Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 2 avril 2009 à 15h00
Protection de la création sur internet — Article 2, amendements 245 364

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

Cet amendement concerne le traitement automatisé des données à caractère personnel. Le texte prévoit la création d'un répertoire des personnes faisant l'objet d'une suspension – un véritable « Livre noir ». Nous avons bien compris que ces personnes ne pourront pas conclure de contrat avec un nouveau fournisseur d'accès à Internet puisque ce dernier pourra consulter ce répertoire.

Dieu sait si la question des fichiers est sensible dans notre pays – qu'on songe aux fichiers EDVIGE, STIC et autres. Il convient de désigner le répertoire établi par l'HADOPI pour ce qu'il est : un fichier. Or, à l'heure où l'on interconnecte les fichiers – sans doute l'une des plus graves menaces pour nos libertés individuelles et la protection de notre vie privée –, une notion reste essentielle sur laquelle la CNIL a été amenée à se prononcer à plusieurs reprises avec force : la durée de conservation des données personnelles.

Je me souviens que nous avions déjà débattu de la question en 2004, au cours de l'examen de la loi pour la confiance dans l'économie numérique.

Cette durée de conservation est simple à fixer : elle ne doit pas excéder la période pendant laquelle l'abonné fait l'objet d'une mesure de la part de l'HADOPI. Comme le soulignait Jean-Pierre Brard, laisser à un décret le soin de fixer ce délai de conservation n'est pas satisfaisant, d'autant que le délai suggéré par le rapporteur lui-même, à savoir trois ans, est pour nous excessif et ne se justifie pas.

Les prescriptions de la loi de 1978 dont il a été rappelé par M. Gosselin qu'elles s'appliquaient au projet HADOPI, soumettent les traitements de données à caractère personnel, et notamment la durée de leur conservation, à des conditions précises.

D'abord, « elles sont exactes, complètes et, si nécessaire, mises à jour. Les mesures appropriées doivent être prises pour que les données inexactes ou incomplètes au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées ou traitées, soient effacées ou rectifiées ».

Ensuite, les données « sont conservées sous une forme permettant l'identification des personnes concernées pendant une durée qui n'excède pas la durée nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont collectées et traitées. »

C'est la raison pour laquelle nous déposons cet amendement de bon sens, qui vise à ce que ces données personnelles soient détruites, effacées, dès la fin de la procédure liant un abonné à l'HADOPI.

Si cet amendement n'était pas adopté, vous voyez le risque : un abonné étant sorti d'une procédure dans laquelle il était visé, si les données le concernant n'étaient pas effacées de ce répertoire, de ce fichier, de cette liste noire, il ne pourrait conclure un nouveau contrat avec un fournisseur d'accès à Internet, alors même qu'il ne ferait plus l'objet d'aucune mesure de la part de l'HADOPI.

Je ne voudrais pas que la réponse du rapporteur et de la ministre consiste à nous dire : « Faites-nous confiance. Il y aura le décret. » Vous avez parlé, monsieur le rapporteur, d'une durée de trois ans. Pour nous, cette durée n'a pas de sens en tant que telle, et surtout, elle ne va pas dans le sens que nous indique la CNIL : « une durée qui n'excède pas la durée nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont collectées et traitées ».

Nous attendons votre réponse, et nous saurons vous répondre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion