Aux termes de l’article D. 57 du code de procédure pénale, les extractions judiciaires sont normalement assurées par les services de gendarmerie ou de police. Ces extractions judiciaires, entendues comme l’exécution par la police et la gendarmerie nationales des réquisitions émises par l’autorité judiciaire aux fins de se faire présenter, dans le cadre d’une activité juridictionnelle, une personne détenue dans un établissement pénitentiaire, mobilisent chaque année un nombre important de militaires et fonctionnaires évalué, selon des données concordantes, à environ 1 270 ETPT, pour 155 000 extractions réalisées en 2008, toutes activités juridictionnelles confondues.
Une grande part de ces extractions n’est pas justifiée, les audiences pour lesquelles elles sont réalisées pouvant dans un grand nombre de cas être réalisées sans difficulté pratique ou juridique par la voie de la visioconférence. Le législateur a pris conscience des potentialités du recours à la visioconférence et a permis, par plusieurs modifications législatives successives, l’utilisation de ce mode de communication pour un nombre désormais assez important d’actes juridictionnels.
Malgré ces possibilités légales de recourir à la visioconférence et malgré la mise en place d’équipements performants dans les juridictions et les établissements pénitentiaires, l’utilisation de la visioconférence peine à s’implanter dans les pratiques professionnelles des magistrats. Afin de responsabiliser les magistrats, le conseil de modernisation des politiques publiques a fixé au ministère de la justice pour objectif de réduire de 5 % le nombre des extractions judiciaires en 2009 par rapport à 2008, grâce au recours intensif à la visioconférence. Cette nouvelle politique a permis d’augmenter sensiblement le recours à la visioconférence : depuis le début de l’année 2009, on a observé une forte augmentation de l’utilisation de la visioconférence. Ainsi, entre janvier et juin 2009, l’activité de la visioconférence a augmenté de 400 %, soit plus de quatre sessions par mois dans les établissements pénitentiaires équipés.
Cependant, comme l’a souligné le Président de la commission des Lois de l’Assemblée nationale Jean-Luc Warsmann dans le rapport de la mission d’information sur l’optimisation de la dépense publique, « l’indispensable rationalisation des moyens de l’État exige aujourd’hui une mobilisation encore plus forte des magistrats et des fonctionnaires du ministère de la justice pour intégrer pleinement le recours à la visioconférence dans leur pratique professionnelle ». C’est la raison pour laquelle la mission d’information a proposé (proposition n° 23) de « faire de la visioconférence la règle et des extractions judiciaires l’exception », en prévoyant que « dans le champ d’application que lui assigne actuellement la loi, la visioconférence soit désormais la règle de droit commun et les extractions judiciaires l’exception ».
Le présent amendement traduit cette proposition, qui permettra d’accroître encore le recours à la visioconférence, sans toutefois en modifier le champ d’application, et de diminuer la charge que représentent les extractions pour les services de la police et de la gendarmerie nationales. Seront seules exclues de cette nouvelle règle de recours à la visioconférence par principe sauf décision contraire les confrontations entre plusieurs personnes dans le cadre d’une instruction. En effet, compte tenu de la spécificité de ces actes, les confrontations doivent rester soumises à la règle de la visioconférence facultative, à l’appréciation du magistrat saisi. En revanche, pour tous les autres actes pour lesquels la visioconférence est aujourd’hui seulement possible, le présent amendement prévoit que celle-ci deviendra la procédure de droit commun, sauf décision contraire de l’autorité judiciaire compétente.
1. | L'article 706-71 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
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2. | 1° Le début de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigé : « Sauf décision contraire de l'autorité judiciaire compétente, l'audition ou l'interrogatoire d'une personne sont effectués... (le reste sans changement). » ; |
3. | 2° La deuxième phrase du premier alinéa est supprimée ; |
4. | 3° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
5. | « Dans les mêmes conditions, lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction le justifient, la confrontation entre plusieurs personnes ou la présentation aux fins de prolongation de la garde à vue ou de la retenue judiciaire peut être réalisée par l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle. » ; |
6. | 4° Au deuxième alinéa, les mots : « de l'alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « du premier alinéa » ; |
7. | 5° Au début du troisième alinéa, les mots : « Ces dispositions » sont remplacées par les mots : « Les dispositions du premier alinéa ». |
Tous les amendements déposés sur cet article : n° 108 n° 229 adopté n° 283
A propos de l'alinéa 5, le 02/02/2010 à 16:11, foobar (veilleur) a dit :
Mise en place de la visioconference: http://www.rue89.com/2010/02/02/loppsi-la-visioconference-sinvite-au-tribunal-136456
Vers une déshumanisation de la justice ? Quels contacts humains en garde à vue, uniquement avec les forces de l'ordre ?
Le 14/02/2010 à 18:18, Le Canard Déchaîné (Lecteur averti) a dit :
D'après le Canard du 3 février 2010, un procureur s'étant vu sommer de fermer son blog pour manquement au devoir de réserve en racontait pourtant de belles sur le fonctionnement de la visioconférence : "La communication avec le tribunal voisin merdois sérieusement. [...] Il s'avère que nos lignes téléphoniques dédiées au sytème sont incompatibles ! Le gag ! Deux tribunaux qui ne peuvent pas communiquer entre eux par ce miyen technologique présenté par le ministère comme la panacée ! Alors que nos installations sont le fruit de marchés publics !"