COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES
Mercredi 8 octobre 2008
Présidence de M. Pierre Méhaignerie,
président de la Commission,
puis de M. Pierre Morange, vice-président
Examen d'un rapport d'information de M. Denis Jacquat, sur « le rendez-vous 2008 » sur les retraites.
La séance est ouverte à onze heures trente
La Commission examine un rapport d'information sur « le rendez-vous 2008 » sur les retraites, présenté par M. Denis Jacquat, rapporteur.
Ce rapport est destiné à fournir les éléments d'information utiles pour apprécier les problématiques du rendez-vous de 2008 sur les retraites et évaluer les mesures proposées ou écartées par le Gouvernement au titre de ce rendez-vous.
Il rassemble donc d'abord des données financières, démographiques, sociales et juridiques sur les thèmes essentiels du rendez-vous de 2008. Il comporte également, afin de mettre correctement en perspective les mesures proposées par le Gouvernement, un rappel de l'ensemble des réformes intervenues en matière de retraite depuis 1993 et présente en annexe un rappel historique de la construction législative des multiples régimes de retraite ainsi qu'un tableau de l'ensemble des régimes spéciaux français.
Je me concentrerai ici sur les orientations à donner aux mesures qui doivent être adoptées au titre du rendez-vous de 2008 sur les retraites. Celui-ci résulte des dispositions de l'article 5 de la loi du 21 août 2003, précisément analysées dans le rapport.
Ce rendez-vous de 2008 doit en outre, et avant tout, traiter des trois thèmes suivants : l'évolution de la durée d'assurance ouvrant droit à une liquidation au taux plein ; la situation des titulaires de petites pensions de retraite, ce qui pose le problème de l'évaluation des dispositifs du minimum contributif, du minimum vieillesse et des pensions de réversion ; et la gestion des âges de départ à la retraite et le maintien des salariés âgés dans l'emploi, ce qui conduit à aborder les questions relatives à l'âge légal de départ à la retraite, à l'évolution de l'âge effectif de liquidation des pensions, à la retraite anticipée pour carrière longue, aux modalités de calcul des pensions de retraite et aux limites d'âge professionnelles.
Le passage en 2012 de 40 à 41 ans de la durée d'assurance exigée pour une liquidation au taux plein est le point de départ du rendez-vous de 2008. Fixé par la loi du 21 août 2003, ce relèvement est d'application directe, à moins que le Gouvernement ne décide d'en ajuster le calendrier par décret pour tenir compte d'une modification de l'évolution du rapport entre durée de la retraite et durée de la vie active ainsi que des paramètres financiers et démographiques des régimes et de l'emploi par rapport aux prévisions. Sa mise en oeuvre pour le secteur privé n'exige qu'un toilettage de certains articles réglementaires du code de la sécurité sociale mais aucune mesure réglementaire d'application pour le secteur public. Le rapport présente un tableau de répartition des matières relevant de la loi et du règlement.
Cette question est analysée en profondeur et toutes les données sont mises à plat, y compris une étude des effets financiers d'un maintien à 40 ans de la durée d'assurance. Pour information, je précise que, s'agissant des deux seuls régimes des travailleurs salariés et de la fonction publique d'État, ce gel créerait une dépense supplémentaire estimée à 2,5 milliards d'euros pour l'année 2010 et à 10 milliards d'euros pour la seule année 2040, soit environ 17 % du déficit de ces deux régimes.
Outre ces considérations financières, le relèvement de la durée d'assurance tel qu'il a été décidé en 2003 se justifie aussi par un motif d'opportunité essentiel : il permet de dégager des ressources utilisables pour financer des prestations ciblées répondant à des besoins cruciaux favorisant la cohésion sociale, comme le financement des départs anticipés pour carrière longue ou la revalorisation des petites retraites.
En effet, la prolongation du dispositif de départ anticipé pour carrière longue mis en place en 2003 est une mesure capitale, qui répond à un besoin de la population et relève d'une équité sociale cruciale pour l'acceptation du système des retraites français par nos concitoyens.
De même, il est indispensable de prolonger au moins jusqu'au prochain rendez-vous de 2012 l'objectif d'un minimum contributif majoré égal à 85 % du SMIC pour les salariés ayant cotisé au SMIC une carrière complète.
Le minimum contributif pose d'autres problèmes, qui ont notamment été soulevés par la Cour des comptes.
Tout d'abord, tous les assurés ayant cotisé au SMIC ne bénéficient pas d'un total de pensions égal à 85 % du SMIC, en raison des variations de pension complémentaire dues à l'assujettissement ou non à la CSG – pour 1 % d'entre eux environ, le montant de la pension est très légèrement inférieur. Le rapport préconise une application stricte de la règle : il ne faut pas interpréter l'article 5 de la loi de 2003 comme fixant une moyenne de liquidation, mais comme un minimum de liquidation dont tous les assurés peuvent se prévaloir dès lors qu'ils en réunissent les conditions. L'enjeu social mérite qu'on surmonte les difficultés matérielles de cette application stricte.
En deuxième lieu, le minimum contributif bénéficie parfois à des salariés ayant des retraites élevées, ce qui n'est pas conforme à l'objectif qui avait présidé à sa création en 1983 : il s'agissait alors de donner une majoration de pension aux salariés ayant travaillé longtemps avec une rémunération faible.
Enfin, le montant du minimum vieillesse tend à rejoindre le montant du minimum contributif, ce qui ne valorise pas le travail.
Sur ces deux points, le Gouvernement propose des mesures dans le PLFSS pour 2009, mais il importe de ne pas pénaliser excessivement les femmes, dont la majorité des pensions bénéficient du mécanisme du minimum contributif.
Pour ce qui concerne les pensions de réversion, je soutiens depuis quinze ans le relèvement de 54 % à 60 % du taux de réversion. C'est Simone Veil, ministre de la santé dans le gouvernement d'Édouard Balladur, qui, en 1994, avait porté ce taux de 52 % à 54 % avec l'objectif d'atteindre progressivement 60 %. Depuis lors, tous les gouvernements ont baissé les bras.
Dès l'annonce du projet du Gouvernement de relever le taux de la réversion, j'ai appelé son attention sur la nécessité de ne pas limiter la mesure aux futures liquidations de pension de réversion, mais de traiter également le stock des pensions déjà liquidées. La discussion a été longue et difficile en raison du coût d'une telle mesure. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2009 devrait parvenir à un équilibre en revalorisant les pensions de réversion de 11 %, ce qui correspond à un taux de liquidation de 60 %, mais en réservant la mesure aux plus petites pensions – ne dépassant pas 800 euros, tous régimes confondus – et aux personnes âgées d'au moins 65 ans.
Au-delà de la réversion, mon rapport rappelle, dans le droit fil de celui que j'avais présenté en 2006 sur le veuvage, la nécessité de fournir un complément de ressources aux conjoints survivants ayant encore un ou plusieurs enfants à charge. Cela peut se faire, comme en Allemagne par exemple, sous la forme d'une assurance orphelin.
En matière de gestion des âges de la retraite et de l'emploi des seniors, le rapport fait un bilan complet de la fixation des âges de la retraite. Bien que des demandes se soient exprimées en ce sens, le rendez-vous de 2008 ne prévoit pas la modification de l'âge légal de 60 ans, qui est un acquis social majeur. Cette question exige un large débat dans la société, que le Conseil d'orientation des retraites (COR) n'a pas souhaité ouvrir pour l'heure. Une étude de la CNAV a toutefois montré qu'un relèvement progressif de l'âge du départ à 62 ans allégerait les charges du régime général de 5 milliards d'euros en 2020 et ramènerait le déficit estimé pour cette année de 13 milliards à 8 milliards.
