Mesdames, je vous remercie d'avoir répondu à l'invitation de la Mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances de l'Assemblée nationale. L'un de nos deux corapporteurs, M. Jean-Louis Dumont, va ouvrir les débats, en l'absence de M. Yves Deniaud, l'autre corapporteur.
Comme vous le savez, nous bénéficions, pour nos auditions, du concours de la Cour des comptes, représentée aujourd'hui par MM. Christian Sabbe, conseiller maître, et Claude Lion, conseiller référendaire. Je salue également la présence de M. Jean-Pierre Lourdin, secrétaire général du conseil de l'immobilier de l'État, que j'ai l'honneur de présider.
L'action présente de la Mission d'évaluation et de contrôle s'inscrit dans la suite logique du rapport, rédigé en juillet 2005, qui avait relevé une carence dans la politique immobilière de l'État. La nécessité d'assurer un suivi, rappelée hier encore à la tribune de l'Assemblée par le Premier président de la Cour des comptes, nous a amenés à remettre un deuxième rapport. Nous préparons maintenant un troisième rapport destiné à faire le point. Entre temps, le conseil de l'immobilier de l'État a été installé en juin 2006.
Nous avons de nombreuses questions à vous poser. Nous souhaitons en particulier avoir des précisions sur les dossiers en cours dans votre ministère, au sujet desquels nous avons déjà eu l'occasion de vous interroger dans le cadre du conseil de l'immobilier de l'État.
Mesdames, j'ai pris connaissance du compte rendu de votre audition par le CIE. Permettez-moi d'évoquer en préambule une autre audition restée dans les annales de la commission des Finances, celle du ministre de la Culture de l'époque sur les problèmes immobiliers de son ministère : jamais l'on n'avait vu le président Pierre Méhaignerie s'emporter à ce point ! À l'évidence, le ministère de la Culture ne s'inscrit pas dans la ligne définie par les instances gouvernementales. Cette capacité à résister ne saurait être qualifiée de positive.
Le ministère de la Culture a déjà procédé à des ventes d'immeubles dont le produit, au demeurant, s'est révélé plus important que les estimations initiales. S'il y a lieu de s'en réjouir, encore faut-il savoir comment utiliser cet argent à bon escient.
La question du relogement de la direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles – DMDTS –, qui doit quitter ses locaux actuels en juin 2008, est connue depuis le début de l'année 2006. Pourquoi a-t-on pris un tel retard ? Pour les ministères, et singulièrement pour celui de la Culture, il semblerait qu'il n'y ait point de salut hors Paris - voire lorsque l'on s'éloigne un peu de la rue de Valois. Est-ce une volonté politique qui a provoqué des retards ? Avez-vous pris connaissance de l'ensemble des propositions du service France Domaine ? Si tel est le cas, quels enseignements en tirez-vous ? Quelles relations entretenez-vous avec France Domaine ? Trouvez-vous des défauts à son fonctionnement ? Le ministère a-t-il effectué des recherches directement ? S'il l'a fait, pour quelles raisons, de quelle manière et avec quelle autorisation ?
La MEC s'interroge également sur les informations que vous avez fournies sur l'immeuble de la rue des Bons-Enfants. Les chiffres relatifs aux surfaces ne correspondent pas à ceux dont nous disposons. Qu'en est-il des possibilités de densification de ces surfaces, dans la perspective d'accueillir plus de personnel qu'actuellement ? Pouvez-vous prendre des engagements à ce sujet ?
Voilà un an que j'occupe les fonctions de secrétaire général du ministère de la Culture et de la communication et je ne pense pas que l'on puisse dire que ce ministère fait de la résistance ou se livre à une opposition militante à l'égard de la politique immobilière de l'État, dont les principes ont été rappelés par le conseil de modernisation des politiques publiques. Je n'ai pas non plus décelé de mauvaise volonté de la part de mon administration, dont les relations avec France Domaine, autant que je sache, sont bonnes. Sous l'impulsion de la Cour des comptes et grâce à France Domaine, nous avons progressé dans la professionnalisation de notre approche de l'immobilier. Ce n'était évident ni de notre côté ni de celui du ministère du Budget. Désormais, le ministère de la Culture s'emploie à appréhender ce sujet de façon professionnelle, dissociée de toute considération idéologique.
