Cet article a pour objet de soumettre tout projet ayant pour effet une augmentation d’une importance significative des prélèvements d’eau ou des rejets d’une installation nucléaire de base à la procédure de consultation du public mise en place par l’article L. 122-1-1 du code de l’environnement dans sa rédaction proposée par le 3° de l’article 86 du projet de loi portant engagement national pour l’environnement.
Il apparaît en effet souhaitable de permettre à la population d’être pleinement associée à l’adoption de telles décisions d’augmentation des prélèvements ou rejets même si le projet de modification ne nécessite pas une modification du décret d’autorisation de création de l’installation. Cette mesure permet d’accroître la transparence en matière nucléaire et de promouvoir une information des citoyens adaptée aux enjeux et leur participation au processus décisionnel.
1. | Après le II de l'article 29 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
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2. | « II bis. - Un projet de modification de l'installation ou de ses conditions d'exploitation soumis à l'accord de l'Autorité de sûreté nucléaire qui, sans constituer une modification notable de l'installation, est susceptible de provoquer un accroissement significatif de ses prélèvements d'eau ou de ses rejets dans l'environnement fait l'objet d'une mise à disposition du public selon les modalités définies à l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement. » |
Tous les amendements déposés sur cet article : n° 1513 n° 1584
Le 20/04/2010 à 09:13, Ecolo30 a dit :
Comme l'explique Arnaud Gossement sur son blog, cet article qui semble aller vers plus de transparence en matière nucléaire est en réalité un pis-aller :
"Concrètement : pour prélever davantage d'eau ou rejeter davantage d'effluents chimiques ou radioactifs, une installation nucléaire a besoin d'une autorisation mais plus d'enquête publique préalable. Une simple procédure de mise à disposition suffira. La procédure est donc allégée."
"Pour éviter qu'un projet de modification d'une INB échappe à l'enquête publique il était tout simplement possible d'élargir la définition de ce qu'est un "changement notable". Au contraire cet article 94 quater restreint cette notion de changement notable puisqu'un projet de modification qui autorise 'un accroissement significatif de ses prélèvements d’eau ou de ses rejets dans l’environnement' n'est plus pour autant qualifié de 'changement notable'. A ce rythme, on peut se demander ce qu'est un changement notable soumis à enquête publique. Il existe ici un risque d'appauvrissement de la notion, y compris pour le droit des installations classées."
"Résultat: un projet autorisant une installation nucléaire à rejeter davantage dans l'environnement est dispensé d'enquête publique et soumis à une simple procédure de mise à disposition du public."
"On peut se demander ce que cette disposition vient faire dans un projet de loi destiné à mettre en oeuvre les engagements du Grenelle de l'environnement."
http://www.arnaudgossement.com/archive/2010/04/19/96227f1eb7e0729c70a1373b5fc3752a.html#more
Le 08/06/2010 à 11:22, Ecolo30 a dit :
Analyse juridique de Maître Busson, avocat du Réseau "Sortir du nucléaire" sur cet article : http://groupes.sortirdunucleaire.org/blogs/grenelle-2-agissons-vite-contre-la/en-savoir-plus-sur-le-grenelle-ii/article/article-pronucleaire-du-grenelle-2
Le droit des INB (non soumis au code de l’environnement sauf pour les rejets aqueux et gazeux) pre?voit un de?cret du Premier ministre qui cre?e? l’INB ; ensuite, ses rejets sont autorise?s par le ministre en charge de l’Industrie apre?s enque?te publique et e?tude d’impact.
Le II de l’article 29 de la loi du 13 juin 2006 soumet ainsi a? autorisation les changements d’exploitant, la modification du pe?rime?tre de l’exploitation et « la modification notable » de l’installation ; dans ce dernier car, une enque?te publique avec e?tude d’impact est organise?e.
Le de?cret d’application de la loi pre?cise que, par modification notable, il faut entendre notamment « une modification des e?le?ments essentiels pour la protection des inte?re?ts mentionne?s » au I de l’article 28 de la loi TSN i.e. la protection de l’environnement et de la sante?.
Cela pouvait donc inclure accroissements significatifs des rejets des INB. C’est le juge administratif qui aurait eu le dernier mot pour interpre?ter la loi et son de?cret.
La loi « TSN » a constitue? le 1er recul compare? aux installations classe?es pour l’environnement car les dispositions le?gislatives du code de l’environnement exigent seulement un « changement » des conditions d’exploitation avec des conse?quences sur l’environnementii et non un changement « notable ».
La loi « Grenelle II » enfonce le clou en excluant de ces changements notables les accroissements significatifs des rejets des INB. Ainsi, par exemple, le juge administratif a conside?re? que devait e?tre soumis a? une nouvelle autorisation le fait d’augmenter le cheptel d’une porcherie industrielle1 ou de stocker dans des silos a? la place de ce?re?ales des farines animales : dans ces exemples, les rejets polluants dans l’environnement augmentent ou alors des risques nouveaux apparaissent.
