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Commission des affaires étrangères

Séance du 6 février 2008 à 10h30

Résumé de la séance

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  • armée
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  • musharraf
  • pakistan
  • parti

La séance

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Audition de M. Jean-Luc Racine, directeur de recherche au CNRS, et de M. Olivier Guillard, directeur de recherche Asie à l'IRIS, sur la situation au Pakistan

Le président Axel Poniatowski a accueilli M. Jean-Luc Racine, directeur de recherche au CNRS, et M. Olivier Guillard, directeur de recherche Asie à l'IRIS, que la commission des affaires étrangères a souhaité entendre pour mieux comprendre la situation au Pakistan. L'instauration de l'état d'urgence, en novembre dernier, puis l'assassinat de Benazir Bhutto, le 27 décembre, ont en effet montré que les inquiétudes que ce pays inspire depuis quelques années sont fondées et que sa stabilité apparente semble très précaire.

Afin de bien situer les enjeux, M. Jean-Luc Racine a d'abord rappelé quelques paramètres : avec 165 millions d'habitants – soit plus que la Russie –, dont plus du tiers a moins de quinze ans, le Pakistan, deuxième pays musulman au monde après l'Indonésie, connaît, dans un contexte politique difficile, un taux de croissance de 5 % en moyenne, sans pour autant que la redistribution des fruits de la croissance soit bonne. Quant à l'armée, elle comprend 600 000 hommes, avec une prédominance de l'armée de terre, pour un budget officiellement de l'ordre de 3,5 % du PIB. Dans ce pays, ouvertement nucléarisé depuis 1998, les experts évaluent le nombre des missiles à 50 ou 80, peut-être 100.

Le syndrome de la partition de 1947 pèse toujours sur l'identité de la nation qui s'est voulue la terre des musulmans de l'ancien empire britannique, même si aujourd'hui le Bangladesh et l'Inde en comptent chacun autour de 150 millions. C'est d'ailleurs le rapport à l'Inde qui justifie, selon l'armée pakistanaise, la prégnance de son pouvoir, au même titre que l'incapacité présumée de la classe politique à gouverner le pays. Depuis l'indépendance, les militaires ont gouverné plus longtemps que les civils, et même lorsque ce n'était pas directement le cas sous les gouvernements Bhutto et Sharif des années 90, ils ont toujours gardé le contrôle de la politique de sécurité, du programme nucléaire et des relations avec l'Inde et l'Afghanistan.

La partition n'a pas suffi à garantir la sécurité du pays aux yeux des dirigeants, a fortiori après la sécession du Bangladesh en 1971, appuyée par l'armée indienne. La culture de la méfiance subsiste, même si, depuis 2004, le dialogue est continu avec l'Inde, le problème se cristallisant autour de la question du Cachemire. Quant à l'Afghanistan, la hantise d'Islamabad est d'être prise en tenailles entre l'Inde, d'un côté, et un régime pro-indien à Kaboul, de l'autre – comme à l'époque de l'occupation soviétique –, d'autant que l'Afghanistan n'a jamais reconnu la frontière afghano-pakistanaise issue de la ligne Durand.

Cette situation explique que le général Musharraf, au pouvoir depuis le coup d'État soft de 1999, ait, après les attentats du 11 septembre, choisi la guerre contre le terrorisme aux côtés de Washington plutôt que ce qui allait devenir, selon le président Bush, « l'axe du mal ». La lutte contre Al Qaida a ainsi connu des résultats spectaculaires, dont l'arrestation de Khalid Cheikh Mohammed, instigateur présumé des attentats du 11 septembre, transféré avec d'autres suspects à Guantanamo. De même, une politique de répression a été menée à l'encontre des organisations sunnites radicales et des organisations chiites ultras engagées dans de sanglants conflits "sectaires" – les sunnites comptent pour près des trois quarts de la population. Le général Musharraf – et au-delà de lui la conférence des généraux de corps d'armée qui se réunit régulièrement pour faire le point sur la situation pakistanaise à tous égards – estiment en effet que, sur ce point, c'est la cohésion nationale qui est en jeu.