Le relèvement de la durée d'assurance exigée pour obtenir le taux plein et l'amélioration du taux d'emploi des salariés âgés me paraissent donc être, dans l'immédiat, la meilleure voie pour faire évoluer le système des retraites. Je propose de lever les principaux obstacles au maintien des seniors dans l'emploi. Il faut ainsi, à l'exception des cas où elles sont motivées par des raisons médicales, mettre un terme au système des préretraites, devenues de fait des instruments de gestion des effectifs salariaux dans l'entreprise. Il convient de ne plus permettre les mises à la retraite d'office. Il importe aussi de libéraliser le cumul emploi-retraite en supprimant le plafond de cumul des ressources et le délai de latence de six mois imposé avant la reprise d'une activité chez le dernier employeur, et de relever à 65 ans toutes les limites d'âge dans la fonction publique, avant de les supprimer complètement. En tout domaine, il faut permettre aux travailleurs de poursuivre leur activité professionnelle s'ils le souhaitent.
En dernier lieu, le rapport présente quelques pistes d'amélioration du mécanisme de liquidation des pensions de retraite. J'indiquerai notamment que, depuis des années, je conteste la règle appliquée par le régime général, en vertu d'une circulaire de 1973, selon laquelle les salaires de l'année de liquidation de la pension ne sont pas pris en compte dans le calcul du salaire annuel moyen (SAM). Une analyse précise réalisée avec les services de la CNAV montre que les assurés nés en octobre ou novembre peuvent être pénalisés par cette absence de prise en compte. Plutôt que de demander l'intégration de la dernière année travaillée même partiellement, je propose de calculer le SAM non pas sur les 25 meilleures années mais sur les 100 meilleurs trimestres : seul le trimestre de liquidation de la pension échapperait alors au calcul du SAM. Cette solution simple et équitable bénéficierait également aux femmes, aux travailleurs transfrontaliers et aux travailleurs, de plus en plus nombreux, qui connaissent des carrières discontinues ou des années de rémunération faiblement valorisées en raison, par exemple d'une maladie, d'une maternité, d'un chômage ou d'un stage. Le salaire ou revenu trimestriel moyen ainsi utilisé pour calculer leur pension refléterait mieux leur activité professionnelle réelle.
Je propose enfin de faire franchir, au terme de la montée en charge du système actuel, une nouvelle étape au droit à l'information. Celui-ci est capital et ses effets sur les comportements des assurés sont patents en Allemagne et en Suède, où il a été pleinement mis en place. Il faut fournir une information systématique aux assurés dès le début de leur carrière par des procédés électroniques dématérialisés afin qu'ils puissent disposer d'estimations indicatives du montant minimal envisageable de leurs pensions et d'éléments d'information générale sur les moyens de valoriser celles-ci. Si, à 30 ans, une estimation de pension peut être aléatoire, elle n'en sensibilise pas moins l'assuré à la question de la retraite tout en lui fournissant une indication du montant de la pension qu'il percevrait dans l'hypothèse où ses revenus n'augmenteraient pas.
Ces propositions ne pouvant être introduites dans le PLFSS pour des raisons de constitutionnalité, j'envisage de déposer une proposition de loi et de solliciter son examen dans le cadre d'une niche parlementaire.
J'ai bien noté l'importance du maintien du dispositif des carrières longues. Par ailleurs, il faudra peut-être revenir sur les possibilités de transfert d'une partie des cotisations UNEDIC. À taux de chômage identique, la cotisation est de 6,4 % en France contre une moyenne européenne de l'ordre de 4 %.
Se pose également, dans cette période de transition liée à la crise, le problème délicat de la gestion des effectifs et des préretraites, avec une progression probable de la demande de mesures financées par le Fonds national de l'emploi (FNE).
Le rapport traite de cette question, sur laquelle nous reviendrons lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2009.
Le travail de M. Denis Jacquat est très utile pour faire le point sur un sujet très complexe. Cependant, l'annonce répétée de rendez-vous permanents sur les retraites est anxiogène pour nos concitoyens, bien que peu de décisions soient, en fait, prises lors de ces rendez-vous.
L'abondement de la branche vieillesse par le transfert d'une part des cotisations UNEDIC et des avantages familiaux sur les trois prochaines années n'empêchera pas le déficit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV). Si rien ne change, ce déficit augmentera même à partir de 2012, après avoir diminué jusqu'en 2011, et nous accumulerons 13 milliards de dettes.
Ne nous voilons pas la face : la seule mesure efficace consiste à accepter de relever, comme l'ont fait la plupart des pays du monde, l'âge légal de départ à la retraite, icône intouchable dans notre pays. Puisque nous gagnons chaque année un trimestre d'espérance de vie en bonne santé, les Français peuvent comprendre que, dans un contexte économique tendu, il faut travailler plus longtemps – jusqu'à 65 ans à l'horizon 2028. La plupart des pays européens auront fait cet effort, l'Allemagne prévoyant même de porter l'âge légal du départ en retraite à 67 ans vers 2025. Sinon nous paierons par la dette ce que nous refusons d'assumer aujourd'hui.
La pénibilité pourrait être prise en compte plus simplement au niveau des branches, comme c'est le cas dans le Bade-Wurtemberg. Au bout du compte, le montage national que nous mettons en place ne profitera peut-être qu'aux fonctionnaires et, pour donner le sentiment que le problème est réglé, à quelques maçons !
Quel est, enfin, l'avenir du Fonds de réserve des retraites (FRR), utile pour lisser les besoins de financement ? De fait, s'il n'est abondé que marginalement, il sera de moins en moins utile.
J'aborderai trois points.
Comme l'offre raisonnable d'emploi votée cet été, l'assouplissement des règles de cumul emploi-retraite interviendra à contretemps et à contresens de la situation de l'emploi et du chômage dans les prochaines années, et ces deux mesures joueront contre l'emploi.
Pour ce qui concerne les départs anticipés pour carrières longues, la décision prise cette année par le Gouvernement d'imposer une durée de cotisation différente – jusqu'à quatre trimestres – selon l'année de naissance du salarié se traduira par une injustice.
En troisième lieu, la pénibilité au travail, qui a fait l'objet d'un rapport de M. Jean-Frédéric Poisson auquel plusieurs d'entre nous ont collaboré, n'est pas assez prise en compte dans le rapport que nous examinons aujourd'hui. La négociation entre les partenaires sociaux prévue par l'article 12 de la loi du 21 août 2003 est un échec, même si le ministre semble avoir écrit aux partenaires sociaux pour relancer le processus. Dans ce domaine, des mesures législatives s'imposent.
Bien que ce rapport se présente explicitement comme un état des lieux, on souhaiterait parfois que le rapporteur formule davantage de propositions.
Comme M. Régis Juanico, je regrette l'absence de prise de position du rapporteur sur la pénibilité au travail. Le rapport présenté par M. Jean-Frédéric Poisson, dont la première version se bornait à proposer des dispositifs de temps partiel en fin de carrière – alors que, je le rappelle, l'espérance de vie d'un ouvrier est inférieure de sept ans à celle d'un cadre supérieur – a finalement reconnu qu'il fallait adopter des dispositifs de départ anticipé pour ces catégories de salariés.
En deuxième lieu, la proposition de transfert d'une partie des cotisations chômage vers l'assurance vieillesse, contestée par les partenaires sociaux, doit être examinée en tenant compte de l'évolution du contexte économique et social au cours des derniers mois.
Pour ce qui est du départ anticipé pour carrière longue, il n'est pas acceptable que les trimestres rachetés, pris en compte dans le calcul de la retraite, ne le soient plus pour le calcul de la date de départ car cela revient à remettre en cause le contrat passé avec les salariés.
Nous sommes défavorables à l'allongement à 41 ans de la durée d'assurance. Cette question est indissociable de celle de l'emploi des seniors et la situation perdurera tant que le taux d'emploi des seniors n'aura pas été porté à plus de 38 %. Mécaniquement, les pensions versées auront tendance à baisser, et la décote se traduira par une perte de pouvoir d'achat. Le rapport devrait être plus précis à cet égard et ne pas accepter cet allongement comme une fatalité financière.
N'oublions pas les aspects démographiques : les générations montantes suffiront-elles ? L'allongement de l'espérance de vie est également une question importante.
Nous devons aujourd'hui faire le contraire de ce qui a été fait en 1982-1984 en annonçant qu'on pourrait prendre sa retraite à 60 ans sans que cela ait d'incidence sur le montant des retraites versées.
À en croire la CNAV, le bilan de la loi Fillon n'est pas très flatteur : en 2008, l'âge moyen de départ à la retraite est de 60,7 ans, contre 61,4 ans en 2004. Il ne faut pas nous faire prendre des vessies pour des lanternes ! Ce problème est indissociable de celui de l'emploi des seniors.
D'autre part, le rapport de M. Denis Jacquat ne parle guère des petites retraites, qui concernent pourtant des millions de Français. Pour les gros revenus, la baisse du pouvoir d'achat ne se traduit que par une limitation des dépenses de luxe, mais il y a dans ma circonscription des retraités qui, à la fin du mois, mangent de la viande pour animaux qu'ils achètent dans les magasins de hard discount. En décidant de réduire le pouvoir d'achat des petites retraites en 2008, le Gouvernement a prouvé qu'il ne s'intéressait pas à ce problème. L'an dernier, lors du débat sur le PLFSS, le ministre nous taxait d'impatience mais, un an plus tard, l'augmentation est très faible. Aujourd'hui, les Français qui souffrent seront les premières victimes de la faillite du système libéral.
Relever l'âge de départ à la retraite sera source de nouvelles inégalités : ceux qui ont fait le moins d'études et ont commencé à travailler plus tôt devront travailler plus longtemps. Qui plus est, la circulaire publiée cet été sans débat provoque un grand sentiment d'injustice car les personnes voulant prendre leur retraite doivent, selon leur date de naissance, totaliser un nombre différent de trimestres de cotisation, sans parler du fait que les dates retenues par la CNAV et par la circulaire ne sont pas cohérentes.
Le transfert d'une partie de la cotisation UNEDIC a été proposé voici plusieurs mois par le Gouvernement au motif que le taux de chômage baissait. Aujourd'hui, la crise et les licenciements massifs attendus notamment dans le secteur de l'automobile invitent à la prudence : si l'on refuse les mesures FNE et que l'on transfère une fraction de la cotisation UNEDIC, comment financera-t-on les allocations chômage ?
Madame Martine Billard, est-il normal qu'un cadre supérieur au chômage puisse gagner 4 500 euros pendant 23 mois ? La France est le seul pays d'Europe où cela se produit et il faudra bien revoir un jour l'ordre des priorités sociales.
J'ai déjà déclaré que je n'étais pas opposée au plafonnement des indemnités. Au demeurant la moyenne des indemnités chômage perçues par les allocataires est très loin de 4 500 euros et, si le chômage devait augmenter, il n'en faudrait pas moins financer les allocations.
La possibilité qu'ont les polypensionnés de cumuler le minimum contributif et d'autres revenus est un effet pervers qui doit être corrigé. Toujours est-il que les femmes sont souvent réduites, faute d'avoir travaillé 42 ans, à toucher le minimum vieillesse, ou le minimum contributif si elles ont cotisé 42 ans mais perçoivent une retraite inférieure au SMIC. Il faut donc réfléchir à un autre dispositif.
Ce rapport très riche est une mise au point utile et une mine d'informations.
Le dispositif relatif aux carrières longues était attendu et 500 000 personnes environ en ont déjà profité. Connaît-on le « stock » de personnes qui, ayant commencé à travailler avant l'âge de 16 ans – avant l'instauration de la scolarisation obligatoire jusqu'à cet âge –, pourraient bénéficier de ce dispositif ?
Je suppose par ailleurs que les dispositions relatives aux veuves d'Alsace-Moselle et aux travailleurs transfrontaliers seront précisées en temps voulu.
Je tiens enfin à évoquer, en tant qu'élu d'une circonscription frontalière, le problème des personnes touchées par des licenciements économiques en Allemagne avant 65 ans, âge légal de la retraite dans ce pays. Leur prise en charge par les ASSEDIC en France est lourde pour les caisses françaises.
Je salue à mon tour le travail du rapporteur.
La pyramide des âges est différente en métropole et en outre-mer. Dans mon département de la Réunion, 56 % de la population a aujourd'hui moins de 30 ans. Malgré le dynamisme économique de notre territoire, le marché de l'emploi y est étroit et la volonté d'allonger à 41 années la durée de cotisation pose question : comment pourrons-nous assurer l'entrée des jeunes sur le marché du travail alors que les seniors, qui peinent aujourd'hui à accéder à une retraite à taux plein, seront obligés de rester en poste ?
Il conviendrait de clarifier le problème du cumul de la retraite et de l'activité, auquel sont confrontées de nombreuses personnes, notamment certains médecins désireux de reprendre une activité.
M. Pierre Morange, vice-président, remplace M. le président Pierre Méhaignerie à la présidence de la réunion.
Je salue moi aussi le travail considérable du rapporteur sur un sujet très complexe.
L'allongement de l'espérance de vie et sa conséquence inéluctable, l'allongement du temps de cotisation, doivent être pris en compte avec lucidité et pragmatisme. Il ne faut pas, en revanche, faire dépendre cette question de la résolution d'autres problèmes, comme le taux d'employabilité insuffisant des plus de 55 ans dans nos systèmes de production, la pénibilité, les carrières longues et l'alternance d'activité et d'inactivité, pour lesquels il existe une solution très concrète, nullement suspensive ou alternative, mais complémentaire de l'augmentation de la durée de cotisation. Nous voulons assurer l'efficacité de notre système de production de manière à produire des richesses et à mieux les répartir, ainsi qu'à protéger la sécurité et la santé des salariés. Un consensus est possible sur ce point.
Comme l'ont souligné plusieurs orateurs, ce rapport a été conçu comme un vade-mecum destiné à faire le point sur les retraites en 2008, en reprenant notamment les lois de 1993 et de 2003 et les idées émises notamment par la Cour des comptes, la CNAV, le COR ou le Médiateur, ou les déclarations faites l'an dernier par le Président de la République au Sénat lors des journées de la presse sociale. Il convient également de le distinguer du PLFSS, malgré la coïncidence de leurs dates d'examen.
Monsieur Yves Bur, les rendez-vous prévus tous les quatre ans par la loi de 2003 me semblent offrir un tableau de bord utile. Celui que le gouvernement a ajouté pour 2010 ne me semble pas non plus superflu dans le contexte économique actuel. Ainsi, le transfert d'une fraction des cotisations UNEDIC pourrait, en cas de crise et de reprise du chômage, rendre difficile l'indemnisation des chômeurs. Des points de contrôle réguliers sont nécessaires.
Vous avez justement évoqué le caractère anxiogène que peuvent avoir les rendez-vous sur les retraites, qui ont pu pousser certaines personnes à anticiper leur départ à la retraite de crainte de voir se mettre en place des conditions moins favorables. L'information sur les retraites doit donc être très régulière.
