La Commission examine une proposition d'avis, présentée par M. Gilles Carrez, Rapporteur général, sur un projet de décret portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance, en application de l'article 13 de la loi organique n° 2001-692 relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF).
Nous examinons une proposition d'avis présentée par M. le Rapporteur général sur un projet de décret d'avance portant ouverture et annulation de 65 millions d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et de crédits de paiement (CP).
Ce projet de décret d'avance, le troisième de l'année 2009, ouvre 65 millions d'euros d'AE et de CP sur le compte de concours financiers Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics. Il s'agit de permettre à ce compte spécial de procéder à une avance supplémentaire en faveur du budget annexe Contrôle et exploitations aériens, afin de faire face à une dégradation de sa trésorerie.
Cette ouverture est compensée à due concurrence par des annulations portant sur des crédits mis en réserve sur deux programmes du budget général relevant du ministère de l'Écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer : 19,5 millions d'euros d'AE et de CP sur le programme Infrastructures et services de transports et 45,5 millions d'euros d'AE et de CP sur le programme Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres.
Il peut paraître étonnant de recourir à un décret d'avance à cette période de l'année, au moment où l'Assemblée nationale est saisie du projet de loi de finances rectificative de fin d'année. Mais les comptes de concours financiers sont, depuis l'entrée en vigueur de la LOLF, en principe dotés de crédits limitatifs – et non plus évaluatifs. En outre, le besoin de trésorerie du budget annexe Contrôle et exploitation aériens ne peut attendre l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative à la fin de cette année, dès lors qu'il s'agit de remédier à un risque de cessation de paiement à la mi-décembre. Cette insuffisance en trésorerie, qui a déjà donné lieu à une avance du Trésor de 100 millions d'euros dans la loi de finances rectificative du 20 avril dernier, s'explique par la crise économique et par la chute du trafic aérien – qui ont fait diminuer les rendements attendus des redevances de navigation aérienne et de la taxe de l'aviation civile.
Il reste que, compte tenu des perspectives d'évolution du transport aérien, l'endettement du budget annexe se creuse dangereusement : il devrait dépasser un milliard d'euros à la fin 2009 et approcher 1,2 milliard d'euros à la fin 2010.
Je suis surpris de la ponction de 45 millions d'euros sur la mission Régimes sociaux et de retraite, pour laquelle je suis rapporteur spécial. Il me semble en effet que les crédits ont été calibrés en fonction de l'inflation réelle et non de l'inflation prévisionnelle.
Ce montant de 45 millions d'euros ne représente que 1,2 % du montant total des crédits du programme. En prenant en compte les annulations prévues en projet de loi de finances rectificative pour 2009, le montant total des crédits annulés sur ce programme s'élèveraient à 85 millions d'euros en AE et CP. Il s'agit en outre de crédits qui avaient été mis en réserve en début d'exercice.
Je souhaiterais attirer l'attention de la Commission sur deux points. D'une part, le texte proposé correspond à la finalité assignée aux décrets d'avance. Il était en effet impossible d'anticiper, en loi de finances initiale pour 2009, une telle chute des recettes du budget annexe. Or, tel n'a pas toujours été le cas, comme le montre notamment le récent rapport de la Cour des comptes sur les mouvements de crédits de 2009. Cette année, trois décrets d'avance ont été adoptés pour un montant total d'environ un milliard d'euros. Sur cette somme, moins de 200 millions d'euros de crédits financent des dépenses non prévisibles et, en conséquence, entrent dans le cadre défini pour les mouvements de crédits prévus par décret d'avance. Les quelques 800 millions d'euros de crédits restant ne correspondent pas à cette finalité : ils financent des facilités de trésorerie, créent des marges de manoeuvre infra-annuelles, etc.
D'autre part, la mission Régimes sociaux et de retraite finance les dotations assurant l'équilibre des régimes spéciaux de retraites. Le présent décret d'avance vise donc à assurer les besoins de financement du budget annexe Contrôle et exploitation aériens en prélevant les crédits destinés à ces régimes de retraites, qui, du fait d'une dotation de l'État insuffisante, devront puiser dans leur trésorerie pour verser leurs prestations. Je remarque, par ailleurs, que la mission Régimes sociaux et de retraite a été abondée de 400 à 500 millions d'euros depuis la réforme des régimes de retraites de la SNCF et de la RATP, ce qui prouve que cette réforme n'a pas produit d'économies pour les finances publiques.
Les économies dues à une inflation réelle inférieure à l'inflation prévisionnelle (+ 1,5 % dans la loi de finances initiale) sont réelles. J'en veux pour preuve les économies réalisées cette année sur les charges de la dette, qui s'élèvent à 2,1 milliards d'euros du seul fait de la moindre inflation. Sur le premier point soulevé par M. Cahuzac, il est vrai que les précédents décrets d'avance ont porté sur certains postes budgétaires traditionnellement concernés par les ouvertures de crédits en cours d'année car chroniquement sous-dotés en loi de finances initiale, tels que les opérations extérieures (OPEX) du ministère de la Défense ou la prise en charge des demandeurs d'asile. Toutefois, un volume très important de crédits correspond à des dépenses difficilement prévisibles ou évaluables, comme le dispositif de bonus-malus automobile, les conséquences de la tempête Klaus ou les mesures relatives à la grippe A.
La mission Défense constitue la variable d'ajustement du budget de l'État. Les crédits qui ont été annulés par le décret d'avance du 9 novembre seront, en grande partie, rétablis dans le collectif budgétaire. La raison de ce va-et-vient réside dans le fait que, comme on pouvait s'y attendre, les cessions immobilières qui devaient financer les dépenses prévues avant la fin de l'année n'ont pas été réalisées. Le Gouvernement ne respecte donc pas le budget voté par le Parlement. Le constat est le même sur les dépenses en faveur des demandeurs d'asile.
Sur les OPEX, je vous renvoie à mon rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009, qui sera publié à la fin de cette semaine. Alors que les ouvertures en faveur des OPEX étaient habituellement gagées sur la mission Défense, elles sont cette année financées par ponction sur la réserve de précaution des autres ministères, ce qui n'est pas très sain.
M. le Rapporteur général, quelle est la teneur de votre proposition d'avis sur le projet de décret ?
Elle consiste à reconnaître le caractère urgent de cette ouverture de crédits tout en notant le déséquilibre structurel du budget annexe Contrôle et exploitation aériens. En 2010, le besoin de financement couvert par la dette sera ainsi supérieur au montant des investissements. Le problème sous-jacent est la soutenabilité d'un tel déséquilibre et il faudra s'interroger sur les moyens de le résorber, car la taxe sur l'aviation civile ne peut être relevée sans limites.
La Commission adopte la proposition d'avis sur le projet de décret d'avance, qui comporte notamment les trois observations suivantes :
1. L'ouverture de crédits au profit du compte spécial Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics, destinée à permettre le versement d'une avance du Trésor de 65 millions d'euros au budget annexe Contrôle et exploitation aériens, vise à pallier les pertes de recettes encaissées par le budget annexe en cours d'année et à éviter une rupture de ses paiements au mois de décembre. L'urgence de la situation ne permet pas de procéder à l'ouverture des crédits dans la loi de finances rectificative de fin d'année.
2. Alors que les avances du Trésor n'ont pour vocation que de couvrir des besoins ponctuels de trésorerie, la nouvelle avance de 65 millions d'euros, qui s'ajoute aux 116,8 millions d'euros d'avances prévues dans la loi de finances initiale pour 2009 et aux 100 millions d'euros d'avances supplémentaires autorisées par la loi de finances rectificative du 20 avril 2009, témoigne d'une dégradation aussi durable que préoccupante de la situation financière du budget annexe Contrôle et exploitation aériens. La question de la soutenabilité de son endettement total, qui pourrait atteindre près de 1,2 milliard d'euros à la fin de l'année 2010, est posée.
3. Portant sur la réserve de précaution constituée en début d'année, les annulations de crédits permettent de préserver l'équilibre budgétaire défini par les lois de finances pour 2009.
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