Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 22 juin 2010 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • bettencourt

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

En rendant hier son rapport annuel pour 2009, le président de l'Autorité des marchés financiers, Jean-Pierre Jouyet, a déclaré que l'absence d'un véritable régulateur européen des marchés financiers signifierait « que nous avons perdu la bataille de la régulation ».

L'heure d'actions concrètes au niveau mondial en matière de régulation bancaire et financière semble avoir enfin sonné !

Pour autant, il n'y a toujours pas de projet de véritable régulation européenne. Le seul exemple de la décision prise par l'Allemagne d'interdire les ventes à découvert à nu en témoigne.

Au groupe Nouveau Centre, nous pensons que de telles mesures n'ont de sens que si elles sont prises par l'ensemble des pays de l'Union européenne.

Nous avons d'ailleurs proposé la création d'une agence européenne de notation et demandé une taxation européenne du secteur bancaire. Cette solution combinerait le double avantage de ne pas pénaliser nos propres entreprises de crédit et d'être plus aisément applicable qu'une taxe internationale.

C'est la raison pour laquelle nous souhaitons la création, sans délai, d'un véritable régulateur européen, doté de réels pouvoirs, c'est-à-dire capable d'arbitrer entre les différents régulateurs nationaux et de superviser les acteurs transnationaux. C'est le seul moyen de protéger les épargnants et d'éviter les dérives auxquelles nous avons assisté.

Le Gouvernement français va-t-il demander à ses partenaires européens, et en particulier à l'Allemagne, de mettre en place une agence européenne de régulation des marchés financiers dotée de réels pouvoirs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le député, je vous prie d'excuser l'absence de Mme Lagarde. Retenue au Sénat, elle m'a demandé de vous apporter les éléments de réponse suivants :

La France a toujours été, depuis le début de cette crise, aux avant-postes pour la régulation financière. Ainsi, sous l'impulsion de la présidence française de l'Union européenne, les agences de notation dont vous avez parlé devront, à compter du 7 décembre de cette année, être agréées et contrôlées au niveau européen.

En outre, le projet de loi de régulation bancaire et financière, actuellement en discussion au Parlement, donne pouvoir à l'Autorité des marchés financiers pour sanctionner ces agences de notation si nécessaire.

Mais ce projet de loi prévoit également, et vous y avez fait allusion, des mesures fortes d'encadrement des ventes à découvert pour imposer la transparence sur ces ventes à découvert.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le député, je vous prie d'excuser l'absence de Mme Christine Lagarde ; retenue au Sénat, elle m'a demandé de vous apporter les éléments de réponse suivants :

La France a toujours été, depuis le début de cette crise, aux avant-postes pour la régulation financière. Ainsi, sous l'impulsion de la présidence française de l'Union européenne, les agences de notation dont vous avez parlé devront, à compter du 7 décembre de cette année, être agréées et contrôlées au niveau européen.

En outre, le projet de loi de régulation bancaire et financière, actuellement en discussion au Parlement, donne pouvoir à l'Autorité des marchés financiers pour sanctionner ces agences de notation si nécessaire.

Mais ce projet de loi prévoit également, et vous y avez fait allusion, des mesures fortes d'encadrement des ventes à découvert pour imposer la transparence sur ces ventes à découvert.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Des dispositions sont également prévues pour interdire ces ventes, comme en Allemagne, en cas de circonstances exceptionnelles.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Vous le voyez, monsieur le député, ce travail est conduit en parfaite coordination avec nos partenaires européens. C'est le sens de la lettre que le Président de la République a encore récemment adressée, avec la Chancelière allemande, au président Barroso.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Vous évoquez enfin la mise en oeuvre de la réforme de la supervision. Ce dispositif, que la France a proposé, se met en place au niveau européen avec la création d'un comité européen du risque systémique, mais également au niveau des acteurs du secteur financier, avec la création de trois nouvelles autorités européennes de surveillance : une pour les banques, une pour les assurances et la troisième pour les marchés. Nous mettons tout en oeuvre avec nos partenaires allemands pour que les discussions aboutissent entre le Conseil et le Parlement européen afin que ce dispositif soit opérationnel au début de l'année 2011. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Asensi, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de François Asensi

Ma question s'adresse à M. Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Ce jeudi 24 juin, les Français exprimeront dans la rue leur refus d'une réforme des retraites symbole d'injustice et de recul civilisationnel.

Debut de section - PermalienPhoto de François Asensi

Cette mobilisation massive et unitaire sera un cri de résistance aux diktats du MEDEF et des marchés financiers, qui veulent faire payer aux salariés une crise qu'ils ont déclenchée.

Par un renversement suspect des valeurs, la droite se fait championne d'un égalitarisme qui signifie, pour elle, le nivellement vers le bas. Mais, face aux disparités du salariat, votre obsession d'un traitement uniforme pour tous est le plus sûr chemin vers l'aggravation des inégalités.

Où est la justice quand ceux qui ont exercé les métiers les plus pénibles cotiseront, malgré une espérance de vie inférieure de sept ans, pendant quarante-quatre années ?

Où est la justice quand les 31 % de femmes cantonnées au temps partiel devront partir à soixante-sept ans, tout comme les 40 % de jeunes au chômage dans les quartiers difficiles ?

L'équité, c'est la contribution de chacun selon ses moyens. Où voyez-vous l'équité dans le financement de votre réforme ? Les salariés appauvris par la crise, les fonctionnaires que vous sanctionnerez doublement en gelant demain leurs salaires, supporteront 85 % de son coût.

Les entreprises et les revenus de la finance, qui ont pourtant bondi de 143 % en dix-sept ans, fourniront le dérisoire complément, une aumône.

Pour les parlementaires communistes et du Parti de gauche, le départ à soixante ans est une avancée sociale. La proposition de loi que nous allons déposer démontrera que son maintien est financièrement supportable en mettant les revenus du capital à contribution.

Ne laissons pas bafouer ce droit de l'homme : le droit fondamental à disposer d'une séquence de vie libérée du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Monsieur le député, notre réforme est une réforme juste (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC), je l'ai dit à plusieurs reprises, et je conteste la façon dont vous la présentez.

La réforme des retraites, ce n'est pas une question de marchés ; c'est une question de sauvetage du système par répartition. Ce n'est pas autre chose ! Aujourd'hui, le système par répartition n'est plus financé ; nous avons, année après année, des dettes sur les retraites, et le Conseil d'orientation des retraites a montré que, si ces dettes sont cette année de 30 milliards, elles passeront à 40, 45, voire 50 milliards. Or, il n'est évidemment pas possible de payer les retraites des Français à partir de l'endettement.

Il faut donc réformer nos systèmes de retraite. Et nous le faisons en prenant en compte ceux qui ont commencé à travailler très jeunes. Pour ceux qui ont commencé à travailler à quatorze ans, à quinze ans ou à seize ans, c'est la réforme opérée par François Fillon en 2003 qui s'applique, et nous maintenons ses dispositions. Mais nous intégrons aussi ceux qui ont commencé à travailler à dix-sept ans, nous prenons en compte la pénibilité, c'est-à-dire le fait d'être usé physiquement,…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

…dans sa chair, par un métier, une posture, un facteur d'exposition à des risques, et nous donnons la retraite à soixante ans à ceux qui ont été mis dans de telles conditions. Comme ceux qui ont commencé à travailler jeunes, ils partiront à soixante ans ou avant.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Cette réforme est profondément juste également (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC) parce qu'elle fait appel à tous. Elle fait appel à des recettes nouvelles, à l'augmentation de l'impôt sur le revenu, aux prélèvements fiscaux libératoires sur les dividendes. Tout cela forme un ensemble cohérent dont nous pouvons être fiers. Le Président de la République nous a appelés à réfléchir encore sur la pénibilité, les carrières longues ou les polypensionnés. Nous continuerons évidemment à le faire jusqu'au mois de septembre. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Couve

Monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, le département du Var, comme vous le savez, a été cruellement frappé, la semaine dernière, par des orages d'une violence aussi exceptionnelle qu'inattendue et qui ont touché la plupart des communes de neufs cantons du département.

C'est un véritable drame qu'ont vécu et que subissent encore les Varois. Dans ma circonscription, le pays de Draguignan et le coeur du département ont été particulièrement sinistrés : jusqu'à 400 millimètres d'eau se sont abattus en quelques heures, soit plus du tiers de la pluviométrie annuelle moyenne.

Des trombes d'eau et des torrents de boue ont dévalé des collines et des rues ravageant bâtiments, habitations et terrains agricoles et, surtout, tuant sur leur passage. Dans les quatrième et cinquième circonscriptions, on déplore aujourd'hui vingt-neuf morts et disparus. Je tiens à exprimer toute ma considération, ma sympathie et mes condoléances attristées aux familles endeuillées.

Face à ce désastre aussi violent que soudain, les secours se sont déployés avec une grande promptitude malgré les très difficiles conditions d'intervention. Un remarquable élan de solidarité s'est manifesté de la part de toute la population et je tiens à saluer l'action des services de l'État qui, sous la conduite du préfet du Var et de la sous-préfète de l'arrondissement de Draguignan, ont conduit les opérations de secours.

Dès les premières heures, l'armée s'est mobilisée de façon massive ; 860 militaires sont intervenus et sont encore sur le terrain. Pas moins de 1 300 hélitreuillages ont été effectués en opérations diurnes et nocturnes, sauvant un grand nombre de personnes. Nos pompiers sauveteurs, les forces de l'ordre, les fonctionnaires municipaux, les services du conseil général, les agents d'EDF, des compagnies des eaux, de France Télécom, la Croix-Rouge, tous se sont, dès les premières heures, engagés avec un grand dévouement. Je tiens à les en remercier très chaleureusement.

Je remercie aussi le Président de la République et vous-même, monsieur le ministre, qui êtes venu sur le terrain manifester votre sollicitude. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour nous venir en aide ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Monsieur le député, le 14 juin dernier, Météo-France plaçait onze départements du Sud-Est en état de vigilance « orange » et, effectivement, quelques heures plus tard, des orages d'une violence inouïe se sont abattus sur plusieurs cantons du département du Var. Vingt-cinq personnes ont trouvé la mort et trois sont encore portées disparues. Comme l'a fait hier le Président de la République en présence de Jean-Louis Borloo et d'Hubert Falco, je tiens à saluer leur mémoire et à exprimer notre peine à leurs familles.

Il y a eu une forte mobilisation de l'État et des collectivités locales. Le ministère de l'intérieur et celui de la défense ont déployé 1 600 pompiers, 16 hélicoptères, 370 policiers et gendarmes chargés d'empêcher des actes de vandalisme ou de vol.

De plus, des mesures très concrètes ont été décidées par le Président de la République et le Premier ministre.

Première mesure : le déblocage de 2 millions d'euros de crédits d'extrême urgence, qui ont d'ores et déjà bénéficié à 98 familles – 200 dossiers étant en cours d'instruction.

Deuxième mesure : la publication, ce matin même, de l'arrêté de reconnaissance d'état de catastrophe naturelle pour les communes des neufs cantons les plus sinistrés. Si d'autres communes devaient être concernées, des instructions ont été données pour que cela se fasse le plus rapidement possible.

Enfin, les délais de déclaration de sinistre ont été allongés, et des allégements de charges sociales et fiscales seront attribués aux entreprises sinistrées.

Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement met tout en oeuvre pour aider à la fois les collectivités et les populations à l'indispensable reconstruction. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean Mallot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, la presse nous apprend que Mme Bettencourt, deuxième fortune de France (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), a décidé de « procéder à la régularisation de l'ensemble de ses avoirs placés à l'étranger », dans des paradis fiscaux. Il s'agirait de comptes, en Suisse notamment, et de la propriété d'une île aux Seychelles ; mais on ne sait pas tout.

Allez-vous, monsieur le ministre, faire une analyse complète de la situation fiscale de Mme Bettencourt ? La fortune de l'intéressée est estimée à une vingtaine de milliards d'euros. Même mal géré, un tel capital doit produire au moins un milliard de revenu annuel. Mme Bettencourt précise qu'elle a payé, au cours des dix dernières années, 400 millions d'euros d'impôt, soit 40 millions par an. Ce qui fait un taux d'imposition de 4 %... Difficile de faire moins. Plus fort que le bouclier fiscal !

Je ne sais pas si Mme Bettencourt était présente en décembre dernier à l'hôtel Bristol lorsque le Président Sarkozy, Président de la République et président de l'UMP, et M. Woerth, trésorier de l'UMP, ont reçu les soutiens financiers de ce parti pour les remercier. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Elle aurait pu donner des leçons d'optimisation fiscale à ses collègues généreux donateurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, la presse nous apprend que Mme Bettencourt, deuxième fortune de France (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), a décidé de « procéder à la régularisation de l'ensemble de ses avoirs placés à l'étranger », dans des paradis fiscaux. Il s'agirait de comptes, en Suisse notamment, et de la propriété d'une île aux Seychelles ; mais on ne sait pas tout.

Allez-vous, monsieur le ministre, faire procéder à une analyse complète de la situation fiscale de Mme Bettencourt ? Sa fortune est estimée à une vingtaine de milliards d'euros. Même mal géré, un tel capital doit produire au moins un milliard de revenu annuel. L'intéressée précise qu'elle a payé au cours des dix dernières années 400 millions d'euros d'impôt, soit 40 millions par an. Ce qui fait un taux d'imposition de 4 %... Difficile de faire moins… C'est encore plus fort que le bouclier fiscal !

Je ne sais pas si Mme Bettencourt était présente en décembre dernier à l'hôtel Bristol lorsque le Président Sarkozy, Président de la République et président de l'UMP, et M. Woerth, trésorier de l'UMP, ont reçu leurs soutiens financiers pour les remercier. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Elle aurait pu donner des leçons d'optimisation fiscale à ses collègues généreux donateurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

La décision de Mme Bettencourt de régulariser sa situation fiscale n'a pas été prise de son plein gré, mais sous la pression des médias. Par ailleurs, le dispositif de régularisation mis en place l'an dernier par le ministre Woerth – encore lui – prévoyait une date limite de rapatriement des comptes au 31 décembre 2009. Mme Bettencourt est donc a priori passible de sanctions fiscales et pénales.

Monsieur le ministre du budget, pouvez-vous nous assurer qu'en l'occurrence, la loi s'appliquera dans toute sa rigueur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Courage, Fillon !

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Courage Fillon !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le député, le ministre du budget aura certainement au cours de cette séance l'occasion de répondre précisément à votre question, mais je voudrais reprendre certains de ces sous-entendus.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Il n'y a pas de sous-entendus, il y a une question !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Nous avons tous ici, hommes publics, un devoir d'exemplarité. Sur le chemin de l'exemplarité et de la transparence, depuis le début de la République, les uns et les autres, nous avons fait des progrès.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Je voudrais rappeler qu'il n'y a pas si longtemps que les fonds secrets servaient encore à financer les revenus des membres du Gouvernement, de gauche comme de droite. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je veux rappeler qu'il n'y a pas si longtemps que la présidence de la République, celle de Charles de Gaulle, celle de François Mitterrand ou celle de Jacques Chirac, ne faisait l'objet d'aucun contrôle financier.

Nous avons fait des progrès, mais nous avons encore des progrès à faire.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

J'aurai l'occasion, dans les prochains jours, avec le Président de la République, de prendre de nouvelles décisions dans cette direction.

Sur ce chemin de la transparence et de l'exemplarité, il y a aussi eu des défaillances. Ces défaillances doivent être sanctionnées fermement.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Enfin, sur ce chemin, il y a un long cortège de dénonciations anonymes, de calomnies, de corbeaux, de petits calculs politiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Pour ma part, depuis le début de ma vie publique, je me suis toujours interdit de hurler avec les loups. Je n'ai jamais accepté de jeter aux chiens l'honneur d'un homme politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) D'ailleurs, lorsque Dominique Strauss-Kahn a été injustement accusé en 1999, j'ai pris publiquement sa défense, parce que les procès instruits sur la rumeur, ce n'est pas ma conception de la République, ce n'est pas ma conception de la démocratie, ce n'est pas ma conception de l'honneur. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ceux qui, sur la base de quelques informations non vérifiées, glanées ici où là dans la presse, s'érigent en procureurs, ceux-là manquent aux lois fondamentales de notre République, celles qui protègent la dignité et la liberté de chacun d'entre nous, comme l'a si bien écrit François Mitterrand.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Éric Woerth est un homme intègre. Éric Woerth n'a commis aucune faute. Éric Woerth n'a donné aucune instruction concernant la situation fiscale de Mme Bettencourt (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Éric Woerth sera sans doute l'un des ministres de la Ve République qui aura le plus fait pour lutter contre la fraude fiscale et contre les paradis fiscaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Éric Woerth a toute ma confiance, et j'ajoute aujourd'hui devant vous : toute mon amitié, dans l'épreuve qu'il traverse. Je ne laisserai pas son honneur traîné dans la boue pour quelques misérables petits calculs politiques. Je ne laisserai pas la démocratie s'égarer sur le chemin des règlements de compte. (Les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement.)

Affaire Bettencourt

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Ma question s'adressait initialement à Mme la garde des sceaux. Elle vise à progresser sur le chemin de moralisation de la vie politique, auquel vient de faire allusion M. le Premier ministre.

Les faits dont il est question concernent la même affaire et visent à l'appréhender sous un autre angle. Les faits ne semblent pas contestés, non plus que le contenu des écoutes.

Les faits sont les suivants : de mai 2009 à mai 2010, le maître d'hôtel de Mme Bettencourt a procédé à des enregistrements secrets des conversations qu'elle avait avec son conseiller financier. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Fin mai 2010, il a remis ces enregistrements à Mme Françoise Bettencourt, fille de Liliane Bettencourt, étant précisé que la mère et la fille s'opposent à propos d'un héritage.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Début juin 2010, Mme Françoise Bettencourt remet ces enregistrements à la police. Le 14 juin 2010, une enquête est ouverte pour atteinte à la vie privée, et en conséquence, le maître d'hôtel et l'informaticien qui a gravé les disques sont mis en garde à vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Or l'écoute des propos tenus, et notamment ceux de M. de Maistre, permet de penser qu'une fraude massive a été commise. Or il semble qu'à ce jour aucune poursuite n'ait été engagée pour cette fraude fiscale massive.

Cela amène plusieurs questions. La fraude fiscale est punie beaucoup plus sévèrement que l'atteinte à la vie privée et il ne semble pas y avoir eu d'enquête. Ma première question est donc de savoir s'il est exact qu'il n'y a pas eu d'enquête, et que la réactivité dont il a été fait preuve à l'encontre du maître d'hôtel n'a pas été la même à l'encontre de ceux que l'on pourrait soupçonner de fraude fiscale ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Or l'écoute des propos tenus, et notamment ceux de M. de Maistre, permet de penser qu'une fraude massive a été commise. Or, à ce jour, aucune poursuite n'a apparemment été engagée à ce titre.

Cela amène plusieurs questions. La fraude fiscale est punie beaucoup plus sévèrement que l'atteinte à la vie privée et il ne semble pas y avoir eu d'enquête. Ma première question est donc de savoir s'il est exact qu'il n'y a pas eu d'enquête, et que la réactivité dont il a été fait preuve à l'encontre du maître d'hôtel n'a pas été la même à l'encontre de ceux que l'on pourrait soupçonner de fraude fiscale ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Deuxième question : va-t-il y avoir des poursuites ou des instructions en vue de l'ouverture d'une information ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Voulez-vous que je vous dise, monsieur le député, ce que je pense de tout cela ? C'est immonde, et c'est ignoble. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Jamais mon épouse n'a eu besoin de moi pour trouver un travail. Jamais je ne suis intervenu pour qu'elle en ait un. Jamais ni elle ni moi n'avons été informés d'une quelconque fraude ou évasion fiscale. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Le rôle de ma femme était de placer les dividendes de la société L'Oréal versés chaque année à Mme Bettencourt, épouse d'André Bettencourt, ministre du général de Gaulle, en toute transparence et en toute légalité.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Ce n'est pas la question !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Personne n'a parlé de cela ! Répondez à la question !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Jamais, je dis bien jamais, je n'ai donné la moindre instruction aux services fiscaux concernant la situation de Mme Bettencourt ou celle de L'Oréal. Mon intégrité, comme celle de mon épouse Florence, est totale. Je suis le ministre du budget qui a doté le fisc d'une police fiscale. Je suis le ministre qui s'est le plus investi dans la lutte contre les paradis fiscaux.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Répondez à la question !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Je suis le ministre qui a pris tous les coups pour lutter contre les paradis fiscaux, contre l'évasion fiscale, notamment en Suisse. Jamais mon épouse ou moi-même n'avons été mêlés de près ou de loin au procès qui oppose les membres de la famille Bettencourt. Oui, la femme d'un ministre peut exercer son métier. Il n'y a pas de conflit d'intérêt, parce que tout simplement ni mon épouse ni moi n'avons d'intérêt dans cette affaire, et je l'assume.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Comment pouvez-vous prendre sans aucune distance des informations relayées par un site Internet dans un but commercial, et peut-être même politique ? La vérité est que je n'ai rien à me reprocher, absolument rien, je suis la bonne cible au bon moment.

Monsieur le député, dans un discours important, le Président Mitterrand parlait des chiens : faites attention de ne pas en devenir un. ((Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Comment pouvez-vous prendre sans aucune distance des informations relayées par un site Internet dans un but commercial, et peut-être même politique ? La vérité est que je n'ai rien à me reprocher, absolument rien, je suis la bonne cible au bon moment.

Monsieur le député, dans un discours important, le Président Mitterrand parlait des chiens : prenez garde à ne pas en devenir un. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Chers collègues, permettez-moi, avant que je pose pour la première fois une question au Gouvernement dans cet hémicycle, d'avoir une pensée émue et affectueuse pour Henri Cuq à qui j'ai l'honneur de succéder. Mes pensées vont naturellement à son épouse et à ses enfants. (Applaudissements.)

Monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, vous avez présenté, mercredi dernier, le projet de réforme du Gouvernement pour sauvegarder notre système de retraite par répartition.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Il comporte un ensemble de mesures pour ramener notre système de retraite à l'équilibre dès 2018, tout en veillant à le rendre juste et solidaire. Ainsi, en augmentant progressivement l'âge de la retraite, qui doit atteindre 62 ans en 2018, il appréhende le problème à sa racine : la démographie.

L'équité du système sera assurée et renforcée par des mesures de recettes ciblées, ainsi que par une plus grande convergence entre le public et le privé.

Enfin, pour que l'effort soit réparti de manière équilibrée entre tous les Français, vous avez introduit un certain nombre de mécanismes, concernant la pénibilité, la protection des retraites des futures mères, la prise en compte des jeunes en situation précaire.

Le Président de la République vous a demandé vendredi de lui proposer, d'ici au début de nos débats en septembre, des évolutions sur quelques points de cette réforme. Pouvez-vous nous dire quelles sont ces évolutions et comment elles s'articuleront avec les travaux du Parlement ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Il comporte un ensemble de mesures pour ramener notre système de retraite à l'équilibre dès 2018, tout en veillant à le rendre juste et solidaire. Ainsi, en augmentant progressivement l'âge de la retraite, qui doit atteindre soixante-deux ans en 2018, il appréhende le problème à sa racine : la démographie.

L'équité du système sera assurée et renforcée par des mesures de recettes ciblées, ainsi que par une plus grande convergence entre le public et le privé.

Enfin, pour que l'effort soit réparti de manière équilibrée entre tous les Français, vous avez introduit un certain nombre de mécanismes, concernant la pénibilité, la protection des retraites des futures mères, la prise en compte des jeunes en situation précaire.

Le Président de la République vous a demandé vendredi de lui proposer, d'ici au début de nos débats en septembre, des évolutions sur quelques points de cette réforme. Pouvez-vous nous dire quelles sont ces évolutions et comment elles s'articuleront avec les travaux du Parlement ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Madame la députée, permettez-moi de me joindre à votre évocation du souvenir d'Henri Cuq.

Comme vous le savez, le Président de la République et le Premier ministre m'ont demandé – ainsi qu'à Georges Tron, qui se trouve en ce moment au Sénat – de poursuivre la réflexion, les concertations et les négociations relatives à l'évolution de notre système de retraite. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Le texte que nous avons élaboré au terme d'une longue procédure de concertation et de dialogue est efficace : il permet de répondre au déficit des retraites dès 2018. C'est aussi un texte juste, qui prend en compte ceux qui ont commencé à travailler tôt et ceux qui ont exercé des métiers pénibles. Il prend aussi en compte la situation particulière des femmes ou des travailleurs agricoles. Il s'agit d'un texte réellement équilibré, juste et raisonnable.

Le Président de la République nous a demandé de poursuivre dans cette voie et, avant que le projet de loi ne soit examiné par l'Assemblée nationale à partir du 6 septembre, de continuer la réflexion dans trois domaines.

Tout d'abord, en ce qui concerne les carrières longues, nous devons, si c'est possible, essayer d'améliorer encore le texte qui sera présenté à la commission d'ici à la fin du mois de juillet.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Lefait

Inutile ! Il est parfait, ce texte ! (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Ensuite, nous devons voir comment améliorer le dispositif relatif à la pénibilité. Ce point est extrêmement important, et il nous faut veiller à ne pas créer des usines à gaz où personne ne se retrouverait.

Enfin, le Président de la République nous a demandé de nous intéresser aux polypensionnés, c'est-à-dire à ceux qui ont cotisé à plusieurs caisses au cours de leur carrière.

Nous allons donc poursuivre notre réflexion sur ces trois sujets et, éventuellement, renforcer notre texte. Nous le ferons en toute concertation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Yves Cochet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, l'Assemblée commencera la semaine prochaine l'examen du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche.

La semaine dernière, lors de la réunion de la commission saisie au fond, une cinquantaine de députés UMP ont déposé un amendement facilitant l'installation d'élevages industriels de porcs ou de volailles. La commission a adopté cet amendement contre l'avis de l'opposition – ce qui, me direz-vous, est bien normal –, mais, surtout, contre celui du Gouvernement.

Vous avez alors indiqué, comme en fait foi le compte rendu des travaux de la commission, que le Gouvernement avait deux raisons de fond de s'opposer à cet amendement. Tout d'abord, selon vos propres paroles, ce serait donner un signal négatif en matière de protection de l'environnement, car cela pourrait favoriser les pollutions et, notamment, la prolifération des algues vertes contre laquelle le Gouvernement a proposé un plan doté de 120 millions d'euros. Le Premier ministre s'est d'ailleurs rendu en personne à Saint-Michel-en-Grève l'an dernier.

Ensuite, vous avez indiqué que la multiplication par quatre des concentrations d'élevages de porcs ou de volailles risquait de concentrer aussi la pollution, alors même qu'un contentieux relatif aux nitrates existe d'ores et déjà avec la Commission européenne.

Monsieur le ministre, déposerez-vous la semaine prochaine un amendement pour supprimer la disposition adoptée en commission ? Êtes-vous toujours opposé à cette mesure qui favorise la concentration des porcs et des volailles, ainsi que la pollution et la prolifération des algues vertes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Monsieur le député, revenons, si vous le permettez, au problème de fond soulevé par les députés de la majorité qui ont déposé l'amendement adopté la semaine dernière en commission.

Il existe actuellement un écart de compétitivité entre les producteurs de porcs français et allemands ; le problème est là. Cet écart repose sur deux difficultés que nous essayons de traiter dans le cadre du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, grâce à la discussion et au compromis, dans un esprit de dialogue que je tiens d'ailleurs à souligner.

Tout d'abord, dans la filière porcine, se pose la question des délais nécessaires pour obtenir une autorisation d'exploitation. Ces délais, beaucoup trop longs, sont aujourd'hui en France de deux à trois ans. Le projet de loi permettra de les réduire à un an.

La deuxième question est celle du régime français d'autorisation, par rapport au régime allemand. En France, les exploitations sont soumises à ce régime dès qu'elles dépassent 450 porcs ; en Allemagne, la règle ne s'applique qu'à partir de 2 000 porcs. Tel est le problème qu'ont voulu soulever, à juste titre, Marc Le Fur, Michel Raison et Antoine Herth, coauteurs de l'amendement adopté par la commission. Je rappelle que chaque éleveur soumis à un régime d'autorisation doit sortir 15 000 euros supplémentaires de sa poche pour mettre son exploitation aux normes.

La position du Gouvernement n'a aucune raison de changer. Nous ne voulons rien faire qui puisse remettre en cause les choix environnementaux défendus par Jean-Louis Borloo comme par le Premier ministre, ni les efforts faits par l'ensemble des exploitants de porcs, en particulier en Bretagne, pour protéger l'environnement, mais nous devons régler ce problème de compétitivité.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Trouver un compromis par rapport aux attentes des éleveurs de porc, c'est ce à quoi je vous invite dans les jours à venir. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Fernand Siré, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Fernand Siré

Monsieur le ministre de l'alimentation de l'agriculture et de la pêche, la prochaine réforme des retraites suscite de vives préoccupations chez les agriculteurs. Alors que nous nous apprêtons à examiner, la semaine prochaine, le projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, très attendu par les professionnels dans ce contexte de crise, et au moment où le Gouvernement engage une réflexion et une concertation sur le devenir et la pérennité de notre système de retraite par répartition, il est essentiel d'aboutir à un système qui permette une revalorisation, indispensable, des retraites agricoles.

En effet, les pensions des agriculteurs sont en moyenne inférieures de 30 % à celles des salariés du régime général. Ainsi un exploitant agricole ayant une carrière complète touche en moyenne une retraite de base de 700 euros et son conjoint 450 euros. La faiblesse de ces pensions découle principalement du niveau peu élevé des revenus agricoles : 70 % des agriculteurs ont en effet un revenu inférieur au SMIC. Qui plus est, leurs pensions sont calculées en fonction non des vingt-cinq meilleures années, comme c'est le cas dans le régime général, mais de l'ensemble de la carrière : du coup, les bonnes années comme les mauvaises entrent dans le calcul. Les pensions sont donc tirées vers le bas lors des mauvaises années agricoles, que celles-ci soient dues aux aléas climatiques, aux crises sanitaires ou aux variations des marchés. Se pose en outre le problème des carrières incomplètes ou en pointillés, cas très fréquents dans la profession, notamment pour les conjoints.

Aussi, monsieur le ministre, comme vous l'ont exposé les représentants de la profession que vous avez reçus avec M. Woerth, le 11 mai dernier, les agriculteurs souhaiteraient-ils que le calcul de leur retraite s'adosse sur celui du régime général et notamment qu'il se fonde sur les vingt-cinq meilleures années. Il est vrai, et nous le saluons, que des mesures de revalorisation des retraites agricoles ont été instaurées depuis 2009 ; mais pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur les prochaines avancées en la matière ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Fernand Siré

Monsieur le ministre de l'alimentation de l'agriculture et de la pêche, la prochaine réforme des retraites suscite de vives préoccupations chez les agriculteurs. Alors que nous nous apprêtons à examiner, la semaine prochaine, le projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, très attendu par les professionnels dans ce contexte de crise, et au moment où le Gouvernement engage une réflexion et une concertation sur le devenir et la pérennité de notre système de retraite par répartition, il est essentiel d'aboutir à un système qui permette une revalorisation, indispensable, des retraites agricoles.

Les pensions des agriculteurs sont en moyenne inférieures de 30 % à celles des salariés du régime général. Ainsi un exploitant agricole ayant une carrière complète touche en moyenne une retraite de base de 700 euros et son conjoint 450 euros. La faiblesse de ces montants découle principalement du niveau peu élevé des revenus agricoles : 70 % des agriculteurs ont en effet un revenu inférieur au SMIC. Qui plus est, leurs pensions sont calculées en fonction non des vingt-cinq meilleures années, comme c'est le cas dans le régime général, mais de l'ensemble de la carrière : du coup, les bonnes années comme les mauvaises entrent dans le calcul. Les pensions sont donc tirées vers le bas lors des mauvaises années agricoles, que celles-ci soient dues aux aléas climatiques, aux crises sanitaires ou aux variations des marchés. Se pose en outre le problème des carrières incomplètes ou en pointillés, cas très fréquents dans la profession, notamment pour les conjoints.

Aussi, monsieur le ministre, comme vous l'ont exposé les représentants de la profession que vous avez reçus avec M. Woerth, le 11 mai dernier, les agriculteurs souhaiteraient-ils que le calcul de leur retraite s'adosse sur celui du régime général et notamment qu'il se fonde sur les vingt-cinq meilleures années. Il est vrai, et nous le saluons, que des mesures de revalorisation des retraites agricoles ont été instaurées depuis 2009 ; mais pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur les prochaines avancées en la matière ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Monsieur le député, nous voulons, avec Éric Woerth et le Premier ministre, poursuivre la revalorisation des retraites agricoles engagée, notamment pour les conjoints, en 2009 et 2010. Nous avons reçu, Éric Woerth et moi, l'ensemble des organisations syndicales agricoles représentatives, afin d'écouter leurs préoccupations et de leur répondre. Le projet présenté par Éric Woerth apporte une réponse, me semble-t-il, à toutes ces préoccupations.

S'agissant de la situation des conjoints et des femmes d'agriculteurs, le projet supprime la condition de délai pour ouvrir un droit à pension : celle-ci pénalise durement les femmes d'agriculteurs, qui se retrouvent dans une situation inacceptable. Nous apportons donc une réponse à cette première difficulté.

La deuxième difficulté concerne la reprise sur succession, qui fait peur à un bon nombre d'exploitants agricoles incapables de bénéficier de la retraite agricole minimale. Nous allons donc exclure de la reprise sur succession l'ensemble des bâtiments et des terres agricoles, de façon à ce que chaque agriculteur puisse ouvrir son droit au minimum vieillesse.

Enfin, conformément aux attentes des représentants agricoles, nous sommes prêts à examiner le calcul de la pension agricole sur la base des vingt-cinq meilleures années. Nous allons engager les travaux techniques sur ce sujet afin de répondre aux préoccupations exprimées par les exploitants.

J'estime que le volet agricole du texte présenté par Éric Woerth est à l'image de la réforme des retraites défendue par l'ensemble du Gouvernement : il est juste, équitable et il répond concrètement aux préoccupations des agriculteurs français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Monsieur le député, nous voulons, avec Éric Woerth et le Premier ministre, poursuivre la revalorisation des retraites agricoles engagée, notamment pour les conjoints, en 2009 et 2010. Nous avons reçu, Éric Woerth et moi-même, l'ensemble des organisations syndicales agricoles représentatives afin de les entendre. Le projet présenté par Éric Woerth répond, me semble-t-il, à toutes leurs préoccupations.

S'agissant de la situation des conjoints et des femmes d'agriculteurs, le projet supprime la condition de délai pour ouvrir un droit à pension : celle-ci pénalise durement les femmes d'agriculteurs, qui se retrouvent dans une situation inacceptable. Nous apportons donc une réponse à cette première difficulté.

La deuxième difficulté concerne la reprise sur succession, qui fait peur à un bon nombre d'exploitants agricoles incapables de bénéficier de la retraite agricole minimale. Nous allons donc exclure de la reprise sur succession l'ensemble des bâtiments et des terres agricoles, de façon à ce que chaque agriculteur puisse ouvrir son droit au minimum vieillesse.

Enfin, conformément aux attentes des représentants agricoles, nous sommes prêts à examiner le calcul de la pension agricole sur la base des vingt-cinq meilleures années. Nous allons engager les travaux techniques sur ce sujet afin de prendre en compte les revendications exprimées par les exploitants.

J'estime que le volet agricole du texte présenté par Éric Woerth est à l'image de la réforme des retraites défendue par l'ensemble du Gouvernement : il est juste, équitable et il répond concrètement aux préoccupations des agriculteurs français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur le Premier ministre, nous avons assisté, cet après-midi, à une bien curieuse séance de questions au Gouvernement. En effet, Jean Mallot vous a posé des questions précises sur la fraude avouée de Mme Bettencourt (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP) et sur ses suites judiciaires et fiscales ; nous vous avons interrogé sur les poursuites que vous comptez engager contre M. de Maistre, qui a organisé l'évasion fiscale de Mme Bettencourt. Or vous nous avez servi, ainsi que M. Woerth, des réponses préparées, mais complètement décalées (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP), puisque jamais nous ne vous avons interrogés sur l'éventuelle implication de M. Woerth. Ni le ministre du budget ni la garde des sceaux n'ont daigné répondre avec précision à nos questions.

A ce stade, mes chers collègues, rien n'indique que M. Woerth ait eu à connaître des manoeuvres fiscales de Mme Bettencourt. Mais il faut – et c'est une nécessité d'ordre public – que la lumière soit faite et les procédures fiscales et pénales ordonnées, afin que l'on connaisse la vérité sur cette affaire, qui peut être une affaire d'État. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur le Premier ministre, nous assistons cet après-midi à une bien curieuse séance de questions au Gouvernement. En effet, Jean Mallot vous a posé des questions précises sur la fraude avouée de Mme Bettencourt (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP) et sur ses suites judiciaires et fiscales ; nous vous avons interrogé sur les poursuites que vous comptez engager contre M. de Maistre, qui a organisé l'évasion fiscale de Mme Bettencourt. Or vous nous avez servi, ainsi que M. Woerth, des réponses préparées, mais complètement décalées (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP), puisque jamais nous ne vous avons interrogés sur l'éventuelle implication de M. Woerth. Ni le ministre du budget ni la garde des sceaux n'ont daigné répondre avec précision à nos questions.