La politique à l'égard des groupes du djihad au Cachemire a, en revanche, été beaucoup plus ambiguë. Si les infiltrations de combattants pakistanais dans la partie indienne du Cachemire ont baissé, les structures n'ont pas été véritablement démantelées. La ligne Musharraf est à peu près semblable vis-à-vis des talibans afghans, ayant bénéficié de "sanctuaires" dans les zones tribales pakistanaises voisines de l'Afghanistan. Qu'il s'agisse des djihadistes pakistanais au Cachemire ou des talibans à la frontière afghane, le régime a choisi de juguler sans éradiquer, afin de garder des cartes en main permettant le moment venu, dans le premier cas, de peser sur le dialogue avec l'Inde et, dans le second, de préserver une influence sur l'avenir de l'Afghanistan, tel que la communauté internationale tente de le redéfinir. En revanche, la montée en puissance des "talibans pakistanais" insurgés contre l'armée dans les zones tribales et suscitant des opérations terroristes dans ces mêmes zones et au-delà a contraint le régime a durcir sa répression contre les émules de Baitullah Masud, auquel le pouvoir attribue l'assassinat de Benazir Bhutto, ce que l'intéressé a démenti. La volonté de mettre à mal les tribaux insurgés se heurte en tout état de cause à de grandes difficultés, l'armée n'étant pas entraînée pour lutter contre la guérilla.

Quant à la question récurrente de l'arrivée au pouvoir des islamistes et du risque d'accession de groupes terroristes à l'arme nucléaire, il convient d'être mesuré. L'arrivée au pouvoir des islamistes par les urnes est très peu probable (certains partis islamistes devraient du reste boycotter les élections). Une prise du pouvoir par la force n'est pas plus d'actualité. La sécurité des armes nucléaires est jugée pour l'heure satisfaisante par les experts étrangers, américains ou français. L'accès de groupes terroristes à des matériaux radioactifs susceptibles d'entrer dans la fabrication d'une "bombe sale" artisanale inquiète davantage, mais le Pakistan n'est pas jugé plus dangereux à cet égard que de nombreux pays issus du démantèlement de l'Union soviétique.

Les élections devant avoir lieu le 18 février sont, pour leur part, porteuses de grands enjeux. Le président Musharraf (il a dû abandonner sa fonction de chef d'état major de l'Armée) souhaite une majorité qui le soutienne afin de faire ratifier son élection à la Présidence de la République. Si les élections paraissent truquées, la légitimité du régime, déjà affaiblie, le sera plus encore. Si l'opposition l'emporte, une crise constitutionnelle est possible. Quelle ligne suivrait alors le nouveau chef d'état-major de l'armée de terre ? Le général Kiyani, choisi par le général Musharraf avec, dit-on, l'agrément de Washington et de Benazir Bhutto, entend autant que faire se peut, soustraire l'armée du jeu politique, la recentrer sur ses missions, y compris la lutte anti-terroriste, tout en préservant son influence dans les affaires essentielles du pays.

PermalienOlivier Guillard

, a indiqué que le Pakistan n'allait pas bien. Ce phénomène, qui n'est pas nouveau, mais qui ne va pas en s'améliorant, tient d'abord à un environnement géographique complexe, source d'instabilité : 2 500 kilomètres de frontières avec l'Afghanistan, 3 000 avec l'Inde, 1 000 avec l'Iran et 500 avec la Chine. Il s'explique aussi par son économie qui est émergente et non en développement comme celle de l'Inde, puisqu'un Pakistanais sur quatre vit largement au-dessous du seuil de pauvreté, tandis que seulement deux sur trois ont un accès satisfaisant à l'éducation, certaines régions frisant le taux de 90 % taux d'analphabètes, sans oublier la discrimination à l'égard des femmes.

