie solution, pas comme celle que les syndicats de SeaFrance qui sont allés au siège du parti socialiste se sont vu proposer, c'est-à-dire de prendre simplement 100 euros d'actions.
Nous, c'est chacun des 872 emplois qui nous intéresse. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Monsieur le Premier ministre, comme nos concitoyens, j'attache la plus grande importance à la cohérence et à la parole donnée (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Or, face à la multiplication des propositions de dernière minute du candidat Nicolas Sarkozy, nous ne savons plus si nous sommes dans le registre de l'improvisation ou dans celui du parjure. (Vives exclamations sur les mêmes bancs.)
Je pourrais vous interroger sur la taxe sur les transactions financières, d'abord condamnée, puis brandie comme un étendard avant d'être ravalée au simple rétablissement de l'impôt de bourse, impôt que vous aviez vous-même supprimé en 2008…
Mais je me limiterai à vous demander une réponse sur un seul sujet d'actualité : la hausse de la TVA. Votre grande promesse fut celle du pouvoir d'achat. En 2007, Nicolas Sarkozy précisait, par la voie d'un communiqué solennel de l'Élysée : « Le Président de la République n'acceptera aucune augmentation de TVA qui pourrait avoir pour effet de réduire le pouvoir d'achat des Français. »
Que s'est-il passé depuis ? Vous avez déjà augmenté la TVA au 1er janvier ; quelle obscure raison peut donc justifier une nouvelle augmentation massive et un allègement des cotisations patronales dont la charge serait transférée sur les familles, les salariés, les retraités et les chômeurs ?
Monsieur le Premier ministre, force est de constater que le quinquennat auquel vous participez activement, en première ligne, a commencé au Fouquet's, avec le bouclier fiscal (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), et qu'il risque de s'achever avec la TVA à 24 %, en d'autres termes avec un troisième plan d'austérité qui ne veut pas dire son nom ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Les Français n'en peuvent plus de cette politique ! Ils doivent savoir qu'avec François Hollande, nous reviendrons sur cette mesure. Nous voulons le changement maintenant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le président Jean-Marc Ayrault, permettez-moi d'abord de vous souhaiter une bonne année…
…et beaucoup de courage, notamment pour convaincre les Français de cette remise en cause de la totalité du programme porté par François Hollande ! Car si vous vous interrogez sur tel ou tel projet gouvernemental, nous, nous nous posons des questions sur la totalité de ce que pensent les socialistes : Quelle est votre ligne sur la retraite à soixante ans ? Quelles sont vos propositions définitives sur l'éducation nationale ? Où en êtes-vous sur les emplois aidés ? Que pensez-vous désormais de la réforme fiscale et de la fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu ? Nous n'en savons rien !
Face à cela, nous proposons, jusqu'à la fin du quinquennat, de l'action, toujours de l'action, encore de l'action, pour garantir la compétitivité de notre économie.
Oui, il y aura un rendez-vous parlementaire dans le courant du mois de février pour discuter de la compétitivité de notre économie.
Cette crise n'est pas banale : elle est mondiale et touche toutes les économies. Ce n'est pas une parenthèse, c'est un tournant. Et ce tournant, nous devons l'aborder de front, sur les deux piliers : la réduction des déficits publics et la réduction de notre endettement.
Depuis trois ans, méthodiquement, mécaniquement, nous sommes au rendez-vous des engagements que nous avons pris vis-à-vis des Français, de nos partenaires et de la communauté internationale. Le Premier ministre l'a annoncé lui-même : nous serons en dessous des objectifs annoncés en matière de déficits publics.
Nous sommes animés du même volontarisme et de la même détermination pour ce qui concerne le soutien à la croissance. Oui, il y aura un rendez-vous sur le financement de la protection sociale ; oui, il y aura un rendez-vous sur le financement des moyens ; oui, il y aura un rendez-vous sur les moyens de préserver l'emploi et de lutter contre les délocalisations ; oui le Gouvernement et sa majorité seront à ce rendez-vous avec les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
TVA
La parole est à M. Jérôme Cahuzac, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, le président Jean-Marc Ayrault vous a posé une question, mais M. Baroin a répondu à votre place sans fournir les éléments demandés. Je me permets donc de vous interroger à nouveau pour savoir si, oui ou non, le Gouvernement que vous dirigez a l'intention de proposer au Parlement une augmentation de la TVA de trois points pour compenser la trentaine de milliards d'euros que représente la baisse des charges pesant sur les entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Si tel est le cas, monsieur le Premier ministre, on peut craindre que vous ne vous déjugiez une deuxième fois. Je me permets en effet de citer ce que vous déclariez en février 2011 : « On parle de convergence avec l'Allemagne mais, Berlin ayant relevé sa TVA, les taux français et allemands sont à peu près équivalents. Si on augmente notre TVA, on se redécale par rapport à l'Allemagne. Plutôt que de réfléchir à une augmentation des recettes fiscales, mieux vaut se concentrer sur “diminuer les dépenses”. »
Le Parlement a examiné l'année dernière les deux plans de rigueur Fillon I et Fillon II, qui ont abouti à une augmentation des impôts de plus de quinze milliards d'euros en 2012 et à une diminution des dépenses d'un peu moins de trois milliards d'euros. C'était déjà une première façon de vous déjuger – certains iraient même jusqu'à parler de reniement. Avez-vous l'intention de vous déjuger ou de vous renier une deuxième fois, en proposant une hausse de la TVA dont l'effet sur la compétitivité serait sinon nul, du moins tout à fait marginal, de l'ordre de 1 à 2 % ?
