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Séance en hémicycle du 16 juillet 2007 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • dette
  • maîtrise
  • prélèvement

La séance

Source

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant règlement définitif du budget de 2006 (nos 3, 66).

La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur le président, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi de répondre en quelques mots aux différents orateurs qui se sont exprimés ce matin.

M. Idiart a évoqué les indicateurs de performance, un domaine dans lequel nous avons accompli des progrès. En effet, le taux de renseignement de ces indicateurs est amélioré dans le projet de loi de finances pour 2007, ce que les rapports annuels de performance – les RAP – devraient d'ailleurs traduire. Nous comptons poursuivre la démarche dans le projet de loi de finances pour 2008, sur la base des RAP de 2006.

Plusieurs intervenants ont cité le rapport de la Cour des comptes, souvent de façon négative. Michel Bouvard a pourtant souligné qu'il contenait de nombreux éléments positifs,…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…en dehors de la certification elle-même. L'État n'a pas nécessairement toujours tort ; reste que nous avons avec la Cour des divergences d'appréciation fondamentales. Ainsi en est-il de la comptabilisation du régime des versements d'acomptes de l'impôt sur les sociétés : la modification du système nous permettra de mieux évaluer, en décembre, la situation de l'année en cours, sans être obligés de prendre en compte les résultats obtenus un an, voire un an et demi auparavant. Il s'agit donc d'une réforme structurelle, qui produira ses effets chaque année, et non d'un simple fusil à un coup.

De même, s'agissant de la mesure de la progression des dépenses de l'État – qui intègre les comptes spéciaux du trésor, les affectations de recettes, les remboursements et dégrèvements, les prélèvements sur recettes, voire la dépense fiscale –, l'appréciation de l'État et celle de la Cour des comptes tendent à diverger. Il nous faudra certainement débattre de ces questions, mais on ne peut parler d'impasses ou d'imperfections.

Comment répondre à une intervention aussi fleurie que celle de M. Brard ? À l'entendre, la dette est vertueuse, mais une telle affirmation n'est vraie que jusqu'à un certain niveau ; au-delà, elle devient vicieuse.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Or nous sommes passés de la vertu au vice : le niveau d'endettement de l'ensemble de la sphère publique est aujourd'hui trop important et nous devons le réduire. Le Président de la République nous a fixé une norme et le Premier ministre un calendrier ; nous nous y tiendrons. Bien sûr, tous les pays font usage de la dette. Mais lorsqu'elle devient excessive, elle constitue un handicap et met en péril la confiance témoignée par les citoyens.

Je note enfin que la plupart des recettes proposées par M. Brard appartiennent au passé : les pays qui les ont essayées ont souvent échoué.

M. de Courson a soulevé l'importante question du périmètre de la norme de dépense. Faut-il y inclure les dépenses fiscales, les prélèvements sur recettes, les remboursements et les dégrèvements ? La commission des finances de l'Assemblée comme celle du Sénat en ont souvent débattu, de même que le Comité d'orientation des finances publiques, à l'initiative de Gilles Carrez. Dès 2008, nous franchirons une étape supplémentaire en élargissant la norme de dépense. Jusqu'où ? Nous le verrons en examinant le projet de loi de finances pour 2008. La réponse : « jusqu'à ce qu'il est possible de faire » est-elle en mesure de vous contenter, monsieur de Courson ? (Sourires.) Quoi qu'il en soit, l'accroissement du périmètre de la norme de dépense va dans le sens d'une certaine vérité budgétaire que nous avons tout intérêt à voir émerger.

J'ai bien entendu – et je partage – les souhaits exprimés par Michel Bouvard s'agissant des systèmes d'information. Il sera difficile de travailler tant qu'ils n'auront pas produit totalement leurs effets. C'est particulièrement vrai pour le projet Chorus, qui a connu bien des vicissitudes. Nous espérons son déploiement à partir de 2009. L'État bénéficiera alors d'un cadre informatique conforme au cadre comptable et budgétaire de la LOLF.

L'amélioration des indicateurs doit être poursuivie, même si ceux-ci donnent plutôt satisfaction pour un premier essai. En revanche, il me paraît préférable qu'ils ne soient pas trop nombreux. Au fil du temps et de la pratique, en fonction des souhaits de votre commission et de la demande de nos concitoyens, nous pourrions sans doute être amenés à distinguer les indicateurs vraiment significatifs pour la gestion de nos finances publiques de ceux apparaissant plus anecdotiques.

Quant à la maquette budgétaire, elle figure dans le tome II du rapport sur le débat d'orientation budgétaire. Si elle n'a pas fait l'objet d'une importante concertation, c'est pour des raisons de délais : la mise en place de nouveaux ministères et la définition de nouveaux périmètres rendaient une adaptation nécessaire – même si les changements demeurent peu nombreux.

En ce qui concerne les dépenses de personnel, le regroupement des crédits sur les programmes de support est une commodité destinée à éviter les erreurs de répartition entre les programmes. Mais l'objectif est bien de parvenir progressivement à une ventilation plus fine des crédits.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il est vain de revenir sans cesse sur les notions de bilan, d'héritage,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

N'avez-vous pas supprimé les droits de succession ? (Sourires.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

… mais puisque M. Muet fait appel à notre mémoire, rappelons qu'en 2002, les recettes avaient été surévaluées de près de 10 milliards d'euros. En matière budgétaire, rien n'est jamais tout noir ou tout blanc. Auriez-vous oublié ce collectif budgétaire de 2002 à l'occasion duquel nous avons dû rétablir la vérité sur les finances de l'État ? Et je ne parle pas de l'évaluation de l'impact des 35 heures sur les finances publiques ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Lisez Le Parisien de ce matin : vous aurez un aperçu de ce que peuvent donner les 35 heures à l'hôpital !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je ne prétends pas que c'est ce que vous souhaitiez, mais c'est bien ainsi que cela se passe. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

La fonction publique hospitalière souffre de cette réforme structurelle qui a provoqué des dépenses, des déficits structurels auxquels nous devons aujourd'hui faire face.

Enfin, s'agissant de la dette, sa gestion technique a été optimisée au cours des années précédentes. Elle a baissé en 2006. Nous avons réduit l'encaisse de précaution du compte du Trésor, qui avait atteint 26 milliards d'euros : une gestion efficace de la dette publique imposait de le faire, même si cela ne signifie pas qu'il faille le faire tout le temps.

La vraie réponse à la progression de la dette française est la maîtrise de la dépense. Il n'en existe pas d'autres, et c'est à cela que nous allons nous atteler.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ce n'est pas une vieille recette, c'est la réalité. Seule une maîtrise drastique de la dépense nous permettra de réduire la dette et les déficits. La veille recette consisterait justement à se contenter d'optimiser les recettes, et il n'y aurait rien de plus dangereux.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je partage donc l'attachement de Daniel Garrigue à la maîtrise de la dépense publique et son souci de ne pas dilapider les surplus fiscaux dans de nouvelles dépenses. C'est d'ailleurs un des principes de gestion prescrits tout à l'heure par le rapporteur général, et nous nous y conformerons.

Laurent Hénart a évoqué la mise en oeuvre de la réforme budgétaire sur le terrain par les administrations déconcentrées. Il est vrai que les services de l'État jouent, au niveau local, un rôle majeur dans la maîtrise de la dépense publique. Cela n'a pas été facile, mais cette exigence est maintenant bien intégrée. Je suis prêt à rechercher avec vous les moyens de fluidifier la gestion sur le terrain. À cet égard, les réflexions des préfets sont souvent très intéressantes.

Louis Giscard d'Estaing a résumé avec beaucoup de lucidité la situation de nos finances publiques. En la matière, on est acteur, mais aussi héritier…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je n'ai pas l'intention de remonter à la IIIe République, monsieur Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous êtes bien méchant à l'égard de l'ancien président !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Non, je pensais à vous.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

En dépit de la situation dont nous avions hérité, la dépense est fortement maîtrisée : nous sommes en zéro volume depuis quatre ou cinq ans. Nous espérons cependant aller plus loin, plus fort – j'y reviendrai lors du débat d'orientation budgétaire –, parce que c'est la seule façon de revenir à des critères de gestion qui soient à la hauteur des engagements de la France, non seulement vis-à-vis de l'Europe mais tout simplement à l'égard d'elle-même : c'est à mes yeux le plus important.

Jean-François Lamour nous a fait part de son intéressante expérience de ministre et de député…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

En tout cas, il nous aidera, je l'espère, à sabrer dans les dépenses.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je serai le premier à le soutenir dans cette voie. Nous sommes demandeurs d'une plus grande collaboration avec le Parlement pour mieux organiser la maîtrise de la dépense.

Enfin, Yves Censi a très justement insisté sur le renforcement extraordinaire de la transparence et sur l'exercice démocratique que représente la LOLF. Je me répète, mais je sais que le président de la commission des finances et le rapporteur général en sont d'accord : nous avons besoin de plus de transparence et de vérité. Nos débats y gagneront en qualité. Le côté idéologique perdra parfois quelque peu de sa force…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il y a un bon côté idéologique, monsieur Brard (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…et il y en a un mauvais ! Oublions le mauvais et gardons le bon côté idéologique du débat budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mon rappel au règlement sera très bref. Je tenais à revenir, monsieur le ministre, sur le début de votre propos. Je vous invite à respecter l'esprit et la lettre de la Constitution, et notamment son article 5. Vous avez évoqué, si je ne me trompe, l'orientation de l'instruction du Président de la République. Jusqu'à nouvel ordre, la Constitution n'a pas été changée. La violer serait commettre, d'une certaine manière, un putsch. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) L'article 5 précise : « Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État. » Il n'est pas habilité à donner instructions et orientations à quelque ministre que ce soit, y compris au premier d'entre eux, fût-il réduit au rôle de grand vizir !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Nous en venons à la discussion des articles.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Sur l'article 1er, je suis saisi d'un amendement n° 2 .

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Avis favorable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 2 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 3 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Favorable !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 3 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Sur l'article 2, je suis saisi d'un amendement n° 5 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suppose que le Gouvernement y est favorable.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Oui, monsieur le président.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 5 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 4 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Le Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 4 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Sur l'article 3, je suis saisi d'un amendement n° 13 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Le Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 13 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 6 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Le Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 6 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 7 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Le Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 7 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 8 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Le Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 8 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 9 .

Toujours rédactionnel, monsieur le rapporteur général ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Et le Gouvernement y est toujours favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 9 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'article 3, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Sur l'article 4, je suis saisi d'un amendement n° 10 , également rédactionnel.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Le Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 10 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'article 4, modifié par l'amendement n° 10 .

(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Les articles 5 à 8 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

(Les articles 5, 6, 7 et 8, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Après l'article 8, je suis saisi de l'amendement n° 1 rectifié , portant article additionnel.

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Vous avez la parole, monsieur de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

L'amendement n° 1 rectifié , adopté par la commission des finances, est très simple. La LOLF fait état des opérateurs. Nous avons prévu que soit indiquée dans les textes l'évolution des moyens destinés à chacun d'entre eux. En matière d'emplois, nous n'avons pas, hélas ! cette synthèse, contrairement à celle des effectifs de l'État. Un administrateur que nous surnommons « le bénédictin » a, sans en être totalement certain, abouti au résultat suivant : les effectifs des opérateurs auraient augmenté de 10 000 à 12 000 au cours des trois dernières années, soit plus que la réduction des effectifs des fonctionnaires de l'État !

Cet amendement tend donc à ce que nous soit présentée la totalité des effectifs : ceux de l'État – fonctionnaires, contractuels, etc. – et ceux des opérateurs au sens de la LOLF.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je suis favorable à l'amendement déposé par MM. Carrez et de Courson. Nous avons effectivement intérêt à la plus grande transparence tout en évitant l'effet de vases communicants entre l'État et ses multiples opérateurs.

À l'initiative de Gilles Carrez, un rapport rédigé dans le cadre du PLF 2007 donnait déjà des indications intéressantes sur les opérateurs et leurs emplois pour l'année en cours et l'année suivante. Vous prévoyez d'améliorer cette information. Nous le ferons dès cet automne dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Abstention !

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'ordre du jour appelle le débat d'orientation budgétaire pour 2008.

La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, en dépit de l'agenda chargé de cette session extraordinaire, j'ai souhaité – tout comme le Premier ministre évidemment – que nous ayons un débat d'orientation budgétaire cette année, comme les années précédentes.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est essentiel ; notre discussion de ce matin l'a montré plus que jamais. Ce débat permet, en effet, d'avoir une discussion féconde avec le Parlement sur l'orientation donnée à nos finances publiques, qui servira de cadre à l'élaboration des projets de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

Vous avez, au cours de cette session, à vous prononcer sur bon nombre de lois qui mettront en oeuvre les réformes annoncées par le Président de la République et par le Premier ministre et choisies par les Français, qu'il s'agisse de revaloriser le travail, d'aider à l'accession à la propriété, de réformer les universités, d'assurer un service minimal dans les transports ou de lutter contre la récidive.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Parmi tous les engagements contenus dans ce projet présidentiel, il en est un tout aussi important que les autres, qui donne sa cohérence et sa crédibilité à l'ensemble de la politique économique que nous allons poursuivre : la réduction du déficit et de la dette publics. Ce débat d'orientation budgétaire est justement l'occasion de réaffirmer cette orientation majeure de notre politique : revenir, par une maîtrise résolue des dépenses, à l'équilibre de nos comptes publics avant la fin de la législature, sans sacrifier aucun autre engagement.

Il n'y a pas de réforme possible dans l'incertitude et l'insécurité de finances publiques non maîtrisées. Il ne s'agit pas seulement de respecter nos engagements européens – je le disais en répondant aux orateurs de ce matin – mais de se comporter de façon responsable : qui d'entre nous souhaite léguer des dettes à ses enfants ou à ses petits-enfants ? Il s'agit aussi de faire preuve de bon sens : qui d'entre nous pense qu'on peut revenir sur l'exception française des prélèvements élevés si on ne revient pas sur cette autre exception française, tout aussi remarquable, de la dépense publique la plus élevée de l'OCDE en proportion de la richesse nationale ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

En dépit des efforts indéniables de mes prédécesseurs, le déficit et la dette que nous supportons aujourd'hui, hypothèquent notre capacité à relever les défis de l'avenir, qu'ils soient liés au vieillissement, à l'environnement, à l'ouverture croissante du monde aux échanges d'idées, de marchandises ou de services. Ils pèsent également sur notre crédit vis-à-vis de nos partenaires européens.

Le niveau atteint par la dépense publique dans notre pays nous prive de marges de manoeuvre pour faire face à la concurrence, pour investir dans l'innovation et la recherche ou réagir aux fluctuations conjoncturelles de l'économie mondiale. C'est pourquoi une politique ambitieuse en matière de relance de l'emploi et de la croissance, ambitieuse en matière de réformes structurelles, en matière d'enseignement supérieur, de recherche et d'innovation ne peut produire pleinement ses effets que si elle est, presque en parallèle, accompagnée d'une politique ambitieuse en matière de réduction du poids de la dépense publique, de reflux de la dette publique et de résorption des déséquilibres des comptes publics. C'est pourquoi le Président de la République nous a assigné l'objectif…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Article 5 de la Constitution ! C'est anticonstitutionnel !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…d'un retour à l'équilibre des finances publiques en 2012 au plus tard, le retour de la dette publique en deçà de 60 % du PIB en 2012 au plus tard et plus tôt, si possible.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Article 5 : « Tu ne parleras pas à tort et à travers. » ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Cet objectif s'impose, je le répète. La crédibilité de la France est en cause et surtout – pacte de stabilité ou pas, engagements européens ou pas – le sort de nos enfants. Pour y parvenir, il convient de diviser par deux le rythme de croissance de la dépense publique par rapport à ce que nous avons connu dans le passé. Ce moyen s'impose lui aussi. Pour réduire les déficits, il n'y a qu'une alternative : réduire le poids de la dépense ou accroître celui des prélèvements. La seconde option est envisageable dans des pays faiblement imposés ; elle ne l'est pas dans un pays dont le taux de prélèvements obligatoires excède de quatre points la moyenne européenne.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est donc bien – et vous me pardonnerez de le répéter inlassablement, aussi longtemps que cette charge me sera confiée – par la baisse du poids de la dépense publique dans le produit intérieur brut chaque année d'ici à 2012 que nous parviendrons à inscrire enfin notre pays dans une trajectoire de désendettement durable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Allons, monsieur Brard !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous y parviendrons tout à d'abord en infléchissant la courbe de la dépense publique. Je vois tout de suite la critique fuser : « Vous allez dégrader le service public ! » (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.) « Vous n'aurez plus un service public de qualité ! »

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

J'ai, quant à moi, examiné le montant des dépenses liées au service public depuis un certain nombre d'années et j'ai remarqué que les signaux d'alarme sur la qualité de nos services publics se multiplient.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ce n'est donc pas un problème de moyens, parce que, dans ce cas, il n'y aurait pas de problème du tout. C'est bien la preuve que nous devons changer radicalement notre culture de la dépense. Aujourd'hui, aussi paradoxal que cela puisse encore paraître à certains, c'est en ralentissant la croissance de nos dépenses que nous préserverons la qualité de nos services publics, parce que ce ralentissement exigera une modernisation en profondeur de nos politiques publiques. Nous y parviendrons ensuite par des réformes profondes : en réformant le marché du travail et en simplifiant les réglementations, en conférant plus d'autonomie aux universités, en redéployant des moyens vers l'enseignement supérieur et la recherche, en supprimant les verrous réglementaires qui entravent le développement de l'emploi et de l'activité, bref, en appliquant avec détermination tous les engagements présidentiels.

Cette démarche doit concerner, bien évidemment, l'ensemble de nos finances publiques, celles de l'État, celles des collectivités territoriales et celles de la sécurité sociale. Cette année, et pour la première fois, un seul ministre, et non plus deux, voire quatre, est chargé de vous présenter la stratégie du Gouvernement pour l'ensemble des comptes publics. Ce n'est pas une innovation légère, mais bien la marque d'une volonté politique forte de prendre à bras-le-corps nos problèmes de déficit et d'endettement.

Il y a un seul ministre responsable de l'ensemble des finances publiques parce que seules une vision d'ensemble et une stratégie cohérente peuvent nous permettre de rééquilibrer de façon durable nos comptes publics.

Je voudrais détailler au moins deux raisons qui justifient la création d'un tel ministère.

La première, c'est que les contraintes qui pèsent aujourd'hui sur les finances publiques sont globales : ce qui pèse sur le pouvoir d'achat des ménages ou la compétitivité de nos entreprises, ce n'est pas seulement l'impôt sur les sociétés ou les cotisations maladie, c'est l'ensemble des prélèvements obligatoires ; ce que nous léguons à nos enfants et petits-enfants, ce n'est pas seulement la dette de l'État ou le déficit de la sécurité sociale, c'est la situation de l'ensemble des comptes publics.

C'est donc sur l'ensemble de ces comptes que porte notre engagement. On ne le dira jamais assez, les engagements européens ne sont que des règles de bonne gestion qu'il conviendrait de respecter même, et surtout, s'il n'y avait pas le cadre européen. C'est une question d'honnêteté vis-à-vis de nous-mêmes.

La seconde raison, c'est qu'il doit permettre de clarifier les relations entre l'État et l'ensemble des acteurs, qu'ils relèvent de la sécurité sociale ou des collectivités locales. Ces relations, vous le savez, ne se sont pas toujours caractérisées par la transparence.

J'ai pu m'en apercevoir lors de la commission des comptes de la sécurité sociale : la question de la dette de l'État envers la sécurité sociale envenime les relations entre les acteurs. Or elle est souvent mal comprise. On dit parfois, à tort, que cette dette participe au déficit de la sécurité sociale. Cela n'est pas vrai, et il ne faudrait pas que cette analyse erronée serve d'alibi pour éluder les vraies raisons de nos difficultés financières. Si un ministère des comptes publics a un sens, c'est bien pour apporter une clarification en la matière.

Cette clarification a commencé avec la reconnaissance des créances des régimes de sécurité sociale dans le bilan de l'État en 2006. Il n'y a plus de bataille de chiffres en la matière : les créances sur l'État enregistrées dans les comptes du régime général sont les même, au centime d'euro près, que la dette reconnue par l'État.

La clarification ne doit pas s'arrêter là et j'ai bien l'intention d'engager l'apurement de la dette de l'État dès cette année. Je souhaite également mettre en place des règles de gouvernance et des procédures pour que cette dette ne se renouvelle pas. Il faut notamment que l'autonomie de gestion permise par la LOLF ne conduise pas à l'utilisation à d'autres fins des crédits destinés à la compensation des exonérations de cotisations. Gilles Carrez l'a rappelé dans son rapport à la Conférence nationale des finances publiques. J'y veillerai.

Nous avons longuement parlé de 2006 ce matin et je vais détailler l'horizon 2012 dans un instant ; mais, au préalable, je voudrais rapidement faire un point sur 2007 puisque notre programme en matière de finances publiques s'applique dès maintenant.

Certains ont pu douter de notre capacité à honorer les engagements pris par le précédent gouvernement pour 2007. Le Président de la République a rappelé à Bruxelles,…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

… notre objectif d'un déficit de 2,4 points de PIB pour l'ensemble des administrations publiques, soit une légère amélioration par rapport à 2006. Cet objectif sera respecté et nous conserverons une discipline sans faille sur les dépenses de l'État.

Quant aux recettes fiscales, elles devraient dépasser de 2 à 5 milliards d'euros le niveau prévu en loi de finances, en particulier grâce au dynamisme de l'impôt sur les sociétés. Le déficit budgétaire devrait donc être inférieur à celui prévu en loi de finances initiale.

Ce surplus de recettes fiscales fait réapparaître, ici ou là, l'expression de « cagnotte ». Très franchement, comment peut-on encore parler de cagnotte quand le déficit de l'État avoisine les 35 ou 40 milliards d'euros ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

C'est vous qui avez inventé ça ! Quelle mauvaise foi !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Comment parler de cagnotte quand on vient d'annoncer une très mauvaise nouvelle pour la sécurité sociale, à savoir la dégradation de la situation financière du régime général ? (M. de Courson applaudit.) Le déficit attendu est proche de 12 milliards d'euros, soit 4 milliards au-dessus de ce que vous avez voté en loi de financement.

La maîtrise des finances sociales est un exercice très difficile. Tous ceux qui s'y sont essayés peuvent en témoigner, et ce n'est pas la peine de donner des leçons. C'est un véritable travail de Sisyphe, sans cesse à refaire, qui demande beaucoup de ténacité.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Contrairement à ce qu'imaginait Albert Camus, il n'y a pas de Sisyphe heureux en la matière. Cette situation de déficit structurel est proprement inacceptable. Elle montre qu'il n'y a pas de réforme miracle, qu'il faut un effort continu, quotidien, sans relâche, pour mieux réguler les dépenses d'assurance maladie et se donner les moyens de financer de nouveaux besoins.

Le retour à l'équilibre est pour nous un impératif absolu, un impératif financier, un impératif de responsabilité. Que dirions-nous, là encore, si nous avions aujourd'hui à rembourser les dettes de nos aînés ?

J'en viens maintenant à la stratégie du Gouvernement pour la législature qui s'ouvre.

Notre objectif est de revenir, dès que possible, c'est-à-dire avant 2012, à une dette inférieure à 60 % du PIB et à un solde public équilibré. Cette stratégie volontariste s'appuie sur deux piliers, que j'ai déjà mentionnés : des mesures fiscales ambitieuses, qui revalorisent le travail et vont créer un choc de confiance permettant de relancer durablement la croissance, créatrice de richesses ; une maîtrise sans précédent de la dépense publique, qui participera tout autant au rétablissement de la confiance en permettant de réduire la dette, d'améliorer l'efficacité des services publics et de préserver la solidarité juste et nécessaire entre les générations.

La clé de l'assainissement des finances publiques réside donc dans la maîtrise de la dépense. Pour réussir, il faut plusieurs conditions : cette maîtrise doit être partagée par l'ensemble des acteurs ; elle ne doit souffrir aucun report ; elle doit s'inscrire dans la durée.

L'objectif que nous nous sommes fixé pour la législature, c'est, je le disais en introduction de mon propos, de diviser par deux la progression de la dépense publique par rapport aux tendances passées.

Cela correspond à une évolution moyenne légèrement supérieure à 1 % par an en volume sur l'ensemble de la sphère publique – État, sphère sociale, collectivités territoriales –, contre 2,25 % en moyenne sur les dix dernières années. C'est bien un effort sans précédent que nous devons fournir.

Cet effort permettra, dès 2008, d'amorcer une baisse du déficit. Un ralentissement de la croissance de la dépense publique à hauteur d'un point, c'est près de 10 milliards d'euros de dépenses en moins dès 2008 par rapport aux tendances passées. L'effort sur la dépense est ainsi du même ordre que le choc fiscal en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, et il permettra même de poursuivre une légère baisse du déficit public en 2008, comme s'y est engagé le Président de la République.

Dès 2009, la maîtrise de la dépense nous engagera dans une trajectoire de désendettement plus rapide. Son rythme dépendra néanmoins de la croissance du produit intérieur brut. Si elle est au rendez-vous et atteint 3 %, le double objectif d'une dette inférieure à 60 % du PIB et d'un équilibre des finances publiques pourra être atteint dès 2010. Sinon, il sera décalé, mais au plus tard en 2012, pour peu que la croissance atteigne 2,25 %.

En fait, nous appliquons les règles qu'a présentées encore ce matin Gilles Carrez : des prévisions de recettes prudentes, l'affectation des plus-values au désendettement, le respect de la norme de dépenses sur l'État et, plus généralement, la maîtrise des dépenses publiques.

Pour parvenir à cette maîtrise de la dépense, tous les acteurs devront s'impliquer.

S'agissant de l'État, une norme « zéro volume » – au plus…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

… s'appliquera sur un périmètre élargi puisqu'il inclura les prélèvements sur recettes, notamment ceux qui sont destinés aux collectivités locales. Cette norme élargie est un objectif ambitieux, qui n'a jamais été demandé à l'État jusqu'à présent.

Il faut bien prendre en compte aussi le fait que l'évolution des dépenses inéluctables – charge de la dette et pensions – est désormais défavorable : la remontée des taux d'intérêt fait croître la charge de la dette, jusqu'alors quasiment stable depuis quatre ans ; les pensions, quant à elles, progressent fortement avec le choc démographique majeur que connaît la fonction publique.

L'effort sur les autres dépenses devra donc être encore plus exigeant. Cela sera perceptible dès le budget 2008 et les entretiens que j'ai pu avoir avec chacun de mes collègues ministres – je les ai terminés vendredi – me confirment que l'objectif de 0 % en volume…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

… quand on n'a pas le secours de la baisse des taux d'intérêt nécessite, de la part de chacun, une stricte discipline en matière de gestion des effectifs comme en matière d'efficacité des dépenses d'intervention.

Quant aux administrations de sécurité sociale, elles bénéficieront de la maîtrise des dépenses de santé et de la poursuite de l'amélioration de la situation de l'emploi.

Nous ne pouvons continuer à faire financer nos dépenses de santé courantes par nos enfants ou petits-enfants, nous devons prendre nos responsabilités. C'est une question d'éthique et de morale.

En moyenne, la croissance de l'ONDAM devra être au plus de 2 % en volume sur la période, soit environ 3,5 % en euros courants.

C'est un objectif ambitieux, qui implique que le Gouvernement examine et renforce dès maintenant les leviers de la maîtrise médicalisée avec l'ensemble des acteurs. C'est aussi un objectif réaliste, supérieur du reste à celui qui avait été assigné en 2007, car il est inutile d'afficher des cibles trop difficiles à atteindre. De telles cibles ne sont plus crédibles pour les acteurs de la dépense de santé et perdent d'emblée toute signification. L'instauration de la franchise devrait permettre, quant à elle, de financer les nouveaux besoins.

La maîtrise des dépenses d'assurance maladie est d'autant plus nécessaire que nous devons faire face à la dégradation des comptes de la branche vieillesse. Ce sera l'objet du rendez-vous de 2008. Nous devrons poursuivre la démarche engagée en 2003 et programmer la réforme des régimes spéciaux.

Mais, il faut le redire, la clé en matière d'équilibre des régimes de retraite, c'est l'emploi des seniors. Le Gouvernement mettra tout en oeuvre pour lever les obstacles financiers, réglementaires et parfois culturels, au développement de ces emplois. Les dépenses de la branche famille devront, enfin, participer également à l'effort global de maîtrise de la dépense publique.

Les collectivités locales ne peuvent pas rester à l'écart de cette obligation. Personne ne le comprendrait. Elles devront donc stabiliser leur endettement, en modérant leurs dépenses. C'est tout le sens du nouveau pacte que nous voulons passer avec elles afin d'améliorer leurs relations financières avec l'État, dans le respect, bien évidemment, de leur autonomie de gestion. C'est un dialogue de responsabilité qu'il faut établir.

Étant moi-même élu local, je sais que, dans des domaines très divers, l'État impose souvent de nouvelles dépenses aux collectivités locales, à travers, par exemple, des normes techniques ou environnementales ou la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. C'est pourquoi nous devons mieux associer les élus à l'élaboration de ces normes contraignantes, qui entraînent une forte augmentation des dépenses.

En contrepartie, les règles gouvernant l'évolution des dotations aux collectivités locales devront être réformées : dès 2008, les concours qui relèvent du contrat de croissance et de solidarité se verront appliquer la même norme que celle qui s'imposera aux autres dépenses de l'État.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est avec ces exigences sans précédent, qui doivent être partagées, que nous arriverons à atteindre les objectifs d'assainissement des finances publiques au cours de cette législature. C'est ainsi que nous ferons refluer notre ratio de dette sous les 60 % du PIB.

Je voudrais terminer mon propos en évoquant devant vous quelques-uns des moyens que nous mettrons en oeuvre pour appliquer notre stratégie budgétaire.

Une stratégie aussi ambitieuse réclame bien évidemment des réformes nombreuses et efficaces. Le Président de la République et le Premier ministre les ont annoncées et expliquées à de nombreuses reprises au cours de ces derniers jours. Ce sont des réformes justes et d'une ampleur sans précédent pour restaurer nos finances publiques : le remplacement d'un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique d'État, ou le non-remplacement, ce qui revient au même,…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

… la réforme des régimes spéciaux, la fin de l'indexation sur la croissance des concours de l'État aux collectivités locales ou encore les mesures visant mettre fin à la dérive des dépenses d'assurance maladie par l'instauration d'une franchise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce n'est pas une raison pour commettre un hold-up !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je concentrerai mon propos sur l'une des plus importantes, dont mon ministère sera la cheville ouvrière, c'est-à-dire la révision générale de l'ensemble des politiques publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cheville ouvrière ! Vous savez ce que c'est, un ouvrier ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Depuis 2005, sous l'impulsion de Jean-François Copé, plusieurs vagues d'audits de modernisation ont été lancées. Elles ont accompagné le processus de mise en place de la LOLF, et ont permis de commencer à rationaliser la dépense publique et à améliorer le service public.

Avec la révision générale des politiques publiques lancée par le Premier ministre il y a quelques jours, nous passons désormais à la vitesse supérieure.

C'est une démarche très novatrice pour notre pays, inspirée des meilleures pratiques étrangères. Il ne s'agit pas d'un énième étage d'un processus de réformes dont on ne verrait pas la fin. Il s'agit d'une étape décisive, celle qui permettra de sortir de l'empilement permanent de dépenses et de politiques publiques qu'on ne réexamine jamais, et de mettre un terme au réflexe selon lequel il suffit d'augmenter les moyens publics pour que l'usager ait un meilleur service, celle qui fera de l'efficacité le mot d'ordre et la fierté de l'action publique.

Nous allons passer au crible l'ensemble de la dépense publique. Chaque politique publique sera réexaminée de fond en comble, à partir de questions simples : à quoi sert-elle, répond-elle aux besoins des usagers, pourrions-nous la conduire différemment, avec moins de moyens, en la ciblant davantage ? Autant de questions – et il y en a bien d'autres – de bon sens.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ce réexamen de fond permettra d'identifier et de programmer des réformes intelligentes et structurantes, assurant une maîtrise durable et bien ciblée de la dépense de l'État. Il permettra en particulier d'atteindre l'objectif de ne pas remplacer un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique d'État, sans porter préjudice à la qualité du service rendu aux usagers, et souvent même en l'améliorant.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Les rapporteurs généraux des deux commissions des finances seront associés à cet exercice de révision générale des politiques publiques.

Toutes les dépenses de l'État seront concernées par cette révision, y compris les dépenses d'intervention, sur lesquelles on ne s'est pas encore penché bien qu'elles représentent 40 % des dépenses budgétaires. Le champ d'examen ne s'arrêtera d'ailleurs pas à l'État stricto sensu et pourra inclure des politiques dans lesquelles celui-ci intervient à côté d'autres partenaires, telles que les politiques sociales et de sécurité sociale, ou les politiques des collectivités territoriales : même si elles exigent d'autres moyens, d'autres méthodes, elles doivent être elles aussi examinées.

C'est à un Conseil de la modernisation des politiques publiques, présidé par le Président de la République, et dont je serai le rapporteur général, qu'il reviendra ensuite de décider de l'option à retenir. Comme vous le voyez, le changement de méthode est profond, et nous franchissons là une étape décisive dans l'examen de nos politiques publiques : jamais les plus hautes instances politiques n'auront été autant impliquées dans la modernisation de l'État. Il ne faut d'ailleurs pas se payer de mots : sans cette implication, il n'y aura pas de réelle modernisation de l'État, pour laquelle la légitimité politique est absolument nécessaire : on l'a vu dans tous les États qui ont procédé à une modernisation en profondeur de leurs procédures comme de leurs politiques. C'est ce qui a fait défaut aux démarches précédentes, quelle que soit leur qualité, et c'est ce qui fera la différence dans celle-ci.

Les résultats auxquels nous parviendrons serviront ensuite à établir une programmation pluriannuelle détaillée des dépenses – vous en avez souligné la nécessité ce matin, et je partage ce sentiment – qui donnera aux gestionnaires davantage de visibilité sur leurs crédits et davantage de responsabilité dans l'ensemble de leur gestion.

Cette révision générale sera menée tambour battant puisqu'elle devrait être achevée début 2008, avant le prochain débat d'orientation budgétaire. Nous mettrons alors en place un contrôle régulier de la mise en oeuvre des réformes décidées, en lien avec les commissions compétentes des assemblées et avec la Cour des comptes.

Permettez-moi, en conclusion, de dire un mot d'un sujet auquel je suis très attaché : la lutte contre la fraude fiscale et sociale.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Avec ma collègue Roselyne Bachelot notamment, pour ce qui est des comptes sociaux, nous en faisons une priorité, car elle constitue un élément important de la légitimité de l'intervention publique. La baisse des prélèvements et la lutte contre les dépenses inutiles doivent être accompagnées de la plus grande transparence et surtout de la plus grande équité dans la perception des prélèvements et le versement des prestations. C'est une question de morale publique : ceux qui acquittent leur dû ne doivent pas payer pour ceux qui fraudent ou qui trichent. C'est un point essentiel de l'acceptabilité du prélèvement public.

Je veillerai à poursuivre et à accélérer la mobilisation de tous les services publics, administration fiscale ou organismes de sécurité sociale, au service de cette priorité de justice.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Tels sont, mesdames et messieurs les députés, les principaux axes de travail structurants que le Gouvernement entend suivre pour mener à bien notre chantier commun : l'assainissement durable de nos finances publiques.

Celui-ci n'est ni de droite, ni de gauche ; ce n'est pas l'obsession d'un camp, ni un oubli délibéré de l'autre : c'est une nécessité collective, qui exigera l'engagement de tous et de chacun. On peut discuter des moyens, encore que le niveau atteint aujourd'hui par notre endettement et nos dépenses publiques en limite fortement le nombre ; mais on ne doit pas discuter de l'objectif, qui s'impose à chacun d'entre nous parce que l'avenir de la France est notre bien commun, et parce que la solidarité entre les générations fonde notre éthique commune.

Les Français sont très sensibles à ces enjeux : ils savent que ne sont pas des enjeux simplement comptables, mais de véritables enjeux politiques, qui conditionnent la capacité de notre pays à rester dans l'avenir un grand pays, prospère, influent et respecté. Ils ne veulent plus de politiques de l'autruche, ils ne veulent plus de fausses assurances ; ils veulent que nous assumions collectivement nos responsabilités. Nous n'esquiverons rien et nous tiendrons nos objectifs, parce que nous n'avons pas le droit de les décevoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le débat d'orientation budgétaire pour 2008 est capital puisqu'il engage une stratégie budgétaire qui sera, j'en suis sûr, la clé de voûte de notre politique économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Heureusement que la France a de plus belles cathédrales !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

En effet, chers collègues, notre projet de relance de l'économie est indissociable de notre volonté de mener à son terme le retour à l'équilibre de nos finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Le choc de confiance que notre majorité attend de la mise en oeuvre de la loi dite TEPA, « Travail, emploi et pouvoir d'achat » ne prend son sens qu'à partir de l'engagement du Gouvernement d'accélérer le désendettement de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je suis pour ma part convaincu que les différentes mesures du projet TEPA ne seront efficaces que si les Français savent que l'État ne reprendra pas demain ce qu'il leur donne aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

C'est pourquoi la vertu budgétaire doit nécessairement l'accompagner.

Mais, en sens inverse, le désendettement sera fortement accéléré grâce à la remobilisation des forces économiques du pays qu'organise et encourage le choc fiscal et le choc de confiance de la loi « Travail, emploi, pouvoir d'achat ».

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je reprends à mon compte le principe que le Président de la République a clairement exposé à nos partenaires européens : il faut que nous arrachions à la torpeur économique de notre pays ce point de croissance supplémentaire qui nous fait défaut depuis trop longtemps.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Dès lors que nous aurons obtenu ce point de croissance supplémentaire, nous reviendrons rapidement à l'équilibre de nos finances publiques – peut-être à l'horizon 2010 – et nous fermerons enfin cette trop longue séquence d'endettement que notre pays a entamé en 1981. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Allons, mes chers collègues ! Vous aurez l'occasion de répondre au cours du débat.

Allez-y, monsieur le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : en 1981, la dette représente 20 % du PIB, et 65 % vingt-cinq ans plus tard. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Comme je le disais ce matin, monsieur le ministre, il y a deux principes : celui, intangible, de la maîtrise de la dépense publique dans toutes ses composantes : non seulement le budget de l'État, mais aussi les comptes sociaux et les comptes locaux, dont on parle moins ; deuxièmement, le principe selon lequel les fruits de la croissance doivent être consacrés prioritairement au désendettement. Il ne s'agit pas de les gaspiller : la fameuse cagnotte, si cagnotte il y a, doit être consacrée à la baisse de la dette, et en aucun cas à des dépenses supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Maintenant que vous avez fait vos cadeaux, vous resserrez les cordons de la bourse !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

En 2007 nous avons franchi une étape supplémentaire dans la maîtrise de la dépense d'État en fixant une norme de dépense de – 1 % par rapport à l'inflation. Nous allons garder ce cap en 2008, mais nous élargirons le périmètre de la norme de dépense en y incluant certains prélèvements sur recettes ou des dépenses qui ne sont pas inscrites en tant que telles dans le budget général. Je pense en particulier aux prélèvements sur recettes au profit des collectivités locales, ou aux dépenses fiscales qui se substituent clairement à des dépenses budgétaires, tel le financement par crédit d'impôt du prêt à taux zéro, qui était auparavant financé par des crédits budgétaires. Je pense aussi que, comme Charles de Courson le disait ce matin, les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux doivent entrer dans le périmètre de la dépense d'État, ainsi que certaines débudgétisations de recettes, donc de dépenses, au profit de certains opérateurs de l'État, tels que l'Agence nationale de la recherche, OSEO, ou l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF. Il nous faut donc bâtir une norme de dépenses qui soit exhaustive. En effet, comme je le rappelais ce matin, 56 % des marges de manoeuvre de l'année 2006 ont été consacrées à l'augmentation de la dépense ou à celle des prélèvements sur recettes. En clair, il faut qu'en 2008 un périmètre élargi nous permette de mieux répartir les efforts, qui ne doivent pas peser uniquement sur l'État.

Il faut également, monsieur le ministre, suivre avec une grande vigilance l'évolution des comptes sociaux – à ce propos je me réjouis de votre responsabilité « consolidée » sur l'ensemble des comptes publics, comptes sociaux et comptes de l'État – et il faut bien entendu que nous arrivions à freiner l'évolution de la dépense locale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Nous devons cependant être bien conscients que nous aurons à supporter en 2008 des contraintes probablement plus fortes qu'en 2007, du fait en particulier de la hausse des taux d'intérêt : en dépit d'une stabilisation en volume de la dette, cette hausse provoquera une dépense supplémentaire d'environ un milliard d'euros dont il faut d'ores et déjà prévoir le financement. Le poids du passé se fera également sentir par la progression mécanique des dépenses de pensions, qui à elles seules représentent deux milliards d'euros.

Mais si l'on excepte ces deux héritages du passé, l'accroissement du poids des intérêts et des pensions, les autres dépenses connaissent une stabilisation en valeur, c'est-à-dire une progression égale à zéro, qu'il faut conserver en 2008.

Il faudra, tout en maintenant cette stabilité de la dépense, financer nos priorités : la dernière tranche de la loi de programmation militaire, qu'il ne faut pas oublier et qui suppose un certain nombre de crédits de report ; le soutien à la recherche, qu'il faut porter à 3 % du PIB, et…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…un effort particulier, monsieur Brard, en faveur de l'enseignement supérieur et des universités.

D'où la nécessité absolue de réaliser des économies. On a évoqué ce matin le levier que constitue la LOLF en la matière, qui doit nous permettre de dépenser mieux en dépensant moins. Je pense aussi aux audits de modernisation. Mais je voudrais dire à ce stade que la réduction du train de vie de l'État ne doit pas servir d'alibi en matière d'économies. Il faut certes réduire le train de vie de l'État…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…mais les économies nécessaires sont d'une tout autre échelle. Monsieur le ministre, vous qui vous êtes occupé en d'autres temps de la réforme de l'État – et la fonction publique relève aujourd'hui de votre tutelle – vous savez bien qu'une maîtrise efficace de la dépense publique passe par une « revue générale » des programmes, pour reprendre la terrminologie canadienne.

Comme vous, monsieur le ministre, je me félicite de ce que le Président de la République ait décidé de présider le Conseil de modernisation des politiques publiques, conformément à l'article 5 de la Constitution – cette précision étant destinée à notre cher collègue Brard. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Ceci devrait nous permettre de trouver quelques milliards d'économies.

J'en viens à présent aux recettes. En revalorisant le travail et le pouvoir d'achat, les allégements des prélèvements, que ce soit en faveur des ménages ou des entreprises décidés dans le cadre du projet TEPA, seront payés de retour par une croissance supplémentaire, qui elle-même générera des recettes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cela étant, la prudence commande de ne pas fonder une politique budgétaire exclusivement sur les fruits d'une croissance…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…espérée. Il faut donc rester de la plus grande fermeté sur le levier de la réduction de la dépense. C'est pourquoi, monsieur le ministre, pour répéter rapidement ce que j'ai dit ce matin, la commission des finances attachera la plus grande importance au suivi de l'exécution, semaine par semaine, si ce n'est jour par jour…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…heure par heure, du budget de 2007, pour qu'à la fin de l'année 2007 la stabilisation de la dette soit maintenue et que le budget soit en excédent primaire, une fois déduit les intérêts.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Tremblez, monsieur le ministre, devant autant de résolution !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Nos marges de manoeuvre pour 2008 sont très contraintes et nous devons être intransigeants sur ces deux objectifs que sont le maintien de l'excédent primaire et le maintien d'un déficit stabilisant la dette.

Si nous voulons redresser les comptes pour l'horizon 2010-2012, c'est-à-dire la fin de la législature, il nous faut absolument adopter une approche consolidée, qui embrasse à la fois les comptes de l'État et ceux de la sécurité sociale. Je rappelle en effet que si le budget de l'État est, une fois rétablis les prélèvements sur recettes, de 350 milliards d'euros, celui de la sécurité sociale atteint 450 milliards d'euros, tandis que celui des collectivités locales s'élève à 190 milliards d'euros. Il nous faut donc absolument être attentifs à ces comptes.

Prenons l'exemple des relations financières entre l'État et les collectivités locales : depuis vingt-cinq ans, l'État a pris à sa charge un ensemble d'impôts locaux, comme la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…les dégrèvements de taxe d'habitation ou la réduction des droits de mutation. En réintégrant tout ce que l'État assume en lieu et place des collectivités locales, nous ne serions pas si éloignés aujourd'hui de l'équilibre budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Dans le domaine social, j'insiste comme vous sur le fait qu'il est absolument nécessaire, pour y voir clair, que l'État rembourse sa dette de l'État envers la sécurité sociale, même s'il s'agit là de droits constatés, qui n'ont pas d'incidence sur le déficit. Ce problème envenime les relations et il faut absolument trouver un moyen d'amorcer le remboursement de ces 6 ou 7 milliards d'euros.

En matière de comptes sociaux, vous devez également engager, monsieur le ministre, une révision générale des programmes, à l'image des politiques publiques du budget de l'État. Là aussi, il peut arriver que certaines prestations soient versées sans qu'il y ait de contrepartie sous forme de rigueur et de contrôle de l'efficacité.

Nous devrons aussi améliorer les outils de régulation et de pilotage des dépenses sociales dans une logique de performance, comme c'est le cas avec la LOLF.

L'État doit montrer l'exemple en amplifiant la maîtrise de la dépense, en évitant d'accorder de nouveaux allègements fiscaux sans contrepartie prenant la forme d'économies ou de dépenses supplémentaires, et en appliquant en permanence, durant cette législature, la règle d'affectation des surplus au désendettement.

Je terminerai, monsieur le ministre, en évoquant la pluriannualité, que vous évoquiez en conclusion de votre propos. Il m'a toujours paru quelque peu paradoxal que les ministères dépensiers s'ingénient à sécuriser leurs dépenses dans le cadre de lois pluriannuelles et que le ministre responsable des équilibres généraux ne puisse pas, quant à lui, bénéficier d'une approche pluriannuelle.

Or la pluriannualité, est devenue indispensable. Elle l'est devenue, dans le cadre de la loi organique, la LOLF, pour la gestion par les opérateurs responsables de programmes, à qui une visibilité sur trois ans permettra d'être beaucoup plus efficaces dans leur démarche de bonne gestion. Mais elle est aussi indispensable sur le chemin du désendettement. Il est paradoxal que nous transmettions chaque année à Bruxelles un programme de stabilité reposant sur une approche pluriannuelle et que nous n'ayons pas de mécanisme correspondant dans notre gestion interne des finances publiques. L'inspection des finances vient de nous proposer un rapport tout à fait remarquable pour mettre en place une pluriannualité dans la gestion de nos finances.

Mon voeu le plus cher serait – et je conclurai ainsi – que ce rapport ne reste pas lettre morte. Quoi qu'il en soit, la commission des finances souhaite vivement s'inscrire dans une démarche pluriannuelle en vue de garantir le rétablissement de nos finances publiques. (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, débattre des orientations budgétaires est toujours utile.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Encore faut-il convenir que ce débat vient après la discussion que nous avons eue ce matin sur le projet de loi de règlement et où nous avons déjà évoqué diverses contraintes et réalités budgétaires. Il vient après la présentation du projet de loi TEPA, qui engage une partie de nos finances publiques pour 2007, 2008 et les années à venir. Il vient aussi après une campagne électorale au cours de laquelle ont été formulées des orientations et de propositions et, en quelque sorte, après que le suffrage universel a tranché sur ces propositions.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Comme toujours !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

J'attends donc avec impatience – la même impatience, peut-être, que le rapporteur général – le débat d'orientation budgétaire que nous aurons l'année prochaine, après une année d'exécution qui nous permettra d'apprécier les conséquences des premières mesures qui seront adoptées ce soir dans le cadre du projet de loi TEPA et après quelques mois d'exercice d'une politique qui, si elle se présente comme étant en rupture avec les années précédentes, se situe, selon moi, dans une certaine continuité, à en juger par les propositions formulées en matière fiscale.

En attendant ce rendez-vous pour un débat d'orientation budgétaire qui pourra avoir un autre contenu, je me contenterai, monsieur le ministre, de quelques questions.

La croissance mondiale est vigoureuse. L'activité de la zone euro l'est également. Or les résultats de la France sont un peu en retrait de ces performances. Le président Seguin faisait observer qu'il existait d'ailleurs un risque de voir se creuser encore en 2007 et 2008 l'écart entre la France et ses principaux partenaires, notamment l'Allemagne et l'Italie. Dans son étude annuelle, parue le 27 juin dernier, l'OCDE observe que la reprise reste plutôt hésitante et que l'avance modeste, mais persistante, dont disposait la France depuis plus de dix ans en matière de croissance par rapport à des partenaires commerciaux importants comme l'Allemagne ou l'Italie semble s'être réduite à néant, voire transformée en retard.

Ma première question, monsieur le ministre, est de savoir quelles sont, selon vous, les raisons pour lesquelles les performances de l'économie française soient aujourd'hui systématiquement en deçà de la moyenne européenne et de celles que connaissent de nombreux pays dans le monde, alors que récemment encore ses résultats étaient supérieurs à la moyenne européenne et plus en ligne avec la croissance mondiale. Comment expliquez-vous que ces résultats passables s'observent après cinq années de gouvernement assumées pour ainsi dire par la même majorité ? C'est pour moi un sujet d'étonnement : on ne peut à la fois se glorifier de résultats et constater les faiblesses des performances de notre économie...

Ma deuxième question porte sur les années 2007 et 2008, et notamment sur les modalités de financement des mesures figurant dans le projet TEPA. Le coût de ces mesures sera beaucoup plus important pour 2008 que pour 2007, et plus important encore en régime de croisière en 2009, selon les propres estimations de Mme Lagarde. Comment seront-elles financées pour l'année 2007 ? Des précisions s'imposent, dès lors que, comme vous le rappelez, les plus-values de recettes fiscales – qu'il ne faut en aucune façon considérer comme une « cagnotte », j'en suis entièrement d'accord avec vous –…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

… doivent être consacrées en totalité à la réduction du déficit budgétaire. Comment donc ces dépenses supplémentaires – car même s'il s'agit d'atténuation de recettes, ce sont toujours des dépenses fiscales – seront-elles financées pour l'année 2007, alors même que la Cour des comptes constate pour le début de l'exécution du budget 2007 une certaine surconsommation dans les dépenses réalisées depuis le 1er janvier et, en conséquence, une légère augmentation du niveau de déficit par rapport à l'année précédente ? Comment financer tout cela dans le respect des principes de la LOLF, que vous avez vous-même rappelés ?

Je terminerai par quelques questions portant sur la maîtrise de la dépense, la dette, la fiscalité et la situation des collectivités locales.

En matière de maîtrise de la dépense, nous nous rejoignons sur l'objectif : maîtriser la dépense – cette évidence me semble relever du pur bon sens. Mais alors, pourquoi la dépense publique a-t-elle augmenté plus rapidement durant les cinq dernières années qu'au cours des cinq années précédentes, comme l'a observé la Cour des comptes et rappelé voici quelques jours son Premier président devant la commission des finances ?

Maîtrise de la dépense, certes, mais encore faut-il qu'elle se traduise concrètement dans les faits. S'il y a quelque difficulté à respecter ce principe, c'est parce qu'il y a, reconnaissons-le, plusieurs façons de contourner la norme d'évolution de la dépense. Cela pose à nouveau la question des dépenses fiscales : comment entendez-vous prendre en compte les dépenses fiscales dans le calcul de la norme d'évolution de la dépense publique ?

Cette question est d'autant plus sensible que la majorité de notre assemblée est sur le point de voter des dépenses fiscales supplémentaires de 14 à 16 milliards d'euros sans que nous en ayons évalué les conséquences et l'efficacité. Nous devons tous reconnaître honnêtement qu'aucune de nos dépenses fiscales n'est réellement évaluée et que c'est là l'une des insuffisances des contrôles que nous exerçons au niveau tant du Gouvernement que de l'Assemblée nationale.

En outre, la maîtrise de la dépense ne doit pas se transformer en réduction a priori de la dépense publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Il faut éviter de traduire toujours « maîtrise de la dépense publique » par « réduction a priori de la dépense publique », une telle réduction pouvant remettre en cause de politiques publiques efficaces, si l'on y regarde bien, pour atteindre certains des objectifs que doit s'assigner un gouvernement pour répondre aux besoins collectifs de notre société. (« Tout à fait ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Pour ce qui concerne la dette, M. le rapporteur général s'est permis tout à l'heure de m'envoyer une petite pique,…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Je me permettrai quant à moi de lui faire observer que la seule fois où la France est « sortie des clous » en ne respectant pas les critères de Maastricht fixant le ratio d'endettement, c'est sous la législature précédente, et que nous sommes encore hors des clous.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Malgré une amélioration optique du ratio d'endettement en 2006, l'INSEE a observé que ce ratio avait sensiblement augmenté au premier trimestre de l'année 2007.

Sur la dette comme sur le déficit, je souhaiterais donc vous interroger, monsieur le ministre, sur la réalité de vos engagements.

Lorsque l'on compare les conclusions du sommet de Bruxelles – telles qu'elles sont rapportées par la presse, j'en conviens – avec les engagements pris à cette tribune par le Premier ministre ou par vous-même, on peut observer quelques décalages. Qu'en est-il ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il n'y a aucun décalage.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Les 60 % d'endettement et l'équilibre budgétaire seront-ils atteints en 2010 ou en 2012 ? Et selon quelles hypothèses ?

Une autre question : sous le gouvernement précédent, auquel vous avez participé, l'équilibre était censé être atteint – ainsi d'ailleurs que la baisse du ratio d'endettement – dès 2010, avec pourtant une hypothèse de croissance de 2,25 % ; comment arrivez-vous, avec une hypothèse de croissance plus haute – 2,50 % – à une date plus éloignée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Pour moi, un tel décalage est un sujet d'étonnement et, de temps en temps, on peut s'interroger sur l'hypothèse de croissance qui est retenue.

Autre question encore, monsieur le ministre, pour éclairer notre débat : quel va être le contexte fiscal des prochaines années ? Je précise que le Président de la République, lors de la campagne électorale, s'était engagé à réduire le taux des prélèvements obligatoires – une baisse de quatre points avait même été évoquée. Cet engagement reste-t-il d'actualité dans le contexte budgétaire actuel ? Je me permets de rappeler que le fameux rapport Pébereau, souvent cité à propos de la situation de nos finances publiques, recommandait en seconde priorité de ne pas toucher au montant des prélèvements obligatoires tant que la situation de nos comptes publics ne serait pas suffisamment rétablie. À partir du moment où l'objectif de réduction de quatre points des prélèvements obligatoires reste d'actualité, comment concrètement ce processus va-t-il se décliner sur l'ensemble de la législature ?

Le dernier point de mon intervention concerne les collectivités territoriales. Le Premier ministre a été clair, vous-même également : le contrat de croissance et de solidarité sera bien remis en cause. Mais le sera-t-il dès 2008 ou seulement en 2009 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Et quelles économies cela représentera-t-il pour le budget de l'État ? Selon les chiffres donnés et les périmètres retenus, j'ai eu connaissance de sommes variant entre 500 millions et 1,2 milliard d'euros. Pourriez-vous, là aussi, nous apporter quelques précisions ? Selon le niveau de la somme, c'est toute la question de la capacité des collectivités locales à agir qui est bien évidemment posée. Si je suis de ceux qui souhaitent que nous mettions à plat les relations entre l'État et les collectivités territoriales, encore faut-il que les propositions formulées ne se fassent pas sur le dos de celles-ci.

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, voilà quelques questions pour éclairer le débat, en souhaitant bien évidemment, comme nous l'avons dit ce matin, pouvoir, en accord avec le rapporteur général, assurer un suivi de l'exécution budgétaire. Il a proposé un suivi au jour le jour, à la seconde près ! (Sourires.) Je ne serai peut-être pas aussi ambitieux, mais je pense qu'il faudra en tout cas que nous suivions ensemble les conséquences de l'exécution du budget 2007, pour mieux évaluer les politiques qui nous sont proposées. C'est tout l'intérêt d'un débat d'orientation budgétaire ; c'est aussi tout l'intérêt d'un travail parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Il nous faut des réponses, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est àM. Jean-Pierre Brard, premier orateur inscrit. (De nombreux députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire quittent l'hémicycle.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, je regrette que M. Goulard, effrayé par la perspective de mon propos, prenne déjà la fuite ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, une remarque préalable : vous ne pouvez pas exiger des petites frappes et des malfrats qu'ils respectent la loi si vous-mêmes la violez. Il est vrai que ce ne sont pas les mêmes qui sont violées… Vous, vous violez la première d'entre elle, notre loi fondamentale : la Constitution. Vous l'avez déjà fait à plusieurs reprises tout à l'heure : tant que la Constitution n'est pas modifiée, vous ne pouvez pas attribuer au Président de la République un autre rôle que celui qui lui est dévolu par la Constitution elle-même à l'article 5. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Quoiqu'en dise d'ailleurs le principal intéressé, dont on voit se profiler, de plus en plus, les tendances bonapartistes,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… même si on est passé de la Corse aux Vosges, cela ne change rien quant au fond ! C'est tout à fait insupportable parce que vous y perdez de l'autorité.

Monsieur le ministre, avant d'en venir au coeur de mon propos, je tiens d'abord à vous remercier pour avoir fait marche arrière sur la pratique de la novlangue, pour avoir enfin abandonné l'expression « zéro volume », qui ne veut rien dire du tout ; sauf pour les jargonneux. Vous vous êtes corrigé. À tout péché miséricorde !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur de Courson, vous oubliez qu'un de mes cousins évêque !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, vous avez dit, à propos du service public, qu'économie n'est pas synonyme de détérioration, que ralentir la dépense ne voulait pas dire que le service public serait moins bon. Il faudra que vous nous expliquiez comment cela marche à l'école ou à l'hôpital public. Tous ceux parmi nous qui sont maires et qui président un conseil d'administration le savent, y compris à Paris dans les hôpitaux de l'APHP : aujourd'hui, même pour des pathologies graves, il faut attendre des semaines et parfois des mois pour obtenir un rendez-vous ! Vous pourriez me faire remarquer que cela raccourcit les circuits puisqu'à un certain moment il n'y a plus besoin d'aller à l'hôpital : il suffit d'aller directement aux pompes funèbres ! Vous êtes en train de plomber la santé publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous avez parlé des difficultés de la Sécu, mais c'est vous qui les créez en élargissant sans cesse le trou, en supprimant des cotisations sociales pour beurrer la tartine de ceux qui sont déjà des privilégiés ! Il y aurait une bonne formule : vous parlez de démocratie, le Président de la République en tête ; il a le droit d'en parler, mais ce serait plus convaincant s'il pratiquait… De ce point de vue, il a des marges de progressions. Pour la sécurité sociale, rien ne vaudrait la démocratie. Après tout, qui finance la sécurité sociale ? Ce sont les salariés pour l'essentiel. Revenons au système ancien, qui était démocratique : qu'elle soit gérée par les représentants des salariés. Vous savez que cela a été supprimé il y a déjà un certain temps.

Monsieur le ministre, vous avez tout à l'heure évoqué la fraude. Voilà une volonté qui sonne doux à nos oreilles, sauf que, là encore, entre ce que vous dites et ce que vous faites, il y a un pas. Que faites-vous contre ceux qui escroquent les finances publiques alors qu'ils sont assujettis à l'ISF ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Que faites-vous contre les exilés fiscaux ? Que faites-vous pour combattre les escroqueries à la TVA intracommunautaire ? Vous avez parlé de morale publique, mais prêchez par l'exemple, monsieur le ministre ! Ce n'est pas en réduisant le nombre de fonctionnaires de votre ministère que vous y parviendrez. Je ne parlerai pas des paradis fiscaux quoiqu'il y aurait beaucoup à dire – puisque vous ne voulez faire de peine ni aux Luxembourgeois, ni aux Néerlandais, ni aux Britanniques –, mais je vais donner une information à mes collègues : on prétend renforcer la lutte contre la fraude, mais connaissent-ils une des dernières décisions du Gouvernement ? On empêche les douanes d'acheter des vedettes rapides pour renouveler leur flotte... Est-ce ainsi que nous allons progresser dans la lutte contre la fraude ? Non, tout ça, c'est du discours, de la poudre aux yeux. La réalité est autre.

Quant au train de vie de l'État, qui a été largement évoqué, on voudrait bien que l'exemple vienne d'en haut. Or vous savez comme moi que, sitôt élu, Nicolas Sarkozy a doublé le nombre des agents qui forment le personnel de maison de l'Élysée !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cher collègue, je ne personnaliserai pas.

Quant à l'effet annoncé des mesures du « paquet fiscal », discuté la semaine dernière par notre assemblée, il sera, à en croire le rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire, quasi miraculeux : « Les dispositions contenues dans le projet de loi permettent d'augmenter le pouvoir d'achat des ménages et des salariés tout en diminuant le coût du travail pour les entreprises ». Mais l'expérience de cinq années de votre gestion, depuis 2002, nous a montré que ce type de mesure est inefficace pour relancer la consommation et la croissance car l'essentiel des cadeaux fiscaux ou des réductions de cotisations sociales va dans la poche des contribuables les plus fortunés, ou de patrons qui en profitent pour thésauriser ou effectuer des placements financiers. Une véritable politique de relèvement du pouvoir d'achat doit être orientée, massivement, vers les ménages moyens et modestes qui ont de nombreux besoins non satisfaits, et utilisent donc le surplus de pouvoir d'achat qui leur est accordé pour répondre à ces besoins. Quand un RMIste, un smicard, un fonctionnaire moyen, un employé d'une entreprise privée voit son salaire augmenter, que fait-il ? Il ne va pas acheter des actions, encore moins spéculer à la Bourse. Il va éventuellement faire les soldes pour habiller ses enfants avant les vacances, ou bien garder un peu d'argent pour faire face aux frais de la rentrée scolaire… C'est à ce demander, messieurs les membres du Gouvernement, dans quel monde vous vivez !

Les motivations réelles de votre « paquet fiscal » ne sont pas à chercher bien loin : Mme Lagarde les a annoncées très explicitement. Selon Les Échos du 10 juillet, lors des Rencontres économiques d'Aix-en-Provence, elle a expliqué vouloir – je la cite parce que cela vaut vraiment le coup – « désinhiber la France, réhabiliter le succès et son corollaire, l'argent ». Oui, monsieur Karoutchi, je vous vois sourire, parce que vous qui êtes un homme du champ politique, vous savez bien qu'on peut penser cela, mais pas le dire aussi ouvertement ! Vous savez à quel point cela peut avoir des effets détestables ! Je regrette seulement qu'elle ne l'ait pas dit entre les deux tours des élections législatives, si possible à une heure de grande audience, sur TF1 par exemple… Dans le même registre, on a déjà pu constater que le Président de la République prêche par l'exemple, entre Fouquet's et yacht de luxe. Et Mme Lagarde d'ajouter devant les investisseurs de Paris Europlace, à l'intention de ses amis fortunés, mais au patriotisme très chancelant : « Vous qui partez chercher au loin les clefs du paradis fiscal, je vous dis : revenez, ce n'est plus le purgatoire ici ! Enrichissez-vous ! ». On ne se lasse pas de la reciter, à voir comment elle a appris son Guizot par coeur !

De ce point de vue, les choses sont déjà en très bonne voie, comme le confirme une étude de l'économiste Camille Lombais de l'École d'économie de Paris : « Notre travail révèle un fort accroissement des inégalités de revenus depuis huit ans, du fait d'une augmentation très forte des revenus des foyers les plus riches depuis 1988, tandis que les revenus moyens et médians croissent très modestement. Les 0,01 % des foyers les plus riches ont vu leur revenu croître de 42,6 % sur la période, contre 4,6 % pour les 90 % des foyers les moins riches ». Voilà, mes chers collègues de droite – « chers » parce que vos politiques coûtent cher aux contribuables et rapportent beaucoup à ceux dont vous allégez les impôts, c'est-à-dire les plus riches !

Camille Lombais explique cet accroissement des inégalités par une jolie formule : « La forte dynamique des revenus du patrimoine explique une partie des divergences de destin entre les niveaux de revenus ». Avouez que c'est bien tourné… Je suis sûr que Guy Geoffroy va apprécier !

Le rapport précise vos projets concernant les services publics auxquels, rappelons-le, les Français sont extrêmement attachés. Or, ces projets sont des plus inquiétants ! L'axe stratégique est dessiné page 20 : « Le service public doit se recentrer sur ses missions pour plus d'efficacité afin de mieux accompagner l'initiative privée et favoriser la croissance. Cette meilleure utilisation de l'argent public permettra de dégager les marges de manoeuvre nécessaires pour financer les dépenses indispensables à une croissance durablement plus forte, comme les crédits pour la recherche et l'université ».

Les hôpitaux sont, déjà, fortement incités à coopérer, pour leurs investissements, avec le privé. Mais je n'ai jamais vu le groupe Bouygues faire oeuvre de philanthropie ! S'il finance des investissements, même dans un hôpital, il en attendra un retour en espèces sonnantes et trébuchantes. Payées par qui ? Par la sécurité sociale, bien entendu…

Les objectifs sont donc clairement énoncés : « accompagner l'initiative privée et favoriser la croissance ». Jusqu'à présent les objectifs du service public, dans une perspective républicaine, étaient de répondre aux besoins des citoyens en fournissant à tous un service de qualité, financièrement et géographiquement accessible à chacun, sans discrimination. Le service public est, et doit rester, au service des citoyens et non de l'initiative privée, car il est un puissant facteur de cohésion sociale.

Vous invoquez sans cesse la défense de l'attractivité de la France. Mais cette attractivité est fondamentalement liée à la qualité des services publics de l'éducation, de la santé, des transports, de la culture – pour n'en citer que quelques-uns – et non au moins-disant fiscal et social, votre credo.

Du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, vous avez fait un dogme. Cette mesure rétrograde, personne n'avait osé la mettre à exécution, même si elle fait les beaux soirs des théoriciens libéraux depuis des années. Le document d'orientation budgétaire indique, au passage, que le rythme d'accroissement des effectifs dans la fonction publique territoriale est supérieur à celui enregistré dans la fonction publique de l'État. Cela résulte simplement des transferts de compétences opérés dans la dernière période.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais cela résulte surtout du fait que les collectivités territoriales sont au contact direct des citoyens sur le terrain, qu'elles doivent répondre à leurs besoins et faire face à des situations concrètes et urgentes, appelant des réponses immédiates et efficaces, comme, par exemple, en novembre 2005.

À l'époque, souvenez-vous, le Gouvernement a perdu les pédales face aux violences dans les banlieues. Heureusement que les maires étaient là, sur le terrain, qu'ils soient de gauche ou de droite ! Cela dit, nous n'avons pas entendu parler de violences urbaines à Neuilly-sur-Seine, pas plus qu'à Courbevoie, Rueil-Malmaison ou Puteaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

La réduction des effectifs sera donc, pour les services publics et les administrations de l'État, de l'ordre de 35 000 emplois par an. Pour 2008, par exemple, 17 000 suppressions de postes, devraient intervenir dans l'éducation nationale.

Pendant la campagne électorale, le candidat Nicolas Sarkozy a crié haro sur les douaniers, ce qui est très incohérent quand on prétend lutter contre la fraude !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Article 5 !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'était juste une réflexion personnelle…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne l'ai pas entendue. J'ai cru qu'elle m'était destinée. Non ? C'est dommage !

Je pensais au travail à réaliser pour combattre la fraude que j'évoquais tout à l'heure, en particulier aux frontières de l'Union européenne.

En matière de dépenses de santé, le rapport invoque « une maîtrise renforcée des dépenses d'assurance maladie. » Concrètement, il s'agit, pour les assurés, de l'instauration d'une réduction annuelle des remboursements sur les soins et les médicaments annoncée page 64, sous le vocable enjôleur de « franchise pour financer les dépenses nouvelles ». En année pleine, l'addition représentera 1,225 milliard d'euros, essentiellement à la charge des assurés.

Outre une mise en cause des effectifs de la fonction publique territoriale déjà évoquée, nous constatons une volonté d'aller vers une standardisation de la gestion des collectivités locales. Je vous cite : « La diffusion de coûts standards, appliquée au champ local, devrait ainsi permettre d'identifier et de diffuser les bonnes pratiques et de constituer, par politique publique, des “boîtes à outils” permettant de rendre le meilleur service au meilleur coût, en fonction des spécificités locales. » Mais, pour rendre le meilleur service au meilleur coût, nous ne vous avons pas attendus, monsieur le ministre !

Pour faire bonne mesure, le paragraphe suivant du rapport annonce : « Un site Internet unique et enrichi par rapport aux sites ministériels existants pourrait ainsi être développé afin de mettre à disposition des élus locaux et du public une série d'informations sur les données économiques et financières des collectivités territoriales ainsi que sur certains ratios financiers pertinents. » Voilà une mesure vraiment révolutionnaire ! dirait notre rapporteur général qui, ce matin, appelait Saint-Just à participer à nos travaux… Nous savons ce que vous prévoyez : non seulement des cadeaux pour les privilégiés, mais surtout la TVA « antisociale ». Oh vous faites patte de velours parce que vous avez été échaudés entre les deux tours des élections législatives ! Mais récemment, vous avez resservi les plats.

Les Français ne sont pas les bourgeois de Calais, monsieur le ministre ! Vos orientations nous offrent la corde. Mais nous allons la délier et délier l'énergie de notre peuple, en jouant notre rôle dans cette enceinte, pour que les Français s'unissent et s'opposent à votre politique d'injustice faite uniquement pour les privilégiés, ce dont nos compatriotes ne tarderont pas à se rendre compte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Charles de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le Président de la République a pris des engagements forts en matière budgétaire, devant nos partenaires de l'Eurogroupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Il s'est engagé à ramener le déficit à 2,4 % du produit intérieur brut en 2007 – ce qui représente à peu près 2 milliards d'économies – puis à 2,3 % en 2008 – encore 2 milliards supplémentaires. Il a également promis de faire repasser le ratio de dettes sous le seuil des 60 %, et de ramener le solde public à l'équilibre au plus tard en 2012, mais si possible dès 2010.

Le groupe Nouveau Centre approuve ces objectifs. Mais si nous voulons les tenir, il faut rompre avec des pratiques inadaptées à la situation de nos finances publiques et être convaincus que nous devons faire des efforts comparables à ceux consentis par tous nos partenaires communautaires. La France est devenue une anomalie en Europe.

Ce redressement dépend largement de la croissance française. Cessons de nous raconter des histoires ! Au cours des cinq dernières années, la croissance française a tourné autour de 1,5 %, alors qu'elle se situait à un peu plus de 2 % auparavant. Elle a constamment décru. Cet état de fait s'explique par deux raisons majeures.

La première réside dans l'ampleur du déficit des finances français qui est d'une tout autre nature que celui de l'Allemagne, par exemple. Le déficit français est massivement imputable à des dépenses de fonctionnement ; celui de l'Allemagne est davantage creusé par des dépenses d'investissement. En France, sur 42 milliards de déficit budgétaire, 22 milliards sont liés au fonctionnement. Quant à celui de la sécurité sociale, c'est entièrement un déficit de fonctionnement.

Ne vous étonnez pas si à force de ponctionner l'épargne nationale pour alimenter un déficit de fonctionnement, vous assistiez à une chute du taux de croissance. De combien ? De l'ordre de 0,5 point sur la moyenne période. Pourquoi ? En divisant 2,5 ou 3 % par un coefficient de capital de 4, on obtient, grosso modo, la réduction de la croissance française : un demi – point…

Deuxième cause de la baisse du taux de croissance : la baisse de la compétitivité internationale de nos entreprises qui, de ce fait, perdent des parts de marché. Au cours des cinq dernières années, on peut estimer que ce facteur nous a coûté environ 0,5 à 0,6 point de croissance par an.

Donc, si nous voulons regagner le point de croissance qui nous manque pour essayer de gérer avec sagesse nos dépenses publiques et améliorer fortement le niveau de chômage – c'est-à-dire le faire tomber à 4,5 ou 5 %, performance des pays les mieux gérés en Europe – il faut chercher à redresser la compétitivité des entreprises : favoriser la recherche, l'innovation, l'assouplissement des relations sociales, etc.. C'est cela qui permettrait de gagner deux fois 0,5 point et de passer de 1,5 à 3 % de croissance annuelle.

Dans le rapport qui, hélas, ne nous a été remis que ce matin, le rapporteur général le montre très bien : avec un taux de croissance de 3 % et une gestion rigoureuse, nous atteindrions l'équilibre budgétaire en 2010, sans problème ! En revanche, si nous tombons à moins de 2 % comme cela a été le cas, en moyenne, ces cinq dernières années, les choses deviendront extrêmement difficiles.

Monsieur le ministre, il semblerait que vous envisagiez de retenir un taux de croissance d'environ 2,5 % pour l'année prochaine. C'est une hypothèse optimiste, plutôt en haut de la fourchette des prévisions. En effet, nous avons réalisé 1,2 % en 2005, 2,1 % en 2006 et actuellement les évaluations se situent entre 2,1 % – selon l'INSEE – et 2,4 % – pour les plus optimistes.

Or il ne s'agit pas de se focaliser seulement sur 2008, mais de tenir dans la durée avec un taux de croissance beaucoup plus élevé que ces dernières années. Monsieur le ministre, je vous conseillerais donc de faire l'inverse de vos prédécesseurs : retenez systématiquement l'hypothèse la plus basse ! Ne pensez pas, comme vos prédécesseurs, qu'afficher un taux de croissance plus élevé que raisonnable modifie le comportement des acteurs économiques. Il n'en est rien. Les acteurs économiques n'attendent pas que le ministre des finances leur annonce le futur taux de croissance. Alors, soyez prudent et dites que vous retenez l'hypothèse la plus basse, et que tout ce qui viendra en plus, nous l'affecterons à la réduction du déficit budgétaire.

À ce stade, j'aimerais vous citer un passage du rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques. Je voudrais mettre cet excellent extrait en résonance avec votre objectif, monsieur le ministre : diviser par deux le taux de croissance en volume de la dépense publique – État, sécurité sociale, et collectivités territoriales.

« Malgré l'infléchissement de 2006, l'augmentation moyenne des dépenses a été plus forte au cours des cinq dernières années (2,6 % par an en volume) qu'au cours des cinq précédentes (1,8 %). La croissance des dépenses n'a donc manifesté aucune tendance de fond au ralentissement sur la période récente en dépit des objectifs annoncés. » La note de bas de page, où se trouve toujours l'essentiel dans les rapports de la Cour des comptes, précise : « Depuis 2000, – vous voyez que tout le monde est concerné ! –, tous les programmes de stabilité ont retenu des objectifs de progression des dépenses compris entre 0,3 % et 1,3 % par an en volume. » Mais n'ont jamais été respectés…

Si nous voulons effectivement redresser les finances publiques, il faut donc amorcer une véritable rupture dans leur gestion. S'agissant du budget pour 2008, monsieur le ministre, vous n'y parviendrez pas si, comme je vous l'ai dit en d'autres lieux, vous ne tendez pas à une progression « zéro valeur » pour ce qui concerne les dépenses de l'État. Vous m'aviez répondu que cet objectif était atteint dès lors que l'on retranchait les augmentations spontanées, notamment de la dette. Or, mes chers collègues, le rapport de M. Carrez et celui de la Cour des comptes le montrent bien : n'espérez plus une baisse des taux d'intérêt ! Bien au contraire, ceux-ci augmentent et portent sur un stock de dette lui aussi croissant. Pour 2008, l'ordre de grandeur actuellement avancé est de 1,8 milliard d'euros, soit entre 1,5 milliard et 2 milliards selon l'évolution des taux d'ici à la fin de l'exercice.

Certains de nos collègues pensent que l'objectif du « zéro valeur » est irréaliste : je les invite à consulter le rapport de la Cour des comptes, qui montre que, chez la plupart de nos partenaires, la part de la dépense publique dans la richesse nationale a rapidement baissé.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Pourquoi les Français n'arriveraient-ils pas à faire ce que les Allemands, les Anglais, les Espagnols et bien d'autres ont fait ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pourquoi les imiter ? Vous avez toujours besoin de modèles ! Hier, c'étaient les Soviétiques ; aujourd'hui, ce sont les Allemands ! (Rires et exclamations sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Ce n'est pas une affaire de modèle, mon cher collègue.

Le déficit du budget de l'État s'est finalement établi en 2006, monsieur le ministre, à 39 milliards d'euros – soit 10 milliards de moins que prévu, grâce à des plus-values fiscales et non à des économies supplémentaires. Pour l'année 2007, notre assemblée a voté un budget présentant un déficit de 42 milliards d'euros. Vous nous avez expliqué en commission que vous espériez entre 2 et 5 milliards de plus-values mais qu'il fallait financer le milliard dévolu au TEPA, ainsi que d'autres dépenses. Au mieux, le déficit sera donc de 38 à 41 milliards d'euros, soit un chiffre légèrement supérieur à celui de l'exercice 2006.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

En 2008, nous devons absolument afficher une poursuite de la réduction en valeur du déficit budgétaire de l'État. L'exercice, je le sais, est particulièrement difficile, mais avec une dépense « zéro volume », je pense que vous n'y parviendrez pas : il faut passer à « zéro valeur ».

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

J'indiquerai tout à l'heure les trois grands types d'économies permettant d'atteindre un tel objectif.

Le problème est encore plus difficile pour la sécurité sociale. Je m'étonnais auprès de notre rapporteur général que le rapport d'information publié ce matin n'évoque que le budget de l'État et pas la situation de nos comptes sociaux : faute de temps, m'a-t-il répondu. Je voudrais donc préciser que le financement des administrations de sécurité sociale, au sens de la comptabilité nationale, s'est dégradé en 2006 à hauteur d'environ 3 milliards d'euros – puisque le déficit est passé de 2,6 milliards en 2005 à 5,6 milliards.

Toutefois, ces chiffres n'ont pas grand sens puisqu'ils mêlent régimes de base, qui relèvent de la responsabilité de l'État, et régimes complémentaires, qui, comme l'assurance chômage, ressortissent aux partenaires sociaux. Or ces derniers, mes chers collègues – et en particulier de gauche –, ont mieux géré les seconds que les Gouvernement successifs n'ont géré les premiers.

Si les dépenses sociales ont enregistré une croissance relativement modérée – 3,3 % – en 2006, une partie d'entre elles ont été reportées sur le budget de 2007 : le malheureux ministre en charge des comptes, qui porte sur son dos la lourde croix du budget de la sécurité sociale et du budget de l'État, doit donc assumer un dérapage de ces dépenses, à hauteur d'environ 2 milliards pour l'assurance-maladie. Chacun savait, d'ailleurs, que l'ONDAM pour 2007 n'était pas réaliste : nous avions dit, lors du débat sur le PLFSS, qu'il était sous-estimé de 1, et sans doute de près de 2 milliards. Nous sommes donc à 2 milliards.

Quant aux régimes de retraite de base, le « dérapage » s'est élevé à 1 milliard d'euros car le dispositif de départ anticipé a mieux fonctionné que prévu : on observe aujourd'hui encore un rythme moyen d'environ 110 000 départs anticipés par an, soit 440 000 départs cumulés. Nous avions tous voté pour cette mesure de justice que nos concitoyens ont largement utilisée et qui était d'ailleurs réclamée par les partenaires sociaux, mais on en mesure aujourd'hui les conséquences pour nos comptes sociaux, d'autant que nous avions aussi ouvert la possibilité de racheter des annuités. Certes, le dispositif touche à sa fin puisqu'il n'y aura bientôt plus guère d'actifs ayant commencé à travailler entre quatorze et seize ans, mais entre-temps, nos comptes sociaux, eux, se sont dégradés.

Vous avez déclaré, monsieur le ministre, que l'objectif du Gouvernement était de ramener la croissance de l'assurance-maladie de 2 % en volume. Or, dans tous les pays occidentaux, l'élasticité des dépenses de santé est de l'ordre de 2 : pour une progression en volume équivalant à 2 % du PIB, la croissance des dépenses de santé est en moyenne de 4 %. L'objectif annoncé exige donc des réformes structurelles, à commencer par celle de l'hôpital, dont personne ne veut parler : sujet d'autant plus difficile que, chers collègues de gauche, la loi sur les 35 heures, appliquée sous la forme du compte d'épargne-temps, est une véritable bombe à retardement budgétaire puisque le nombre d'heures travaillées non payées atteint aujourd'hui 2,2 millions !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Aux dernières nouvelles, les comptes des hôpitaux sont à peine provisionnés pour le quart. Lors de la discussion du projet de loi TEPA, certains collègues avaient d'ailleurs suggéré de considérer ces heures comme des heures supplémentaires au sens de l'article 1er, ce à quoi s'est refusée notre assemblée.

Je pense donc, monsieur le ministre, que votre objectif d'une croissance de 2 % en volume des dépenses de santé, c'est-à-dire à peu près parallèle à celle de la richesse nationale, suppose des réformes structurelles dont il serait intéressant que vous informiez la représentation nationale. Force est en effet de reconnaître que, lors des campagnes législative et présidentielle, le problème a été à peine esquissé.

En revanche, s'agissant des retraites, les orientations de la réforme qui interviendra au printemps de 2008 après le dialogue avec les partenaires sociaux ont été clairement affichées. Toutefois, même si nous avons le courage de la voter, elle ne portera pas ses fruits immédiatement. On parle pour la première fois de supprimer les régimes spéciaux – ce que, pour ma part, je préconise depuis quinze ans ; mais, là encore, ce n'est pas le lendemain matin de cette décision que les effets s'en feront sentir : le Président de la République a d'ailleurs déclaré devant l'Eurogroupe qu'il engageait des réformes structurelles, mais que les économies réalisées ne le seraient pas dès leur mise en oeuvre, d'autant que celle-ci génère parfois des dépenses. Il faudra en fait attendre au moins deux ou trois ans.

Sur ces deux grandes branches – les autres ne posant pas de problème particulier –, le nouveau centre souhaite que l'ONDAM soit mieux respecté, et donc calibré d'une façon plus réaliste : Jean-Luc Préel l'expliquera longuement lors de l'examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ayons le courage de dire à nos concitoyens qu'en matière de retraites, nous ne pouvons continuer avec les départs anticipés. Il faut au contraire améliorer le dispositif, peu efficace jusqu'à présent, visant à encourager le travail des seniors. Aucun équilibre durable de la branche « retraites » de la protection sociale n'est possible autrement.

Un mot, enfin, sur le troisième volet des finances publiques : les collectivités territoriales. Après huit années d'excédent au cours desquelles elles se sont désendettées,…

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

…on a vu apparaître en 2004 un besoin de financement, lequel augmente de 1 à 1,5 milliard d'euros chaque année. On était à 3,3 milliards en 2005, à 4,6 milliards en 2006 et l'évolution semble se confirmer. Les dépenses locales ont elles-mêmes augmenté à un rythme soutenu : 6,1 % en valeur pour 2006, dont il faut certes retrancher les transferts de compétences, mais ceux-ci, pour les communes et les intercommunalités – lesquelles représentent environ deux tiers des dépenses locales – sont pratiquement nuls. L'augmentation des dépenses ne peut donc, contrairement à ce que l'on prétend souvent, leur être imputée.

Il est vrai, en revanche, que la croissance des dépenses des départements est liée, pour environ 80 % – selon les calculs de notre commission des finances – aux transferts de certaines prestations sociales définies par l'État. Les conseils généraux sont devenus des distributeurs de prestations sociales, sans possibilité de modulation. Certes, une première expérimentation a eu lieu dans le cadre de l'article 142 de la loi de finances pour 2007 et l'on va essayer d'améliorer les choses grâce à la loi TEPA. Mais il faut aller bien plus loin dans la possibilité donnée aux élus départementaux de moduler les prestations sociales dont ils ont la responsabilité, dans des limites fixées par la loi : je ne vois pas pourquoi le conseil général de Corrèze ne pourrait pas décider un RMI plus bas qu'en région parisienne, compte tenu des différences du coût de la vie. En la matière, monsieur le ministre, appliquer la même règle à tous ne signifie pas l'égalité. Il conviendrait donc de rendre une telle modulation possible, libre ensuite aux départements d'en faire usage ou non.

Mon groupe a toujours défendu le principe de la responsabilisation des élus locaux. Or, hélas ! les majorités qui se sont succédé n'ont fait que démanteler le système de la fiscalité locale. Il est vrai que celui-ci était devenu obsolète, mais nul n'a jamais eu le courage de le réformer vraiment.

Le comité des finances locales a organisé un séminaire au cours duquel nous nous sommes demandé quel était l'impôt tout à la fois moderne, euro-compatible, démocratique et responsabilisant pour les élus locaux. Il n'y en a qu'un : l'impôt sur le revenu. C'est ainsi qu'est née l'idée de donner aux départements et aux régions la possibilité de fixer un taux de CSG, en réduisant le taux de CSG nationale et en supprimant les compensations accordées par l'État, qui déresponsabilisent totalement les régions.

Aujourd'hui, celles-ci n'ont guère plus de 25 % d'autonomie fiscale. Dans mon département, ce taux atteint à peine un tiers… On ne peut vouloir responsabiliser les élus et louer la démocratie locale sans aborder cette question. Il serait intéressant, monsieur le ministre, que vous nous disiez dans quelle direction souhaite aller le Gouvernement pour responsabiliser les collectivités territoriales.

Souvenez-vous du débat torride que nous avons eu l'an dernier à l'occasion du projet de loi de finances lorsque des technocrates en folie nous ont proposé de véritables usines à gaz, croyant qu'ils réguleraient la dépense publique en intégrant les impôts locaux dans le bouclier fiscal et en prévoyant des sanctions collectives. Le Gouvernement a été obligé de renoncer à cette idée, tant elle était absurde – les sanctions collectives ont été supprimées par amendement la semaine dernière.

J'en viens au mécanisme de plafonnement à la valeur ajoutée.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur le ministre, vous êtes un garçon sérieux et vous savez ce qu'est une entreprise : remettez un peu votre nez dans ce dispositif. À mon avis, il explosera dans deux ou trois ans, car nous n'arriverons pas à le tenir. Nous avons déposé des tas d'amendements sur ce point, dont une partie a été adoptée dans la dernière loi de finances.

Restons-en donc à des idées simples, comme la responsabilisation et la réforme de la fiscalité locale, et nous réussirons à réguler le système. En maintenant les collectivités locales dans un état de dépendance à l'égard de l'État – c'est-à-dire de la fiscalité nationale – vous déresponsabilisez les élus locaux et vous les encouragez à se comporter en syndicalistes.

J'en viens aux propositions du Nouveau Centre face à la situation budgétaire de notre pays et au désendettement de l'État. Notre groupe, monsieur le ministre, a toujours dit que le Gouvernement devait cesser de raconter des histoires à la représentation nationale. Nous avons longuement débattu avec vous, dans un esprit ouvert, du concept de dépense nette. Tout le monde reconnaît que le concept de dépense nette masque l'augmentation réelle de la dépense de l'État : M. le rapporteur général avait d'ailleurs eu l'audace de le dire l'an dernier. Dans votre intervention liminaire, monsieur le ministre, vous vous êtes montré disposé à élargir le concept.

Le Nouveau Centre vous demande d'intégrer dans la norme de dépense les prélèvements sur recettes, et notamment le prélèvement européen, contrairement à ce que préconise M. le rapporteur général. Nous, nous pensons qu'il faut l'intégrer, car ce sont les ministres des finances qui décident du budget de l'Europe, sur proposition de la Commission, naturellement, et avant l'examen par le Parlement – or on sait que les traités ne donnent guère de pouvoirs au Parlement européen.

Monsieur le ministre, vous êtes donc co-responsable du budget de l'Europe, donc du prélèvement européen. Il faut donc l'intégrer à la norme. Mais, monsieur le ministre, vous ne vous êtes pas officiellement prononcé. Quant au rapporteur général, il défend la thèse inverse.

S'agissant des prélèvements sur recettes, M. le rapporteur général a raison d'y intégrer les dégrèvements et les remboursements sur impôts locaux, qui explosent : deux milliards supplémentaires dans la loi de règlement de 2006 !

Par ailleurs, il faut mettre en place un système de comptes consolidés pour les établissements publics que vous débudgétisez, afin que nous ayons une vision d'ensemble des variations que cela entraîne. Tel est le sens d'un amendement que j'ai proposé à la commission. J'ai cru comprendre, monsieur le ministre, que vous étiez prêt à étendre le nombre de ces organismes.

En revanche, je crois savoir que vous n'êtes pas très favorable à l'utilisation de la dépense fiscale. Je propose que la commission des finances effectue une étude rétroactive sur l'utilisation de la dépense fiscale à la place de la dépense budgétaire. La dépense fiscale, en effet, donne l'illusion qu'elle ne coûte rien dans un premier temps, et fait croire à un effort de rigueur. Certains ministres en ont tellement abusé qu'ils ont prétendu réduire la dépense budgétaire alors que la dépense globale augmentait !

Faut-il, monsieur le ministre, intégrer la dépense fiscale dans la norme, et la substituer à la dépense budgétaire ? Le prêt à taux zéro, par exemple, n'a pas été financé comme une dépense budgétaire, mais par un crédit d'impôt sur les sociétés offert aux banques qui le proposaient. De plus, c'est une dépense qui augmente rapidement, ce qui plombe l'impôt sur les sociétés. Heureusement, celui-ci se porte bien et cela ne se voit pas trop. Mais il en irait autrement s'il affichait une faible croissance. Comme vous le voyez, il serait sage d'élargir le concept afin de mieux apprécier la dépense publique.

Par ailleurs, le Nouveau Centre partage votre volonté de consacrer l'intégralité des surplus fiscaux au désendettement, comme cela a été fait en 2006, mais à condition d'adopter une hypothèse de croissance basse de façon à réaliser des plus-values. Il y a un problème dont on ne parle jamais : que se passe-t-il en cas de moins-value ? Du fait de leur élasticité, – de l'ordre de deux points – les recettes fiscales « crachent » beaucoup lorsque tout va bien. Mais sitôt qu'arrive une inversion, elles s'effondrent : ce fut le cas en 2002 où nous nous sommes retrouvés avec un gouffre budgétaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Oui, et l'élastique vous revient dans la figure ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

On parle toujours du mécanisme dans un sens, mais jamais dans l'autre. Vous m'objecterez que l'on constitue une réserve de précaution, qui s'élève à 4,5, voire 5 milliards d'euros. Mais l'expérience montre que les sous-dotations connues dès la loi de finances – AME, OPEX, bonifications, dans le domaine de l'épargne, etc. – vous mangent plus de la moitié de votre réserve. Je suis de ceux qui préconisent d'ajuster les crédits budgétaires avec réalisme et de vous laisser une véritable réserve de précaution, et non une réserve dont la plus grande partie est préemptée par l'insuffisance de certaines dotations, connue dès le vote de la loi de finances !

Le Nouveau Centre partage également votre volonté de réforme de l'État. Les services publics doivent se consacrer à leur mission pour accompagner plus efficacement l'initiative privée qui, elle, favorise la croissance. Nous soutenons votre démarche, inspirée des pratiques étrangères, qui consiste à réviser l'ensemble de nos politiques publiques et de passer au crible toutes les dépenses de l'État et de ses opérateurs, en fonction des trois dimensions de la performance : l'efficacité, l'efficience et la qualité du service.

Enfin, le Nouveau Centre voudrait vous alerter sur la question de la fraude fiscale et sociale – problème cher à M. Brard – dont le montant, 36 milliards d'euros, est comparable à celui du déficit de l'État. Selon le rapport annuel du Conseil des prélèvements obligatoires de février 2007, les deux tiers de la fraude sont imputables aux impôts, TVA en tête – en fait, au travail au noir. Ce n'est pas nouveau : le rapport que j'avais rédigé en 1996 le montrait déjà.

Vous dites vouloir faire de la lutte contre la fraude fiscale et sociale une priorité : nous nous en réjouissons. Nous estimons que la baisse des prélèvements et la lutte contre les dépenses inutiles doivent avoir pour corollaire l'optimisation des recettes, qui renforce le consentement à l'impôt.

Mais la meilleure façon de lutter contre le travail au noir, c'est d'encourager le travail « au blanc », le travail déclaré par des incitations fiscales, comme on l'a fait avec succès dans le domaine du travail à domicile, où le nombre de travailleurs au noir a été réduit de moitié !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pourquoi ne renoncez-vous pas totalement à l'impôt ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Par quels moyens réduire la dépense publique ? Mon groupe, le Nouveau Centre, s'est toujours battu…

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

…pour inscrire dans la Constitution – cela figure dans notre plate-forme législative – l'interdiction de présenter en déficit de fonctionnement le budget de l'État et celui de la sécurité sociale. L'engagement en a été pris devant la représentation nationale : il faudra donc réformer la loi organique pour l'y intégrer.

Afin de financer les dépenses nouvelles, notamment celles qui figurent dans le texte relatif au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat, qui sera voté prochainement, le Nouveau Centre propose trois importantes mesures d'économie.

Tout d'abord, il faut mettre les mesures dites de « niche fiscale » sous enveloppe, à travers l'impôt minimal alternatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je vous rappelle que les 240 niches fiscales – une par jour ouvrable – qui existent dans notre pays privent les recettes de l'impôt sur le revenu de 35 milliards d'euros. Si elles n'existaient pas, l'impôt sur le revenu produirait autour de 100 milliards d'euros au lieu de 65 milliards.

Mettons donc ces mesures sous enveloppe et adoptons le dispositif de l'impôt minimal alternatif, qui a fait ses preuves aux États-Unis – n'en déplaise à notre collègue Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Une autre mesure consiste à concentrer les allégements de charges patronales sur les PME, car ce sont elles qui en ont le plus besoin et créent le plus d'emplois. Sur ce point, il semble que vous avez encore quelques hésitations, monsieur le ministre. Suivons donc les recommandations de la Cour des comptes et commençons par en exclure les grandes entreprises du pétrole, de la chimie et de la grande distribution. Celles-ci, en effet, n'ont nul besoin de ces aides qui, de plus, ont un inconvénient majeur, mis en lumière par la Cour des comptes : elles créent des trappes à bas salaires au lieu de développer l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

La dernière mesure consiste à lier l'État aux collectivités territoriales par un pacte de solidarité, afin que les transferts de l'État ne puissent plus dépasser l'augmentation de la dépense publique.

Avec ces trois mesures d'économie, nous pourrions financer pendant deux ans l'ensemble des mesures contenues dans le texte relatif au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat.

Je voudrais enfin évoquer les quatre grandes réformes structurelles indispensables au redressement de nos finances publiques : la réforme des retraites – sur laquelle nous nous sommes clairement engagés devant le peuple français – et celle de l'assurance maladie, la décentralisation – avec une véritable autonomie fiscale, et non seulement financière, des collectivités territoriales – et enfin, la réforme de l'État.

En conclusion, le désendettement est essentiel pour restaurer nos marges de manoeuvre et retrouver au plus vite un point de croissance supplémentaire. Le Nouveau Centre, qui entend contribuer de son mieux au redressement des finances publiques, apportera son soutien à une véritable politique budgétaire de rupture, capable de réduire le niveau de notre dette publique. Cela implique l'inscription dans la Constitution du principe d'interdiction de tout déficit de fonctionnement, le financement de chacune des dépenses nouvelles par des mesures d'économie à due concurrence, la mise en oeuvre des quatre grandes réformes que j'ai évoquées plus haut, et enfin un effort, partagé par tous, de maîtrise des dépenses.

Force de proposition et de contrôle, le Nouveau Centre sera au rendez-vous du projet de budget et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 avec des propositions justes, audacieuses et modernes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures trente.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est reprise.

La parole est à M. Michel Bouvard.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, comme l'a rappelé à juste titre M. le rapporteur général, ce premier débat d'orientation budgétaire implique de penser nos choix budgétaires à l'échelle de toute la législature. C'est dans cet esprit que je souhaite aborder ce débat.

Quels enjeux devons-nous prendre en compte pour les cinq années à venir ? Tout d'abord, celui de la connaissance et de la maîtrise de la dépense de l'État dans son ensemble, liée au budget. Comme nous l'avons indiqué ce matin, cela suppose d'intégrer dans la norme de progression de la dépense, les prélèvements sur recettes, mais aussi les dépenses fiscales, dont le coût, estimé par la Cour des comptes, est passé de 49,9 milliards d'euros à 62,6 milliards d'euros entre 2000 et 2006, le nombre de mesures en cause étant passé de 357 à 487 !

Cette norme de progression de la dépense doit également s'intéresser aux opérateurs publics, au sens de la LOLF.

L'intégration dès 2008, proposée par le Gouvernement, des prélèvements sur recettes – dont le montant, pour les seules collectivités locales, est passé de 34,8 milliards d'euros en 2002 à 48,2 en 2006 – répond à cette logique, et nous y souscrivons. Il est également souhaitable de s'intéresser au nombre croissant de recettes affectées à tel ou tel opérateur, dont le nombre s'est significativement accru, notamment avec la loi de finances initiale pour 2007, ce qui permet de contourner la norme de progression de la dépense.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Cette intégration globale nous permettra de disposer d'une vision totale de l'action publique.

Le périmètre étant établi pour l'État, il convient d'être plus actif dans l'appréciation de l'ensemble de la dépense publique. Nous nous sommes engagés dans cette voie en mettant en place la Conférence des finances publiques, permettant d'apprécier l'ensemble des dépenses et des prélèvements obligatoires liés au niveau de financement de la protection sociale et des collectivités territoriales.

Par ailleurs, il est nécessaire de clarifier les responsabilités réciproques des différents acteurs, pour aboutir à une meilleure traçabilité de la dépense et à une meilleure responsabilisation des acteurs. Les dépenses croisées et les transferts de charges – par exemple en ce qui concerne la prise en compte de la dépendance, qui constitue un des défis de l'avenir – entre l'État, les collectivités territoriales et les différents opérateurs de la protection sociale sont le symbole de notre besoin d'une approche globalisée de la dépense et d'une spécialisation des dépenses et des recettes.

S'agissant du budget de l'État lui-même, le groupe UMP souscrit aux mesures fiscales et à la stratégie économique du Gouvernement en vue d'augmenter le pouvoir d'achat des ménages et des salariés, tout en diminuant le coût du travail pour les entreprises. C'est ce que prévoit le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dont la discussion se poursuivra ce soir.

Toutefois, ces mesures ne sont pas exclusives d'un assainissement des finances publiques, qui ne sera possible que par la combinaison d'une croissance soutenue générant des recettes et d'une maîtrise de la dépense. Cette maîtrise passe en premier lieu par une gestion plus efficace des ressources de personnel et par une réduction des effectifs. Leur poids dans le budget de l'État, dans lequel ils représentent 45 % du volume de la dépense, impose d'enrayer la spirale de la hausse enclenchée depuis déjà trop longtemps. Rappelons-le : les dépenses de personnel de l'ensemble des administrations publiques ont atteint 235 milliards d'euros en 2006 et ont augmenté, entre 1996 et 2006, de 39 % en euros courants et de 19,5 % en euros constants. Globalement, leur proportion dans le PIB a augmenté deux fois plus vite en France qu'en Allemagne pendant la même période.

La première cause de cette progression réside, pour 70 %, dans la hausse des effectifs, qui se sont accrus de 15 % entre 1995 et 2005, pour un total de 605 000 équivalents temps plein. Quand on parle de diminuer de 10 000, 30 000 ou 40 000 le nombre des emplois publics, on doit garder à l'esprit que leur nombre a augmenté de 600 000 au cours des dix dernières années.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Seulement 30 % de l'augmentation du coût des dépenses de personnel sont liés à celle des salaires. Ce sont donc bien les effectifs qui sont les premiers en cause.

Si l'augmentation des effectifs a été importante au niveau des collectivités locales, où elle se monte à 30 %, elle a néanmoins été de 6 % dans la fonction publique d'État, hors opérateurs, et ce malgré les lois de décentralisation, qui, depuis plus de vingt-cinq ans, transfèrent régulièrement certaines compétences de l'État aux collectivités territoriales. C'est dire que les marges de manoeuvre offertes par des gains de productivité sont considérables.

Le passage à une gestion plus productive, qui devra s'accompagner d'une revalorisation des traitements au regard des performances, est incontournable, puisque 1,5 million d'agents de la fonction publique, dont 946 000 pour la seule fonction publique d'État, partiront à la retraite avant 2015. Cette situation est une chance, mais elle alourdit d'autant la charge au niveau du compte des pensions. La Cour des comptes l'a souligné : pour les seuls régimes de retraite des fonctionnaires civils et militaires de l'État, les besoins de financement s'élèvent, d'ici à 2050, à 251 milliards d'euros, avec un taux d'actualisation de 2,5 %. Il convient d'y ajouter 166 milliards d'euros pour les régimes spéciaux, dont les principaux bénéficient d'une subvention d'équilibre de l'État, ce qui rend incontournable la réforme des régimes spéciaux, trop longtemps différée.

À ce point de l'exposé, puisque nous parlons des réductions des effectifs, je m'attends à ce que nos collègues de l'opposition agitent le spectre de la détérioration du service public.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Mais la Cour des comptes a apporté la preuve dans différents domaines, notamment dans son rapport sur l'enseignement scolaire, rédigé à la demande de la commission des finances, que des dizaines de milliers de postes sont affectés à d'autres activités que celle pour laquelle ils ont été créés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Là se trouvent les gisements du redéploiement qui permettra de diminuer les effectifs sans détériorer la qualité du service public. Cette évolution des effectifs ne doit toutefois pas être aveugle. Elle prendra appui sur la révision générale des politiques publiques, lancée par le Premier ministre, et qui laisse espérer la simplification des structures, la suppression des cloisonnements et donc l'amélioration de l'efficacité de la dépense publique. Nous souhaitons que le Parlement soit associé à sa mise en oeuvre, au-delà des deux rapporteurs généraux de la commission des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, auxquels nous faisons par ailleurs toute confiance.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Nous souhaitons que les propositions soient formulées sur des objectifs quantifiés et vérifiables par la représentation nationale, et nous nous réjouissons de l'implication personnelle du chef de l'État et du Premier ministre, qui permettra, nous l'espérons, d'aller au-delà des résultats déjà obtenus par le passé. Je pense notamment aux stratégies ministérielles de réforme que vous aviez lancées, monsieur le ministre, selon une démarche audacieuse et positive, qui s'est interrompue trop tôt. J'ai déjà eu l'occasion de le regretter à cette tribune, il y a quelques années.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

J'en viens aux besoins d'investissements, dont la mise en oeuvre est directement conditionnée par la réduction des dépenses de fonctionnement. Certains investissements, notamment en matière militaire, sont sécurisés par une loi de programmation, mais d'autres, dans le domaine civil, sont soumis aux aléas des régulations et des équilibres budgétaires. Or il importe que les programmes d'investissements, qui soutiennent la croissance et l'attractivité du territoire, puissent eux aussi s'inscrire dans une démarche pluriannuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Les contrats de projet constituent une partie de la réponse, mais l'on sait que, par le passé, ils ont souvent été affectés par des retards liés aux régulations budgétaires. Dans certains secteurs, comme les transports, les expériences successives en matière d'identification et d'affectation de recettes ont eu un effet limité dans le temps. Ce fut le cas de la TIPP, du FITTVN et, plus récemment, des dividendes autoroutiers.

Je souhaite vivement que, dans le cadre du « Grenelle de l'environnement », l'émergence d'une fiscalité écologique, grâce à l'eurovignette ou à la taxe carbone, prenne en compte les besoins d'infrastructures de la France pour toute la durée de la législature, comme cela s'est passé dans des pays voisins comme la Suisse ou l'Autriche. D'autant que, pour transposer la directive Eurovignette, les États disposeront, comme à l'ordinaire, d'une marge d'interprétation.

Nous avons intérêt à mener dans ce domaine une politique active. La recherche des partenariats, notamment entre le public et le privé, doit être effectuée de manière plus volontariste qu'aujourd'hui,...

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

..notamment afin de répartir la charge des dépenses d'investissement entre les acteurs et dans le temps.

Je terminerai par quelques mots sur les collectivités locales. La multiplication des niveaux, des compétences et la montée en puissance de l'intercommunalité ont généré une complexité croissante pour le citoyen, ainsi qu'une confusion des compétences et une multiplication des financements croisés. Après les étapes successives de la décentralisation, il importe de délimiter et de définir clairement les compétences des uns et des autres. N'est-ce pas aussi un des objectifs que nous pouvons nous fixer en début de législature, à l'occasion de ce débat d'orientation budgétaire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Bien évidemment, nous assurons le Gouvernement de notre soutien dans son action de réforme et de modernisation de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

L'objet de mon intervention, dans le cadre de ce débat d'orientation budgétaire, sera d'appeler l'attention de mes collègues élus locaux sur la situation dans laquelle vont se trouver les collectivités locales du fait des choix financiers effectués par le Gouvernement.

Avec votre permission, je voudrais, en tant que président, avec Adrien Zeller, de l'Institut de la décentralisation, et sans me départir d'une vision équilibrée, tirer un signal d'alarme. Je pense en effet que la situation est sérieuse et qu'il faut enfin parler franchement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Afin d'éviter toute mésinterprétation, je rappellerai la part occupée par les finances locales dans les finances publiques, pour souligner que l'absence d'une vraie politique financière conduit à faire du budget des collectivités locales la variable d'ajustement du budget de l'État pendant les cinq années à venir.

Ma démarche s'appuie sur le constat, opéré dès décembre 2005 par le rapport Pébereau sur l'avenir des finances publiques, que la dette nous rend vulnérable à toute hausse du taux d'intérêt. Or ce scénario est en train de se réaliser, nos collègues de la majorité l'ont rappelé eux-mêmes. Par ailleurs, la dette préempte l'avenir en faisant peser une charge supplémentaire sur les générations suivantes, qui auront déjà du mal à financer le vieillissement de la population.

Face à ce constat, l'engagement pris par le gouvernement précédent de réduire la dette de 66 à 60 % du PIB à l'horizon de 2010 – date à laquelle, pour avoir multiplié les cadeaux fiscaux, il substitue à présent celle de 2012 – implique non seulement qu'on stimule la croissance, mais aussi qu'on demande à l'ensemble des acteurs de la dépense publique – État, administrations sociales et collectivités locales – de maîtriser leurs finances.

Je ne citerai que quelques chiffres relatifs aux APU, les administrations publiques locales. Les 195 milliards d'euros qu'elles ont dépensés en 2006 représentent un peu plus de la moitié des dépenses générales de l'État. Leur capital fixe se situe entre 11 % et 12 % de celui de la nation et leurs prélèvements obligatoires oscillent entre 5 et 6 % du PIB.

Quant au déficit des administrations publiques, l'état des lieux est simple : le déséquilibre entre les dépenses et les recettes, permanent depuis vingt-cinq ans, tient quasi exclusivement à celui des comptes de l'État, alors que la situation des collectivités locales s'est continûment améliorée jusqu'en 1998 et que leur déficit se limite aujourd'hui à 0,1 % du PIB.

C'est pourquoi – dois-je le rappeler ? – le rapport Pébereau préconisait d'entreprendre une action volontariste de retour à l'équilibre des comptes pour l'État et les organismes de sécurité sociale, mais sans en faire peser la charge sur les prélèvements obligatoires locaux et les collectivités locales.

Dans ce climat, qu'il faut bien qualifier de malsain, le Gouvernement s'engage pour une régulation classique par la ressource. Il peut agir en jouant soit sur ses propres dotations, soit sur les impôts locaux.

La régulation des ressources par l'impôt est traditionnelle, mais elle a pris une forme nouvelle avec la loi de finances pour 2006. Cette régulation figure dans la Constitution puisque, selon elle, c'est le législateur qui « fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ». Historiquement, la régulation prend la forme d'un encadrement du régime des impôts locaux, mais ses instruments – plafonds de taux, règles de lien entre les différentes taxes, entre autres – ont été renouvelés avec la réforme de la taxe professionnelle en 2006.

Premier élément qui va peser lourd pour nos collectivités : la création d'un ticket modérateur dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle. Il met à la charge des collectivités locales une fraction du coût du plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée et limite donc le coût du dégrèvement supporté par l'État. « Nous payons pour les autres » : certes l'ancien procès est toujours d'actualité, mais l'accusation doit être modérée depuis la réforme de la TP. Toutefois, l'addition sera salée pour les collectivités et leurs établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI.

Deuxième élément, la création du bouclier fiscal s'accompagne d'une diminution de la ressource allouée aux collectivités locales. Ainsi, pour la première fois en 2007, les régions encaisseront du fait d'une réforme législative, un produit fiscal inférieur à l'année passée – 4,276 milliards d'euros en 2007 contre 4,308 milliards d'euros en 2006 –, comme le montre le rapport de 2007 de l'Observatoire des finances locales !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Cette diminution résulte, c'est vrai, du comportement fiscal des collectivités locales, mais elle se traduit par une diminution non du produit fiscal qui leur est alloué, mais de la dotation globale de fonctionnement. Porter le bouclier fiscal de 60 % à 50 % va d'ailleurs poser problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

On en reparlera, monsieur Carrez.

Ensuite, la régulation s'applique classiquement aux dotations de l'État. Elle a d'abord pris la forme d'une modification de l'indexation des principales dotations de l'État. En 1990, la DGF évolue comme le seul indice prévisionnel des prix ; en 1994, son taux de croissance est fixé à 2 % ; en 1995, il est égal à l'inflation. Cette régulation prend, depuis la loi de finances pour 1996, la forme d'un contrat concernant la plupart des dotations actives allouées aux collectivités locales. Une enveloppe normée est indexée selon des règles qui ont varié. Ce fut d'abord une indexation sur l'inflation dans le cadre du pacte de stabilité mis en place pour les années 1996 à 1998, puis sur l'inflation augmentée d'une fraction du taux de croissance du PIB en volume – 20 % en 1999, 25 % en 2000 et 33 % depuis 2001. C'est ce contrat qui est dénoncé aujourd'hui par votre Gouvernement et qui rapportera en économie budgétaire à l'État un peu plus de 300 millions d'euros auxquels s'ajoute le montant de la régulation négative de 80 millions révélée au dernier comité des finances locales, il y a quelques jours.

Outre l'atteinte au caractère symbolique de la DGF, il faut, dans ces conditions se poser quelques questions. Avec des indices en baisse ou des ponctions financières par le jeu des désindexations, comment finance-t-on la solidarité urbaine en 2008 ? La dotation de solidarité urbaine, la DSU, a atteint environ 1 milliard d'euros en 2007 et devait être abondée jusqu'en 2009 de 120 millions d'euros sous l'effet de la loi Borloo. Mais ce coup de rabot sur la DGF provoque mécaniquement une réduction de ces 120 millions d'euros, qui se transforment en 60 ou 80 millions d'euros !

Est-il cohérent de lancer un « plan Marshall » des banlieues en commençant à raboter les dotations de péréquation qui profitent justement aux banlieues ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Ne doit-on pas prévoir des abondements budgétaires spécifiques précisément pour soutenir la péréquation ?

En 2009, il faudra intégrer les chiffres du recensement sur la période 1999-2006 – avec une hausse de la population française –, ce qui ne sera pas simple avec une nette décroissance de la DGF, à moins d'en bouleverser l'architecture. Est-ce souhaitable après la réforme de 2004-2005 qui avait abouti à un point d'équilibre ? Où sont la visibilité et la prévisibilité promises par l'équipe précédente et Jean-François Copé lui-même lors de la conférence nationale des finances publiques.

Il me faut aborder une autre question, car réduire les flux financiers vers les collectivités locales, c'est prendre un risque avec la croissance économique de notre pays. Depuis 2003, les dépenses d'investissement des collectivités locales ont connu une progression annuelle de 8 % comme l'a montré un article récent de la Revue du Trésor, pour un total de 40 milliards d'euros en 2006 contre 30 milliards en 2002. À titre de comparaison, l'investissement des entreprises françaises sur la même période est passé de 159 à 187 milliards d'euros soit une croissance annuelle de 4 %. L'investissement local joue donc un rôle de premier plan : sa part est estimée à un point de croissance économique cumulée de 2002-2006 et génère la création de plus de 200 000 emplois dans le secteur privé – car l'investissement joue évidemment un rôle d'entraînement sur le secteur du BTP.

Il faut, par ailleurs souligner que cette progression de l'investissement public local de 10 milliards d'euros entre de 2002 à 2006 a été financée à parts égales par une hausse de 5 milliards d'euros de l'épargne – équivalent à 0,3 point de prélèvements obligatoires – et par un surcroît d'emprunt de 5 milliards d'euros, tout cela sans altérer la situation financière des collectivités locales.

Alors que cherche-t-on ?

Les communes investissent prioritairement dans l'aménagement urbain et le logement ; les départements dans la voirie et les collèges et les régions dans les lycées et les transports collectifs. Veut-on réduire cela ? Veut-on affaiblir les collectivités alors que la progression de l'investissement est aujourd'hui tirée par l'augmentation des prix ? En 2006, sur une progression du volume d'investissement du secteur public local de 7,1 %, 5,6 % sont imputables à la hausse des prix – tensions sur les salaires, hausse des prix des matières premières, de l'énergie –, la dynamique réelle de l'investissement est ramenée à une croissance de 3,6 %.

À moyen terme, les besoins en matière d'infrastructures routières, de protection environnementale, d'aménagements urbains, de logements, de transports et, plus généralement, les besoins induits par la décentralisation doivent rester soutenus. L'INSEE estime à 577 milliards d'euros le stock actuel de capital fixe des administrations publiques locales – ouvrages d'infrastructure, logements, matériels de transport et d'équipement, logiciels – et à 27 milliards d'euros son usure annuelle. Afin de reconstituer et de développer le stock de capital fixe, les administrations publiques locales ont investi 38,5 milliards d'euros en 2005. L'effort d'investissement observé ces dernières années a mis fin à une érosion relative du stock de capital. Sa valeur rapportée au PIB est passée de 31 % en 2000 à 34 % en 2005, mais elle reste inférieure aux 37 points de PIB de 1980, ce qui indique que, malgré les efforts, il y a une érosion de la valeur du capital collectif. Voilà pour le constat.

J'avoue ne pas comprendre la stratégie suivie par le Gouvernement en matière de collectivités locales, et je ne suis pas le seul dans ce cas au sein de cet organisme « transpolitique » qu'est l'Institut de la décentralisation. C'est illisible, à moins de considérer que ces collectivités sont érigées en variables d'ajustement du budget de l'État et qu'il faudrait, contre toute logique économique, les priver de recettes fiscales.

Les transferts de compétences prévus par la loi d'août 2004 ne sont pas encore totalement calés, à l'image de celui des formations sanitaires vers les régions ou de celui des personnels – le transfert des gestionnaires de RMI aux départements attend depuis 2005 et les contentieux se multiplient avec les communes, par exemple pour les passeports.

La volonté « d'associer », c'est une litote, les collectivités locales à des dépenses collectives n'a jamais été aussi grande : « Grenelle de l'environnement », universités autonomes mais financièrement dépendantes, contrats d'itinéraires sur des routes nationales. Tous les jours des procédures se mettent en place pour faire « participer » les collectivités territoriales, mais sans jamais aucune orientation précise, ni même une reconnaissance officielle par un ministre délégué aux collectivités locales. En revanche, on entend bien un discours passablement passéiste, compte tenu de la place des collectivités, prompt à stigmatiser la dépense locale.

Quand mènerez-vous une politique de l'intercommunalité pour rationaliser les EPCI et en couvrir le pays ? À moyen terme, avec un peu de coercition et de volonté politique, c'est un moyen structurel de peser sur la dépense locale, y compris en Île-de-France, sans agiter l'impossible gadget complètement dépassé d'une communauté urbaine.

Vous ne manifestez aucune envie de poser des questions de fond sur le rôle moteur des agglomérations, le rôle économique des régions, le rôle social des départements, ni aucun souci de respecter les autres personnes publiques, ce qui est tout de même un peu fort dans un État de droit, constitutionnellement décentralisé. L'objectif de redressement des comptes publics est partagé par tous les responsables politiques, mais il exige un changement dans la méthode et implique qu'une concertation soit engagée avec l'ensemble des acteurs de la dépense publique.

Voilà, monsieur le ministre, ce que je voulais vous dire. Mon ton est passionné parce qu'avec un certain nombre de collègues, je tente de défendre nos collectivités. Nous ne représentons ni les départements, ni les régions, ni les communes, ni aucune collectivité contre une autre. Mais, il y a aujourd'hui de vraies interrogations dans les collectivités locales parce qu'une tentation semble se faire jour – et je voudrais conclure en évoquant ce dernier point.

Mme Thatcher a conjugué ultralibéralisme et attaque contre les collectivités locales – ceux qui ont un peu de culture politique s'en souviennent. Tel était la règle en Grande-Bretagne où il a fallu attendre M. Blair pour que les collectivités locales retrouvent un statut. Je ne suis pas certain qu'il n'y ait pas aujourd'hui chez nous une tentative similaire pour conjuguer ultralibéralisme et centralisation économique et politique. Si c'est bien le pari en cours – et je pense qu'il y a un net infléchissement politique de la droite –, alors il faut en discuter dans le pays parce tous nos concitoyens ne sont pas au courant.

J'aimerais bien qu'un certain nombre de questions, y compris financières, que j'ai essayé de poser sur le plan technique à l'occasion de ce débat d'orientation reçoivent des réponses. En effet, comme cela a été dit par le rapporteur général et par notre président de commission, les enjeux de ce débat vont peser non seulement sur l'année 2008 mais jusqu'en 2012. Si vous ne voulez pas passer en force, nous avons besoin d'avoir une visibilité et une prévision sur les ressources des collectivités pour plusieurs années. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. François de Rugy.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d'abord, au nom des députés Verts et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, je voudrais faire une remarque de forme.

Déjà, lors de l'examen du projet de loi « Travail, emploi et pouvoir d'achat », nous avons déploré avec plusieurs collègues de l'opposition de gauche l'absence de réponses à nos questions de la part de la ministre de l'économie. J'avais pensé, un peu naïvement sans doute, que vous seriez plus clair, monsieur le ministre, mais j'ai malheureusement dû constater ce matin…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…lors du débat sur le projet de loi de règlement, que vous n'aviez répondu à aucune de mes questions. Vous avez certes prétendu qu'elles étaient hors sujet, mais j'espère que, cette fois, j'aurai des réponses. Je voudrais dire ici que pour la qualité et la clarté de nos débats, cette attitude ne nous paraît pas convenable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Ce qui n'est pas convenable c'est de défendre, comme vous l'avez fait ce matin, une motion de procédure sur le projet de loi de règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Ce n'est plus une question de droite ou de gauche, de majorité ou d'opposition, mais de respect, non pas à notre égard – les députés de l'opposition n'ont pas d'orgueil mal placé –, mais vis-à-vis des Français qui nous ont élus et dont nous nous faisons les porte-parole au même titre que n'importe quel autre député de la nation.

Les Français ont le droit d'obtenir des réponses claires et précises aux questions qu'ils se posent, notamment concernant les matières budgétaires et fiscales qui ont et auront un impact direct sur leur vie quotidienne.

Peut-être est-ce le syndrome Borloo, le syndrome de la TVA sociale qui vous aurait frappé à votre tour ? Il vaudrait mieux ne rien dire, tellement l'expression claire et nette de vos intentions vous rend très vite minoritaires ou impopulaires ? Peut-être avez-vous reçu des consignes de l'Élysée, ou une lettre de mission comme celle que nous évoquions avec votre collègue du ministère de l'économie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Un ministre qui ne recevrait pas de lettre de mission ce serait inquiétant !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Deniaud

Ce serait gênant, on ne saurait pas ce que fait le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

En tout cas, je sais que vous avez été vous-même rappelé à l'ordre, monsieur le ministre, lorsque vous avez osé modérer les ardeurs dépensières du Président en essayant d'introduire un peu de logique et de bon sens économique et budgétaire dans les promesses inconsidérées du candidat Sarkozy.

Et vous, mon cher collègue Bouvard, vous ne devriez pas réagir comme vous le faites, parce que je crois qu'au fond vous partagez plus mon analyse que vous ne soutenez les mesures, que je n'hésite pas à qualifier d'un peu délirantes, du projet de loi « Travail, emploi et pouvoir d'achat » que vous n'avez jamais pu justifier qu'en invoquant la réalisation des promesses du candidat Sarkozy. Jamais aucun autre argument ne nous a été opposé, jamais vous n'en avez démontré ni l'utilité économique ni la qualité de justice sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Effectivement, si on ne fait aucun effort pour comprendre !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je voudrais simplement citer quelques extraits du rapport de M. Carrez : « …l'assainissement de nos finances publiques ne peut ni ne doit être mis entre parenthèses […] Les deux premières réunions de la Conférence des finances publiques […] ont débouché sur le diagnostic partagé de la nécessité du désendettement. Le premier rapport du Conseil d'orientation des finances publiques […] a insisté sur le choc démographique à venir et sur l'impact du vieillissement sur les dépenses publiques. La maîtrise de nos comptes publics est donc un impératif moral autant que financier. »

J'ignore si c'est un impératif moral, mais c'est sans aucun doute une question d'efficacité économique et de justice sociale. Au reste, le rapporteur général lui-même le reconnaît lorsqu'il décrit ce que l'on pourrait appeler le cercle vicieux de l'aggravation de la dette, en tout cas dans une situation économique telle que la nôtre – car, pour notre part, nous n'avons pas une approche idéologique ou politicienne de ce problème. M. Carrez évoque en effet « la dégradation initiale du déficit, mais aussi l'augmentation des charges d'intérêts directement engendrée par l'augmentation de la dette, ainsi que l'augmentation des charges d'intérêts découlant de la hausse des taux indirectement provoquée par l'augmentation de la dette ». Tout est dit sur les conséquences des mesures du projet « Travail, emploi et pouvoir d'achat » que vous avez votées !

Que lit-on encore dans le rapport de M. Carrez ? « Les surplus durables s'élèvent chaque année à environ 1012 milliards d'euros. C'est la marge de manoeuvre dont doit se contenter le législateur budgétaire respectueux des générations futures. » En tant qu'écologiste, j'ai été particulièrement sensible à ce dernier argument. Or que faites-vous ? Non seulement vous n'affectez pas cette marge de manoeuvre au désendettement, mais vous faites voter des baisses d'impôt, de surcroît réservées aux plus riches, d'un montant de 13 milliards d'euros pour la première année pleine – ensuite, on ne sait pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Ce ne sont pas 13 milliards de baisses d'impôts !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est d'ailleurs la situation que dénonce le rapporteur général lorsqu'il estime que “le choc fiscal” ampute nos marges de manoeuvre en 2008 ». J'ajouterai, pour ma part, qu'il provoquera un « effet boule de neige » car, ainsi que l'a montré le président de la commission des finances, il est à craindre que, avec la hausse des prix de l'immobilier ou l'augmentation du nombre de personnes détenant un gros patrimoine, les cadeaux fiscaux ne nous coûtent de plus en plus cher au fil des années.

C'est sans doute la raison pour laquelle le rapporteur général n'hésite pas à écrire : « Les montants distribués en 2008 épuisent les marges de manoeuvre “durables” disponibles. À ce titre, les arbitrages rendus » – on imagine par qui ils l'ont été – « contraignent les choix budgétaires de l'ensemble de la législature ». Si je traduis cette phrase en français de tous les jours – car nos concitoyens ont le droit de savoir –, cela signifie à peu de choses près que, à cause des cadeaux fiscaux que vous venez d'accorder en moins d'une semaine, nous sommes pieds et poings liés jusqu'en 2012 ! Sans compter, comme le fait remarquer le rapporteur général, que « si la croissance faiblissait… » – et c'est un risque qui n'est pas à exclure,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…compte tenu de l'instabilité économique mondiale – « …l'ajustement budgétaire nécessaire au reflux de la dette publique à l'horizon 2012 serait probablement hors de portée. »

Nous partageons d'autant moins ces choix politiques que M. Carrez, contraint à des acrobaties rhétoriques et politiques,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…parvient tout de même à retomber sur ses pieds et commence de lever le voile sur les conséquences de cette politique, sur laquelle il est de notre devoir d'éclairer les Français. Il conclut en effet : « Pour toutes ces raisons, les allégements fiscaux et sociaux consentis en ce début de législature doivent être adossés à une politique résolue de baisse des dépenses. » On ne s'interroge même plus sur l'utilité des dépenses : leur baisse devient un objectif en soi. On nage en pleine idéologie !

La première solution évoquée par le rapporteur général consiste à « élargir le périmètre de la norme de dépense ». Il faut beaucoup de talent dans le maniement de ce que mon collègue Brard appelait la novlangue technocratique pour dissimuler ainsi aux Français, derrière une sorte de rideau de fumée, la volonté de piocher dans le budget des collectivités locales, ainsi que M. Balligand vient de le démontrer brillamment.

Sans me faire le porte-parole de tous les élus locaux,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

… je voudrais prendre la défense de l'autonomie de gestion des collectivités locales.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je ne vois pas au nom de quels principes démocratiques vous pourriez imposer ainsi une politique aux collectivités locales, dont les gestionnaires sont élus au suffrage universel.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Au reste, quelles sont les dépenses locales que vous voudriez réduire ou supprimer ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Celles qui sont consacrées à l'édification des palais régionaux et à la communication des régions !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Dans les Pays de la Loire, monsieur Bouvard, le « palais de la région », comme on l'appelait en effet, n'a pas été construit par une majorité de gauche. En revanche, je peux vous parler de la construction et de la rénovation des écoles et je puis vous dire que les Nantais ne jugent pas les dépenses excessives ou somptuaires quand il s'agit d'investir dans les écoles, les bibliothèques, les salles culturelles ou les équipements associatifs et sportifs. Ils estiment au contraire que nous n'allons pas assez vite.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je sais que vous êtes gênés lorsque l'on vous cite des exemples concrets, mais je veux des réponses précises à mes questions. Voulez-vous que l'on s'attaque aux investissements dans les transports en commun ou dans le logement social,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

… deux secteurs dans lesquels les collectivités ont pourtant dû se substituer à l'État pour pallier son désengagement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

On n'a jamais autant construit que ces dernières années !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Voulez-vous que, au moment où tout le monde parle de développement durable, les régions – et je précise que je ne suis pas un élu régional – arrêtent d'investir dans les trains express régionaux ? Sur l'ensemble du territoire, des élus locaux, toutes tendances politiques confondues, demandent, sur l'insistance des habitants, davantage de dessertes, car les trains sont de plus en plus fréquentés, voire saturés.

À ce propos, je vais vous poser une question concrète à laquelle j'aimerais obtenir une réponse précise, monsieur le ministre. À Nantes, nous avons le projet de rouvrir une ligne de chemin de fer vers le nord du département, où la population augmente. Pour ce projet, élaboré avec la région, le département et la communauté urbaine de Nantes Métropole, nous espérons un financement de l'État à hauteur de 30 %. Pouvez-vous nous indiquer si l'État tiendra ses engagements inscrits dans les contrats de projet État-régions ou si nous devons nous attendre à de nouveaux désengagements ?

J'en viens à la deuxième solution, quasiment présentée comme une recette miracle, pour financer vos cadeaux fiscaux aux plus aisés. Je veux parler du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Une remarque sur la forme, tout d'abord. Dans son rapport, M. Carrez indique que l'économie réalisée par cette mesure est évaluée à 1 milliard d'euros par an, soit à peine 10 milliards en dix ans, alors qu'il s'agit tout de même, je le rappelle, de supprimer 350 000 postes ! Il faut comparer ces 10 milliards aux 150 milliards au bas mot que vont vous coûter, au cours de la même période, les cadeaux fiscaux octroyés par le projet « Travail, emploi et pouvoir d'achat ». En outre, le rapporteur général explique combien une telle politique est difficile à mener si on l'applique de façon autoritaire.

Sur le fond, vous ne pouvez pas continuer à esquiver nos questions, comme ce fut le cas lors d'un certain débat télévisé. J'espère en tout cas que vous ne nous ressortirez pas l'argument selon lequel c'est en réduisant le nombre des douaniers que l'on réglera le problème budgétaire. Ce n'est pas sérieux.

La semaine dernière, Mme Lagarde nous a conseillé de nous rendre à la gare du Nord, fréquentée par les pauvres exilés fiscaux qui viennent passer le week-end en France. En tout cas, ce matin, lorsque j'ai pris le train à la gare de Nantes, les voyageurs que j'ai rencontrés ne m'ont pas parlé du bouclier fiscal, mais de la prochaine rentrée scolaire, de l'accueil dans les crèches, de l'accueil dans les écoles, ou bien des cantines. En tant qu'élus locaux, vous savez très bien que les dépenses réalisées dans ces domaines ne sont pas pharaoniques et excessives, mais qu'elles répondent à la demande des habitants.

Le problème se pose dans les mêmes termes s'agissant des fonctionnaires de l'État. Dans quels services allez-vous supprimer ces postes : dans les écoles, la police, les prisons, les tribunaux ? Lors d'un récent débat, M. Wauquiez, porte-parole du Gouvernement, a osé suggérer de supprimer des postes au ministère de l'environnement, alors même qu'il s'agit de la plus petite administration de l'État et que vous nous avez vendu la création d'un grand ministère de l'écologie et du développement durable !

Vous me répondrez sans doute que la gauche critique la majorité, mais qu'elle n'a rien à proposer. Nous jouons notre rôle d'opposant, c'est vrai, mais nous avons aussi des propositions.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Nous proposons une autre politique économique, budgétaire et fiscale, qui préserve la solidarité et les services publics,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

… auxquels nous sommes attachés et que nous n'avons pas honte de défendre. Nous voulons que l'État garde ses capacités financières pour pouvoir préparer l'avenir en investissant dans les transports ferroviaires, par exemple – et je suis sûr que M. Bouvard sera sensible à cet argument.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Nous souhaitons privilégier le redéploiement du personnel de l'État plutôt que les suppressions de postes. En matière de réforme fiscale, nous préférerions organiser un « Grenelle fiscal » rassemblant tous les acteurs pour débattre de la justice fiscale et de la réforme de la fiscalité locale, plutôt que de piocher dans le budget des collectivités locales. Ce serait également l'occasion d'évoquer la question de la fiscalité écologique. À ce propos, j'ai été surpris, pour ne pas dire choqué, de ne pas entendre un seul mot sur ce thème. La semaine dernière, les amendements que j'ai déposés en ce sens, qui étaient pourtant très modestes et réduisaient les dépenses, ont tous été refusés par Mme Lagarde.

Je souhaite que nous ayons un vrai débat sur les choix que traduit la politique budgétaire, car celle-ci ne doit pas être la simple illustration d'une idéologie dont la baisse des dépenses serait le seul objectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Yves Deniaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Deniaud

Monsieur le Président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce premier débat financier de la nouvelle législature incite tout naturellement, pour évaluer notre situation, à se remémorer ce qu'il en était en 2002. Nous héritions alors d'un déficit sous-estimé de 16 milliards d'euros, de 14 milliards de reports, de trois primes de Noël à payer la même année – ce qui avait fait dire à Alain Lambert qu'il était plus le Père Noël que le ministre du budget –, d'une APA non financée et d'une AME estimée au vingtième de son coût réel.

Une majorité sortante espère toujours se succéder à elle-même, mais la sagesse des électeurs a évité à la gauche plurielle de l'époque de s'offrir à elle-même le très vilain cadeau dont nous avons été gratifiés.

En 2007, nous avons voulu nous donner les meilleures chances de réussite pour les cinq ans à venir, et les électeurs ont bien voulu être de cet avis. Même si, bien sûr, tout est loin d'être parfait, nous pouvons légitimement considérer que notre base de départ est plus solide et plus confortable que celle d'il y a cinq ans.

Nous avons bien noté, monsieur le ministre, que, comme ce fut le cas pour tous les budgets depuis 2003, la loi de finances de 2007 sera exécutée conformément au vote du Parlement pour les dépenses. Nous souhaitons tous que ce soit également le cas pour les recettes, donc pour la réduction du déficit.

La loi de règlement nous a également permis de vérifier que le déficit a, en 2006, été réduit pour la troisième année consécutive, repassant sous les 3 % du PIB pour la première fois depuis 2001 – ce qui montre au passage qu'il aura fallu cinq ans pour se remettre de l'effondrement budgétaire de 2002 et de son budget comportant un mensonge de 16 milliards d'euros. Nous venons d'atteindre l'équilibre primaire calculé hors intérêts de la dette, ce qui constitue le premier seuil marquant du redressement.

Pour 2008, en dépit de l'effort considérable en faveur de la croissance que nous allons engager grâce à la loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat, vous nous proposez, monsieur le ministre, de poursuivre sur la même voie de l'assainissement en profondeur de notre situation financière, conformément aux engagements pris devant le pays comme devant nos partenaires européens.

Ces engagements, nous les avons tous pris avec le Président de la République et – que cela soit bien clair pour l'opposition – nous n'envisageons pas un instant que ces engagements ne soient pas scrupuleusement tenus.

Nous devons même faire encore mieux car, en dépit des efforts méritoires accomplis et des résultats positifs obtenus, nous restons, par exemple, à un déficit égal à 2,5 % du PIB, contre 1,7 % en moyenne pour l'Union Européenne à vingt-sept et 1,4 % pour la seule zone euro. Il n'y a aucune raison pour que nous ne rattrapions pas cette moyenne à la vitesse où l'Allemagne, pour ne citer qu'elle, a progressé.

Si la législature précédente a marqué une nette orientation vers l'assainissement, elle ne nous a toutefois pas permis de nous placer parmi les meilleurs en Europe, alors que la plupart des États adoptent, à des degrés et des rythmes divers, une ligne de conduite globalement homogène de réduction des déficits, de maîtrise des dépenses et de réforme des politiques publiques, qui a porté ses fruits en matière de croissance et d'emploi. Les résultats moyens au sein des États européens sont meilleurs que les nôtres, qu'il s'agisse des comptes publics, de la croissance ou du taux de chômage, et les performances de quelques-uns sont mêmes spectaculaires – je pense notamment à la Grande-Bretagne ou à l'Irlande. Notre ambition doit être de rejoindre ce peloton de tête qui allie des excédents budgétaires à un chômage ne dépassant pas 5 %.

Nous nous réjouissons, comme je l'ai dit, d'avoir atteint l'équilibre primaire, mais il est bien évident que chaque exercice budgétaire doit désormais voir les recettes couvrir une part grandissante des intérêts de la dette, au rythme de 15 milliards d'euros par an si nous voulons arriver à l'équilibre complet dès 2010, ou au rythme de 9 à 10 milliards d'euros par an si nous devions nous contenter de l'atteindre en 2012. Cette exigence est d'autant plus vitale à satisfaire que les taux d'intérêt exceptionnellement bas des années récentes sont derrière nous et que la remontée des taux de la Banque centrale européenne joue contre nous.

Bien sûr, nous jugeons tous défavorablement l'attitude obsessionnelle de certain Don Quichotte de Francfort qui se bat contre le moulin à vent d'une inflation qu'on ne voit guère poindre à l'horizon. Bien sûr nous n'avons pas oublié que la même recette du même auteur – dite, à l'époque, « politique du franc fort » – avait, il y a quinze ans, complètement démoli la croissance française avec des taux à 10 % pour une inflation à 2 %

Malheureusement, même s'il faut continuer à plaider pour une politique monétaire plus souple et soucieuse de croissance, force est de constater que la gouvernance économique de l'Europe ne permettra pas de progrès significatifs dans le temps qui nous est imparti. Il y a donc une grande urgence à dégager sur nos recettes pérennes la couverture complète des intérêts afin de permettre le dégonflement du stock de dette.

Sur cette période de trois ans si possible, de cinq ans au pire, nous devrons continuer à procéder à des cessions d'actifs. Il est évident que le stock des participations de l'État n'est pas inépuisable, mais la période limitée que nous nous donnons pour revenir enfin à l'équilibre est forcément la plus indiquée pour procéder à ces cessions qui permettront de contenir la dette en complément de la baisse des déficits – d'autant plus que le niveau élevé de la bourse et l'attente des marchés vis-à-vis de certaines valeurs sont tout à fait propices à l'obtention de recettes fructueuses.

S'y ajouteront, bien sûr, les cessions de biens immobiliers de l'État. La restructuration des services qui en sont chargés nous laisse espérer des résultats encore améliorés que nous suivrons avec un intérêt d'autant plus soutenu que nos travaux parlementaires ont été à l'origine de cette réforme.

Bien entendu, l'essentiel des résultats positifs que nous pouvons attendre, la clé de la maîtrise des dépenses et du retour à l'équilibre, tient dans la réforme de l'État. Celle-ci a été engagée par l'intermédiaire des stratégies ministérielles de réforme et des audits de modernisation, qui ont porté sur 100 milliards d'euros de dépenses.

Pour être à la hauteur des enjeux et tenir le délai imparti – un délai, je le répète, qu'il serait hautement souhaitable de maintenir à trois ans, et qui, s'il devait être plus long, ne saurait excéder cinq ans –, il est toutefois nécessaire d'accélérer vivement et d'aller beaucoup plus profondément.

Je me réjouis, monsieur le ministre, que vous ayez lancé la semaine dernière avec M. le Premier ministre la révision générale des politiques publiques, qui, nous le croyons fermement, répond à l'exigence que je viens d'exprimer. En effet, elle impose dans un délai très contraint – mai 2008 – un changement en profondeur des organisations et des méthodes.

Il est prévu – et c'est à noter – que les fonctionnaires soient associés le plus largement possible à ces réformes. Nous devons les convaincre que le changement qui bousculera nécessairement leurs habitudes sera positif, que la simplification des procédures facilitera leur travail, et que la diminution de leur nombre par le non-remplacement d'un départ sur deux ne s'appliquera pas de façon purement mathématique, à la manière d'un couperet. Les fonctionnaires concernés doivent trouver dans cette réforme, et dans la réduction de leurs effectifs, une récompense en termes d'intérêt des tâches et d'amélioration de leur carrière et de leur rémunération. Tel est l'engagement du Gouvernement, qui doit en être félicité et encouragé.

Si cette révision générale des politiques publiques suscite notre adhésion enthousiaste, je me permets d'insister sur le nécessaire accompagnement de cette démarche interne à l'exécutif et à l'administration en particulier, par le travail du Parlement. L'entrée en vigueur de la LOLF et le développement de nos pratiques de contrôle ont démontré combien le Parlement pouvait aider à l'instauration de bonnes pratiques. Ce rôle, nous avons tous l'ambition – le Président de la République en premier – de lui voir prendre de l'ampleur. Le Parlement devra donc prendre toute sa place dans le processus de réforme de l'État et dans sa traduction dans les finances publiques.

J'émettrai deux recommandations pratiques quant à l'application concrète de ces réformes. La première, c'est que les réorganisations, donc les diminutions de postes, concernent bien les services centraux des administrations ainsi que les directions régionales et départementales, en luttant contre la tendance naturelle observée jusqu'à présent à transférer aussi souvent que possible les suppressions de postes vers les services extérieurs, ceux qui sont au contact du public. Les grands services financiers privés ont, lorsqu'ils ont fait subir une cure d'amaigrissement à leurs sièges sociaux et à leurs services administratifs centraux ou décentralisés, veillé dans le même temps à recruter largement des personnels au contact du public. Si comparaison n'est pas raison, je crois tout de même que nous serions bien avisés de puiser quelque inspiration dans cet exemple.

La deuxième recommandation concerne l'investissement, éternel parent pauvre de nos politiques financières. Je souscris totalement aux propos tenus tout à l'heure par Michel Bouvard à ce sujet. La Cour des comptes relève que, lors des dix dernières années, la croissance des dépenses publiques en valeur a été de 43 % alors que celle de l'investissement ne dépassait pas 7,4 % – ce qui correspond à 15 % de baisse en volume en euros constants.

Nous sommes nombreux à considérer que ce n'est pas admissible. La France compétitive que nous voulons a besoin d'un État investisseur. L'État doit le redevenir comme il doit être un contractant fiable et non plus, par exemple, le mauvais partenaire des contrats de plan État-région dont on attend interminablement les participations promises, en particulier pour les infrastructures de transports. Celles-ci constituant l'un des atouts majeurs de la France, reconnu internationalement pour l'attractivité de notre pays, il ne faut pas laisser cet atout se dégrader, mais au contraire maintenir notre avance.

Ces recommandations faites, l'essentiel est que vos orientations budgétaires, monsieur le ministre, se situent dans la droite ligne des engagements pris devant les Français. Elles doivent nous amener à financer nos mesures ambitieuses de relance de l'emploi et du pouvoir d'achat, tout en étant implacables dans la réduction du déficit et de la dette. C'est pourquoi nous les adopterons avec confiance, la même confiance avec laquelle nous vous donnons rendez-vous pour la loi de finances pour 2008. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Bernard Derosier.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat d'orientation budgétaire doit également constituer pour nous l'occasion d'échanger sur un sujet très important : les relations entre l'État et les collectivités territoriales dans une république moderne.

Jean-Pierre Balligand a, il y a quelques instants, développé des arguments intéressants. Je voudrais, pour ma part, faire état des nombreuses préoccupations, voire des inquiétudes qui se font jour au fur et à mesure des annonces et des propositions faites par le Gouvernement en direction des collectivités territoriales.

Je note tout d'abord que, sur les 70 pages que compte le programme de l'UMP pour les présidentielles et les législatives,…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

…six lignes à peine sont consacrées aux collectivités territoriales. Après avoir entendu M. Bouvard se livrer à un véritable réquisitoire contre les collectivités territoriales, je ne suis pas loin de penser qu'il fait partie de ces députés de droite que les collectivités et les élus locaux indisposent, et qui voudraient voir disparaître toutes les têtes derrière celle du Président de la République. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Selon l'UMP, les collectivités territoriales auront « plus de liberté dans l'exercice de leurs compétences, mais aussi plus de responsabilité par l'affectation d'un seul impôt principal à chaque collectivité. » J'observe, monsieur le ministre, que vous êtes membre d'un gouvernement où il n'y a plus aucun ministre, ni même aucun secrétaire d'État, chargé des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

De ce fait, les élus locaux n'ont qu'un interlocuteur, le ministère du budget, qui appliquera une logique essentiellement comptable ne s'inscrivant pas dans la nécessité d'un dialogue apaisé entre l'État et les collectivités territoriales.

Vous-même, monsieur le ministre, déclariez d'ailleurs dans les Échos le 24 mai dernier qu'il faudrait « utiliser tous les moyens, notamment financiers, pour convaincre les collectivités territoriales de participer à la maîtrise des dépenses publiques. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Le décor est planté, nous savons désormais à quoi nous en tenir : la DGF pourrait être amenée à devenir un outil servant à « mettre au pas » les collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Ne sommes-nous pas, monsieur le président du comité des finances locales, en train d'assister à la reconstitution d'une tutelle de l'État sur les collectivités territoriales ?

Notons que la DGF de 2006 connaît une régularisation à la baisse de l'ordre de 84 millions d'euros qui devrait être imputée sur la DGF pour 2008. Une nouvelle régularisation à la baisse, estimée entre 200 et 300 millions d'euros, est attendue pour la DGF de 2007 et serait déduite de la DGF pour 2009.

Ces deux régularisations interviennent alors même que le Premier ministre indiquait très clairement, lors de sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale, le 3 juillet dernier, que « les dotations de l'État qui sont allouées aux collectivités territoriales ne pourront pas globalement croître au-delà de l'inflation en 2008 ». Cette orientation contestable est encore imprécise quant à ses modalités d'application et surtout inquiétante pour l'ensemble des collectivités territoriales.

Elle est imprécise dans la mesure où le Premier ministre a évoqué des dotations, sans préciser lesquelles : s'agit-il des dotations incluses dans le périmètre du contrat de croissance et de solidarité, ou de tous les concours alloués aux collectivités de manière directe ou indirecte ? Cette question a bien sûr son importance, car l'enjeu financier n'est pas le même selon que l'on se limite aux premières dotations ou que l'on considère l'ensemble de « l'effort financier en faveur des collectivités locales ».

Elle est également inquiétante, car elle annonce un manque à gagner pour les collectivités territoriales compris entre 330 et 400 millions d'euros sur les dotations pour 2008. Par de telles mesures, l'État romprait de manière unilatérale le pacte qui le liait depuis plusieurs années aux collectivités locales, alors même qu'il leur a transféré d'importantes charges partiellement compensées et dont l'évolution annuelle est très largement et automatiquement supérieure à l'inflation.

Nos collègues parlementaires présidents d'associations d'élus, M. Pélissard et M. Rousset, ou le président de l'Association des départements de France, Claudy Lebreton, ont ainsi souligné ces risques qui pèsent aujourd'hui sur les collectivités territoriales.

En fait, monsieur le ministre, vous voulez assécher les ressources des collectivités locales pour mettre ces dernières au pas puisque des élus, même de droite, n'acceptent pas les dispositions voulues par le Gouvernement.

Dans ces conditions, comment les collectivités vont-elles pouvoir poursuivre efficacement leurs politiques, d'autant que certains problèmes n'ont toujours pas été réglés, notamment depuis la mise en oeuvre de la loi de 2004 ? Ainsi, le transfert des routes nationales et des TOS, dans les collèges et les lycées, et le revenu minimum d'insertion restent une source majeure de préoccupation pour les départements.

À cela, il faut ajouter les dispositions qui découlent des lois votées au cours de la dernière législature. Je pense à la réforme de l'adoption, qui prévoit un suivi et un accompagnement renforcés avant, pendant et après l'adoption. Je pense aussi à la loi du 27 juin 2005 relative aux assistants maternels et aux assistants familiaux, qui a des conséquences financières directes pour les départements.

À côté de ces dossiers, qui grèvent les finances des collectivités, le Gouvernement annonce de nouvelles mesures qui seront autant de nouvelles contraintes. Je pense ainsi à la carte scolaire et à sa suppression progressive annoncée par le ministre de l'éducation nationale. Cette suppression, sous prétexte d'absence d'efficacité, risque d'entraîner une désorganisation totale de l'offre éducative, notamment pour les régions et les départements, et générera de lourdes charges financières pour les collectivités. Je pense aux conséquences de cette mesure en matière de transport scolaire, qui deviendra plus coûteux s'il faut faire face à de nouveaux types de déplacements des collégiens, voire des lycéens.

Dans le domaine social, plusieurs réformes décidées par la loi du 5 mars 2007 ne seront pas sans effet sur les institutions locales, tant en termes financiers que d'organisation et de ressources humaines. Par exemple, la réforme de la protection de l'enfance prévoit la création d'une cellule départementale de signalement. De même, la réforme de la protection juridique des majeurs, qui crée la mesure d'accompagnement social personnalisé en remplacement de la tutelle sociale devrait être, au moins en partie, assumée par les départements.

Et je n'oublie pas la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées qui ne permet pas de garantir le financement durable des dispositions qu'elle contient.

En fait, c'est du devenir de la solidarité nationale qu'il est question ici. Je sais bien qu'elle a été assimilée à de l'assistanat au cours des dernières campagnes électorales. Et qu'on l'a accusée d'être à l'origine de tous les maux que connaît notre pays. Il est donc à craindre que les mesures que compte mettre en oeuvre le Gouvernement creusent encore les injustices sociales. Nous sommes là dans une logique libérale pleinement à l'oeuvre. Celle-ci est tout à fait confirmée par le coup de frein aux contrats aidés annoncé par Mme Lagarde dans Les Echos du 10 juillet dernier.

En effet, prétextant la diminution du chômage, 1e Gouvernement veut réduire de près d'un tiers le nombre d'entrées en emplois aidés dans le secteur marchand, passant ainsi de 185 000 à 130 000 entre le premier semestre 2007 et le second. Le ministère de l'économie et des finances indique même que « le dynamisme de l'emploi salarié ne justifie pas de consacrer autant d'efforts qu'auparavant au traitement social du chômage ».

Ce n'est cependant pas la seule raison qui pousse le Gouvernement à donner un coup de frein aux contrats aidés. Il lui aurait en effet fallu trouver, par redéploiement ou en collectif budgétaire, 600 millions d'euros supplémentaires par rapport aux crédits accordés dans la loi de finances. C'est pourtant bien peu comparé aux 15 milliards d'euros du paquet fiscal ! L'objectif est, pour le Gouvernement, la réalisation d'économies sur le dos des collectivités territoriales.

Cette annonce constitue donc une attaque directe non seulement envers les publics les plus éloignés de l'emploi mais aussi contre les opérateurs associatifs qui vont connaître de grandes difficultés de fonctionnement.

Le Gouvernement ne semble pas accorder la moindre attention à la nécessaire réforme de la fiscalité locale. Si déjà l'État n'assume pas la responsabilité des conséquences des transferts, s'il charge à nouveau la barque et qu'en plus, il veut contrôler et limiter leurs ressources, les collectivités territoriales, et en particulier les départements, vont se retrouver prochainement dans une situation financière inextricable.

Face à cette situation que doivent-elles faire ? Doivent-elles remettre en question leurs politiques volontaristes pourtant si indispensable pour faire vivre une véritable démocratie de proximité et pourront-elles même assumer leurs politiques obligatoires ?

Nous devons prendre la mesure des risques qui pèsent sur la participation de l'État aux finances des collectivités territoriales. Il est à mes yeux plus que jamais nécessaire que celles-ci puissent travailler dans un climat de confiance avec l'État. Mais pour être dans un climat de confiance, il faut être deux à le vouloir.

Monsieur le ministre, vous avez fait allusion à votre expérience d'élu local : mettez-la à profit pour engager d'autres relations avec les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. François Bayrou.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bayrou

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en matière sociale, il y a un droit d'alerte. Eh bien, il y a, selon moi, un devoir d'alerte en matière politique.

M. Bouvard vient d'exprimer sa satisfaction de constater que les orientations budgétaires qui ont été arrêtées sont dans le droit fil des propositions annoncées par le candidat Nicolas Sarkozy pendant la campagne électorale. Il me semble au contraire que la disposition la plus importante n'avait nullement été abordée pendant la campagne présidentielle.

Dès que vous avez été nommé, vous avez annoncé une « pause » dans la lutte contre le déficit budgétaire. Vous avez ainsi fait savoir à nos partenaires européens que nous reportions à l'horizon 2012, et non plus 2010, le retour à l'équilibre des finances publiques en France.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bayrou

Or il n'en avait jamais été question. C'est même le contraire qui avait été dit pendant la campagne présidentielle. Les Français avaient en effet entendu que le déficit et la dette allaient désormais faire l'objet d'une vigilance générale. Les principaux candidats s'étaient tous prononcés en ce sens, souhaitant que l'effort ne soit pas relâché en la matière et qu'une politique de réduction du déficit enfin sérieuse soit menée. Nul n'ignore en effet que la dette financière constitue un risque très important pour la société française.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bayrou

C'est une épée de Damoclès au-dessus de la tête des Français. Nous sommes menacés de voir les prélèvements sur l'activité du pays exploser et, au bout du compte, mettre en cause la compétitivité de l'économie française et donc notre niveau de vie. C'est d'autant plus vrai qu'il y a maintenant une circonstance aggravante. Si pendant des années les taux d'intérêt ont été très bas, nous savons que nous allons inéluctablement entrer dans une période où ils vont être plus hauts, ce qui fait planer une menace bien réelle d'explosion du service des intérêts de la dette.

Le sujet est d'autant plus brûlant – M. le rapporteur général y fait allusion dans son rapport – que, derrière la dette financière, il en existe une autre, moins apparente, mais encore plus inéluctable : je veux parler de la dette démographique. L'augmentation du nombre des personnes âgées, des retraités, le fait que la génération du baby-boom va atteindre l'âge de la retraite dans les années à venir, tout cela constitue une menace de très grand déséquilibre pour la société française, y compris financier. Nicolas Sarkozy a dit dans le débat entre les deux tours des élections que les retraites étaient financées jusqu'en 2020. Des guillemets s'imposent car nous savons tous qu'il n'en est rien et que nous allons, au contraire, vers des rendez-vous inéluctables.

Monsieur le rapporteur général, vous avez très souvent et fort justement insisté dans votre rapport sur les marges de manoeuvre, les « surplus durables » que vous avez estimés aux alentours de 10 ou 12 milliards d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bayrou

Chacun sait ici que le déficit actuel s'établit à quelque 40 milliards d'euros et connaît le rythme obligatoire de baisse du déficit que nous devons respecter si nous voulons tenir le délai de 2010 ou 2012. M. Bouvard l'a rappelé à l'instant : 15 milliards par an pour 2010 et 10 pour 2012. Cette arithmétique-là est familière à chacun d'entre nous.

Voyons maintenant ce qu'il faudra inscrire en face de ces diminutions obligatoires. Un grand institut de conjoncture a indiqué ce matin que le paquet fiscal allait coûter 14 milliards en 2008 et 17 milliards en année pleine. En outre, un certain nombre d'engagements de dépenses supplémentaires, réitérés avec force tout au long de la campagne électorale, ont également été pris. Permettez-moi d'en citer deux ou trois.

Nicolas Sarkozy s'est ainsi engagé à augmenter de 50 % le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui représente actuellement 21 milliards d'euros. Je vous laisse imaginer quel rythme d'augmentation des dépenses il faudra suivre pour atteindre la hausse de 50 %.

François Fillon a annoncé de cette tribune, dans son discours de politique générale, qu'il allait lancer un grand plan de désenclavement des cités, notamment en matière de transports en commun. Songez à ce que cela représente comme investissement !

Par ailleurs, nul ici n'oublie les engagements – sans doute politiques mais plus encore moraux – pris au regard de l'état de nos prisons. On peut parler d'atteinte aux droits de l'homme pour ceux qui sont privés de liberté pour avoir commis des délits et des crimes.

Si donc on ajoute aux 14 à 17 milliards d'euros de cadeaux fiscaux les 5 à 6 milliards d'euros de dépenses supplémentaires, on arrive à plus de 20 milliards. Mais comment va-t-on financer ces dépenses fiscales ou budgétaires nouvelles qui font l'objet essentiel de ce débat d'orientation budgétaire ?

La réponse habituelle, celle qui a encore été faite à cette tribune, notamment par M. Bouvard, c'est la réforme de l'État et la baisse du nombre des fonctionnaires liée au non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux.

À ce stade, un minimum d'arithmétique est nécessaire. Après M. de Rugy, qui s'y est appliqué sur plusieurs années, je vais m'y essayer sur un an : 35 000 départs à la retraite non remplacés équivalent grosso modo à cinq cents millions d'euros d'économies. Comme le Gouvernement a assorti le non-remplacement des agents de l'État qui partaient à la retraite d'un engagement qui est de rendre aux fonctionnaires la moitié des économies réalisées, ce ne sont plus cinq cents millions d'euros que l'on économise mais deux cent cinquante millions. Puis-je rappeler que, rapporté aux vingt milliards d'euros dépensés, cela représente moins de 2 % des besoins de financement ?

J'en viens à ma conclusion. Le choix que vous avez fait et qui est le contraire de ce qui était prévu et annoncé va soumettre à des tensions insupportables des secteurs entiers de l'action publique de notre pays, et ce d'autant plus que nous sommes contraints à une certaine discipline budgétaire en raison de nos engagements européens.

Si encore nous avions la certitude que le paquet fiscal allait dans le bon sens et permettait de relancer l'économie et la compétitivité, peut-être pourrait-on prendre ce risque. Mais les plus grands économistes, comme la plupart des instituts de conjoncture, indiquent qu'au contraire vos choix ne vont pas dans la bonne direction. Et ce n'est un secret pour personne qu'y compris dans les rangs de la majorité des inquiétudes se font jour à ce sujet.

Je voulais donc vous alerter à cette tribune sur les risques que font courir vos choix aux finances publiques de notre pays et, à terme, à l'ensemble de nos équilibres économiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Daniel Garrigue.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Monsieur le ministre, mes chers collègues, en écoutant les orateurs successifs, on distingue nettement les deux questions qui sont au coeur de ce débat d'orientation budgétaire : celle du désendettement et celle du taux de croissance dans notre pays.

Ces deux questions ne sont pas sans lien. Le désendettement est un enjeu considérable, car si l'on veut développer la croissance, il est essentiel de réduire les prélèvements qui pèsent sur les acteurs de notre économie. Cela est vrai – j'y insiste – non seulement pour l'État, mais aussi pour l'ensemble des collectivités territoriales. Trop de régions, de départements ou de villes augmentent en effet aujourd'hui leur fiscalité dans des proportions qui pénalisent de plus en plus leurs chances de développement.

Il y a deux façons pour l'État de se désendetter. On évoque le plus souvent la maîtrise de la dépense publique, qui permet en effet de résorber une grande part de la dette, mais le meilleur accélérateur du désendettement, c'est la croissance elle-même, car c'est grâce à elle que l'on pourra obtenir les résultats les plus rapides.

Monsieur le ministre, la question fondamentale dans notre pays aujourd'hui est donc de savoir comment élever notre taux de croissance comme ont réussi à le faire plusieurs de nos partenaires, tandis que nous restons malheureusement l'un des pays d'Europe où la croissance est la plus faible.

Plusieurs des initiatives que nous avons prises s'inscrivent dans cette perspective, qu'il s'agisse de libérer le travail – c'est l'objet du projet de loi TEPA, dont nous reprendrons la discussion tout à l'heure – ou de faire sauter un certain nombre de blocages, ce qui est le sens de la mission qui a été confiée au président de la Cour des comptes. Dans un pays, en effet, où les blocages sont beaucoup plus nombreux et plus forts qu'on ne le croit, la nécessité d'un nouveau rapport Rueff-Armand se faisait sentir.

Il s'agit notamment de réfléchir au très lourd problème de la normalisation, pas du tout maîtrisé à l'heure actuelle, ou aux questions ayant trait à la recherche et à l'innovation, qui doivent être approfondies dans le cadre de la préparation de la loi de finances.

J'insisterai sur l'innovation, qui reste problématique dans notre pays. Je voudrais en particulier vous demander quand nous ratifierons le protocole de Londres sur les brevets d'invention et ce que vous comptez faire pour renforcer les réseaux animés par OSEO-ANVAR en liaison avec le programme de compétitivité et d'innovation de l'Union européenne.

Nous devons également nous attacher au développement de nos exportations, car si certains de nos partenaires, notamment l'Allemagne, ont pu poursuivre leur effort de croissance, c'est grâce à leur haut niveau d'exportations.

Enfin, attention doit être portée aux investissements d'infrastructures. Beaucoup d'entre nous savent en effet que, malgré tout ce qui a été réalisé au cours des décennies précédentes, le développement de leurs régions passe avant tout par les routes et les aéroports.

Il faut donc que nous réussissions à trouver une dynamique qui concilie l'objectif de désendettement et les nécessaires investissements en matière d'innovation, d'exportations et d'infrastructures : cela va au-delà de la simple arithmétique préconisée par M. Bayrou.

Je voudrais enfin vous interroger, monsieur le ministre, sur la notion de gouvernement économique de l'Europe et savoir quelle part elle prendra dans la préparation de cette loi de finances et de votre politique. Il me semble bénéfique, en effet, que l'on puisse aborder lors des conseils européens certains sujets que nos partenaires sont parfois hésitants à traiter, comme la question de la politique monétaire ou le maniement des outils de concertation et de comparaison.

Le rapporteur général mentionnait tout à l'heure le programme de stabilité ; on pourrait également évoquer les programmes nationaux de réforme prévus par la stratégie de Lisbonne et qui ont été quelque peu négligés jusqu'ici dans la préparation de nos grandes décisions. Enfin, il est temps de se pencher sur la définition d'une stratégie européenne dans les domaines de l'énergie, de l'industrie et des technologies. Cela suppose que l'on cerne clairement les enjeux, mais aussi que l'on se dote des outils adéquats.

J'attends donc, monsieur le ministre, vos réponses sur le gouvernement économique de l'Europe et la manière dont cela sera pris en compte dans la préparation de la prochaine loi de finances. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Henri Nayrou.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Nayrou

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, juste avant ce débat d'orientation budgétaire, l'examen du projet de loi de règlement pour 2006 a permis de constater la dégradation persistante de nos comptes publics, malgré l'amélioration optique du solde budgétaire, qui n'a été obtenue qu'après de nombreuses acrobaties comptables et une politique de privatisation accélérée mais sans lendemain.

L'endettement public n'a jamais été réellement maîtrisé et l'état des lieux dressé le 17 juin dernier par la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques est pour le moins inquiétant.

Allons donc à l'essentiel, c'est-à-dire au contexte dans lequel nous examinons vos propositions en matière budgétaire. Le contexte, ce sont tous les comptes publics dans le rouge, la sombre réalité de votre bilan entre 2002 et 2007, un nouveau type de politique-spectacle qui s'appelle débauchage et marchandage, politique plutôt habilement menée mais qui livrera ses limites quand se seront estompées les volutes de fumée.

Derrière ce rideau, apparaîtra alors la triste réalité. Vous étiez déjà cernés par le déplorable état des comptes publics, la dette vis-à-vis des générations futures et d'un certain sens de l'éthique politique, le déficit du budget de la nation non conforme à nos obligations européennes et les gouffres de la sécurité sociale. Comme si cette situation d'apocalypse financière ne suffisait pas au malheur de la France,…

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Nayrou

…comme si le discours incantatoire du candidat Sarkozy sur la valeur travail était oublié sitôt la porte de l'Élysée franchie, comme si l'opinion publique était anesthésiée pour quelques mois encore, vous poussez le cynisme à un niveau rarement atteint en commençant, à peine installés, par dépenser plus de treize milliards d'euros en faveur, qui plus est, des contribuables les moins défavorisés, ce qui fait beaucoup, beaucoup d'argent pour un petit, petit nombre de bénéficiaires.

Le bouclier fiscal est passé officiellement à 50 % pour la presse, mais à 39 % subrepticement pour vos amis. L'impôt de solidarité sur la fortune a rétréci après son passage dans la machine à recycler les consciences et les calculatrices – voire les calculateurs. Les gros patrimoines sont désormais exonérés de droits de succession. Vous auriez pu choisir de dépenser ces 13 milliards d'euros pour relancer le pouvoir d'achat des plus pauvres – qui sont aussi, comme le rappelait Coluche, les plus nombreux –, donnant ainsi, pour une fois, un sens concret aux promesses faites par votre candidat aux gens qui travaillent en se levant tôt le matin.

Nous en aurions pris acte avec satisfaction et, du coup, le débat d'orientation budgétaire aurait été plus aisé, monsieur le ministre du budget improbable, des comptes publics en détresse et de la fonction publique en péril !

Mais on ne va pas vous plaindre, parce que, d'une part, vous avez choisi votre voie et que, d'autre part, vous ne vous êtes pas opposé à la distribution insensée de ces treize milliards d'euros, qui est pourtant un non-sens à la fois économique et social.

De toute évidence, c'est plus le dogmatisme idéologique qui semble guider les choix gouvernementaux que le souci de maîtrise des comptes, voire l'intérêt général du pays. Bref, le moins que l'on puisse dire, c'est que les premières données de l'exécution budgétaire de 2007 ne sont pas satisfaisantes et que la situation précaire des comptes de l'État n'incline pas à l'optimisme.

Après avoir baissé pour la première fois de 1,4 point entre 1999 et 2001, la dette publique a explosé en cinq ans. Je voudrais, à ce propos, apporter trois précisions à M. le rapporteur général du budget, qui vient d'expédier ce débat sans note, ce qui revient à descendre le Galibier sans frein.

La première, c'est que, ces quinze dernières années, la dette a augmenté en moyenne de 1,1 % sous la gauche et de 2,8 % sous la droite.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Nayrou

La deuxième, c'est que cette dette s'élevait en 2002 à 59 % du PIB et, en 2005, à 66,6 %. La troisième, c'est que le champion toute catégorie du saut en longueur de la dette a été M. Sarkozy, lorsqu'il était ministre du budget entre 1993 et 1995, avec un bond de 41 % à 51 %. Cela nous emmène loin de vos affirmations, monsieur Carrez, en matière de gestion de la dette !

Le déficit conduira inévitablement, comme cela a été le cas en 1993 et en 2002, à l'alourdissement des prélèvements sur l'ensemble des ménages.

Les propositions du groupe socialiste, pourtant réitérées à de multiples reprises, en faveur du plafonnement des dispositifs, de leur évaluation et de la suppression des dispositifs les moins efficaces constituent pourtant des pistes essentielles à la recherche de l'optimisation des dépenses fiscales. Ce n'est pas, de toute évidence, la stratégie retenue.

Je souhaite terminer mon intervention en évoquant deux points.

Le premier concerne la propension de vos gouvernements respectifs à arrêter de nouvelles mesures et, surtout, à décider de les faire financer par d'autres, notamment les collectivités régionales et départementales.

Le deuxième point est que nos engagements européens, supposant de maintenir la dette sous le seuil des 6o % de PIB, ne sont plus respectés depuis cinq ans. Faut-il vous rappeler qu'ils l'avaient toujours été entre 1997 et 2002 ?

Aujourd'hui, votre gouvernement n'envisage plus d'atteindre cet objectif avant 2012, et, comme M. Bayrou, je le déplore. C'est une nouvelle démonstration de vos échecs répétés et de votre incapacité à proposer une gestion saine des finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Nayrou

Nous avons aujourd'hui un débat sur un budget en quelque sorte désorienté. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme Béatrice Pavy.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Pavy

Monsieur le ministre, les orientations budgétaires que vous nous avez présentées traduisent une volonté forte de changement exprimée par les Français lors de l'élection présidentielle et confirmée lors des élections législatives. Les Français se sont exprimés en faveur d'un programme clair et précis, basé sur les principes de confiance, de croissance et de revalorisation du travail.

Pour y répondre, la stratégie économique et budgétaire du Gouvernement s'appuie sur deux piliers qu'il est utile de rappeler : des mesures fiscales ambitieuses permettant de revaloriser le travail, de créer un choc de confiance et de relancer durablement la croissance ; une maîtrise sans précédent de la dépense publique permettant de réduire la dette et de préserver l'équité intergénérationnelle, tout en améliorant l'efficacité de l'État et du secteur public.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Pavy

Le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat en est une première illustration, et le retour de la valeur travail, au coeur de la politique et des engagements de Nicolas Sarkozy, s'inscrit dans la perspective plus longue des grandes réformes économiques que le Gouvernement aura à mener dans les prochains mois, en concertation avec l'ensemble des acteurs.

Redonner confiance aux Français, en donnant les outils nécessaires à l'amélioration du pouvoir d'achat et à la valorisation du travail, est un objectif qui doit nous animer tout au long de ces discussions budgétaires. C'est pourquoi ce débat doit être à l'image de cette volonté de récompenser les fruits du travail, gage de valeur démocratique, républicaine, économique et sociale.

Pour engager les réformes indispensables afin que notre pays retrouve sa place en Europe et dans le monde et toute son attractivité et sa compétitivité, il est nécessaire que l'État fasse preuve d'une gestion rigoureuse, ambitieuse et dynamique. D'abord, en luttant contre la fraude fiscale et sociale. Ensuite, en supprimant les dépenses inutiles pour les recentrer là où les efforts sont indispensables, notamment pour la prise en charge et l'accompagnement des plus démunis et des plus fragiles, mais aussi en dégageant des marges de manoeuvre nécessaires au financement de la recherche et de l'innovation, pour une croissance durablement plus forte.

Je ne reviendrai pas sur le bilan de l'année 2006, vu en loi de règlement tout à l'heure, mais je veux souligner l'effort important réalisé par le Gouvernement, qui a stabilisé la dépense pour la quatrième année consécutive.

La maîtrise de nos finances publiques, qui n'est pas du tout incompatible avec un service public de qualité, doit s'articuler autour de trois points : un service public recentré sur ses missions pour plus d'efficacité ; une maîtrise de la dépense pour dégager un espace disponible permettant de mettre en oeuvre budgétaires pour ne pas ajouter au coût du vieillissement le poids de la dette sur les générations futures.

Mais la maîtrise des dépenses publiques doit être un objectif partagé par l'ensemble des acteurs – État, administrations, sécurité sociale et collectivités territoriales –, et je souhaiterais vivement que soit engagée une véritable réflexion sur la suppression de certaines strates administratives, sources de complexité et de dépenses parfois inutiles.

Il me semble en effet indispensable de tendre vers une simplification de notre système administratif, des procédures et réglementations en vue d'une meilleure maîtrise des coûts et une réconciliation des citoyens avec les administrations. Cette simplification va dans le sens de la volonté gouvernementale d'approfondir et de renouveler les actions entreprises en vue d'un pilotage d'ensemble des finances publiques.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de souligner la démarche très novatrice pour notre pays, à l'instar des meilleures pratiques étrangères, qu'est la révision générale des politiques publiques – qui devrait nous rassurer – selon trois dimensions : efficacité, efficience et qualité de service.

Les orientations budgétaires mettent également en lumière la nécessité de renforcer la cohérence de la procédure budgétaire, conformément à l'esprit de la LOLF, afin de renforcer l'intervention du Parlement sur les questions essentielles et de revaloriser son rôle en matière de contrôle de l'exécutif.

Un pouvoir renforcé par le principe de chaînage vertueux permet en effet aux parlementaires et aux responsables de programme de tirer les conséquences des résultats de la gestion passée et d'anticiper celles à venir selon le principe du « cycle de performance ».

Assainir les finances publiques passe également par le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique, afin de permettre un retour direct sous forme d'intéressement financier pour les fonctionnaires. Cet engagement doit être perçu comme une règle de bonne gestion de la masse salariale de l'État, nécessaire à la modernisation du service public ainsi qu'à la modernisation de la politique salariale dans la fonction publique, dont certains agents souffrent également de précarité.

La création d'un ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique est la manifestation concrète de la volonté du Gouvernement de progresser vers une vision globale des finances publiques, indispensable pour un assainissement durable qui ira bien au-delà de la législature actuelle.

Enfin, je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité de mieux contrôler le transfert de compétences, afin d'éviter un glissement des charges – notamment vers les conseils généraux dont les dépenses d'ordre social, liées à l'allongement de la durée de la vie et à la dépendance, sont élevées – ou encore la surenchère des normes et réglementations qui grèvent fortement le budget des collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Pavy

Mais je ne doute pas que la vigilance et la volonté du Gouvernement sauront enrayer une certaine dérive, afin de préserver la qualité des services publics locaux, ainsi que le rôle essentiel des collectivités territoriales en tant qu'investisseurs publics.

En conclusion, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dirai que les orientations budgétaires retenues sont réalistes et ambitieuses. Elles appellent au contrôle de l'efficacité, à la rigueur, à la performance, à la responsabilité de l'État pour rétablir des marges de manoeuvre afin de soutenir la croissance et préparer l'avenir de notre pays dans le dynamisme et la confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Monsieur le ministre, ce matin, nous avons longuement débattu de la situation budgétaire de notre pays pour 2006. Dans ce débat d'orientation budgétaire, vous nous proposez, en quelque sorte, de réaliser dans le quinquennat qui s'ouvre ce que vos prédécesseurs avaient promis dans celui qui s'est achevé, c'est-à-dire d'aboutir à l'équilibre des finances publiques à la fin de la législature.

À cette même place, en 2002, votre prédécesseur, M. Francis Mer, s'était engagé à réduire chaque année le déficit d'un demi-point de PIB pour atteindre l'équilibre en 2006-2007. Nous en sommes loin. Non seulement la France a connu, pendant pratiquement quatre ans, des déficits excessifs, mais le déficit n'est jamais revenu à ce qu'il était en 2001 – 1,5 % de PIB –, ou même à ce qu'il était à l'été 2002 où il était compris entre 2,2 et 2,5 %. Il ne devrait pas non plus repasser au-dessous de cette valeur dans les deux années qui viennent, puisque, d'après les projections dont vous avez fait état, il se maintiendra à peu près autour de 2,5 % de PIB en 2007 comme en 2008.

Vous nous avez expliqué, monsieur le ministre, que votre stratégie économique et budgétaire s'appuyait sur deux volets : des mesures fiscales ambitieuses pour relancer la croissance – c'est le « paquet fiscal » dont nous terminons l'examen ce soir – et une maîtrise sans précédent des finances publiques. Ce sont aussi, à peu de choses près, les mots employés par M. Francis Mer il y a cinq ans. Réussirez-vous là où il a échoué ? Du côté de la maîtrise des dépenses publiques, nous verrons.

Du côté de la relance de la croissance, le « paquet fiscal » me laisse septique, comme il laisse sceptique la grande majorité des économistes, de gauche ou de droite, qui l'ont analysé.

On peut, certes, concevoir une stratégie où des mesures d'incitation conduisent, de façon temporaire, à un déficit public transitoire pour augmenter, à terme, la croissance potentielle de notre économie. Mais comme la plupart des économistes, je ne vois rien de tout cela dans les mesures que nous discutons depuis une semaine dans le cadre du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.

La mesure phare sur le pouvoir d'achat, l'exonération des heures supplémentaires, aura, selon deux experts du Conseil d'analyse économique – dont on ne peut pas dire qu'ils sont favorables à la réduction du temps de travail –, MM. Artus et Cahuc, « un effet incertain sur l'emploi et le revenu global pour un coût exorbitant pour les finances publiques ». Une note commandée à la direction du trésor par votre prédécesseur, Thierry Breton, tirait à peu près les mêmes conclusions en des termes à peine différents.

Cette mesure ne concernera pas ceux qui ont le plus besoin de travailler davantage, c'est-à-dire ceux qui sont au chômage, ou ceux qui voudraient bien travailler plus parce qu'ils sont à temps partiel contraint. Car les salariés à temps partiel qui souhaiteraient travailler à temps plein – ils sont 1 million en France, à 80 % des femmes – n'ont pas la maîtrise de leur temps de travail, et une mesure d'incitation ne changera rien. En outre, malgré cette mesure, la reprise économique sera peu créatrice d'emplois, car les entreprises privilégieront le recours aux heures supplémentaires plutôt que l'embauche.

J'ai le même scepticisme en ce qui concerne la déduction des intérêts d'emprunt immobilier. Une telle mesure peut être pertinente dans une situation où il faut stimuler la demande de logements. Mais cela n'est pas le problème actuel du secteur. Aujourd'hui, le problème de l'accès à la propriété se trouve du côté de l'offre de logements à des prix accessibles. En stimulant la demande, vous allez favoriser la spéculation foncière et la hausse des prix immobiliers. C'est d'ailleurs ce qu'indiquait, à l'époque, une note de Bercy réalisée à la demande, là aussi, du ministre des finances, en mentionnant « une fausse bonne idée » qui risquait d'accroître les prix immobiliers.

Il en est de même des mesures qui concernent les droits de succession. Supprimer les droits de succession va nuire à la mobilité sociale,…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

…car on ne construit pas une économie dynamique en la fondant sur l'héritage. Comme l'écrivait Philippe Frémeaux et ainsi que l'a rappelé mon collègue Jean-Pierre Brard dans un débat précédent, « une société où le pouvoir se transmet sans avoir à faire preuve de mérite a un petit goût d'ancien régime ; c'est une société condamnée à la croissance lente où les rentiers l'emportent sur les créateurs ». Je crois qu'on retrouve cette expression dans la bouche de beaucoup de chefs d'entreprises, même de grandes entreprises, qui considèrent que fonder l'essentiel de la transmission d'entreprise sur l'héritage n'est pas la meilleure façon de construire une économique dynamique.

Aucune de ces mesures n'est susceptible d'accroître réellement l'offre potentielle de notre économie qui en a pourtant bien besoin. Je rappelle que nous avons 30 milliards de déficit extérieur, ce que notre pays n'a jamais connu dans le passé.

Pour développer la croissance potentielle, il serait plus pertinent d'utiliser autrement ces 13,6 milliards de cadeaux fiscaux. Par exemple, comme nous le proposions, nous socialistes, en investissant massivement dans la recherche et dans l'enseignement supérieur. Ou en favorisant l'innovation et l'investissement, notamment par la modulation du taux de l'impôt sur les sociétés en faveur des bénéfices réinvestis. Ou encore en mettant l'accent sur l'entrée des jeunes dans la vie active, car ceux pour qui travailler plus pour gagner plus a un sens sont bien les jeunes qui attendent d'entrer dans la vie active.

Au lieu de cela, votre « paquet fiscal » comporte, au mieux, des mesures de pouvoir d'achat – Mme la ministre ne s'en est d'ailleurs pas cachée durant nos débats –, mais à destination de ceux qui n'en ont pas forcément le plus besoin.

Il en restera peut-être une relance par la demande. Et encore, ce ne sera pas la plus efficace car les cadeaux fiscaux qui vont aux plus fortunés de nos concitoyens ne sont pas ceux qui ont l'impact le plus évident sur la consommation.

Et encore faut-t-il, pour que l'effet reste positif, que l'État ne reprenne pas demain ce qu'il donne aujourd'hui – le rapporteur général a lui-même utilisé cette formule –, comme cela s'est produit de 2002 à 2006 où, après une baisse de l'impôt sur le revenu, les prélèvements obligatoires ont augmenté. Si vous compensez à terme ces cadeaux fiscaux par une hausse de la TVA, ce serait profondément injuste, inégalitaire – le « paquet fiscal » l'est déjà –, mais aussi fortement négatif sur la croissance et l'emploi.

Enfin, à une époque où l'Europe est en train de retrouver une croissance forte, qui était de 2,7 % en 2006 – la France étant à la traîne –, et qui pourrait, selon la prévision commune de trois instituts de conjoncture, être proche de 3 % cette année, vous commettez la même erreur que celle qui a conduit à la dérive et à la persistance des déficits à partir de 2002.

En privilégiant, dès le début de la législature, les cadeaux fiscaux au détriment d'une réduction rapide de la dette et des déficits − vous prévoyez en effet que la dette ne reviendra à 60 % du PIB qu'à la fin de la mandature, et les déficits resteront relativement importants en 2007 et en 2008, proches de ce qu'ils sont actuellement −, vous courez le risque d'être incapables de faire face à un éventuel ralentissement de l'activité économique mondiale ou européenne. Monsieur le ministre, votre politique économique n'est donc pas seulement injuste : elle risque d'être profondément inefficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Laurent Hénart.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce sont les petites conférences de Laurent Hénart ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Hénart

Oui, c'est pour vous, monsieur Brard, pour vous être agréable.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Hénart

Je constate avec plaisir votre présence dans l'hémicycle, mais, comme je ne dispose que de cinq minutes et que je voudrais les consacrer à mon propos, nous reprendrons ce dialogue à l'issue de la séance, si vous le voulez bien. (Rires.)

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, nombreux sont les intervenants qui l'ont noté, ce débat d'orientation budgétaire est plus stratégique que d'autres, puisqu'il intervient au début de la législature et qu'il a lieu dans l'éclairage particulier de l'engagement − pris par le chef de l'État lorsqu'il était candidat et par la majorité qui le soutient − d'un retour à l'équilibre et d'un désendettement suffisant pour passer, avant la fin de la législature, sous la barre des 60 %.

Je souhaiterais faire trois remarques : la première à propos de l'État, et les deux autres à propos des comptes des collectivités locales et de la sécurité sociale, dont l'addition est d'ailleurs bien plus importante que le seul budget de l'État.

En ce qui concerne le budget de l'État, mon intervention ira un peu dans le même sens que celle de Béatrice Pavy : j'invite moi aussi à une véritable dynamique des dépenses. Nous devons notamment, grâce à des redéploiements, faire en sorte de tenir d'autres engagements que ceux de maîtrise du déficit de l'État que nous avons contractés au niveau européen et qui, s'ils sont indispensables, ne sont que financiers. J'en conçois deux. Le premier, tout aussi important, est celui que nous avons souscrit, dans le cadre de l'engagement de Lisbonne, pour un effort en matière de recherche et développement. Il s'est traduit, pendant la campagne, par l'annonce d'une augmentation de 50 % des moyens de l'enseignement supérieur et de la recherche. C'est grâce à l'investissement dans la durée − dans le cadre d'une loi de programmation qui pourrait utilement faire suite à celle sur l'autonomie des universités − que nous pourrons avoir les moyens et la matière grise, aussi bien pour la recherche publique que pour la recherche privée, aussi bien pour la recherche d'établissement que pour celle en université. Cela nous garantira une croissance fondée sur l'innovation et la compétitivité, qui, à l'heure de la mondialisation, est le seul levier utile face à des pays émergents où les salaires sont vingt fois plus faibles que chez nous.

D'autre part, il est tout aussi important que nous respections jusqu'à leur terme les engagements que nous avons souscrits dans le plan de cohésion sociale et qui, en matière de baisse du chômage, ont commencé à porter leurs fruits, puisque, depuis deux ans, on compte près de 500 000 chômeurs en moins inscrits à l'ANPE et près de 500 000 cotisants en plus recensés par l'ACOSS, percevant des salaires, versant des cotisations et contribuant au fonctionnement de notre économie par leur consommation et par les impôts qu'ils acquittent. Il paraît donc important que cette loi de programmation, qui doit encore se dérouler sur trois exercices, puisse nous permettre d'atteindre les objectifs que nous nous étions fixés : parvenir à un taux de chômage de 6 ou 7 %, proche du plein emploi ; améliorer la formation des jeunes par le développement de l'alternance, pour rapprocher l'offre de formation des besoins des employeurs − car, outre le chômage, c'est un des maux français que d'avoir des offres non pourvues − ; enfin, et surtout, il faut continuer l'effort engagé en matière de logement et rattraper le retard des années 1999-2001 par la poursuite d'un ambitieux programme de construction, aussi bien de logements sociaux que de logements privés. De ce point de vue, les mesures prises en matière de crédit d'impôt pour les intérêts d'emprunt liés à l'acquisition d'un logement sont complémentaires et non pas concurrentes de l'effort en faveur du logement social. Voilà ce que l'on peut dire de la dynamique de redéploiement des fonds : je suis bien conscient que la norme de dépense zéro volume…

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Hénart

…nous imposera de redéployer et non pas de faire tourner la planche à billets.

Je souhaite également parler de deux budgets voisins. Le premier est celui des collectivités locales. J'ai lu avec un grand intérêt le rapport d'information préalable à ce débat d'orientation budgétaire. Même si le principe d'autonomie nous lie tous, il serait intéressant de prévoir des mesures particulières pour les collectivités qui s'engageraient dans une politique budgétaire comparable à celle que vous annoncez pour les années 2008 à 2012, et qui comporterait un inventaire général des politiques conduites pour les rendre plus performantes, une économie sur les postes de personnel libérés par les départs à la retraite − la pyramide des âges dans la fonction publique territoriale laissant prévoir d'importants départs dans les communes, intercommunalités ou départements −, et une volonté de maîtriser les dépenses avec une norme 0 % en volume, pour reprendre l'excellente expression de notre collègue Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On a de l'autorité sur ce qu'on peut ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Hénart

Enfin, en ce qui concerne la sécurité sociale, je souhaite que vous n'abandonniez pas la réflexion sur la diversification des financements de notre protection, notamment en matière d'assurance maladie, de famille, de dépendance et de handicap. Aux yeux de nos concitoyens, ces sujets relèvent davantage de la solidarité nationale que de l'assurance professionnelle. De mon point de vue, ils doivent, au-delà des cotisations, bénéficier de nouvelles sources de financement pesant moins sur le travail. L'organisation d'une réflexion sur le sujet a été annoncée, après qu'un débat polémique s'est déroulé dans l'opinion sur toile de fond électorale. Les élections sont passées et ce débat doit être conduit : nul n'ignore que, en matière de santé, de dépendance, de handicap, les besoins iront croissant dans les prochaines années, et que l'optimisation des dépenses et la lutte contre la fraude ne pourront pas tout. Il nous faudra diversifier les financements et trouver les moyens d'assumer les besoins de nos concitoyens et les solidarités essentielles à l'intention des plus faibles d'entre nous ou de ceux qui, après une vie de travail, ont droit à la vieillesse la plus digne possible.

Merci, mes chers collègues, de votre attention. Merci à M. Brard de ses remarques pertinentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Hénart

Et merci au Gouvernement de son écoute pour les propositions parlementaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-François Lamour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Avec Jean-François Lamour, on coupe le cordon au sabre d'abordage ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Je pensais que M. Brard en avait terminé avec la majorité, mais je vois qu'il lui reste des forces. Il doit s'échauffer, comme les sportifs : sans doute concourt-il chez les vétérans. (Sourires.)

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le mandat que nous ont confié les Français n'est pas impératif. Pourtant, tout au long des dernières campagnes présidentielle et législative, nous avons perçu une exigence. Certes, les Français nous ont manifesté leur confiance, mais ils nous ont également placés devant notre responsabilité : nous devons agir.

Les Parisiens que j'ai croisés ces derniers mois ont été très clairs. Sur les marchés, dans les rues, dans les parcs, quelle que soit leur situation ou leur activité, ils demandaient que l'action publique reconnaisse le niveau de leur engagement ou de leur effort, qu'elle les soutienne quand certains ont le sentiment d'être laissés pour compte sur le bord du chemin, alors qu'ils ont la volonté de s'en sortir.

Comment ne pas voir, dans ce débat d'orientation budgétaire de début de législature, l'occasion pour chacun d'entre nous de répondre à cette exigence ? Monsieur le président de la commission des finances, vous vous demandiez tout à l'heure si le débat d'orientation budgétaire de l'année prochaine ne serait pas plus passionnant et plus constructif que celui-ci. Je ne le crois pas. Vous compariez le travail effectué depuis 2002 par le précédent gouvernement à ce qui avait été fait entre 1997 et 2002. Songez plutôt à la situation dont nous avions hérité en 2002 : il fallait trouver, pour 350 000 emplois-jeunes, une solution de sortie que vous n'aviez absolument pas prévue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Il fallait également appliquer les 35 heures dans leur totalité : on sait combien cela coûte encore à la collectivité, alors que, si mes souvenirs sont exacts, vous aviez bénéficié, chaque année pendant toute cette période, d'un taux de croissance de plus de 3 %, que vous avez peu ou mal utilisé à la réduction de la dette et pour redynamiser notre pays. Vous le voyez, rien n'est simple. Le débat d'orientation budgétaire d'aujourd'hui est particulièrement important et intéressant et nous place en effet devant nos responsabilités, mais avec au moins, cette fois-ci, des budgets sincères. Du reste, nous l'avons bien vu ce matin, lors de la présentation, par Éric Woerth, de la loi de règlement de 2006.

Pour répondre aux attentes des Français − le Président de la République a d'ailleurs été clair à cet égard −, nous devons nous focaliser sur trois priorités : davantage de croissance, davantage d'emplois, davantage de cohésion sociale. Ces objectifs ne peuvent pas être atteints si l'État prélève plus, dépense inutilement et ne s'interroge jamais sur le bien-fondé de son action.

Les mesures fiscales du projet de loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat, que nous allons, je l'espère, adopter ce soir en première lecture, sont un signe fort. Ces dispositions permettront de soutenir, dès 2008, le revenu des ménages et la consommation. Elles allègent le coût du travail pour les entreprises afin de leur permettre de développer l'emploi durable. Les premières mesures fiscales entreront en vigueur dès l'automne 2007. Mes chers collègues, voilà ce que j'appelle agir au service des Français. Voilà surtout les réponses que les Français attendent de nous.

Mais ce débat d'orientation budgétaire doit également permettre aux parlementaires que nous sommes de regarder plus loin. Notre rôle, monsieur le ministre, est de travailler activement et profondément à atteindre les objectifs de réduction de dette de 60 % du PIB en 2012 au plus tard. Au début de 2007, la croissance française est comprise entre 2 % et 2,5 % en rythme annuel. Je suis convaincu que, pour la croissance, les mesures prises par notre majorité et votre gouvernement seront le vecteur d'un rythme soutenu. En 2008, l'activité économique s'accélérera ainsi, du fait notamment des premiers effets de la politique économique du Gouvernement.

Quels sont les piliers d'un tel plan pour la France ? Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement doit d'abord poursuivre la politique de maîtrise des dépenses publiques. Cette stratégie doit assurer la réduction de la dette publique et l'équité intergénérationnelle, tout en améliorant l'efficacité de l'État et celle des services publics. Nous serons, en tant que parlementaires, au coeur de ce projet que nous soutiendrons et auquel, je le sais, les Français sont favorables. Voilà le premier objectif que l'État doit s'assigner.

Le second aspect n'est pas plus négligeable : les finances sociales seront la cheville ouvrière d'une bonne et saine gouvernance financière de notre pays. Maintenons cet impérieux effort de la maîtrise des dépenses d'assurance maladie. Souvenez-vous que, dès 2006, après le vote de l'ONDAM, les dépenses d'assurance maladie avaient dépassé 1,2 milliard d'euros. Il faut donc agir, maîtriser, mais aussi compléter notre action par des mesures structurelles. Une meilleure régulation de l'assurance maladie et l'instauration d'une franchise pour financer les dépenses nouvelles permettront ainsi de maîtriser les dépenses d'assurance maladie.

La politique familiale constitue un autre poste des finances sociales. Longtemps, les chemins des familles et de l'État se sont croisés sans jamais vraiment se rencontrer. Pour avoir discuté avec des familles et des représentants d'associations, je peux en témoigner : les signes que l'État enverra sont attendus. Vous me confirmerez, je l'espère, que notre politique familiale sera dynamique, riche et ambitieuse, à l'image de ce que le Président de la République a dit, pendant la campagne, sur les « orphelins de seize heures trente », sur la création des crèches d'entreprise et sur les structures d'accueil de la petite enfance. Vous le savez, c'est la deuxième de nos priorités.

Enfin, il s'agira de poursuivre la réforme des retraites. La loi d'août 2003 a marqué une première étape courageuse, décisive, mais nous avons un prochain rendez-vous en 2008. Il nous faudra, avec l'aide des travaux du COR et en concertation avec les partenaires sociaux, établir un nouveau diagnostic, en toute transparence. Monsieur le ministre, j'espère que, là aussi, vous saurez répondre à nos attentes. Nous aurons à coeur d'être des protagonistes éclairés et avisés, de promouvoir cet effort et ce travail de réforme de l'État, de modernisation de ses structures. Nous avons vu, ce matin, que la LOLF en est un outil particulièrement pertinent. Je suis convaincu, monsieur le ministre, que la création de votre ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, et votre connaissance des dossiers, nous permettront d'effectuer un travail sérieux et efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais revenir sur quelques éléments du débat qui nous a occupés cet après-midi. Les remarques ont été nombreuses, et je me concentrerai sur deux grands axes.

D'un point de vue général − je m'adresse là plus particulièrement à la gauche −, on ne peut pas systématiquement opposer les dépenses en disant que celles des cinq dernières années ont été plus importantes que celles des cinq années précédentes. Cela dépend grandement de la méthode de calcul et de la façon dont on prend en compte les dépenses très exceptionnelles de 2002, que nous avons dû remettre d'équerre : je vous rappelle qu'elles étaient de l'ordre de 14 milliards et demi – c'était la conséquence soit de sous-budgétisation, soit de surévaluation de recettes. L'écart était considérable. M. Yves Deniaud ou un autre député de la majorité a rappelé, par exemple, la prime de Noël…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Le Père Noël vivait à crédit, à l'époque !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…ou la sous-budgétisation de différentes mesures, sans parler des 35 heures.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Mon intention n'est évidemment pas de donner des leçons à qui que ce soit, mais, franchement, quand je constate que l'APA et bien d'autres plaisanteries de ce genre n'ont pas été financées, je me dis que nous n'avons pas de leçons à recevoir sur la maîtrise de la dépense publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Gilles Carrez nous a appelés à plus de pluri-annualité. Je suis également d'accord sur ce point. Il est bon de donner de la visibilité à nos finances publiques, c'est vrai pour l'ensemble des politiques publiques, c'est encore plus vrai d'une certaine façon pour leur financement. Gilles Carrez a eu raison de souligner que s'il était bien d'avoir des lois de programmation, nous devions, d'une certaine façon, avoir également une programmation très précise en ce qui concerne la dépense et la recette.

Il faut que nous regagnions ce point de croissance supplémentaire qui nous manque, comme le Président de la République nous y a invités à plusieurs reprises et comme Gilles Carrez l'a souhaité tout à l'heure dans son propos introductif.

Gilles Carrez a évoqué la sincérité de l'ensemble du budget, tout particulièrement à propos de l'élargissement de la norme. C'est un point qui a été repris par de nombreux interlocuteurs, notamment Michel Bouvard et Charles de Courson. En 2008, nous présenterons un projet de loi de finances élargi. Ce n'est pas un terme barbare, cela signifie tout simplement qu'on prend une base de dépenses plus importante. On ne peut pas d'un côté prendre une base de dépenses réduite sur laquelle on se bat beaucoup pour maîtriser la dépense et puis, de l'autre côté, laisse courir la dépense.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous devons élargir la base de travail pour vérifier que la tenue de la dépense s'établit sur une base suffisamment importante. Sinon, cela ne veut pas dire grand-chose. Être vertueux sur une toute petite partie et l'être moins sur une autre partie n'a pas de sens.

Il faut que cette dépense soit pilotable, sinon ce n'est pas possible d'élargir, notamment sur un certain nombre de guichets. Je me pose la question par exemple à propos de la dépense fiscale. À un moment donné, compte tenu des droits qui sont ouverts, elle devient impilotable, en tout cas pas directement pilotable. La norme élargie doit permettre à l'État de mieux organiser, d'assurer plus de transparence sur l'ensemble de sa dépense. On verra sur les prélèvements sur recettes, sur l'Europe, sur les prélèvements fiscaux.

Didier Migaud a posé plusieurs questions, auxquelles j'apporterai des éléments de réponse.

D'abord, quelles sont les raisons pour lesquelles le taux de croissance de la France est inférieur à celui observé dans d'autres pays en Europe et dans le monde ? Mon sentiment personnel, c'est que le poids des prélèvements obligatoires est, en France, trop lourd.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il est bien plus lourd que dans beaucoup d'autres pays avec lesquels nous sommes en compétition.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Ce n'est pas parce que vous affirmez une contrevérité que cela devient une vérité !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le poids de la dépense publique est également trop important. La dépense publique est évidemment nécessaire, nous le verrons tout à l'heure lorsque j'aborderai la question des collectivités locales, mais, à un moment donné, son poids fait qu'il commence à anesthésier un pays, et la dépense publique devient alors contreproductive. Aujourd'hui, nous avons dépassé ce stade en France.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Ce n'est pas de l'économie, c'est de l'idéologie, ça !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il y a trop de dépenses publiques. Il faut convertir cette dépense publique en une dépense plus efficace, une dépense qui va directement aux secteurs économiques marchands.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Un préjugé est plus difficile à casser qu'un atome disait Einstein !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le coût du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat est estimé, pour 2007, à environ 1 milliard d'euros. Le prélèvement pour l'Union européenne sera par exemple inférieur aux prévisions pour une somme à peu près équivalente.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ce projet de loi apportera – c'est une conviction très profonde du Gouvernement et de la majorité – un supplément de croissance et de confiance, qui contribuera à son propre financement pour 2007 et pour 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est la méthode Coué. Il n'y a que vous qui y croyez.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Vous avez indiqué que la dépense publique avait beaucoup augmenté ces dernières années mais la dépense publique, ce n'est pas uniquement la dépense de l'État, comme le pensent souvent nos concitoyens. Les dépenses qui ont le plus augmenté ces dernières années, ce sont les dépenses des collectivités locales et les dépenses de la protection sociale.

Les dépenses des collectivités locales ont augmenté, en volume, d'environ 4 % par an, c'est-à-dire, inflation comprise, d'environ 6 % par an.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ce taux est très nettement supérieur à celui des dépenses de l'État. Je vous rappelle que, depuis quatre ans, les dépenses de l'État sont alignées sur l'inflation puisqu'elles évoluent à zéro volume. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Les Français savent que vous avez augmenté les dépenses !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Les collectivités représentent plus de 70 % de l'investissement public en France !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Sur la dette, il existe une cohérence très forte entre les engagements pris, ce qui est dit, ce qui est écrit et ce qui a été dit avant même l'élection présidentielle. Le candidat à la présidence de la République a toujours indiqué avec beaucoup de précisions, mais peut-être n'avez-vous pas bien lu son programme,…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…que les dépenses reviendraient à l'équilibre à la fin de son quinquennat.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

Il n'a pas commencé que vous voudriez qu'il ait terminé, mesdames, messieurs de l'opposition !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il a indiqué que son objectif était d'avoir un endettement de 60 % par rapport au PIB à la fin de son quinquennat. Cela a toujours été exprimé clairement, cela a même été écrit.

Ce qui a été indiqué depuis, notamment devant nos partenaires européens, par le Président de la République lui-même, c'est la confirmation de cet engagement pour 2012, étant entendu que si la croissance était au rendez-vous, nous pourrions aller plus vite dans l'accomplissement de ces engagements qui sont très forts.

Pourquoi nos partenaires européens prêtent-ils une oreille particulière à ce sujet ? Parce qu'en contrepartie, le Président de la République et le Premier ministre mettent en forme des réformes structurelles.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est parce que des réformes structurelles sont engagées que nous pouvons nous permettre de retarder de deux ans l'échéance initialement prévue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est vrai que des réformes structurelles ont été engagées : il n'y a plus de Premier ministre !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est le prix de ces réformes structurelles. Mais lorsqu'un projet de loi comme le projet de loi sur le travail permet de remettre le travail au coeur du système économique français, ce n'est pas une simple mesure d'exonération de charges sociales pour les heures supplémentaires, c'est une mesure aussi profondément culturelle qui réconcilie notre pays avec sa capacité de travail.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est vrai également pour les autres réformes. Ainsi, les réformes qui seront conduites sur le marché du travail sont également des réformes structurelles, et le fait que ces réformes produisent des effets favorables à l'équilibre de nos finances publiques a été pris en compte par nos partenaires européens.

C'est la même chose avec le contrat de solidarité vis-à-vis des collectivités territoriales, monsieur Migaud. Il faut être juste, les collectivités territoriales s'administrent d'une façon autonome : cela s'appelle la décentralisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Elles s'administrent « librement », pas de façon autonome !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Heureusement, car je n'aimerais pas que l'on me dicte ma propre politique dans ma collectivité locale – j'imagine que vous partagez cette opinion. Il n'empêche que l'on constate que les collectivités locales ont, aujourd'hui, un rythme de dépenses qui est très supérieur au rythme des dépenses de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est normal : il y a un transfert de compétences.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

À partir du moment où il existe des relations financières, extraordinairement complexes, entre les collectivités locales et l'État – l'ensemble représente 85 milliards –, il est naturel de se poser la question de l'avenir du contrat. Celui-ci, arrivé à échéance depuis plusieurs années, est reconduit d'une année sur l'autre et porte sur à peu près 50 ou 55 milliards d'euros. Ne doit-on pas le revoir et rediscuter avec les collectivités territoriales ? Il met en jeu des sommes considérables, très utiles, certes, aux collectivités locales, mais qui pèsent sur nos déficits et qui font l'objet d'un jugement général au sens maastrichtien du terme comme d'ailleurs les dépenses sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est faux ! aucune collectivité n'est en déficit !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous devons donc engager un dialogue de responsabilité avec l'ensemble des exécutifs des collectivités territoriales pour parvenir à mieux réguler ces dépenses. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Cela signifie-t-il que vous allez nous étrangler, monsieur le ministre ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il est très important de le dire : nous ne parviendrons pas à tenir l'ensemble de nos engagements s'il y a des dépenses qui ne sont pas travaillées en concertation avec les responsables d'exécutif. Le Premier ministre reçoit en ce moment les responsables de collectivités territoriales, pour essayer de mieux redéfinir les relations entre les collectivités territoriales et l'État. Ce ne seront pas des réformes à la hussarde.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ce ne seront pas des réformes brutales. Ce seront des réformes concertées. Mais nous avons le droit et surtout le devoir de poser ce type de questions.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur Brard, vous avez indiqué que la douane avait décidé, ce qui m'a surpris, de ne pas financer des vedettes rapides. Comment voulez-vous lutter contre la fraude, avez-vous dit, si, en même temps, vous ne tenez pas vos engagements en ce qui concerne les moyens consacrés à la lutte contre la fraude ? Je puis vous assurer que nous allons, dès cette année, être livrés de deux patrouilleurs, les deux patrouilleurs auxquels vous faisiez référence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce qu'il faut pour être efficaces, ce sont des vedettes rapides, pas des patrouilleurs !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

En outre, cinq hélicoptères seront livrés dès cette année à la douane. Cela faisait très longtemps que la douane ne s'était pas vue dotée de ce type de moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ça, c'est pour le Club Med, ce n'est pas pour lutter contre la fraude !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je vous invite à venir constater, lorsque vous vous serez calmé, l'ensemble de ces nouveaux investissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il faut des interventions rapides pour lutter contre les truands qui sont en mer !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur de Courson, vous avez indiqué à plusieurs reprises, qu'il fallait gagner ce point de croissance supplémentaire, et je suis évidemment d'accord avec vous. Je n'oppose pas les mesures qui permettent de fluidifier le marché du travail, les mesures qui tendent à redonner du pouvoir d'achat ou de la confiance, ou celles qui recréent de la compétitivité dans nos entreprises. Des visions probablement un peu théoriques permettent de faire de la différence entre la compétitivité, la demande et l'offre, mais, en réalité, l'économie d'un pays, c'est un peu tout cela en même temps et c'est tout cela qu'il faut traiter.

Nous espérons atteindre le taux de croissance de 2,5 % que nous avons choisi pour 2008, et peut-être sera-t-il supérieur si l'économie française redémarre. En tout cas, nous essayons d'avoir une vision optimiste des choses.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Et si ce taux de croissance n'était pas atteint, cela ne constituerait pas pour autant une remise en cause de nos engagements en matière de réduction du déficit. En effet, ces engagements ont été très précisément calculés à partir d'une maîtrise des dépenses. Nous n'avons pas regardé d'un côté les recettes et de l'autre les dépenses, nous avons d'abord étudié les dépenses et tenté de les calibrer avec beaucoup de sérieux et de contraintes. Si l'activité venait à être moins forte que celle que nous prévoyons pour 2008, la maîtrise des dépenses nous permettrait de respecter les engagements de la France pour 2012, à la fois en matière de désendettement et d'équilibre de nos finances publiques – je tiens à le dire parce que ce n'est pas si évident. Parfois, on dit la croissance résoudra tout ; ce n'est pas du tout la politique du Gouvernement, qui est beaucoup plus prudente et vertueuse que cela.

En ce qui concerne les besoins des collectivités, monsieur de Courson, les entretiens qu'a actuellement le Premier ministre avec les responsables des collectivités locales doivent nous permettre de mettre en place un véritable dialogue de responsabilité, un nouveau pacte de travail en commun avec les collectivités locales.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je ne reviens pas sur le débat sur la norme élargie.

Vous appelez de vos voeux des réformes structurelles pour l'assurance maladie, je suis évidemment d'accord, parce que le déficit de l'assurance maladie est structurel. À déficit structurel, réforme structurelle. Nous devrons nous y engager comme l'ont fait d'autres avant nous parce que c'est un sujet en perpétuelle évolution. C'est normal, et ce sera comme ça encore pendant bien longtemps, compte tenu du vieillissement de la population et de la complexité des soins. Nous devrons également poursuivre l'effort entrepris en matière de maîtrise médicalisée des dépenses.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Évidemment, l'idée n'est pas d'avoir une maîtrise comptable des dépenses. Il s'agit de faire passer l'idée d'une maîtrise médicalisée des dépenses, mais dans un cadre de responsabilisation financière. Nous avons parlé jusqu'à présent des soins de ville, notamment avec le comité d'alerte, mais l'hôpital sera également concerné. Il est bien difficile aujourd'hui d'y travailler, car les 35 heures ont totalement désorganisé l'hôpital français.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce ne sont pas les 35 heures qui sont en cause, c'est l'absence de médecins !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous ferons face à cette situation avec Roselyne Bachelot.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je pense notamment à la création des agences régionales de santé et à l'extension de la T2A.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Et les promesses faites aux infirmières avant l'élection présidentielle !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ces réformes devraient nous permettre de tenir les 2 % en volume prévus par l'ONDAM sur les quatre prochaines années.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

M. Bertrand avait pris des engagements pour les infirmières !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Michel Bouvard a évoqué de manière très fine les dépenses de personnel. Il a bien raison de dire que l'augmentation des effectifs dans la fonction publique a été très importante. En réalité, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, en pourcentage de la fonction publique, demandera un effort relativement faible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ah oui, 50 % c'est faible ! Vous le direz au infirmières de nuit !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

La réorganisation des services et les efforts de productivité, ainsi que des efforts sur l'ensemble de l'organisation de la dépense publique devraient parfaitement permettre de faire face.

Je retiens l'idée de Michel Bouvard selon laquelle nous ne pouvons pas travailler sans tenir compte de ce qui se passe ailleurs – je pense notamment aux opérateurs. Je suis bien d'accord.

Monsieur Balligand, j'ai entendu votre grand discours sur les collectivités locales. Je sais bien qu'il faut parfois forcer ses propos pour être entendu, mais je regrette que vous ayez caricaturé nos intentions, comme l'a également fait M. Derosier. Nous ne stigmatisons pas les collectivités locales ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Nous demandons simplement que les transferts financiers en leur faveur suivent la même évolution que les dépenses de l'État.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est un objectif extrêmement vertueux que l'on peut tout à fait atteindre. Je ne vois pas pourquoi l'on ne ferait pas preuve d'une telle vertu ! Le volume de ces transferts est trop important pour que nous puissions les rayer d'un trait de plume ou les oublier totalement. Donc, s'il vous plaît, ne caricaturez pas notre position ! Ne stigmatisez pas les choses ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous proposons simplement d'appliquer aux transferts vers les collectivités locales, pour une partie des transferts d'État, la même norme que celle que l'État va s'imposer à lui-même. Ne dramatisez pas la question ! Nous souhaitons introduire plus de responsabilité et de clarté. Nous donnerons aux collectivités locales une visibilité très forte sur l'ensemble de leurs rapports avec l'État. Le Premier ministre a d'ailleurs appelé de ses voeux un nouveau pacte avec les collectivités locales.

Monsieur de Rugy, vous faites beaucoup de politique…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Certes, mais il y a la bonne et la mauvaise !

En tous cas, je ne suis pas sûr que vous ayez écouté tout mon discours dont une grande partie était consacrée aux questions que vous avez posées. Vous dites, en prenant l'exemple de votre propre collectivité – là encore c'est une caricature ! –, que vous ne voyez pas ce que l'on peut réduire à l'intérieur des politiques qui sont les vôtres. Oui, c'est vrai, il est très difficile de maîtriser la dépense publique ! Nous devrons faire, ensemble, beaucoup d'efforts pour montrer que les dépenses peuvent être en partie réduites, mieux maîtrisées, tout en conservant la qualité du service public. Des politiques anciennes devront parfois être abandonnées…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Les crèches, par exemple, ou les maisons de retraite !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…pour pouvoir en financer de nouvelles. Nous devons sans cesse remettre en question les euros dépensés sur le plan public, car si nous ne le faisons pas, nos enfants nous appelleront à beaucoup plus de rigueur. L'idée du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux représente à peu près 1 milliard d'euros en année pleine, donc 500 millions d'euros par an d'économie sur le budget de l'État. C'est aussi 500 millions qui seront basculés…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…vers les fonctionnaires eux-mêmes pour que l'on puisse avoir un dialogue plus responsable, plus approfondi, plus moderne avec l'ensemble de la fonction publique d'État, nous permettant d'améliorer leurs conditions de travail et leur pouvoir d'achat. La fonction publique d'État doit être revalorisée, comme les autres fonctions publiques. Je n'aime pas la façon dont on oppose systématiquement, dans les journaux, le secteur privé qui serait efficace et le secteur public qui ne le serait pas. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je pense que le secteur privé a parfois beaucoup de leçons à recevoir de la part du secteur public.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je suis pour un secteur public moderne, efficace et respectueux des finances publiques.

Quand je vous entends parler d'une « autre » politique publique, monsieur de Rugy, je ne peux que m'interroger. Cela fait vingt-cinq ans que l'on en parle ! L'autre politique, c'est celle qu'est en train de construire le Président de la République avec cette majorité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Deniaud nous appelle à la vigilance, et je suis d'accord avec lui. J'ai apprécié l'ensemble de son discours. Il nous appelle au sérieux et à l'investissement. Les dépenses de fonctionnement ont effectivement pris le pas sur l'investissement, et c'est inacceptable. L'État doit investir davantage dans les infrastructures, la formation, la recherche et l'université. La révision générale des politiques publiques devrait nous aider à dégager des marges de manoeuvre au sein des mille milliards d'euros de dépenses publiques annuelles et nous permettra donc d'être plus efficaces dans la gestion de cette dépense publique.

Je ne reviendrai pas sur les propos de M. Derosier. Je ne sais pas si l'existence d'un ministre délégué aux collectivités locales résoudrait complètement la question.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Mais vous avez déjà des interlocuteurs : le ministre de l'intérieur, qui est responsable des collectivités locales – vous admettrez que c'est un interlocuteur compétent de poids ! –,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Surtout depuis qu'elle a fait ses classes à la défense !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…le Premier ministre, qui a décidé de réunir l'ensemble des associations d'élus, et le Président de la République qui n'est évidemment pas insensible à ce type de question – comment d'ailleurs pourrait-il l'être lorsqu'il s'agit de nos collectivités territoriales ?

François Bayrou…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…trouve que la dépense publique est trop élevée. Je partage cette opinion. Le Président de la République a parfaitement indiqué avant l'élection ce qu'il entendait faire : nous nous sommes toujours engagés à restaurer l'équilibre des finances publiques avant la fin du quinquennat, et plus tôt encore si la croissance est au rendez-vous.

Dès lors que nous parviendrons à ramener de 2,25 % à 1,1 % le rythme annuel de croissance de la dépense publique, conformément aux objectifs du Gouvernement, qui seront inscrits dans le projet de loi de finances et dans l'ONDAM pour 2008, nous réaliserons 10 milliards d'euros d'économies par an. Nous n'aurons alors aucune difficulté pour respecter nos engagements européens et pour financer des politiques nouvelles liées à l'investissement, notamment en matière d'enseignement supérieur et de recherche, sujets dont nous aurons l'occasion de débattre dès cet été.

Comment élever notre taux de croissance ? C'est la question qu'a posée Daniel Garrigue. C'est celle que nous nous posons tous et à laquelle nous essayons de répondre avec un maximum de précisions. Le projet de loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat contribuera à cette accélération de la croissance. Il doit évidemment être accompagné d'une maîtrise de la dépense publique. Ce sont deux piliers indispensables qui vont ensemble. Nous devrons en même temps réfléchir à une réorganisation du marché du travail, au parcours professionnel, à la sécurité professionnelle personnalisée – sujets qui seront d'actualité à partir de la rentrée –, car c'est en permettant au travail de se développer que nous stimulerons la croissance.

La mission sur les freins à la croissance et au travail, qui a été confiée à Philippe Séguin, est extrêmement importante. Tout doit être fait pour accroître le volume de travail en France. Toutes nos politiques doivent poursuivre cet objectif. Nous devons augmenter le nombre d'heures travaillées pour accroître la richesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est ce que fait ce gouvernement, dans le cadre de l'Europe. Ce gouvernement défend également l'idée d'un véritable gouvernement économique au sein de l'Union européenne, que vous avez appelé de vos voeux, et dont les stratégies économiques et financières doivent être mises en cohérence. Cette idée est parfaitement portée par Christine Lagarde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Elle confond l'Assemblée avec un conseil d'administration !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous tiendrons les engagements souscrits dans le cadre du processus de Lisbonne, et je précise que nous avons l'intention de ratifier rapidement le protocole de Londres relatif aux brevets.

Béatrice Pavy a dit que le service public devait être efficace et qu'elle attendait beaucoup de la révision générale des politiques publiques. Il est très important que les parlementaires soient associés à cette révision. Peut-être y aura-t-il une réponse de droite et une autre de gauche, ou bien une « ouverture », mais il importe que le Parlement se saisisse sans tabous de cette démarche inédite dans notre pays. Nous aurons regardé l'ensemble de la dépense publique sur l'ensemble de la sphère publique avec beaucoup de détermination, sans tabous, avec des réponses et des décisions au plus haut niveau.

Monsieur Muet, je ne reviendrai pas sur le texte relatif au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat, dont vous allez poursuivre l'examen tout à l'heure, mais je tiens à rappeler que les mesures envisagées ne se limitent pas à l'amélioration du pouvoir d'achat. Elles vont beaucoup plus loin que cela. Grâce à la détaxation et à la défiscalisation des heures supplémentaires, il s'agit en effet de modifier le rapport des Français au travail. Il y a un problème quand on inculque depuis des années aux jeunes l'idée de travailler 35 heures, voire moins ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous devons systématiquement répéter à nos concitoyens que nous gagnerons plus si nous créons plus de richesses.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est la création de richesses qui fait le pouvoir d'achat, pas le contraire. Vous avez toujours envie de distribuer sans créer ; nous voulons distribuer en créant de la richesse, car c'est évidemment un préalable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Sans remettre en cause votre compétence, monsieur Muet, vous rejetez notre politique au nom de votre vision de l'économie, mais beaucoup d'économistes se sont trompés jusqu'à présent. J'espère que l'avenir vous donnera tort !

S'agissant des redéploiements financiers souhaités par M. Hénart, il est vrai que nous devrons stabiliser les dépenses de l'État. La seule dynamique que je n'apprécie pas, c'est celle des dépenses. J'appelle également à une refonte des relations entre l'État et les collectivités locales dans un cadre partenarial. Nous avons la maturité nécessaire : il faut maintenant maîtriser la dépense dans l'ensemble du secteur public. Je rappelle enfin mon attachement à la spécificité de notre système de sécurité sociale, dont les différentes branches peuvent continuer, dans un cadre maîtrisé, à avoir la capacité de se financer.

Enfin, je suis d'accord avec Jean-François Lamour : nous devons nous interroger sur l'ensemble des politiques publiques. Comme je l'ai dit à Béatrice Pavy, nous devons nous efforcer d'atteindre tous les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés, à commencer par la maîtrise des finances publiques. Ce ne sera pas le travail du seul Gouvernement, mais aussi celui de tous les citoyens de notre pays, car cela implique une modification du rapport à la dépense publique : chaque euro dépensé doit être justifié et efficace. Ce n'est pas un débat entre la droite et la gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous vous faites pourtant l'apôtre du grand capital !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est, à mon avis, un débat moral. Et je vous remercie d'y contribuer si largement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Nous avons terminé le débat d'orientation budgétaire.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 4, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat :

Rapport, n° 62, de M. Gilles Carrez, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan,

Avis, n° 61, de M. Dominique Tian, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 59, de M. Jean-Charles Taugourdeau, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire,

Avis, n° 58, de M. Sébastien Huyghe, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Jean-Pierre Carton