A ce stade, mes chers collègues, rien n'indique que M. Woerth ait eu à connaître des manoeuvres fiscales de Mme Bettencourt. Encore faut-il, c'est une nécessité d'ordre public, que la lumière soit faite et les procédures fiscales et pénales ordonnées, afin que l'on connaisse la vérité sur cette affaire, qui peut être une affaire d'État. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Au-delà des suites judiciaires à donner à cette affaire – et vous y avez d'ailleurs fait allusion, monsieur le Premier ministre –, se pose un problème déontologique qui ne peut échapper au chef du Gouvernement : la question n'est pas celle de savoir si Mme Woerth a, oui ou non, le droit d'exercer une carrière professionnelle ; tout relève, en fait, du conflit d'intérêts entre les fonctions ministérielles exercées par M. Woerth, au service de l'État, et celles exercées par Florence Woerth auprès de la plus grosse fortune de France. Ce que je dis est du reste si évident que Mme Woerth a démissionné hier, et que c'est M. Woerth qui a choisi d'en faire l'annonce. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J'ajoute que ce conflit d'intérêts ne se limite pas à la profession de Mme Woerth ; il se prolonge dans le cumul de fonctions de son mari, ministre le jour, trésorier de l'UMP le soir. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le Premier ministre, comment souhaitez-vous, concrètement, mettre bon ordre à cette situation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Au-delà des suites judiciaires à donner à cette affaire – et vous y avez d'ailleurs fait allusion, monsieur le Premier ministre –, se pose un problème déontologique qui ne peut échapper au chef du Gouvernement : la question n'est pas celle de savoir si Mme Woerth a ou non le droit d'exercer une carrière professionnelle ; tout relève en fait du conflit d'intérêts entre les fonctions ministérielles exercées par M. Woerth, au service de l'État, et celles exercées par Florence Woerth auprès de la plus grosse fortune de France. Ce que je dis est du reste si évident que Mme Woerth a démissionné hier, et que c'est M. Woerth qui a choisi d'en faire l'annonce. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J'ajoute que ce conflit d'intérêts ne se limite pas à la profession de Mme Woerth ; il se prolonge dans le cumul de fonctions de son mari, ministre le jour, trésorier de l'UMP le soir. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le Premier ministre, comment souhaitez-vous, concrètement, mettre bon ordre à cette situation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Je vous en prie !

Vous avez la parole, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Monsieur le président Ayrault, dans votre question,…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

…j'ai du mal à faire le tri entre l'indigne, le déplacé, le décalé et l'irresponsable. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Vous posez une première question, qui porte sur la situation de Mme Bettencourt, notamment sur sa situation fiscale.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Le secret fiscal – la conscience que nous en avons, l'exigence de respecter l'une des plus grandes libertés individuelles qu'est le lien intime entre n'importe quel citoyen ou contribuable et son administration – est très supérieur au secret des vestiaires. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Le secret fiscal, c'est la protection d'une liberté publique individuelle. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

En tant que ministre du budget, responsable de l'administration fiscale, je ne peux répondre à une question sur la situation de tel ou tel. Si, d'aventure, monsieur Ayrault, je répondais à une question sur votre situation personnelle, sur celle de votre femme ou de votre voisin de palier, je serais condamnable. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Ce n'est pas le problème. Là, il s'agit d'une fraude !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Vous seriez en droit de vous retourner contre moi et vous gagneriez devant la justice. C'est bien la raison pour laquelle nous devons protéger cette situation.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Vous seriez en droit de vous retourner contre moi et vous gagneriez devant la justice. C'est bien la raison pour laquelle nous devons protéger le secret fiscal.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Il y a une ligne, définie par l'administration fiscale, qui s'applique sur l'ensemble du territoire et qui vise à lutter contre tous les dispositifs de fraude. Ainsi, les patrimoines supérieurs à trois millions sont régulièrement, tous les trois ans, examinés par l'administration fiscale. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Voilà un élément de réponse non nominatif qui devrait satisfaire votre curiosité que, dans ce contexte singulier, je peux qualifier de malsaine.

Par ailleurs, un peu plus de 50 000 contrôles fiscaux sont effectués en France, dont un peu plus de 45 000 concernent les entreprises et 5 000 les particuliers. Seuls 1 000 dossiers sont transmis au parquet, et 4 000 sont réglés dans le cadre d'un redressement traditionnel. Voilà des éléments chiffrés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Voilà un élément de réponse non nominatif qui devrait satisfaire votre curiosité que, dans ce contexte singulier, je peux qualifier de malsaine.

Précisons qu'un peu plus de 50 000 contrôles fiscaux sont effectués en France, dont un peu plus de 45 000 concernent les entreprises et 5 000 les particuliers. Seuls 1 000 dossiers sont transmis au parquet, et 4 000 sont réglés dans le cadre d'un redressement traditionnel. Voilà des éléments chiffrés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Ma question s'adresse à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Monsieur le ministre, nous nous sommes fixé, dans le cadre du Grenelle 1, un objectif de 23 % d'énergies renouvelables au sein de l'énergie consommée totale. L'Union européenne a fixé, quant à elle, un objectif de 10 % pour le secteur des transports ; nous en sommes à peine à 7 % à l'heure actuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Cela m'amène à vous poser trois questions, monsieur le ministre d'État. Premièrement, où en est la préparation du plan d'action national qui doit être communiqué avant le 30 juin prochain à la Commission européenne ?

Deuxièmement, comment les responsables professionnels et industriels du secteur sont-ils associés à la préparation de ce plan ?

Troisièmement, a-t-on bien tenu compte du fait que les biocarburants de deuxième génération n'en sont qu'à l'état expérimental et ne seront industrialisables qu'à l'horizon 2020 ? Ignorer cette donnée reviendrait en effet à sacrifier la filière et tous ceux qui s'y sont engagés.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Monsieur le ministre, la consommation de bioéthanol au cours de l'année qui vient de s'écouler a été de 35 millions d'hectolitres environ, dont 8 millions ont été importés. En 2020, nous consommerons plus de 100 millions d'hectolitres. Il faut rassurer notre agro-industrie et les industriels français car, dans ce domaine, ce sont des investissements à long terme que nous leur demandons – ainsi qu'aux agriculteurs.

Monsieur le ministre, comment envisagez-vous d'accompagner l'agriculture et l'agro-industrie françaises dans le domaine des biocarburants ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Monsieur le président Jacob, vous souhaitez savoir où nous en sommes du plan d'action national relatif aux énergies renouvelables qui doit être communiqué fin juin à la Commission européenne. À ce jour, nous constatons une augmentation de 600 % de l'énergie solaire et photovoltaïque, de 80 % de l'énergie éolienne et de 75 % pour l'ensemble de la biomasse et de la géothermie. Nous sommes donc en avance sur nos obligations européennes et sur nos prévisions. Nous sommes enfin sortis de la léthargie dans ce domaine !

Votre deuxième question portait sur les biocarburants. Alors que nous en étions à 1 % en 2003, nous nous situons actuellement entre 6 % et 7 %. Ce sont les chiffres que nous allons communiquer à la Commission pour les biocarburants de première génération. En ce qui concerne la deuxième génération, vous souhaitez savoir si elle restera encore longtemps expérimentale. Nous verrons bien, mais en tout état de cause, nous souhaitons que des investissements soient faits sur cette deuxième génération – tout en honorant nos promesses et engagements à l'égard de ceux qui ont financé des exploitations. La parole de l'État sera respectée !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Pour ce qui est de votre troisième question, plus générale, notre plan « Énergies renouvelables » est le plus important en Europe, et un énorme succès français.

Enfin, j'ai l'honneur de vous annoncer que, s'agissant de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la France est en avance de 14 % sur ses obligations résultant du protocole de Kyôto. Nous serons probablement le premier pays industrialisé en économie durable ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Photo de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Eckert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le président, je voudrais d'abord observer que les deux questions du groupe socialiste avaient pour objet de demander quelle serait la nature des poursuites éventuellement engagées contre les fraudes fiscales avérées, les trafics d'influence ou les conflits d'intérêts supposés. Il ne s'agissait en aucun cas de faire un procès à des personnes qui ne sont pas accusées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Ma question s'adresse à Claude Guéant ou, à défaut, à M. le Premier ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Claude Guéant est à la une du Financial Times, la bible des milieux d'affaires. (« Jaloux ! » sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez sans doute lu la déclaration par laquelle il annonce au monde de la finance que des coupes budgétaires vont être pratiquées en France – un véritable plan de rigueur dont vous disiez le 7 mai, monsieur le Premier ministre, qu'il n'existait pas et n'existerait pas. Simultanément, à Bercy et à Matignon, des voix s'élèvent pour défendre un gel pur et simple des traitements des fonctionnaires jusqu'en 2013, voire la remise en cause de la hausse de 0,5 % prévue pour le mois prochain.

Après les 100 000 postes déjà supprimés en trois ans, 34 000 postes seraient supprimés en 2011, ce qui aggraverait encore la qualité des services publics et les conditions de travail des agents. Quant à votre projet de réforme des retraites, il comporte une augmentation de 2,7 % des cotisations de retraite des fonctionnaires. Cela aurait pu être compris et négocié si, en même temps, vous n'envisagiez pas le gel des traitements, augmentés de moins de 0,8 % par an depuis cinq ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

J'ai deux questions précises. Premièrement, envisagez-vous de geler les traitements des fonctionnaires jusqu'en 2013 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Deuxièmement, qui faut-il croire : M. Guéant, lorsqu'il annonce un plan de rigueur, ou vous-même, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. (« On veut Guéant ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Quel est notre objectif, monsieur le député ? C'est d'être au rendez-vous que le gouvernement français a proposé à ses partenaires européens en matière de réduction du niveau de déficit, afin de revenir aux 3 % d'avant la crise.

Quelle est la méthode retenue ? Un dispositif de maîtrise des dépenses publiques portant sur leurs trois sources : dépenses budgétaires, dépenses sociales, dépenses des collectivités territoriales. Il faut beaucoup de détermination pour appliquer ce dispositif. Si votre question est de savoir si ce plan est rigoureux, ma réponse est qu'il est rigoureux dans le sens de la minutie et de l'expertise de ce qui sera efficace pour l'économie ; nous ne devons pas entrer dans une logique récessive, c'est donc un plan de responsabilité.

Comment y parvenir ? Par un dispositif de partenariat avec l'ensemble des acteurs qui se trouvent aux côtés de l'État. Ce ne seront pas des mesures faciles à prendre, mais ce seront des mesures efficaces. Ce qui est intangible pour l'année prochaine, c'est de passer de 8 % de déficit à 6 %. Le Premier ministre a exposé un plan d'ensemble de 100 milliards d'euros, dont plus de la moitié portant sur la maîtrise des dépenses…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

…et le reste sur l'augmentation des recettes liée à l'élasticité des prélèvements obligatoires au sein de la matrice économique.

Pour répondre à votre question, nous ne travaillons pas sur une baisse du pouvoir d'achat ou du niveau de vie des fonctionnaires. Comme vous le savez, le Gouvernement a mis en place, depuis plusieurs années, un certain nombre de garanties. Le glissement vieillesse-technicité, que tous les élus locaux et les responsables des finances publiques connaissent bien, est une garantie pour le pouvoir d'achat. Il a ainsi permis aux fonctionnaires de bénéficier, l'an dernier, d'une augmentation de plus de 3 % de leur pouvoir d'achat, ce qui montre bien que les dispositifs mis en place protègent le pouvoir d'achat des fonctionnaires français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Photo de Bernard Accoyer

La parole est à M. Alain Marty, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marty

Ma question s'adresse à M. Hervé Morin, pardon, à M. Hervé Novelli. (Sourires.) Ce lapsus s'explique facilement : je devais accompagner aujourd'hui M. le ministre de la défense au Kosovo, mais le déplacement a été reporté. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le secrétaire d'État chargé du tourisme, vous étiez il y a quelques jours en Moselle, dans ma circonscription, pour assister à l'inauguration du quatrième Center Parc réalisé en France par le groupe Pierre et Vacances.

Photo de Alain Marty

Ma question s'adresse à M. Hervé Morin, pardon, à M. Hervé Novelli. (Sourires.) Pardonnez ce lapsus : je devais accompagner aujourd'hui M. le ministre de la défense au Kosovo, mais le déplacement a été reporté. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le secrétaire d'État chargé du tourisme, vous étiez il y a quelques jours en Moselle, dans ma circonscription, pour assister à l'inauguration du quatrième Center Parc construit en France par le groupe Pierre et Vacances.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marty

Vous avez pu juger de la qualité de ce complexe touristique au sein d'une forêt remarquable ; vous savez combien ce dossier me tenait à coeur. Il s'agit d'un investissement de 250 millions d'euros, qui s'appuie sur un partenariat public-privé ; il crée 549 emplois et peut accueillir 4 000 personnes.

On mesure l'importance que peut avoir un tel équipement dans un territoire, d'autant plus que cela fait suite à la récente inauguration du Centre Pompidou à Metz par le Président de la République. Cela montre que la Moselle est une terre de culture, qui peut se prévaloir d'attraits touristiques majeurs : face aux défis de la restructuration industrielle et de la restructuration militaire, cela compte.

Monsieur le secrétaire d'État, si nous voulons rester la première destination touristique au monde, il faudra aussi améliorer et professionnaliser l'accueil et l'hébergement. Quelle est la place du tourisme dans notre économie ? Quelles sont, à la veille de l'été, les priorités de votre ministère ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

J'ai eu plaisir, monsieur le député, à inaugurer ce Center Parc en Moselle, dans votre circonscription, qui permettra à terme de créer près d'un millier d'emplois. Il aura nécessité près de 250 millions d'euros d'investissements : c'est le plus gros investissement dans le domaine touristique des dernières années dans l'Union européenne. Ces chiffres sont révélateurs du potentiel touristique de notre pays.

Vous avez également raison de rappeler que nous sommes la première destination mondiale en matière touristique : 77 millions de touristes étrangers sont venus chez nous l'année dernière. Le tourisme intérieur est également important, puisque 80 % des Français qui partent en vacances restent en France.

Mais cette situation est fragile : nos hébergements touristiques vieillissent et doivent être rénovés. Notre accueil, nos capacités d'accueil, doivent être améliorés. Notre destination doit également être mieux promue.

Il y a maintenant presque un an, vous avez voté la loi de modernisation et de développement des services touristiques, à la quasi-unanimité, et je m'en félicite. Ensemble, nous avons posé les bases de la réforme du classement de tous les hébergements touristiques ; nous avons créé l'Agence de développement touristique de la France ; nous avons réformé la procédure des chèques-vacances, désormais accessibles aux salariés des entreprises de moins de cinquante personnes. Bref, nous avons donné à toutes les collectivités, à tous les acteurs du tourisme, les moyens de se développer. Vous avez su le faire en Moselle ; je souhaite que ce soit le cas partout en France. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Pascale Crozon, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Monsieur Le Premier ministre, vous tentez d'expliquer aux Françaises et aux Français qu'il leur suffira de travailler jusqu'à soixante-deux ans pour sauver notre système de retraites. Mais il est un âge dont vous ne parlez pas : c'est le recul à soixante-sept ans de l'âge de départ sans décote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

La décote, c'est la triple peine. Non seulement celles et ceux qui la subissent partent en retraite plus tard, non seulement ils partent avec des droits incomplets et donc une pension plus faible, mais ils subissent une retenue plus que proportionnelle aux droits pour lesquels ils ont cotisé.

Ses victimes sont essentiellement des femmes, dont une sur trois attend soixante-cinq ans pour faire valoir ses droits à la retraite. Mais ce sera demain le cas pour l'immense majorité, hommes et femmes, car ces générations, entrées plus tard sur le marché du travail, seront soumises à des conditions drastiques de durée de cotisation, et auront connu durant toute leur carrière l'existence du chômage de masse.

Votre projet de loi, monsieur le Premier ministre, est injuste, d'abord parce que, à l'instar des réformes de 1993 et 2003, même si que vous refusez de l'admettre, il conduira à une nouvelle baisse des pensions. Qui plus est, cette baisse des pensions se concentrera une fois encore sur les plus précaires, sur ceux qui auront subi les parcours professionnels les plus accidentés, et notamment les femmes et les jeunes.

Ma question est donc extrêmement simple : allez-vous revenir sur le report de l'âge de départ en retraite sans décote, ou allez-vous enfin avouer aux Français que votre projet n'est pas de les faire travailler jusqu'à soixante-deux ans, mais de leur laisser le choix entre partir à soixante-sept ans ou partir avec une retraite de misère ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Madame la députée, l'âge de la retraite aujourd'hui va de soixante à soixante-cinq ans : vous partez en retraite au taux plein à soixante ans seulement si vous avez tous vos trimestres. Il n'y a donc pas un âge du taux plein qui serait à soixante-cinq ans, et un âge légal qui serait à soixante.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Le départ sans décote, c'est bien soixante-cinq ans !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Les deux tiers des Français partant à la retraite ont tous leurs trimestres, voire plus qu'il n'en faut.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Mais pas des Françaises !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Il faut maintenir ces deux bornes, et si nous déplaçons l'une à soixante-deux ans, alors il faut déplacer l'autre à soixante-sept ans.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

On pourra partir à soixante-deux ans au taux plein si l'on a tous ses trimestres. De plus, les périodes de chômage entrent dans le calcul de la retraite : conformément au principe de la solidarité des régimes de retraite, les trimestres que, malheureusement, vous passez au chômage comptent dans le calcul. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Les périodes de maternité entrent également dans le décompte des trimestres.

Il faut évidemment en tenir compte pour comprendre qu'en 2018, bon nombre de nos concitoyens disposeront du nombre de trimestres nécessaires pour prendre leur retraite. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Le problème des femmes, c'est en réalité celui de la carrière des femmes. C'est un problème majeur depuis probablement trente ans en France : les femmes, à responsabilités égales, gagnent moins que les hommes. C'est un scandale absolu.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

En réalité, les retraites ne font que traduire les conséquences cette situation-là. Nous essayons d'y remédier en intégrant les indemnités journalières de maternité, et nous irons encore plus loin dès la fin de l'année, avec un texte sur l'égalité salariale. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Cécile Dumoulin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Dumoulin

Madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, vous vous êtes rendue avec Fadela Amara, secrétaire d'État en charge de la politique de la ville, à Mantes-la-Jolie afin d'inaugurer, dans le cadre du plan « Espoir banlieues », la crèche des Garennes, et je vous en remercie.

Trois objectifs ont guidé cette réalisation.

Il s'agit, tout d'abord, de proposer un mode d'accueil plus souple, avec des horaires à l'amplitude élargie, en veillant à établir une mixité sociale.

Il s'agit, ensuite, de faciliter l'accueil des enfants dont les parents sont en situation d'urgence ou en insertion professionnelle : chômage, formation, recherche d'emploi, alphabétisation. Des places leur seront spécifiquement réservées.

Il s'agit, enfin, de former des professionnels au sein même de cette structure.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Veuillez m'excuser, madame la députée, mais je dois vous interrompre.

Chers collègues, si vous avez choisi de sortir, faites-le sans bruit et sans parler à vos voisins. La séance n'est pas terminée, tant s'en faut, et ces mouvements sont tout à fait désagréables, aussi bien pour le député qui pose sa question que pour ceux qui l'écoutent et pour le membre du Gouvernement qui y répond.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Vous pouvez reprendre votre propos, madame la députée.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Dumoulin

Trois postes seront attrribués à des personnes en insertion en vue de les conduire à une formation de maîtresse de maison ou à un CAP « petite enfance ». De plus, un poste est ouvert à une élève auxiliaire de puéricultrice dans le cadre de sa formation par alternance.

Cette structure, qui pourra fonctionner sept jours sur sept, répond véritablement aux besoins de nos quartiers. Il faut faire plus pour ceux et celles qui sont le plus éloignés de l'emploi, imaginer des dispositifs sur mesure, innovants, et proposer une offre de garde diversifiée.

Cette structure multi-accueils de vingt-huit berceaux a été la première à être inaugurée dans le cadre du plan « Espoir Banlieues », dont l'objectif est de créer des modes de garde adaptés aux contraintes spécifiques des personnes vivant dans les quartiers dits sensibles.

Madame la secrétaire d'État, alors que de nombreuses familles attendent la création de nouvelles places d'accueil, particulièrement dans nos quartiers, pouvez-vous nous donner les résultats de l'appel à projets lancé sur l'ensemble du territoire le 23 janvier 2009 ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.

Debut de section - PermalienNadine Morano, secrétaire d'état chargée de la famille et de la solidarité

Madame la députée, ce n'est pas un hasard si notre pays connaît le taux de natalité le plus élevé de l'Union européenne. Nous menons en effet une politique familiale généreuse et nous développons des modes de garde adaptés et diversifiés sur l'ensemble du territoire.

Debut de section - PermalienNadine Morano, secrétaire d'état chargée de la famille et de la solidarité

L'année dernière, Brice Hortefeux et moi-même avons signé avec la Caisse nationale d'allocations familiales une convention d'objectifs et de gestion, comportant près de 1,3 milliard d'euros supplémentaires, afin de tenir l'engagement du Président de la République de créer 200 000 offres de garde supplémentaires sur le territoire.

Vous avez raison de rappeler, madame la députée, que nos quartiers prioritaires nécessitent une aide particulière. Nous savons que le premier besoin est le désenclavement par les transports et que le deuxième est le développement des modes de garde, car le taux d'activité des femmes y est de dix points inférieur à la moyenne nationale.

Fadela Amara et moi-même avons lancé dans toutes les caisses d'allocations familiales un appel à projets pour que soient développées des crèches « Espoir banlieues » dans ces quartiers. Nous sommes venues chez vous, à Mantes-la-Jolie, inaugurer la première crèche de ce dispositif.

Les CAF ont reçu 400 dossiers, nous en avons retenu 230. Avec Éric Woerth, nous avions prévu 1 500 places ; nous allons finalement en créer 3 000. Nous avions initialement prévu un budget de 30 millions d'euros ; ce sont finalement 73 millions que nous allons consacrer aux 215 quartiers prioritaires, pour permettre aux habitantes de ces quartiers de travailler et de bénéficier de modes de garde innovants au coeur de leur lieu d'habitation. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Plisson, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, la réforme des retraites que vous proposez est marquée du sceau de votre politique profondément injuste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Injuste car le rallongement de la durée du travail de deux ans pénalise encore les salariés les plus modestes qui ont commencé à travailler tôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Injuste car le financement de la mesure ne met les hauts revenus à contribution que pour moins de 15 % du total de l'enveloppe.

Injuste pour les femmes et les précaires dont la vie professionnelle est morcelée et qui seront contraints de travailler jusqu'à soixante-sept ans.

Injuste pour les salariés exerçant des métiers pénibles, qui devront justifier d'un taux de 20 % d'invalidité pour partir à soixante ans.

Injuste pour les fonctionnaires, dont les cotisations augmenteront de 2,7 % alors que vous allez geler leurs traitements.

Injuste pour les jeunes générations, scotchées au chômage, dont le Gouvernement pille le dernier filet de sécurité, créé par la gauche : le Fonds de réserve des retraites.

Après le bouclier fiscal qui exonère les riches de l'effort pour la nation, pourquoi choisissez-vous aujourd'hui, avec la réforme des retraites, de frapper encore les plus humbles de notre société ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Monsieur le député, la réforme proposée par le parti socialiste est, elle, totalement injuste ! Elle répond aux problèmes démographiques par le seul allongement de la durée de cotisation. Or, pour obtenir en 2018 les mêmes économies sur les besoins de financement de nos systèmes de retraite, il faudrait porter la durée de cotisation à quarante-sept ans. Vous sentiriez-vous capable de le faire ? Cela vous semblerait-il juste ?

Je vous fais aussi observer que, pour toute réponse au problème des retraites, vous proposez un matraquage fiscal de l'ensemble de la société,…

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Pour Liliane aussi !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

…à commencer par les classes moyennes et par les entreprises. C'est une réponse qui ne tient pas debout !

Trouvez-vous juste, monsieur le député, qu'un fonctionnaire ayant la même rémunération et la même retraite qu'un salarié du privé cotise trois points de moins ? Je vous laisse répondre à cette question. Le Gouvernement, lui, y a déjà répondu : nous porterons les cotisations des fonctionnaires au même niveau que celles des salariés du privé. Sur dix ans, l'augmentation des cotisations vieillesse des fonctionnaires sera de 0,28 point chaque année. Il nous paraît normal et juste que chacun cotise de manière égale pour le même montant de pension.

De la même façon, ceux qui ont commencé jeunes …

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Comme Liliane !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

…auront la possibilité de prendre leur retraite à soixante ans, et ceux qui auront été exposés à la pénibilité …

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Comme Liliane !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

…pourront eux aussi partir à soixante ans, ce que vous n'avez jamais proposé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Réforme des retraites

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les explications de vote communes et les votes, par scrutin public, sur, d'une part, la proposition de loi de Jean-Marc Ayrault et plusieurs de ses collègues visant à étendre la modernisation du dialogue social aux propositions de loi (nos 2499, 2582, 2571) et, d'autre part, la proposition de résolution de Jean-Marc Ayrault et plusieurs de ses collègues tendant à réviser le règlement de l'Assemblée nationale (nos 2491, 2583, 2572).

Dans les explications de vote communes, la parole est à M. Jean Mallot, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Monsieur le président, comme vous venez de l'indiquer nous avons examiné, jeudi dernier, la proposition de loi du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche destinée à étendre la modernisation du dialogue social aux propositions de loi et la proposition de résolution tendant à réviser le règlement de l'Assemblée nationale afin de mettre en musique, en quelque sorte, le dispositif prévu par la proposition de loi.

Nous avons tous ressenti, à différents moments, la nécessité d'améliorer les procédures de dialogue social en amont de l'élaboration de la loi. À cet égard, l'article L. 1 du code du travail prévoit que tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle doit faire l'objet d'une concertation préalable qui peut déboucher ou non sur un accord.

L'article L. 1 du code du travail, issu de la loi du 31 janvier 2007, a donné lieu à plusieurs applications récentes. Je citerai l'accord sur la modernisation du marché du travail et la sécurisation des parcours professionnels qui a abouti à la loi du 25 juin 2008 ou encore la position commune adoptée par quatre syndicats – deux syndicats de salariés, et deux syndicats représentatifs du patronat – le 9 avril 2008 sur la représentativité, le développement du dialogue social et le financement du syndicalisme.

Mais, nous le savons, ce dispositif comporte une faille, puisque l'article L. 1 ne s'applique pas aux propositions de loi, sauf lorsque le Gouvernement les reprend à son compte – c'est un autre sujet. D'ailleurs, on pourrait s'interroger sur l'applicabilité de l'article L. 1 dans ce cas-là.

En tout cas, nous avons éprouvé le besoin de compléter le dispositif dans deux situations récentes au moins : la proposition de loi relative au repos dominical qui n'avait malheureusement pas fait l'objet d'une négociation préalable avec les partenaires sociaux, et la proposition de loi de M. Poisson concernant le maintien et la création d'emploi.

La présente proposition de loi vise donc à étendre le dispositif prévu par l'article L. 1 aux propositions de loi, la proposition de résolution prévoyant la succession d'étapes qui permettent de s'assurer que cette consultation et éventuellement cette négociation préalables ont eu lieu.

Certes, un protocole a été adopté par la conférence des présidents le 16 février dernier. Mais presque personne n'en connaît l'existence. En tout cas, nous ne saurions lui reconnaître un caractère opposable dans la mesure où il s'agit d'un simple document qui n'a pas de valeur juridique réelle.

Les débats qui ont eu lieu jeudi dernier ont abouti, comme cela avait été le cas en commission, à l'adoption d'un amendement présenté par M. Cherpion. Cet amendement déplace le point d'application du dispositif. Au lieu de concerner les propositions de loi au moment où l'on envisage leur inscription à l'ordre du jour, le dispositif concernerait les propositions de loi avant leur examen en commission. La dernière phrase de cet amendement prévoit que les modalités de mise en oeuvre de la concertation sont définies par chaque assemblée. Voilà pourquoi cela doit figurer dans le règlement de notre assemblée. Il n'y a donc pas désaccord de fond sur cet amendement.

S'agissant de la proposition de résolution, une contestation en constitutionnalité a été développée, mais elle n'a pas abouti. D'ailleurs, celles et ceux qui la défendaient ont baissé pavillon assez rapidement. En tout cas, j'avais proposé un amendement de précaution qui n'a pas été retenu et sur lequel nous aurons peut-être l'occasion de revenir à l'avenir. La proposition de résolution ayant été rejetée en commission, nous verrons bien comment les uns et les autres se positionneront tout à l'heure.

Reste à savoir si c'est toujours la proposition du groupe socialiste. C'est le cas, puisque, si elle a été amendée, elle n'a pas été dénaturée. Je me contenterai d'évoquer, en l'occurrence, le jugement du roi Salomon. Lorsque les deux soi-disant mères se présentent devant le roi Salomon avec le bébé, chacune prétendant qu'elle est la bonne mère, le roi propose de couper l'enfant en deux. La vraie mère se précipite alors et dit qu'elle préfère qu'il vive avec l'autre femme plutôt qu'il soit coupé en deux.

Nous préférons que notre enfant, c'est-à-dire la présente proposition de loi, vive même amendée par le groupe UMP plutôt qu'elle meure au simple motif qu'elle aurait été déposée par le groupe socialiste.

Voilà pourquoi le groupe SRC votera la proposition de loi et la proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour le groupe GDR, la parole est à M. François de Rugy.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Madame la secrétaire d'État chargée de la politique de la ville, je tiens tout d'abord à préciser que je m'exprime au nom des députés écologistes, les députés communistes et du parti de gauche du groupe de la gauche démocrate et républicaine ne participant pas aux votes.

La proposition de loi de nos collègues socialistes renvoie à une certaine conception de la démocratie que nous partageons. Pour nous, elle ne se limite pas à la démocratie politique, représentative que les députés incarnent.

Il y a d'autres sources de légitimité : c'est ce que l'on appelle souvent la démocratie sociale. À cet égard, je citerai le Conseil économique et social. Il y a même eu, ces dernières années, d'autres procédures, comme le Grenelle de l'environnement, qui ont fait émerger d'autres acteurs, et c'est très bien.

Mais il faut bien reconnaître que la démocratie sociale est trop souvent négligée et affaiblie, quand elle n'est pas purement et simplement ignorée. La consultation des partenaires sociaux est pourtant un enrichissement. Nous ne croyons pas à la réforme par décret, à la réforme imposée d'en haut. C'est pourquoi nous soutenons la proposition de loi de nos collègues du groupe socialiste.

Bien sûr, l'initiative parlementaire ne doit pas être bridée ou entravée. Il ne doit pas y avoir de restriction au dépôt de propositions de loi, et encore moins à leur examen. En revanche, il serait utile, sans aucun doute, de mettre à profit les six semaines qui séparent désormais le dépôt d'une proposition de loi de son examen pour consulter les syndicats de salariés ou les syndicats patronaux, le dernier mot appartenant naturellement aux élus du peuple que nous sommes, et c'est bien normal – c'est l'essence même de la démocratie.

Mais cela n'empêche pas, à nos yeux, d'éclairer la représentation nationale par un avis des partenaires sociaux avant que le Parlement ne discute d'un texte et a fortiori avant qu'il ne le vote. La démocratie représentative n'empêche pas de favoriser, chaque fois que c'est possible, la négociation, celle-ci pouvant déboucher sur des accords entre partenaires sociaux. Nous croyons aux vertus des changements négociés. Ces changements sont mieux acceptés et mieux mis en oeuvre s'ils ont été négociés. La négociation peut éviter à notre pays des crises et des affrontements dont nous avons malheureusement trop souvent l'habitude et qui, finalement, ne font qu'accroître les blocages. Souvenons-nous du Contrat première embauche si cher à un précédent Premier ministre et qui a mis la France entière dans la rue pour finir par une loi promulguée par le Président de la République qui a annoncé dans le même mouvement qu'il ne l'appliquerait pas. Étrange conception de la procédure législative !

Plus près de nous et plus directement lié à la proposition de loi de nos collègues socialistes, rappelons-nous le texte sur l'ouverture des magasins le dimanche. On sait bien, et nous l'avions dit à l'époque, que si le Gouvernement avait préféré susciter une proposition de loi plutôt que de déposer un texte de loi, c'était pour ne pas avoir à consulter les partenaires sociaux (Protestations sur les bancs du groupe UMP), bref pour squeezer toute discussion et toute négociation.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il aurait pourtant été particulièrement intéressant de connaître, non seulement le point de vue des syndicats de salariés, mais aussi celui des syndicats patronaux qui étaient loin d'être unanimes sur le sujet.

Cette procédure, telle que la proposition de loi la présente, est un garde-fou contre les tentatives de passage en force. Parce que nous croyons à l'utilité du dialogue social, que nous jugeons nécessaire de le développer, parce que nous croyons que le Parlement gagnera toujours à consulter les acteurs sociaux avant de légiférer, nous, les députés écologistes, nous voterons sans hésitation pour la proposition de loi de nos collègues socialistes. (Applaudissements sur certains bancs du groupe GDR et du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte du palais.

La parole est à M. Francis Vercamer pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

La proposition de loi qui nous est présentée tend à soumettre à la concertation préalable des partenaires sociaux les propositions de loi qui interviennent dans le champ de l'article L. 1 du code du travail. Il vient ainsi compléter et parachever le dispositif de la loi du 31 janvier 2007 qui instaurait cette obligation de concertation pour les projets du Gouvernement.

Notre famille politique a toujours été attachée à la démocratie sociale et à la négociation collective. Nous pensons en effet que les partenaires sociaux ont toute légitimité à traiter les questions touchant au travail et aux relations sociales, au sein de l'entreprise comme de leur branche professionnelle.

De même, le Nouveau Centre est favorable à toute disposition susceptible d'améliorer l'articulation entre la démocratie politique et la démocratie sociale. À des relations sociales traditionnellement conflictuelles, nous préférons un dialogue social apaisé où la règle de droit pourra évoluer avec l'accord du plus grand nombre à l'issue d'un processus d'échanges, de propositions et de contre-propositions.

C'est ce changement de mentalité qu'avait d'ores et déjà initié la loi du 31 janvier 2007 sur des textes aussi essentiels que la modernisation du marché du travail, la réforme de la représentativité ou la réforme de la formation professionnelle.

Le groupe Nouveau Centre est donc favorable à ce que les propositions de loi entrant dans le champ de la négociation collective soient soumises à la concertation préalable.

À l'occasion de l'examen du projet de loi portant modernisation du dialogue social en décembre 2006, nous avions d'ailleurs regretté que les propositions de loi ne soient pas concernées par cette phase de concertation. Plusieurs députés, dont je faisais partie, s'inquiétaient de la place laissée au Parlement dans le dispositif de concertation avec les partenaires sociaux. Cette proposition de loi apporte donc une réponse bienvenue.

Nous pensons que le dispositif pourrait être encore amélioré, notamment lorsque la négociation préalable débouche sur un désaccord entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. Il serait possible, à notre avis, de donner une seconde chance au dialogue social tout en laissant la décision finale au Gouvernement et en respectant la primauté du politique. L'expression d'un désaccord est aussi un élément de la démocratie, bien sûr.

Par ailleurs, les inquiétudes exprimées sur les risques d'inconstitutionnalité de ce texte qui limiterait le droit d'initiative des parlementaires ne nous paraissent pas fondées. En effet, organiser les pouvoirs n'implique pas forcément que ceux-ci soient limités. Il s'agit ici d'établir un simple temps d'échange qui n'enlève rien à l'initiative parlementaire.

La proposition d'amendement de notre collègue rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, Gérard Cherpion, a levé toute ambiguïté quant au risque de voir les dispositions de la proposition de loi restreindre l'application des règles de détermination de l'ordre du jour de l'Assemblée telles qu'elles sont définies par l'article 48 de la Constitution.

Quant à la proposition de résolution, il nous semble peu opportun qu'elle détaille les modalités de la procédure de concertation avec les partenaires sociaux alors même que la proposition de loi n'a pas achevé son parcours législatif.

Pour ces raisons le groupe Nouveau Centre soutiendra la proposition de loi dans sa version issue des amendements présentés par le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, mais votera contre la proposition de résolution.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Lefrand

La loi du 31 janvier 2007 a fait l'objet de nombreuses critiques : ses dispositions seraient floues, notamment les modalités selon lesquelles les partenaires sociaux font connaître leur volonté d'engager une négociation ; son champ d'application serait limité puisqu'il ne couvre pas la protection sociale ; elle serait facilement contournable via la notion d'urgence ; elle n'aurait enfin, en tant que simple loi, qu'une portée limitée puisque n'importe quelle loi ultérieure peut y déroger.

Trois ans plus tard, force est de constater qu'aussi bien les acteurs politiques – Gouvernement et Parlement – que les partenaires sociaux ont joué le jeu et su appliquer la nouvelle loi avec des résultats très intéressants. Une fois rappelée la primauté du politique, il convient de saluer la bonne foi et la bonne volonté avec lesquelles l'exécutif tout comme les partenaires sociaux ont participé à sa mise en oeuvre, permettant déjà à trois réformes majeures de voir le jour et d'être transposées dans la loi : la modernisation du marché du travail, la réforme de la représentativité syndicale, la réforme de la formation professionnelle.

Pour ces raisons, dans un contexte de valorisation du rôle du Parlement et de promotion de la coproduction législative, il paraît légitime que les initiatives parlementaires soient également soumises à la concertation préalable avec les partenaires sociaux lorsqu'elles portent sur leur champ de compétence. D'ailleurs, les consultations préalables étaient déjà bien souvent menées par l'auteur d'une proposition de loi auprès de ces fameux partenaires sociaux. Il s'agit donc principalement de formaliser la procédure de consultation préalable pour les propositions de loi. Enfin, cette procédure ne concerne pas les amendements.

Cependant, la proposition de loi du groupe SRC ainsi que la proposition de résolution nous posent plusieurs problèmes, tant sur le plan rédactionnel que constitutionnel mais également quant à la synchronisation entre la proposition de loi et la proposition de résolution. En effet, la rédaction proposée par le groupe SRC place au même niveau les projets gouvernementaux qui sont des projets de réforme faisant l'objet d'un agenda social fixé par le Président de la République en début d'année, et les propositions de loi qui reflètent des initiatives portant sur des aspects plus spécifiques et moins programmés qui ne figurent pas sur l'agenda social.

Compte tenu de la différence de nature entre un projet de réforme gouvernemental et une proposition de loi, les délais de consultation doivent être beaucoup plus longs pour les premiers. Aussi la rédaction proposée par le groupe SRC n'était-elle pas appropriée aux propositions de loi.

Aujourd'hui, grâce à l'initiative du rapporteur pour avis, M. Gérard Cherpion, la commission des affaires sociales ainsi que notre Assemblée ont adopté deux amendements. Le premier modifiait l'article premier afin de viser expressément les propositions de loi, de ne pas placer la procédure de concertation à la charge de l'auteur de la proposition de loi et de reprendre la formulation de l'article 39 de la Constitution quant à la saisine du Conseil d'État. Le second supprimait l'article 2.

Pour toutes ces raisons, et grâce aux heureux amendements de M. Gérard Cherpion, nous voterons la proposition de loi ainsi amendée mais nous rejetterons la proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous venons d'entendre les explications de vote d'une part sur la proposition de loi visant à étendre la modernisation du dialogue social aux propositions de loi et d'autre part sur la proposition de résolution tendant à réviser le règlement de l'Assemblée Nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur la proposition de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 463

Nombre de suffrages exprimés 461

Majorité absolue 231

Pour l'adoption 459

Contre 2

(La proposition de loi est adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur la proposition de résolution.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 469

Nombre de suffrages exprimés 465

Majorité absolue 233

Pour l'adoption 161

Contre 304

(La proposition de résolution n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, conformément à la décision de la conférence des présidents, notre débat portant sur l'évaluation de la mise en oeuvre du principe de précaution inscrit à l'ordre du jour de cet après-midi se tiendra en salle Lamartine.

Vote sur la proposition de résolution

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante à l'extérieur de l'hémicycle, salle Lamartine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle le débat sur le principe de précaution, organisé à la demande du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques.

La conférence des présidents a décidé d'organiser ce débat dans la salle Lamartine afin qu'il soit plus direct, plus vivant, plus spontané et ainsi plus fructueux.

Il s'agit d'un débat avec le Gouvernement à partir d'un rapport d'étape, publié par le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, sur l'évaluation de la mise en oeuvre de l'article 5 de la charte de l'environnement, relatif à l'application du principe de précaution.

Je vais d'abord donner la parole aux co-rapporteurs, Alain Gest et Philippe Tourtelier. Ils disposeront chacun de cinq minutes. Les membres du Gouvernement s'exprimeront ensuite. Je donnerai enfin la parole aux députés qui la demanderont afin qu'ils puissent échanger avec les membres du Gouvernement.

Chaque question devra être concise et durer moins de deux minutes. Elle sera suivie d'une réponse immédiate et tout aussi concise de la part des membres du Gouvernement. Si le député qui a interrogé le Gouvernement souhaite ajouter quelque chose, il le pourra et le ministre ou le secrétaire d'État également.

Je veillerai à l'équilibre des temps de parole entre la majorité et l'opposition. Le groupe UMP comme le groupe SRC disposent de vingt minutes et le groupe Nouveau Centre et le groupe GRD, quant à eux, de dix minutes, un temps spécifique étant réservé aux députés non-inscrits.

La parole est à M. Alain Gest, co-rapporteur du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gest

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, madame la secrétaire d'État chargée de l'écologie, mes chers collègues, voilà cinq ans qu'à l'issue d'une discussion parlementaire très dense, a été adoptée la révision constitutionnelle introduisant la charte de l'environnement et sa disposition phare : le principe de précaution.

À la demande du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée, présidé par Bernard Accoyer, Philippe Tourtelier et moi-même avons été chargés d'en évaluer la mise en oeuvre, complétant ainsi le travail réalisé par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Mesurer la réalité de la mise en oeuvre et les impacts du principe de précaution est apparu indispensable, non pas tant pour le remettre en cause mais pour prendre en compte les critiques, voire les polémiques nées de son application ou simplement même, parfois, de sa seule évocation.

En ce qui concerne son application, mon rapport sur les incidences éventuelles sur la santé de la téléphonie mobile en a fourni une illustration, j'y reviendrai. Pour ce qui est de la simple évocation, force est de constater que le principe de précaution est devenu un repère médiatique dès qu'il est question de la gestion collective d'un risque. Cela illustre parfaitement ce que chacun peut constater, à savoir la confusion souvent faite entre la prévention, applicable à un risque identifiable – par exemple en matière de vaccinations ou de lutte contre les inondations – et la précaution qui concerne des risques non avérés, incertains, pour lesquels il s'agit d'anticiper un éventuel dommage.

L'actualité nous a donné plusieurs exemples de l'utilisation très approximative du principe de précaution, qu'il s'agisse de la suspension des vols des avions de ligne à la suite de l'éruption d'un volcan islandais, ou encore de la grippe H1N1. Dans ces deux cas, l'évocation du principe de précaution était inadaptée.

Au-delà de ce premier constat, les auditions que nous avons effectuées ont confirmé la complexité des différents sujets découlant de l'utilisation du principe de précaution. C'est la raison pour laquelle nous avons choisi, Philippe Tourtelier et moi-même, de rendre un prérapport formulant les questions que les débats publics et nos interlocuteurs nous ont inspirées.

Après le séminaire portant sur ces réflexions, organisé le 1er juin à la demande du président de l'Assemblée, le moment est venu de présenter nos propositions en réponse aux questions posées, d'une part sur la détermination du principe de précaution et, d'autre part, sur l'organisation de sa mise en oeuvre.

Sur le premier point, nous avons considéré, en premier lieu, qu'il ne fallait pas abroger le principe – je me permets d'y insister car il m'a été donné de lire des interprétations du rapport totalement erronées. Aucune des personnes auditionnées, du reste, ou nous ayant fait part de leur point de vue, ne nous l'a demandé. Sans doute certains avaient-ils cette volonté à l'esprit, mais ils sentaient bien qu'il y faudrait une telle volonté politique et pédagogique qu'ils n'ont probablement pas osé aller au bout de leur pensée.

En revanche, outre le fait que la définition juridique du principe de précaution se trouve très souvent écornée, nous avons constaté une certaine ambiguïté dans sa rédaction. En effet, l'article 5 de la charte fait à la fois référence au principe de précaution et le définit. L'interprétation extensive du principe dans les débats qui s'instaurent quasi quotidiennement n'est sans doute pas étrangère à la difficulté à laquelle est confrontée la justice pour l'appliquer.

Il en est ainsi de décisions de jurisprudence, certes minoritaires mais sur lesquelles on peut s'interroger, concernant l'obligation faite à un opérateur téléphonique soit de démonter, soit de ne pas installer une antenne de téléphonie mobile. Je fais notamment référence à un arrêt de la cour d'appel de Versailles qui, par souci de simplification, a indiqué que, si les risques concernant les antennes de téléphone n'étaient pas démontrés, l'inverse ne l'était pas non plus ; qu'on pouvait donc raisonnablement considérer comme légitime l'inquiétude des voisins immédiats d'une antenne et qu'il y avait de ce fait un trouble du voisinage. On mesure ici que la notion de trouble du voisinage peut apparaître comme une extension assez large du principe de précaution.

À cet égard, je regrette que la Cour de cassation n'ait pas eu l'occasion de formuler une première jurisprudence à propos de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, l'opérateur ayant finalement renoncé à son pourvoi.

Face à cette situation quelque peu confuse, il semble indispensable de clarifier l'actuelle rédaction de la charte, soit par une résolution, soit, mieux encore, par une loi. Ce texte devra par exemple s'intéresser à ce qui apparaît aujourd'hui comme un élargissement du principe de précaution.

En effet, à l'issue du débat de 2005, le texte ne concernait que le secteur de l'environnement.

Or à chaque fois que le principe de précaution a été évoqué jusqu'à présent, c'était à propos de la santé, un domaine non retenu à l'époque dans le texte constitutionnel.

Faut-il entériner la situation constatée ou confirmer le choix effectué en 2005 ? À titre personnel, je suis tenté de penser que refuser de prendre en compte la réalité des débats n'est pas une position durablement tenable. Encore convient-il, dès lors, d'introduire la notion de coût économiquement acceptable et surtout de préciser les procédures d'évaluation d'une analyse coûts-bénéfices des décisions. Mon collègue Philippe Tourtelier s'exprimera sur ce point tout à l'heure.

La notion de coût économiquement acceptable figure d'ailleurs dans l'article L.110-1 du code de l'environnement, introduit par la loi Barnier, ce qui pose aussi le problème de la cohérence nécessaire entre ce texte et la charte constitutionnelle.

Le texte, explicitant les intentions du législateur, pourrait utilement tenir compte de la résolution du Conseil européen de Nice de décembre 2000 et de la communication de la Commission sur le recours au principe de précaution.

Reste qu'il y a également nécessité de faciliter l'organisation de la mise en oeuvre du principe de précaution. Cela passe, là encore, par une clarification entre les nombreux outils d'expertise scientifique : Haute autorité spécifique, Haut conseil, Agence nationale, Fondation santé et radiofréquence. J'en oublie sans doute et il y a là matière à réflexion.

L'opportunité nous est peut-être donnée par la création d'une nouvelle Agence de sécurité sanitaire, née de la fusion de l'AFSSA et l'AFSSET. Celle-ci semble se doter d'une organisation suffisamment plurielle qui concilie expertise scientifique et expertise de type sociétal – économique, éthique et social – et suffisamment indépendante pour émettre un avis pertinent à destination des autorités publiques.

Enfin, nous avons été alertés sur la nécessité de préciser le régime de responsabilité civile applicable aux entreprises au titre de leurs activités. La mise en place d'un dispositif de garantie assurantielle doit être envisagée si l'on veut que le principe de précaution demeure le principe d'action qu'ont voulu ses concepteurs et ne devienne pas le redoutable frein au progrès et à la recherche que ses détracteurs redoutaient, ce qui avait sans doute conduit nombre de parlementaires à ne pas prendre part au vote ou à se réfugier dans l'abstention.

C'est vous dire, mes chers collègues, combien vos rapporteurs – je pense pouvoir parler au nom de mon collègue Philippe Tourtelier – souhaitent faire oeuvre utile en rédigeant les conclusions définitives de leur rapport à l'issue du débat qui s'ouvre.

Nous serons donc très attentifs à vos propositions et à vos remarques, ainsi qu'aux déclarations des membres du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Tourtelier, co-rapporteur du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

Monsieur le président, je vous fais confiance pour me signaler la fin de mon temps de parole, car je n'ai pas rédigé mon intervention afin de m'adapter à celle d'Alain Gest et éviter les répétitions.

Cela étant, je peux dire d'emblée que rien ne m'a choqué dans les propos de mon co-rapporteur ; nous sommes bien sur la même ligne.

À chaque séminaire, j'étais responsable de la partie constat établie dans le rapport d'étape. Je vais donc rappeler certains constats même si des conclusions ont déjà été tirées, tout en renvoyant au rapport disponible en ligne et aux comptes rendus des séminaires.

Précisons le contexte et revenons sur quelques interrogations. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le président, la question portait sur l'évaluation de la mise en oeuvre de l'article 5 de la charte de l'environnement relatif à l'application du principe de précaution.

Nous pouvons y apporter la réponse suivante : si elle lui a donné plus de solennité, la constitutionnalisation du principe de précaution n'a finalement pas changé les choses ni dans un sens ni dans l'autre.

D'un côté, elle n'a pas validé les craintes d'un éventuel blocage de la recherche et de l'innovation, sauf dans le domaine des OGM qui, précisons-le, ne représentent pas l'ensemble des biotechnologies.

D'un autre côté, elle n'a pas non plus répondu aux attentes de clarification sur le plan juridique. Pourquoi ? L'article 5 est d'application directe dans le domaine de l'environnement. Or quand il est évoqué dans des procédures ou à l'occasion de controverses, c'est d'abord à propos de la santé. Alors que la charte de l'environnement plaçait la santé au second plan, dans les faits elle est évoquée en premier par les gens.

Ce glissement de l'environnement à la santé nous conduit à un premier constat : nos concitoyens estiment que la charte de l'environnement ne répond pas directement à leurs préoccupations. Ils ont parfois l'impression que le principe de précaution n'est pas appliqué, et cela d'autant plus qu'ils font – tout comme les médias – une confusion entre principe de précaution et principe de prévention, comme l'a très bien expliqué mon co-rapporteur. C'est tout de même assez embêtant.

À propos de cette confusion, je voudrais insister sur deux points qui ont aussi été relevés par le Comité de la prévention et de la précaution, au vu de la table des matières. Premier point : la temporalité et le principe de précaution. Ce dernier est-il compatible avec l'urgence ?

Nous le verrons dans les développements ultérieurs, la mise en oeuvre de ce principe suppose de rassembler des preuves, puis d'évaluer le risque, etc. Normalement, le principe de précaution n'est pas un principe d'urgence, sauf dans des situations exceptionnelles. Il faut le dire.

Deuxième point : dans le cas de la vaccination, le principe de prévention collective rencontre le principe de précaution individuelle, chacun ayant sa propre immunité. Individuellement, la médecine a toujours appliqué un principe de précaution : voilà le médicament, mais son usage comporte des risques individuels. Collectivement, il s'agit d'une prévention. Il faudra savoir articuler les deux, en particulier en fonction de l'évaluation de la balance risques-avantages, l'une des phases du déroulement de la procédure.

Première conclusion : l'article 5 n'a pas fondamentalement changé les choses. Pourquoi ? Parce que, selon l'un de nos interlocuteurs, il y a une dynamique du principe de précaution. Il est né dans les années soixante, puis il s'est diffusé au niveau international dans le domaine de l'environnement, avec la convention de Rio, le changement climatique, la biodiversité. La loi Barnier se situe dans cette ligne.

Cette dynamique s'est propagée, y compris en Europe : intégration dans le traité de Maastricht, jurisprudence précise, définition du champ – environnement, santé et sécurité alimentaire. La législation européenne est donc avancée ; au niveau international, nous en sommes restés au niveau des déclarations.

Il n'empêche qu'une dynamique existe. Depuis la convention de Rio, nous n'avons plus la même conception du progrès. Avant Rio, comme nous l'avons entendu lors des débats, prévalait le schéma suivant : l'avancée des connaissances nourrit les évolutions scientifiques qui se traduisent par des techniques qui apportent le progrès. Après Rio, il a aussi été question des dégâts environnementaux et sociaux du progrès.

L'analyse bénéfices-riques doit donc se faire en fonction des trois termes du développement durable. Lors de la création d'instances, il est important de ne pas le perdre de vue.

Notre rapport établit un deuxième constat qui justifie notre proposition de préciser les choses : tout en disant s'être approprié le principe de précaution, les chercheurs et les entreprises continuent à craindre que son application dévoyée, trop stricte ou décalée ne bride l'innovation ou la recherche.

C'est pourquoi il nous est apparu important de préciser le périmètre et les modalités d'application du principe de précaution dont tout le monde souligne le caractère procédural.

Il faut peut-être préciser aussi d'autres notions. Sans approfondir, j'en cite quelques-unes. Comment éviter le principe du parapluie – la protection maximum – en ce qui concerne les responsabilités ? Quelle protection pour les lanceurs d'alertes dans les dispositifs mis en place ? Deux types d'expertise sont nécessaires, l'une scientifique et l'autre sociétale, mais cette dernière ne doit pas être confondue avec la représentation de la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Avec Michèle Pappalardo, commissaire générale et déléguée interministérielle au développement durable, nous avons évidemment étudié l'avant-projet des co-rapporteurs Alain Gest et Philippe Tourtelier et nous partageons largement leurs analyses.

Il s'agit d'un dossier extrêmement difficile. Premier point : l'utilisation inappropriée d'un terme n'appelle pas la suppression du concept ; il s'agit plutôt de revenir à un usage approprié du terme en question.

Devrais-je rappeler que le Gouvernement n'a jamais utilisé le principe de précaution au moment de l'irruption du volcan islandais ? Au contraire, la France est le premier pays à avoir fait revoler des avions, en gérant un problème de sécurité aéronautique. On ne nous l'a jamais reproché.

Comme l'ont souligné Alain Gest et Philippe Tourtelier, le principe de précaution n'est pas un principe d'urgence. C'est agir de façon précautionneuse face à un risque mal évalué, en adoptant une démarche scientifique visant à mieux le connaître et à en apprécier les possibles conséquences sociales.

Pour en revenir à l'exemple de l'irruption volcanique islandaise, la France a décidé de ne pas fermer les aéroports de Toulouse, de Marseille et de Nice, même si les cartes météorologiques internationales gérées par nos amis britanniques pouvaient l'inciter à le faire. Ensuite, la France a décidé de faire voler des avions à vide, puis de démonter les moteurs afin d'analyser les risques. Personne ne nous a parlé du principe de précaution parfaitement inadapté aux circonstances. Dans le langage courant, on l'évoque pour des situations où il est souvent tout aussi inadapté.

Notre problème n'est donc pas tant juridique que sémantique, si je lis bien le rapport d'étape. L'acception courante ou médiatique de ce terme peut avoir des répercussions sociales ou sociétales.

Chantal Jouanno et moi-même, nous soutenons l'analyse des co-rapporteurs sur un deuxième point : ce principe d'action précautionneuse et documentée n'a pas arrêté la recherche et l'innovation ; il les a même fait plutôt progresser.

En revanche, nous sommes en désaccord sur un sujet dont il est bon que nous puissions discuter entre nous. Je ne crois absolument pas que le principe de précaution ait à voir quoi que ce soit avec le problème de la recherche sur les OGM.

D'abord, ce sujet est antérieur à 2005. Ensuite, même s'il a été un peu atténué grâce à la création du Haut conseil sur les biotechnologies, nous sommes confrontés au problème de l'importation d'un produit de commerce courant. Certains considèrent qu'il a un caractère diffusant et agressif à l'égard d'autres modes de cultures, mais je ne veux pas entrer dans ce débat.

Imaginons qu'il y a dix ans, la France n'ait pas autorisé la commercialisation d'un tel produit. Cette polémique n'aurait pas eu lieu. Je suis convaincu que la recherche sur les OGM – qui est nécessaire et que nous soutenons – aurait perduré et se serait même amplifiée et développée. Je n'établis pas de rapport de cause à effet entre ces deux événements.

Autre observation : le débat public est nécessaire dans ce domaine. Non seulement nous regrettons mais nous condamnons les conditions dans lesquelles, malgré des éléments scientifiques très préparés, le débat citoyen sur les nanotechnologies s'est déroulé.

Ceux qui invoquent ce sujet à contretemps et de manière inappropriée et qui font appel à la démocratie citoyenne sont en général ceux qui empêchent la tenue de débats citoyens parfaitement nécessaires ou qui n'y participent pas.

En résumé, le problème provient, nous semble-t-il, d'un mot du langage courant qui n'a, au fond, pas tout à fait la même signification dans la charte et au quotidien. Le mot lui-même créant la confusion, il faudra, et ce ne sera pas facile, l'encadrer et repréciser son champ, le considérer, en quelque sorte, comme une boîte à outils.

M. le rapporteur Gest s'est interrogé sur l'opportunité d'élargir le principe au-delà de l'environnement. Le débat est ouvert et l'on voit bien que le mot est d'utilisation extrêmement difficile. Je regrette, comme vous, messieurs les rapporteurs, que la Cour de cassation n'ait pas eu à se prononcer sur la notion de trouble de voisinage à propos du principe de précaution.

Le principe de précaution est un principe d'action précautionneuse, nécessitant un débat de plusieurs sciences. On a vu, grâce au Haut conseil sur les biotechnologies qui a maintenant un an d'existence, qu'une seule catégorie scientifique ne peut pas s'approprier le débat sur un élément de recherche. Que sociologues, juristes, économistes et autres scientifiques puissent participer à un débat contradictoire et ouvert dans la société nous paraît tout à fait utile et décisif.

Pour nous, le problème tient beaucoup plus à l'utilisation du mot qu'au concept lui-même, qui nous paraît devoir être défendu en tout état de cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je partage l'analyse de M. Borloo. Le principe de précaution me semble éminemment nécessaire. Je l'avais d'ailleurs défendu au nom de l'UMP, à l'époque où je siégeais sur les bancs de l'Assemblée nationale. Il est également parfaitement fondé. En réalité, il y a un malentendu sur la notion juridique du principe de précaution et sur l'utilisation qui en est faite dans le grand public. C'est pourquoi je suis très heureuse que le président Accoyer ait décidé, avec l'Assemblée nationale, d'engager un débat pour faire connaître la vraie consistance du principe de précaution et faire en sorte qu'il ne soit plus invoqué dans tous les champs de la vie collective et à tout moment.

Le principe de précaution est parfaitement justifié s'il est invoqué conformément à ce que prévoit la charte de l'environnement, pour éviter des dommages graves et irréversibles à l'environnement lorsqu'il y a un doute sur l'innocuité d'une pratique ou d'un objet. Mais on ne peut pas l'appliquer dans tous les domaines de la vie collective. Si le principe de précaution impose des responsabilités aux pouvoirs publics, des militants associatifs ne peuvent pas s'en réclamer pour justifier leurs propres actions. Il n'appartient pas au milieu associatif de se substituer aux pouvoirs publics dans l'application du principe de précaution.

Ce principe doit nous permettre de réagir de manière proportionnée et provisoire, autrement dit d'agir intelligemment en l'absence de faits scientifiquement établis. Pour moi, il est évident que la première application du principe de précaution, c'est davantage de recherche, ce qui est l'une des réactions « provisoires et proportionnées » naturelles face à une incertitude scientifique. En faisant dériver le principe de précaution dans le langage courant, en l'invoquant dans des domaines où il n'a pas à s'appliquer, on contribue à affaiblir sa portée, à le fragiliser et à le décrédibiliser.

Selon le ministère de la recherche, sans recherche scientifique, le principe de précaution n'a pas de sens. Qui dit précaution dit risque ; s'il y a risque, c'est qu'il y a incertitude, et face à l'incertitude, il y a un devoir de recherche.

Mais attention à la tentation d'inverser la charge de la preuve, ce qui arrive très souvent. D'aucuns invoquent le principe de précaution en disant aux pouvoirs publics : « j'ai l'impression qu'il y a un risque, démontrez-moi qu'il n'y en a aucun ; si vous n'y arrivez pas, vous ne pouvez pas agir ». Agir de la sorte, c'est faire du sentiment d'inquiétude le moteur du principe de précaution. Or le principe de précaution ne repose pas sur la crainte ; la crainte ne doit pas être érigée en principe d'action publique.

S'agissant des OGM ou du clonage thérapeutique, par exemple, il faut se garder d'utiliser le principe de précaution pour faire peur. Sur les OGM, il existe des certitudes scientifiques, notamment une : les OGM n'existent pas en tant que catégorie. Chaque organisme qui subit une modification génétique pose ses propres questions, de la même manière que chaque médicament est une molécule différente. Cela signifie que chaque OGM nécessite ses propres études scientifiques. Et puisque nous importons, nous consommons des OGM, nous avons un devoir de recherche.

Sur le maïs Monsanto 810, nous avons invoqué la clause de sauvegarde parce qu'il y avait une incertitude sur les risques. De ce point de vue, nous avons fait une application saine du principe de sauvegarde. La précaution, c'est prendre ses responsabilités en présence d'une incertitude quant aux risques, ce n'est pas conclure d'une incertitude sur les risques qu'il faut arrêter la recherche, comme cela s'est passé à Colmar avec le fauchage de plants OGM expérimentaux. Ces plants avaient certes été mis en place dans le cadre d'une loi précédant celle sur les OGM, mais c'était au terme d'une très large concertation associant des sociologues, des agronomes et toute la population, qui ensemble ont décidé des mesures à prendre pour que l'expérimentation se déroule dans des conditions de risque minimal. Et malgré cela, les plants ont été fauchés.

De tels agissements doivent être considérés comme une rupture de contrat, en quelque sorte. La loi sur les OGM prévoit le maximum de mesures de précaution en application du principe de précaution, moyennant quoi les chercheurs doivent pouvoir chercher dans la sérénité. Un contrat moral, un contrat tacite a été passé entre la représentation nationale…

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Cela s'est bien passé ainsi. Les travaux conduits par l'INRA étaient acceptés par tous, ils respectaient les normes de la loi. Derrière ces recherches, c'est la souveraineté nationale qui est en question, car il est de son ressort de savoir comment fonctionnent les OGM. Si nous ne conduisons pas de telles recherches, nous nous mettons entre les mains des intérêts que vous dites combattre, monsieur Mamère.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Nous avons une responsabilité politique, que mon ministère assumera : partout où il y a incertitude scientifique, il y a devoir de recherche. Ce devoir impose de se mettre d'accord, en vertu du principe de précaution, sur le cadre légal dans lequel ces recherches doivent avoir lieu, sur les limites éthiques et environnementales de ces expérimentations. Nous le faisons aussi dans le cadre des lois bioéthiques, nous le ferons aussi, j'imagine, dans le cadre des nanotechnologies. Mais il n'est jamais possible d'ériger l'obscurantisme comme un principe de gouvernance politique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous passons aux orateurs.

Pour le groupe GDR, la parole est à M. Noël Mamère, pour deux minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

L'objet de cette réunion est de maintenir le principe de précaution, et, si j'ai bien compris le rapport de nos deux collègues et la réponse de M. le ministre d'État, il n'est pas question de remettre en cause l'article 5 de la charte de l'environnement. Comment Mme la ministre de la recherche peut-elle parler de principe de précaution et d'une loi sur les OGM qui protégerait l'environnement et la santé alors même que l'expérience et le recul nous montrent que le risque zéro n'existe pas et qu'il y a des risques de contamination bien au-delà des limites qui ont été posées ?

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

On le sait, et je peux vous donner des exemples.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Des expériences en laboratoire ont été menées.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

J'ai dit qu'il y a un devoir de recherche !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Le principe de précaution n'a jamais empêché le devoir de recherche. Mais nous disons qu'on ne transforme pas les champs de nos paysans en paillasses de laboratoire. Oui, nous sommes pour la recherche, mais en laboratoire confiné. Le principe de précaution, comme l'a très bien dit M. Tourtelier, ne s'applique pas dans l'urgence, précisément pour permettre à la recherche de suivre son cours. Vous prétendez l'engager pour les nanotechnologies, mais elles sont déjà à l'oeuvre ! Des produits contenant des nanoparticules sont déjà vendus dans le commerce sans même que l'on ait pris la précaution de savoir quel pouvait être leur impact environnemental ou sanitaire. Le principe de précaution n'a pas été appliqué.

Monsieur et madame les ministres en charge de l'écologie, êtes-vous d'accord avec l'idée de faire du principe de précaution un principe général, qui ne s'appliquerait pas simplement aux questions environnementales mais aussi aux questions sanitaires ? Pour ce faire, faut-il publier un décret ou voter une nouvelle loi ? Ne serait-il pas plus judicieux de tenir la promesse que vous aviez faite d'une loi sur l'information en matière d'environnement et en matière sanitaire, qui devait être présentée au Parlement le 30 juin prochain ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Je me souviens très bien du débat de février 2005, au cours duquel j'avais posé quelques questions. J'en reprendrai quelques-unes en rappelant la charte sur la base de laquelle nous travaillons. À propos de l'article 5 de cette charte – lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités veillent à prendre des mesures provisoires et proportionnées –, je demandais : qu'est-ce que la réalisation scientifiquement incertaine d'un dommage ? Qu'est-ce alors que la gravité et l'irréversibilité d'un dommage incertain ? Que peuvent être des mesures proportionnées à une valeur dont la principale qualité est d'être une possibilité incertaine ?

C'est sur de telles bases que le juge va devoir se prononcer. Permettez-moi de continuer à penser qu'il risque de le faire en toute méconnaissance de cause puisque, faute de certitudes scientifiques, la simple possibilité d'un dommage grave et irréversible comporte des risques par définition hypothétiques. Donc, la question du principe de précaution, telle que je l'ai bien entendue au fond, c'est d'abord celle de son indéfinition.

La question n'est pas mince, c'est même plutôt un gisement illimité de contentieux juridiques possibles. Si nous avions à prendre des mesures telles que M. Gest les évoquait, il me semble qu'il faudrait revenir sur la confusion de départ, qui a justifié à l'époque que je m'abstienne, entre précaution et prévention. Autant la précaution relève d'un acte, autant la prévention relève d'un principe. C'est d'ailleurs ce que l'Europe a toujours dit.

Je rappelle que le Conseil européen de Nice de décembre 2000 n'a jamais parlé de principe de précaution, mais s'est toujours appuyé sur la présomption ou la prévention.

Peut-être pourrait-on donner au principe de précaution un contenu probabiliste évaluable en substituant aux mots : « bien qu'incertain » le terme de « probable » ? Auquel cas, devant un risque probable, on conviendra des mesures à prendre…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Reste que je m'interroge tout autant qu'en février 2005.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Monsieur Mamère, le deuxième point que vous avez évoqué a été repris – cela ne vous a pas échappé – dans la loi Grenelle 2 : je vous renvoie aux articles 72, 73, etc., qui traitent de prévention sanitaire.

Sur votre première question, pour être honnête, je m'interroge. Nous avons déjà du mal à rester sur le principe lui-même – je n'imagine pas que vous souhaitiez un blocage de l'ensemble du dispositif. La délimitation du champ d'application n'a pas été simple : on se souvient des débats de 2005. Chercher à étendre un concept auquel nous nous attachons plutôt à essayer de donner réalité pour assurer sa puissance, me paraît difficile, et surtout porteur d'un grave risque d'incompréhension. Efforçons-nous plutôt, à la suite du rapport, de travailler ensemble, de bonne foi, à conforter la puissance et la vérité de ce concept plutôt que de pousser à un éparpillement qui le rendrait particulièrement fragile et peu applicable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je partage l'avis de Jean-Louis Borloo : la santé relève de la prévention.

Dès lors que l'on pressent des risques pour la santé humaine, on ne les prendra jamais. C'est cela, la prévention : une réponse négative systématique dès lors qu'il y a risque pour la santé.

En revanche, si la question des dommages graves et irréversibles à l'environnement nous a semblé devoir être inscrite dans la Constitution, c'est parce qu'elle était beaucoup plus diffuse et suscitait des réactions moins fortes des pouvoirs publics. C'est pour cela que le principe de précaution a été intégré dans la charte de l'environnement. On se souciait beaucoup de la santé humaine, mais pas toujours suffisamment de la planète et de l'environnement dans lequel l'homme évolue. Mais je n'imagine pas un seul instant que l'on puisse, à chaque fois que se profile un risque, fût-il potentiel, pour la santé humaine, prendre une décision susceptible de la mettre en danger. Lorsque nous parlons de santé humaine, nous sommes dans le domaine de la prévention, et dans le domaine de la précaution lorsque nous parlons de l'environnement : le risque est alors plus diffus, et nécessite que l'on y remédie.

Enfin, sur la question des OGM, permettez-moi de vous dire, monsieur Mamère, que ce n'est pas aux militants associatifs de décider comment on fait de la bonne recherche.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

C'est aux chercheurs eux-mêmes de définir le protocole. On ne peut pas faire de la recherche en serre pour un produit qui se cultive en plein champ et vous le savez. Vous ne verrez pas les pleins effets, bénéfiques ou pervers,…

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Ni le rapport coût-bénéfice, c'est certain !

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

…ni les réels dangers d'une culture si vous ne la cultivez pas en plein champ. C'est bien d'ailleurs pour cela que vous fauchez…

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Pas du tout. Venez avec moi à Colmar : vous verrez que nous n'avons pas planté au milieu des champs n'importe comment. Vous pourrez constater à quel point toutes les précautions ont été prises pour cette expérimentation. à l'issue d'un processus extraordinairement consensuel et concerté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Avez-vous une réponse à apporter à M. Michel Piron ?

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Nous avons déjà eu ce débat entre prévention et précaution il y a quelques années. Michel Piron a une totale foi dans la fiabilité de la science, ce qui le conduit à dire : ou il y a certitude, ou il n'y a pas certitude. C'est un raisonnement probabiliste. Nous sommes sur un raisonnement un peu plus flou : l'incertitude quant à l'existence même du risque.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Ce n'est pas un raisonnement probabiliste, monsieur Mamère, et l'on ne peut le quantifier. Il est plus incertain.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Permettez-moi une digression sur la notion d'anticipation. La planète bouge, les éléments bougent, les événements bougent, les êtres humains bougent ; une vérité scientifique ou une amorce de vérité scientifique du moment peut nécessiter des études complémentaires par anticipation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Les deux rapporteurs, Alain Gest et Philippe Tourtelier, au nom du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques sur la mise en oeuvre du principe de précaution, se veulent rassurants. Ce principe de précaution n'est pas menacé et personne ne propose de l'abroger.

Pour autant, le rapport d'étape ne peut nous faire oublier que Jacques Attali, en 2007, dans ses propositions pour libérer la croissance, ne manqua pas d'indiquer que la référence à l'article 5 de la charte de l'environnement à ce principe génère des incertitudes juridiques et instaure un contexte préjudiciable à l'innovation et à la croissance en raison des risques de contentieux en responsabilité à l'encontre des entreprises les plus innovantes.

De même, il ajouta que l'article 5 risquait d'inhiber la recherche fondamentale et appliquée et jugea sa rédaction très ouverte susceptible de paralyser l'activité économique. Dès lors, il ne faut pas s'étonner qu'il ait proposé d'abroger ou à défaut de préciser très strictement la portée de l'article 5 de la charte de l'environnement de 2004.

À la suite des réflexions et analyses de Jacques Attali, je voudrais aussi relever celles du président de notre assemblée lors de la réunion du comité du 18 mai 2010. Il a tenu à préciser qu'il ne fallait pas revenir sur le principe de précaution en lui-même ; il a aussi évoqué la perspective qui s'ouvre à nous d'en encadrer les applications. Il considère en effet que son interprétation erronée a eu des conséquences considérables dans deux domaines dont les applications technologiques et industrielles sont fondamentales. À l'entendre, la recherche française en biotechnologie est menacée de mort et dans le domaine des nanotechnologies montent des peurs nouvelles avec un glissement de la sphère de l'environnement vers celle de la santé.

Des premières réponses plutôt rassurantes ont été apportées par nos rapporteurs. Ils ont indiqué que les chercheurs ont fait le constat du peu d'impact du principe de précaution sur le volume et la nature de la recherche, hormis le cas des biotechnologies et que les opérateurs économiques ont de facto tendance à intégrer, à apprivoiser, à s'approprier le principe de précaution en tant qu'élément d'un contexte économique général.

Monsieur, mesdames les ministres, êtes-vous favorables à un texte législatif qui conduirait à encadrer les applications du principe de précaution ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Ce n'est pas tellement une question d'encadrement au sens propre : nous aurons des difficultés pour définir ex ante les conditions déterminant l'application du principe de précaution. En général, c'est plutôt a posteriori que l'on s'aperçoit que l'on était bien dans une situation de précaution… Ainsi, pour ce qui est des nanotechnologies, nous ne partons pas de rien, loin s'en faut : les nanoparticules ont toujours existé dans notre environnement. La mesure décidée à l'issue du Grenelle de l'environnement – autrement dit d'un débat de la société civile, pour simplifier – consiste à les inventorier, à les recenser et à les suivre.

Rappelons par ailleurs que tout ce qui est « nano » dans le domaine médical et alimentaire est soumis à une procédure stricte : nous ne partons pas de rien, je le répète. Cette volonté de suivre les « nano » procède vraiment d'une application proportionnée du principe de précaution. Nous aurons du mal à en définir ex ante les conditions : il s'agit moins d'un encadrement que d'une boîte à outils.

Nous avons eu en début de la semaine un travail intéressant du comité prévention-précaution, qui a étudié la prise de décision en situation d'incertitude et nous fait des propositions sur les acteurs appelés à intervenir aux différents stades de la décision : il y a d'abord les acteurs qui doivent alerter les pouvoirs publics sur une situation d'incertitude, de risque potentiellement majeur et irréversible ; viennent ensuite les acteurs qui peuvent essayer de caractériser ce risque, et ensuite ceux qui doivent organiser une forme de concertation avec la société civile pour mettre en balance les avantages et inconvénients de telle technologie, et montrer la nécessité de prendre des mesures de précaution.

Il nous faudrait davantage définir cette boîte à outils que le principe même d'un encadrement que nous ne parviendrons jamais a arrêter ex ante compte tenu de la diversité des sujets.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

J'abonde dans le sens de Chantal Jouanno : nous n'avons pas besoin d'un texte. En revanche, nous avons besoin d'un statut de l'expert. Celui qui déclenchera l'alerte sur le principe de précaution, c'est celui qui dira : « Il y a peut-être une hypothèse de risque ».

Nous avons mis au point une charte de l'expertise pour avoir des experts déontologiquement indépendants, dotés d'une charte de déontologie : si un produit présente un risque, il faut des experts totalement indépendants pour pouvoir détecter ce risque ou cette incertitude.

Nous avons également travaillé sur un statut pour les donneurs d'alerte : certains chercheurs peuvent se rendre compte de quelque chose et prendre un risque personnel en le dénonçant. Ce statut de l'expert donne chair au principe de précaution. Avoir des personnalités scientifiques très indépendantes,…

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Certes ! Mais il faut que les experts garantissent qu'ils n'ont pas de conflits d'intérêts, tout comme il faut garantir aux experts qu'ils ne seront pas « placardisés » sitôt qu'ils diront la vérité – cela peut arriver.

Pour ce qui est des nanotechnologies, ne tombons pas dans le même travers que pour les OGM. Les nanotechnologies n'existent pas en tant que telles : nous respirons la fumée du feu de bois depuis des millénaires : autant de nanoparticules qui entrent dans nos narines… Je suis désolée de vous dire qu'il y a, par des phénomènes de transformation de toutes sortes, des nanoparticules partout dans l'univers.

Certaines nanoparticules sont protégées et n'entrent pas en contact avec le corps humain ; d'autres vont entrer en contact avec le corps humain. Chaque utilisation de nanoparticule doit faire l'objet d'une étude d'impact spécifique : c'est ce que nous faisons avec les agences chargées de vérifier les effets sur la santé, l'environnement et les aliments. Mais je ne vois pas ce qu'il peut y avoir de commun, intellectuellement et scientifiquement, entre les « nanos » que l'on utilise dans votre iPhone, les nanomédicaments qui permettront de cibler une tumeur cancéreuse, ou des nanotubes que l'on mettra dans les murs ou ces nanoparticules d'argent que certains fabricants de chaussettes ont trouvé intelligent de mettre comme bactéricide !

Il ne faut pas traiter des sujets qui n'ont rien à voir les uns avec les autres en les globalisant. Car en globalisant le problème, on aboutit à des réponses simplistes à des questions simplistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bertrand Pancher

Les ministres nous ont éclairés sur le principe de précaution. Il a besoin d'être rappelé en permanence. Ce principe est à l'opposé du principe d'inaction : c'est un principe d'action dans des zones d'incertitude, qui s'applique notamment aux risques émergents. Il ne s'agit nullement d'arrêter les recherches, mais bien de trouver des alternatives au moratoire généralisé.

Dans ces conditions, faut-il abroger l'article 5 de la Charte de l'environnement ? Évidemment non ! Le principe de précaution aurait été une vraie réponse aux scandales sanitaires et environnementaux passés : amiante, pesticides, PCB, rayons X, dioxyde de soufre comme le démontre à partir de nombreux exemple l'Agence européenne de l'environnement dans sa publication de 2001 : Signaux précoces et leçons tardives.

Faut-il voter un texte d'application dans ce domaine ? Je reste particulièrement prudent. Faut-il préciser les conditions d'application du principe ? La Commission européenne prend en compte le principe de précaution non seulement dans le domaine de l'environnement, mais également dans une acception très large, et ce n'est pas le moment de réduire le champ du principe de précaution.

Devons-nous faire référence à un « coût économiquement acceptable » en évaluant les gains et les risques ? J'appelle votre attention sur le fait suivant : les évaluations économiques des destructions environnementales ou des effets sanitaires étant très peu nombreuses, cet aspect se retrouve systématiquement sous-évalué. Pourtant, nous disposons de données très intéressantes : selon le rapport intitulé « Les perspectives de l'environnement de l'OCDE », une estimation des coûts directs ou indirects de santé liés à l'environnement pourrait s'élever à 3,2 % du PIB – vision qui serait encore plus réductrice si nous prenions en compte les coûts réels liés à l'environnement.

Trois questions se posent cependant.

La première touche aux moyens de la recherche. Les nanotechnologies, par exemple, représentent seulement 2 % du budget de recherche publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Bertrand Pancher

La deuxième concerne la problématique de l'expertise, l'absence d'expertise pluridiscipliaire et la gouvernance de l'expertise.

Debut de section - PermalienPhoto de Bertrand Pancher

C'est celle du débat public. Pourquoi avons-nous si peu de débat public dans notre pays pour faire en sorte que le grand public s'approprie la notion de risque ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Nous sommes bien évidemment très favorables au débat public. C'est du reste la loi Grenelle qui a proposé l'organisation d'un débat public sur les nanotechnologies.

Cependant, je dois à l'honnêteté de dire que ce débat public a purement et simplement été empêché dans une demi-douzaine de très grandes villes de France par des groupuscules qui n'ont pas laissé les scientifiques s'exprimer.

Pour ma part, j'ai la culture du débat public, celle qui permet au pour et au contre de s'exprimer au même endroit. Vous excuserez le Gouvernement de ne pas lancer de débats publics dans des domaines où ils ne peuvent se tenir. Je trouve extrêmement regrettable que l'on bâillonne les scientifiques de notre pays quand ils ont des choses à dire et questionnements à confronter avec d'autres questionnements. Je souhaite que nos concitoyens puissent poser toutes les questions aux scientifiques, y compris celles qui dérangent. Ils seront infiniment rassurés quand ils verront que nos scientifiques ne sont pas des apprentis sorciers, mais des hommes et des femmes responsables, des citoyens qui, à chaque fois qu'ils réfléchissent prennent des précautions au sens courant du terme, qui font en permanence de la prévention de risque. Le niveau de prévention que l'on applique à la recherche en nanotechnologies est un niveau de précaution extrême. Cela doit se dire et se montrer. Donc, oui au débat public.

Le crédits consacrés à la recherche dans les nanotechnologies – question posée par M. Pancher – augmentent considérablement : c'est une des priorités du programme d'investissements d'avenir. Mais ce qui importe surtout, c'est de faire progresser le montant de la recherche en écotoxicologie. À l'issue du Grenelle de l'environnement, il a été décidé de le décupler. Cette recherche a pour but de vérifier les conséquences environnementales et de santé publique de certaines nouvelles particules ou certains produits d'usage courant, parfois plus toxiques que l'on ne le croit.

Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, nous avons pris l'engagement de former 400 écotoxicologues en dix ans et de développer une véritable filière de recherche en cette matière, qui permette de mesurer les conséquences sur l'environnement de toutes les substances dont nous nous servons dans la vie quotidienne.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Jacob, président de la commission du développement durable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Je souhaite tout d'abord féliciter nos deux rapporteurs pour l'excellence et la précision de leur travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Il convient de séparer le principe de précaution du principe de prévention. Le premier s'applique lorsque la science ne peut ni prouver ni exclure ; il faut alors favoriser la recherche. Lorsque le risque est établi, on fait intervenir le principe de prévention comme pour la grippe H1N1: on peut le sous-évaluer ou le surévaluer, mais il est connu avec certitude. Là est toute la différence.

Tout est dans l'article 5 de la charte de l'environnement. Cela étant, il est peut-être nécessaire de préciser davantage les choses dans l'application du principe de précaution, souvent utilisé pour freiner et bloquer la recherche. Je reviens sur l'exemple, cité tout à l'heure, des OGM : je pense pour ma part qu'il faut très rapidement reprendre la recherche en plein champ. Le Gouvernement est-il prêt à rouvrir ce dossier et à autoriser la recherche de plein champ ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Nous subissons la concurrence de pays voisins où la culture des OGM est autorisée, ce qui leur permet de réduire considérablement l'utilisation des pesticides et des intrants. Il faut donc rouvrir le débat sur cette affaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

C'est une question importante adressée par le président d'une commission non moins importante de l'Assemblée au ministre de la recherche.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

On ne forcera pas nos chercheurs à chercher s'ils ont le sentiment qu'ils ne peuvent pas chercher dans de bonnes conditions…

La vérité, c'est que nos programmes de recherche en matière de biotechnologies végétales, notamment d'OGM, ont été divisés par quatre en quelques années parce que les chercheurs ont le sentiment qu'ils n'arriveront pas à mener leurs recherches à leur terme.

Il est vrai qu'au moment du Grenelle de l'environnement, nous avions multiplié les budgets de l'Agence nationale de la recherche, en matière de biotechnologies végétales. Le message était le suivant : dès lors que nous avions voté une loi sur les OGM et abouti à un consensus national dans un cadre législatif, et que nous avions fait voter l'amendement Chassaigne définissant de manière extrêmement restrictive les conditions dans lesquelles on peut faire des recherches en plein champ, c'était possible.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Si l'on veut faire de la recherche en plein champ, de la recherche expérimentale, on peut le faire grâce à l'amendement Chassaigne en prévoyant 150 mètres de part et d'autre des plants OGM.

Mais même cela, monsieur le président Jacob, on n'y arrive pas : l'exemple de Colmar est à cet égard malheureusement emblématique. Si la loi n'est pas respectée, les chercheurs sont en droit de penser qu'en France, il est impossible de mener des recherches dans le domaine des OGM. Dans ces conditions, ils choisissent ou de quitter la France ou de travailler sur d'autres thématiques. C'est pourquoi j'ai lancé un programme d'alternative aux OGM en matière de biotechnologies végétales pour essayer de trouver d'autres façons de modifier les cultures qui ne soient pas des modifications génétiques. La France risque de prendre un vrai retard dans la lutte contre le changement climatique et pour de la réduction des pesticides pour ce qui est de la productivité de son agriculture. Nous allons donc lancer d'autres programmes alternatifs, car nos chercheurs ont compris qu'un programme de recherche s'étalent sur plusieurs années et qu'il faut pouvoir s'y engager en toute sérénité, ce qui n'était plus le cas avec les OGM en France.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Permettez-moi de commencer par une remarque générale : mieux vaut dans ce genre de débat parler franchement… Si vous êtes contre le principe de précaution, madame la ministre de la recherche, dites-le carrément, car c'est ce qui ressort de vos propos ! Lorsque vous parlez d'obscurantisme, est-ce à dire que vous associez le principe de précaution à de l'obscurantisme ? Quand vous dites que ce n'est pas aux associations de se substituer aux pouvoirs publics, est-ce à dire que le Gouvernement serait faible à ce point depuis trois ans ? Il ne m'a pas semblé ! Lorsque vous appelez à inverser la charge de la preuve, cela signifie-t-il que vous souhaitez inverser la charge de la preuve par rapport au principe de précaution ? En fait, vous voudriez qu'il ait une sorte d'innocuité juridique et politique.

J'invite également M. le ministre d'État, ministre de l'écologie et Mme la secrétaire d'État à s'exprimer clairement sur ce point. Si vous êtes pour, dites-le franchement. Mais ne vous cachez pas derrière votre petit doigt.

J'ai l'impression, madame la ministre, que nous ne vivons pas dans le même pays. En matière de principe de précaution, nous revenons de loin. Le contentieux est énorme. Certes, vous pouvez refuser de voir la réalité, mais nos concitoyens ressentent que, depuis des années, on leur a caché des choses très graves, comme l'amiante par exemple. Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour savoir ce qui s'est passé avec l'amiante – 3 000 morts en moyenne par an depuis quelques années, ce n'est tout de même pas rien – ou d'autres technologies. Le secret est maintenu dans de multiples domaines. Pourquoi le rapport Roussely sur le nucléaire est-il classé « secret défense » alors qu'il touche à l'avenir d'une technologie si importante pour l'énergie en France ?

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je souhaite que vous disiez clairement si vous vous inscrivez toujours dans la logique scientiste selon laquelle toute découverte est un progrès ou la logique « économiciste » selon laquelle tout ce qui permet de gagner de l'argent est bon à prendre ? Il vaut mieux le dire franchement car lorsque Mme Jouanno dit qu'il faut tenir compte des coûts économiques et sociaux du principe de précaution, j'aimerais qu'elle clarifie ce qu'elle entend par là et qu'elle nous dise quelle forme aurait la boîte à outils dont elle a parlé ? Nous avons compris que ce n'était pas une loi.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Notre collègue Chanteguet a posé la question tout à l'heure. Pour ma part, je n'ai pas entendu de réponse précise.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur de Rugy, vous n'aviez pas la chance de siéger à l'Assemblée nationale lorsque la charte de l'environnement a été votée. Comme tous mes propos et toutes mes prises de position en tant qu'orateur de l'UMP sur la charte de l'environnement figurent au Journal officiel, je vous y renvoie. Vous pourrez lire ce que je pensais du principe de précaution et je n'ai pas changé d'avis depuis.

Depuis le début, j'ai pensé que ce principe était indispensable ; j'ai même essayé d'en convaincre une partie de la majorité à l'époque, ce qui était du reste ma mission alors. Ne proférez pas de contrevérités dans cette assemblée devant des témoins qui étaient présents et qui pourront témoigner à la fois de la constance de mon engagement au service du principe de précaution et du fait que je n'accepte pas que ce principe soit utilisé à d'autres fins que celles pour lesquelles il a été voté. Il a été voté pour protéger notre environnement des atteintes graves et irréversibles. En cas d'incertitude scientifique, il impose aux pouvoirs publics d'agir de manière provisoire et proportionnée lorsque ce risque est potentiellement capable de se manifester. Ce n'est pas du tout votre interprétation, monsieur de Rugy.

Et lorsque vous dites que sur le nucléaire, j'entretiens le secret, (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), je vous rappelle que j'ai créé le statut juridique du lanceur d'alerte qui permet ainsi à tous les chercheurs, y compris dans le domaine nucléaire, de dire ce qu'ils voient, ce qui n'était pas possible par le passé.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

J'ai instauré une charte de l'expertise indépendante pour permettre aux chercheurs d'avoir la parole libre. Alors, monsieur de Rugy, ne me critiquez pas, ne m'attaquez pas sur le principe de précaution…

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

…parce que je l'ai défendu et je l'ai fait voter !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Pourquoi le rapport Roussely est-il classé « secret défense » ?

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je ne suis pas ministre de la défense !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

L'intégration de l'approche socioéconomique dans la mise en oeuvre du principe de précaution est justement l'une des conclusions du Comité de la prévention et de la précaution. Je vous renvoie à leur rapport sur la décision publique face à l'incertitude ; c'est du reste ce que nous avons mis en oeuvre dans le Grenelle. Face à des découvertes nouvelles, l'approche scientifique vise à évaluer le risque et, en balance, il faut également évaluer les avantages que la société en attend. L'approche socioéconomique repose sur l'organisation d'un débat public. Le principe de proportionnalité des mesures que l'on doit prendre pour la mise en oeuvre du principe de précaution repose sur cette logique. Cessons de penser uniquement de manière purement scientifique. Intégrons aussi les attentes socioéconomiques de la société. Cela fait partie du principe de proportionnalité.

L'avis rendu par le Comité de la prévention et de la précaution, et c'est là tout son intérêt, recommande que le débat public, autrement dit la participation d'une manière ou d'une autre de la société civile, puisse intervenir dans la prise de décision sur la mise en oeuvre du principe de précaution. C'est l'un des apports essentiels de ce rapport : il introduit une dimension éthique dans la mise en oeuvre du principe de précaution. Que vous l'appelez « coût » ou « avantage », en tout état de cause, c'est la prise en compte de l'approche socioéconomique.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Je suis un peu étonné de ce que j'entends. Nous essayons d'aborder, de la manière la plus honnête possible, une question difficile. Je ne crois pas qu'il y ait dans ce domaine des parangons de vertu qui protégeraient la société, d'une part, et, d'autre part, de complets irresponsables : ce ne sont pas là les termes du débat.

Nous avons un texte. Nous essayons de voir comment l'appliquer, le renforcer, le défendre – du moins pour la majorité d'entre nous, puisque le texte a été voté à la majorité –, et nous étudions la manière dont il a été affaibli par des utilisations inappropriées. J'ai évoqué ces utilisations à propos des avions ; on pourrait en parler dans bien d'autres domaines. Sur ces points, je souhaite m'enrichir de votre appréciation : comment pouvons-nous progresser ?

Voici un exemple, relatif à l'expertise. Je m'attarderai un instant sur ce point – je me suis très peu exprimé, monsieur le président. J'ai été très heureux du bilan du Haut Conseil des biotechnologies à l'issue de sa première année d'exercice : selon le président du comité scientifique, le fait que le comité soit composé de scientifiques de cultures très diverses a été une extraordinaire source d'enrichissement pour chacun de ces spécialistes.

Mieux : toujours selon le président du comité scientifique, même si le HCB est composé de deux comités qui devaient à l'origine travailler séparément, le fait que le comité économique, éthique et social, qui représente d'autres acteurs de la société, ait pu interroger directement les scientifiques et leur poser d'autres questions que celles qu'ils se posaient eux-mêmes, leur poser des questions qui venaient d'autres parties de la société, a modifié le point de vue de ces scientifiques sur les problèmes qu'ils étudient.

Il n'y a donc pas une bonne expertise et une seule : c'est la confrontation des expertises, organisée de manière démocratique, qui permet de progresser. On ne peut pas opposer ceux qui auraient absolument raison à ceux qui auraient absolument tort. Quel type de recherches mener ? Comment ? Pourquoi ? Comment les accompagner ? Voilà ce qu'il s'agit de mieux identifier.

Or le HCB, qui constitue une première mondiale, née dans des conditions extrêmement difficiles où l'on comptait les pour et les contre – pour ou contre telle ou telle culture, telle ou telle analyse scientifique –, est en train de bâtir une méthode pour apprécier et améliorer une décision publique positive, qui permet l'action mais reste précautionneuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Merci, monsieur le ministre d'État.

La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Je suis très favorable à l'application du principe de précaution, mais à condition de l'appliquer dans les deux sens. Autrement dit, s'il ne faut pas entreprendre une action nouvelle sans expérimentation préalable et de manière brutale, il ne faudrait pas non plus interrompre un état de fait brutalement et sans procéder à des expériences.

Je songe par exemple à la suppression des molécules dans les produits phytosanitaires : en supprimant une molécule efficace sans en prévoir le remplacement, on peut s'exposer à une pandémie dans le règne végétal. On pourrait détailler davantage cet exemple ; mais ce serait difficile dans le délai qui m'est imparti.

Monsieur Mamère, si, comme je viens de le dire, le principe de précaution ne doit pas être appliqué dans l'urgence, il faut en informer les faucheurs. En effet, le fauchage est une mesure d'urgence à laquelle il ne faut pas recourir au nom du principe de précaution, si l'on ne veut pas mettre brutalement fin à une situation établie.

Enfin, j'aimerais que les avis des experts fassent systématiquement l'objet d'un débat avec les professionnels.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Vous évoquez la suppression des deux molécules qui posent un problème : le duron et le méthomyl. Or, en l'espèce, il s'agit d'appliquer non le principe de précaution, mais le principe de prévention, puisque les risques sont bien connus et évalués : ils touchent les utilisateurs, d'une part, et les eaux, de l'autre.

Cela étant, après en avoir débattu, nous avons eu des difficultés à trouver les molécules de substitution que nous devons proposer aux agriculteurs – puisque nous avions consacré le principe d'un droit à l'alternative en 2007, dans le cadre du Grenelle.

