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Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 31 mars 2009 à 15h00
Protection de la création sur internet — Rappels au règlement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

Monsieur le président, je souhaite m'exprimer, en application de l'article 58 de notre règlement, sur les conditions dans lesquelles se déroule le débat que nous avons repris hier en fin d'après-midi et qui s'est poursuivi hier soir.

Amendement après amendement, l'opposition à laquelle se joignent d'ailleurs plusieurs députés de la majorité, essaie de démontrer combien ce projet de loi est inutile et inefficace. Nous souhaitons surtout montrer que les dispositions que le Gouvernement veut mettre en place seront facilement contournées et qu'elles donneront lieu à un très important contentieux. Avec l'anonymisation des adresses, le cryptage des contenus, et l'utilisation de certains logiciels qui existent déjà, il ne faudra pas être un hacker chevronné pour éviter les conséquences des dispositions que vous voulez nous faire voter.

Le caractère inapplicable de ce projet de loi est désormais prouvé. Nous avons exposé nos arguments à plusieurs reprises, mais nous avons été surpris que, la plupart du temps, ni les rapporteurs – notamment le rapporteur de la commission des lois – ni la ministre n'aient trouvé utile de nous répondre. Certes, les éléments que nous avons présentés étaient parfois ambitieux et techniques, mais il me semble que nous nous devons de maîtriser totalement ces questions – sans quoi nous légiférerions sans mesurer les effets des dispositions que nous votons.

Vous remarquerez que l'opposition n'a quasiment pas demandé de suspensions de séance ; elle n'a pas déposé d'amendements répétitifs. Nous cherchons tout simplement par notre travail à obtenir un certain nombre de garanties juridiques qui n'existent pas dans ce projet de loi, alors même qu'elles sont la traduction de principes fondamentaux du droit. Nous pensons, en effet, à nos concitoyens internautes qui doivent, selon nous, bénéficier des mêmes droits que tous les autres : droit à une procédure contradictoire, droit à la présomption d'innocence, garantie des droits de la défense… En conséquence, nous avons souhaité à plusieurs reprises – mais hélas ! vainement – que l'autorité judiciaire puisse intervenir dans la procédure.

L'actualité européenne pèse aussi terriblement sur nos débats, et nous avons été étonnés que M. Riester et Mme Albanel balaient les éléments que nous avons cités d'un revers de main en arguant qu'ils n'avaient aucune valeur juridique. Certes un rapport n'a pas de valeur juridique en soi, mais, en l'espèce, il traduit bien la réflexion du Parlement européen sur la question. Il montre aussi que la législation communautaire évolue à l'opposé des mesures que vous nous proposez, et il confirme ce que nous savions déjà : l'accès à Internet est un droit fondamental. L'interruption de cet accès remet donc ce droit en cause et, en conséquence, elle ne peut se faire que sous le contrôle du juge.

Sur le même sujet, alors que le nouveau paquet Télécom est en deuxième lecture au Parlement européen, nous regrettons que la France ait fait pression pour reporter le vote de ce texte au 21 avril, c'est-à-dire après la fin de la discussion parlementaire du projet de loi HADOPI. En effet, l'amendement 46 au nouveau paquet Télécom reprend l'amendement 138 de nos collègues Guy Bono et Daniel Cohn-Bendit. Le Gouvernement utilise un faux-fuyant alors que, plus que jamais, le débat nécessite de la clarté.

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