En revanche, a? cause de l’amendement gouvernemental, l’augmentation significative des rejets par exemple de l’usine de La Hague dans la Manche, premie?re source de pollution de l’Atlantique du Nord par rejets de nitrates et de tritium notamment2 ne serait plus soumis a? enque?te publique. Cf pour une porcherie industrielle, la jurisprudence cite?e plus haut ! i Art. 31 De?cret du 2 nov. 2007. ii V. art. L512-15 du code de l’environnement qui dispose qu’en cas de « de transformation de l’installation ... » ou de « changement dans ses proce?de?s de fabrication, entrai?nant des dangers ou inconve?nients » pour la sante? ou l’environnement, l’exploitant est tenu de de?poser un nouveau dossier d’autorisation. ; notez que, en revanche, la partie re?glementaire du code de l’environnement impose un changement « notable » aussi ; mais le juge administratif fait primer la loi, plus large d’application, sur le de?cret. Les autres changements n’entrai?nant pas d’impact sur l’environnement donnent lieu a? un simple arre?te? (dit « comple?mentaire ») pris par le pre?fet sans e?tude d’impact ni enque?te publique.
Le 11/06/2010 à 17:09, ManUtopiK a dit :
Une pétition pour le retrait de cette loi a été lancée par le réseau sortir du nucléaire en partenariat avec cyber@cteur. Signez ici : http://groupes.sortirdunucleaire.org/spip.php?page=cyberaction
A propos de l'amendement n°1513, le 11/06/2010 à 23:28, cedric Cadoret a dit :
Heureusement il reste des députés "libres " et ecolos dans notre assemblée.Vive la Décroissance
A propos de l'amendement n°1513, le 12/06/2010 à 00:06, cedric Cadoret a dit :
Il me semble aussi que non seulement l amendement est a une obligation à l'acceptation vis a vis de la convention Aarus et la directive européenne 2003/4/ce pour info
Le 03/08/2010 à 14:25, Agora a dit :
Bonjour,
Je ne partage pas les points de vue des précédents commentaires. Non pas pour des raisons idéologiques ou autres, mais pour des raisons seulement juridiques.
Que dit vraiment cet article ?
1. Un projet de modification de l’installation ou de ses conditions d’exploitation soumis à l’accord de l’Autorité de sûreté nucléaire [COMPRENDRE : par exemple, une modification conduisant une modification des prescriptions de rejets/prélèvements fixées par l'ASN] qui,
2. sans constituer une modification notable de l’installation, [COMPRENDRE : qui constitue donc une modification "non notable" au sens de l'art. 26 du décret 2007-1557]
3. est susceptible de provoquer un accroissement significatif de ses prélèvements d’eau ou de ses rejets dans l’environnement
4. fait l’objet d’une mise à disposition du public selon les modalités définies à l’article L. 122-1-1 du code de l’environnement" [COMPRENDRE : procédure simplifiée de mise à disposition du public des projets soumis à étude d’impact mais qui ne font pas l’objet d’une enquête publique]
»
* Dans les faits aujourd’hui, s’il est vrai qu’ une installation nucléaire a besoin d'une autorisation (sous la forme d’une décision de l’Autorité de Sûreté Nucléaire homologué par ministre) pour prélever davantage d'eau ou rejeter davantage d'effluents chimiques ou radioactifs, la loi et ses décrets d’application ne requièrent :
- ni enquête publique,
- ni même une simple consultation du public (cf. article 26 du décret 2007-1557 du 02/11/07), sauf à considérer que ce projet constitue une modification dite « notable » (art. 31 du décret 2007-1557). Le cas échéant, une enquête publique est obligatoire.
* L’article 94 quater en question n’a donc pas pour effet d’ « alléger la procédure » mais, au contraire, de soumettre à consultation du public une catégorie de rejets/prélèvements qui ne l'étaient pas jusqu'à présent : celle « susceptible de provoquer un accroissement significatif », mais pas assez significatif cependant pour être « notables ».
* En fait, cet article vient ajouter une nuance dans les procédures actuelles entre les modifications non notables (art. 26 : pas de consultation du public) et les modifications notables (art. 31 : consultation du public sous forme d'enquête publique). Désormais, entre ces deux procédures, il y aura une consultation du public (moins poussée que l'enquête publique certes) pour certaines modifications non notables , mais "significatives", qui rappelons-le ne sont aujourd'hui soumises à aucune forme de consultation du public.
* Il n'est pas vrai de dire que « pour prélever davantage d'eau ou rejeter davantage d'effluents chimiques ou radioactifs, une installation nucléaire a besoin d'une autorisation mais plus d'enquête publique préalable. Une simple procédure de mise à disposition suffira. La procédure est donc allégée ».
* Enfin, il n'est pas écrit : "Un projet de modification de l’installation ou de ses conditions d’exploitation soumis à l’accord de l’Autorité de sûreté nucléaire qui est susceptible de provoquer un accroissement significatif de ses prélèvements d’eau ou de ses rejets dans l’environnement NE CONSTITUE PAS UNE MODIFICATION NOTABLE et fait l’objet d’une mise à disposition du public selon les modalités définies à l’article L. 122-1-1 du code de l’environnement".
==> Il reste donc la possibilité, à l'avenir, de considérer qu’un « un projet de modification de l’installation […] susceptible de provoquer un accroissement significatif de ses prélèvements d’eau ou de ses rejets dans l’environnement » puisse constituer une « modification notable » de l’installation, et qu’à ce titre, il puisse être soumis à enquête publique.
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Plus généralement, le problème de fond est celui de l'absence de clarté du droit en France et de l'abus d'adjectifs qualificatifs sans en définir les critères, laissés à l'appréciation de l'exploitant, de l'administration, voire du juge.
Cordialement,