Je le répète, il ne s'agit donc pas de précaution, mais de prévention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Ce que je veux dire, c'est qu'il faut prendre des précautions avec la prévention ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Gaillard

Après avoir entendu les orateurs, je suis moi aussi très satisfaite de constater que le principe de précaution n'est pas remis en cause. Je souhaite simplement aborder deux questions.

Il me semble que la commission Coppens, dont je faisais partie et qui a travaillé sur le sujet pendant plusieurs mois, avait trouvé le meilleur moyen de faire accepter par tous cet article 5.

Une question en particulier, qui avait posé des problèmes, n'a pas été véritablement approfondie : qu'appelle-t-on un dommage irréversible ? Faut-il donner à cette notion un sens scientifique ou un sens environnemental, c'est-à-dire humain ? Un dommage que l'on met dix mille ans à réparer est remédiable scientifiquement, mais non humainement ; et c'est cela qui, dans l'application du principe de précaution, a suscité bien des craintes.

Deuxièmement – vous l'avez dit, madame la secrétaire d'État –, on confond souvent prévention et précaution. Je m'interroge sur ce point. En effet, Mme Pécresse a parlé de développer la recherche, notamment en écotoxicologie. Or nous n'avons plus de toxicologues, l'enseignement des sciences naturelles est limité dans notre pays et nous n'avons plus de naturalistes ; nous n'avons plus que des chercheurs en biotechnologie. Nous serons donc confrontés à un problème si nous voulons que des scientifiques de toutes formations livrent une expertise sur ces sujets.

Mme Pécresse est malheureusement partie ; j'aurais aimé savoir si elle comptait inverser la tendance qui caractérise la recherche dans ces disciplines.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Je ne peux malheureusement pas répondre à la seconde question.

Quant à la première, elle est très délicate. Car, pour être tout à fait honnête, lorsqu'on étudie des exemples concrets, il s'agit presque toujours de dommages irréversibles pour l'homme, rarement pour l'environnement.

Ainsi, j'ai rarement entendu invoquer le principe de précaution à propos du lancement d'un plan de lutte contre la disparition d'une espèce, alors même que nous avons beaucoup à apprendre des différentes espèces, ne serait-ce que par la biomimétique.

Un exemple d'application du principe de précaution nous est fourni par les téléphones portables ; je ne parle pas des antennes relais, mais bien des téléphones. L'avis de l'AFSSET a révélé que 12 % des études jugées sérieuses faisaient état d'un risque pour les jeunes enfants qui les utilisaient de manière abusive. Cela a conduit à intégrer au Grenelle 2 des recommandations à ce sujet. Dans ce cas, il s'agit bien d'un dommage grave et irréversible, puisqu'il compromet le développement du cerveau de l'enfant. De fait, c'est toujours de l'homme qu'il s'agit.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Madame Gaillard, je demanderai à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche de vous faire parvenir sa réponse à votre question sur l'écotoxicologie, qui figurera naturellement au compte rendu de nos débats.

Mais peut-être M. le ministre d'État peut-il d'ores et déjà vous fournir des éléments de réponse.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

En effet, monsieur le président. Un pôle d'écotoxicologie a été constitué autour de l'INERIS, grâce à des recrutements, et le budget triennal que vous avez voté au titre du Grenelle alloue 115 millions d'euros à la recherche en toxicologie et en écotoxicologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Gaillard

Je le répète, il n'y a plus de naturalistes ; or nous avons besoin de leur expertise pour appliquer le principe de précaution en matière environnementale. Nous avons beaucoup de chercheurs en biotechnologie, mais nous avons laissé tomber les autres disciplines ; or nous devons progresser dans ces domaines.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Vous avez raison.

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

Merci d'avoir organisé ce débat, qui me paraît essentiel et qui est au coeur de débats nationaux en cours. Je constate avec plaisir que tous s'accordent à dire qu'il faut maintenir le principe de précaution, lequel nous permet d'identifier, en quelque sorte, les risques des risques.

Comme membre de la commission des affaires économiques et comme députée de Grenoble, je souhaite évoquer les nanotechnologies, ce qui ne vous surprendra pas. En effet, nous avons à Grenoble un pôle de développement fondé sur des systèmes miniaturisés intelligents ; il en existe d'autres dans le pays, pour d'autres technologies. L'évolution des nanotechnologies nous permet d'envisager des applications bénéfiques dans les domaines de l'information et de la communication – je songe à la nanoélectronique –, de la santé, par la convergence nano-bio, mais aussi de l'environnement et des énergies nouvelles, grâce aux matériaux nanostructurés – le photovoltaïque, les batteries pour véhicules électriques et tout ce qui a trait aux réseaux intelligents et à l'efficacité énergétique.

Néanmoins, plusieurs éléments semblent aujourd'hui compromettre ces avancées, en lien avec le principe de précaution ; nous devrions y réfléchir.

Tout d'abord, le débat sur les nanotechnologies a été pitoyable. Les activistes qui ont répandu de l'ammoniaque à Toulouse ne sont pas seuls en cause, même si nous sommes tous d'accord pour dire que leurs méthodes sont inacceptables. Plus généralement, c'est la société française elle-même qui manque de maturité lorsqu'il s'agit d'exprimer des doutes, de discuter des avantages et des inconvénients, de proscrire les débats binaires.

Ce constat s'applique aussi à l'Assemblée : j'ai souvent regretté que, sur divers sujets, nos débats soient excessivement binaires et que toute approche rationnelle en soit bannie. Ainsi, on est pour ou contre les nanotechnologies ; mais les nanotechnologies, cela ne veut rien dire. On adore les mots qui ne veulent rien dire ! De même, on est pour ou contre les OGM, alors qu'ils recouvrent des réalités scientifiques très différentes, qu'il faut étudier : on doit s'opposer à certains OGM, mais on peut s'interroger sur le bien-fondé de certains autres.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Tout à fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

Je regrette que Valérie Pécresse ne soit plus là. En effet, pour remédier à ce manque de maturité, il faudrait développer bien davantage l'action des centres culturels, scientifiques, techniques et industriels, et ce dès le plus jeune âge, afin de donner aux citoyens, par le savoir, l'évaluation et le dialogue, des outils pour décider en toute connaissance de cause. Ce n'est pas être scientiste que de dire cela ; c'est une question d'éducation. Or le principe de précaution peut y contribuer.

Laissons le sensationnel aux médias : il nous appartient à nous, élus, de raviver la rationalité et la confiance. Or la confiance implique notamment un dialogue avec la société. L'information doit être claire et les consommateurs doivent connaître les composantes des produits qu'ils consomment pour avoir une vraie liberté de choix. Cela suppose aussi – je l'ai dit – la recherche d'une intelligence collective dès le plus jeune âge et le refus absolu des oppositions binaires.

Comment faire en sorte que l'application du principe de précaution serve l'évaluation rationnelle des risques en la fondant sur des expertises scientifiques transparentes, indépendantes et contradictoires ? Comment faire en sorte qu'elle encourage l'adoption de mesures raisonnées dont on évalue, autant que possible, l'effet économique, social et environnemental, comme l'a dit Mme la secrétaire d'État ? Aujourd'hui, cette évaluation fait défaut.

En somme, comment associer ce que l'on est en train de dissocier totalement – le principe de précaution et le principe d'action –, et ce selon une logique de développement durable, c'est-à-dire au service du progrès social et environnemental, qu'il s'agisse de la recherche ou de sa valorisation industrielle ?

Voici deux suggestions, qui ne sont pas des réponses. Premièrement, nous n'utilisons pas suffisamment l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. J'en fais partie, comme d'autres ici, mais je constate à regret que son président n'est pas là. L'Office publie des rapports contradictoires, de différents partis, et procède à de nombreuses auditions également contradictoires ; il accomplit un travail formidable. Or ce travail ne profite absolument pas à nos débats en séance publique, ce qui est vraiment dommage.

Deuxièmement, il faut développer les études en écotoxicologie et en épidémiologie, deux domaines dans lesquels les Français sont très faibles.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Je n'ai pas grand-chose à retirer à ces propos.

Nous souhaitons engager une réflexion sur l'organisation du débat public – version Commission nationale du débat public, ou version conférence de consensus, ou encore du type de celui utilisé pour le Grenelle ? – pour savoir quand il doit intervenir dans la procédure. C'est à cela que nous pensons quand nous parlons de « boîte à outils » pour la mise en oeuvre de ce type de principe.

L'OPECST a publié de nombreux rapports de grande qualité pour éclairer la plupart des débats. Mais, outre le fait que personne ne remet en question le principe de précaution, l'idée forte qui doit ressortir de nos échanges de cet après-midi, c'est qu'il faut un débat public, avec une approche socio-économique pluraliste. Il faut sortir de ces discours tout blancs ou tout noirs totalement surréalistes. Dans les débats du type de ceux qui ont été tenus pour préparer le Grenelle, nous n'avons pas eu de difficultés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je précise que Claude Birraux, président de l'OPECST, est retenu par la présentation d'un rapport de l'Office.

La parole est à M. Gérard Bapt.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Je voudrais prolonger quelques-unes des questions qui ont été posées par M. Pancher tout à l'heure concernant les signaux d'alerte, d'une part, l'expertise, d'autre part.

Les signaux d'alerte sont insuffisamment pris en compte. Dans l'Antiquité, on coupait la tête de celui qui, le premier, donnait l'alerte, parce qu'il portait la mauvaise nouvelle. J'ai assisté à une séance de la commission des affaires économiques où le professeur Belpomme avait été mis plus bas que terre sur la question du chlordécone aux Antilles. Aujourd'hui, deux rapports sont sortis qui confirment, voire vont au-delà de ce qu'affirmait le professeur Belpomme il y a peu de temps devant nous.

L'Assemblée débat actuellement de l'interdiction du bisphénol contenu dans les biberons. L'alerte est avérée et, même si l'avis officiel rendu par l'AFSSA au début de 2009 indique que 90 % de l'intoxication des nourrissons vient non pas du biberon mais du lait maternel, on ne peut se contenter de cette réponse. Le rapport devra donc être complété. Le Gouvernement peut encore choisir de réparer ce qui s'avérera peut-être une erreur aussi grave que celle commise à propos du Mediator : alors que les premières alertes sur ce médicament ont été lancées à Toulouse et à Madrid à peu près à la même époque, c'est-à-dire en 2005-2006, l'Espagne a réagi dès 2006, comme l'Italie, en interdisant le produit à la vente, quand nous, nous venons seulement de l'interdire fin 2009, soit quatre ans plus tard. Pendant ce temps, des femmes, notamment, sont mortes d'hypertension artérielle pulmonaire ou ont été opérées de valvulopathie grave.

Cette question de l'alerte mériterait d'être gérée autrement qu'avec la rigidité actuelle des agences, qui se réfèrent toujours à d'autres études à faire, des études selon des normes internationales que les laboratoires publics – et je regrette que Mme Pécresse soit partie – ne peuvent pas suivre par manque de moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Je n'ai traité que le premier aspect de mon intervention, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Faites vite, car nous devons impérativement en terminer.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Je regrette que Mme Pécresse soit partie, car c'est elle qui est concernée par cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Les questions lui seront transmises, et elle vous répondra.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Je voulais aborder le problème des conflits d'intérêt dans l'expertise et de la transparence.

Je constate que le Gouvernement disposait du rapport de M. William Dab sur le chlordécone depuis septembre 2009. Il vient de l'évoquer parce qu'est sorti un rapport, qui va dans le même sens, du professeur Multigner, du CHU de Pointe-à-Pitre.

La transparence, avec tout ce que cela suppose en termes de conflits d'intérêts, reste largement un sujet à traiter, pas simplement par la charte qui ne s'applique qu'aux laboratoires publics, comme vient de le dire Mme Pécresse.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Ces débats sont utiles, même si nous nous éloignons du principe de précaution, vous l'avez vous-même reconnu.

Le manque de réactivité et de puissance des agences pose problème. L'affaire du chlordécone est un scandale absolu, c'est vrai. Mais une inquiétude qui se porte sur tout se révèle non pertinente. La société a du mal à intégrer certaines évolutions, des risques, des alertes comme celle-là. Nous avons indiscutablement un effort considérable à faire en termes de réactivité. Certes, nous avançons un peu plus vite maintenant, mais nous sommes très loin d'être dans une situation satisfaisante.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christophe Caresche, pour une brève intervention.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

J'avais participé au débat, M. Piron s'en souvient. Le principe de précaution tel qu'il a été inclus dans la Charte de l'environnement est un principe d'application directe. Cela a été un choix conscient, délibéré et volontaire du législateur, qui a décidé de faire confiance à la jurisprudence pour construire l'application de ce principe. Cependant, la jurisprudence reste assez faible, pour la simple raison que le principe a un champ relativement limité, à la fois dans son application et dans la manière dont il est mis en oeuvre.

On parle aujourd'hui de préciser par la loi le principe de précaution, qui a été conçu comme un principe d'application directe, mais on ne parle pas des autres principes : le principe de prévention, le principe d'information, le principe de réparation. Ils n'ont pas fait l'objet d'un travail législatif, alors que la Charte de l'environnement renvoie explicitement à la loi pour définir les conditions de leur application.

Je suggère d'élargir un peu le champ de la mission et de nous intéresser au principe de prévention, dont l'application est renvoyée explicitement à la loi par l'article 3 de la Charte, au principe de réparation – « pollueur-payeur » – mentionné dans les mêmes conditions à l'article 4, et au principe d'information. Le principe de précaution reste limité, mais les confusions sont permanentes. Peut-être préciser les autres principes permettra-t-il de donner l'exacte signification du principe de précaution.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Je partage le concept et l'analyse juridique, mais pas votre conclusion, monsieur Caresche.

Nous avançons pas à pas. Vous occultez complètement la loi sur la responsabilité environnementale, qui pose justement le principe polleur-payeur. La transparence a fait une avancée extraordinaire, notamment grâce au débat contradictoire, y compris dans l'entreprise, qui n'existait pas. Sur tel ou tel point particulier, nous sommes peut-être passés à côté, mais je pense que le débat sur le Grenelle a eu le mérite d'être totalement partagé et d'aborder tous les champs. Peut-être est-ce insuffisant ? Je suis tout à fait preneur, si vous le souhaitez, d'une note de votre part.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Je pense que l'objectif des uns et des autres n'est pas d'encadrer au sens propre le principe de précaution, mais de lui trouver des modalités d'application, donc une boîte à outils : où sont les signaux d'alerte, même faibles ? Qui fait l'expertise pluraliste et contradictoire ? Qui organise le débat public, et comment ? Nous ne sommes pas dans une logique d'encadrement au sens propre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gest

Je ferai deux courtes clarifications.

En aucun cas, je n'ai parlé d'encadrement. J'ai indiqué, après avoir entendu tous les avis, qu'il me paraissait nécessaire de clarifier les choses. L'idée, développée par les ministres, de la boîte à outils correspond assez bien à ce que nous avons imaginé. Simplement, j'ai peur que cela ne puisse pas être mis en oeuvre. Cela nécessite sûrement une réflexion complémentaire.

Je souscris à l'observation de Jean-Louis Borloo sur le fait qu'il n'existe pratiquement pas de jurisprudence, du fait que le principe est circonscrit à l'environnement. Une autre loi a été adoptée sur la responsabilité environnementale, qui s'attache aussi aux biens inappropriés, mais ce concept entièrement nouveau n'a pas encore fait l'objet de démarche particulière, en tout cas de procédure.

La seconde réflexion que je voulais faire, c'est que je n'ai pas été complètement convaincu par l'argumentation de la ministre de la recherche tout à l'heure, lorsqu'elle a dit que la santé, c'était toujours de la prévention. Je me suis beaucoup interrogé là-dessus, et ce n'est pas que je veuille absolument qu'on élargisse le concept à la santé, mais je constate que, quand on parle de principe de précaution, et même si la terminologie est très souvent inappropriée, il est des cas où se pose réellement un problème, qui touche au principe de précaution adapté à la santé.

J'ai l'impression que, si l'on s'en tient à ce que l'on voit aujourd'hui, le principe de précaution demeurera, très longtemps encore, un beau principe inutilisé. Le professeur Tubiana avait évoqué, au cours de son audition, le problème des transplantations, pour se demander si le principe de précaution les aurait permises, étant donné que toute transplantation comporte un risque impossible à évaluer. Nous devons nous pencher sur le sujet, car ces questions vont se multiplier.

Il nous est peut-être plus facile de le faire aujourd'hui dans la mesure où le principe de précaution n'est encore véritablement précisé dans la Constitution que pour l'environnement et où, dans le domaine de la santé, un texte purement législatif pourrait peut-être permettre certaines évolutions. En tout état de cause, nous ne pourrons pas nous dispenser de prendre en compte la réalité du débat d'aujourd'hui, qui porte essentiellement sur les problèmes de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

Pour compléter le propos de M. Piron, je voudrais dire que le juge statue sur la procédure et éventuellement sur le fond. Moins il statue sur le fond, mieux cela vaut, mais, pour qu'il ne statue pas sur le fond, il faut que la procédure soit extrêmement bien définie, en particulier dans la phase risque-avantage – l'un et l'autre étant envisagés du triple point de vue économique, social et environnemental. Si la procédure n'est pas respectée, y compris dans cette comparaison risque-avantage, alors le juge est obligé de juger sur le fond, mais il n'est pas plus qualifié pour le faire que n'importe qui. Il faut donc absolument préciser la procédure. Appelez cela une boîte à outils si vous voulez…

Seconde remarque : il y a une dynamique du principe de précaution. Il ne faut pas en rester à la situation actuelle. Si les faucheurs volontaires ont invoqué le principe de précaution et qu'ils ont été entendus par le juge, c'est bien qu'il y a une dynamique du principe de précaution, et si les entreprises s'inquiètent d'un passage à la responsabilité civile et parlent d'assurance, c'est aussi parce qu'il y a une dynamique.

Soit on en reste là, soit on précise et on clarifie les choses pour qu'il ne se fasse pas n'importe quoi. S'agissant de l'environnement, je pense que les choses sont bien calées : l'article 5 est d'application directe, la jurisprudence est peu fournie et il y a la loi sur la responsabilité environnementale. Dans le domaine de la santé, les questions ne sont pas réglées. Faut-il une loi ? Cela reste à discuter. En tout cas, il faut rechercher le moyen le plus efficace pour ne pas laisser le juge seul juger sur le fond des expertises scientifiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le débat est clos.

Il a légèrement dépassé la durée qui lui était impartie mais je pense que chacun aura remarqué que cette nouvelle forme du débat parlementaire permettait des échanges vifs, interactifs. Cette expérience pourrait probablement être renouvelée.

Je veux remercier nos deux rapporteurs pour leur excellent travail, ainsi, bien entendu, que chacune et chacun d'entre vous, mais tout particulièrement les membres du Gouvernement pour la qualité et la précision de leurs réponses et pour leur disponibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Seconde lecture du projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma