Déposé le 6 octobre 2010 par : M. Tardy, Mme de La Raudière, M. Martin-Lalande, M. Mariton, M. Vanneste, M. Gatignol, M. Cinieri, M. Aboud, M. Vandewalle, Mme Primas, M. Mach, M. Mothron, M. Morel-À-L'huissier, Mme Poletti.
À l'alinéa 3, après le mot :
« notifie »,
insérer les mots :
« , après accord de l'autorité judiciaire, ».
Cet amendement propose de réintroduire l'obligation de passer par le juge judiciaire pour ordonner le filtrage de l'internet.
La décision 2009-580 DC du Conseil constitutionnel impose l'intervention du juge judiciaire pour restreindre la liberté des internautes d'accéder aux services proposés sur internet. Filtrer un site internet est sans conteste une restriction d'accès à un service sur internet, donc une atteinte à un droit constitutionnel.
Des atteintes à ce droit peuvent être justifiées, et la lutte contre la pédo-pornographie justifie que l'on puisse prendre des mesures de restriction d'accès à des sites sur internet. Mais d'autres restrictions peuvent se révéler injustifiées, et il revient, en tout état de cause au juge judiciaire de vérifier que la demande de restriction d'accès à un service sur internet entre bien dans le cadre prévu par la loi.
Il est donc nécessaire, même si la caractère pédo-pornographique de certaines image est manifeste, de passer par le juge judiciaire, afin de respecter la Constitution.
Le recours au juge est également nécessaire pour qualifier les faits. Si dans certains cas, l'image entre sans contestation possible dans le cadre légal fixé par l'article 227-23 du code pénal, parfois, l'interprétation peut être litigieuse et seul le juge peut trancher. C'est d'ailleurs expressément son rôle et une autorité administrative ne saurait se substituer à lui.
Les sénateurs ont d'ailleurs reconnu qu'il y avait là un problème, puisqu'ils ont adopté un amendement prévoyant que le juge peut être saisi en cas de doute sur le caractère pornographique des images. Mais ils n'ont pas résolu le problème, puisque c'est l'autorité administrative qui décide ou pas de saisir le juge, prenant par là une décision de qualification juridique de faits, prérogative qui relève du seul pouvoir du juge.
Cette question du filtrage des sites internet a été déjà traitée dans la loi 2010-476 sur les jeux en ligne, qui prévoit que le filtrage des sites de jeux en ligne illicite doit être autorisée par un juge judiciaire. Il serait incohérent et juridiquement risqué de prévoir un régime différent pour le filtrage des sites pédo-pornographiques. Il existe un risque constitutionnel de rupture d'égalité si certaines décisions de filtrage passent par un juge et pas d'autres. A aucun moment, les sénateurs n'ont expliqué en quoi il est justifié de traiter différemment la lutte contre la pédo-pornographie et la lutte contre le jeu illicite.
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