Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 5 avril 2011 à 15h00

Résumé de la séance

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Sommaire

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Vergnier, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergnier

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, l'école est gratuite et obligatoire de six à seize ans. Obligatoire, cela signifie que tous les enfants doivent la fréquenter mais aussi que l'enseignement doit être assuré partout et pour tous.

Or, cela, monsieur le ministre, vous ne le faites plus. Depuis quelques années, les non-remplacements de professeurs se multiplient aussi bien dans l'élémentaire que dans les collèges et les lycées.

Vous rappelez sans beaucoup de succès des personnels retraités. Ailleurs, ce sont des parents qui assurent la classe et, là, des élus. Vous poussez même l'absurdité jusqu'à enlever un remplaçant à un endroit pour le mettre à un autre où la situation devient plus tendue.

C'est ce que j'appelle la politique du sapeur Camember mais, dans un domaine aussi crucial, cela ne prête pas à rire.

De plus, certains enseignants se voient refuser par des chefs d'établissement des journées de formation auxquelles ils ont droit mais auxquelles ils ne peuvent pas participer parce qu'ils ne peuvent être remplacés. Quand on sait à quoi a été réduite la formation professionnelle, c'est tout simplement catastrophique !

Rien d'étonnant alors si les démissions se multiplient. Que faire, en effet, face à une classe lorsque le minimum pédagogique n'est pas assuré ?

Je suis médusé de voir, dans la presse, des annonces pour recruter des enseignants. Je suis, de même, médusé lorsque vous demandez qu'on fasse appel à Pôle emploi. Je n'y comprends plus rien ! La formation des enseignants, ce n'est pas une petite affaire, et nous l'assurerons lorsque nous reviendrons aux affaires, je peux vous l'assurer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Monsieur le ministre, il est temps de réagir face à cette situation qui devient dramatique. (Nouveaux applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Monsieur le député, la situation est évidemment très éloignée de la caricature que vous venez d'en faire. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Je vous rappelle juste un chiffre : 96,2 % des absences de professeurs de longue durée donnent lieu à remplacement. Vous me direz, certes, que 3,8 % de non-remplacements c'est trop et qu'il faut faire mieux. Il n'en faut pas moins avoir ce taux de remplacement – supérieur à 96 % – en tête.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Comment assurons-nous les remplacements ? D'abord, naturellement, grâce à nos titulaires de zones de remplacement. Je le rappelle, ils sont aujourd'hui 50 000 et nous avons amélioré leur taux d'utilisation. Alors que celui-ci était de 60 % il y a encore quelques années, le dernier chiffre que nous avons s'élève à 87,5 %. Nous avons donc mieux mobilisé notre ressource de titulaires remplaçants.

Cela n'est cependant pas suffisant.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Pourquoi ? Parce que le système – ce n'est pas nouveau – est trop rigide. Vous avez, d'un côté, des titulaires remplaçants disponibles et, de l'autre, des besoins dans d'autres disciplines, dans d'autres académies.

J'ai donc décidé d'assouplir ce dispositif, en permettant, d'abord, aux titulaires d'effectuer des remplacements au-delà de leur académie, ensuite, de recruter des contractuels, c'est-à-dire de répondre ponctuellement à un besoin local. Constituer un vivier de contractuels est de la responsabilité des recteurs et des chefs d'établissements de manière à être plus réactif. Et oui, dans ce vivier, il y a des professeurs, mais il peut y avoir aussi des étudiants en fin de formation. On ne peut à la fois me reprocher le manque de formation pratique et ne pas accepter qu'il y ait des formations dans la classe pour ces étudiants.

Nous améliorons donc le remplacement, monsieur le député.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Nous cherchons à faire en sorte que le système soit plus efficace. C'est la politique que nous menons, bien éloignée de la caricature que vous avez faite. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Huées sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, ces cris sont absolument inadmissibles. Pensez à l'image que nous donnons, à l'honneur qui est le nôtre d'être élus ici, à l'Assemblée nationale. Je vous demande d'y être attentifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Et c'est valable pour la totalité de l'hémicycle !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Guy Teissier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Teissier

Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.

Notre armée est engagée en Côte-d'Ivoire dans une opération de protection de la population civile. Nous n'avons aucun doute sur la légalité de cette action puisqu'elle intervient en application de la résolution 1975 du Conseil de sécurité, qui interdit les tirs à l'arme lourde dans la capitale économique ivoirienne.

Nous n'avons aucun doute non plus sur sa légitimité, dans la mesure où le secrétaire général de l'ONU a demandé au Président de la République l'appui de nos forces pour lancer en urgence des opérations militaires nécessaires à la mise hors d'état de nuire desdites armes lourdes.

Le recours aux armes lourdes par le clan du Président déchu Laurent Gbagbo contre les populations civiles, notamment dans les quartiers nord d'Abidjan, ainsi que les attaques militaires contre les forces de l'ONU, en violation du droit international, créent une menace contre la paix et la sécurité internationale.

Je souhaite souligner la réactivité du Gouvernement et le professionnalisme de nos militaires, notamment de l'aviation légère et de l'armée de terre, qui ont pris des risques importants pour neutraliser les forces qui agissaient en violation du droit et dans la négation de toute considération humanitaire.

Cet engagement me conduit, monsieur le ministre, à vous poser trois questions.

Premièrement, pouvez-vous faire devant la représentation nationale un point sur la situation militaire en Côte-d'Ivoire à cette heure ?

Deuxièmement, comment le Gouvernement compte-t-il assurer la protection de l'ensemble des ressortissants français et étrangers présents à Abidjan ?

Troisièmement, comment le Gouvernement envisage-t-il la fin des opérations dans lesquelles nos forces sont engagées et quel dialogue envisage-t-il avec les organisations internationales régionales, notamment la CEDEAO et l'Union africaine, en vue de faciliter une sortie durable et pacifique de cette crise qui n'a que trop duré ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le président de la commission de la défense, hier, en fin d'après-midi, les forces françaises sont intervenues en Côte-d'Ivoire à la demande expresse du secrétaire général des Nations unies, sur la base de la résolution 1975, en appui des forces de l'ONUCI, avec un objectif et un seul : neutraliser les armements lourds des forces favorables à Laurent Gbagbo afin d'éviter un bain de sang et de protéger les populations civiles. Quatre hélicoptères français sont intervenus et ont dirigé leurs tirs sur des blindés et sur des moyens d'artillerie. Il n'y a pas eu de nouvelle intervention depuis ce matin.

Dans le même temps et avec l'accord du Président élu, Alassane Ouattara, les forces françaises ont pris le contrôle de l'aéroport d'Abidjan, ont regroupé nos ressortissants sur des points sécurisés et ont commencé l'évacuation de ceux, assez peu nombreux, qui le souhaitaient.

Le ministre des affaires étrangères de Laurent Gbagbo et son chef d'état-major se sont réfugiés hier à l'ambassade de France et ont appelé ce matin à la fin des combats. Au moment même où nous sommes en train de parler, deux généraux proches de l'ancien président Gbagbo sont en train de négocier les conditions d'une reddition.

Ce matin, j'ai pu, avec Alain Juppé et le Président de la République, participer à une conférence téléphonique avec le Président Ouattara. Le Président de la République a redit au Président Ouattara l'engagement de la France de participer à la reconstruction de la Côte-d'Ivoire. Il lui a également fait part de son souhait de voir se constituer un gouvernement de large union nationale en Côte-d'Ivoire pour assurer la réconciliation de tous les Ivoiriens.

Je forme à l'instant même le voeu que cette journée marque la fin de quatre mois d'efforts de la communauté internationale pour faire respecter la démocratie en Côte-d'Ivoire. Je rappelle l'engagement de la France au premier jour, et en particulier l'engagement du Président de la République, pour mobiliser la communauté internationale et faire en sorte qu'en Côte-d'Ivoire, comme par la suite partout en Afrique, les droits de l'homme et la démocratie soient respectés.

Mesdames et messieurs les députés, je pense que la France peut aujourd'hui être fière d'avoir participé à la défense et à l'expression de la démocratie en Côte-d'Ivoire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Situation en Côte-d'Ivoire

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Ma question s'adresse à Alain Juppé, ministre des affaires étrangères.

En précipitant l'organisation des élections dans un pays déchiré, la communauté internationale, et la France en particulier, portent aujourd'hui une lourde responsabilité dans le drame qui se joue en Côte-d'Ivoire. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Démago !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, écoutez la question ! Chacun a le droit de s'exprimer ici !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Qu'elle qu'ait été l'issue de ces élections, des affrontements violents étaient prévisibles.

Alors que nous préconisions une négociation politique pour sortir de la crise, Nicolas Sarkozy a préféré soutenir « officiellement » un candidat dès le lendemain du premier tour de l'élection présidentielle ivoirienne.

Encore une fois, la diplomatie française s'illustre en Côte-d'Ivoire par son incohérence. Soutenant inconditionnellement Alassane Ouattara, avant et après son élection, la France ose se présenter comme force d'interposition impartiale.

Hier soir, en faisant intervenir les forces armées françaises pour bombarder le palais présidentiel de Laurent Gbagbo, la France, loin de protéger les civils, agit pour installer au pouvoir, par la force, son poulain et ami. (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe UMP.) Mesurez-vous bien la portée de votre soutien ? Aujourd'hui le camp Ouattara fait l'objet de graves accusations de crimes de guerre et de massacres de civils ayant fait des centaines de morts.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Ces accusations émanent de l'ONU et de plusieurs organisations internationales.

Ce soutien inconditionnel a vraisemblablement été interprété comme un blanc-seing pour agir dans l'illégalité et commettre des exactions. Dès lors, c'est la responsabilité politique et morale de notre pays qui est engagée.

Ma question est simple : quel est l'objectif de l'intervention des forces armées françaises en Côte-d'Ivoire ? S'agit-il pour la France, en bombardant le palais présidentiel…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.

Debut de section - PermalienAlain Juppé

Monsieur Lecoq, l'objectif de la France est clair : faire respecter le droit international.

Nous n'avons pas tout à fait la même appréciation du temps. Vous avez dit dans votre question que nous avions précipité l'organisation des élections. M. Gbagbo s'est maintenu au pouvoir dix ans en refusant d'organiser des élections ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Cette élection a eu lieu et M. Ouattara a été élu.

Debut de section - PermalienAlain Juppé

L'élection a été reconnue par l'ensemble de la communauté internationale : les Nations unies, l'Union africaine, la CEDAO – la communauté économique des États de l'Afrique de l'ouest – et les grandes puissances, dont la France.

M. Gbagbo a refusé d'accepter la sanction du suffrage universel. Il s'est maintenu au pouvoir par la force. Il a utilisé tous les moyens contre son propre peuple. C'est la raison pour laquelle, la semaine dernière, a été votée la résolution 1975 évoquée par M. le Premier ministre, qui demandait à l'ONUCI de s'emparer des armes lourdes que Laurent Gbagbo utilisait contre le peuple ivoirien.

L'ONUCI n'y est pas parvenue à elle seule. Hier soir, le secrétaire général des Nations unies a donc demandé à la France de faire intervenir le dispositif Licorne en appui de l'ONUCI. C'est ce qui s'est passé. Nous sommes aujourd'hui, je l'espère, à deux doigts de convaincre M. Gbagbo de quitter le pouvoir et de laisser Alassane Ouattara l'exercer comme le veulent le droit international et le résultat des élections.

Il nous faut maintenant nous projeter dans l'avenir et aider cette nouvelle Côte-d'Ivoire à se reconstruire dans la paix et dans la prospérité.

Debut de section - PermalienAlain Juppé

Je peux vous dire, monsieur le député Lecoq, que moi aussi, je partage le sentiment de fierté du Premier ministre devant ce que le Président de la République et la France ont fait pour aider la Côte-d'Ivoire à surmonter cette épreuve. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Après avoir écouté M. Lecoq, je comprends mieux pourquoi M. Paul Vergès, qui a quelques affinités politiques avec lui, et M. Roland Dumas sont allés soutenir M. Gbagbo, voilà quelques semaines de cela ! (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Monsieur le ministre de la défense et des anciens combattants, vous l'avez dit, pendant dix ans, Laurent Gbagbo s'est maintenu au pouvoir sans élections après avoir monté les Ivoiriens les uns contre les autres, au risque d'aboutir à une guerre civile. Depuis quatre mois, en dépit de la sanction du suffrage du peuple souverain de la Côte d'Ivoire, il refuse de quitter le pouvoir. C'est malheureusement par la force que les loyalistes républicains ont dû entrer dans Abidjan. Il y avait un risque d'enlisement dans cette ville, prise en otage par un dictateur qui se bunkérisait. Hier, l'ONUCI, appuyée par les forces françaises et à la demande du Secrétaire général des Nations unies, est intervenue pour lutter contre les milices de Laurent Gbagbo. À l'heure même où je m'exprime, les familles des Français expatriés et de nombreux Ivoiriens d'origine vivant sur notre sol s'inquiètent beaucoup. Cette intervention militaire semble avoir précipité les événements, puisque les émissaires de M. Gbagbo semblent, enfin, vouloir baisser les armes.

Jusqu'à présent, la mission de l'ONUCI était de protéger les populations civiles. Puisqu'elle a dû intervenir, avec l'appui de la force Licorne, quels éléments nouveaux ont commandé cette intervention ? Pourquoi M. Ban Ki-moon a-t-il dû en arriver là ? Enfin, comment peut-on parvenir à protéger au maximum les Français présents en Côte d'Ivoire et notamment à Abidjan ? Ils sont très dispersés et leurs familles sont très inquiètes. Je sais, alors que deux de nos compatriotes ont été enlevés, que le Gouvernement s'efforce de prendre les dispositions nécessaires pour assurer leur protection. Que pouvons-nous faire de plus, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants.

Debut de section - PermalienGérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants

Cher Jean-Christophe Lagarde, la question très précise que vous posez a trait à la défense des populations civiles d'Abidjan, en général, et, plus précisément, des 12 000 Français qui y vivent aujourd'hui. Votre souci est légitime. La raison essentielle du changement de comportement de l'ONUCI tient au fait que le Secrétaire général des Nations unies a, enfin, donné des ordres formels à son représentant local pour que les troupes dont il assure la direction mettent fin à une situation inacceptable : l'utilisation par l'ancien président Gbagbo de moyens militaires lourds au détriment des populations civiles, avec notamment des frappes de mortier sur des quartiers civils sans objectif militaire. Nous avions dénoncé cette situation de fait. L'arrivée des troupes du président Ouattara dans Abidjan risquait d'entraîner une apocalypse. C'est la raison pour laquelle, très raisonnablement, le Secrétaire général des Nations unies, activé par l'ensemble des grandes puissances du Conseil de sécurité, et notamment la France, a donné l'ordre formel de neutraliser ces moyens militaires. Par ailleurs, l'ONUCI bloque les deux ponts de la lagune, de sorte que les quartiers qui ne sont pas exposés, aujourd'hui, à des risques militaires par les conflits internes puissent être totalement protégés.

Je tiens à rendre hommage aux soldats français de la Licorne qui ont assuré la protection de tous les civils français, franco-ivoiriens et proches de la France, et ce dans un très grand respect des conditions de maintien de l'ordre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Brottes, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur le Premier ministre, la vie de tous les jours est devenue un enfer pour une majorité de Français qui rencontre des difficultés pour se chauffer et se déplacer. Aujourd'hui vous nous dites : « le prix du gaz ne bougera pas » En réalité, depuis des mois, et même des années, et ce en dépit de nos propositions pour mettre un coup d'arrêt à cette spirale infernale, c'est le Gouvernement qui ne bouge pas ! Avouez qu'il faut tout de même un certain culot pour évoquer une taxation des compagnies pétrolières alors que, chaque fois que nous vous avons proposé une telle mesure depuis 2007, vous vous êtes indignés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Il faut quand même un certain culot pour annoncer une nouvelle augmentation de l'électricité de 3 %, après les 10 % en 2010, puis un moratoire jusqu'aux élections présidentielles, alors que vous n'avez toujours rien décidé sur le prix de vente du nucléaire par EDF à ses concurrents. Il faut tout de même un certain culot pour annoncer encore une révision de la formule de calcul du prix du gaz, après plus de 55 % d'augmentation en cinq ans ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) À l'incompétence, vous ajoutez l'indécence : vous gèleriez les tarifs du gaz le 1er juillet, donc au moment où l'on n'a plus besoin de se chauffer, et quelques jours après avoir accordé une hausse de plus de 5 % !

À l'heure où GDF Suez, comme les banques, réalise des profits considérables, votre gouvernement panique, vous cherchez une sortie, vous sentez bien que les Français n'en peuvent plus ! En matière de tarifs de l'énergie, vous vouliez vous exonérer : le marché libéral devait tout régler ! Le marché s'est bien servi, il s'est même bien gavé ! Les consommateurs ont payé et ils risquent de vous le faire payer ! On ne peut pas impunément briser les fondamentaux du service public, monsieur le Premier ministre, sans se retrouver KO au fond du ring lorsque, à force de taper toujours sur les mêmes, commencent à apparaître des ecchymoses dans le budget des ménages ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Il y a une urgence sociale, une urgence vitale ! C'est dès maintenant qu'il faut reconsidérer la taxation de l'énergie.

Monsieur le Premier ministre, ne cherchez plus à gagner du temps ou à trouver un peu de répit d'ici aux prochaines élections. Arrêtez les gadgets, les Français attendent des actes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le député Brottes, nous arrivons, effectivement, au moment où nous allons pouvoir comparer les programmes des uns et des autres. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Cela va être l'heure de vérité ! La première chose que vous devriez expliquer aux Français, si vous dites la vérité, c'est que nous sommes en face de tendances lourdes d'augmentation des coûts de l'énergie !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Nous avons, en 2009, atteint le pic de production en matière de pétrole. La production ne peut maintenant que décroître, alors même que la croissance de l'économie mondiale a retrouvé un train de 4,5 %. La catastrophe de Fukushima aura forcément des conséquences sur les investissements dans le monde en matière nucléaire.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Enfin, nous savons tous que les énergies renouvelables ont un coût très élevé. Nous sommes donc confrontés, de manière tendancielle, à une augmentation des coûts de l'énergie. Face à cette situation, on peut faire de la démagogie ou on peut répondre de manière sincère et pragmatique…

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Vous, vous n'avez rien fait !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…aux difficultés que rencontrent les Français. Nous sommes dans une phase de redémarrage de l'économie française. Celle-ci s'appuie, pour l'essentiel, sur la consommation. C'est la raison pour laquelle nous avons pris des décisions visant à freiner l'augmentation du coût de l'énergie pour ne pas handicaper les capacités des consommateurs français. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Oui, l'électricité, qui aurait normalement dû croître de 5 % au mois de juillet, n'augmentera que de 2,9 %, 1,7 % correspondant à l'inflation et aux investissements nécessaires sur le réseau de distribution et 1,2 % correspondant aux décisions que vous avez votées et soutenues (Protestations sur les bancs du groupe SRC) et dont vous considérez d'ailleurs souvent qu'elles ne sont pas suffisantes pour financer les tarifs sociaux et le surcoût de la vente de l'électricité provenant des énergies renouvelables à EDF.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Non !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Quant au gaz, nous avons décidé de mettre un coup d'arrêt à une augmentation qui aurait dû être de 7,5 % au mois de juillet prochain. Il n'y aura pas de hausse du gaz pendant un an (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et nous allons renégocier le contrat de service public qui lie l'État à GDF Suez, notamment pour revoir la formule de calcul.

Enfin, s'agissant de la taxation sur les entreprises pétrolières, vous avez juste oublié, monsieur Brottes, que nous l'avons déjà pratiquée à plusieurs reprises pour financer la prime à la cuve. Nous prendrons de nouveau cette décision cette année, mais, cette fois-ci, pour venir en aide à tous les professionnels qui roulent beaucoup et qui, du fait de l'augmentation du prix de l'essence, sont handicapés dans leur activité.

Mesdames, messieurs les députés, au moment où le parti socialiste nous annonce qu'il est converti à la sortie du nucléaire, les propos de M. Brottes sonnent comme des propos électoralistes…

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est ridicule !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…qui n'ont aucun fondement en économie ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Ma question s'adresse à M. le ministre du budget.

Vous avez annoncé la semaine dernière, monsieur le ministre, les résultats pour 2010 de l'effort de réduction des déficits publics. L'objectif, je le rappelle, était de 7,7 % du PIB. Le résultat est de 7 %, c'est-à-dire beaucoup mieux que ce qui était prévu.

Cet effort réalisé par l'ensemble de nos concitoyens renforce incontestablement notre souveraineté nationale. Pour autant, nous le savons, l'effort doit se prolonger, d'autant que, cette année, l'objectif est de 6 %.

C'est dire avec quelle consternation nous avons pris connaissance hier des projets du parti socialiste (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), parce que c'est le retour aux recettes éculées du siècle dernier. Le PS, une fois de plus, renoue avec ses vieux démons.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

C'est d'abord de la démagogie, et je prendrai un seul exemple, les emplois-jeunes, renommés emplois d'avenir. Ceux qui les ont vécus s'en souviennent encore, avec un goût plus qu'amer, eux qui n'ont jamais trouvé de vrais emplois.

Par ailleurs, une fois de plus, le PS laisse filer les déficits. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Mobilisé par les querelles d'ego, il n'a oublié qu'une seule chose, c'est qu'après la crise financière, la crise monétaire, la crise géopolitique que nous connaissons, le monde a tout simplement changé. Ce changement doit se traduire concrètement. Nous devons ensemble bâtir la France du XXIe siècle.

Je ne vous donnerai qu'un seul exemple sur la différence entre le PS, la majorité et le Gouvernement. Au moment où la majorité et le Gouvernement veulent inscrire dans la Constitution l'interdiction des déficits, le PS, lui, veut accroître la dépense publique de 25 milliards d'euros. Pourriez-vous donc nous rappeler les objectifs de maîtrise du déficit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.– Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Merci, madame Vautrin !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Vous avez raison, madame la députée, de mettre en lumière les résultats plus qu'encourageants (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) qui montrent la trajectoire suivie par le Gouvernement en matière de réduction des déficits. Je comprends, mesdames, messieurs de l'opposition, que cette question ne vous intéresse pas, vous ne l'avez jamais traitée : toujours plus de dépenses, toujours plus d'augmentations des impôts, et de lointains souvenirs d'une maîtrise des finances publiques. Or nous y sommes parvenus en un exercice budgétaire. J'espère malgré tout emporter la conviction de quelques-uns d'entre vous.

En dépit de la difficulté de la gestion de la crise budgétaire corrélative à la crise financière, le déficit prévu était passé de 8,5 % à 7,7 % du PIB. C'est considérable et c'est un effort jamais réalisé jusqu'à présent dans l'histoire budgétaire de notre pays. L'INSEE, en toute indépendance, a annoncé un taux de 7 %. Nous le devons à une meilleure maîtrise de toutes les sources de dépenses, celles de l'État, celles des collectivités territoriales, celles aussi de la sécurité sociale puisque, pour la première fois depuis sa création en 1997, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie aura été respecté.

Cela ne donne pas de marges de manoeuvre supplémentaires, cela nous permet juste d'annoncer dès à présent que, pour l'année 2011, l'objectif de réduction des déficits à hauteur de 6 % du produit intérieur brut sera atteint, et nous serons probablement en dessous.

Vous avez raison de rappeler que la politique suivie par le Gouvernement va dans la bonne direction, que les efforts donnent des résultats, que cela nous permet de conforter notre projet. Nous avons en effet l'impression, en examinant l'idée qu'ils se font du monde réel, que les socialistes ont ouvert le placard et regardé ce qui tombait à leurs pieds, dont ils ont conservé une certaine nostalgie. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Rudy Salles, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, au lendemain de la révolution tunisienne, votre premier acte fort au sein du Gouvernement a été de vous rendre, le 4 mars dernier, dans les Alpes-Maritimes, à la frontière franco-italienne, afin de témoigner de votre volonté de faire de la lutte contre l'immigration clandestine l'une de vos priorités.

Depuis votre visite, la situation côté italien s'est dégradée de telle sorte que, samedi dernier, la ville frontalière de Vintimille a connu de véritables scènes d'émeutes urbaines surréalistes. Les manifestants, essentiellement des immigrés clandestins tunisiens, encadrés par des activistes de gauche, ont en effet affronté une présence policière qui avait été renforcée. Les revendications s'adressaient directement au Gouvernement français et l'objectif était d'obtenir l'ouverture totale des frontières.

En dépit d'une enveloppe « immigration » de 80 millions d'euros attribuée par l'Union européenne, Silvio Berlusconi semble dépassé par la situation et évoque un véritable tsunami humanitaire. Son ministre de l'intérieur étudie la mise en place de permis de séjour provisoires permettant aux clandestins tunisiens de circuler librement en Europe.

Ainsi, l'Italie ne serait plus qu'un lieu de transit pour ces migrants, contrairement aux accords de Schengen, selon lesquels le premier État recevant des étrangers en situation irrégulière a la responsabilité d'apporter la solution qui convient, en particulier le retour dans le pays d'origine.

Face à ce constat inquiétant, je souhaiterais connaître les mesures concrètes que le Gouvernement entend prendre afin de responsabiliser notre voisin italien et, de manière générale, de lutter efficacement au niveau européen contre l'afflux croissant de ces clandestins. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. (Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Il est exact, monsieur le député, que la pression migratoire qui s'exerce sur l'Italie a des conséquences dans notre pays. Entre le 23 février et le 28 mars dernier, ce sont 2 800 personnes de nationalité tunisienne en situation irrégulière qui ont été interpellées : 1 700 personnes ont d'ores et déjà fait l'objet d'une reconduite à la frontière, pour la plupart à la frontière italienne ; pour les autres, les procédures se poursuivent.