S'il s'agit d'être compétitif par rapport à l'Asie où les salaires sont dix à quinze fois moindres, cette mesure sera sans effet ; s'il s'agit d'être compétitif par rapport à la zone dollar, sachant que le dollar fluctue de plus ou moins 10 % par rapport à l'euro plusieurs fois par mois, elle sera également sans effet.
Quant à l'Allemagne, ses entreprises enregistrent des gains de productivité de 3 à 4 % par an : autant dire que votre mesure, là encore, sera sans effet.
Monsieur le Premier ministre, si vous augmentez la TVA, il vous faudra geler les salaires, les pensions et contrôler les prix. Pouvez-vous donc nous indiquer si, oui ou non, vous augmentez la TVA et si, en conséquence, vous gelez les salaires, les pensions et les prix ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président Jérôme Cahuzac, qui a dit : « Nul ne doute de l'amélioration de la compétitivité des entreprises qui résulterait de l'instauration d'une TVA sociale » ? Manuel Valls, porte-parole du candidat socialiste François Hollande ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je crois donc, mesdames et messieurs les députés du parti socialiste, que vous n'êtes pas les mieux placés pour critiquer la décision qu'a prise le Président de la République de réformer le financement de notre protection sociale, afin qu'il cesse de peser sur l'emploi.
La stratégie du Gouvernement est claire, je vous la répète : nous voulons baisser le coût du travail, pour que nos produits soient moins chers, pour que nos entreprises puissent investir, embaucher, augmenter les salaires et exporter. Nous voulons que les produits importés des pays à bas coûts de production soient davantage taxés et contribuent au financement de notre protection sociale.
Monsieur Cahuzac, vous aimeriez que je vous dise aujourd'hui ce qui va découler du sommet de crise au cours duquel le Gouvernement rencontrera les partenaires sociaux. Mais nous sommes pour l'heure dans le temps de la concertation : rien n'est arrêté, rien n'est tranché. Soyez néanmoins assuré que le Gouvernement prendra ses décisions et ses responsabilités avant l'élection présidentielle : parce que nous, nous ne nous défaussons pas lorsque l'intérêt général est en jeu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, il est quelques politiques publiques qui font consensus entre la droite et la gauche. C'est le cas de la retraite par répartition et du quotient familial, auquel nous avons collectivement décidé, depuis 1945, de ne pas toucher.
Grâce à notre politique familiale, notre pays détient le meilleur taux de natalité et le meilleur taux de professionnalisation des femmes en Europe.
Le quotient familial est l'un des piliers de cette politique, car il place l'enfant au coeur du dispositif. Le remettre en cause, comme l'envisage M. Hollande, qui voudrait purement et simplement le supprimer (Huées sur les bancs du groupe UMP), c'est d'abord opposer les familles entre elles en ouvrant un débat de lutte des classes là où il y avait consensus jusqu'à présent. Des familles qui, aujourd'hui, ne paient pas d'impôt parce qu'elles ont des enfants à charge, en paieraient demain. (Mêmes mouvements.) C'est aussi mener une politique de redistribution sur le dos des enfants. (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.) Monsieur le Premier ministre, dans ce contexte, il est essentiel que le Gouvernement réaffirme avec force son soutien au quotient familial, dont la suppression serait une attaque sans précédent contre la politique familiale française. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur Christian Jacob, vous faites part au Gouvernement de votre inquiétude concernant la proposition de François Hollande de supprimer le quotient familial. Permettez-moi de vous dire que cette inquiétude, je la partage (« Ha ! » sur les bancs du groupe SRC), car cette proposition serait un véritable coup de massue sur les classes moyennes et sur les familles. En effet, 4,5 millions de ménages seraient concernés par une augmentation d'impôt moyenne de 1 000 euros. C'est à partir de trois SMIC que les familles seraient taxées. Retenez bien ce chiffre, il vous rappelle peut-être quelque chose : en 2007, François Hollande avait déclaré qu'un ménage est riche en France dès lors qu'il gagne 4 000 euros !
Cette proposition de supprimer le quotient familial repose sur une vision totalement erronée de la politique familiale française, laquelle figure parmi les plus généreuses au monde mais aussi parmi les plus justes en ce qu'elle favorise les familles modestes. L'allocation de rentrée scolaire, les aides aux modes de garde, les aides aux parents isolés, les aides au logement sont versées sous condition de ressources. Les plus fragiles sont protégés. C'est pour cette raison que la France détient le taux de natalité le plus élevé d'Europe, qui est l'un des leviers majeurs de notre croissance. Nous, nous n'abattrons pas une conquête sociale qui est aussi notre meilleur atout pour l'avenir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Patrick Braouezec, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine
Monsieur le ministre du travail, depuis plusieurs années, différents plans en faveur de l'emploi des jeunes et des seniors se succèdent. Même s'ils restent sans succès, ils dénotent une certaine intention. Or rien de tel pour l'emploi des femmes alors qu'elles représentent plus de la moitié de la population. Leur taux de chômage apparaît moins préoccupant que celui des hommes alors que la crise et l'austérité les frappent plus durement.
Outre le chômage, l'emploi à temps partiel a partout fortement augmenté. Les femmes, surreprésentées dans ces catégories d'emploi, ont subi des réductions forcées de leur durée de travail et de leur rémunération. Elles sont aussi les plus touchées au sein de la fonction publique par les réductions d'effectifs. En France, comme dans toute l'Europe, les femmes sont les premières concernées par l'insécurité et la précarité croissantes de l'emploi et par les bas salaires. C'est d'ailleurs pourquoi j'ai déposé avec le groupe GDR une proposition de révision constitutionnelle visant à inscrire dans la Constitution l'égalité salariale entre les hommes et les femmes.
Dans une résolution de juin 2010, le Parlement européen avait même attiré l'attention du Conseil européen et de la Commission en soulignant les répercussions particulièrement négatives de la crise sur les femmes, davantage exposées à la précarité de l'emploi.
Il s'agit bien ici de dénoncer le fait que la question de l'emploi des femmes est ignorée, occultée, absente de la scène politique, mais aussi de dénoncer les priorités que ce gouvernement impose sans se préoccuper des inégalités provoquées par sa propre politique. Au moment où certains candidats ou certaine candidate préconisent le retour de la femme au foyer, il convient d'affirmer avec force que le droit au travail des femmes, comme des hommes, est un enjeu majeur de société.
Quand les discriminations dans le monde du travail faites aux femmes cesseront-elles et pour quelle raison n'en avez-vous pas fait la priorité de votre fin de mandat ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.
Monsieur le député, vous constatez avec raison que, même si la question de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes a progressé, ce chantier reste encore devant nous. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé, lors de la loi portant réforme des retraites, dans son article 99, d'imposer un nouveau dispositif qui oblige les entreprises de plus de cinquante salariés à élaborer un plan d'action ou à signer des accords avec les organisations syndicales pour établir l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Si l'objectif n'est pas atteint, des sanctions fortes seront appliquées puisque les pénalités peuvent aller jusqu'à 1 % de la masse salariale. De même, des indicateurs de performance doivent être fixés pour suivre la question de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes au sein de ces entreprises.
J'ai engagé un dialogue approfondi avec les organisations syndicales pour aller encore plus loin et parfaire la notion d'égalité professionnelle ainsi que l'égal partage des tâches familiales.
D'autres dispositifs sont à l'oeuvre comme le label Égalité, qui récompense les entreprises performantes, ou le fonds de garantie à l'initiative des femmes.
Je veux vous dire avec force que préserver l'emploi entre les hommes et les femmes et l'égalité passe par une politique familiale qui a fait ses preuves. Le conseil d'analyse stratégique a d'ailleurs félicité le Gouvernement pour son plan de création de places de garde. Dans ce domaine, et pour aller dans le sens défendu par Valérie Pécresse, il serait inconséquent de revenir sur un élément majeur de notre politique familiale : le quotient familial. J'espère, monsieur Patrick Braouezec, que vous condamnerez formellement les propositions de M. Hollande. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
M. le Premier ministre ayant évité de répondre à Jean-Marc Ayrault comme à Jérôme Cahuzac, et M. Baroin, chargé de répondre à Jean-Marc Ayrault, ayant esquivé la question, je la lui repose.
Répondant en février de l'année dernière à une question sur la TVA sociale proposée alors par l'UMP, vlous déclariez, monsieur le le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie : « Je ne suis pas favorable à cette mesure. Il faudrait un effort très conséquent d'augmentation de la TVA pour que cela ait un impact, (...) et qui peut imaginer qu'une [telle] augmentation (...) de la TVA n'aurait pas des conséquences dramatiques sur notre activité économique ? ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
À l'époque où vous prononciez ces mots, notre économie n'allait pas bien, mais il y avait encore un peu de croissance. Et pourtant, vous remarquiez déjà avec raison qu'« alourdir la fiscalité sur la consommation serait faire prendre un risque à la reprise de l'activité ».
En ce début d'année, la croissance s'effondre, parce que, selon l'INSEE, le pouvoir d'achat baisse déjà fortement. Ne croyez-vous pas qu'en augmentant la TVA vous allez enfoncer de façon dramatique – pour reprendre votre expression – notre pays dans la récession ?
Toujours il y a un an, vous déclariez : « Il n'y aura pas d'augmentation d'impôt d'ici la fin de la législature, ni l'impôt sur le revenu ni la TVA. » Vous avez pourtant accru le premier de 1,5 milliard pour 2012, et vous venez d'augmenter la seconde de 1,8 milliard, et vous allez continuer. Qui faut-il croire ?
Mes chers collègues, nos concitoyens l'auront compris : s'ils veulent retrouver l'espoir, il y a urgence à changer de Président ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le député Pierre-Alain Muet, permettez-moi d'abord de vous féliciter de puiser auprès des bons auteurs les excellentes citations qui nourrissent votre réflexion !
Je ne rappelle pas l'eau écarlate qui est tombée sur le projet socialiste : aujourd'hui, c'est une page blanche, vous avez tout à réécrire. Il vous reste deux mois : bon courage et bonne chance ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Augmenter la TVA n'est pas en soi un projet politique. Le projet politique, c'est baisser le coût du travail, préserver l'emploi, produire en France, lutter contre les délocalisations.
J'ai été – puisque vous avez eu l'amabilité de me citer – l'un des premiers auteurs d'un texte qui n'a malheureusement pas été mis en discussion. Nous étions alors au début des années 90. Étant l'élu d'un département qui a perdu 1 000 emplois par an pendant vingt ans dans l'industrie du textile, la lutte contre les délocalisations, je connais. Mais je connais aussi, malheureusement, les limites des mesures que les uns et les autres avons été amenés à prendre.
C'est la raison pour laquelle la crise, d'une envergure mondiale avec une accélération à partir du mois d'août qui a frappé toutes les économies, nous amène naturellement à réfléchir de manière sincère, objective, nouvelle, à explorer de nouvelles frontières afin d'atteindre un objectif simple : protéger l'emploi en France, nos industries et la production française, baisser le coût du travail, être plus compétitif et, ainsi, retrouver le chemin de la croissance durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Président, mes chers collègues, ma question, à laquelle j'associe mon collègue et ami Jean-Sébastien Vialatte, député de La Seyne-sur-Mer, s'adresse à Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé.
Madame la secrétaire d'État, l'affaire des prothèses et implants frauduleux développés, fabriqués et commercialisés par la société Poly Implant Prothèse suscite colère et légitime inquiétude...
..parmi la population des 300 000 femmes porteuses de prothèses mammaires de cette marque. Parmi elles 30 000 sont françaises – rappelons que cette affaire ne concerne pas que notre pays, puisque près de 90 % de la production de la société PIP étaient destinés à l'export.
Depuis mars 2010, il ne se passe pas une semaine sans que soient apportées de nouvelles révélations sur la façon dont cette entreprise a organisé une escroquerie d'une telle ampleur. Aujourd'hui, que répondre et comment répondre aux angoisses de ces milliers de femmes ?
Madame la secrétaire d'État, je vous demande solennellement en leur nom de rappeler les préconisations et mesures que vous avez déjà prises pour faire face à ce problème de santé publique, en particulier en ce qui concerne la prise en charge de l'explantation des prothèses défectueuses et leur remplacement, mais aussi de nous informer de celles que vous comptez mettre en place à l'avenir pour faire en sorte qu'il ne soit désormais plus possible, dans notre pays, de mettre en place une fraude de cette envergure. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député Vitel, nous sommes, vous l'avez dit, face à une pratique frauduleuse qui a trait à la fabrication des prothèses PIP et qui concerne 30 000 femmes sur notre territoire. Sensibles à l'anxiété de ces femmes, nous avons, avec Xavier Bertrand, réactivé dès le mois de novembre le numéro vert, numéro de téléphone d'information, pour répondre à leur préoccupation.
Que nous disent les experts sur les risques sanitaires ? Tout d'abord qu'il n'y a pas de risque accru de cancer lié à ces prothèses. Néanmoins, le risque de rupture et le pouvoir irritant du gel utilisé sont bien établis. Au vu de ces éléments, nous avons immédiatement réagi et, dès la fin de l'année 2011, nous avons préconisé à titre préventif le retrait de ces prothèses pour toutes les femmes. L'explantation sera totalement prise en charge par l'assurance maladie ; encore faut-il organiser l'accueil de ces femmes sur l'ensemble du territoire. À cet effet, nous avons mobilisé les agences régionales de santé pour éviter les listes d'attente.
Afin qu'un tel événement ne se reproduise pas, vous m'avez demandé ce qu'il fallait faire.
D'abord, la loi « médicament » a permis de renforcer la sécurité sanitaire des médicaments ; elle s'applique aussi aux dispositifs médicaux. Par ailleurs, il faut accroître le nombre des contrôles et en renforcer les modalités. À cet effet, nous devons porter l'évolution de la réglementation au niveau européen : c'est ce que nous avons précisément commencé à faire avec Xavier Bertrand. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
De l'action, toujours de l'action, encore de l'action : voilà ce que les ministres nous répètent depuis de début de la séance. Quand cette action se traduit par 1 million de chômeurs supplémentaires en cinq ans et 600 milliards d'euros de déficit supplémentaire, il serait peut-être temps d'arrêter les dégâts ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Quant à M. le président du groupe UMP, qui trouve des accents de lutte des classes dans la réforme pourtant juste du quotient familial, je suis étonné que les mêmes mots ne lui soient pas venus à l'esprit quand le Gouvernement et la majorité ont voté le paquet fiscal ou la réforme de l'impôt sur la fortune. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
C'est le moment que vous choisissez pour ouvrir un débat sur la TVA dite « sociale ». Je rappelle que, dans un rapport récent, le Conseil économique et social montre que pour l'industrie manufacturière, le coût du travail horaire en Allemagne s'élève à 33,37 euros contre 33,16 euros en France. Le Conseil économique et social rappelle aussi que la productivité de la main-d'oeuvre française est supérieure à celle de la main-d'oeuvre allemande, soit en termes d'indice 120,1 contre 105,2. Si la France a un problème de compétitivité, il s'agit d'un problème hors coût notamment dû à l'effort de recherche et développement inférieur de 30 % dans notre pays à celui enregistré en Allemagne. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Ainsi, non seulement votre projet est injuste mais votre diagnostic est faux, et il vous amène à conduire une politique qui donne les résultats désastreux que nous constatons.
L'augmentation de la TVA va frapper tous les Français et tous les produits, et d'abord nos concitoyens qui n'ont pour vivre que leur retraite ou leurs indemnités de chômage. C'est d'ailleurs ce que pensait M. Christian Estrosi qui déclarait lorsqu'il était ministre : « Faire basculer les cotisations sociales payées par quelques-uns sur une TVA sociale payée par tous serait contre-productif. » Nous allons l'écouter…
..et François Hollande lui aussi s'inspirera de cette remarque. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Si je puis me permettre, monsieur Vidalies, vous commettez plusieurs erreurs. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
La première porte sur le coût du travail. Aujourd'hui, en France, lorsque l'on paie 100 euros de salaire, on paie aussi 50 euros de charges sociales alors que celles-ci ne sont que de 39 euros en Allemagne. Vous avez décidé de nous comparer avec l'Allemagne ; c'est pourtant la comparaison qui nous est la plus défavorable. En effet, Mme Merkel l'a répété hier au Président Nicolas Sarkozy, l'Allemagne a déjà fait une réforme du financement de sa protection sociale pour qu'il ne repose plus sur les salaires et sur l'emploi.
Vous faites une deuxième erreur : les Allemands ont effectué le transfert des charges sociales vers la TVA.
Aujourd'hui, nous consultons les partenaires sociaux. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Un sommet sur la crise nous réunira et, à l'issue de ce sommet, nous prendrons des décisions.
D'ores et déjà, je peux vous le dire, nous baisserons le coût du travail.
Monsieur Vidalies, vous faites une troisième erreur. Vous nous dites que nous n'avons rien fait pour doper l'innovation et la recherche dans les entreprises privées. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe SRC.) Comment pouvez vous dire cela ? Dans les trente dernières années, jamais un Gouvernement n'a autant investi dans l'enseignement supérieur et la recherche. Vous le savez mieux que quiconque ! Nous avons triplé le crédit impôt recherche et, permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire, vous avez voté contre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Elle s'inscrit dans le prolongement de celle posée par le groupe Nouveau Centre et pas dans celui de celle du groupe SRC.
Au moment où les crises financières et les dettes souveraines appellent des décisions promptes et courageuses, le Président de la République s'attache à faire avancer à grands pas le chantier d'une taxation des transactions financières.
Ainsi hier, il a rencontré la Chancelière allemande Angela Merkel, qui s'est déclarée personnellement favorable à cette mesure, même si le Bundestag n'est pas tout à fait prêt pour sa mise en oeuvre. La Commission européenne souhaite faire aboutir, elle aussi, une taxation puisqu'elle a mis sur la table ce dossier que la France avait déjà ouvert lors du G 20. Il ne s'agit donc pas, pour la France, de prendre une mesure de façon isolée, mais bien d'être à l'avant-garde de ce combat majeur.
Ce n'est pas la première fois que la France a un tel rôle précurseur en matière fiscale. J'en veux pour preuve la taxe de solidarité sur les billets d'avion mise en place en 2006 par le Président Jacques Chirac. Aujourd'hui, nombre de pays ont rejoint cette initiative partout dans le monde.
Dans la période d'instabilité financière et bancaire que nous traversons, les classes moyennes sont durement mises à contribution. Aussi, la taxation des transactions financières sera une mesure d'équité fiscale. Les spéculateurs et les professionnels des marchés doivent, eux aussi, contribuer à résorber les crises actuelles.
Monsieur le ministre, pouvez-vous informer la représentation nationale des modalités et du calendrier envisagés pour cette réforme ?
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le député, vous avez évoqué la décision prise par le Président Jacques Chirac de créer une taxe sur les billets d'avion afin, notamment, de financer la distribution de médicaments aux plus démunis dans les pays en voie de développement. Je me souviens qu'à l'époque les réactions étaient aussi vives et intenses qu'elles le sont aujourd'hui pour ce qui concerne la taxation des transactions financières. On nous expliquait alors que cette taxe mettrait la France en faillite. Résultat : cette taxe est aujourd'hui un succès et elle s'est développée. Les pays autrefois réservés ont embrayé sur le chemin éclairé par la France.
Le même esprit nous anime et anime le Président Sarkozy pour la mise en place de la taxe sur les transactions financières. Trois raisons nous motivent, qui sont d'ordre budgétaire, économique et moral.
Oui, il est moral de demander aux acteurs de l'industrie financière, qui portent une part de responsabilité dans les errements dans lesquels le monde a malheureusement été entraîné par la crise économique et financière, d'apporter un complément, une contribution, une addition. Celle-ci sera demandée selon des modalités et un calendrier coordonnés à l'échelle européenne, mais il y aura un poste avancé. Il est incontestable que si nous attendons un consensus et un accord mondial, cette taxe ne se fera pas.
Il est donc incontestable que des pays doivent prendre l'initiative. Comme il s'agit d'une conviction forte et que nous travaillons main dans la main avec l'Allemagne, la Chancelière et le Président Nicolas Sarkozy nous ont mandatés, mon homologue Wolfgang Schäuble et moi-même, pour faire des propositions. Nous avançons parallèlement à la proposition de la Commission européenne et j'ai déjà évoqué, à l'instar du Premier ministre, la volonté de disposer d'une assiette large et de fixer un taux bas. La France sera le premier pays à mettre cette taxe en place au cours de l'année 2012. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Laurence Dumont, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Madame la ministre du budget, poursuivons le florilège des citations de membres de la majorité, puisque l'actualité le réclame. Qui a dit : « La TVA sociale, en l'état de la croissance en France et sans un accompagnement très ferme en matière de maintien des prix, ne serait pas propice en ce qu'elle serait facteur d'inflation » ? Votre prédécesseure, Christine Lagarde ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
À quatre mois de la présidentielle, ce que votre majorité a repoussé, à juste titre, pendant quatre ans deviendrait un remède miracle à la crise. Ce prétendu remède – cette potion amère, plutôt – va, une fois de plus, sanctionner les foyers modestes, qui, après deux plans de rigueur, subiront de plein fouet cette augmentation de TVA.
Plusieurs députés du groupe UMP. Mensonge !
Car ce que vous proposez n'est rien d'autre qu'une nouvelle augmentation de la TVA, que l'on ne saurait qualifier de sociale, puisque, pesant davantage sur les petits revenus, c'est l'impôt le plus injuste. Appelez-la donc par son vrai nom : la « TVA Sarkozy » !
Vous allez encore dégrader le pouvoir d'achat des Français qui dépensent tout leur revenu pour vivre, alors que les plus fortunés, eux, pourront continuer à épargner.
Depuis le début de la législature, votre credo reste le même : toujours plus pour ceux qui ont déjà tout et toujours moins pour ceux qui ont le moins. Demandez donc ce qu'ils en pensent aux salariés du laboratoire Scherin-Plough, à Hérouville-Saint-Clair, qui se battent pour leurs emplois. Leur entreprise dégagera plus de bénéfices ; eux paieront les taxes pour financer les actionnaires !
Madame la ministre, ces salariés vous diraient qu'il faut le changement maintenant, car les Français n'en peuvent plus de vos réformes injustes, incohérentes et improductives. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la députée, j'entends, depuis une heure maintenant, les arguments de l'opposition, qui reposent sur un contresens absolu. Vous voulez en effet faire croire aux Français qu'avec cette réforme du financement de la sécurité sociale, nous allons augmenter les impôts. (Applaudissements et vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) C'est un mensonge, c'est totalement faux ! Nous allons baisser le coût du travail et transférer la baisse des charges sociales vers d'autres modes de financement. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame Dumont, il s'agit d'un jeu à somme nulle.
Ce n'est pas une mesure anti-déficit ; c'est une mesure de compétitivité, destinée à protéger l'emploi. Vous voulez faire croire aux Français que nous allons augmenter la fiscalité sur ce point, c'est faux !
Face à la crise et au chômage, deux stratégies sont possibles : la nôtre, celle de l'action, qui consiste à jouer cartes sur table, et celle de l'opposition, qui consiste à avancer masqué, à ne rien dire et à dissimuler ses propositions afin de ne pas avoir à dire qu'aujourd'hui, pour réduire la dette et les déficits, il faut baisser les dépenses.
Vous ne dites pas la vérité aux Français, et cette séance le prouve ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Jean-Paul Garraud, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire
Monsieur le garde des sceaux, ce soir, nous commencerons à débattre du projet de loi sur l'exécution des peines. Il s'agit d'un sujet d'importance, car chacun comprend que les peines prononcées par les juridictions doivent être intégralement exécutées dans de brefs délais.
Notre majorité conduit une politique volontariste en la matière. Dois-je rappeler le programme « 13 200 places de prison », lancé dès 2002, ainsi que la création des établissements pour mineurs et des centres éducatifs fermés ? Dois-je rappeler toutes les lois que nous avons adoptées et qui multiplient les possibilités offertes aux juges de prononcer les peines les plus adaptées à la gravité des faits et à la personnalité de leurs auteurs ? Ces lois mêlent prévention et répression : aménagement des peines et alternatives à l'incarcération pour ceux qui s'engagent vraiment dans un parcours de réinsertion, multiplication des mesures de sûreté, de contrôle et de contrainte pour ceux qui sont enracinés dans le crime et qui présentent toujours une certaine dangerosité.
Ces lois étaient nécessaires, car il fallait agir après la terrible inertie des gouvernements de gauche. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il fallait ne pas faire comme eux, ne pas céder à l'idéologie, mais être réaliste, dans l'intérêt de nos concitoyens et des victimes dont nous avons fait progresser les droits, ce qui n'est que justice.
Aujourd'hui, il faut aller encore plus loin, programmer la justice de demain et nous engager pour l'avenir. Grâce à ce projet de loi, 3,5 milliards d'euros et près de 7 000 emplois équivalent temps plein permettront, non seulement de construire et de restaurer 24 000 places de prison supplémentaires, mais aussi de créer de nouveaux centres éducatifs fermés, des établissements pour les courtes peines et des cursus de formation pour les futurs experts psychiatres, d'augmenter le nombre des médecins coordonnateurs, de généraliser les bureaux d'exécution des peines et les bureaux d'aide aux victimes. Mais ce texte comporte bon nombre d'autres dispositions.
Monsieur le garde des sceaux, pourriez-vous faire état devant représentation nationale de ce vaste et indispensable chantier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur le député, ainsi que vous venez de le rappeler, le Gouvernement de François Fillon et le Parlement ont essayé, tout au long de la législature, de donner à la justice l'effectivité et la crédibilité dont elle a besoin.
Bien sûr que si, monsieur le député !
Le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui participe de cette recherche de la crédibilité de la justice, à l'instar du texte entré en vigueur au 1er janvier qui associe les citoyens aux tribunaux correctionnels pour juger les délits les plus graves. Cette appropriation de la justice par nos concitoyens est essentielle.
Ainsi que vous l'avez rappelé, le Parlement a doté notre pays d'un droit pénal adapté à la délinquance actuelle. Les magistrats, dont il faut saluer le travail, appliquent la loi telle qu'elle a été votée.
Aujourd'hui, il nous appartient, après la mise en oeuvre des programmes antérieurs – notamment le programme « 13 200 », lancé par Dominique Perben et dont nous achevons la réalisation –, de faire en sorte que toutes les décisions de justice soient appliquées. Tel est l'objectif du projet de loi que vous examinerez aujourd'hui. Il s'agit non seulement de créer un certain nombre de places de prison, adaptées à la durée de la peine – car on n'a pas besoin du même établissement selon que les peines sont longues ou courtes –, mais aussi de permettre l'application de toutes les autres formes d'exécution des peines.
Par ailleurs, ce texte comporte une disposition essentielle – peut-être la meilleure du projet de loi – sur l'évaluation de la dangerosité. Monsieur Garraud, je suis certain que, grâce aux enrichissements que vous apporterez au projet de loi en votre qualité de rapporteur, nous travaillerons pour le bien de la justice. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, je voudrais rassurer Mme la ministre du budget, mais aussi lui rappeler quelques vérités. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Au sujet de la taxation sur les transactions financières, j'ai procédé à une recherche qui m'a permis de relever qu'au cours des dix-huit derniers mois, nous avons proposé neuf fois de l'adopter, lors de l'examen de chaque loi de finances. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Aucun député de la majorité n'a jamais voté notre proposition, et lorsqu'elle a enfin été adoptée par le Sénat, vous vous êtes empressés de la détricoter en deuxième lecture ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez raison, madame la ministre, il faut dire la vérité aux Français. En ce qui concerne la TVA, une chose est sûre, c'est que vous l'avez déjà augmentée au mois de décembre, en faisant passer son taux réduit de 5,5 % à 7 %, et pas sur n'importe quoi : sur les ordures ménagères, l'assainissement, les services à la personne, les transports publics, y compris scolaires, et le logement social.
Pour ce qui est de votre troisième rafale, votre troisième plan de rigueur sur la TVA sociale, je voudrais citer, moi aussi, les paroles de Jean-François Copé (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC) qui disait, en février 2010 : « opérer un tel transfert n'est pas sans danger dans notre pays, où la croissance est largement portée par la consommation. D'autant plus que cela éroderait le pouvoir d'achat des Français, à commencer par celui des retraités ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
C'est vrai qu'il faut dire des vérités, mes chers collègues ! Et le changement, la justice sociale et fiscale, c'est pour maintenant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, je vous remercie de votre question, qui me donne l'occasion de parler de la politique budgétaire de notre pays.
Vous avez évoqué la hausse de la TVA à taux réduit, décidée dans le cadre du plan de réduction des déficits…
…exposé par le Premier ministre le 24 novembre 2010. Permettez-moi de vous dire, monsieur Eckert, que, grâce à la réactivité du Gouvernement (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC), j'ai de bonnes raisons de penser que, non seulement nous tiendrons notre objectif de réduction du déficit public de 7,1 % à 5,7 % en 2011, mais nous ferons certainement mieux encore. Nous tiendrons notre objectif de réduction des dépenses mieux que prévu, puisque le budget de l'État va afficher, pour 2011, 4 milliards d'euros de déficit de moins que ce que nous avions prévu.
C'est évidemment dû à la gestion extrêmement serrée des dépenses, une gestion économe, crédible et sincère, qui permet d'apporter un démenti cinglant à l'opposition, qui a toujours mis en doute notre stratégie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Patrick Beaudouin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Marc Laffineur, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense et des anciens combattants.
L'année 2011 aura été particulièrement exigeante pour nos armées, avec près de 12 000 soldats engagés dans une quinzaine d'opérations essentiellement extérieures. Les succès remportés en Côte d'Ivoire et en Libye, les progrès enregistrés en Afghanistan font notre fierté à tous, tout comme l'action de nos forces sur le territoire national, par exemple dans la lutte contre l'orpaillage clandestin en Guyane ou contre les narcotrafiquants aux Antilles.
Ces combats réaffirment dignement la vocation de notre pays dans le monde, au service de la paix et de la démocratie. Dans le même temps, ils rappellent que certains de nos soldats continuent de tomber pour la France. Le décès de deux légionnaires du 2e régiment étranger de génie de Saint-Christol, le 29 décembre dernier en Afghanistan, en est un exemple douloureux. Servir la France par les armes est noble et indispensable, mais servir la France par les armes se fait, aujourd'hui encore, au péril de sa propre vie.
C'est pourquoi, bien que la nature des conflits et l'ampleur des pertes aient changé, le devoir de reconnaissance de la Nation envers les morts pour la France demeure. La quatrième génération du feu mérite d'être honorée, au même titre que les générations précédentes, pour ses combats et ses sacrifices.
Le souhait du Président de la République de faire du 11 novembre une journée d'hommage à tous les morts pour la France permet précisément d'associer la quatrième génération du feu à l'hommage unanime de la nation. Cela a d'ailleurs donné lieu, le 11 novembre dernier, à des cérémonies très émouvantes, qui ont fédéré un grand nombre de nos compatriotes et ravivé notre mémoire collective.
Cette évolution répond pleinement aux enjeux actuels de notre politique mémorielle, qui doit tenir compte à la fois de la disparition progressive des témoins et des formes nouvelles de notre engagement militaire. Aussi, monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous réaffirmer l'engagement du Gouvernement à pérenniser l'esprit des commémorations du 11 novembre, un esprit nouveau ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la défense et des anciens combattants.
Vous avez raison, monsieur le député, depuis la mort du dernier poilu en 2011, le 11 novembre avait vocation à évoluer, car la mémoire est vivante, comme l'a très bien dit le Président de la République lors de la dernière cérémonie du 11 novembre. Si cette journée reste celle de la commémoration de la fin de la Première Guerre mondiale, elle peut très bien devenir également une journée des morts pour la France – tout soldat qui tombe, tombe pour la France et ses valeurs.
Il n'est pas question de supprimer les autres dates. Ainsi, le 8 mai reste, de même que les dates relatives à la guerre d'Algérie et à la guerre d'Indochine. L'idée du projet de loi que Gérard Longuet et moi-même allons vous présenter dans quelques instants est de montrer la filiation existant entre les morts de 1914-1918 et les morts de la troisième et de la quatrième génération du feu. Il était de notre devoir de faire évoluer les choses, afin que tous les soldats tombés depuis la guerre d'Algérie puissent avoir, eux aussi, une journée de commémoration. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)