La confusion dans laquelle nous nous trouvons s'accroît de minute en minute, enfonçant le Gouvernement et sa majorité dans une ornière dont je crains qu'ils n'aient du mal à se sortir.
Nous posons des questions précises. La ministre ne répond pas, le président de la commission des lois non plus ; c'est un rapporteur de la commission des affaires économiques qui vole à leur secours, pour confirmer que Mme Lebranchu a dit vrai et que l'aide juridictionnelle ne peut s'appliquer en l'espèce. La ministre enfin finit par s'en remettre à notre sagesse.
Que nous fassions la loi dans ces conditions me rend extrêmement perplexe. Je ne suis pas intervenu jusqu'ici – on ne peut pas travailler sur tous les textes, chacun en conviendra – mais j'ai suivi les débats, et la manière dont ils évoluent est particulièrement instructive.
À un moment donné, le Gouvernement et sa majorité ont souhaité engager l'opposition dans un rapport de force, prenant l'opinion à témoin et opposant les artistes et les internautes. Sans doute était-ce pour dissimuler que le dispositif prévu par le projet de loi est d'une très grande complexité et qu'il se révèle, alinéa après alinéa, totalement inapplicable. Sans doute était-ce aussi pour dissimuler qu'il est déjà dépassé par l'évolution des techniques – qui, dans ce domaine, progressent chaque jour –, qu'il est attentatoire aux libertés publiques et qu'aucune garantie n'est prévue contre ces atteintes aux libertés. Sans doute était-ce enfin parce que le Gouvernement est absolument incapable de fournir des explications cohérentes : pour parer aux critiques de l'opposition, il fournit une explication, puis en donne une autre à l'alinéa suivant, au risque de se contredire.
La confusion s'accroît donc d'heure en heure. J'ai l'impression d'assister à une véritable Bérézina. Nous atteignons à présent le stade ultime, celui où vont s'arrêter les débats, puisque le Gouvernement et sa majorité sont littéralement muets ! Ils sont en train de se rendre doucement compte – et la nuit les aidera sans nul doute à parachever cette prise de conscience – qu'ils défendent une affaire qui les dépasse complètement, que quelqu'un, quelque part – nous voyons bien qui –, leur a demandé de soutenir, mais qu'ils sont incapables d'expliquer.
Il serait donc sage, monsieur le président, de donner à cette majorité le temps du repos nécessaire pour qu'elle admette qu'il lui faut abandonner la défense d'un texte inutile, stupide, dangereux, totalement inapplicable, et qui ne manquera pas de ternir l'image du Gouvernement dans l'opinion – ce dont nous nous soucions beaucoup. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)