La France n'est pas prête à accepter un tel afflux, qui n'est ni plus ni moins que de l'immigration économique puisque la Tunisie est en train de s'ouvrir à une ère nouvelle de vie démocratique et de libertés individuelles et publiques.

La réponse est d'abord nationale, avec la mise en place de forces supplémentaires afin de permettre les contrôles aux frontières, l'innovation juridique que constitue la LOPPSI votée récemment, qui permet d'effectuer des contrôles dans la zone des vingt kilomètres, dans les aéroports et les gares, et le projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, examiné au Sénat.

Elle est aussi européenne, vous avez raison de le souligner. Il faut d'abord que l'accord de Schengen soit totalement respecté, et la France s'y emploie.

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Frontex doit mieux organiser son dispositif de protection contre les venues irrégulières. Nous devons rechercher avec la Tunisie un accord dans le cadre des négociations globales avec l'Union européenne afin que la Tunisie lutte contre l'immigration irrégulière. Pour mettre en oeuvre tout ce dispositif, les pays de la Méditerranée et de l'Union européenne se rencontreront vendredi et il y aura lundi un Conseil justice et affaires intérieures sur le sujet à Luxembourg. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je voudrais répondre à M. Baroin car je pense que le débat sur la politique économique de notre pays mérite mieux que des caricatures. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Nous savons très bien, monsieur Baroin, quelle sera la situation que nous trouverons en 2012. La dette de la France aura doublé en dix ans. Nous aurons un déficit abyssal, une compétitivité dégradée, et ce depuis 2004 car, avant 2002, il y avait 20 milliards d'excédents. (Applaudissements sur les bancs de groupe SRC.) Le chômage aura explosé. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Face à cette situation, nous disons – et nous pouvons en débattre – qu'il faut attaquer les trois problèmes en même temps.

Il faut une politique de l'emploi. C'est ce que nous proposons avec la création de 300 000 emplois d'avenir. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Il faut une politique industrielle qui permette de rétablir notre compétitivité tout au long de la législature. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Il faut une réduction continue du déficit, comme nous l'avons fait lorsque nous étions au pouvoir : nous l'avions ramené de 3,5 % à 1,5 % du PIB. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Cela nous permettra de changer le rythme de croissance de notre pays. Vous nous dites : « La croissance sera de 2,5 % et nous réduirons les déficits. » Quand avez-vous fait 2,5% de croissance ? Jamais ! Sous Chirac, c'était 2 % – un-demi point de moins que l'Europe. Sous Sarkozy, c'est zéro. Sous Balladur et Juppé, c'était 1,5 %, quand l'Europe faisait plus de 2 %. Le seul gouvernement qui l'ait fait, c'est nous : 3,2 % alors que l'Europe n'était qu'à 2,5 %. Nous n'avons donc pas de leçons à recevoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le député, ne faites pas comme si vous aviez oublié que, lorsque vous êtes arrivés au pouvoir en 1997, dans les circonstances que l'on sait (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) – oui, vous n'étiez pas prêts, cette victoire vous a surpris ! –, vous aviez griffonné sur un coin de table de bistrot, où se trouvaient Mme Aubry et M. Strauss-Kahn, les emplois jeunes, les 35 heures... Vous avez cependant bénéficié de la bulle internet qui a tiré la croissance vers le haut ; qu'en avez-vous fait ? Plus de dépenses, plus de déficits ! (Mêmes mouvements.) Mêmes motifs, mêmes punitions !

Je ne prévois pas un grand avenir à votre projet, monsieur Muet, parce qu'il repose entièrement sur le passé. Je relève quelques-unes des priorités du parti socialiste : c'est dans les bons auteurs que l'on trouve les meilleures sources !

Vous proposez la création de 300 000 emplois ; vous le portez en bandoulière une fois de plus. Je dirai : une fois de trop ! Nous savons très bien que cela a provoqué la création d'emplois de fonctionnaires. Dites aux Français que vous voulez créer des postes de fonctionnaires, alors que nous en supprimons : à la fin de cette législature, nous revenons au même nombre qu'au début des années 90.

Vous proposez la suppression de la TVA « restauration ». Les restaurateurs apprécieront ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous supprimez le blocage des loyers. Les propriétaires apprécieront ! (Mêmes mouvements.) Vous proposez de revenir à la retraite à soixante ans. M. Hamon appréciera ; nos finances publiques certainement pas, une certaine idée de la solidarité nationale non plus !

C'est au sein de L'Égalité réelle que je trouve vos éléments de réflexion. Vous proposez notamment le rattrapage des moyens de la justice. Nous le faisons (Mêmes mouvements) : c'est un budget en augmentation de 4 %.

Nous lisons également, dans ce document, cette phrase curieuse : « Chaque acte de délinquance doit pouvoir trouver une réponse immédiate. » De là à conforter l'action des pouvoirs publics et de notre ministre de l'intérieur !... (Mêmes mouvements.)

Enfin, à mon tour, je vous pose une question.

Plusieurs députés du groupe SRC. Non, votre temps de parole est écoulé !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Entre les deux tours des cantonales, vous avez agoni la droite de sottises. Vous proposez le retour à la proportionnelle : y renoncez-vous, pour ne pas faire revenir le Front national ici ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Élie Aboud, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Élie Aboud

Monsieur le ministre de l'industrie et de l'énergie, le Premier ministre vient d'annoncer à la représentation nationale des mesures destinées à limiter l'impact de la hausse des prix de l'énergie sur le budget des Français. Il est vrai qu'il y a urgence. Le Gouvernement se devait de prendre des décisions en la matière, et je m'en réjouis.

Ainsi, vous avez décidé de ne pas augmenter les tarifs du gaz et d'élaborer une nouvelle formule plus favorable au consommateur final.

Debut de section - PermalienPhoto de Élie Aboud

Sur l'électricité, là encore, vous avez décidé d'encadrer les hausses à venir d'ici au mois de juillet 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Élie Aboud

Enfin, vous avez aussi décidé de limiter l'envolée des prix des carburants, qui constitue elle aussi une ponction directe sur le budget des ménages des Français.

Je me permets de le rappeler, le Grenelle de l'environnement, initié par notre majorité, permettra d'ici à 2020 de réduire considérablement la consommation de carburant grâce au soutien des énergies renouvelables.

Monsieur le ministre, les mesures annoncées ce matin arrivent au bon moment pour les Français. Afin d'éclairer mes compatriotes, pouvez-vous nous dire dans quelles circonstances ces mesures pourront être appliquées et quels sont les délais à prévoir ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique

Monsieur le député, vous avez rappelé à juste titre les principales mesures annoncées par le Premier ministre. Vous me permettrez d'ajouter deux éléments sur les tarifs sociaux.

Vous savez que, pour l'électricité, le tarif social existe. Nous l'avons revalorisé de dix points le 1er janvier dernier. Pour les ménages les plus modestes, la réduction moyenne est ainsi de 90 euros par an environ.

Pour le gaz, le Gouvernement a également mis en place un tarif social, que nous venons de revaloriser de 20 % au 1er avril. Pour un foyer chauffé au gaz, le rabais est passé à 142 euros par an.

Comme l'a indiqué François Fillon à l'instant, cela signifie que, face à la hausse des prix de l'énergie dans le monde, le Gouvernement français fait tout ce qu'il peut pour en limiter l'impact sur le pouvoir d'achat des ménages.

Les principales mesures sont simples. Le gel des tarifs du gaz…

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique

…va nous permettre de recalculer la formule de réévaluation avec GDF Suez et la Commission de régulation de l'énergie.

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique

Vous savez ce qu'il en est : nous nous appuyons trop, aujourd'hui, sur des contrats de longue durée. Nous voulons que cette formule tienne mieux compte de la baisse du prix du gaz sur le marché dit spot, marché à court terme.

En ce qui concerne le prix de l'électricité, le Président de la République et le Premier ministre ont voulu que ce soit la hausse minimale qui s'applique. Cela vient d'être expliqué.

S'agissant des carburants, enfin, il y aura une hausse du forfait kilométrique sur la feuille d'impôt sur le revenu. François Baroin a indiqué que cette hausse de 4,6 % s'appliquerait à cinq millions de personnes. Nous aurons avec Christine Lagarde et Frédéric Lefebvre une réunion la semaine prochaine avec les compagnies pétrolières pour leur demander leur contribution.

Vous voyez que notre préoccupation est bien le pouvoir d'achat des ménages, notamment des plus modestes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bernard Roman, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Monsieur le Premier ministre, la République française est l'héritière de valeurs que nous connaissons tous et dont nous sommes tous ici, députés ou membres du Gouvernement, les garants. Les nouvelles déclarations de votre ministre de l'intérieur (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) sont tout simplement contraires à ces valeurs, qui font pourtant l'honneur de notre république. Nous ne faisons pas à M. Guéant l'injure de penser que ses propos sont des dérapages… Non, c'est pire ! (Mêmes mouvements.) Ils s'inscrivent dans une stratégie réfléchie, concertée, délibérée et assumée !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Le chef de l'État est en campagne électorale pour 2012 ; il a choisi la pire des stratégies : la provocation, la transgression de l'extrême-droitisation !

Il se trouve pourtant que le rôle d'un ministre de l'intérieur n'est pas de faire une campagne électorale, mais d'en assurer le bon déroulement. Le rôle d'un ministre de l'intérieur n'est pas d'agresser et d'inquiéter les citoyens, mais de protéger et de rassurer. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Enfin, il se trouve que le ministre de l'intérieur est aussi chargé des cultes, donc de la laïcité, principe constitutionnel qui, faut-il le rappeler, donne à chaque citoyen, dans le respect des lois républicaines, la liberté de croire ou non, de pratiquer ou non, cette liberté de conscience étant garantie par la neutralité de l'État.

Or l'État aujourd'hui n'est plus neutre ! En effet, le Président de la République revient à l'envi sur « l'héritage chrétien de la France » (« Et alors ? » sur de nombreux bancs du groupe UMP) et le ministre de l'intérieur estime que « l'accroissement du nombre de fidèles » de religion musulmane, ainsi qu'« un certain nombre de comportements », « posent problème », quelques jours après avoir assuré que « les Français veulent que la France reste la France ».

Dès lors, monsieur le Premier ministre, devant de telles déclarations qui bafouent la République (« Oh ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP) et avant que Claude Guéant ne se voie, comme son prédécesseur, condamné pour provocation à la haine et à la discrimination raciale, rappelez-lui de respecter les valeurs de la République ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur Bernard Roman, il y a quelques semaines, une publication du parti socialiste présentait le Président de la République sous les traits d'Adolf Hitler. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Je n'ai entendu aucun regret, aucune excuse, aucune condamnation de la part des dirigeants du parti socialiste ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Il y a quelques jours, la Première secrétaire du parti socialiste trouvait judicieux d'apposer sa signature au bas d'une pétition aux côtés de celle de Tariq Ramadan, l'homme qui proposait un moratoire pour la lapidation des femmes adultères (Huées sur les bancs du groupe UMP.)

À Marseille, des accusations graves de fraude ont été portées par M. Montebourg.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Je n'ai entendu aucune réaction, aucune condamnation, aucune décision du parti socialiste !

Et vous venez maintenant instruire le procès de Claude Guéant avec des phrases sorties de leur contexte,…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…coupées en morceaux, selon les bonnes vieilles méthodes des procès staliniens (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) : la caricature, la calomnie, l'amalgame. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et sur de nombreux bancs du groupe NC.) C'est une attitude méprisable. (De nombreux députés du groupe SRC se lèvent et protestent.) Claude Guéant est un républicain, et toute sa carrière parle pour lui. Vous avez choisi une méthode d'intimidation. Mais je vous l'affirme : je ne céderai pas devant cette méthode, et vous me donnez l'occasion de dire à tous les Français la grande confiance que j'ai dans le ministre de l'intérieur. (Les députés du groupe UMP et de nombreux députés du groupe NC se lèvent et applaudissent longuement. – De nombreux députés du groupe SRC quittent l'hémicycle.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Olivier Dassault, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Dassault

Ma question s'adresse à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.

Il est inutile de rappeler l'ampleur et la violence du tsunami qui a dévasté le Japon. La dignité du peuple japonais force l'admiration, mais le Pays du Soleil Levant doit aujourd'hui se relever de cet immense désastre. Nous entretenons avec lui de profonds liens d'amitié, et des relations bilatérales constantes depuis le XVIIeme siècle. Le dialogue de nos deux cultures a toujours été fructueux, et le souvenir de Paul Claudel, qui y fut notre ambassadeur, y est toujours ardent.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Parler de « procès staliniens », c'est scandaleux, monsieur le Premier ministre ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Dassault

Il est juste de ne pas laisser seul ce pays sinistré. De nombreuses initiatives individuelles de solidarité ont ainsi vu le jour dans notre pays, et la visite du Président de la République à Tokyo, la semaine dernière, a été très appréciée, tout comme votre présence à ses côtés. Cette visite est le signe manifeste que nous ne tournons pas le dos au Japon, ni du point de vue politique, ni en matière commerciale, économique et même touristique.

Plus que toute autre, la question de la sécurité nucléaire s'ajoute à celle du sinistre. Votre déplacement sur place a été l'occasion de mettre en avant les coopérations nécessaires entre nos deux pays. « La vie est une bougie dans le vent », nous enseigne un proverbe japonais. À nous de préserver cette flamme, de savoir la protéger, quitte à la mettre sous globe.

N'est-ce pas aujourd'hui le rôle de la France de prendre l'initiative d'une réflexion nouvelle pour établir dans le monde des normes performantes de sécurité nucléaire ? Non seulement parce que nous présidons actuellement le G8 et le G20, mais aussi en raison de l'expertise avérée de nos chercheurs et de nos entreprises en la matière, avec au premier rang le Commissariat à l'énergie atomique, AREVA et EDF.

Madame la ministre, quelles initiatives la France entend-elle prendre pour venir en aide au Japon et au peuple japonais ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Monsieur Olivier Dassault, je vous remercie d'avoir posé cette question grave sur un sujet tragique, une question que j'aurais aimé pouvoir écouter dans un silence respectueux, ce dont nous a privé l'opposition.

Le Président de la République était jeudi au Japon pour porter un message de compassion, de solidarité et aussi d'admiration du peuple français au peuple japonais. Le Premier ministre japonais, Naoto Kan, a accueilli Nicolas Sarkozy en citant un proverbe qui dit toute l'émotion, par ailleurs visible, qui a imprégné ce déplacement : « Les vrais amis sont ceux qui viennent sous la pluie. »

S'agissant de l'accident très grave de Fukushima, j'ai moi-même été frappée de voir combien les Japonais étaient inquiets, bien sûr de ses suites, mais aussi à l'idée qu'ils puissent être mis à l'écart en raison de cet accident nucléaire, combien ils étaient inquiets que les étrangers ne veuillent plus séjourner au Japon, inquiets que leurs produits ne se vendent plus alors qu'ils ont besoin de redémarrer leur économie pour reconstruire leur pays.

La France s'est mobilisée à leurs côtés dans cette terrible épreuve, notamment en matière de coopération nucléaire. La crise n'est pas finie car la situation à la centrale de Fukushima n'est pas stabilisée. Concernant le problème majeur qui se pose aujourd'hui, celui du pompage et du traitement de l'eau contaminée, la France dispose de compétences au CEA et chez AREVA qu'elle a mises à la disposition des Japonais. Des experts sont auprès des équipes de TEPCO pour dispenser leur expertise.

Et puis nous devons tirer tous les enseignements de la catastrophe de Fukushima. En France, le Premier ministre l'a annoncé : il s'agira d'un audit, centrale par centrale, pour tirer les leçons de la catastrophe. Au niveau international, le Président de la République et le Premier ministre japonais ont convenu de travailler ensemble à des règles internationales en matière de sûreté ; le Président de la République m'a demandé de réunir, dans le cadre du G20, les autorités de sûreté nucléaire pour établir ces règles. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Je demanderai à M. le Premier ministre de garder son sang-froid. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je lui rappelle que les propos de M. Guéant n'ont pas simplement choqué de ce côté de l'hémicycle, mais qu'ils ont aussi choqué les électeurs, les Français et une partie de son électorat. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Ma question s'adresse à Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé. Depuis sa nomination, en novembre 2009, elle a mis en avant sa qualité de médecin expérimenté. Permettez-nous d'avoir des doutes.

Premièrement, je tiens à rappeler ses propos minimisant l'ampleur du scandale du Mediator au début de la crise, ce qui avait amené légitimement notre collègue Gérard Bapt à demander sa démission, devant la légèreté de ses affirmations. (« Il avait raison ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Deuxièmement, je tiens à rappeler sa récente déclaration au Sénat : « L'homosexualité est un facteur de risque pour le VIH. » C'est scandaleux sur le plan éthique et faux sur le plan médical. Ce n'est pas le type de population qui détermine le risque mais bien les comportements individuels, que l'on soit homosexuel ou hétérosexuel. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) D'ailleurs la population homosexuelle attend des excuses.

Le troisième point concerne ses conflits d'intérêt avec l'industrie pharmaceutique, qui ont fait l'objet de trois courriers de ma part. Au premier, elle a répondu, agacée, qu'elle avait autre chose à faire. Au second, son chef de cabinet a fait une non-réponse. Au troisième, silence radio.

M. Xavier Bertrand souhaite mettre en place la déclaration des conflits d'intérêt au premier euro perçu. Qu'attend Mme Berra pour nous dire quelles sont les missions exactes qu'elle a exercées au sein de ces laboratoires pharmaceutiques et pour quels niveaux de rémunération pendant dix ans, alors qu'elle était en fonction à l'hôpital Édouard Herriot de Lyon. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Le projet socialiste a l'ambition de mettre en place une démocratie sanitaire transparente. L'exemplarité doit toujours venir d'en haut, les Français l'exigent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Nadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienNadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle

Madame la députée, permettez-moi d'abord de vous prier d'excuser Mme Nora Berra, retenue au Sénat, et de vous rappeler que nous sommes ici dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale et non pas dans un tribunal. (Applaudissements sur quelques bancs de l'UMP.)

Je sais qu'il est actuellement de bon ton de manipuler les phrases en les sortant de leur contexte ou de trahir la pensée intellectuelle de leur auteur. Nora Berra vient de préciser une nouvelle fois sa pensée aujourd'hui au Sénat. Elle a rappelé qu'en matière de dons du sang, il y était relevé des contre-indications ciblant uniquement les pratiques à risque et non pas les personnes.

Par respect pour les malades, pour leurs familles, pour les personnels soignants et aussi pour les associations…

Debut de section - PermalienNadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle

…qui sont engagées dans la lutte contre le VIH, ne cédons pas à la polémique.

Par devoir aussi, soyons tous mobilisés. Xavier Bertrand et Nora Berra, poursuivant l'action de Roselyne Bachelot, mettent en place les nouveaux appels à projet pour lesquels l'État consacre 3,8 millions d'euros supplémentaires cette année. Les associations y sont éligibles.

Debut de section - PermalienNadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle

Six mois après l'annonce du plan de lutte contre le sida et les autres infections sexuellement transmissibles, certaines mesures phares sont déjà engagées en matière d'information, de prévention, de dépistage et de prise en charge.

En décembre, une campagne d'incitation au dépistage à destination du grand public a été réalisée et lancée par l'INPS.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Ce n'est pas la question ! Répondez !

Debut de section - PermalienNadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle

L'ouverture de nouveaux centres de dépistage dotés de tests rapides d'orientation diagnostic vont être financés à hauteur de 3,5 millions d'euros sur trois ans. C'est ce qui préoccupe vraiment nos concitoyens, et non pas le fait d'instruire en permanence de procès en sorcellerie sur tous les élus et sur tous les membres du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Raoult, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Monsieur le garde des sceaux, Noisy-le-Sec est une commune moyenne du département de la Seine-Saint-Denis, connue pour être un noeud ferroviaire. Cette ville populaire est maintenant sous les feux de l'actualité pour un drame de violence quotidienne, pourtant venu des cités d'alentour, tout simplement parce qu'il y a un tunnel souterrain sous la gare.

Haroun, un jeune de dix-neuf ans, a été quasiment lynché par un groupe d'une dizaine d'adolescents d'une cité voisine, pour une histoire de fille, comme ils disent.

Le nouveau maire de cette ville, Laurent Rivoire, comme Claude Capillon, son collègue de Rosny-sous-Bois, se sont rendus immédiatement sur place avec le préfet Christian Lambert. Le ministre de l'intérieur est aussi venu pour manifester son émotion, sa solidarité mais surtout sa détermination à retrouver les coupables.

Au nom des élus de ce département, du moins de ceux qui ne banalisent pas la violence sous le vocable de révolte sociale (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

…– je ne vous ai pas cité, alors ne vous reconnaissez pas ! – je veux tout d'abord féliciter les services de police pour leur efficacité et leur célérité. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) En effet, il n'a fallu que quarante-huit heures pour obtenir les premières arrestations.

Laissant un instant ma question au ministre de la justice, je m'adresserai au ministre de l'intérieur : monsieur le ministre, tenez bon ! Votre bon sens est compris, même s'il fait réagir les bonnes âmes des beaux quartiers…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Les gens modestes des quartiers populaires, eux, vous donnent raison. Si la gauche vous prend pour cible, vous êtes pour nous un porte-drapeau. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Malheureusement, la Seine-Saint-Denis n'en est pas à son premier drame. Monsieur le garde des sceaux, c'est vous que je souhaite interroger pour connaître les moyens juridiques concrets que vous comptez mettre en oeuvre pour régler ce dossier dans ces quartiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur le député Éric Raoult, comme vous venez de le rappeler, à Noisy-le-Sec, il y a quelques jours, un jeune homme de dix-neuf ans a fait l'objet d'une agression infâme, inadmissible.

Tout d'abord, je voudrais souhaiter son meilleur rétablissement et dire notre compassion à sa famille. En tant que ministre de la justice, je voudrais ensuite féliciter les policiers pour le professionnalisme et la célérité avec lesquels ils ont agi dans cette affaire.

En effet, une dizaine d'individus dont une majorité de mineurs a été interpellée. Ces personnes sont actuellement en garde à vue. Je veux aussi souligner l'efficacité de la vidéosurveillance dans cette affaire…

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

…et les effets de la LOPPSI 2. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Ce fait divers tragique confirme le rajeunissement des auteurs de violences les plus graves ainsi que l'importance des violences collectives.

Très prochainement, je proposerai un projet de loi (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) qui permettra d'adapter la justice des mineurs à ces évolutions, en mettant l'accent sur le respect des principes constitutionnels : meilleure connaissance de la personnalité des auteurs par la création d'un dossier unique de personnalité ; accélération des procédures ; création d'un tribunal correctionnel pour mineurs compétent à l'égard des adolescents récidivistes âgés de seize à dix-huit ans ; augmentation du nombre de places en centres éducatifs fermés pour les mineurs auteurs des faits les plus graves, et cela sans attendre qu'ils soient récidivistes.

Les conditions de détention des mineurs se sont sensiblement améliorées depuis 2003, grâce à la présence éducative des services de la protection judiciaire de la jeunesse dans tous les quartiers pour mineurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Monsieur le garde des sceaux, le 25 août 2005, un immeuble du boulevard Vincent Auriol, dans le XIIIe arrondissement, s'embrasait, faisant dix-sept victimes : trois mères de familles et quatorze enfants de moins de dix ans. Il s'agissait de familles de travailleurs immigrés réguliers mal logées, dramatiques victimes, en quelque sorte, d'une double peine.

A la suite de ce drame, une instruction lente et obscure s'est déroulée pendant cinq ans. Le 10 mars dernier, une audience était programmée. Les familles des victimes et leurs proches attendaient de la République française et de sa justice qu'elles reconnaissent ce drame avec solennité et humanité et fassent place au besoin de vérité.

Devant les conditions d'organisation de ce procès – un jour et demi d'audience seulement, des salles inadaptées pour recevoir les familles, une absence de sonorisation –, la présidente du tribunal a été obligée de reporter la tenue de celui-ci.

Monsieur le ministre, vous qui avez en charge l'administration de la justice, qu'avez-vous à dire à ces familles ? Qu'avez-vous à dire sur leur drame ? Qu'avez-vous à dire sur le fait que notre République n'a pas su leur rendre l'hommage et la vérité nécessaires ?

Si jamais, comme cela nous parait évident, votre ministère ne disposait pas de moyens suffisants, que pensez-vous des propositions du parti socialiste, qui demande l'attribution d'un plan pluriannuel à la justice de notre pays pour qu'elle soit enfin digne des citoyens et qu'elle soit en mesure de rendre justice à l'ensemble des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.- (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Les propositions du parti socialiste, c'est du pipeau !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur Le Guen, comme vous l'avez très justement rappelé, en 2005, plusieurs incendies meurtriers ont touché la capitale, faisant au total 52 morts, pour la plupart des personnes d'origine africaine. Je veux, tout d'abord, assurer toutes ces familles de notre compassion et de notre volonté de voir la justice aboutir à un jugement dans des délais raisonnables – ce qui est aussi un droit constitutionnellement garanti.

Le 10 mars dernier, le tribunal correctionnel de Paris a décidé, comme vous l'avez rappelé, de renvoyer le procès de l'incendie du boulevard Auriol compte tenu de l'exiguïté de la salle d'audience disponible et des conditions matérielles du procès.

Le procureur de la République de Paris a mandaté l'association Paris Aide aux victimes pour apporter aide et réconfort aux familles endeuillées. En effet, bien que nécessaire, l'audience est toujours un moment pénible. Je peux, dès à présent, vous informer que l'audience de fixation aura lieu le 5 mai prochain.

Je vous rappelle que les chefs de juridiction sont maîtres de l'organisation de leurs audiences en vertu du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs.