Quant aux bénéfices de la croissance ou de l'assistance internationale, aucun Pakistanais de la rue ne semble en profiter. Enfin, la cohésion nationale est mise à mal, les Pakistanais revendiquant d'abord leur appartenance ethnique – pachtoune, baloutche, pendjabi…) plutôt que leur statut de citoyen de la République islamique du Pakistan, et les provinces rivalisant entre elles voire se méprisant.

C'est une nation qui traverse une phase de grande fébrilité, au point que l'on ne peut savoir à quoi elle ressemblera d'ici à dix jours, après le scrutin. Encore faut-il que celui-ci ait lieu car, dans le climat actuel qui continue de s'alourdir, nombre d'événements peuvent intervenir d'ici là. L'utilisation particulièrement importante de moyens d'État par le parti au pouvoir, le PML-Q, au profit de l'équipe en place, permet en effet de prédire que les élections seront tout sauf libres, équitables et honnêtes. Face à cette équipe qui cherche à se maintenir au pouvoir, les partis civils traditionnels – le PPP de Benazir Bhutto et le PML-N de Nawaz Sharif – se sont tout de même alliés pour le retour de la démocratie plébiscité par la population, le général Kiyani devant, pour sa part, s'émanciper très rapidement de son mentor du fait d'une vision moins politique de son rôle.

En dépit de ses manipulations, l'équipe en place ne devrait pas recueillir plus de 25 à 35 % des suffrages. La légitimité populaire du général Musharraf est en effet au plus bas, d'autant qu'il avait annoncé, après son arrivée au pouvoir en octobre 1999, qu'il ne resterait à la tête du pays que le temps de rétablir les grands équilibres nationaux. Quant au PPP, la succession de Benazir Bhutto pose problème, car son mari, Asif Ali Zardari – appelé jadis M. 10 % à cause du pourcentage qu'il prélevait sur les marchés publics –, est une personnalité contestée. Il ne pourra longtemps fédérer le parti, même si, selon le testament politique de Benazir Bhutto, il lui revient de le diriger en attendant que son jeune fils Bilawal lui succède dans plusieurs années. Par ailleurs, nombre de petits partis refusent de participer à des élections tant qu'un semblant de justice dans le pays n'aura pas été restauré. Contrairement à ce qu'il prétend en tout cas, le président Musharraf n'est pas indispensable à un meilleur fonctionnement de la société pakistanaise, même si les difficultés de gestion du pays n'ont pas d'égal dans le monde du fait d'intérêts claniques totalement opposés et d'une atmosphère permanente de crise et de tension.

Les scenarii les plus catastrophiques courent sur le Pakistan. Il faut les prendre avec recul, qu'il s'agisse de l'implosion du pays, de la création d'un Pachtounistan ou encore de la prise du pouvoir par les islamistes : si l'ensemble des fondamentalistes prenait part aux élections, il n'obtiendrait pas plus de 20 % des voix. La société civile pakistanaise est majoritairement plus modérée qu'elle n'en donne l'impression à l'extérieur, et les Mollahs ne sont pas près de prendre le pouvoir dans la configuration actuelle.

Le président Axel Poniatowski a souhaité savoir comment se ferait le partage du pouvoir après le scrutin entre les trois pôles du pouvoir, l'influence des partis religieux au sein tant de l'armée que de la société civile étant faible.

Par ailleurs, les troubles récurrents au Baloutchistan font-ils courir des risques d'éclatement au Pakistan ?

Selon M. Olivier Guillard, l'architecture souhaitable du pouvoir doit être fondée sur un rééquilibrage entre les trois centres de pouvoir que sont la Présidence de la République, le Premier ministre et le chef des armées, l'idéal étant qu'ils coopèrent plutôt qu'ils continuent à fragiliser l'édifice. Aujourd'hui en effet, la Présidence de la République est toute puissante alors que le Premier ministre n'a aucune marge de manoeuvre. La restructuration des pouvoirs est en tout cas acquise, et elle devrait avoir lieu quelle que soit l'équipe en place. De toute façon, le maintien du général Musharraf à son poste ne devrait pas aller au-delà de la fin 2009, ne serait-ce que parce que Washington n'a plus confiance en lui.