Pour rationaliser et dynamiser la gestion de notre patrimoine immobilier, il nous faut en améliorer la connaissance et développer des outils permettant de le valoriser. C'est ce qui sous-tend la politique de cession que vous avez mentionnée, monsieur le Rapporteur. Celle-ci se poursuivra, notamment en ce qui concerne le patrimoine, extrêmement étendu et divers, de nos services déconcentrés, pour lequel nous avons fixé des objectifs clairs. Je le répète : il n'existe aucune volonté de résistance de notre part.
Si nous sommes animés par la volonté de rationaliser notre patrimoine immobilier, nous sommes aussi guidés par les grands principes de la réforme de l'État, ce qui n'est nullement incompatible. Étant chargée de coordonner la réflexion sur la révision générale des politiques publiques au sein de ce ministère, je me dois de constater que l'éclatement des implantations est d'abord le reflet de l'éclatement des structures et des administrations. La politique de cession doit donc se combiner avec une politique de regroupement des services et de mutualisation des fonctions support, dans une logique consistant à concentrer l'administration du ministère, conformément aux recommandations du conseil de modernisation des politiques publiques, autour de quatre à cinq directions, et non plus neuf. Cela suppose une relative proximité.
L'éclatement des implantations complique la mutualisation, mais aussi la gestion de nos grandes salles de réunion. Les surcoûts qu'entraînent les déplacements de personnel vont à l'encontre de l'objectif d'efficacité économique que nous poursuivons.
C'est pourquoi, d'un commun accord avec France Domaine, nous avons cherché à reloger la DMDTS plutôt à proximité du ministère. Je souhaite que les agents de cette direction puissent utiliser les salles de réunion communes et que certaines fonctions, comme la documentation ou l'inspection, soient mutualisées. L'éloignement des services rendrait cette démarche presque impossible. Nos discussions avec France Domaine nous laissent à penser que le projet de localisation que nous avons pour la DMDTS rue Beaubourg permet de concilier une certaine norme de loyer au mètre carré et une norme d'éloignement ne dépassant pas trente minutes de trajet.
Mme Catherine Ahmadi-Ruggeri pourra, si vous le souhaitez, retracer toutes les démarches et les visites d'immeubles qui ont été effectuées. Les faits montrent que nous n'avons jamais tenté de nous opposer à ce qui nous a été demandé, ce qui aurait été d'ailleurs irresponsable de la part de hauts fonctionnaires.
J'ai parlé, plus précisément, d'une éventuelle volonté politique : en tant que secrétaire général, vous n'auriez pu que l'appliquer. C'est ce que la commission des Finances a déjà cherché à établir sous l'impulsion du Président Pierre Méhaignerie.
Considérez-vous que les réponses qui vous ont été faites sont suffisantes, monsieur le Rapporteur ?
Elles ne sont pas tout à fait satisfaisantes. Je doute que l'argument de l'utilisation des salles de réunion suffise à justifier la validité d'une installation à proximité du ministère, non plus que le critère des trente minutes de trajet.
S'agissant de l'immeuble de la rue des Bons-Enfants, le ministère a-t-il l'intention de densifier l'utilisation des surfaces ?
La gestion actuelle de cet immeuble présente des contraintes objectives. Moins de 50 % de l'espace total peut être consacré aux bureaux. Nous n'avons pas conçu ce bâtiment ; nous l'avons pris tel qu'il est. Un premier déménagement a eu lieu, mais le regroupement, à ce jour, est loin d'être parfait. Depuis longtemps, le ministère réfléchit à une meilleure utilisation des surfaces. Un marché a déjà été passé en ce sens avec un programmiste immobilier.
De telles études prennent du temps. En outre, je ne peux reprogrammer l'utilisation des espaces sans savoir quel sera le visage de mon administration après la réduction du nombre de directions demandée par le conseil de modernisation des politiques publiques. Dès que la ministre aura rendu son arbitrage sur le périmètre des quatre ou cinq directions regroupées, le travail du programmiste sera facilité.
La validation d'un avant-projet d'organisation de l'administration centrale dépend du conseil de modernisation des politiques publiques. On peut sans doute envisager avril ou mai. Ensuite, le programmiste pourra faire des propositions service par service.
Au moment où le Président de la République et le Premier ministre nous demandent de recomposer le visage de l'administration, on ne peut imaginer que des directions se rapprochent et travaillent ensemble que si elles sont réunies dans un même espace. Il ne serait pas de bonne pratique de les maintenir dans des localisations séparées.
M. le Rapporteur devant nous quitter, je vais m'efforcer de faire office à la fois de Rapporteur et de Président. Ne voyez surtout aucun tour personnel dans mes questions, madame le secrétaire général. J'ai d'ailleurs bien noté que vous avez pris vos fonctions il y a un an seulement.
Les travaux de la commission des Finances ont démontré qu'environ 80 millions d'euros ont été investis pour les travaux de rénovation de l'immeuble de la rue des Bons-Enfants et 80 millions pour le portage, ce qui porte le coût total à près de 160 millions. Ayant été rapporteur à l'époque, je me rappelle que le ministère présentait ce chantier comme l'opération structurante de sa politique immobilière. Elle devait être financée par la réalisation de plusieurs autres actifs.
Au bout du compte, l'opération se révèle particulièrement emblématique de ce qu'il ne faut pas faire. D'une part, les cessions n'ont pas été effectuées spontanément : c'est un amendement de la commission des Finances au projet de loi de finances pour 2006, déposé par M. Pierre Méhaignerie, M. Gilles Carrez et moi-même, qui a conduit à la vente des hôtels Kunsky et Vigny-Croisilles. D'autre part, comme vous l'avez reconnu, l'immeuble ne semble pas correspondre à vos souhaits.
Quelle appréciation portez-vous sur ces insuffisances ? Non seulement l'opération des Bons-Enfants, initialement donnée en exemple, s'est révélée un fiasco du point de vue économique le plus élémentaire – douze ans de portage d'un immeuble vide en plein coeur de Paris ! –, mais il apparaît qu'une extension est aujourd'hui nécessaire.
Quant à la direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, la DMDTS, elle souhaitait, dans un premier temps, s'installer dans l'immeuble en face, sans doute l'un des plus chers de Paris. Cela ne traduit pas un effort de recherche considérable. Vous invoquez des impératifs de rationalisation de l'utilisation des salles et de mutualisation pour rejeter l'idée d'une implantation dans des arrondissements périphériques, mais ne pensez-vous pas que les moyens de télécommunication actuels permettent une bonne organisation du travail à distance ?
Le ministère que nous venons d'auditionner nous a soutenu que 40 % des effectifs de son administration centrale sont déconcentrés en province, mais que les 60 % restants doivent impérativement être implantés à quelques mètres les uns des autres !
À la différence de ce ministère, l'administration centrale de la culture est peu déconcentrée. En revanche, elle est située dans un périmètre restreint autour du ministre, et cela a un sens. Des déplacements trop importants seraient facteurs d'inefficacité économique. Nous avons déjà généralisé l'usage du télétravail et de la visioconférence dans nos services déconcentrés : les DRAC ne se déplacent plus à Paris pour une réunion sur tel ou tel sujet. Cela semble beaucoup plus compliqué pour les services parisiens et entre en contradiction avec la dynamique que nous voulons instaurer et qui suppose la présence des agents dans des réunions et au sein de groupes de réflexion : désormais, l'administration fonctionne davantage en groupes de projet que selon un mode hiérarchique, et ces groupes ont besoin d'être à proximité les uns des autres.
En quoi la proximité immédiate entre le cabinet du ministre et la DMDTS est-elle une obligation ? Quelle difficulté y aurait-il, par exemple, à implanter cette direction dans le XIIIe arrondissement, qui est parfaitement desservi par le métro ?
Nous avions établi, pour des raisons d'efficacité économique, que la DMDTS ne devait pas se trouver à plus de trente minutes de la rue de Valois. En quoi le fait d'avoir trouvé un immeuble rue Beaubourg, pour un loyer qui nous semble raisonnable et qui est conforme au cahier des charges, nous obligerait maintenant à aller dans le XIIIe arrondissement ? On doit se défendre de toute position dogmatique. Pour les agents, il est important de pouvoir se rendre rapidement au cabinet du ministre pour y assister à des réunions qui sont souvent organisées au dernier moment. Cela fait partie de la réactivité de cette administration. Le ministère de la Culture a en effet pour spécificité, par rapport à d'autres ministères plus régaliens, d'être particulièrement soumis à l'événement et à l'actualité, ce qui suppose une grande capacité de réaction. Le ministre est sollicité tous les jours…
Je regrette que vous n'ayez pas assisté à l'audition des autres ministères, car cet argument n'est pas d'une grande originalité.
La différence entre un trajet de trente minutes à pied pour aller rue Beaubourg et un trajet de trente minutes en métro pour aller rue Albert vous semble-t-elle insurmontable ?
Non, bien entendu. En revanche, pourquoi choisir le XIIIe si l'on a trouvé aussi bon marché rue Beaubourg ?
Mme Sophie Moussette, qui a instruit ce dossier, pourra vous répondre en détail.
Permettez-moi tout d'abord, monsieur le Président, de revenir sur la cession de l'hôtel Kunsky, dont le produit – 38 millions d'euros – a largement dépassé le prix de 12 millions qui avait été évalué par les Domaines. La contribution du ministère ne saurait donc être ignorée.
M'autoriserez-vous à vous rappeler que nous avons dû nous montrer quelque peu incitatifs pour parvenir à ce résultat ?
C'est une chose dont je vous remercie, monsieur le Président.
Les surfaces occupées ont été considérablement réduites : environ 2 000 mètres carrés bruts pour la rue Beaubourg, contre 3 500 pour l'hôtel Kunsky. Si l'on considère l'ensemble des opérations réalisées – dont la résiliation du bail de la place de Valois, la vente de l'immeuble de la rue du Renard et, à terme, la résiliation du bail de la rue Louvois, où sont aujourd'hui installées les organisations syndicales –, on atteint un gain de près de 2 800 mètres carrés pour l'administration centrale et parisienne.
Pouvez-vous me garantir que les opérateurs dépendant de votre ministère ne mènent pas d'opérations parallèles qui iraient à l'encontre de cette diminution de la surface ?
En outre, les opérateurs sont des entités juridiquement responsables. En tant que gestionnaire de la politique immobilière du ministère, il m'est plus facile d'intervenir au niveau de l'administration centrale.
Ces subtilités sont bien compréhensibles, mais la commission des Finances, quand elle aborde ces sujets, n'est pas censée s'y attarder. Le ministère de tutelle de ces opérateurs est bien le ministère de la Culture et leur parc immobilier s'y rattache. On ne peut féliciter un ministère de réduire la surface qu'occupe son administration centrale si, dans le même temps, ses opérateurs accroissent la leur.
Mme le secrétaire général a affirmé que les coûts de la rue Albert et de la rue Beaubourg sont comparables. Pourriez-vous préciser ce point ?
Il convient de rappeler que le marché est aujourd'hui extrêmement tendu. En matière de location de bureaux, l'offre est peu abondante et la réalité rencontrée sur le terrain est souvent différente de l'image qu'en donnent les agences immobilières. Nous avons travaillé en totale transparence avec France Domaine, en commençant par une recherche fondée sur un cahier des charges validé par le cabinet du ministre des Finances. Pour parfaire notre connaissance du marché, nous avons également reçu directement un certain nombre d'offres émanant d'agences immobilières. Il apparaît clairement que les niveaux de prix du XIIIe arrondissement, notamment en raison de la desserte par la ligne Météor, sont largement supérieurs à ce qui nous a été proposé pour la rue Beaubourg : les prix de présentation, dans ces bâtiments de standing, s'élèvent à environ 650 euros par mètre carré.
Ils sont moins élevés, puisque la rue Albert est au bord du périphérique et n'est pas sur la ligne Météor : 300 euros par mètre carré. Cependant il existait aussi un problème de disponibilité.
À cela près que l'immeuble de la rue Beaubourg est disponible, pas celui de la rue Albert.
Moyennant un petit effort, nous avons tout de même établi que ce ne sont pas les mêmes coûts.
Vous avez qualifié le marché de « tendu ». Or France Domaine aurait reçu treize offres d'immeuble et vous les aurait présentées. Cela n'est-il pas le signe que le marché est moins tendu qu'il n'y paraît ?
Après examen, nous nous sommes aperçus que certaines offres ne correspondaient absolument pas à nos besoins : ainsi des immeubles mal agencés, notamment dans le XIe arrondissement, ou dépassant le cahier des charges, le temps de transport avec la rue de Valois excédant les trente minutes. Nous avons aussi visité un immeuble dans le XVIe arrondissement qui semblait répondre parfaitement à ce que nous recherchions, mais la moitié des surfaces étaient aveugles.
À la lumière de l'expérience de l'immeuble de la rue des Bons-Enfants, considérez-vous que le ministère de la Culture soit en mesure de déterminer par lui-même et de façon explicite quels sont ses besoins ? Les treize propositions étaient très diverses : elles recouvraient quatre arrondissements parisiens et six communes de la proche banlieue, avec des loyers variant de 250 à 980 le mètre carré, plusieurs offres s'établissant dans le bas de cette fourchette.
En outre, quel a été le rôle du ministère de la Culture lui-même dans la prospection du marché, étant entendu que, selon nous, c'est à France Domaine d'assumer cette tâche ? N'a-t-on pas engagé des démarches parallèles ?
France Domaine est dans son rôle de propriétaire et de gestionnaire immobilier. Il est tout de même très utile d'associer les utilisateurs ou leurs représentants à la recherche de biens qui doivent répondre à leurs besoins ! Si nous avons exploré des pistes avec France Domaine, il n'en était pas moins important de connaître ce qui est proposé aujourd'hui sur le marché. Du reste, nous n'avons rien fait sans France Domaine, qui a effectué toutes les visites avec nous.
En accord avec France Domaine, nous avons écarté ceux qui ne correspondaient pas au cahier des charges.
Le temps de parcours de trente minutes est-il expressément indiqué dans ce cahier des charges ?
Il faut bien entendu rechercher les immeubles avec les utilisateurs, mais où placeriez-vous la ligne de partage entre les possibilités laissées à un ministère pour faire entendre sa voix et le pouvoir de décision qui revient à France Domaine ?
La question est difficile. Le travail est effectué en total accord avec France Domaine sur bien d'autres dossiers que celui de la relocalisation de la DMDTS.
Dans celui que j'ai sous les yeux, et qui concerne la recherche de bureaux pour la DMDTS, je peux lire : « Localisation : la desserte en transports, et notamment en transports en commun, doit être satisfaisante et permettre de relier facilement l'immeuble avec le ministère de la culture (métros Palais-Royal et Pyramides). » Il n'est pas fait mention des trente minutes…
Cela me ramène à ma question précédente : à partir de quel moment considère-t-on que le ministère décide pour lui-même ? Où est la frontière ?
Le ministère est l'utilisateur. Le cahier des charges aurait été très difficile à établir sans notre apport. Si nous réduisons la surface totale occupée, c'est que nous comptons, grâce à ces trente minutes, mutualiser certains locaux et certaines fonctions. L'intervention du ministère permet des économies.
Revenons à l'exemple des Bons-Enfants.
Quelles sont, pour cet immeuble, les surfaces SHOB (hors oeuvre brute), SHON (hors oeuvre nette), SUB (utile brute) et SUN (utile nette) ?
L'agrément du 4 février 2000 délivré par le Comité pour l'implantation des emplois publics indiquait une SHON de 32 000 mètres carrés, alors qu'aujourd'hui n'en figurent plus que 28 634, soit une perte de 3 366. De plus, comment est-on passé de 38 000 mètres carrés de SHOB à 21 000 mètres carrés de SUB ?
Enfin, l'examen des différents ratios montre que rien ne correspond aux éléments dont on disposait initialement. Quels sont les vrais chiffres ? Ceux-ci expliquent-ils la déception dont Mme Le Bihan-Graf a fait état quant à l'utilisation de cet immeuble ? Cela ne démontre-t-il pas que ce n'est pas forcément le ministère utilisateur qui est le plus à même d'apprécier les caractéristiques de l'immeuble qu'il souhaite occuper ?
Les chiffres sont les suivants : 28 634 mètres carrés de SHON, 21 128 de SUB et 10 100 de SUN.
Par la succession des permis de construire qu'il a fallu redéposer et par le fait que le coefficient d'occupation des sols a été réduit à un moment donné.
Vous avez posé à plusieurs reprises la question du partage de compétences entre France Domaine et le ministère utilisateur, monsieur le Président. Or il est clair qu'aucune des deux fonctions n'empiète sur l'autre. Tout projet immobilier doit se faire en bonne intelligence avec l'utilisateur pour ce qui est de la définition des besoins, et tel a été le cas. Nous travaillons de façon constructive avec France Domaine, dans un souci commun d'amélioration et de dynamisation de la gestion de notre patrimoine.
Dans le cas de la DMDTS, France Domaine a fait des propositions. Nous avons évalué ensemble nos besoins au cours d'une discussion contradictoire : il ne s'est nullement agi d'une liste de voeux avalisée les yeux fermés. C'est ainsi que nous avons abouti à cet ensemble de mandats, qui a reçu ensuite une validation politique.
Il faut également rappeler qu'une implantation avait été identifiée et que l'équipe politique précédente l'avait approuvée, tant du côté du ministère des finances que de celui de la culture. Nous avons conduit une étude de programmation détaillée associant les cent cinquante agents de la DMDTS. Or, après six mois de travail, nous nous sommes retrouvés à la fin de l'été dans une situation catastrophique puisque le projet s'est effondré du jour au lendemain. Il nous a fallu tout reprendre pour assurer un déménagement avant juin 2008. Si nous avons nous-mêmes commencé à examiner avec France Domaine des offres dans le périmètre défini par le mandat, c'est à cause de cette contrainte. Si nous ne respectons pas le délai, nous devrons payer des pénalités considérables.
J'entends bien votre argument, madame, mais il pose à mon sens beaucoup plus de questions qu'il n'en résout. Les délais sont toujours invoqués par les ministères pour faire pression sur les différents acteurs. Non en avons quelque expérience au conseil de l'immobilier de l'État. On peut se demander pourquoi le ministère de la Culture n'a pas trouvé plus tôt une solution au problème du déménagement de la DMDTS, l'échéance du 30 juin 2008 pour la fin du bail étant connue depuis le début 2006.
Sans doute me suis-je mal fait comprendre : nous avions trouvé une solution.
A 490 euros le mètre carré, ce qui signifie que la négociation a été extrêmement favorable pour le ministère.
Vos réponses sont parfaitement cohérentes, madame, mais j'aimerais que vous reconnaissiez que mes questions ne le sont pas moins.
Vous m'expliquez que ce prix de 490 euros est très avantageux pour le quartier mais, rue Albert, ce montant n'était que de 300 euros. Le ministère du Budget et France Domaine ont adressé des messages pour faire savoir que le premier prix paraissait trop élevé. J'en reviens donc à ma question : à partir de quand considérez-vous que vous êtes mieux placés que le ministère du Budget et France Domaine pour décider ? Après tout, vous pourriez aussi soutenir qu'obtenir des bureaux à 800 euros le mètre carré au lieu de 1 000 est une opération très profitable.
Est-il possible de prendre en considération la perception globale des coûts par l'État, et non les références auxquelles tel ou tel ministère est habitué ? C'est là que la centralisation par France Domaine trouve tout son sens. Nous avons constaté, au fil des auditions, que chaque ministère y va de son référentiel et que chacun considère qu'il a fait une très bonne affaire, parce que lui seul apprécie les coûts. Ne pensez-vous pas que le CIE et France Domaine sont dans leur rôle lorsqu'ils disent non parce que le prix est trop élevé ?
Nous avions obtenu un accord sur ce coût. Que le CIE et France Domaine le trouvent aujourd'hui trop élevé, nous en avons pris acte et nous avons essayé de trouver une implantation moins onéreuse, comme c'est le cas avec l'immeuble de la rue Beaubourg.
Je me suis efforcée, monsieur le Président, de répondre à votre question sur l'urgence et de vous expliquer comment nous nous sommes trouvés dans cette situation alors même, comme vous l'avez à juste titre rappelé, que nous connaissions l'échéance qu'il nous fallait respecter. C'est ce qui explique que nous ayons pris l'initiative, en parfaite entente avec France Domaine, de consulter quelques offres complémentaires pour faire face à l'urgence.
Certains signaux avaient été donnés, notamment lors de l'audition, ici même, du ministre de l'époque, M. Renaud Donnedieu de Vabres. Le CIE avait également poussé l'investigation sur ce sujet. La notion du temps au ministère de la Culture est difficile à saisir : on laisse un immeuble vide pendant douze ans, mais voilà qu'aujourd'hui on est assailli par l'urgence !
J'ai toujours du mal à comprendre où vous placez la frontière entre ce qui relève de l'utilisateur et ce qui relève de France Domaine. En l'occurrence, ce dernier organisme donne le sentiment de n'avoir pas joué de rôle moteur dans la discussion.
Au fond, il est à craindre qu'aucune solution ne se dégage tant qu'il n'y aura pas de réorganisation du ministère, comme l'a dit Mme Le Bihan-Graf.
Pour ce qui est de l'implantation de la DMDTS rue Beaubourg, on peut s'interroger plus sur la durée de la location que sur son prix. Pour une durée courte, des solutions un peu plus chères sont acceptables et le prix de 390 euros par mètre carré n'est en lui-même pas de nature à surprendre les connaisseurs du dossier. Ce qui est plus surprenant est la durée de six ans prise en référence.
En ce qui concerne l'immeuble de la rue des Bons-Enfants, la Cour des comptes nous a fait part de sa conviction dès le départ que l'opération était une erreur. Malheureusement, cela semble se vérifier aujourd'hui.
Nous avons une différence d'appréciation avec le ministère de la Culture sur l'urgence : le CIE n'a jamais eu connaissance d'un accord du ministère du Budget sur cette question, laquelle n'a d'ailleurs pas été abordée par le prédécesseur de Mme Le Bihan-Graf lors de son audition sur le SPSI.
En outre, nous ne connaissions pas le projet alternatif d'implantation rue Albert : il est donc difficile de dire aujourd'hui qu'il ne convient pas.
Pour ce qui est de la comparaison des coûts, nous ne pouvons déterminer le loyer final réel rue Beaubourg puisque nous ignorons les coûts d'aménagement. Il semble que cet immeuble ne réponde pas aux normes d'accessibilité des handicapés et ne dispose pas de restaurant inter-entreprises. Il est difficile de comparer ce qui n'est pas comparable.
La réforme de l'État ne s'inscrit pas dans une temporalité de court terme. En revanche, le moyen terme nous semble raisonnable. C'est pourquoi nous avons demandé un bail de six ans pour l'immeuble de la rue Beaubourg : il faut inclure les délais de concertation et de négociation liés à toute réforme, ceux qu'implique la rédaction d'un décret en Conseil d'État, puis la réorganisation elle-même, pendant que s'effectue parallèlement le travail du programmiste immobilier.
L'immeuble de la rue des Bons-Enfants a fait l'objet de rapports très pertinents de la Cour des comptes. Il faut cependant reconnaître la singularité de la démarche patrimoniale du ministère de la Culture, même si je connais les limites du discours de la spécificité, monsieur le Président. On ne peut reprocher au ministère de la Culture de vouloir occuper des bâtiments pour les restaurer, les valoriser et sauvegarder leur dimension patrimoniale. Dans le cas de la rue des Bons-Enfants, nous sommes dans une autre logique, celle de la création, du geste architectural, à laquelle je crois savoir que le Président de la République lui-même n'est pas insensible : au-delà des aspects fonctionnels, l'architecture doit devenir un vecteur de la politique de création.
C'est ce geste architectural qui entraîne des contraintes que ne présenterait sans doute pas un immeuble de bureaux banal répondant à la seule logique de la rentabilité.
Il nous faut donc prendre ce qui existe aujourd'hui, avec les contraintes d'organisation administrative et d'organisation spatiale que nous connaissons, et essayer de faire de ces contraintes des leviers permettant d'améliorer notre gestion patrimoniale.
Si le mandat de France Domaine était de gérer l'immobilier à notre place et de nous indiquer de façon totalement directive où nous devons aller, nous nous y conformerions. Mais l'heure est à un dialogue serein avec France Domaine, où les intérêts du propriétaire se conjuguent avec ceux du locataire. Lorsqu'un particulier visite plusieurs appartements, le fait que ceux-ci soient tous différents ne l'empêche de garder en tête l'ordre de ses priorités. Or, pour moi qui suis chargée de la coordination de l'administration, la priorité est que les conditions de cette coordination ne soient pas rendues encore plus compliquées par la dispersion des services.
Cela étant, je constate que le ministère a fait des recherches par lui-même, que des éléments ne figurant pas au cahier des charges, comme les trente minutes – dont on m'a affirmé avec assurance qu'elles y sont inscrites –, sont ajoutés ; on nous présente des coûts très supérieurs à ceux du marché comme étant particulièrement avantageux… Tout cela reste très surprenant.
J'en viens maintenant à une dernière série de questions. Pourriez-vous m'indiquer où en sont le recensement et l'évaluation des opérateurs du ministère de la Culture ? Il s'agit, pour le coup, d'une véritable spécificité.
Qu'en est-il également de la mise à jour du schéma pluriannuel de stratégie immobilière, le SPSI, et des SPSI déconcentrés ? Quelles sont actuellement les perspectives de diminution des effectifs du ministère dans le cadre de la RGPP ? On nous promet depuis longtemps une réduction annuelle de l'ordre de 100 équivalents temps plein travaillé – ETPT –, mais il ne semble pas que ce soit le cas. Si l'on s'en tenait à la norme de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, le total serait de 350 ETPT en trois ans et de 700 en six ans, dont un tiers dans les services centraux.
Qu'en est-il enfin, dans ce contexte, de la réorganisation de la fonction immobilière du ministère après la création du bureau de la politique immobilière en 2002 ?
Le ministère de la Culture est en effet atypique puisqu'il comporte plus de 30 SCN – services à compétence nationale – et 78 opérateurs, soit 72 établissements publics et 6 associations. Cela complique singulièrement la connaissance du patrimoine immobilier, qui a été inscrite comme un objectif prioritaire de l'année 2008. Dans le cadre du chantier de la qualité comptable, nous avons engagé six actions, pour la plupart consacrées à l'immobilier.
Ainsi nous mettrons en place, dans tous les établissements publics, un réseau de correspondants qui fourniront régulièrement des données mises à jour et nous tiendront au courant des projets d'opération. Ces correspondants se verront proposer des formations aux outils de gestion immobilière les plus récents et les plus performants. Le dispositif permettra d'améliorer la fiabilité et la cohérence des données du tableau général des propriétés de l'État. La fiabilisation des données nous semble en effet un préalable indispensable pour entrer dans une logique de cession plus dynamique en ce qui concerne le patrimoine des opérateurs : contrairement à ce qu'un esprit naïf pourrait penser, ce n'est pas parce que nous sommes l'administration que nous faisons moins bien que nos opérateurs en matière immobilière.
Je ne le crois pas, monsieur le Président. (Sourires.)
Avec ce réseau, notre objectif est de monter en compétence sur ces sujets et d'agir sur la base de données fiables.
S'agissant des effectifs, la seule règle validée politiquement est celle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux. Aucun secrétaire général, quel que soit son ministère, n'a d'autre instrument pour mettre en oeuvre la RGPP. Or cette règle est d'ores et déjà appliquée dans l'ensemble des ministères, ce dont la direction du Budget s'assure chaque année lors des négociations budgétaires.
Pourtant, dans le projet de loi de finances pour 2008, le chiffre n'est pas de un sur deux, mais de un sur trois et il ne s'applique pas de la même façon à tous les ministères. Ce n'est de toute façon pas contradictoire avec les engagements pris au cours des années précédentes. Quoi qu'il en soit, je prends note de votre réponse.
Pour en venir au recensement des 78 opérateurs, je souhaite savoir si vous êtes en mesure de m'indiquer de combien d'immeubles leur patrimoine est constitué, pour quelles surfaces et pour quelle évaluation.
Le travail n'est pas totalement terminé. Nous avons procédé à la fiabilisation des données du TGPE pour les services déconcentrés et nous abordons maintenant les opérateurs. Le chiffre que l'on peut avancer aujourd'hui est de 3,8 millions de mètres carrés de surface utile brute. Il doit être affiné dans les mois qui viennent car le recensement n'est achevé que pour quinze établissements publics et est en cours pour vingt-quatre autres.