Pour répondre à votre dernière question, monsieur Le Guen, je rappellerai que la construction d'un nouveau palais de justice est prévue à Paris, pour 162 millions d'euros. Il fait partie du plan de construction que conduit le ministère que je gère. J'espère que, dans quelques jours, nous pourrons choisir définitivement l'architecte qui sera chargé de la construction de ce palais. J'espère que nous aurons tous à coeur de doter Paris d'un nouveau palais de justice : la justice disposera alors de tous les moyens nécessaire pour faire son office. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jacques Remiller, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Remiller

Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, ce lundi, Mme la ministre Kosciusko-Morizet et vous-même avez dévoilé, aux côtés du directeur du Bureau d'enquêtes et d'analyses, M. Jean-Paul Troadec, les premières images des débris localisés de l'épave de l'Airbus AF 447 englouti le 1er juin 2009 dans l'Atlantique.

L'épave de l'avion renferme encore les corps de 228 victimes de la catastrophe. Nous avons tous une pensée particulière pour les familles qui vivent, après deux années de recherche, des moments très douloureux. Cette découverte nous donne enfin l'espoir de trouver des réponses sur les causes du crash du vol Rio-Paris.

Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous donner les éléments de cette découverte, nous préciser quelles sont les prochaines étapes de l'enquête technique, quelles sont les chances de retrouver les boîtes noires, indispensables pour déterminer les circonstances exactes du crash, et surtout quels moyens restent à mettre en place pour que les familles des victimes puissent, selon leur désir, retrouver les corps ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Thierry Mariani, secrétaire d'État chargé des transports.

Debut de section - PermalienThierry Mariani, secrétaire d'état chargé des transports

Monsieur le député, nos premières pensées s'adressent, bien évidemment, aux familles, que Nathalie Kosciusko-Morizet et moi-même avons pu rencontrer hier après-midi. C'est avec une grande émotion que nous avons appris dimanche la découverte de nombreux débris de l'appareil constituant une part importante du vol Rio-Paris qui s'est abîmé en mer il y aura bientôt deux ans.

Nous avons assuré ces familles de l'attachement du Gouvernement à connaître la vérité. La découverte qui vient d'être faite devrait bientôt nous permettre de l'établir.

À ce stade, je peux préciser que les éléments retrouvés appartiennent bien à l'épave recherchée. Les clichés qui nous ont été fournis montrent nettement des pièces de structure de l'avion – les moteurs, le train d'atterrissage, de nombreux débris techniques – ainsi que quelques corps qui seraient dans l'épave.

Ces photos ont été prises dans une zone située à 3 900 mètres de fond. Je tiens, à ce sujet, à saluer la prouesse technologique que cela représente, près de deux après l'accident.

L'objectif maintenant est de cartographier très précisément cette zone pour identifier tous les débris.

Je réunirai avec Nathalie Kosciusko-Morizet le comité d'information des familles de victimes dans les prochains jours afin de leur préciser clairement le calendrier : il s'agira de sélectionner le navire le mieux à même pour ramener les débris de l'avion et, éventuellement, les corps qui pourraient être à son bord.

Cette phase de localisation est déjà un succès. Nous pouvons saluer la prouesse technique qu'elle représente. J'espère qu'elle permettra aux familles de faire complètement le deuil de leurs proches et, pour l'avenir de la navigation aérienne, de connaître enfin la vérité sur les causes de cet accident survenu il y a déjà deux ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Découverte de débris du vol Paris-Rio

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La conférence des présidents, réunie ce matin, a arrêté, pour les séances des mardi 10 et mercredi 11 mai, les propositions d'ordre du jour suivantes :

Proposition de loi relative à l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires ;

Proposition de loi portant diverses dispositions d'ordre cynégétique.

Il n'y a pas d'opposition ?

Il en est ainsi décidé.

Mes chers collègues, je vous rappelle que, immédiatement après les votes solennels, l'Assemblée devra se prononcer sur la publication des comptes rendus des comités secrets de 1870-1871.

La conférence des présidents ayant décidé que l'Assemblée nationale se prononcera par un vote à main levée, je vous demanderai de bien vouloir rester à vos places à l'issue des votes solennels, pour faciliter le bon déroulement de ce scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les explications de vote communes et les votes par scrutin public sur le projet de loi organique relatif à l'élection des députés et des sénateurs, le projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2009-936 du 29 juillet 2009 relative à l'élection de députés par les Français établis hors de France et la proposition de loi portant simplification de dispositions du code électoral et relative à la transparence financière de la vie politique (nos 3200, 3256, 3201, 3257, 3199, 3258).

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Dans les explications de vote communes, la parole est à M. Philippe Houillon, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Houillon

Monsieur le président, monsieur le ministre chargé des collectivités territoriales, mes chers collègues, nous avons examiné, la semaine dernière, en seconde lecture, ce qu'il est convenu d'appeler le « paquet électoral », c'est-à-dire un ensemble de trois textes qui adaptent le droit électoral aux évolutions institutionnelles récentes et à de nouvelles exigences en matière de transparence financière de la vie politique.

Le texte relatif à l'élection de députés par les Français établis hors de France vise simplement à adapter notre code électoral à l'entrée en vigueur, à compter du prochain renouvellement général de notre assemblée, de la disposition de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 prévoyant que nos compatriotes établis hors de France feront désormais l'objet d'une représentation spécifique sur les bancs de cet hémicycle.

Les deux autres textes, relatifs à l'élection des députés et à la transparence financière de la vie politique, ont été plus longuement débattus, à l'Assemblée comme au Sénat. En effet, le projet de loi organique relatif à l'élection des députés, outre qu'il actualise le régime des inéligibilités et des incompatibilités des parlementaires, permettra, en particulier, que la bonne foi puisse être invoquée par les candidats aux législatives, à l'instar de ce qui a déjà lieu pour les autres élections, devant le juge de l'élection. Nous avons avalisé le choix du Sénat de créer une présomption de bonne foi en faveur des candidats dont le compte de campagne a été rejeté, et sa contrepartie, à savoir la possibilité pour le juge électoral d'alourdir la sanction d'inéligibilité à trois ans maximum, contre un an aujourd'hui, et de moduler cette sanction en fonction de la gravité du comportement frauduleux du candidat.

Par ailleurs, la proposition de loi et le projet de loi organique, dont plusieurs articles sont rédigés en miroir, selon qu'ils concernent les parlementaires ou les élus locaux, donnent de nouvelles prérogatives à la Commission pour la transparence financière de la vie politique, afin de renforcer la transparence financière de la vie politique. Nous avons ainsi décidé la création d'une infraction pénale spécifique afin de sanctionner les parlementaires ayant produit une déclaration de situation patrimoniale mensongère auprès de la commission. Ces derniers pourront être condamnés par le juge pénal à 30 000 euros d'amende et aux peines complémentaires d'interdiction des droits civiques et d'interdiction d'exercer une fonction publique.

En outre, la commission pourra désormais obtenir communication des déclarations d'impôt sur le revenu et d'impôt sur la fortune des députés et des sénateurs. Après les avoir demandées aux parlementaires eux-mêmes, elle pourra, à défaut de réponse dans un délai de deux mois, se les faire communiquer par l'administration fiscale.

Enfin, le Sénat a souhaité ajouter une peine supplémentaire d'amende – 15 000 euros – à l'encontre des parlementaires qui n'auraient pas adressé une déclaration dite de fin de mandat. Actuellement, le non-dépôt de cette déclaration n'est sanctionné que par une inéligibilité de un an ; or une telle sanction ne saurait inquiéter un parlementaire qui ne souhaiterait pas se représenter.

En conclusion, nous sommes parvenus à un texte qui respecte l'équilibre entre les droits et les devoirs des députés ; le renforcement des pouvoirs de la Commission pour la transparence, que nous nous apprêtons à voter, le confirme et le rappelle. C'est la raison pour laquelle l'UMP votera ce texte avec conviction. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant leur examen par l'Assemblée nationale, en séance publique, le 20 décembre dernier, ces trois textes avaient fait l'objet d'échanges constructifs entre la majorité et l'opposition, dans un climat consensuel. Ils apparaissaient en effet comme relativement techniques, étant destinés à préciser certaines dispositions du code électoral sur les inéligibilités, les incompatibilités et la transparence financière ou à créer des sièges de députés représentant les Français établis hors de France.

Le groupe socialiste n'était pas défavorable à cet ensemble de propositions, et nous nous abstiendrons, aujourd'hui, sur le projet de loi ordinaire et sur la proposition de loi. Il en va différemment du projet de loi organique, qui a été victime, lors de son examen en première lecture à l'Assemblée nationale, d'un véritable raid qui en a modifié l'esprit. En effet, au mois de décembre, alors que ce texte avait recueilli l'unanimité en commission, MM. Copé et Jacob ont pris une initiative qui a pu paraître improvisée et précipitée – elle a, du reste, surpris jusqu'au rapporteur –, puisqu'ils ont déposé à l'article 1er bis un amendement qui faisait voler en éclats un dispositif qui avait recueilli l'unanimité en commission des lois. Celui-ci consistait, je le rappelle, à sanctionner le député auteur d'une déclaration de patrimoine délibérément mensongère d'une amende de 30 000 euros, d'une mesure d'inéligibilité et d'une peine pouvant aller jusqu'à deux ans de prison.

Cet amendement contredisait les positions du président Warsmann et du rapporteur Charles de La Verpillière, avec lesquels nous avions travaillé en bonne intelligence sur ces trois textes, dégageant un consensus qui satisfaisait aux exigences d'une démocratie parlementaire apaisée et transparente. Enfin, il prenait de court les députés du groupe UMP qui avaient participé aux travaux de la commission des lois.

Finalement, le coup de force n'en était pas un, car l'amendement dit « Copé-Jacob » est devenu la ligne officielle de la majorité parlementaire. En effet, le Sénat n'a pas voulu rétablir une incrimination pénale adaptée à une faute aussi grave que la falsification délibérée d'une déclaration de patrimoine par un député. En dépit des amendements présentés par la gauche sénatoriale et par les centristes, le groupe UMP de la Haute Assemblée n'a rien voulu entendre. Quant à l'examen en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, le 29 mars dernier, il n'a ramené à la raison ni nos collègues de l'UMP ni le rapporteur, qui, le 20 décembre dernier, avait pourtant exprimé un avis défavorable à l'amendement de son président de groupe.

Nous avons donc désormais la certitude, la preuve, la confirmation de votre refus de vous placer sur le même plan que nos concitoyens. Vous ne voulez pas que la loi soit la même pour tous. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Il ne s'agit même pas de prôner l'exemplarité des élus, qui supposerait une sévérité plus grande pour nous ; il s'agit uniquement de respecter l'égalité de traitement entre les parlementaires et les citoyens.

Chers collègues de la majorité, vous irez expliquer aux Français pourquoi les députés organisent leur propre impunité,…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

…alors que, depuis des années, vous votez des lois de plus en plus répressives et sévères pour les justiciables et que l'opinion ressent comme un affront l'institutionnalisation du « deux poids, deux mesures » face à la justice et au droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Vos raisons vous appartiennent, mais, après le désaveu que vous ont infligé vos électeurs les 20 et 27 mars derniers, ils apprécieront le peu de cas que vous faites de leur bulletin de vote.

Le pays ne supporte plus le contraste entre les privilèges que vous vous octroyez et que vous octroyez aux puissants…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

…et le déclassement que votre politique inflige à une majorité de Français. Votre acharnement à ne pas comprendre l'injustice de ce décalage est stupéfiant et votre attitude au sujet de l'article 1er bis du projet de loi organique en est le symbole. Nous voterons donc contre ce texte, et nous saisirons le Conseil constitutionnel au nom du principe d'égalité des citoyens devant la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée.

La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les trois textes soumis à notre examen, d'abord en décembre, puis, en seconde lecture, la semaine dernière, avaient originellement des objectifs louables. Outre l'adoption de règles spécifiques pour l'élection des députés élus par les Français établis hors de France et la mise à jour des inéligibilités applicables aux élections parlementaires, ces trois textes visaient plus généralement à prendre en compte, d'une part, les préconisations formulées par le groupe de travail présidé par Pierre Mazeaud sur la législation relative au financement des campagnes électorales pour les élections législatives et, d'autre part, certaines des propositions de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ainsi que de la Commission pour la transparence financière de la vie politique.

Cette ambition aurait pu ou aurait dû faire consensus. Le débat parlementaire aurait ainsi permis d'améliorer encore notre législation sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Nous aurions pu, en particulier, tous nous entendre afin qu'un député qui omet sciemment des éléments dans la déclaration de patrimoine qu'il effectue au début et à la fin de son mandat soit sanctionné. La commission des lois avait initialement adopté, à l'unanimité, un dispositif prévoyant, dans le cas d'une déclaration de patrimoine délibérément mensongère, une amende de 30 000 euros, une mesure d'inéligibilité et une peine pouvant aller jusqu'à deux ans de prison. C'était compter sans l'action de MM. Copé et Jacob qui, à la veille de Noël, ont présenté in extremis un amendement scandaleux visant à supprimer purement et simplement cette incrimination. Un coup de force qui fut couronné de succès, puisque la majorité, coupant la poire en deux, a maintenu le principe d'une amende mais a supprimé la peine de prison. Ni le Sénat ni notre assemblée n'ont depuis rétabli ces dispositions initiales, en dépit des amendements de la gauche et des centristes.

Ces circonstances pourraient justifier, à elles seules, que nous votions contre ces textes. Il n'est pas acceptable de soustraire aux sanctions pénales les députés qui ont fait de fausses déclarations. Nous le savons tous, nos concitoyens attendent de leurs élus l'exemplarité et la transparence. Avec ce texte, vous leur envoyez un message selon lequel il y a deux poids, deux mesures, vous leur dites que les députés fraudeurs doivent échapper aux peines de prison, quand un simple vol à la tire peut valoir à son auteur trois ans d'emprisonnement. Nous n'acceptons pas semblable injustice.

Vous portez déjà une lourde responsabilité dans la dégradation du climat politique, dans la montée du Front national, dans le peu de confiance que nos concitoyens manifestent à l'égard des institutions, dans la défiance qu'ils éprouvent vis-à-vis de leurs représentants. Croyez-vous que c'est en refusant de sanctionner les députés fraudeurs que vous redonnerez confiance à nos concitoyens ? Croyez-vous que c'est en agissant de la sorte que ceux-ci retourneront aux urnes et cesseront de prêter l'oreille aux propos démagogiques du Front national ?

Vous vous apprêtez d'ailleurs à recommencer au sujet de la question des conflits d'intérêts. Il n'y a qu'à voir l'accueil glacé que la majorité a réservé au rapport de la commission chargée de réfléchir à une moralisation de la vie politique – un rapport qui a déjà fait couler beaucoup d'encre. On ne compte plus les députés de la majorité qui l'ont critiqué ouvertement, à commencer par Jean-François Copé – lui encore – qui déclarait, en dépit des lourdes affaires qui entachent ce quinquennat, qu'« il n'y a pas besoin d'une loi » en la matière.

Votre refus de renforcer les compétences et les pouvoirs d'investigation de la Commission pour la transparence de la vie financière souligne votre absence de volonté politique. Ces compétences et pouvoirs nouveaux constituent pourtant le préalable à la lutte contre les conflits d'intérêts et à cette moralisation de la vie publique que, dans leur immense majorité, nos concitoyens attendent.

Enfin, les débats de la semaine dernière ont mis en relief, une fois de plus, le mépris dans lequel le Gouvernement tient le Parlement. Notre assemblée n'est plus qu'une chambre d'enregistrement où tout débat est interdit, où le Gouvernement use et abuse des instruments de procédure.

Ainsi, la mode est désormais aux secondes délibérations. Lors de nos débats de la semaine dernière, vous avez demandé à votre majorité de revenir sur le vote d'un amendement déposé par un membre de votre majorité une heure plus tôt, et que notre assemblée avait adopté car il soulevait une vraie question – il apportait à tout le moins une précision utile, propre à éclairer le juge sur le statut des moyens de communication électronique. Vous avez demandé à notre assemblée de revenir sur cet amendement non pour un motif de fond, mais simplement pour accélérer l'examen du texte en vous assurant d'un vote conforme par les deux chambres. Vous nous aviez déjà fait le coup lors de l'examen du texte sur le Défenseur des droits et vous vous apprêtez à recommencer à propos de la garde à vue.

C'est proprement inadmissible : vous piétinez le rôle du législateur. Qu'est-ce qu'une assemblée où une mesure ne peut être adoptée, même si elle fait l'unanimité, au motif qu'elle ralentit l'examen du texte ? De qui se moque-t-on ? Si nous n'écrivons plus la loi, que signifie encore le Parlement ? Que signifie la notion de démocratie parlementaire ? Nous vous demandons solennellement de mettre fin à ce type de pratique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

La demande de seconde délibération n'a rien de glorieux. En faire un usage répété peut nous conduire sur un terrain glissant et menacer gravement l'exercice des droits démocratiques.

Dans ces circonstances et pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, les députés de notre groupe voteront contre les textes que vous nous proposez. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de ce processus législatif, c'est d'abord un profond sentiment de regret que je voudrais exprimer au nom de mes collègues du Nouveau Centre. En débattant du nécessaire renforcement de la transparence financière de la vie publique, notre assemblée avait l'occasion de connaître un de ces rares moments de consensus qui font l'honneur du Parlement. Si nous voulons une démocratie respectée de tous, il faut que les responsables publics soient au-dessus de tout soupçon quant à leur intégrité financière, ce qui suppose une vraie transparence de leurs revenus comme de leur patrimoine.

Ce constat, frappé au coin de l'évidence, n'appartient ni à un camp ni à un autre, et, au moment où la crise continue d'exiger de nos concitoyens des sacrifices quotidiens, déclenchant des réflexes de méfiance à l'égard du monde politique, le législateur aurait sans doute gagné à envoyer, sur ce point, un signal fort et clair à chacun de nos compatriotes.

En première comme en deuxième lecture, nos débats se sont cristallisés sur une question très précise : l'opportunité de sanctionner ou non pénalement le fait, pour un député, de fournir sciemment une déclaration de patrimoine mensongère à la Commission pour la transparence financière de la vie politique – une commission précisément chargée de contrôler qu'aucun élu ne profite de son mandat à des fins d'enrichissement personnel. Il s'agissait simplement, en la matière, de répondre à une lacune de notre législation, qui prévoit une sanction en cas d'absence de déclaration de l'élu, mais qui, paradoxalement, n'en prévoit aucune en cas de déclaration volontairement incomplète ou frauduleuse. À ce titre, la commission des lois avait, en première lecture, adopté à l'unanimité une solution de consensus : rendre ce comportement passible d'une peine de deux ans d'emprisonnement, de 15 000 euros d'amende et de la privation des droits civiques, lorsqu'il procède d'une intention délibérée.

Pourtant, au cours de nos débats, plusieurs de nos collègues de la majorité ont souhaité, par voie d'amendements, remettre en cause ce dispositif pourtant essentiel pour préserver la moralité de la vie publique. Sur cette question devenue un symbole, la solution retenue par notre assemblée, qui maintient une incrimination spécifique tout en écartant la peine de prison, est profondément regrettable en ce qu'elle laisse croire que le fait, pour un élu, de mentir délibérément sur le niveau de ses revenus ou l'étendue de son patrimoine ne constituerait finalement qu'une infraction mineure. Le groupe Nouveau Centre s'était opposé à cette mesure.

Son adoption est d'autant plus regrettable que, au-delà de cette seule disposition, ce paquet électoral est porteur de mesures qui constituent, pour la plupart, des avancées réelles et significatives en faveur de la transparence financière de la vie publique. À ce sujet, je veux saluer l'initiative de nos collègues sénateurs qui ont choisi, à l'occasion de ce débat, d'étendre enfin aux élections sénatoriales les règles de droit commun relatives aux comptes de campagne.

Cependant, voter ces textes aujourd'hui reviendrait à s'associer à ce qui constitue désormais une véritable faute politique. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe NC.) C'est pourquoi, si nous soutenons, au sein de ce paquet électoral, l'ensemble des dispositions relatives à l'élection de députés par les Français établis hors de France, nous nous abstiendrons, car nous considérons que son volet relatif à la transparence financière de la vie politique est insuffisant. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, nous allons maintenant procéder à trois votes solennels successifs.

Je vous rappelle que, immédiatement après ces trois votes solennels, l'Assemblée devra se prononcer sur l'autorisation de la publication des comptes rendus des débats en comité secret de 1870 et 1871.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je vais donc mettre aux voix en premier lieu le projet de loi organique relatif à l'élection des députés et des sénateurs.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 535

Nombre de suffrages exprimés 524

Majorité absolue 263

Pour l'adoption 312

Contre 212

(Le projet de loi organique est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je vais maintenant mettre aux voix le projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2009-936 du 29 juillet 2009 relative à l'élection de députés par les Français établis hors de France.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 528

Nombre de suffrages exprimés 354

Majorité absolue 178

Pour l'adoption 308

Contre 46

(Le projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je vais maintenant mettre aux voix la proposition de loi portant simplification de dispositions du code électoral et relative à la transparence financière de la vie politique.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 538

Nombre de suffrages exprimés 354

Majorité absolue 178

Pour l'adoption 289

Contre 65

(La proposition de loi est adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, l'Assemblée doit se prononcer, en application de l'article 51, alinéa 3, du règlement, sur la publication des comptes rendus des débats en comité secret de 1870-1871.

Je vous rappelle que l'Assemblée est invitée à se prononcer par un vote à main levée.

(Il est procédé au vote.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'Assemblée nationale a autorisé la publication des comptes rendus des débats en comité secret de 1870-1871.

Vote en application de l'article 51, alinéa 3, du règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures cinquante, sous la présidence de M. Jean-Christophe Lagarde.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant la ratification du protocole modifiant le protocole sur les dispositions transitoires annexé au traité sur l'Union européenne, au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et au traité instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique, et la discussion du projet de loi relatif à l'élection des représentants au Parlement européen (nos 2932, 3287, 2931 et 3246).

La conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

La parole est à M. Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, l'Europe est un édifice en perpétuelle construction et le fruit de compromis politiques qui forment autant de briques qui en consolident les fondements. L'élévation d'une Europe politique, dans laquelle les citoyens européens se reconnaissent, est un enjeu prioritaire pour l'avenir communautaire. La consolidation de cette Europe démocratique est au coeur des deux projets de loi que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui.

Le premier autorise la ratification du protocole adopté par la conférence intergouvernementale du 23 juin 2010 qui prévoit des mesures transitoires nécessaires pour augmenter, jusqu'au terme de la législature 2009-2014, le nombre des membres du Parlement européen.

Le second, relatif à l'élection des représentants au Parlement européen, a un double objectif : fixer les modalités de l'élection des deux représentants français supplémentaires au Parlement européen prévus par le traité de Lisbonne et redonner aux Français établis à l'étranger la possibilité de voter aux élections européennes.

Je ferai trois remarques. La première concerne la ratification du protocole qui transcrit en droit positif l'accord politique obtenu au Conseil européen de juin 2009, de façon que chaque État membre concerné puisse pourvoir ces sièges en attendant les prochaines élections.

Le traité de Lisbonne, signé le 13 décembre 2007, a fixé à 750 membres, plus le président, les effectifs du Parlement européen. Il a ainsi attribué dix-huit sièges supplémentaires au Parlement européen à douze États, dont deux à la France, mais il est entré en vigueur le 1er décembre 2009. Ces deux députés supplémentaires n'ont donc pas pu être pris en compte lors des dernières élections au Parlement européen, qui se sont tenues en juin 2009, soit six mois avant l'entrée en vigueur du traité.

Ces élections ont désigné le nombre de représentants fixé par le traité de Nice, soit soixante-douze pour la France, au lieu de soixante-quatorze en vertu du traité de Lisbonne.

Au lendemain des élections européennes, le Conseil européen des 18 et 19 juin 2009 a précisé le contenu des mesures transitoires nécessaires pour augmenter, jusqu'au terme de la législature 2009-2014, le nombre des membres du Parlement européen. Un an après, la conférence intergouvernementale du 23 juin 2010 a formellement approuvé le protocole actant ces dispositions transitoires.

Pour permettre l'entrée en vigueur de ce protocole, la France doit, comme ses vingt-six partenaires, adopter le projet de loi autorisant sa ratification. Celui-ci a été soumis à l'examen de votre commission des affaires étrangères et il fait l'objet d'une discussion commune avec le projet de loi sur les modalités de désignation par la France des deux députés européens supplémentaires. Ce second texte modifie à cette fin la loi du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen.

Le protocole sur les mesures transitoires offre aux douze États membres concernés trois options pour désigner leurs eurodéputés supplémentaires respectifs.

La première consiste en l'organisation d'élections spéciales, au suffrage universel direct, selon les modalités d'élection habituelles des représentants au Parlement européen.

La deuxième est de recourir aux résultats des élections européennes de juin 2009.

La troisième est la désignation par le Parlement national, en son sein, du nombre de députés requis, « pour autant que les personnes en question aient été élues au suffrage universel direct ».

C'est cette dernière solution qu'a choisie le Gouvernement français. L'Assemblée nationale est donc appelée à élire en son sein les deux eurodéputés supplémentaires. Le mode de scrutin appliqué à cette élection est celui de la représentation proportionnelle, sur la base de listes paritaires comprenant quatre candidats pour faire face aux éventuelles vacances.

Ces nouveaux députés européens se verront appliquer les incompatibilités, les inéligibilités et le système de remplacement par le suivant de liste prévus par la loi du 7 juillet 1977.

Dernière précision : l'entrée en vigueur de ces dispositions est liée à celle du protocole du 23 juin 2010.

Ma deuxième remarque porte sur les modalités de désignation des deux députés européens français supplémentaires. Elles constituent une réponse pragmatique…

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

…à une situation transitoire.

La solution choisie par le Gouvernement français est une solution pragmatique, conforme au droit européen et validée par le Conseil d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est une manipulation ! Elle est antidémocratique. Utilisez donc des mots plus mesurés pour en parler !