Les partis de Benazir Bhutto et de Nawaz Sharif, qui font cause commune, devraient réunir, sauf trucage aberrant, entre 55 et 65 % des suffrages. Comme M. Sharif ne sera certainement pas habilité à exercer le mandat de chef de gouvernement et comme il ne sera pas souhaitable qu'une personnalité charismatique du PPP accède au poste de Premier ministre, et surtout pas M. Zardari, c'est une personnalité du PPP sans grand relief, mais avec une notoriété importante au sein du parti, qui pourrait être choisi, ce qui permettra peut-être de vider les querelles actuelles entre le président Musharraf, le nouveau Premier ministre et l'actuel chef d'état-major des armées.

S'agissant du risque d'éclatement du Pakistan, M. Jean-Luc Racine a estimé qu'il ne fallait pas exagérer les tensions entre provinces, car si les Pakistanais se définissent volontiers comme Sindhis, Baloutches ou encore Pendjabis, un sentiment national existe, ne serait-ce que sous l'influence , pendant plus d'un demi-siècle, des manuels scolaires, des célébrations patriotiques ou de la télévision d'État. Et l'armée interviendrait en cas de risque sécessionniste avéré.

Le Baloutchistan, qui dispose de ressources en gaz, est, avec 3 % de la population totale – soit un poids beaucoup plus faible que l'ethnie pachtoune – la plus vaste des provinces pakistanaises. La question baloutche pourrait d'ailleurs être facilement réglée si l'on attribuait à cette province, comme elle le demande de façon raisonnable, une part plus conséquente des revenus tirés de ses ressources naturelles.

Quant aux zones tribales, où s'enlisent 80 000 hommes de troupe de l'armée pakistanaise, le problème y est différent, du fait de la déréliction de l'État. Au total, plus que l'éclatement du pays, les risques principaux semblent être l'expansion des attaques terroristes, et l'enracinement de kystes insurrectionnels localisés, deux menaces difficiles à résorber.

PermalienPhoto de Claude Birraux

a fait part d'une appréciation différente de la situation au Pakistan, où il s'est rendu en mai 2006 en qualité de président du groupe d'amitié France-Pakistan.

Il ne faut pas oublier, tout d'abord, que les Américains ont financé les talibans et leurs camps d'entraînement au Pakistan au moment de l'invasion soviétique de l'Afghanistan, ce qui explique la difficulté d'avoir eu à les inclure ensuite dans le camp du mal.

Par ailleurs, comme l'a fait remarquer le président Musharraf lui-même, jamais ce pays n'a connu autant de libertés en particulier avec l'abolition de la charia et avec l'élection de femmes sur des listes séparées, au point qu'il y a plus de femmes au parlement pakistanais que dans le nôtre. Quant à l'Inde, le général a compris que la guérilla constante contre ce pays empêchait le Pakistan de financer les écoles, ce qui permettait aux madrasas et à l'enseignement islamique de se développer et de pénétrer progressivement toutes les couches de la société. Le risque islamique est en effet plus grand qu'on ne le pense.

Par ailleurs, M. Claude Birraux s'est étonné du traitement médiatique réservé au retour de Benazir Bhutto et de Nawaz Sharif alors qu'il est notoire que ces personnages sont totalement corrompus.

PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

a souhaité savoir si le rapprochement avec l'Inde progressait ou s'il était au point mort.

PermalienJean-Luc Racine

a répondu qu'il convenait de mettre au crédit du général Musharraf et des Premiers ministres indiens successifs, en particulier Atal Behari Vajpayee, la mise en place d'un dialogue, très structuré, procédant par phases successives. La phase en cours en est encore aux négociations techniques, avant de se poursuivre à plus haut niveau. Le dialogue devrait continuer et, s'agissant du Cachemire, aboutir non pas à un traité, qu'il serait très difficile de faire accepter dans les deux pays, mais à l'établissement d'un statu quo permettant des échanges plus intenses entre les deux parties de la province, et plus d'autonomie pour elles. Pendant les périodes extrêmement difficiles qu'a connues le général Musharraf en 2007, l'Inde n'a d'ailleurs jamais cherché à aggraver la situation, ayant compris que la stabilité pakistanaise est profitable à tous.

Le président Musharraf est par ailleurs un grand communicant. Dans le discours qu'il adresse aux délégations étrangères, il met ainsi en avant ce qu'il appelle la "modération éclairée", c'est-à-dire une politique faisant en sorte que le Pakistan retrouve sa vocation originelle, à savoir être un État musulman voire une République islamique, mais pas une République islamiste. Les opposants – car des aspirations démocratiques existent au Pakistan avec des citoyens qui se battent pour des causes justes et qui en paient le prix – sont plus sévères : le général, contrairement à ses promesses, n'a réformé ni les madrasas ni les lois hudood concernant les femmes. Reculant sur ce plan devant les partis de l'islam politique, il a également usé de subterfuges pour contourner plusieurs fois la Constitution en fonction de ses propres besoins, l'état d'urgence lui ayant ainsi permis de remplacer la Cour suprême qui allait invalider son élection.

Le général Musharraf laissera une trace dans l'histoire pakistanaise, mais, soucieux de se maintenir au pouvoir, il n'a pas joué toutes les cartes dont il disposait pour moderniser le pays.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Kucheida

a demandé si les islamistes, faute d'avoir les moyens d'accéder au pouvoir par les urnes, risquaient de le prendre par la voie insurrectionnelle, et quel était le niveau de gangrène de l'armée par les mouvements extrémistes.

PermalienOlivier Guillard

a rappelé le triste épisode de la mosquée rouge, haut lieu, au coeur même de la capitale, de la contestation de l'autorité de l'État et de discours djihadistes, où, après dix jours de tractations, les forces pakistanaises ont lancé un assaut qui a coûté la vie d'une centaine de personnes. Il a estimé que c'était là le signe fort d'un mouvement islamiste de fond grandissant dans le pays, qui fait peur à beaucoup. De même, la vallée de Swat, site culturel situé à 150 kilomètres au nord de la capitale, est devenue depuis quelques mois un lieu de bataille entre forces de l'ordre et islamistes.

L'armée est un reflet de la société, avec des gens qui ont une lecture modérée de l'islam et d'autres qui en ont une lecture plus radicale et qui contestent le pouvoir en place. Les derniers attentats visant le général Musharraf ont d'ailleurs abouti à l'arrestation d'officiers de l'armée, dont deux de rang supérieur.

PermalienJean-Luc Racine

a fait observer que si les partis de l'islam politique, qui ne sont plus unis aujourd'hui, cherchent à intégrer le système politique, leurs bras armés, qui étaient également contrôlés par les services secrets, ou ISI, se retournent maintenant contre le pouvoir d'État qui les a aidés au départ, et prennent leur distance vis-à-vis des partis islamistes. On peut donc s'attendre non pas à une insurrection générale, mais plutôt à des stratégies locales de contestation de l'Etat et à la poursuite de la campagne d'attentats suicides. Une éventuelle intervention de commandos américains en Afghanistan entrant au Pakistan en invoquant un droit de poursuite serait un choix risqué dans un pays où l'anti-américanisme dépasse de loin les cercles islamistes.

La clé de la situation dépend de l'influence de l'islamisme au sein de l'armée. Si les islamistes y sont probablement peu nombreux, a fortiori aux niveaux les plus élevés de la hiérarchie, une tradition au sein de l'armée n'en consiste pas moins à les instrumentaliser, c'est-à-dire, à l'exemple du général Musharraf, à contrôler la force qu'ils représentent en tant qu'outil de géopolitique régionale et de politique étrangère. Mais ce modèle montre clairement ses dangereuses limites aujourd'hui : le Pakistan a besoin d'un nouveau paradigme.

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