Quant à la remise en cause de la retraite à 60 ans, je rappelle que, sur les trois leviers disponibles – durée de cotisation, âge du départ et montant des prestations servies –, la France a plutôt choisi d'allonger la durée de cotisation. D'autres pays, comme la Suède, maintenant imitée par Japon, ont fait un autre choix, passant d'un système à prestations définies à un système à cotisations définies.
Le FRR est un fonds de lissage, dont j'ai défendu la création alors que j'étais rapporteur du PLFSS et dans l'opposition, car des ressources garanties sont indispensables pour financer les retraites d'après 2020. Ses réserves s'élèvent aujourd'hui à environ 30 milliards d'euros, judicieusement placées en actions et en obligations. Le Fonds a connu un rendement à deux chiffres en 2005 et 2006 et un rendement correct en 2007, de telle sorte que, malgré ses pertes récentes, de l'ordre de 15 % depuis le début de l'année 2008, il reste bénéficiaire.
Monsieur Régis Juanico, je rappelle, à propos du cumul emploi-retraite, que le rapport a été préparé avant la crise. Les questions que vous avez posées seront abordées dans le cadre de l'examen du PLFSS pour 2009.
Plusieurs orateurs ont évoqué les carrières longues. Le cas des personnes nées en 1952, qui devront cotiser quatre trimestres de plus, a fait l'objet d'un recours de la CFDT devant le Conseil d'État. Cette question est très technique. Cependant, bien que les salariés concernés puissent avoir l'impression de subir une injustice, la mesure mise en place par la circulaire de cet été n'est que la conséquence mécanique de la loi et du décret du 30 octobre 2003.
La pénibilité n'est pas évoquée dans mon rapport car elle a fait l'objet d'un important rapport de M. Jean-Frédéric Poisson, membre de notre commission, qui constate que les discussions avec les partenaires sociaux sont en panne et que la pénibilité ne devrait pas constituer un des paramètres de l'assurance vieillesse, la question pouvant toutefois se poser pour les ouvriers du bâtiment.
Monsieur Jean Mallot, j'ai déjà répondu à votre question relative à la situation des personnes nées en 1952, évoquée également par Mme Martine Billard. Nous reviendrons sur les carrières longues lors de l'examen du PLFSS pour 2009, ainsi que sur la question de la durée de cotisation, liée à celle de l'emploi des seniors.
Monsieur Jean-Claude Mathis, la démographie est largement analysée dans le rapport.
Nous avons déjà évoqué, monsieur Patrick Roy, le caractère anxiogène de la question des retraites, qui a provoqué plus de départs que prévu. Certaines dérives ont pu, à l'inverse, justifier des ajustements. Un chapitre du rapport est par ailleurs consacré au nécessaire relèvement des petites retraites, que nous évoquerons à nouveau dans le cadre du PLFSS.
J'ai bien intégré, madame Martine Billard, vos remarques constructives.
Monsieur Frédéric Reiss, le « stock » potentiellement concerné par le dispositif relatif aux carrières longues est de l'ordre de 100 000 personnes par génération. Pour ce qui concerne les travailleurs transfrontaliers, une circulaire relative aux polypensionnés, diffusée cet été, leur est favorable. J'assisterai demain à une rencontre organisée sur ce thème entre le ministre du travail et les syndicats de Français travaillant au Luxembourg.
J'ai déjà répondu aux questions de M. Patrick Lebreton et de M. Patrice Debray.
Vous avez justement souligné, monsieur Pierre Morange, que les retraites sont un sujet complexe car chaque cas est différent et il faudra être attentif aux personnes qui ont connu des carrières accidentées ou bénéficié d'emplois aidés. Il est probable que, après la diminution actuelle, le nombre de bénéficiaires du Fonds national de solidarité (FNS) augmentera de nouveau, ce qui posera des problèmes de financement.
Monsieur Denis Jacquat, je vous remercie.
La Commission autorise la publication du rapport d'information sur le rendez-vous de 2008 sur les retraites présenté par M. Denis Jacquat.
La séance est levée à treize heures cinq