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Elle présente bon nombre d'avantages : la simplicité, la rapidité, la qualité d'une représentation par des parlementaires déjà élus au suffrage universel direct, conformément aux orientations du Conseil européen des 18 et 19 juin 2009, sans oublier son faible coût.

La France a donc choisi une option juridiquement sûre, lisible, équilibrée et respectueuse des deniers publics. Les deux autres options présentaient à nos yeux des inconvénients plus difficiles à surmonter.

La désignation rétroactive sur la base des élections européennes de juin 2009 – c'est-à-dire en choisissant le suivant de liste – a été écartée pour deux raisons. D'abord, elle présentait une difficulté d'ordre constitutionnel, car la loi serait venue affirmer a posteriori que deux personnes n'ayant pas été déclarées élues au soir des élections devraient désormais être considérées comme l'ayant été,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Cela arrive régulièrement ! M. Hortefeux non plus n'a pas été déclaré élu.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

…alors même que les listes présentées aux électeurs n'avaient pu faire état d'un nombre supérieur de sièges à pourvoir, et donc de candidats à élire. Il y aurait là une forte atteinte au principe de sincérité du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Mais tout cela, on le savait ! C'était écrit dans les traités !

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Il y avait ensuite une difficulté d'ordre technique, liée à notre méthode de recensement annuel de la population : la répartition des sièges entre nos huit circonscriptions régionales n'est pas la même selon que l'on se fonde sur les recensements au 1er janvier 2007 ou au 1er janvier 2008, connus respectivement à la fin de l'année 2009 et de l'année 2010, ou sur le recensement au 1er janvier 2006, publié à la fin 2008 et sur lequel s'appuie la répartition utilisée pour les élections de juin 2009.

Le résultat serait de donner un siège aux circonscriptions Nord-Ouest et Ouest dans le premier cas, un siège aux circonscriptions Nord-Ouest et Est dans le second, avec des élus de partis différents dans les deux hypothèses. Or nos règles électorales nous imposent de toujours répartir les sièges en fonction des derniers chiffres disponibles à la date de l'élection. Le choix de la date pour la population de référence – 2008, 2009 ou 2010 – aurait eu une influence sur le résultat final qui, dès lors, aurait été contestable.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Face à ces risques, le Gouvernement a préféré choisir une solution plus sûre sur le plan juridique.

La troisième option est l'organisation d'une élection partielle. Cette solution, consistant à élire deux députés européens – soit au niveau national, soit au niveau de deux grandes circonscriptions régionales – a été écartée en raison de son coût, de la faible participation probable et de son caractère peu approprié à l'élection de deux députés européens.

Lorsque cette situation provisoire prendra fin, c'est-à-dire en 2014, les deux sièges se fondront dans les soixante-quatorze à pourvoir, répartis entre les huit circonscriptions en fonction de leur population authentifiée à la fin de 2013.

Le projet de loi qui vous est soumis répond certes à une situation ponctuelle et transitoire, mais il résout aussi un problème plus structurel lié à la participation des Français établis hors de France aux élections européennes. L'exercice du droit de vote des Français établis hors de France est une préoccupation permanente et partagée, vous le savez. Nous en avons débattu récemment pour l'élection des députés représentant les Français établis hors de France dans le cadre de l'examen du « paquet électoral ». Pour les élections européennes, la problématique reste la même.

Jusqu'en 2003, les Français établis à l'étranger pouvaient voter dans les centres de vote consulaires pour les élections européennes, puisque celles-ci avaient lieu dans le cadre d'une liste nationale. En rapprochant les électeurs des députés européens grâce à la création des huit circonscriptions interrégionales, la loi du 11 avril 2003 relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen leur a supprimé cette possibilité. Seuls les électeurs résidant dans un pays de l'Union ou inscrits sur une liste électorale en France pouvaient voter, les premiers pour des listes présentées dans leur pays de résidence, les autres pour des listes présentées dans leur circonscription régionale de rattachement.

Ces deux possibilités étant peu utilisées, la participation des Français établis hors de France a été très limitée aux élections européennes de 2004 et de 2009.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

De plus, sur environ 1,4 million de Français établis à l'étranger, quelque 330 000 électeurs ne pouvaient pas prendre part du tout à l'élection des représentants au Parlement européen, car ils résidaient hors de l'Union européenne et n'étaient pas inscrits sur une liste électorale en France.

Depuis 2003, plusieurs propositions de loi ont été déposées sur ce sujet, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. L'Assemblée des Français de l'étranger a, elle aussi, très vivement souhaité revenir au dispositif antérieur. Plus récemment, l'adoption par le Sénat d'une proposition de loi rétablissant la circonscription nationale unique pour l'élection des députés européens a été justifiée par la volonté de redonner à nos concitoyens établis à l'étranger la possibilité d'y participer.

Pour répondre à cette préoccupation, qu'il fait sienne, le Gouvernement a choisi de s'inspirer de la rédaction d'une proposition de loi déposée à la fin de 2008 par les députés Thierry Mariani et Jean-Jacques Urvoas, dont je veux saluer le travail. Votre commission avait adopté ce texte de façon consensuelle lors de sa réunion du 6 janvier 2009.

Le chapitre II du projet de loi propose en conséquence de rétablir la possibilité de voter dans les centres de vote consulaires pour les Français établis hors de France – qu'ils résident dans un des pays de l'Union européenne ou dans un autre pays – et de les rattacher à la circonscription d'Île-de-France.

Mesdames et messieurs les députés, fidèle à ses engagements européens, qu'elle a puissamment contribué à façonner, la France poursuit sa marche en avant vers la construction d'une Europe politique plus forte et plus démocratique. Les deux projets de loi qui vous sont soumis aujourd'hui en sont une démonstration de plus. Ils confirment, confortent et mettent en oeuvre nos engagements européens dans le cadre de l'impulsion politique donnée par les chefs d'État et de gouvernement des États membres de l'Union européenne à Lisbonne en décembre 2007. Je vous invite donc à vous y rallier sans réserve. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

La parole est à M. Jean-Marc Roubaud, rapporteur de la commission des affaires étrangères, pour le projet de loi autorisant la ratification du protocole au traité sur l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

Monsieur le président,monsieur le ministre, mes chers collègues,le protocole modifiant le protocole sur les dispositions transitoires annexé aux traités vise à permettre l'entrée au Parlement européen, pendant la législature 2009-2014, de dix-huit représentants supplémentaires, issus de douze États membres. La France, qui figure parmi ces États, verrait ainsi son contingent passer de soixante-douze à soixante-quatorze députés européens. Les élections européennes du 4 au 7 juin 2009 se sont en effet déroulées sous l'égide des dispositions du traité de Nice et ont conduit à élire 736 députés, soit quinze de moins que ne le permet le traité de Lisbonne, et selon une répartition obsolète.

Le protocole modificatif a donc un triple objet. Il vise d'abord à rendre effectif l'accord sur la composition du Parlement européen qui n'a pu être appliqué ; ensuite à déroger au traité de Lisbonne pour la durée de la législature restante, en fixant le nombre total de députés européens à 754, étant entendu que le mandat de trois des quatre-vingt-dix-neuf députés allemands élus en 2009 ne saurait être interrompu ; enfin à fixer les options ouvertes aux États membres pour la désignation des députés supplémentaires.

Tout cela ayant fort bien été rappelé par M. le ministre, je ne reviendrai pas sur les conditions qui fixent l'accord de ce traité. Je m'arrêterai simplement sur les trois options qui ont été formulées par le Conseil européen de juin 2009.

Il était, en premier lieu, possible d'organiser une élection ad hoc. Comme M. le ministre l'a rappelé à l'instant, le coût et la faible participation étaient un obstacle. Cette option a donc été écartée par la France.

Deuxièmement, on pouvait faire référence aux résultats des élections européennes de juin 2009, ce qui aurait entraîné un certain nombre d'inégalités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

La troisième option – que nous avons retenue – est la désignation par le Parlement national, en son sein, du nombre de députés requis.

Ces options sont assorties de deux limites : les sièges ne peuvent être pourvus que par des personnes élues au suffrage universel direct et, en cas de désignation par un Parlement en son sein, les règles de non-cumul des mandats doivent s'appliquer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

Le protocole a été adopté dans ces termes par la Commission le 27 avril 2010, puis par le Parlement européen le 10 mai 2010. Celui-ci a également donné son feu vert pour réunir une conférence intergouvernementale, sans convoquer de convention. Elle se réunit le 23 juin 2010 et approuve le projet de protocole, permettant de lancer la phase des ratifications.

Où en sommes-nous désormais ? Je ne présenterai pas les modalités choisies par la France, puisque tel est notamment l'objet du projet de loi relatif à l'élection des représentants au Parlement qui – et c'est fort heureux – est aujourd'hui en discussion commune avec le projet de loi de ratification du protocole. Permettez-moi en revanche de faire un point plus général sur le calendrier des ratifications en Europe. C'est d'autant plus important que la désignation des deux représentants supplémentaires français n'interviendra que lorsque le protocole sera entré en vigueur.

Le protocole prévoit d'entrer en vigueur après ratification par les États « si possible le 1er décembre 2010 ». Il est vite apparu que cette date était compromise. Le protocole entrera donc en vigueur le premier jour du mois qui suit le dépôt de l'instrument de ratification du dernier État à procéder à cette formalité.

À ce jour, dix-neuf États ont ratifié le protocole, dont quinze ont déposé les instruments de ratification. Huit États ne l'ont pas encore ratifié : l'Allemagne, la Belgique, la Grèce, la Lituanie, les Pays-Bas, la Roumanie, le Royaume-Uni et la France. Dans tous ces pays, le processus est lancé, mais des incertitudes entourent encore certaines procédures, pour des raisons institutionnelles, juridiques ou politiques. Au Royaume-Uni par exemple, la ratification du Parlement est incluse dans un projet de loi imposant la tenue d'un référendum sur tout nouveau transfert de compétences du Royaume-Uni à l'Union européenne, en cours d'examen. Bref, il n'est pas possible de donner une date, même prévisionnelle, d'entrée en vigueur du protocole.

S'agissant de la désignation des eurodéputés, certains des douze États concernés avaient prévu qu'ils seraient désignés selon les résultats du scrutin du 7 juin 2009. Il s'agissait de l'Espagne, de l'Autriche, de la Lettonie, de la Suède, de Malte et de la Bulgarie. Tous les autres États, hormis la France, se sont ralliés au système des suivants de liste, mais tous n'ont pas adopté la modification de leur législation lorsqu'elle était nécessaire. On peut à nouveau citer l'exemple du Royaume-Uni. L'Italie, comme la France, n'a pas encore fait connaître le nom de son député supplémentaire.

Les eurodéputés déjà désignés sont dans l'attente. Même si, le 25 novembre 2009, le Parlement européen a modifié son règlement pour leur permettre d'entrer avec un statut d'observateur, il est peu probable que cette solution soit mise en oeuvre. Des arrivées échelonnées ne sont pas souhaitables et certaines des procédures de désignation des futurs députés ne sont pas encore terminées. D'ailleurs, aucune décision formelle du bureau du Parlement européen n'est intervenue.

Il est donc plus que souhaitable que le protocole puisse rapidement entrer en vigueur, indépendamment des débats que peut susciter le mode de désignation choisi par la France. C'est d'ailleurs la position qu'a eue le Parlement européen lui-même.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter le projet de loi de ratification du protocole permettant la mise en oeuvre de dispositions uniquement transitoires, mais très importantes pour certains de nos voisins. Ces dix-huit nouveaux députés, parmi lesquels, je le rappelle, figureront deux Français, pourront d'ailleurs ainsi participer aux travaux qui conduiront à déterminer la composition du Parlement à compter de 2014. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

La parole est à M. Jean Tiberi, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour le projet de loi relatif à l'élection des représentants au Parlement européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Monsieur le président, monsieur le ministre,mes chers collègues, comme vient de l'indiquer M. Jean-Marc Roubaud, rapporteur de la commission des affaires étrangères, le protocole européen du 23 juin 2010 permet à chaque État membre de décider des modalités de désignation des députés européens supplémentaires à la suite de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

S'agissant de la France, la nouvelle répartition du nombre de sièges de députés au Parlement européen conduit notre pays à bénéficier de deux représentants supplémentaires par rapport au nombre de sièges pourvus lors des élections européennes du 7 juin 2009, soit soixante-quatorze sièges au lieu de soixante-douze.

Pour attribuer ces sièges supplémentaires, le protocole du 23 juin 2010 offre trois solutions : l'organisation d'élections partielles ; la désignation de suivants de liste sur la base des résultats des élections européennes de 2009 ; l'élection par le Parlement national parmi ses membres élus au suffrage universel direct.

C'est cette dernière option, prévue par l'Europe, qu'a retenue le Gouvernement français. C'est l'objet du projet de loi relatif à l'élection des députés au Parlement européen, que la commission des lois a examiné et adopté le 16 mars dernier.

Ce projet de loi prévoit que les deux députés européens supplémentaires seront désignés par l'Assemblée nationale en son sein, lors d'une élection à la représentation proportionnelle. Il s'agit d'une dérogation exceptionnelle, autorisée par le protocole européen, au principe de l'élection au suffrage universel direct des membres du Parlement européen.

La France est certes le seul des douze États bénéficiaires de sièges supplémentaires à avoir choisi cette procédure d'élection au sein des membres de son Parlement. Les onze autres États concernés ont opté pour une désignation en fonction des résultats des élections européennes de juin 2009, certains ayant même retenu cette solution dès avant la tenue de ce scrutin.

Il est vrai qu'il aurait peut-être été préférable que la question soit réglée en amont, avant les élections de 2009. Peut-être aurait-il fallu conditionner l'attribution de deux sièges supplémentaires à l'augmentation des effectifs du Parlement européen ? Mais, dès lors que cela n'a pas été fait, la procédure proposée dans le projet de loi est, me semble-t-il, la moins contestable qui soit.

En effet, désigner nos deux représentants supplémentaires en se référant aux résultats des élections européennes de 2009 aurait entraîné d'importants risques juridiques. D'une part, désigner rétroactivement davantage d'élus que le nombre de sièges pour lequel les électeurs ont été appelés aux urnes pourrait être jugé inconstitutionnel au regard des « exigences de clarté et de loyauté » des élections, au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. D'autre part, l'identité des candidats qui seraient déclarés élus, près de deux ans après les élections, n'est pas incontestable. Si l'on appliquait strictement les mêmes règles qu'au moment des élections de 2009, il s'agirait de deux candidats Europe Écologie, dans les régions Nord-Ouest et Est.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Laissez M. Tiberi poursuivre, vous aurez l'occasion de lui répondre tout à l'heure.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Vous avez montré, au cours d'une longue carrière, que vous aviez l'habitude de respecter le vote des électeurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Ne soyez pas impatients, laissez le rapporteur s'exprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Depuis les élections de 2009, un fait nouveau doit être pris en compte : la démographie a évolué. Si bien que les deux sièges devraient aujourd'hui revenir aux régions Nord-Ouest et Ouest, donc à un candidat Europe Écologie et à un candidat UMP. Nous devons tenir compte de l'évolution de la démographie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Ce dernier point est d'ailleurs ce qui singularise la France par rapport à beaucoup d'autres États de l'Union européenne : avant même d'être attribués en fonction des résultats obtenus par les différentes listes, les sièges de députés européens sont répartis à la proportionnelle entre huit grandes circonscriptions interrégionales. Désigner des suivants de liste supposerait donc de déterminer, au préalable, quelle circonscription régionale devrait bénéficier de sièges supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Face à ces incertitudes et à ces risques juridiques, le Gouvernement a préféré opter pour une désignation de nos deux représentants supplémentaires par l'Assemblée nationale. Cette élection interviendra, cela a été rappelé tout à l'heure, une fois que le protocole européen sera entré en vigueur, ce qui suppose naturellement qu'il ait été ratifié par les vingt-sept États membres.

Mais le projet de loi relatif à l'élection des députés au Parlement européen ne se limite pas à régler cette difficulté ponctuelle. Il propose également une réforme pérenne, consistant à élargir les possibilités de vote aux élections européennes pour nos compatriotes résidant à l'étranger. Il s'agit de donner aux Français établis hors de France la possibilité de voter dans les centres de vote consulaires lors des élections européennes. En effet, en 2003, la réforme du mode de scrutin avait privé les Français de l'étranger de cette faculté, ne leur permettant plus de voter que dans une commune française ou, le cas échéant, dans un État membre de l'Union européenne, pour désigner, dans ce cas, les représentants de cet État membre.

Or, en 2010, on comptait près de 394 000 Français de l'étranger résidant hors de l'Union européenne et n'étant pas inscrits sur une liste électorale en France, soit 394 000 citoyens privés de toute possibilité d'exercice de leur droit de vote aux élections européennes. Afin de remédier à cette situation, le projet de loi rétablit la possibilité de participer au scrutin européen dans les bureaux de vote consulaires, en rattachant les Français de l'étranger à la circonscription d'Île-de-France. Cette réforme s'inspire d'ailleurs d'une proposition de loi qu'avaient présentée en 2009 deux de nos collègues de la commission de lois, M. Thierry Mariani et M. Jean-Jacques Urvoas – au moins serons-nous d'accord là-dessus, sur tous les bancs de cette assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Je précise que la réforme s'appliquera à l'ensemble des Français de l'étranger, y compris à ceux résidant dans un État de l'Union européenne. Il conviendra donc de mettre en place des procédures permettant de garantir l'absence de tout double vote. Il faudra en effet s'assurer qu'un Français qui aura voté pour élire les représentants de son État de résidence ne vote pas une seconde fois, dans un bureau de vote consulaire, pour élire les représentants français au Parlement européen. Une étroite collaboration entre les autorités françaises et les autres États européens sera donc nécessaire.

Au bénéfice de cette observation, je vous invite, mes chers collègues, au nom de la commission des lois, à adopter le projet de loi relatif à l'élection des députés au Parlement européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

La parole est à M. Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Lequiller

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les deux projets de loi dont nous débattons sont les fruits d'anciens compromis européens. Pour mettre fin à l'inflation des effectifs du Parlement européen, soumis à rude tension avec l'élargissement, le traité de Nice avait décidé de réduire le nombre d'eurodéputés de 785 à 736 membres, tout en figeant dans les traités la répartition des effectifs par pays, qui avait donné lieu à beaucoup de discussions.

Pour régler définitivement cette question, le traité de Lisbonne a fixé, une fois pour toutes, un plafond pérenne de 751 membres et s'en est remis au Conseil européen, à l'unanimité et sur initiative du Parlement européen, pour faire évoluer les contingents nationaux. C'est un progrès considérable.

L'idée des signataires du traité à la fin de 2007 était évidemment d'appliquer ces nouvelles règles dès les élections européennes de 2009. Mais les choses ne se sont pas déroulées comme prévu. En juin 2008, le non irlandais a menacé l'avenir du traité de Lisbonne et, rapidement, il est apparu que nous devrions tenir les élections de 2009 sous l'empire du traité de Nice, donc, dans notre pays, avec soixante-douze eurodéputés contre soixante-dix-huit sortants, alors que le traité de Lisbonne accorde à la France soixante-quatorze députés européens.

Toutefois, dès décembre 2008, les États qui gagnaient de nouveaux représentants avec la répartition du traité de Lisbonne ont souhaité que l'on s'organise pour désigner les nouveaux eurodéputés en cours de mandature, si d'aventure le traité de Lisbonne entrait en vigueur peu de temps après les élections.

Il ne faut pas oublier le contexte d'alors, très délicat. Le second référendum irlandais se dessinait, et avec lui la nécessité absolue d'éviter, de quelque manière que ce soit, de donner l'impression d'en préempter l'issue. Dès lors, les élections de 2009 ont porté en France sur soixante-douze députés. Ce n'est donc qu'au lendemain de l'entrée en vigueur du nouveau traité, en décembre 2009, que nous avons eu concrètement à nous saisir du sujet.

La question s'est d'ailleurs compliquée d'une nouvelle demande de l'Allemagne, seul pays dont le contingent diminuait entre les deux traités. Il était en effet difficile d'imaginer que l'Allemagne interrompe brutalement le mandat de trois de ses eurodéputés, quelques mois seulement après leur élection. C'est la raison qui a motivé, dans le projet de loi de ratification qui nous est soumis, la révision temporaire du plafond de 751 eurodéputés, pour le porter à 754 jusqu'à la fin de la législature.

S'y ajoutaient des difficultés propres à notre pays – que M. Tiberi a fort justement rappelées. En effet, notre tradition électorale ne connaît pas l'application rétroactive de dispositions électorales. En outre, la répartition des deux nouveaux députés se heurte à l'extrême homogénéité de nos circonscriptions dont le poids et le nombre d'électeurs respectifs ont évolué entre le recensement de 2006, qui a servi de fondement aux élections de 2009, et les recensements suivants, désormais disponibles.

Face à cette situation, les vingt-sept chefs d'État et de gouvernement unanimes ont décidé, dès juin 2009, de laisser aux États la possibilité de confier cette désignation, en leur sein, aux Parlements nationaux, à la condition que les futurs eurodéputés procèdent du suffrage universel direct.

Cette solution est évidemment tout à fait transitoire. Je rappelle en effet qu'elle ne vaudra que jusqu'à la fin de la législature 2009-2014. Elle nous est dictée par des contraintes juridiques fortes. C'est ce contexte exceptionnel que j'ai personnellement expliqué à nos partenaires, au Parlement européen auprès d'Íñigo Méndez de Vigo, rapporteur du projet, et au Bundestag, auprès de Gunther Krichbaum, président de la commission des affaires européennes, qui en ont tenu compte dans leurs prises de position.

Nous voici donc devant un choix de raison. Je suis certain que l'Assemblée nationale saura choisir des parlementaires de talent, prêts à représenter la France et à faire avancer l'Union avec ardeur et conviction.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Lequiller

En tant que président de la commission des affaires européennes, je suis donc évidemment favorable à l'adoption de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

J'ai reçu de M. Yves Cochet et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement, sur le projet de loi relatif à l'élection des représentants au Parlement européen.

La parole est à M. François de Rugy, pour une durée ne pouvant excéder trente minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens, pour commencer, à saluer, non sans ironie, la performance remarquable du Gouvernement. En effet, chaque fois que l'on pense avoir atteint des sommets en matière de manipulation de la démocratie, un nouveau projet de loi fait surface pour pousser encore le déni à son paroxysme ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

François Bayrou, qui n'est pas membre de notre groupe, a parlé, lors de l'examen de ce texte en commission, de « scandale à l'état pur » : je le rejoins pleinement.

Vous n'avez pas de chance, monsieur le ministre. Depuis votre nomination, vous êtes préposé à la défense de ces textes indéfendables. Après la loi sur les conseillers territoriaux, vous voilà à présent aux prises avec ce texte sur les eurodéputés, véritable déni de démocratie !

Je m'étonne par ailleurs, monsieur Tiberi, que l'on vous ait choisi pour être le rapporteur de ce texte. Est-ce dû à votre expérience en matière de contentieux électoral ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Ne vous énervez pas, monsieur Tiberi ! Il me semble que, pour vos nombreuses élections, vous avez toujours appelé vos adversaires à respecter le résultat des urnes, et vous auriez dû faire de même pour les élections européennes. Voilà pourquoi je me suis permis cette allusion à différentes affaires dans lesquelles vous avez dû vous défendre.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Ce n'est pas une accusation, mais le simple constat, ironique, d'une situation pour le moins paradoxale…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Vous omettez de parler de la fraude électorale à Aubagne, en 1998 !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Monsieur Deflesselles, vous souhaitez parler des Bouches-du-Rhône ? Vous connaissez la position des élus d'Europe Écologie dans votre département…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Monsieur le président, vous ne grandissez pas votre fonction en m'insultant ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous vous êtes tout à l'heure déclaré « évidemment » favorable à l'adoption de ce texte – sans grande conviction, cependant –, mais, si vous défendiez vraiment l'Europe, dont vous avez la charge, vous défendriez son seul espace de démocratie, à savoir le Parlement européen, seule instance dont les membres sont élus au suffrage universel direct. Au lieu de cela, vous défendez une manipulation électorale, tout en m'insultant de surcroît !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Cher collègues, je vous invite à vous recentrer sur notre sujet et vous rappelle que ce débat a vocation à définir la manière dont nous allons être représentés au Parlement européen, ce qui devrait vous inciter à conserver un minimum de dignité.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Merci, monsieur le président, d'avoir rappelé à l'ordre le collègue qui vient de m'insulter !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il y a maintenant presque deux ans, se déroulait en France l'élection de soixante-douze députés européens, danssept circonscriptions métropolitaines et une circonscription ultramarine. À ces soixante-douze eurodéputés doivent s'ajouter deux députés supplémentaires, ainsi que le prévoit le traité de Lisbonne, signé en décembre 2007, soit un an et demi avant la tenue des élections européennes de juin 2009, ce qui laissait le temps d'anticiper et de mettre en place une méthode démocratique de désignation. Mais vous avez vous-même déploré en commission, monsieur le rapporteur, que l'anticipation n'ait pas été de mise, et l'on ne peut que vous rejoindre sur ce point.

À plusieurs reprises, le Gouvernement a été interrogé à ce sujet. Ainsi, en mai 2009, soit un mois avant les élections, notre collègue sénatrice Marie-Christine Blandin adressait une question écrite au secrétaire d'État aux affaires européennes : aucune réponse ne lui est parvenue. Les responsables politiques d'Europe Écologie sont également intervenus auprès du Président de la République, lorsqu'il les a reçus, comme tous les partis politiques après les élections. Notre députée européenne Hélène Flautre a enfin cherché, à maintes reprises, à obtenir des réponses par des interpellations publiques, sans succès.

Ces deux « députés Lisbonne » créent une situation juridique et politique inédite dans l'histoire de la construction européenne, particulièrement en France du fait de son impréparation, voulue ou non – chacun en jugera. La volonté d'accélérer le processus pour éviter un flou juridique, dans un souci de démocratie et de transparence, a donc toujours été notre mot d'ordre. C'est pourquoi il nous est insupportable aujourd'hui d'avoir à débattre d'un texte qui est le plus pur produit de la démarche inverse.

Alors que nos concitoyens se sont prononcés par les urnes, en juin 2009, pour choisir leurs représentants au Parlement européen, comme cela se fait depuis 1979, ce projet de loi décide de ne pas se référer à leur vote. Alors que le protocole du 23 juin 2010 offrait à chaque État concerné le choix entre trois scénarios, la France a choisi de faire cavalier seul, optant pour la solution qu'elle avait été la seule à demander : la désignation par le Parlement, en son sein, des deux députés européens supplémentaires. Cette option, confrontée aux deux autres scénarios proposés – l'élection au suffrage universel direct ou la référence aux résultats des dernières élections européennes – est la seule qui ne permette pas aux citoyens de choisir eux-mêmes leurs représentants à Bruxelles et Strasbourg.

Comment peut-on se plaindre de l'abstention si l'on ne respecte pas le résultat d'une élection ? Une nouvelle fois, l'exécutif et sa majorité rejettent les méthodes démocratiques…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…à moins que cette majorité ne vote contre, ce qui serait une excellente nouvelle. Il est plus que jamais temps de redonner des couleurs à notre démocratie en berne : tel est l'objectif de cette motion de rejet préalable.

Comment peut-on soutenir sciemment un tel projet de loi ? J'avoue que je ne comprends pas, mais M. Deflesselles nous l'expliquera peut-être tout à l'heure, calmement, posément, avec force arguments.

Dans un contexte qui engage l'Union européenne, alors qu'il s'agit là de la seule représentation démocratique des peuples européens qui existe en son sein, la voie du résultat des élections européennes s'imposait. Douze États membres – l'Espagne, la Suède, l'Autriche, le Royaume-Uni, l'Italie, la Pologne, les Pays-Bas, la Bulgarie, la Lettonie, la Slovaquie, Malte et la France – sont concernés par ces « députés Lisbonne ». J'ai pris la peine de citer ces douze États pour faire ressortir leurs différences : certains sont des pays de grande taille, d'autres non, certains sont de nouveaux entrants, d'autres ont participé à la fondation de l'Union. Onze de ces douze États ont décidé de se référer aux résultats des élections européennes de 2009, certains ayant même anticipé, comme l'Espagne qui avait prévu des listes de cinquante-quatre candidats, les cinquante d'origine auxquels s'ajoutaient les quatre attribués par le traité de Lisbonne, qui fut signé, je le rappelle, un an et demi avant les élections européennes. Sur douze États, onze ont choisi le chemin le plus clair, le plus transparent, le plus direct vers la démocratie. Un seul – le nôtre, malheureusement – a opté pour son propre chemin, allant ainsi à l'encontre du vote de sa population.

Une nouvelle fois, la France se marginalise au sein de l'Union européenne, d'une manière fort peu glorieuse. À défaut d'une anticipation intelligente de la France, le groupe GDR plaide pour que les deux députés supplémentaires soient désignés dans les mêmes conditions que les soixante-douze autres, ce qui serait la moindre des choses. M. le ministre nous dit que l'égalité ne doit pas être rompue : tous les députés européens qui représenteront la France doivent donc être élus de la même façon. Faisons comme si nous avions dû procéder à l'élection du nombre d'eurodéputés prévu par le traité de Lisbonne. Ce scénario éviterait à la France de s'isoler au sein de l'Union et lui permettrait de faire preuve, comme les autres États, de transparence électorale.

Monsieur le ministre, par votre décision de choisir les élus de l'Assemblée nationale plutôt que les candidats qui auraient pu ou dû être élus au soir des élections européennes du 7 juin 2009, la France se singularise malheureusement une nouvelle fois. Du reste, nombre de parlementaires européens n'apprécient pas que des États – en l'occurrence un seul – désignent au sein de leur Parlement national des députés européens. Quel formidable retour en arrière ! C'est ainsi que l'on pratiquait avant l'adoption du suffrage universel direct – c'était en 1979, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, ce qui prouve bien qu'il ne s'agit pas là d'une question de droite ou de gauche.

Rappelons par ailleurs que l'acte de 1976 sur l'élection des députés européens dispose en son article 1er qu'ils sont élus au suffrage universel direct à la proportionnelle. Alors que nombre de pays avaient prévu d'adopter et de faire entrer immédiatement en vigueur le traité de Lisbonne, la France a fait preuve d'imprévoyance et a ensuite exigé que les règles se fassent sur mesure pour lui permettre de désigner les deux parlementaires européens supplémentaires.

De surcroît, les arguments avancés par le Gouvernement et M. Tiberi ne nous convainquent nullement. Il est totalement fallacieux de considérer, pour se donner bonne conscience, qu'il n'était « pas souhaitable » d'anticiper en modifiant la législation avant les élections, le peuple irlandais ayant rejeté le traité de Lisbonne lors du référendum de 2008 ! Les exemples de L'Espagne, de l'Autriche ou de la Suède prouvent que c'était parfaitement envisageable et réalisable. Le Parlement européen lui-même, dans son rapport adopté le 18 mars 2009, c'est-à-dire avant les élections européennes, appelait les États membres à « adopter toutes les dispositions légales nationales nécessaires pour permettre l'élection anticipée, en juin 2009, des dix-huit députés supplémentaires au Parlement européen afin qu'ils puissent siéger au Parlement en tant qu'observateurs à partir de la date d'entrée en vigueur du traité de Lisbonne ».

Pour vanter les mérites du scénario retenu, vous mettez en avant quatre avantages : sa simplicité et sa lisibilité, la rapidité avec laquelle il permettrait à la France de disposer de deux voix supplémentaires au Parlement européen, la faiblesse de son coût par rapport à celui de l'organisation d'une élection partielle dans les circonscriptions gagnant un siège, et enfin – c'est un comble – la légitimité des nouveaux représentants, déjà élus au suffrage universel.

M. le ministre pourrait-il nous expliquer en quoi la référence au scrutin de juin 2009 est complexe et illisible ? Manifestement, il n'y a pas de réponse. Les élections ont déjà eu lieu, il suffit simplement de lire les résultats. On a fait plus alambiqué, me semble-t-il. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Tel semble être votre état d'esprit.

Pour ce qui est de la rapidité, il paraît plus long d'organiser un vote au sein de cette assemblée que de se référer au résultat d'une élection antérieure. Selon M. le ministre, on ne pourrait pas déclarer élus des députés qui n'auraient pas été proclamés élus le soir des élections européennes. Je constate que cet argument ne l'a pas beaucoup ému lorsque son ancien collègue du Gouvernement, M. Hortefeux, a demandé à siéger au Parlement européen, alors qu'il n'y avait jamais été proclamé élu.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

On s'est simplement référé au résultat des élections européennes et celle qui siégeait à sa place a été priée de s'en aller.

L'argument du coût joue en faveur de notre scénario, qui ne nécessite pas d'organiser des élections partielles. On le sait, cette question des élections partielles est un leurre que vous agitez pour faire croire que le processus serait très long et très coûteux. En réalité, dans aucun État de l'Union européenne, personne n'a jamais envisagé d'organiser de nouvelles élections pour un, deux ou plusieurs députés supplémentaires.

Enfin, la légitimité des nouveaux représentants sortirait renforcée de leur élection au suffrage universel dans le cadre d'élections européennes, et non pas législatives. Monsieur le ministre, vous avez invoqué l'interdiction de la rétroactivité, mais votre argument m'a pour le moins étonné : vous dites qu'il n'était pas concevable, en 2009, d'élire par anticipation des députés européens supplémentaires, car on ignorait qu'il faudrait en prévoir deux. En vérité, on a fait semblant de ne pas savoir ! Est-ce qu'un seul citoyen français ayant voté lors des élections législatives de juin 2007 savait que deux députés de l'Assemblée nationale seraient amenés, par un simple vote de l'Assemblée, à siéger au Parlement européen ? Cela ne risquait pas, le traité de Lisbonne n'étant encore ni signé ni même conçu, puisqu'il n'est sorti qu'en décembre 2007.

Tout cela ne vous empêche pas de qualifier la procédure que vous avez choisie de « juridiquement incontestable ». À votre place, je ne me hasarderais pas sur ce terrain. Nous pourrions en discuter longuement, mais une chose est sûre : sur le plan éthique, votre texte est très contestable, et personne ne pourrait le défendre au nom de la démocratie.

Vous prédisez en outre que l'option retenue aboutira à l'élection d'un membre de la majorité et d'un membre de l'opposition. Je tiens d'ores et déjà à vous signaler que, si cette procédure est adoptée, le groupe GDR ne présentera aucune liste.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Sous aucun prétexte, nous ne souhaitons participer à ce simulacre, à ce détournement de démocratie.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Vous ricanez, monsieur Deflesselles, mais, le jour venu, je vous invite à relire le compte rendu de notre séance : vous verrez que nous ne serons pas revenus sur cette position qui est claire, pour les députés écologistes comme pour tous les autres membres du groupe GDR.

Si cette loi était appliquée, elle nous conduirait, de manière assez étonnante, à terminer la législature avec 575 députés au lieu de 577. Le projet de loi prévoit en effet que, au cas où deux de nos collègues se prêteraient à cette manipulation antidémocratique, ils siégeraient au Parlement européen et non plus à l'Assemblée nationale, le cumul des mandats étant interdit. Certes, une élection partielle est prévue par la loi, mais, vous le savez, il n'est procédé à aucune élection partielle dans les douze mois qui précèdent une élection générale. Or l'élection générale aura lieu au plus tard en juin 2012 et, même si vous faites au plus vite, ce texte ne pourra pas être adopté et mis en oeuvre avant juin 2011 : il n'y aura donc pas d'élections partielles.

Quoi qu'il en soit, vous vous dites assuré qu'il y aura un député de la majorité et un de l'opposition. C'est préjuger du résultat, c'est considérer qu'il est connu d'avance : étonnante conception de la démocratie !

Le recours contentieux en matière électorale est également un point important. L'article 25 de la loi du 7 juillet 1977 confie le contentieux de l'élection des représentants au Parlement européen au Conseil d'État. Or, en organisant une élection interne à l'Assemblée, le texte qui nous est présenté rend impossible un quelconque recours auprès du Conseil d'État en raison du principe de séparation des pouvoirs. Le Gouvernement a décidé de ne prévoir aucune procédure contentieuse. C'est pousser le vice démocratique à son paroxysme. Je le répète : notre groupe demeure favorable à l'option choisie par tous les autres États européens concernés, la référence au scrutin des élections européennes de 2009, et les arguments avancés par le Gouvernement et par M. Tiberi ne font que renforcer mes convictions.

Permettez-moi par ailleurs de citer un extrait de l'étude d'impact de ce projet de loi : « La solution consistant à appliquer, postérieurement au scrutin, les résultats des élections du 7 juin 2009 aux circonscriptions gagnant un siège a été écartée. En effet, il apparaît contraire au principe de sincérité du scrutin d'utiliser a posteriori les résultats d'un scrutin pour l'élection d'un nombre de représentants différent du nombre initialement prévu. » Si je comprends bien, il ne serait pas correct vis-à-vis des électeurs de se fier à leur vote du 7 juin 2009, sous prétexte qu'ils ne pensaient élire que dix députés européens au lieu de onze dans la région Nord-Ouest ou bien neuf au lieu de dix dans la région Est ? Pensez-vous sincèrement que le résultat aurait été différent si les électeurs avaient dû voter pour un représentant supplémentaire ? Selon vous, se référer à ce scrutin serait une forme de tromperie à l'égard des citoyens. Utiliser des résultats a posteriori ne serait pas justifiable dans ces circonstances. Mais que dire, alors, de votre décision de choisir nos deux nouveaux représentants au Parlement européen au sein de cette assemblée ? Vous vous référez ainsi à un scrutin datant de juin 2007 et qui s'était déroulé dans un contexte politique totalement différent, celui qui était né de l'élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence de la République. Cette élection aura façonné le rapport de forces au sein de notre assemblée, ce qui est normal puisque les élections législatives au scrutin majoritaire sont déformantes : l'UMP parvient ainsi à obtenir 60 % des sièges à l'Assemblée alors qu'elle ne réunissait que 30 % des voix à l'issue du premier tour des législatives. Une chose est sûre : c'est un objectif bien éloigné de celui des élections européennes de juin 2009. Il s'agissait de choisir des élus pour soutenir une majorité et un Gouvernement nommé par le Président de la République – ou pour s'y opposer ; en aucun cas il n'était question de choisir des députés au Parlement européen.

Le résultat même de ces deux élections prouve qu'elles sont à l'opposé, qu'il s'agisse du contexte ou des enjeux. Ayez l'honnêteté de l'avouer : les Français ne votent pas de la même manière selon les enjeux du scrutin et selon les années.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Brindeau

Il faudrait savoir ! Vous avez défendu l'inverse pendant la campagne des cantonales !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je ne sais pas de quoi vous voulez parler. Je n'étais pas candidat aux élections cantonales. J'ai fait campagne, comme beaucoup, dans mon département. Allez voir les résultats : ils ont été très positifs pour le mouvement que je représente et, croyez-moi, dans cette campagne, nous n'avons pas confondu les enjeux, européens, nationaux ou cantonaux, bien au contraire. Nous avons présenté un programme départemental. Je crois donc que votre remarque n'est pas fondée.

Comment expliquer que l'on ne peut se référer à un scrutin dont les enjeux étaient clairs, pour lequel nos concitoyens ont fait un choix tout aussi clair, en adéquation avec leurs convictions dans le domaine concerné par cette élection, mais que l'on peut, a contrario, s'appuyer sur les résultats d'une élection dont l'enjeu n'était en rien similaire et qui était antérieure de deux ans ? Vous invoquez le principe de sincérité. C'est la sincérité du Gouvernement qui est en cause dans cette affaire ! Vous vous complaisez dans vos paradoxes, vous appuyant sur des arguments dont vous connaissez en réalité la teneur fallacieuse. À quoi bon prétendre jouer la carte de la transparence et de la logique ? En la matière, vous y avez définitivement renoncé. Pourtant, s'il fallait faire preuve de pédagogie, c'est bien pour expliquer à nos concitoyens le mode d'élection des deux « députés Lisbonne » par référence au scrutin de 2009, tout simplement.

Vous vous appuyez également sur l'article 4 de la loi du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen, qui dispose que « le nombre de sièges et le nombre de candidats par circonscription sont constatés par décret au plus tard à la date de la convocation des électeurs ». De prime abord, j'aurais tendance à dire qu'il nous suffisait d'anticiper, que cela aurait été logique, clair, transparent. Mais je rappellerai surtout que la loi peut se modifier, c'est même le but de cette assemblée et précisément de cette séance. Pour citer le rapporteur, « il n'est pas possible de se référer à ces résultats sans recourir à une loi ». Mais n'est-ce pas ce que nous faisons en ce moment même ? N'est-ce pas pour cela que le Gouvernement a déposé un projet de loi ? Il n'y avait donc aucune difficulté pour modifier l'article 4 de la loi de juillet 1977 afin de l'adapter à la situation d'aujourd'hui, que cette loi n'avait pas prévue.

Ensuite, selon le rapporteur, l'option que nous défendons serait trop complexe en raison de l'incertitude des calculs qu'elle suppose. Je tiens à le rassurer : en cas de besoin, nous aurions pu lui apporter notre aide. Notre collègue socialiste, Jérôme Lambert, soulignait en commission que nous savons très bien à quelles régions et à quels candidats ces sièges reviendraient. L'étude d'impact le dit très clairement. Mais le Gouvernement a cherché comment rendre complexe une situation qui paraîtrait trop simple. Le premier argument utilisé a été que la France est découpée en circonscriptions régionales pour les élections européennes. Manque de chance, la Pologne est également dans ce cas, et cela ne change absolument rien.

On a ensuite avancé le problème de la démographie des circonscriptions. S'agissait-il de la population municipale ou de la population totale ? Le texte d'application de la loi ne le précisait pas. Or cela entraînait un classement différent des circonscriptions de l'Ouest, qui comptent la plus forte population totale, et de l'Est, qui comptent la plus forte population municipale. À soixante-douze députés européens, cela n'avait aucune incidence sur les résultats. Avec les deux députés supplémentaires, il a fallu que le décret 2009-430 du 20 avril 2009 dispose que « le chiffre de population auquel il convient de se référer en matière électorale est le dernier chiffre de population municipale authentifié avant l'élection ».

De ce fait, attribuer les deux sièges supplémentaires à des circonscriptions électorales en fonction des résultats du scrutin du 7 juin 2009 impose de retenir comme base juridique la population municipale déterminée par le décret du 30 décembre 2008 qui a servi de fondement aux élections de 2009, et ainsi de doter la région Est d'un député supplémentaire, ainsi que la région Nord-ouest.

Mais peu importent les résultats, c'est une question de principe. Si un siège avait été attribué à la région Ouest, j'aurais été très content qu'elle soit dotée d'un représentant supplémentaire, quelle qu'en soit la couleur politique. Néanmoins, on peut se demander si le Gouvernement aurait choisi cette solution si les résultats de l'élection de 2009 avaient été différents.

Enfin, un dernier argument va à l'encontre de l'option qui a fait l'unanimité des onze États membres de l'Union européenne concernés : cette solution « conduirait de facto le législateur à désigner lui-même, fut-ce implicitement, les deux représentants supplémentaires au Parlement européen, au mépris du caractère général et impersonnel de la norme législative ». Cet argument vaut son pesant d'or. Si, par malheur, le projet de loi est adopté, nous aurons la responsabilité de choisir en notre sein les deux nouveaux députés européens. Ceux qui le désireront pourront ainsi se présenter sur une liste. En outre, l'étude d'impact indique que, « sans préjuger du vote des députés, le mode de scrutin retenu devrait, selon toute vraisemblance et compte tenu de la taille des groupes parlementaires à l'Assemblée nationale, permettre de désigner un candidat issu de la majorité et un candidat issu de l'opposition », ce qui a été confirmé par le Premier ministre, François Fillon, pour lequel il s'agit « d'éviter toute polémique inutile ». Ainsi, on décide en amont d'une partie du résultat. Il est dès lors totalement incongru et incohérent de la part du Gouvernement et du rapporteur d'affirmer que, avec ce projet de loi, ce n'est pas le législateur qui choisira lui-même les deux représentants au Parlement européen. Le vote s'effectuant dans notre assemblée, c'est, encore une fois, le législateur qui décidera des deux « députés Lisbonne », d'une manière directe.

Tout au long de cette motion, je n'ai fait que mettre en exergue toutes les incohérences contenues dans ce projet, ou plus exactement démontrer qu'il est intrinsèquement antidémocratique. Je le répète, nous, députés écologistes, ainsi que nos collègues du groupe GDR, sommes totalement opposés à ce texte et nous ne présenterons pas de liste s'il est adopté. Nous ne serons pas complices de ce déni de démocratie. Nous refusons de nous engager dans ce processus qui n'a rien de démocratique.

Je souhaite, pour conclure, m'adresser aux collègues de la majorité : faites preuve de courage, prouvez-nous votre volonté d'aller dans le sens de la démocratie. Monsieur Deflesselles, vous vouliez en parler à propos de votre département. Faites-le au niveau national pour ces élections européennes. Ne laissez pas la France devenir, une nouvelle fois, la risée de l'Europe. Respectez le choix de nos concitoyens qui ont participé à ces élections européennes et opposez-vous à la décision prise unilatéralement par le Gouvernement français. Faites le choix de la transparence électorale : nous en sortirons tous vainqueurs.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je remercie d'abord les rapporteurs et le président Lequiller. Les conclusions du Gouvernement et celles du Parlement sont très largement convergentes et nous avons développé des visions parallèles.

Je reprends simplement les propos de M. de Rugy. En ce qui me concerne, j'accepte volontiers qu'on ne soit pas de la même opinion : c'est normal en démocratie. Ce que j'ai plus de mal à accepter dans un hémicycle comme celui-ci, ce sont les propos pleins de sous-entendus, les attaques sournoises, si vous me permettez ce terme, cette capacité que vous avez d'attaquer de cette manière puis de vous offusquer quand on vous répond.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je ne faisais que répondre au président Lequiller.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Il en suinte comme un mépris à l'égard des autres, comme un air de supériorité. Quel que soit le banc d'où cela vient, à titre personnel, cela me gêne.

Je viens d'une lignée très modeste et je suis très sensible quand des gens viennent donner des leçons comme vous l'avez fait, du haut de leur supériorité naturelle.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

C'est que vous le faites en permanence envers nous. Permettez-moi simplement de vous dire comment je le ressens.

J'en viens à un point sur lequel vous m'avez interrogé…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

De la part d'un président de la région Alsace, c'est pitoyable pour le Parlement de Strasbourg ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Monsieur de Rugy, merci d'illustrer ainsi très concrètement ce que je voulais vous dire sans pouvoir le formuler avec cette excellence dont vous faites preuve. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je vous réponds sur un point très précis. Vous avez dit qu'il n'y avait aucune disposition sur le contentieux. Le deuxième alinéa de l'article 3 – page 8 du projet de loi – porte que « les dispositions des articles 6 à 6-6 et de l'article 24 de la loi susmentionnée du 7 juillet 1977 leur sont applicables. Pour l'application des articles 6 et 6-6, la décision juridictionnelle s'entend de la décision de l'Assemblée nationale réglant le contentieux ». C'est donc bien prévu, même si ni moi ni les rapporteurs ne l'avions évoqué dans nos interventions liminaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Je voudrais, en quelques mots, m'étonner du caractère assez lamentable de l'intervention de M. de Rugy, de ses attaques personnelles misérables. En fait, monsieur de Rugy, vous ne connaissez même pas le sujet. Je vous renvoie à une décision rendue récemment par le Conseil d'État, après celle du tribunal administratif, et qui a rejeté les demandes de mon adversaire…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

…qui a validé mon élection et a dit qu'il n'y avait aucune irrégularité.

De grâce, un peu de modestie, lorsqu'on appartient à une opposition qui a été un peu maltraitée dans certaines affaires à Marseille, à Reims et à Lille récemment. Vous devriez faire preuve de mesure et d'un peu de pudeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Sur le fond, je comprends très bien – comme le ministre l'a dit, tous les avis sont respectables – que votre droit le plus strict est de ne pas être d'accord avec la solution proposée. Ce que je ne comprends pas, c'est votre acharnement à considérer qu'elle est antidémocratique. Si elle l'était, pourquoi toutes les autorités européennes auraient-elles décidé que c'était l'une des trois possibilités offertes aux pays concernés ? Ce que vous venez de dire est grave ! Vous mettez en cause les institutions européennes, et notamment le Parlement européen. Vous avez le droit de choisir une des deux autres possibilités. Mais dire que la troisième, voulue par le Parlement européen, est antidémocratique, c'est se comporter soi-même de manière antidémocratique.

Pour le reste, vous avez indiqué que les autres États avaient choisi une autre voie. Mais huit des États concernés n'ont qu'une circonscription unique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Ils sont quand même huit. Mais cela, vous avez oublié de le dire.

Voilà quelques observations simples qui montrent que la position du Gouvernement est tout à fait démocratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Vous n'avez vraiment aucun argument sur le fond !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote sur la motion de rejet préalable.

Je la mets donc aux voix.

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. Marc Dolez.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, mon intervention portera exclusivement sur la première partie de ce projet de loi, relative à l'élection de deux députés européens supplémentaires. La seconde partie, qui offre la possibilité aux Français établis hors de France de voter dans les centres d'élection consulaires lors des élections européennes, n'appelle pas de remarque particulière de notre part. Il n'en va pas de même des modalités retenues pour la désignation des deux députés appelés à siéger au Parlement européen depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

Ma première remarque concerne le calendrier.

La logique aurait voulu que le Gouvernement anticipe la situation et définisse, préalablement au précédent scrutin, les régions françaises qui devaient disposer des deux élus supplémentaires. En décembre 2008, le Conseil européen avait d'ailleurs invité les douze États appelés à bénéficier de représentants supplémentaires à agir en ce sens.

Six d'entre eux avaient tranché la question avant les échéances électorales de juin 2009, à l'instar de l'Espagne qui a organisé les élections de 2009 à partir de listes intégrant les quatre élus supplémentaires que le traité de Lisbonne lui octroyait.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Je souligne qu'aucun de ces États n'a choisi de désigner les députés supplémentaires par un vote de son parlement, cette possibilité n'ayant pas même été envisagée avant que la France ne le demande.

Dans notre pays, pendant une longue période, rien n'a été fait. Après de longues tergiversations, il a même été envisagé de désigner un député de la majorité et un député de l'opposition pour siéger à Strasbourg en qualité d'observateurs, en attendant une solution définitive pour 2014, date des prochaines élections européennes. Nous devons en convenir : sur ce sujet, le Gouvernement a fait la preuve d'une incurie manifeste.

Finalement, le principe et les modalités de l'attribution de ces sièges supplémentaires ont fait l'objet d'un protocole signé à Bruxelles, le 23 juin 2010, et nous n'en débattons qu'aujourd'hui.

Ma seconde remarque porte sur le fond, c'est-à-dire sur la procédure retenue. Nous considérons qu'elle est particulièrement choquante sur le plan du respect des principes démocratiques.

En optant pour la désignation des deux représentants supplémentaires au Parlement européen par notre assemblée, parmi ses membres, le Gouvernement a fait le choix d'ignorer délibérément le vote exprimé en juin 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Il aurait été logique d'avoir recours aux résultats des élections du 7 juin 2009 et de désigner soit les deux premiers non élus, soit les deux candidats de la liste qui bénéficie du plus grand nombre de voix non productives, soit de favoriser les régions les moins bien représentées, autrement dit les plus désavantagées au regard du rapport entre élus et population selon l'INSEE. C'est, en tout cas, ce qu'ont fait tous les autres pays concernés.

En effet, la France est le seul des douze États bénéficiaires de sièges supplémentaires à avoir choisi une procédure d'élection aussi absurde que peu démocratique, après l'avoir imposée, seule contre tous, dans le protocole. Car, s'il est vrai, comme le ministre et le rapporteur de la commission des lois l'ont rappelé, qu'il s'agit bien de la troisième option ouverte par le protocole, il faut souligner qu'elle l'a été à la demande expresse de la France. Aucun autre pays n'a choisi cette procédure qui entre en contradiction avec l'Acte de 1976, relatif à l'élection des représentants de la France au Parlement européen, selon lequel ces derniers sont élus au suffrage universel direct et à la proportionnelle. Je constate donc que s'instaure une confusion entre les scrutins : selon nous, elle traduit une certaine forme de mépris des électeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Ce mépris concerne les électeurs de juin 2009, dont le vote n'est pas pris en compte, mais aussi ceux de juin 2007 qui, dans deux circonscriptions, ont envoyé un député à l'Assemblée nationale sans imaginer que ce dernier siégerait finalement dans une autre instance, sans même être directement élu.

Nous pensons même que la confusion confine à la manipulation. L'argument du Gouvernement selon lequel il serait « contraire au principe de sincérité du scrutin d'utiliser a posteriori les résultats d'un scrutin pour l'élection d'un nombre de représentants différent de celui initialement prévu » n'est guère convaincant. D'une part, le Gouvernement est seul responsable du retard qui pourrait nuire à cette sincérité. D'autre part, l'élection au scrutin de liste à la proportionnelle non seulement n'interdit pas ce type de désignation a posteriori mais, au contraire, s'y prête facilement. Ainsi, lorsqu'un siège est déclaré vacant le premier non élu est proclamé. Enfin, cela signifie-t-il que les onze gouvernements qui n'ont pas choisi la procédure française et qui prévoient tous que les députés supplémentaires seront déclarés élus à partir des résultats des élections de 2009 ont manqué à l'exigence de sincérité du scrutin ? Évidemment, non !

Je le dis avec gravité : ce texte piétine les principes démocratiques élémentaires, et il opère une confusion inacceptable entre les modes de scrutin. Il ne respecte ni les institutions européennes ni le Parlement européen. Faut-il rappeler que ce dernier n'est pas la représentation des Parlements nationaux et que l'usage de la proportionnelle quand il s'agit de désigner deux députés vise, de fait, à donner un siège supplémentaire aux deux principales formations politiques du pays ?

Pour toutes ces raisons, les députés communistes, républicains et du parti de gauche voteront contre ce texte, refusant ainsi de cautionner une aussi flagrante manoeuvre alors que l'évidence imposait de répondre à l'exigence de la transparence et, surtout, de respecter le choix des électeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Brindeau

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, effets collatéraux du retard pris dans le processus de ratification du traité de Lisbonne, les deux projets de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui ont un objet propre à en surprendre plus d'un. En effet, ils visent à autoriser notre assemblée à désigner deux de ses membres pour siéger, non pas dans cet hémicycle, mais bien dans celui du Parlement européen.

Ce faisant, nous nous apprêtons à nous placer dans une situation inédite depuis 1979, date des premières élections européennes directes, en autorisant deux de nos collègues à exercer un mandat qu'ils n'auront pas reçu du peuple.

Au-delà du caractère pour le moins inhabituel de cette procédure et des postures derrière lesquelles certains ont choisi de se retrancher, il convient d'examiner de manière lucide et responsable le problème qui nous est soumis et auquel ces deux projets de loi ont l'ambition de répondre.

Si la négociation et l'adoption par les chefs d'État et de Gouvernement de l'Union européenne du traité de Lisbonne constituent incontestablement un succès à mettre à l'actif du Président de la République et de notre diplomatie, sa ratification par l'ensemble des États membres n'a pas été sans heurts, chacun s'en souvient. Au-delà du cas irlandais – je rappelle que deux référendums ont été nécessaires pour permettre la ratification –, l'attitude pour le moins dilatoire choisie par certains chefs d'État a abouti à ce que les élections européennes de 2009 se tiennent, non pas sous le régime prévu par le traité de Lisbonne, mais bien sous celui du protocole sur l'élargissement de l'Union européenne, annexé en 2001 au traité de Nice. Ce protocole, juridiquement de même valeur que le traité lui-même, prévoyait initialement une diminution tant des effectifs du Parlement européen que de ceux de la Commission.

Ce texte a eu une conséquence directe sur la composition du Parlement européen : la délégation française, qui comptait soixante-dix-huit membres sous la précédente mandature, a vu ses effectifs fondre pour compter aujourd'hui soixante-douze membres alors même que des élections tenues sous le régime du traité de Lisbonne auraient permis à nos concitoyens d'être représentés à Strasbourg par un total de soixante-quatorze députés européens.

Adopté au terme d'une longue décennie de balbutiements sur l'architecture institutionnelle de l'Union européenne, le traité de Lisbonne reste ainsi partiellement inappliqué, près de deux ans après son entrée en vigueur définitive, contribuant à fausser les nouveaux équilibres dont il avait pourtant l'ambition de doter nos institutions communautaires.

Certains États, au premier rang desquels l'Espagne, se trouvant particulièrement lésés par cette situation, le Conseil européen a retenu, dès décembre 2008, le principe de dispositions transitoires en ce qui concerne le Parlement européen. Ainsi, les élections de 2009 se tiendraient certes sous le régime du traité de Nice, mais les effectifs du Parlement européen seraient en quelque sorte actualisés en cours de mandature, à compter de l'entrée en vigueur définitive du nouveau traité.

Certains gouvernements ont dès lors fait le choix de prévoir cette éventualité dans l'organisation des élections de 2009, d'autres, tels que la France, ont préféré s'abstenir pour ne pas paraître préempter des résultats du second référendum irlandais.

Pour autant, cette actualisation ne pouvant intervenir de manière progressive ou partielle sous peine de fausser les équilibres entre États, il appartient désormais à la France de procéder à la désignation des deux nouveaux députés européens qui seront amenés à rejoindre sa délégation. C'est d'abord un impératif de solidarité en direction de l'ensemble des États actuellement sous-représentés à Strasbourg qui nous impose aujourd'hui de définir les modalités selon lesquelles seront désignés les deux nouveaux représentants français au Parlement européen.

L'inaction n'étant tout simplement pas permise, le protocole sur les dispositions transitoires aujourd'hui soumis à notre approbation laisse aux États concernés le choix entre trois options.

Tout d'abord, celle d'une élection ad hoc, soit, en quelque sorte, d'une élection européenne partielle.

Ensuite, celle d'une désignation par référence aux résultats des élections européennes de juin 2009 selon le mécanisme des suivants de liste.

Enfin, celle d'une désignation, en son sein par le Parlement national, sous réserve que les personnes désignées soient elles-mêmes des élues du suffrage universel direct.

En fait, il n'y a là, reconnaissons-le, aucune option pleinement satisfaisante.

La première option, celle de l'organisation d'une élection partielle, apparaît largement disproportionnée eu égard aux enjeux – du reste, elle était principalement ouverte en direction des États membres les moins peuplés. De plus, il y a lieu de s'interroger sur la participation qui aurait sanctionné une telle consultation alors que les élections cantonales qui viennent de se dérouler n'ont malheureusement que très peu suscité l'intérêt de nos concitoyens.

La deuxième option, celle d'une désignation par référence aux résultats de 2009, paraissait certes la plus tentante sur le papier, elle n'en posait pas moins de grandes difficultés sur le plan pratique, qu'il s'agisse, en droit, de l'entorse faite au principe de sincérité du scrutin mais aussi, en fait, du choix des circonscriptions amenées à bénéficier d'un représentant supplémentaire – car les écarts de représentation sont très faibles d'une circonscription à l'autre.

J'ajoute que si l'on peut, bien entendu, regretter que cette situation n'ait pas été anticipée lorsqu'il s'est agi d'organiser les élections de 2009, le choix inverse n'aurait pas été sans poser des difficultés en droit interne, notamment au regard de l'exigence de clarté et d'intelligibilité qui s'impose à l'organisation de toute consultation électorale.

Restait ainsi la troisième et dernière option, celle de la désignation par notre Parlement national. À l'inverse de la précédente, cette solution est loin d'être satisfaisante sur le papier, mais elle reste la plus simple à mettre en oeuvre sur un plan pratique.

Cependant, si nous comprenons à certains égards le choix fait par le Gouvernement de retenir la solution d'une désignation de ces deux nouveaux députés européens par l'Assemblée nationale, nous n'en regrettons pas moins profondément la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui, réduits finalement à choisir une mauvaise solution parmi d'autres mauvaises solutions.

Quand bien même ce dont il est question aujourd'hui ne serait qu'un point anecdotique de la vie des institutions communautaires, il n'en demeure pas moins que ce type de débats, l'esprit dans lequel ils sont menés, ne peut, à terme, que contribuer à creuser le fossé qui sépare nos concitoyens des institutions communautaires.

Ce dont l'Europe a besoin aujourd'hui, c'est plus que jamais de respiration démocratique et citoyenne, et pas d'élus qui se désignent entre eux pour assumer des mandats qu'ils n'ont pas reçus du peuple.

Sur le plan des symboles – car c'est bien de cela qu'il est question –, nous ne souhaitons pas nous associer à cette démarche. C'est pourquoi les députés du Nouveau Centre choisiront de s'abstenir sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le 1er décembre 2009, après plusieurs mois et années d'un processus de ratification complexe, le traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne entrait enfin en vigueur.

Quelques mois plus tôt, en juin 2009, l'Union européenne a procédé au renouvellement de son parlement. Ces élections ont eu lieu – cela a été rappelé – sous le régime du traité de Nice, alors en vigueur. Sept cent trente-six députés européens ont donc été élus pour siéger à Strasbourg, dont soixante-douze dans le cadre des huit grandes circonscriptions électorales françaises.

Le traité de Lisbonne porte les effectifs du Parlement européen à 750 membres.

La répartition du nombre de membres par pays a elle aussi été modifiée, en fonction, bien sûr, de critères démographiques. Certains pays comme l'Allemagne perdront des élus, mais pas avant le renouvellement de 2014 puisqu'il a été décidé, à titre transitoire, de ne pas faire démissionner ces quelques représentants élus au suffrage universel direct. Douze pays, dont la France, se partageront les dix-huit sièges supplémentaires octroyés par le traité de Lisbonne. Le nombre de députés européens de notre pays passera donc de 72 à 74.

Cependant, avant même la tenue des élections européennes de juin 2009, le Conseil européen de décembre 2008 avait souligné la nécessité pour les États membres bénéficiant de sièges supplémentaires de prendre des mesures transitoires afin d'être en mesure d'assurer leur pleine présence au Parlement européen en cours de mandat.

Notre pays ne l'a pas fait, et certains le regrettent. La commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale, qui s'appelait alors « délégation pour l'Union européenne », avait alors attiré l'attention sur le sujet.

Il est vrai que la priorité de notre pays, clairement affichée, d'ailleurs, par le Président de la République lors de la campagne électorale de 2007, était de ratifier – par voie parlementaire – ce nouveau traité et de nous permettre ainsi de revenir au devant de la scène européenne après l'échec du référendum sur le traité constitutionnel.

La présidence espagnole de l'Union, première présidence exercée sous le règne du traité de Lisbonne, a fait de cette question l'une de ses priorités. Il faut d'ailleurs souligner que l'Espagne est l'un des principaux pays bénéficiaires de ces mesures puisqu'elle disposera de quatre sièges supplémentaires.

Le 23 juin 2010, une conférence intergouvernementale qui s'est tenue au niveau des ambassadeurs a adopté une modification de l'article 2 du protocole sur les dispositions transitoires annexé au traité de Lisbonne. C'est ce protocole qu'il nous est proposé d'adopter aujourd'hui.

Il fixe le nombre de sièges supplémentaires alloués aux États membres, et les procédures possibles pour la désignation des futurs députés qui doivent avoir été élus au suffrage universel direct ; c'est l'objet de son article 1er. Trois procédures sont possibles, elles sont – nos rapporteurs Jean-Marc Roubaud et Jean Tiberi l'ont rappelé – le résultat d'une décision unanime qui a reçu l'aval du Parlement européen. Je le répète à l'attention de nos collègues de l'opposition qui, on l'a noté tout à l'heure, ne veulent point l'entendre : une décision unanime.

Je ne reviens pas sur les trois procédures possibles ; elles ont été excellemment détaillées par nos rapporteurs. La France a choisi la procédure qui lui permet de désigner ses deux futurs députés européens selon une procédure ad hoc au sein du Parlement national. C'est l'objet du deuxième projet de loi que nous examinons aujourd'hui.

Si ce mode de désignation n'a été adopté que par notre pays, il n'en n'est pas moins légitime.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Je veux ici le rappeler avec force.

On a entendu nos collègues Dolez et de Rugy faire des moulinets, crier au loup, au déni de démocratie, à la forfaiture, presque, et je ne doute pas que Christophe Caresche, qui s'exprimera après moi, tiendra les mêmes propos. La République était en danger, si l'on en croyait leurs dires !

Las, M. de Rugy a l'indignation sélective, et je trouve scandaleuses les attaques qu'il a proférées contre notre collègue Jean Tiberi. J'aurais voulu lui rappeler un peu d'histoire, mais il n'est plus là.

Plutôt que d'avoir l'indignation sélective, il faut tout dire. Fernand Braudel, philosophe et historien trop tôt disparu, l'affirmait : « Quand tu veux expliquer, recule, recule, recule ! » Je vais donc reculer pour expliquer.

M. de Rugy m'a fait, tout à l'heure, un mauvais procès, en me reprochant de parler des Bouches-du-Rhône. Oui, je suis député, membre de cette assemblée, depuis une élection partielle organisée à la suite de l'annulation d'un scrutin de 1998 entaché de fraude. Ma circonscription était tenue par la gauche depuis 1958 ! Je dis clairement les choses, sans sous-entendus, et vous comprenez qui avait fraudé en 1998. Vous ne vous indignez pas, mais j'ai réussi à faire condamner en appel, tout récemment, au terme de douze années de procédure, les fauteurs de troubles électoraux. Que M. de Rugy ne nous donne donc pas de leçons ! Que la gauche ne nous donne pas de leçons sur le sujet !

Nos collègues rapporteurs, ainsi que M. le Ministre, ont expliqué les raisons du choix de la procédure retenue. Je n'y reviendrai donc pas.

L'essentiel pour notre pays est que nous ayons une procédure simple, sûre et acceptée par l'ensemble de nos partenaires européens. C'est le cas, et les deux députés nationaux qui seront amenés à siéger au Parlement européen disposeront de toute la légitimité que leur donnent leur élection au suffrage universel et le choix éclairé de leurs pairs.

C'est aussi une manière pour notre assemblée de reconnaître la légitimité et l'importance du Parlement européen ; je le dis en présence du président de la commission des affaires européennes, Pierre Lequiller. Notre légitimité, comme la leur, procède du peuple. Son importance n'est plus à démontrer, même si certains de nos collègues, une fois encore, semblent parfois feindre de l'ignorer.

En tant que membre de la commission des affaires européennes, je peux témoigner, cher Pierre Lequiller, de l'étroitesse des liens qui nous unissent au Parlement européen et de l'important travail que nous menons en commun avec lui. Pas plus tard que la semaine dernière, par exemple, nous tenions une réunion commune avec nos collègues du Sénat et les membres français du Parlement européen sur le thème, fort important bien sûr, de la gouvernance économique.

Nos deux assemblées ont vu leurs pouvoirs renforcés par le traité de Lisbonne. L'immense majorité des membres français du Parlement européen, quel que soit leur bord politique, y jouent un rôle actif : ils président des commissions et des groupes parlementaires et ils s'impliquent sur de nombreux sujets.

Tandis que nous examinons aujourd'hui ces textes, un nombre non négligeable de nos partenaires – dix-neuf sur vingt-sept, cela a été rappelé – ont déjà ratifié le protocole, choisi leur mode de désignation et indiqué le nom de leurs futurs élus.

J'ai une question, pour vous, monsieur le ministre : avez-vous une idée du délai nécessaire pour que nos deux collègues siègent à Strasbourg ? Certes, il n'est pas aisé de répondre, mais peut-être pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur le calendrier des autres Parlements, Parlements amis qui doivent se prononcer dans les semaines et les mois qui viennent.

Je souhaite enfin revenir rapidement sur le second volet du projet de loi que nous examinons aujourd'hui, pour me réjouir du fait que la question du vote aux élections européennes de nos compatriotes français installés à l'étranger soit enfin réglée.

La situation issue de la réforme du mode de scrutin de 2003 les avait en effet privés du droit de voter dans les centres de votes consulaires. Aux dernières élections européennes, n'ont pu voter que nos compatriotes inscrits sur la liste électorale de leur commune en France et ceux qui, résidant dans un pays européen, ont pu voter sur la liste électorale complémentaire de leur État européen de résidence. Il fallait donc rétablir les droits des Français établis à l'étranger. C'est chose faite : ils seront rattachés à la nouvelle circonscription « Île-de-France et Français établis hors de France ».

Mes chers collègues, parce que notre pays doit occuper toute sa place au sein du Parlement européen, le groupe UMP unanime souhaite et soutient l'adoption des deux textes qui nous sont présentés aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais essayer de ne pas décevoir Bernard Deflesselles. (Sourires.)

Pour qualifier le texte que vous nous soumettez, monsieur le ministre, qu'il me soit permis, à mon tour, de reprendre les mots de François Bayrou en commission : « il est peu de scandales à l'état pur, mais ce texte en est un ».

Scandaleux, ce texte l'est, en effet, à un double titre. Il heurte le principe qui fait du Parlement européen une assemblée élue sui generis et non pas une assemblée composée de parlementaires nationaux. Il a fallu des années pour que le Parlement européen accède à un mode de représentation directe. En désignant des parlementaires nationaux pour siéger au Parlement européen, vous revenez sur l'un des acquis de la construction européenne, qui dotait l'Union d'un Parlement pourvu d'une véritable légitimité. Votre texte représente – de manière conjoncturelle et limitée, j'en conviens ; il s'agit de deux députés – une insupportable régression.

Scandaleux, ce texte l'est aussi au regard du vote exprimé par les Français lors des élections européennes de juin 2009. En choisissant de désigner les parlementaires européens au sein de l'Assemblée nationale, vous vous apprêtez à travestir le résultat des élections européennes. Seront désignés deux députés qui n'appartiennent pas aux formations, ou plutôt à la formation, qui aurait dû logiquement, selon le vote de juin 2009, être représentée.

Vous le reconnaissez d'ailleurs dans votre rapport, monsieur le rapporteur, de même que dans l'étude d'impact, en indiquant que, si la désignation avait été faite par référence aux résultats des dernières élections européennes, ce sont deux candidats d'Europe Écologie- Les Verts qui auraient du être désignés. Or, en suivant la procédure que vous nous proposez, c'est-à-dire une désignation à la représentation proportionnelle au sein de l'Assemblée nationale, cette formation faiblement représentée dans cette enceinte risque de n'avoir aucun représentant désigné. Il est risible que l'un des arguments avancés pour justifier le projet de loi soit la crainte de fausser, a posteriori, la sincérité du scrutin de juin 2009 : c'est précisément le choix que vous retenez qui est insincère puisqu'il vise à ne pas respecter la volonté des électeurs. C'est votre texte qui transpire l'insincérité.

La France est, en réalité, le seul des douze États bénéficiaires de sièges supplémentaires à avoir choisi une procédure d'élection au sein des membres de son Parlement. Les onze autres États concernés ont opté, logiquement, pour une désignation en fonction des résultats des élections européennes de juin 2009. Il était possible de procéder ainsi en France, même avec des circonscriptions régionales, puisque la Pologne, dont le mode de scrutin est similaire au nôtre, a désigné ses députés européens, ou va les désigner, comme les autres États européens, en se fondant sur le résultat des élections de juin 2009.

Pourquoi la France a-t-elle choisi, seule, cette procédure ? Vous répondez que celle-ci figure parmi les trois possibilités ouvertes dans le protocole d'accord européen pour désigner les parlementaires supplémentaires. Effectivement, le protocole prévoit trois modes de désignation : l'élection au suffrage universel direct ; la désignation en référence aux dernières élections européennes ; la désignation au sein des parlements nationaux.

Vous oubliez cependant de préciser que c'est à la demande de la France que cette dernière option à été retenue, aucun des autres États ne la proposant,…

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

…et vous savez, monsieur le président Lequiller, combien il a été difficile de convaincre – vous l'avez fait – nos partenaires d'accepter ce mode de désignation.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Vous nous dites, ensuite, qu'il n'était possible de choisir la procédure consistant à désigner les députés européens en référence aux élections européennes ni avant ni après le scrutin de juin 2009. Cela signifie, soit dit en passant, que cette procédure, retenue par tous les pays européens concernés, n'aurait pas été applicable.

Avant le scrutin de juin 2009, il n'était, selon vous, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, pas possible, de prendre des dispositions législatives qui prévoient la désignation des parlementaires européens en référence aux élections européennes, car le traité de Lisbonne n'était pas encore ratifié. Soit, mais six pays européens, à ma connaissance, ont pourtant fait ce choix avant les élections européennes. Sans doute ont-ils été plus clairvoyants que la France qui – je le rappelle – a été à l'origine du traité de Lisbonne, mais dont on apprend qu'elle ne croyait pas vraiment à sa ratification.

Au demeurant, si cet argument vaut pour le passé, il vaut aussi pour le présent et devrait conduire le Gouvernement à retirer son projet de loi. En effet, si le traité de Lisbonne a bien été ratifié, le protocole dont nous discutons ne l'est toujours pas. En bonne logique, vous devriez attendre qu'il le soit avant de légiférer. Pourquoi attendez-vous, dans un cas, que le traité soit ratifié, alors que, dans l'autre, vous n'hésitez pas à anticiper la ratification ?

J'évoquerai, à ce stade, une hypothèse qui montre l'absurdité de votre projet.

Imaginons que la ratification par les États européens du protocole européen n'intervienne qu'après les élections législatives de 2012 ; cette hypothèse est envisageable. Cela signifierait qu'il faudrait demander à deux députés nouvellement élus à l'Assemblée nationale en 2012 d'abandonner leurs postes pour aller siéger au Parlement européen jusqu'en 2014. Je vous souhaite bon courage.

Il sera sans doute très difficile, en effet, de trouver des candidats acceptant de renoncer à leur mandat pour devenir député européen. En tout état de cause, si cette hypothèse se confirmait et que la gauche soit alors en responsabilité, elle n'hésitera pas – je n'en doute pas – à revoir la procédure de désignation des deux parlementaires européens.

Vous nous dites qu'il n'était pas possible de prévoir une procédure de désignation en référence aux élections européennes avant les élections européennes, mais vous nous dites aussi qu'il n'est pas possible de le faire après ! Il n'était pas possible de le prévoir avant parce qu'il fallait le faire après, mais il n'est pas, non plus, possible de le faire après parce qu'il fallait le faire avant ! Ni avant, ni après ; telle est, en résumé, votre position qui aurait fourni matière au regretté Raymond Devos !

Vous considérez que prévoir la désignation des députés européens supplémentaires en référence aux élections européennes a posteriori serait une atteinte à la sincérité du scrutin. Si cet argument vaut pour les élections européennes – ce que, personnellement, je ne crois pas –, il vaut a fortiori pour le projet que vous nous soumettez.

En effet, les deux députés nationaux qui seront désignés pour siéger au Parlement européen n'ont pas été élus pour cela. Les électeurs qui ont élu ces députés ne les ont pas élus pour les représenter au Parlement européen. À aucun moment, ils n'ont été informés que le député élu de leur circonscription deviendrait parlementaire européen. S'il y a une atteinte au principe de sincérité, elle figure bien dans la procédure que vous nous soumettez.

En revanche, ce problème n'existe pas, selon moi, pour les élections européennes, même si cette désignation est prévue a posteriori. Dès lors que la procédure tiendrait compte fidèlement du résultat des élections européennes, la désignation de deux parlementaires européens supplémentaires, dans ces conditions, serait conforme aux souhaits des électeurs. C'est la seule voie possible si l'on exclut, pour des raisons évidentes, l'organisation d'une nouvelle élection.

Pour accroître un peu plus la confusion, vous introduisez un débat sur la référence démographique à prendre en compte pour l'attribution des sièges, l'élection européenne se déroulant dans plusieurs circonscriptions. Faut-il considérer la démographie constatée le jour de l'élection ou prendre en compte la démographie d'aujourd'hui, date d'examen du projet de loi ? En fonction de l'évolution démographique, serait privilégiée telle ou telle région ou formation politique. La réponse à cette question ne mérite pas les arguties que vous lui consacrez. Il est évident que s'il s'agit de respecter fidèlement le résultat des élections européennes, la seule référence concevable est la situation démographique constatée le jour de l'élection. En réalité, il n'y a pas, selon moi, de véritable débat sur ce point.

Avec toute la bonne volonté du monde, il est difficile de voir dans ce projet autre chose qu'une manoeuvre. Aucun des arguments avancés pour le justifier ne peut convaincre. Pis encore, ce projet représente un véritable déni de démocratie, monsieur Deflesselles, un détournement électoral qui vise, pour la majorité, à s'attribuer un ou plusieurs sièges qu'elle n'a pas gagnés dans les urnes. Certains ont pu penser que le parti socialiste, se voyant « généreusement » attribuer un siège par la méthode proportionnelle retenue, la cautionnerait.

Je suis désolé de les décevoir. Il n'est pas question, pour le groupe auquel j'appartiens, de suivre la majorité et le Gouvernement dans leurs dérives et de fouler aux pieds les principes auxquels nous croyons. Nous combattrons votre projet, aujourd'hui en votant contre, demain en le déférant devant le Conseil constitutionnel, monsieur le ministre, et après-demain en refusant de présenter un candidat à la désignation de notre assemblée.

Pour conclure, je souhaite évoquer un autre sujet dont nous avons l'intention de saisir notre assemblée à l'occasion de ce débat, à travers un amendement que j'ai déposé avec Jérôme Lambert. Il s'agit du « retour» de M. Hortefeux au Parlement européen. Je n'épiloguerai pas sur les conditions dans lesquelles a été jugée recevable par le Parlement européen la nomination d'un candidat, certes, élu au Parlement européen, mais qui n'a jamais, semble-t-il, manifesté clairement sa volonté d'y siéger. En revanche, je conteste l'interprétation du ministre des affaires européennes dans sa lettre au président du Parlement européen, qui estime que M. Hortefeux doit remplacer celle qui lui succédait sur la liste aux élections européennes. Celle-ci ayant démissionné avant la notification par le Gouvernement, ce n'est pas M. Hortefeux qui devrait la remplacer mais le suivant de liste.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Plus généralement, nous proposons de revenir sur la règle qui prévoit qu'un ministre élu parlementaire européen retrouve automatiquement son siège lorsqu'il quitte le Gouvernement.

En effet, la modification en 2009 de l'article 24 de la loi du 7 juillet 1977 qui permet au représentant appelé à des fonctions ministérielles d'être temporairement remplacé et de retrouver ensuite son siège n'est qu'un mauvais décalque d'une disposition applicable aux députés nationaux qui s'appuie de manière injustifiée sur une interprétation erronée de l'article 25 de la Constitution. Cet article ne s'appliquant qu'aux représentants nationaux, il n'y avait effectivement pas lieu d'harmoniser les conditions d'exercice du mandat avec celles des parlementaires européens. Si vous aviez suivi la Constitution sur ce plan, cette disposition aurait dû être réservée uniquement aux parlementaires nationaux.

Mais la source d'inconstitutionnalité vient véritablement de ce que le droit communautaire et de l'Union s'oppose à une telle procédure. En effet, si le législateur national peut étendre les situations d'incompatibilité, il ne peut créer de nouvelles hypothèses de vacance, qui plus est provisoire, puisque l'Acte de 1976 stipule qu'au cas où un siège devient vacant, ce siège est pourvu pour le reste du mandat.

Avec cette désignation contraire à la loi d'un ancien ministre député européen, comme avec ce projet de loi, c'est l'image de la France en Europe qui est écornée. Je le dis, parce que j'ai personnellement constaté l'émoi ressenti par une grande partie des parlementaires européens. La France donne le sentiment de ne pas se conformer aux standards européens en matière de démocratie. Elle n'est certes pas la seule, mais sa position centrale en Europe devrait l'amener à avoir un comportement exemplaire, qui soit reconnu par tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Je commencerai mon propos en posant une question à l'opposition : chers collègues, quand arrêterez-vous de vous livrer à votre exercice favori, celui de la polémique gratuite et stérile ? Plutôt que de perdre du temps sur la forme en vous bornant à des questions de pure procédure, admettez plutôt que la France a gagné une victoire sur le fond !

Aujourd'hui, vous devriez dire « merci » au Président de la République d'avoir réussi à obtenir deux sièges supplémentaires pour la France ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

C'était en juin 2007, juste après son élection, lors des négociations finales du traité de Lisbonne. Vous devriez lui dire « merci », car c'est encore lui qui a obtenu que ces nouveaux députés puissent siéger à Strasbourg avant les prochaines élections européennes de 2014.

Pourquoi polémiquer autour du choix du Gouvernement, alors que ce choix a été accepté par l'ensemble des institutions européennes, y compris le Parlement européen, qui est le premier intéressé dans cette affaire ? On peut être d'accord ou non avec le dispositif proposé, mais on ne peut pas dire qu'il est illégitime…

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

…dès lors qu'il résulte d'une décision unanime du Conseil européen. Ou alors, c'est accuser les vingt-sept États membres de déni de démocratie ! C'est remettre en cause la légitimité du Conseil européen, le moteur de l'Union européenne à qui l'on doit les grandes décisions, comme l'adoption de l'euro, la révision des traités ou encore l'élargissement à l'est.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Vous avez raison, je remets en cause sa légitimité !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

L'option retenue par le Gouvernement est donc la plus raisonnable, car c'est la plus simple et la plus sûre. Les deux autres, vous le savez, sont soit inconstitutionnelles, soit trop onéreuses. J'ajoute que cette situation est provisoire et que, dès 2014, les choses rentreront dans l'ordre. En attendant, à situation exceptionnelle, réponse exceptionnelle !

Contrairement à ce que certains veulent faire croire, les nouveaux députés européens ne seront pas des députés européens de deuxième classe. Ils seront désignés par notre assemblée, élue démocratiquement par l'ensemble des Français.

Ils iront siéger au Parlement européen, une institution devenue incontournable dans le processus décisionnel européen. Chacun, ici, sait que le traité de Lisbonne renforce considérablement son rôle, en lui reconnaissant pleinement son rôle de colégislateur : désormais, il a son mot à dire sur l'ensemble des politiques de l'Union, ce qui n'était pas le cas avant 2009. À quelques exceptions près, plus rien ne se décide sans lui. Le nouveau traité renforce aussi ses pouvoirs budgétaires puisqu'ils s'étendent maintenant à la totalité des dépenses de l'Union.

Depuis le 1er décembre 2009 – date d'entrée en vigueur du traité –, j'ai vu à quel point les députés européens avaient pris conscience de leur nouveau rôle et de leurs nouveaux pouvoirs. Je pense à Michel Dantin, qui siège à la commission de l'agriculture et qui défend efficacement les intérêts de nos agriculteurs en se battant pour maintenir l'enveloppe allouée à la politique agricole commune après 2013. Je pense à Sophie Auconie, qui se bat pour pérenniser la politique régionale après 2013, une politique que tous les citoyens connaissent et apprécient, avec les fameux fonds structurels européens : le FEDER – le fonds européen de développement régional –, le FSE – le fonds social européen – et le FEADER – le fonds européen agricole pour le développement rural. J'étais moi-même rapporteur permanent pour le FSE au Parlement européen. Je peux vous assurer qu'aujourd'hui, la Commission européenne écoute les parlementaires et qu'elle les associe étroitement à tous ses travaux.

Ainsi, en allant à Strasbourg, nos deux eurodéputés supplémentaires iront renforcer les effectifs de la délégation française. Car, on l'ignore souvent, le Parlement européen est une institution stratégique pour l'influence de la France et cette question doit faire l'objet d'une attention constante.

Si les Allemands ont pendant longtemps été les maîtres au Parlement européen, la France a commencé à combler son retard en 2009 en réussissant à obtenir des postes clés – président, vice-président, coordinateur. J'ai été moi-même coordinateur au sein de la commission des pétitions. Les députés européens français sont mieux représentés au sein des commissions influentes qu'ils ne l'étaient auparavant. Et Joseph Daul, un Français, préside le premier groupe politique de l'institution.

Vous le voyez, la voix de la France compte au Parlement européen ! Nous avons à Strasbourg des députés actifs, présents sur tous les fronts de la législation européenne, et qui n'hésitent pas à aller au-devant du droit européen en faisant des propositions audacieuses pour faire avancer l'Europe.

Ce qui importe aujourd'hui, ce n'est donc pas la façon dont on envoie nos deux députés à Strasbourg. L'important, c'est de ne pas se priver de ces deux députés qui contribueront sans aucun doute à renforcer l'influence de la France au Parlement européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Souchet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question ponctuelle que nous avons à trancher, celle du mode de désignation de deux députés européens supplémentaires, résultant du dispositif finalement retenu dans le traité de Lisbonne, devrait être l'occasion de faire le bilan du nouveau mode de scrutin expérimenté lors des élections européennes de 2004 et 2009 et de le remettre sur le chantier.

On se souvient en effet que ce mode de scrutin avait été voté dans la hâte et la confusion. Il y avait eu un amalgame avec la réforme du mode de scrutin des élections régionales. Le même débat avait mêlé les deux sujets. Et l'on peut se demander aujourd'hui si le temps n'est pas venu de constater que les arguments avancés alors pour justifier la suppression de la circonscription nationale et son remplacement par huit circonscriptions interrégionales ne tiennent pas et qu'il faut donc rouvrir le débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Souchet

Deux motifs avaient été mis en avant. Il s'agissait de donner un ancrage territorial aux députés européens et de faire reculer l'abstention.

En fait, l'étendue nécessairement considérable de ces circonscriptions et leur configuration géographique souvent étrange font que le député européen reste toujours un inconnu pour le citoyen, où qu'il réside.

Quant à l'abstention, au lieu de la faire baisser, le nouveau mode de scrutin l'a, au contraire, fait croître significativement. Elle est passée de 47 % à près de 60 % entre 1994 et 2009. Cette érosion n'était pourtant pas écrite d'avance. On voit bien que la participation est liée à une claire conscience des enjeux et au sentiment que voter peut avoir un impact réel. Lorsque la responsabilité lui apparaît éclatée et diluée, alors l'électeur ne se sent pas concerné et ne se mobilise pas.

Si les objectifs avancés n'ont pas été atteints, le nouveau mode de scrutin a produit par ailleurs une série d'effets extrêmement négatifs. Cette cassure du territoire national, qui fausse le jeu de la logique proportionnelle, produit un effet d'aubaine favorable aux grands partis et marginalise les listes plus minoritaires qui peuvent être porteuses de conceptions originales sur la construction européenne. La circonscription nationale permettait donc une représentation plus juste des grandes options en matière européenne sur lesquelles l'électeur est appelé à se prononcer, beaucoup plus que sur l'envoi d'une majorité politique à Strasbourg. Le nouveau mode de scrutin ne permet pas d'assurer une représentation plus équitable des familles politiques. Au contraire, il rétrécit la diversité de l'offre, porte ainsi atteinte au pluralisme démocratique et réduit l'intérêt du scrutin pour l'électeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Souchet

Les deux élections qui se sont déroulées selon le nouveau mode de scrutin, celles de 2004 et de 2009, ont littéralement éteint le débat national sur l'Europe et ont été cannibalisées par des enjeux purement locaux. Ainsi, les Français n'ont pas eu l'occasion de se prononcer sur les différentes conceptions possibles de l'Europe, un choix qui les concerne pourtant au premier chef. Maintenir ce mode de scrutin, c'est être assuré qu'à la prochaine élection européenne, on dépassera les 60 % d'abstention. C'est un point auquel nous devrions réfléchir.

Je reviens à la question ponctuelle qui nous est directement posée aujourd'hui. Je note que le mode de scrutin interrégional ne permet pas de la résoudre et qu'il nous est proposé de revenir, le temps d'un vote – clin d'oeil de l'histoire – au système antérieur à 1979, lorsque les députés européens étaient désignés par les députés nationaux, formule qui avait le mérite de ne pas créer deux légitimités démocratiques concurrentes, comme ce fut le cas à partir de 1979. Depuis lors, le Parlement européen n'a cessé d'avoir un problème existentiel avec la démocratie – je l'ai expérimenté pendant deux mandats –, son statut de Parlement sans peuple le plaçant dans un perpétuel porte-à-faux.

Dans ces conditions, la procédure proposée par notre rapporteur, la désignation des deux députés européens supplémentaires par l'Assemblée nationale, me paraît difficilement contournable, compte tenu du caractère particulièrement complexe et déformant du mode de scrutin régionalisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Line Reynaud

Nous examinons, ce soir, un projet de loi plutôt singulier puisque le Gouvernement nous demande d'adopter un texte qui permettra à deux de nos collègues de devenir parlementaires européens.

Lors des négociations sur le traité de Lisbonne, les États membres ont décidé que le nombre des députés au Parlement européen passerait de 736 à 754, évitant ainsi à l'Allemagne de perdre trois sièges. Cette disposition permet à la France d'obtenir deux sièges supplémentaires ; en outre onze autres pays de l'Union voient leur nombre de députés augmenter.

Le Conseil européen des 11 et 12 décembre 2008 avait prévu l'éventualité d'une entrée en vigueur du traité de Lisbonne après les élections européennes de juin 2009, éventualité qui est devenue une réalité, puisque le peuple Irlandais n'a finalement ratifié le traité que le 2 octobre 2009.

Afin de pourvoir ces sièges supplémentaires, chacun des douze États concernés doit désigner de nouveaux parlementaires. Un protocole, signé à Bruxelles le 23 juin 2010, offre aux États membres le choix entre trois procédures que je rappelle : soit une élection européenne partielle, procédure qui n'est retenue par aucun pays ; soit une désignation par référence aux dernières élections de 2009, méthode que la majorité des pays va retenir et, enfin, une désignation par le Parlement national qui est la solution retenue et voulue par le Gouvernement français. Six États – l'Espagne, l'Autriche, la Suède, la Bulgarie, la Lettonie et Malte – ont pris des dispositions avant les élections européennes de juin 2009 afin d'élire ces futurs députés. Parmi ceux qui n'ont pas pris de dispositions avant l'élection, cinq États vont tenir compte des résultats de la dernière élection. Au final, non seulement la France est le seul pays qui va utiliser l'élection par l'Assemblée nationale, mais notre pays est clairement celui qui est le plus en difficulté dans cette désignation.

Sur ce sujet, comme sur bien d'autres d'ailleurs, le Gouvernement fait preuve depuis le début d'un manque d'anticipation évident. Nous savons tous, depuis décembre 2008, qu'il est nécessaire de résoudre cette désignation et voilà que nous débattons de ce sujet deux ans et demi après dans cet hémicycle. Ce retard est inacceptable, monsieur le ministre, et ne venez pas nous dire que l'ordre du jour de notre assemblée est trop chargé car, quand il s'agit de faire voter des lois, le Gouvernement Fillon nous a démontré, depuis juin 2007, qu'il possédait un talent certain dans ce domaine !

Deux députés nationaux élus en 2007 le seront donc pour sept ans au lieu de cinq, et ce en contradiction avec la durée du mandat de député national et sans que les électeurs n'aient eu leur mot à dire ! Sur le fond, l'option retenue n'est pas acceptable. J'en veux pour preuve que les onze États vont recourir à l'option « 2 », laquelle peut facilement être retenue par notre pays. Une nouvelle fois, la France se singularise et pas de la meilleure des façons, car ce projet de loi revient à faire élire deux députés européens non plus au suffrage universel direct, mais par un Parlement national, ce qui, je le rappelle, est l'ancien système de désignations des parlementaires européens.

Cette option retenue par la France est aussi contraire à l'esprit des institutions européennes, car le Parlement européen représente les citoyens de l'Union et non les États.

Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué que, si l'option de la désignation en fonction des dernières élections était retenue, cette mesure se heurterait à de sérieuses difficultés juridiques d'ordre constitutionnel ou à des problèmes démographiques. Mais croyez-vous vraiment être à l'abri d'une censure du Conseil constitutionnel avec ce projet de loi ? Si la méthode que vous avez choisie a été validée par Bruxelles, la Haute juridiction n'est pas soumise aux décisions bruxelloises, quelle qu'en soit la nature juridique. Cette option est susceptible de se heurter au principe d'égalité. Peut-on, en effet, faire siéger dans une même enceinte parlementaire des députés désignés par deux méthodes différentes : certains au suffrage universel direct et à la proportionnelle et d'autres élus par l'Assemblée nationale, cette dernière étant élue au scrutin majoritaire à deux tours ?

Pour conclure, ce projet de loi est une belle illustration de l'action brouillonne du Gouvernement. Vous êtes dans l'erreur depuis le début dans ce dossier : erreur sur le calendrier et erreur sur la méthode. Ce nouveau projet de loi, qui va apparaître aux yeux de l'opinion comme un tour de passe-passe, n'est pas de nature à renforcer le lien entre les Français et les institutions européennes et je le regrette. Le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche se prononcera, en conséquence, contre ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58, alinéa 1, monsieur le président.

J'attendais que la discussion générale soit close pour répondre au ministre qui m'a tout à l'heure personnellement mis en cause, et ce d'une façon très désagréable. Il a invoqué une « supériorité naturelle ». J'ai bien compris, car j'y suis habitué, qu'il faisait allusion à mon patronyme. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Pas du tout !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il y avait déjà le délit de faciès, il y a maintenant le délit de patronyme ! Cela va sûrement nous emmener loin ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je serai très bref, monsieur le ministre. J'assume parfaitement mon nom. C'est ce que m'ont légué mes parents et c'est bien d'ailleurs la seule chose qu'ils m'aient laissée !

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Il n'y a aucun problème !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Mon père était le fils d'un pilote de l'armée de l'air qu'il n'a jamais connu, puisqu'il est mort en service alors qu'il avait deux ans et demi. Ma mère est d'origine lorraine. Peut-être cela vous parlera-t-il, vous qui êtes Alsacien. Son grand-père paternel était mineur de fond. Il est mort l'année de sa retraite, comme beaucoup de mineurs. Son grand-père maternel a été gazé pendant la guerre de 1914. Lorsqu'il est revenu des tranchées, il a passé le restant de sa vie enfermé dans sa chambre. Pendant la Seconde Guerre mondiale, ma mère a été déportée à l'âge de deux ans avec ses parents, donc mes grands-parents, pendant deux ans et demi, dans un camp de travail. J'assume donc parfaitement mon nom et je vous demande de retirer vos propos.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Je serai très clair. Certains ont, vis-à-vis des autres, un comportement de supériorité. C'est, de leur part, une attitude très naturelle et régulière. J'avoue ne pas apprécier de tels comportements. Je comprends parfaitement qu'on puisse ne pas être d'accord. Il n'y a aucun problème. C'est normal.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Vous auriez dû écouter mes arguments, plutôt que de faire des allusions nauséabondes !

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Je les ai écoutés ! Je ne vous ai pas interrompu, monsieur le député ! J'écoute tout le monde, parce que le principe de la démocratie, c'est d'écouter l'autre. Vous ne pouvez pas, quant à vous, vous empêcher d'interrompre les autres !

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Tout à l'heure, vous m'avez dit qu'il était très désagréable pour l'Alsace d'avoir un président tel que moi.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Non ! J'ai dit que vous ne serviez pas les intérêts du Parlement européen ! C'est différent !

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Je ne me permets pas ce genre d'attaques. Je dis simplement que, dans le fonctionnement démocratique d'une République, l'important, quand on est au Parlement, c'est de s'écouter, d'échanger des arguments et d'essayer de convaincre. Si on n'y parvient pas, on respecte néanmoins les autres. Le respect, c'est l'écoute.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Le respect, c'est la reconnaissance de ce qui est fait.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

J'en viens aux réponses que je souhaitais apporter aux orateurs.

M. Deflesselle m'a interrogé sur la date à laquelle il était envisageable que les deux représentants puissent exercer leurs fonctions. La réalité est la suivante. Si les représentants supplémentaires au Parlement européen ont été identifiés chez une majorité de nos partenaires, la désignation formelle des dix-huit représentants supplémentaires reste tributaire de la ratification du protocole par les vingt-sept États membres. De plus, le Parlement européen, lui-même, a insisté sur le fait que les dix-huit députés doivent commencer à siéger au Parlement en même temps, afin de ne pas bouleverser l'équilibre des nationalités dans l'Assemblée. Comme les vingt-six autres États membres, la France ne pourra donc procéder à la désignation des personnes concernées en qualité de députés européens de plein exercice qu'après l'entrée en vigueur du protocole. Ce calendrier européen s'impose à la France.

Quand le protocole entrera-t-il en vigueur ? Il convient, à ce niveau, de revenir en amont. Les travaux préparatoires à la ratification du protocole ont été engagés par l'ensemble de nos partenaires à l'issue de la signature du texte, le 23 juin 2010. Le Conseil européen de juin 2009, tout comme l'article 2 du protocole modificatif, avait appelé à une entrée en vigueur si possible d'ici au 31 décembre 2010. Cette date est dépassée. À ce jour, sur les vingt-sept États membres, seize ont achevé leur procédure nationale de ratification, quatre Parlements nationaux – Chypre, Pologne, Portugal et Allemagne – ont ratifié le protocole, mais n'ont pas encore déposé leurs instruments de ratification auprès des autorités italiennes à Rome et les sept États membres n'ayant pas ratifié sont donc la Belgique, la France, la Grèce, la Lituanie, les Pays-Bas, la Roumanie et le Royaume-Uni. Il est donc difficile, aujourd'hui, de pouvoir dire à quel moment ces sept États membres auront achevé la procédure. Certains, parmi vous, considèrent que nous sommes très en retard. Six pays sont dans notre cas, mais nous aurons sans doute terminé avant eux. La France, qui n'est pas un cas isolé en la matière, ne sera, par conséquent, pas en retard.

Je répondrai à M. Pascal Brindeau, qui considère qu'il n'existe pas, en l'occurrence, de solution idéale, que je reconnais sans difficultés que celle que nous préconisons ne l'est sans doute pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

J'appelle, en premier lieu, dans le texte de la commission, l'article unique du projet de loi autorisant la ratification du protocole au traité sur l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

(M. Jean-Pierre Balligand remplace M. Jean-Christophe Lagarde au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi relatif à l'élection des représentants au Parlement européen (n°s 2931, 3246).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Sur l'article 1er, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 2 et 7 .

La parole est à M. François de Rugy.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Comme je l'ai expliqué dans la discussion générale et la motion de procédure que j'ai défendue, il s'agit tout simplement de revenir à l'expression démocratique du suffrage direct qui a cours tous les cinq ans depuis 1979 pour les élections européennes et de se référer aux résultats des élections au Parlement européen de juin 2009.

Contrairement à ce qu'ont soutenu certains collègues comme Mme Gruny, nous ne contestons pas du tout la légitimité de la décision européenne, au contraire. Nous voulons nous inscrire dans la logique européenne. Onze États sur douze ont choisi la même voie, l'application des résultats des élections européennes. Seule la France a demandé lors du Conseil européen à en choisir une autre, et tout le monde sait très bien que c'est une manipulation pour tenter de contourner le résultat des élections européennes de juin 2009 en France et de faire élire un député UMP de plus que ce qu'aurait donné le suffrage populaire. Il faut dire les choses clairement à un moment donné. Sinon, pour nos compatriotes, ce n'est pas compréhensible.

Enfin, ce sera la première fois dans l'histoire de la République que des députés élus pour cinq ans siégeront, certes dans un autre Parlement, pendant sept ans. Ils auront été élus en 2007 et pourront siéger jusqu'en 2014. il n'est jamais arrivé que l'on prolonge ainsi un mandat, qui plus est pour deux députés seulement. Si l'on veut rétablir un septennat législatif, il faut le faire pour l'ensemble de l'Assemblée nationale : personne ne défendrait une absurdité pareille ! C'est pourtant ce qui va être fait, nos compatriotes doivent le savoir. Si notre amendement n'est pas adopté, si ce projet est voté en l'état, deux députés de l'Assemblée nationale auront le droit siéger deux ans de plus par rapport au mandat que les Français leur ont confié en juin 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Jérôme Lambert, pour défendre l'amendement n° 7 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Lambert

Le groupe socialiste partage tout à fait l'analyse de M. de Rugy, Christophe Caresche et Marie-Line Reynaud ont d'ailleurs eu l'occasion de dire tout le mal que nous pensions des dispositions proposées.

Moi, je vais insister sur le fait que l'élection de ces deux députés est une violation manifeste du principe de proportionnalité, parce que, si toutefois nous marchions dans votre combine (Protestations sur les bancs du groupe UMP), cela reviendrait dans le meilleur des cas à faire élire un député de la majorité et un député de l'opposition. Où est le respect de la proportionnalité au regard des résultats de juin 2009 ? Il y a quelque part un travers manifeste.

Quant à la mise en application de ces dispositions, M. le ministre nous a justement répondu tout à l'heure que, pour l'instant, on ignorait quels seraient les délais car il fallait attendre que le protocole soit ratifié par les vingt-sept. Il a certes été souhaité que la ratification intervienne avant la fin de l'année 2011, mais rien ne nous garantit que ce délai sera respecté. Ce pourrait donc être la future Assemblée nationale issue des élections de juin 2012 qui aurait à les mettre en application. Deux députés tout juste élus dans la nouvelle assemblée devraient alors choisir d'abandonner leur mandat chèrement acquis pour les cinq ans qui suivent, au profit d'un mandat de deux ans au Parlement européen, dont le renouvellement serait peut-être loin d'être assuré. Ce n'est pas une hypothèse absurde, une telle situation nous pend au nez parce que, vu l'état dans lequel se trouvent l'Europe et certains parlements européens, il ne sera pas évident de faire passer à l'unanimité des textes concernant ce genre de questions.

Pour éviter ce genre de capharnaüm, il faut en revenir à la formule que les onze autres pays concernés ont choisie, c'est-à-dire la référence aux élections de 2009, et déclarer élus deux candidats qui auraient dû l'être en 2009 si nous avions été un petit peu précautionneux comme l'ont été six pays sur les douze, cinq autres ayant rattrapé le coup par la suite comme nous pourrions le faire aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Je me suis exprimé longuement et le ministre a rappelé les différents arguments tout à l'heure. Nous avons bien précisé que le choix qui avait été fait résultait d'une décision des instances européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Je comprends parfaitement que vous soyez favorables à une autre possibilité mais dire que ce n'est pas démocratique, c'est choquant et inacceptable. Vous expliquez que c'est parce que les Français l'ont demandé mais, si c'était une demande inacceptable, antidémocratique, comment pouvez-vous imaginer que le Parlement européen aurait acceptée, et à l'unanimité, je crois ? Ce n'est pas concevable.

Pour le reste, comparez avec les autres États. Il y en a huit qui n'ont qu'une seule circonscription.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Ce n'est donc pas absurde.

C'est pour ces deux raisons fondamentales, en dehors des aspects juridiques que j'ai développés, que notre choix est le bon choix, et je demande le rejet de ces amendements.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Les arguments ont été échangés très longuement, je ne vais donc pas y revenir. Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Vous avez trouvé un nouvel argument, monsieur Tiberi, c'est le bon choix. Il n'y a pas à discuter, circulez, il n'y a rien à voir, c'est le bon choix. C'est étonnant parce que c'est celui d'un seul pays sur douze. Il faudra que vous nous expliquiez ce que vous avez dit à nos homologues polonais par exemple. Selon vous, il n'y a que les huit États n'ayant qu'une seule circonscription qui peuvent se référer aux dernières élections, mais trois autres États le font tout de même alors qu'ils ont plusieurs circonscriptions. C'est d'ailleurs votre majorité qui a voté la loi divisant la France en plusieurs circonscriptions, alors que précédemment il n'y avait qu'une. Vous devez donc trouver d'autres arguments parce que nous répondre que c'est le bon choix, ce n'est pas un argument politique, c'est de la tautologie.

Quant à vous, monsieur le ministre, c'est le pompon. Vous répondez juste que vous êtes défavorable à l'amendement. Il n'y a plus d'explication, plus d'argumentation. À chaque fois, on recule d'un cran. D'abord, c'est bien. Ensuite, c'est vrai, ce n'est pas la meilleure des solutions. Enfin, il n'y a plus d'argument.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Lambert

Nous savons que, si l'on se référait aux résultats de 2009, deux députés d'Europe Écologie seraient demain déclarés élus. Si vous voulez bafouer ce résultat (Protestations sur les bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Lambert

…donné par les citoyens français qui ont voté en juin 2009, nous en prenons acte et nous le dénoncerons.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Monsieur Lambert, vous n'étiez pas là quand je me suis exprimé. Dans mon intervention liminaire, j'ai développé assez longuement, entre dix minutes et un quart d'heure, l'ensemble des arguments qui justifiaient la position du Gouvernement, mais vous ne pouviez pas les entendre puisque vous n'étiez pas dans l'hémicycle. Permettez-moi de ne pas les reprendre à chaque amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(Les amendements identiques nos 2 et 7 ne sont pas adoptés.)

(L'article 1er est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je suis saisi de deux amendements, nos 3 et 8 , tendant à supprimer l'article 2.

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l'amendement n° 3 .

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est la suite logique de l'amendement précédent.

Cela dit, monsieur le ministre, si nous vous demandions de répondre, c'était simplement parce que cela nous semblait plus correct vis-à-vis de la représentation nationale et parce que, en l'occurrence, nous avions avancé des arguments que vous ne pouviez pas connaître lorsque vous avez fait votre exposé liminaire.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Si !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

J'ai expliqué par exemple, et je n'ai entendu de réponse ni de votre part ni de celle de M. Tiberi, que des députés auraient droit à un mandat de sept ans. Ils seront indemnisés, auront des collaborateurs, siégeront dans un Parlement, légiféreront pendant sept ans au lieu de cinq. Pourquoi choisir cette espèce d'incongruité juridique qui crée un septennat d'Assemblée nationale et de Parlement européen alors que cela n'existe nulle part ailleurs et que cela n'a jamais existé dans notre république ? Voilà un argument auquel vous auriez pu répondre, cela aurait été tout simplement correct.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Le fait que des mandats parlementaires puissent être prolongés n'est pas totalement extraordinaire dans la vie de notre République. Ainsi, les sénateurs élus en 2004 l'étaient théoriquement pour neuf ans, et le mandat de certains d'entre eux a été prolongé à dix ans, en raison de la nouvelle organisation des élections au Sénat. Jusqu'alors, il était renouvelé par tiers tous les trois ans et nous sommes passés à un renouvellement par moitié. Le mandat d'un sixième des sénateurs a donc été porté de neuf à dix ans. Ce n'est pas une incongruité, cela tient tout simplement à la nécessité d'adapter de temps en temps la vie parlementaire aux exigences des transformations qui nous sont demandées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Christophe Caresche, pour défendre l'amendement n° 8 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

C'est de la coordination. Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est de mieux en mieux comme arguments démocratiques. Votre référence, monsieur le ministre, ce sont les sénateurs qui s'étaient octroyé un mandat de dix ans alors qu'ils avaient déjà, ce qui était extravagant, un mandat de neuf ans. Dix ans, c'est exactement la durée de deux mandats de député ! Il me semble qu'entre-temps, les sénateurs, et vous avez peut-être voté en ce sens lorsque vous étiez sénateur, ont eu la sagesse de revenir une solution un peu plus raisonnable en ramenant le mandat sénatorial à six ans.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

C'est ce que nous avons dit !

(Les amendements identiques nos 3 et 8 ne sont pas adoptés.)

(L'article 2 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 4 et 9 , tendant à introduire un article additionnel après l'article 2.

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l'amendement n° 4 .

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Cet amendement vise à réaffirmer le respect de la proportionnalité rapportée à la population ainsi que du scrutin proportionnel pour l'élection des députés européens, prévus par l'acte européen de 1976 et traduits en droit français par la loi du 7 juillet 1977. Il est toujours bon d'appliquer les lois.

Mme Gruny a évoqué tout à l'heure la légitimité de l'Europe. Il me semble que la légitimité des institutions européennes est déjà très atteinte. Le traité de Lisbonne, par exemple, a été adopté sans référendum alors que sa quasi-copie conforme avait été rejetée par référendum deux ans auparavant.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

En termes de légitimité, c'était déjà extrêmement affaiblissant, reconnaissons-le ! Je suis un partisan de la construction politique de l'Europe depuis toujours – c'est au fondement de mon engagement politique – et je suis triste de voir que, acte du conseil européen après acte du conseil européen, la légitimité est sapée. Croyez-vous que cet exemple rehaussera aux yeux des Français la légitimité de l'Europe ? Je suis convaincu du contraire.

Au passage, il s'agit également d'un recul de la parité hommes-femmes. Comment pourrez-vous assurer cette parité avec un mode de scrutin où il n'y aura que deux élus – soi disant un de l'opposition et un de la majorité – au sein de l'Assemblée nationale ? Les listes, elles, sont strictement paritaires.

Dernier point : que se passera-t-il si l'une de ces personnes élues par l'Assemblée nationale souhaite, dans quelques mois, se présenter aux élections législatives de 2012, si elle démissionne, parce que, finalement, le Parlement européen ne l'intéresse pas ? Sera-t-on obligé de refaire une élection ? Pour un mandat d'un an et demi ou deux ans ? Et si l'un des deux décède ? Bref, c'est absolument absurde alors que, dans le cadre des listes sur lesquelles les Français se sont prononcés en juin 2009, tout serait réglé de la façon la plus démocratique, comme cela se fait à toutes les élections au scrutin de liste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Jérôme Lambert, pour soutenir l'amendement n° 9 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Lambert

Cet amendement est identique à celui de M. de Rugy. Il a pour but, en complétant le premier amendement, qui a été rejeté, de montrer que notre dispositif était parfaitement cohérent et applicable. Le présent amendement en précise les modalités d'application. Que l'on ne nous dise pas que nous proposons quelque chose de compliqué, que la situation de la France étant particulière, nous ne pouvons pas faire comme les autres pays. Nous le pouvons ! Cet amendement le montre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Monsieur de Rugy, vous parlez de parité mais, si nous avions appliqué votre solution – je l'ai fait vérifier –, ce sont deux hommes qui auraient été élus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

C'est un argument un peu léger, qui ne tient pas. Vous auriez dû vérifier.

Ces amendements illustrent la difficulté juridique et technique que poserait la solution consistant à se reporter aux résultats des élections européennes de 2009. En effet, si l'on optait pour cette solution sans modifier la loi de 1977 sur l'élection des députés européens, on se heurterait au fait que l'article 4 de cette loi prévoit que les sièges sont répartis entre les circonscriptions régionales en fonction de la population constatée lors du dernier recensement général. Or, depuis 2009, les données démographiques – je l'ai dit et je le répète – ont évolué, si bien que la répartition des sièges par circonscription ne serait plus aujourd'hui la même qu'en 2009.

Si l'on souhaite s'en tenir strictement aux résultats des dernières élections européennes, en faisant comme si les deux députés supplémentaires avaient été élus dès 2009, on se trouve obligé de modifier la loi de 1977, comme le proposent ces amendements, mais on se heurte alors au risque d'inconstitutionnalité, du fait du caractère rétroactif de cette disposition. C'est pourquoi j'invite l'Assemblée à rejeter ces amendements.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Par cohérence avec l'avis que j'ai émis sur les amendements précédents, défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je répondrai au rapporteur en lui rappelant un principe élémentaire que l'on m'a appris au lycée : il ne suffit pas de répéter des contrevérités pour qu'elles deviennent des vérités ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il ne suffit pas de répéter indéfiniment qu'il serait compliqué d'appliquer les résultats des élections de 2009, que cela pose des problèmes juridiques ! D'ailleurs, vous avez été obligé de lire un papier, tant le raisonnement était tordu ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous le savez très bien, rien n'était plus simple que d'appliquer les résultats de 2009. Votre position est indéfendable et vous n'avez aucun argument pour la défendre. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Nous sommes provoqués en permanence !

(Les amendements identiques nos 4 et 9 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

À l'article 3, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 6 et 11 .

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l'amendement n° 6 .

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Comme je sens un peu d'énervement sur les bancs de la majorité, ainsi que vous l'avez vous-même observé, monsieur le président, et comme nous avons présenté tous nos arguments, sans recevoir de réponse – nous n'en recevrions sans doute pas davantage maintenant –, je dirai, pour calmer nos collègues, que cet amendement est défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

À dix-neuf heures vingt, la sagesse arrive dans l'hémicycle ! (Rires.)

La parole est à M. Jérôme Lambert, pour soutenir l'amendement n° 11 .

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Par coordination, défavorable.

(Les amendements identiques nos 6 et 11 ne sont pas adoptés.)

(L'article 3 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 5 et 10 , tendant à introduire un article additionnel après l'article 3.

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l'amendement n° 5 .

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est un autre sujet, que nos collègues socialistes ont également évoqué dans leurs interventions.

Nous voulons émettre une protestation contre une autre manipulation, qui a eu lieu il y a quelques semaines, lorsque M. Hortefeux, ministre de l'intérieur, a quitté le Gouvernement. On ne sait pas s'il a démissionné, s'il y a été invité fortement par le Président de la République… Peu importent les motifs. Il a demandé à siéger au Parlement européen, où il n'avait jamais siégé, s'appuyant pour cela sur un parallèle avec la situation de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Je ne reviens pas sur la disposition qui permet à un député ou sénateur, depuis la réforme constitutionnelle, de revenir au Parlement après un passage au Gouvernement. À titre personnel, je trouve cette disposition normale : si nous voulons évoluer vers un régime plus parlementaire, il n'y a pas de raison que ceux qui ont une légitimité parlementaire la perdent au motif qu'ils sont au Gouvernement.

Cependant, le parallèle avec le Parlement européen ne me semble pas fondé. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement, qui a pour objet de ne plus permettre à un représentant au Parlement européen appelé à exercer des fonctions gouvernementales de retrouver son mandat de député européen.

Je précise, au passage, que la disposition en vigueur pour l'Assemblée nationale et le Sénat a été appliquée rétroactivement. Les députés et sénateurs élus avant la réforme constitutionnelle – c'est le cas de la quasi-totalité des actuels parlementaires – ne savaient pas que cette mesure serait prise. L'argument que vous avez utilisé, monsieur le ministre, était donc infondé.

Quoi qu'il en soit, nous avons tenu à mettre l'accent sur la pratique peu élégante de M. Hortefeux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Christophe Caresche, pour soutenir l'amendement n° 10 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Comme le cas de M. Hortefeux a fait polémique, j'en dirai un mot. Ainsi que je l'ai dit lors de la discussion générale, nous considérons que l'interprétation du ministre est erronée. Le ministre a pris acte de la démission de la suppléante de M. Hortefeux et de son remplacement par celui-ci après son départ du Gouvernement.

En réalité, la loi de 1977 ne précise absolument pas que la suppléante devait démissionner. Elle dispose qu'un député européen qui devient ministre est remplacé jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois après la cessation de ses fonctions gouvernementales, puis « il reprend l'exercice de son mandat ». La suppléante de M. Hortefeux a démissionné durant la période d'un mois. Il faudrait vérifier ses intentions. Du fait de cette démission, ce n'est pas cet alinéa 6 de l'article 24 de la loi de 1977 qui s'applique mais l'alinéa premier du même article qui dispose qu'en cas de démission, c'est le suivant de liste qui remplace la personne démissionnaire. J'en parle car nous envisageons des actions pour faire valoir ce point de vue au plan juridique.

Cet amendement vise à modifier la disposition selon laquelle un député européen devenu ministre pourrait retrouver son poste. Autant une telle disposition ne nous pose pas problème s'agissant de parlementaires nationaux, autant il nous semble que, pour les députés européens, elle est contraire à un certain nombre de textes communautaires. Ainsi, l'article 13, paragraphe 2, de l'acte de 1976 stipule que, « sous réserve des autres dispositions du présent acte, chaque État membre établit les procédures appropriées pour que, au cas où un siège devient vacant, ce siège soit pourvu pour le reste de la période quinquennale visée à l'article 3 ».

Cela signifie que si un ministre, considéré comme député européen, est remplacé par un suppléant, ce dernier est désigné pour la durée du mandat. Il nous semble que la disposition est contraire sur ce point à la loi européenne ainsi qu'au règlement intérieur. Notre amendement tend donc à revenir sur cette disposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Il a accepté la personnalité que vous évoquez, monsieur Caresche, il l'a reçue après une étude juridique. Le Parlement européen a décidé que c'était le droit national qui s'appliquait, donc le droit français. Vous pouvez le regretter, mais il en a été décidé ainsi et il faut respecter cette décision.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

La question est de savoir s'il faut demain mettre les députés européens entre parenthèses, les exclure des dispositions communes qui, jusqu'à présent, s'appliquent à tous les parlementaires. La loi du 13 janvier 2009, relative à la commission prévue à l'article 25 de la Constitution, a placé ces trois catégories de parlementaires français au même niveau. Vous voudriez faire une différence entre les élus siégeant au Parlement français et ceux qui siègent au Parlement européen. Ce n'est pas ma position parce que je pense qu'il ne faut pas faire de différence entre les parlementaires français. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable.

Sur le cas plus particulier que vous avez évoqué, monsieur Caresche, celui de M. Hortefeux, je vais citer la déclaration de M. Jerzy Buzek, qui n'est rien de moins que le Président du Parlement européen : «M. Hortefeux siège au Parlement européen en pleine jouissance de ses droits. » Il doit savoir de quoi il retourne.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il doit y avoir un problème de traduction, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Il est vrai que le Parlement européen a décliné toute compétence en la matière en disant que c'est au niveau national que ces questions doivent être réglées, j'en conviens. Mais la disposition qui a été prise au niveau national est contraire au droit européen. Par conséquent, le fait que la France applique une disposition illégale n'engage pas le Parlement européen.

Quant à la position du Président Buzek, elle est directement liée à la lettre que le ministre chargé des affaires européennes lui a adressé pour lui notifier la désignation de M. Hortefeux. Or nous contestons le contenu de cette lettre parce que nous considérons que la suppléante de M. Hortefeux ayant démissionné, aurait dû s'appliquer la disposition qui précise qu'en cas de vacance d'un parlementaire européen, c'est le suivant de liste qui est désigné.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Contrairement à ce qu'indiquent les exposés sommaires de ces deux amendements, le caractère temporaire du remplacement des parlementaires européens acceptant des fonctions gouvernementales n'est en rien contraire au droit européen. J'ajoute que l'article 13, paragraphe 2, de l'Acte de 1976 sur l'élection des parlementaires européens renvoie clairement au droit national le soin d'organiser le remplacement des sièges devenus vacants. La France n'est d'ailleurs pas le seul État qui a pris la position indiquée dans cette lettre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Lambert

Nous constatons que pour appliquer à M. Hortefeux les dispositions qui, en droit français, permettent à un ministre de retrouver son siège, il a fallu qu'une parlementaire européenne démissionne. C'est ainsi que M. Hortefeux a pu retrouver son siège. Nous le contestons, mais c'est un fait. Or, mes chers collègues, qu'arriverait-il si le suppléant d'un ministre refusait de démissionner ? Rien du tout. Cela veut dire que notre droit français, dont nous sommes si fiers au point de vouloir l'imposer au reste sinon du monde, en tout cas de l'Europe,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Lambert

…ne pourrait pas s'appliquer. Une disposition qui ne s'applique que parce qu'on a pu inciter quelqu'un de bonne volonté à démissionner ne pourrait pas s'appliquer dans des conditions normales. Dès lors il faut constater qu'une telle disposition n'est pas applicable dans les faits et qu'il y a tout lieu de voter ces deux amendements pour éviter qu'un tel problème se pose à l'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Christophe Caresche. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Un mot pour souligner qu'une situation semblable à celle que nous évoquons pourrait aussi se produire au niveau du Parlement national. Ainsi, imaginons que durant le mois suivant le départ d'un ministre du Gouvernement, son suppléant décide de démissionner : je ne sais pas ce qui se passe.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Pour les parlementaires élus à la proportionnelle, ce serait le suivant de liste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je considère que l'Assemblée est suffisamment éclairée. Nous passons aux votes.

(Les amendements identiques nos 5 et 10 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je suis saisi d'un amendement n° 1 .

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Il s'agit d'un amendement rédactionnel déposé à titre personnel.

(L'amendement n° 1 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 7, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je suis saisi d'un amendement n° 13 portant article additionnel après l'article 8.

La parole est à M. Serge Letchimy.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux vous persuader de mettre fin à une situation ubuesque.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Les départements, régions et collectivités d'outre-mer ne forment qu'une seule circonscription pour les élections européennes. Celle-ci va de l'océan Indien jusqu'à l'océan Atlantique, en passant par l'océan Pacifique. Si le respect que nous avons tous, élus d'outre-mer, les uns pour les autres nous impose une solidarité, il y a tout de même de grandes différences entre nos divers territoires en matière de problématique de développement. De plus, comme il n'y a qu'une seule circonscription, des candidats minoritaires en voix mais majoritaires en pourcentage peuvent être élus. Je considère que c'est un déni de démocratie. C'est pourquoi il faut absolument corriger cela. Je ne sais pas si on y parviendra, mais je souhaite que la fainéantise intellectuelle ne nous habite pas et que l'on améliore au moins le dispositif, même si nous ne trouvons pas de solution très cohérente.

En raison de la complexité du mode de scrutin, l'article 2 de l'Acte de 1976 dispose qu'« en fonction de leurs spécificités nationales, les États membres peuvent constituer des circonscriptions pour l'élection au Parlement européen ou prévoir d'autres subdivisions électorales ». Une subdivision particulière est donc possible. Il serait réducteur de dire : « L'outre-mer fait partie d'un tout. » À la limite, cela reviendrait à dire que l'Hexagone devrait constituer une circonscription unique. Alors que le découpage électoral dans l'Hexagone tient vraiment compte des régions et de leurs réalités.

C'est pourquoi Victorin Lurel, moi-même et les autres membres du groupe socialiste vous proposons de voter cet amendement qui permettrait de créer trois circonscriptions, que nos concitoyens trouveraient extrêmement homogènes : une circonscription atlantique réunissant évidemment la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon ; une circonscription océan Indien, avec Mayotte et La Réunion, étant entendu que cette dernière représente un million d'habitants ; une circonscription pacifique, composée de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie et de Wallis-et-Futuna.

Bien entendu, il y aurait une petite complexité à régler parce qu'il faudrait alors adapter la proportionnelle à la réalité de cette compétition entre listes, certaines d'entre elles risquant d'être réduites à une personne alors que l'élection s'effectuerait par groupe. Mais notre amendement mérite d'être étudié car il ne faut pas qu'en Guadeloupe, nous soyons représentées par des personnes qui habitent à 20 000 kilomètres ou 30 000 kilomètres et ne vivent pas du tout la même réalité que nous. Je sais que la commission a rejeté cet amendement, mais j'invite l'Assemblée à se dépasser pour aller dans le bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Je souligne qu'on ne demande pas plus d'élus !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Cela étant, une telle modification aboutirait clairement à méconnaître le droit européen, plus précisément l'exigence du caractère proportionnel du mode de scrutin. (Rires sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est le comble ! On vient de faire le contraire de ce que vous dites ! Quel argument !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

La loi réserve actuellement trois sièges à la circonscription outre-mer, si bien que chacune des trois nouvelles circonscriptions n'élirait qu'un seul candidat, rendant impossible une représentation proportionnelle.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Je comprends bien la préoccupation de M. Letchimy, mais le mode de scrutin, issu de la loi du 21 février 2007, organise déjà la circonscription unique en trois sections. Remplacer une circonscription unique par trois circonscriptions supprimerait de fait, comme vient de le dire le rapporteur, la proportionnelle. Une telle proposition avait déjà été faite au Sénat, lors des débats parlementaires sur le texte que je viens d'évoquer – c'était l'amendement Flosse-Othily –, mais elle n'avait pas été retenue au motif qu'elle n'était pas compatible avec le principe de proportionnalité fixé par l'Acte de 1976 qui régit l'élection européenne. C'est la raison pour laquelle, malgré les imperfections du mode de scrutin actuel, qui sont réelles, et malgré les interrogations légitimes qu'il suscite, il y aurait un risque juridique à créer trois circonscriptions : cela reviendrait à faire élire un représentant par circonscription, ce qui transformerait de fait le scrutin proportionnel en scrutin majoritaire. Tout en comprenant vos préoccupations, monsieur le député, j'émets donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Le groupe GDR est plutôt favorable au retour à la circonscription unique pour l'ensemble de la France, toutes régions de métropole et d'outre-mer confondues, mais je veux répondre au rapporteur car il a exposé un argument qui mérite qu'on y revienne.

Monsieur le rapporteur, j'espère que tous les collègues de la majorité vous ont bien écouté, car vous avez donné une consigne de vote contre le projet de loi ! En effet, vous avez dit que vous étiez obligé d'appeler à voter contre cet amendement parce qu'il ne respecte pas la règle de la proportionnelle. Or c'est aussi le cas du projet de loi puisque, jusqu'à preuve du contraire, les députés de l'Assemblée nationale ne sont pas élus à la proportionnelle, et ne peuvent donc pas élire en leur sein les deux représentants supplémentaires au Parlement européen en respectant la proportionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est une excellente conclusion de votre part qui clôt le débat, monsieur le rapporteur, et je vous en remercie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Tiberi

Pour une fois, l'intéressé fait un peu d'humour : le projet prévoit deux sièges à pourvoir, je ne vois pas comment on pourrait faire autrement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Après cette séquence d'humour, vous avez le droit de reprendre la parole, monsieur Letchimy, pour répondre au Gouvernement ou au rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Monsieur le président, après cette séquence d'humour, je vous propose une séquence de douleur parce qu'il m'est extrêmement difficile d'entendre ce que j'ai entendu.

Je comprends la position de M. de Rugy mais je ne reprendrai pas, par rebondissement, la mécanique. C'est quand même vrai que notre choix nous situe dans un cadre d'exception, que nous le voulions ou non.

Monsieur le ministre, acceptez au moins de déclarer publiquement que cette situation est ubuesque et antidémocratique : un candidat qui n'est pas majoritaire est élu avec moins de voix qu'un autre qui s'est battu sur son territoire puisque c'est une proportionnelle à effet complet. Si vous acceptiez cela, je m'en satisferais étant donné que vous allez faire voter contre mon amendement.

Engagez-vous, tout au moins, à expertiser la situation, à regarder cela au fond – c'est de votre responsabilité – et à proposer de revenir devant nous pour nous faire des propositions. Autrement, je ne vois pas comment nous pourrions traiter une situation aussi grave.

D'ailleurs, le taux de participation de la population lors de ces élections-là est tellement faible que nous frisons le ridicule. Vous savez pertinemment que cela ne va pas et que les gens ne se sentent pas concernés.

En outre, le mode de scrutin donne un poids considérable à l'île ou au pays le plus peuplé : mécaniquement, La Réunion pèse considérablement sur l'élection – c'est un constat et non une critique.

Vous êtes donc véritablement en train de cautionner une procédure antidémocratique, antirépublicaine et qui ne respecte pas le suffrage universel.

Si vous vous engagiez, tout au moins, à étudier au fond cette question afin d'apporter une solution pour l'avenir, je serais très satisfait. Sans aller jusqu'à retirer cet amendement très important pour moi, j'aurais le sentiment que nous partirions ce soir sur quelque chose de noble.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Monsieur le député, je vous le redis : nous comprenons vos préoccupations. Si je le dis, c'est que je le pense car il n'est pas dans mes habitudes de prononcer des paroles en l'air.

Il s'agit d'une vraie préoccupation dont nous n'avons pas actuellement la solution. Si nous acceptions votre amendement, nous passerions tout simplement à la situation suivante : un vote à scrutin uninominal, c'est-à-dire contrevenant au principe posé par l'Acte de 1976.

Mes services et moi-même sommes tout à fait prêts à regarder avec vous s'il existe des solutions. Aujourd'hui, je n'en ai pas à proposer et c'est la raison pour laquelle je ne peux que donner un avis défavorable. La raison me porte à le faire.

Pour autant, je ne peux pas balayer d'un revers de main les préoccupations que vous avez exprimées. Ce sont de vraies préoccupations, je le reconnais. (Approbation sur divers bancs.)

(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Personne ne demande plus la parole ?

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Deuxième lecture du projet de loi relatif à la garde à vue.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma