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Séance en hémicycle du 14 mai 2009 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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Sommaire

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de coopération administrative pour la lutte contre le travail illégal et le respect du droit social en cas de circulation transfrontalière de travailleurs et de services entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas (1627).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi autorisant l'approbation du protocole à l'accord du 3 juillet 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Bahreïn relatif aux services aériens (1645).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie concernant la coopération en matière de défense et le statut des forces (1646).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi autorisation l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Angola sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (1647).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Djibouti sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (1648).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République des Seychelles sur la promotion et la protection réciproques des investissements (1649).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi autorisant la ratification de la convention du Conseil de l'Europe pour la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels (1660).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation du protocole sur les registres des rejets et transferts de polluants se rapportant à la convention de 1998 sur l'accès à l'information, la participation du public à la prise de décision et l'accès à la justice dans le domaine de l'environnement (1661).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République orientale de l'Uruguay sur l'emploi salarié des personnes à charge des membres des missions officielles (1662).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du traité de Singapour sur le droit des marques (1663).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du Règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la discussion de quatre projets de loi autorisant la ratification d'accords relatifs aux flux migratoires, respectivement avec la Tunisie, le Sénégal, le Congo et le Bénin (nos 1329, 1328, 1327, 1326).

La Conférence des présidents a décidé que ces quatre textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

La parole est à M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, j'ai l'honneur de vous soumettre aujourd'hui les projets de loi autorisant l'approbation des accords relatifs à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement, ou développement solidaire, conclus respectivement avec le Sénégal, le Congo, le Bénin et la Tunisie.

Ces quatre accords traduisent la détermination de la France à instaurer un partenariat global entre pays d'origine et de destination de la migration, afin d'apporter des solutions concrètes au défi que représente la maîtrise des flux migratoires.

Ces accords s'inscrivent dans le cadre de l'approche globale sur les migrations adoptée dès 2005 par l'Union européenne. Ils sont l'illustration de la nouvelle politique d'immigration choisie et concertée voulue par le Président de la République. Le Pacte européen sur l'immigration et l'asile, adopté à l'unanimité par les États membres en octobre dernier lors de la présidence française de l'Union européenne, a consacré ce principe du partenariat avec les pays d'origine.

Ce type d'accord propose une approche cohérente et concertée des migrations qui se décline en trois volets indissociables : organiser la migration légale et faciliter la circulation des personnes, renforcer la coopération en matière de lutte contre l'immigration clandestine, contribuer au développement des pays d'origine grâce au financement des projets favorisant l'emploi des populations dans les zones d'émigration et à la mobilisation des moyens et ressources des migrants vers des actions de développement.

Au-delà du socle commun, chacun des accords présente des aménagements propres à chaque pays, prenant en compte l'état de la coopération bilatérale et les besoins des gouvernements partenaires.

Je voudrais maintenant vous présenter les principales dispositions qui se retrouvent dans chacun de ces accords.

En ce qui concerne tout d'abord la circulation des personnes, la France et les pays signataires s'engagent à faciliter la circulation des personnes concourant à la vitalité des relations bilatérales, et ce dans tous les domaines. La France et ses partenaires qui, comme le Congo et le Bénin, soumettent les ressortissants français au visa de court séjour, faciliteront la délivrance de visas à entrées multiples d'une validité pouvant aller jusqu'à cinq ans.

Ces accords facilitent en second lieu le séjour temporaire en France d'étudiants étrangers. Ils leur permettent d'acquérir une première expérience professionnelle en vue de leur retour dans leur pays d'origine en bénéficiant de dispositions spécifiques plus favorables que le droit commun prévu par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Les intérêts du pays d'origine seront bien entendu pris en compte, en faisant en sorte que la migration contribue à son enrichissement, non seulement à travers les transferts de fonds des travailleurs migrants, mais également grâce à la formation et à l'expérience professionnelle acquises dans notre pays.

Ces accords s'inscrivent également dans la nouvelle approche de l'immigration choisie et concertée par leurs dispositions relatives à l'accès au travail et à la migration circulaire.

Ils encouragent la délivrance de la carte « compétences et talents ». Celle-ci s'adresse aux ressortissants du pays partenaire qui vont participer de façon significative et durable au développement économique ou au rayonnement de la France et de leur pays.

Ils permettent aux jeunes professionnels déjà engagés dans la vie active d'acquérir une expérience en entreprise pour une durée limitée.

Ils prévoient l'ouverture aux ressortissants des pays concernés de certains métiers sur la base d'une liste qui peut être révisée chaque année.

Afin de limiter l'exode des élites mais aussi de tenir compte de la situation du marché français du travail, les accords prévoient pour la plupart d'entre eux un contingent. C'est pour cette même raison que la carte « compétences et talents » ne peut être renouvelée qu'une seule fois, s'agissant de pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire.

Cet objectif d'une migration régulière à la fois concertée et contrôlée se double de l'établissement d'une coopération renforcée dans la lutte contre l'immigration irrégulière qui a deux composantes.

D'une part, la France s'engage à apporter à ces pays une expertise en matière policière qui peut être accompagnée d'une coopération dans la lutte contre la fraude documentaire et en ce qui concerne la constitution d'un état civil fiable.

D'autre part, la France et chacun des pays concernés s'engagent à réadmettre leurs ressortissants en situation irrégulière sur le territoire de l'autre partie, en facilitant la délivrance des laissez-passer consulaires. Cette disposition vise non seulement les nationaux des deux parties, mais aussi, pour le Congo et le Bénin, les ressortissants d'États tiers ayant séjourné sur le territoire de l'autre partie. Le dispositif français d'aide au retour sera par ailleurs proposé aux étrangers concernés.

Ces accords ont enfin pour objectif de contribuer au développement des pays constituant une source d'émigration grâce à la recherche de synergies entre migration et développement. Ils visent en particulier à mobiliser les compétences et les ressources des migrants en apportant un soutien financier aux initiatives de ces derniers en faveur du développement de leur pays d'origine et en promouvant les instruments financiers prévus à cet effet – compte épargne codéveloppement et livret d'épargne pour le codéveloppement. Ils affirment également la volonté de favoriser la réinsertion sociale et professionnelle des migrants à leur retour dans le cadre de la migration circulaire.

Par ailleurs, il convient de souligner l'introduction du concept de développement solidaire dans l'accord signé notamment avec la Tunisie. Ce concept figure désormais dans tous les accords signés postérieurement ou en cours de négociation.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Il vise à promouvoir des actions de coopération et des projets financés par le ministère de l'immigration en raison de la contribution qu'ils apportent au développement tout particulièrement dans les régions d'émigration, en vue du maintien sur place des populations. Cette politique de développement solidaire est menée en cohérence avec l'aide publique au développement. C'est pourquoi le ministère de l'immigration dispose d'un programme budgétaire spécifique inscrit dans la mission « Aide publique au développement », aux côtés des programmes du ministère de l'économie et de celui que je connais bien du secrétariat d'État à la coopération et à la francophonie qui reste d'ailleurs la partie très majoritaire de cette mission.

Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les principales dispositions des accords relatifs à la gestion concertée des flux migratoires, au développement solidaire et au codéveloppement qui font l'objet des projets de loi soumis à votre autorisation. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Claude Guibal, rapporteur de la commission des affaires étrangères pour le projet de loi relatif à l'accord avec la Tunisie sur la gestion concertée des migrations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Guibal

, rapporteur de la commission des affaires étrangères pour le projet de loi relatif à l'accord avec la Tunisie sur la gestion concertée des migrations. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme le disait, en 2006, le ministre de l'intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, lors du débat sur la loi relative à l'immigration et à l'intégration, la politique d'immigration ne peut plus se définir de manière isolée, sans prendre en compte les problèmes ou les besoins des pays d'origine, elle ne peut plus seulement viser à la fermeture des frontières, comme cela a été un temps son objectif, lequel s'est d'ailleurs révélé impossible à réaliser, mais elle doit s'inscrire dans le cadre de partenariats entre pays en développement et pays d'accueil.

Telle est la politique que la France met désormais en oeuvre et qu'elle promeut, soit de manière bilatérale, soit dans le cadre de l'Union européenne, et l'on sait la part prise en son temps par le ministre Brice Hortefeux dans l'élaboration du Pacte européen signé en octobre dernier.

À cet égard, je voudrais souligner que ce n'est pas seulement au niveau européen que la perception d'ensemble des flux migratoires a changé ces dernières armées. De nouvelles perspectives, riches de possibilités, ont aussi été ouvertes par l'ensemble de la communauté internationale sur l'articulation entre questions de migrations et questions de développement. Il faut y voir un élément déterminant qui peut considérablement aider au succès des politiques migratoires.

Les accords régionaux ou bilatéraux relatifs à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement qui sont négociés entre les pays ou les régions d'origine et le pays de destination en sont un des éléments importants. Celui que le Gouvernement a signé, le 28 avril 2008, avec la République tunisienne et qui est aujourd'hui soumis à notre assemblée, s'inscrit dans cette démarche d'ensemble.

Je voudrais évoquer, au début de mon propos, quelques aspects complémentaires, à savoir les relations bilatérales que nos deux pays ont entretenues en matière migratoire d'une part, et le contexte particulier que présentent le dialogue euroméditerranéen et le processus de construction de l'Union pour la Méditerranée, d'autre part.

Preuve, s'il en était besoin, que l'articulation entre migrations et codéveloppement s'est imposée récemment, les accords antérieurement signés entre la France et la Tunisie ne comportaient pas la moindre disposition qui y fasse allusion.

Ainsi, l'accord négocié en 1988 et ses avenants de 1991 et de 2000, qui sont d'inspiration clairement plus libérale que ceux d'aujourd'hui se bornent à traiter des conditions de séjour et d'obtention de titres de séjour des ressortissants tunisiens en France et des ressortissants français en Tunisie.

Un accord antérieur datant de 1983, avait ouvert la voie à un contrôle plus efficace des flux migratoires entre les deux pays. À l'époque, un échange de lettres avait suffi pour répondre au souci commun des deux gouvernements et avait accordé leur collaboration qui n'avait d'autre préoccupation que celle-ci.

L'approche sur laquelle repose l'accord signé en avril 2008 est radicalement différente. Elle est surtout plus ambitieuse. Cet accord s'inscrit dans la droite ligne du Pacte européen et des sommets de Rabat et de Lisbonne.

Il est par ailleurs conforme à l'esprit du dialogue euroméditerranéen sous ses différentes formes. Je rappelle à ce sujet que la relance du processus de Barcelone avait été envisagée autour des questions de développement économique et social des pays de la rive sud de la Méditerranée.

Comme cela avait été souligné il y a déjà plusieurs années, l'intérêt du processus de Barcelone a été de traiter l'ensemble des problèmes dans leur complexité, et tout particulièrement celui de l'immigration : plutôt que de se limiter à une conception essentiellement sécuritaire de l'immigration, qui aurait pu être choisie, notamment lors de périodes de relative tension, de vagues d'attentats, par exemple, c'est au contraire la voie qui privilégiait la coopération et le codéveloppement qui a été retenue. C'est le développement économique et social des pays d'origine qui a été considéré comme le meilleur outil pour aboutir à la solution la plus satisfaisante pour toutes les parties.

En d'autres termes, cette approche permettait d'ouvrir la réflexion sur certaines des questions que l'on retrouve aujourd'hui consacrées dans les forums internationaux et traitées dans les accords de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement. Il en est ainsi, entre autres, de l'idée de migrations provisoires, lesquelles permettent aux intéressés d'acquérir une formation et de rentrer avec des compétences utiles au développement de leur pays.

De même, dans le cadre du Dialogue 5 + 5, par exemple, au tournant des années 2000, les questions de mise en adéquation des besoins de main-d'oeuvre avec les migrations étaient déjà posées. Tout comme l'étaient celles du contrôle des migrations et de 1'intégration des intéressés, certes sur la base d'autres préoccupations initiales, tenant notamment au risque terroriste, mais avec les mêmes aboutissants. C'est ainsi que des points de convergence ont pu être trouvés très tôt sur les questions de rapprochements des législations nationales en matière d'immigration, notamment pour faciliter les séjours de longue durée des étudiants ou en matière de formation professionnelle pour que les bénéficiaires puissent valoriser ensuite la formation acquise dans leur pays d'origine.

D'une certaine manière, l'accord qui a été négocié avec la Tunisie marque l'achèvement de ce processus de dialogue. C'est le premier de ce type signé avec un pays du Maghreb, après ceux signés avec des pays d'Afrique subsaharienne et, en ce sens, il revêt une particulière importance, compte tenu aussi des liens traditionnels qui unissent nos deux pays.

Par rapport aux accords signés avec les pays africains, peu de différences sont à noter, si ce n'est dans la forme. En lieu et place d'un texte unique, comme ce fut jusqu'à présent le plus souvent le cas, il y a ici un accord-cadre auquel sont adjoints deux protocoles, l'un portant sur la question de la gestion concertée des flux migratoires, l'autre sur le développement solidaire, qui ont été signés le même jour.

L'accord-cadre est très bref dans sa rédaction. Il ne fait que poser les principes, et tout particulièrement ceux auxquels se réfèrent les deux parties lorsqu'elles affirment leur engagement solidaire pour une gestion concertée de la migration et leur volonté d'asseoir un partenariat privilégié en matière de développement solidaire.

Le protocole additionnel relatif à la gestion concertée des flux migratoires détaille, dans des termes fort proches de ceux que l'on retrouve dans les autres accords, les questions relatives aux différents types d'immigration et y apporte des solutions identiques. Parmi les différences notables que l'on peut mentionner, je retiens le nombre des personnes concernées par les différents visas, plus élevé que dans le cas des accords négociés avec les pays d'Afrique subsaharienne : ce sont ici quelque 1 500 candidats par an qui peuvent bénéficier de la carte « compétences et talents » et 1 500 autres des programmes de jeunes professionnels. La catégorie des travailleurs saisonniers intéresse, quant à elle, 2 500 personnes, et 3 500 personnes peuvent être admises chaque année comme salariés exerçant l'un des métiers énumérés sur une liste précise.

Il faut aussi remarquer que la liste des métiers ouverts aux ressortissants tunisiens est incomparablement plus étendue que celles figurant dans les autres accords.

Les questions relatives à la réadmission des personnes en situation irrégulière ne font pas non plus l'objet d'un traitement différent ni dans leur principe ni dans leur mise en oeuvre. Enfin, de même que dans les autres accords, il est prévu que la France aide au renforcement des capacités des services tunisiens en charge de la lutte contre l'émigration clandestine.

Le second protocole, relatif au développement solidaire, réaffirme en premier lieu que « le développement d'une solidarité agissante intégrant à la fois les impératifs du développement durable, de l'emploi et de la sécurité pour tous, est de nature à assurer une maîtrise efficace de la migration ».

Il indique ensuite les axes sur lesquels la coopération entre les deux pays se concentrera et les points sur lesquels la France portera son effort : l'emploi et la formation professionnelle et universitaire, le renforcement de la capacité institutionnelle tunisienne en matière de migration, l'amélioration des dispositifs de transferts de l'épargne des migrants et la coopération décentralisée.

Un volet particulier relatif à la réinsertion sociale et professionnelle intéresse les ressortissants tunisiens porteurs d'un projet de création d'entreprise, les migrants en situation irrégulière qui souhaitent bénéficier de l'aide au retour de la France et les bénéficiaires de la carte « compétences et talents ».

Enfin, une liste de projets, à mettre en oeuvre sur crédits du MIIIDS, est indiquée en annexe du protocole et porte sur des aspects touchant à la formation professionnelle, à l'intégration sociale, à la pêche artisanale, à l'accompagnement des projets des jeunes entrepreneurs ainsi qu'au développement de la région de Médenine ; ces deux derniers projets sont financés pour des coûts estimés respectivement à 3 et 5 millions d'euros. D'autres actions, plus modestes, intéressent les secteurs de la santé et du micro-crédit.

En conclusion, mes chers collègues, je voudrais retenir l'idée que cet accord répond à l'intérêt de la France et de l'Union européenne en ce qui concerne la maîtrise des flux migratoires. Mais je voudrais aussi insister sur l'opportunité qu'il représente pour le développement économique et social de la Tunisie, avec laquelle il a été négocié. La politique du Gouvernement s'inscrit désormais dans le cadre d'une démarche d'aide au développement plus lisible et qui relève d'une logique de coresponsabilité qu'il faut saluer.

Pour ce qui me concerne, je vous recommande par conséquent d'approuver le projet de loi qui nous est soumis. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Michel Terrot, rapporteur de la commission des affaires étrangères pour les trois projets de loi relatifs à des accords sur les flux migratoires avec le Sénégal, le Congo et le Bénin.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Terrot

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, le traitement de l'immigration étant l'une des questions les plus polémiques qui soient, il me semble opportun de resituer la politique du Gouvernement, et donc les textes qui nous intéressent aujourd'hui, dans leur contexte national, régional et international.

Chacun se souvient, bien sûr, de la loi de novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, de celle de juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et, plus récemment, du Pacte européen sur l'immigration et l'asile, adopté par le Conseil européen en octobre dernier, durant la présidence française de l'Union européenne.

On a peut-être moins présent à l'esprit que, depuis quelques années, la gestion des migrations internationales est devenue l'une des principales priorités de l'ensemble de la communauté internationale, dont l'approche recoupe celle défendue par le Gouvernement dans ces accords de gestion concertée.

Quelques données chiffrées, tout d'abord, pour rappeler que le fait migratoire touche aujourd'hui quelque 200 millions de personnes, soit 3 % de la population mondiale, qui sont essentiellement motivées par des conditions socio-économiques et par l'écart de conditions entre pays riches et pauvres.

Cela étant, l'immigration est un phénomène qui évolue fortement : il concerne aujourd'hui aussi bien des mouvements de populations des pays du sud vers le nord que du sud vers le sud. Nombre de pays africains, par exemple, sont désormais des pays d'accueil ou de transit importants, qui rencontrent les mêmes problèmes que les pays de l'OCDE. Il faut savoir que l'Ouganda, l'Afrique du sud et la Côte-d'Ivoire sont parmi les vingt premiers pays accueillants au niveau mondial.

Je voudrais insister ensuite sur le fait que ce ne sont pas seulement les migrations qui changent, mais surtout le regard qu'on a sur elles, et que ce changement de perspective a entraîné depuis quelques années, au niveau mondial, de profondes évolutions des politiques migratoires.

Que ce soit de la part de l'OIT, de l'OIM, de l'OCDE, de la Banque mondiale et, bien sûr, en tout premier lieu, de la part des Nations unies, la réflexion et les stratégies en matière de politique migratoire insistent désormais sur le lien étroit entre migrations et développement et sur l'articulation nécessaire entre les deux.

Je veux rappeler à ce sujet qu'en 2006, Kofi Annan avait lancé un « Dialogue de haut niveau sur les migrations internationales et le développement », qui a réuni plus de 130 pays autour de l'idée selon laquelle les pays pouvaient coopérer afin de concrétiser les synergies possibles entre migrations et développement et rendre la situation avantageuse et profitable à la fois pour les migrants, leurs pays d'origine et les sociétés qui les accueillent. Depuis, tous les ans, à l'initiative, la première fois, de la Belgique en 2007, un forum mondial sur la migration et le développement associe États et organisations de la société civile de plus de 150 pays pour débattre des différents aspects de la problématique. Y ont déjà été discutés les thèmes de la fuite des cerveaux, des transferts monétaires des migrants vers leurs pays d'origine, de la meilleure utilisation qui pourrait être faite de ces sommes – qui équivalent, au niveau mondial, à plus du double du montant total de l'aide publique au développement –, ou encore des partenariats de coopération à mettre en oeuvre entre pays d'origine et de destination.

Il y a donc un véritable dialogue international, qui se décline au niveau régional : il y a actuellement treize forums régionaux qui débattent sur la thématique « « migration et développement » sur les cinq continents.

L'Union européenne est sans doute le pôle régional qui a été le plus loin dans cette logique avec l'approbation du « Partenariat Afrique - Union européenne » au sommet de Lisbonne en décembre 2007, avec l'adoption du Pacte il y a quelques mois, et bien sûr, avec les conférences ministérielles euro-africaines sur la migration et le développement, qui se sont réunies à Rabat en juillet 2006 et à Paris en novembre dernier, au cours desquelles un partenariat global, ainsi qu'un programme de coopération pluriannuel ont été approuvés par les soixante pays et les vingt organisations internationales qui y ont participé.

Ces accords, qui reposent sur une vision globale, cohérente et négociée, mettent l'accent sur deux aspects essentiels, comme leurs titres l'indiquent, à savoir la maîtrise des flux migratoires et la mise en oeuvre d'actions de codéveloppement. En d'autres termes, c'est une approche de la relation nord-sud sous l'angle du développement des pays d'origine.

L'architecture de ces différents accords est très proche et l'on note également peu de différences quant au fond, dans la mesure où ils déclinent les trois aspects complémentaires : le volet de l'organisation de l'immigration légale, celui de la lutte contre l'immigration irrégulière et, enfin, celui du codéveloppement ou développement solidaire.

En matière de circulation, tout d'abord, tous les trois comportent des dispositions sur les différentes catégories de visas et de personnes admises au séjour.

Est ainsi abordée la politique de facilitation des visas de circulation dont vous venez de parler, monsieur le secrétaire d'État, c'est-à-dire les visas de courts séjours à entrées multiples, qui permettent des séjours de trois mois maximum par semestre pour une durée de un à cinq ans, pour trois catégories de bénéficiaires : les hommes d'affaires, les universitaires, les sportifs, etc., les membres des familles de ressortissants résidant sur le territoire et, enfin, les personnes nécessitant des soins médicaux.

En ce qui concerne les séjours de longue durée, les accords distinguent entre la qualité des demandeurs. Ce sont les étudiants qui sont concernés en premier lieu et la logique des dispositifs est de valoriser leur séjour en France dans une perspective de développement de leur pays d'origine. En ce sens, des mécanismes sont prévus pour favoriser leur retour au pays à la suite de leurs études, et la possibilité d'une première expérience professionnelle en France après leurs études pour ceux titulaires d'un master. Je note aussi, dans le cas du Sénégal et du Bénin, le souci d'une adéquation marquée de la politique migratoire avec les besoins de formation exprimés par les pays.

La seconde catégorie concernée par les visas de longue durée est celle des immigrés pour motifs professionnels, pour laquelle les accords, pour l'essentiel, mettent en oeuvre les dispositions de la loi de 2006 qui renvoie expressément à la signature d'accords bilatéraux en ce qui concerne l'octroi des cartes de séjour « compétences et talents » aux ressortissants de pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire.

Pour le reste, les accords prévoient également les dispositions concernant les jeunes professionnels et la délivrance des cartes de séjour temporaire qui concernent soit les travailleurs saisonniers, soit un certain nombre de métiers précisément énumérés.

Le deuxième point clé de ces accords concerne l'organisation de la lutte contre l'immigration irrégulière. Ici aussi, les dispositifs prévus dans les trois accords sont très proches, si ce n'est identiques, en tout cas dans leur esprit. Le principe est affirmé d'une responsabilité partagée entre la France, le Bénin et le Congo en la matière, et des mécanismes de coopération ou de collaboration sont prévus, notamment en matière de réadmission des nationaux et de procédures d'identification de la nationalité des personnes en situation irrégulière pour leur future réadmission.

Une coopération spécifique, via le FSP, est également prévue en matière de surveillance des frontières dans le cadre de l'accord avec le Sénégal en vue d'un partenariat entre les deux pays. Dans le cadre de l'accord avec le Bénin et le Congo, l'accent est mis sur une coopération policière par laquelle la France apporte son expertise sur les questions de démantèlement de filières de clandestins, de sécurisation de titres, de fraude documentaire ou de sécurisation aéroportuaire.

Le troisième volet des accords porte sur les questions de codéveloppement et d'aide au développement des pays d'origine. C'est sur ce dernier aspect que les accords diffèrent le plus dans la mesure où ils répondent aux besoins exprimés par chacune des parties.

L'accord avec le Congo met ainsi l'accent sur le rôle des migrants et notamment sur le financement de projets de développement local initiés par leurs associations, sur l'appui aux diasporas et le soutien aux projets d'initiatives économiques ou de développement des migrants, notamment des jeunes. Un autre aspect concerne la réinsertion des migrants volontaires pour un retour dans leur pays et, enfin, un fort accent est mis à la coopération dans le secteur santé dans lequel un certain nombre d'actions sont énumérées qui complètent le DCP signé entre la France et le Congo en 2007.

La coopération développée avec le Sénégal dans le cadre de l'accord est plus variée et concerne notamment, outre la santé, les secteurs de l'agriculture et de la pêche, le domaine financier et la coopération décentralisée.

Enfin, l'accord avec le Bénin énumère les généralités sur lesquelles les parties entendent mettre l'accent et détaille en annexe le fort appui de la part de la France aux questions de santé et tout particulièrement sur le thème de la faiblesse des ressources humaines du système de santé béninois.

Cela étant, sans contester l'intérêt de ces actions d'aide au développement, leur mise en perspective avec l'architecture générale de l'APD appelle néanmoins quelques commentaires.

Tout d'abord, on peut, monsieur le secrétaire d'État, se monter surpris de ne voir nulle part mentionné le secrétariat d'État à la coopération, qui vous est cher. Certes, les crédits ici mobilisés, sont ceux du ministère de l'immigration, qui s'inspire du cadre général des DCP parfois évoqués. Pour autant, aux fins d'une bonne harmonisation des politiques conduites par les différentes institutions en charge de l'aide au développement, dont le ministère de l'intégration fait désormais partie, il aurait sans doute été opportun de rappeler le rôle du secrétariat d'État à la coopération, voire de prévoir son intervention.

Le deuxième point que je souhaiterais évoquer – et j'en terminerai par là – est celui de la logique de l'articulation entre gestion migratoire et codéveloppement qui me paraît impliquer de privilégier les financements bilatéraux d'aide publique au développement. Or chacun sait que la part des financements multilatéraux est tendanciellement à la hausse dans la structure de l'APD française …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Terrot

…et que tant les autorisations d'engagement que les crédits de paiement consacrés à la coopération bilatérale sont en baisse régulière, en témoigne le budget voté pour l'année 2009.

Je souhaite donc appeler vivement votre attention, monsieur le secrétaire d'État et celle du Gouvernement sur la question de la cohérence indispensable entre les politiques migratoires…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Terrot

…garante, pour ce qui vous concerne, de l'efficacité des accords de gestion concertée et du succès sur la durée de la maîtrise de l'immigration.

Sous ces quelques réserves, je vous invite, mes chers collègues, à approuver ces accords qui marquent une étape et une réorientation de la politique migratoire de la France dans un sens que je crois à la fois plus équilibré et répondant aux intérêts communs de notre pays et des trois pays d'origine. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Axel Poniatowski, président de la commission des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Axel Poniatowski

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les quatre accords bilatéraux de gestion concertée des flux migratoires, aujourd'hui soumis à notre examen, s'inscrivent dans le cadre de la politique que la France mène résolument depuis l'adoption des lois de 2003 et de 2006, comme cela a été indiqué.

Il faut voir, dans la signature de ces accords de gestion concertée des flux migratoires, la marque de la réorientation, souhaitée par le Président de la République, de notre politique de contrôle de l'immigration lancée par Brice Hortefeux, alors ministre de l'immigration.

Je voudrais profiter de ce débat pour que soient apportées à la représentation nationale quelques précisions et levées certaines incertitudes ou ambiguïtés.

En premier lieu, si l'on en croit les chiffres communiqués par les services officiels, l'immigration a augmenté de 14 % en cinq ans, entre 2003 et 2007, en ce qui concerne le Congo et le Sénégal, plus légèrement pour ce qui est de la Tunisie. Cela est dû au fait que le dispositif prévu dans la loi de 2006 n'entre que très lentement en vigueur. En effet, je rappelle qu'à ce jour, un seul accord ratifié avec le Gabon est aujourd'hui en application.

Les effets de la législation se feront vraisemblablement pleinement sentir lorsque les accords seront tous ratifiés. Toutefois, je souhaiterais connaître les prévisions du ministère de l'immigration sur l'évolution et la nature de ces flux migratoires.

L'examen des profils migratoires des quatre pays concernés montre, en effet, que l'immigration familiale reste, et de loin, très nettement dominante, tandis que l'immigration professionnelle est faible, si ce n'est totalement marginale. Celle en provenance du Bénin, par exemple, ne représente quasiment rien. C'est aussi le cas de l'immigration congolaise puisque, en 2007, 1,7 % des immigrés seulement ont obtenu leur visa à ce titre. Les données sont comparables en ce qui concerne le Sénégal.

En d'autres termes, monsieur le secrétaire d'État, ces accords suffiront-ils à promouvoir une immigration professionnelle, dont nous avons besoin, qui demeure aujourd'hui encore bien modeste ? Y a-t-il véritablement adéquation entre les ambitions, qui sont louables et que je partage entièrement, et les dispositifs mis en place, dont on peut se demander comment ils permettront d'atteindre les objectifs fixés ? Comment, pour ne prendre que cet exemple, sera-t-il possible d'attribuer jusqu'à 150 cartes dites « compétences et talents » par an à des ressortissants béninois ou congolais pour répondre à des offres d'emplois qui requièrent des qualifications très spécifiques ?

Cette réflexion me semble d'autant plus justifiée que cette politique entend, à juste titre, développer des relations de partenariats d'égal à égal entre les pays d'origine et la France. Certaines des négociations qui sont menées, je pense notamment à celle avec le Mali, s'avèrent d'ores et déjà difficiles. Celle conduite avec le Sénégal l'a été aussi, en témoignent les avenants qu'il a fallu apporter au texte initial. Il ne faudrait pas que cette politique, qui allie opportunément la gestion de l'immigration à l'aide au développement que la France apporte aux pays bénéficiaires, en se révélant inadaptée, ne sache finalement répondre à nos attentes ni à celles des pays concernés.

Ces questions me semblent d'autant plus importantes que la crise économique et financière qui frappe aujourd'hui bouleverse sans doute la donne. À ce titre, j'aimerais savoir également si ce contexte de crise modifie les objectifs fixés et les demandes d'immigration.

Cela étant, si les accords bilatéraux de gestion des flux migratoires traduisent les nouvelles orientations de la politique gouvernementale, il n'en demeure pas moins que c'est toujours la délivrance d'un visa qui permet à une personne d'accéder légalement au territoire français, pour y travailler ou y étudier, mais aussi, pour y séjourner, même brièvement. Ainsi, 2,350 millions de demandes de visas ont été traitées par les consulats français en 2007, ce qui constitue une masse de travail considérable, même si le nombre total de demandes est en baisse de 6,5 % entre 2004 et 2007 à la suite, notamment, de la mise en place du paiement de frais de dossier au moment du dépôt de la demande et non plus quand le visa est accordé.

Deux mouvements sont en cours depuis quelques années dans le domaine de la délivrance des visas, mouvements lancés à l'origine par le ministère des affaires étrangères et désormais gérés, en premier lieu, par le ministère de l'immigration. Il s'agit d'une part du processus d'externalisation des visas – comme l'accueil des demandeurs, la perception des frais de dossiers, la vérification de la présence de toutes les pièces requises – et, d'autre part de la généralisation progressive des visas biométriques. S'ils répondent à des logiques différentes, ces deux mouvements me semblent également indispensables. Le premier, d'initiative nationale, vise à la fois à améliorer la qualité du service rendu aux demandeurs de visas et à permettre aux agents des consulats de se concentrer sur l'essentiel, c'est-à-dire l'instruction des demandes. Le second mouvement, qui s'insère dans la perspective d'un système européen dénommé VIS – visa information Schengen – a pour objectif d'améliorer les contrôles lors de la délivrance des visas, aux frontières et sur le territoire des États de la zone Schengen : les empreintes digitales et la photographie des demandeurs sont numérisées, puis traitées par informatique.

Jusqu'à aujourd'hui ces deux évolutions ont été menées en parallèle. Concrètement, fin 2008, une trentaine de postes, et en particulier ceux auxquels sont adressées de très nombreuses demandes, avaient recours à l'externalisation, tandis que 107 postes étaient en mesure de délivrer des visas biométriques. Plus du tiers des visas délivrés étaient biométriques fin 2008. Cette proportion devrait avoir doublé fin 2009 et atteindre 100 % fin 2010. Comme il n'y a pas de raison d'abandonner le processus d'externalisation, qui a produit d'excellents résultats, et rend d'ailleurs un très grand service aux demandeurs étrangers, il devient urgent de trouver un moyen de concilier externalisation et biométrie.

La principale contrainte vient de la nécessité de garantir la sécurité des données et la protection des libertés individuelles sur lesquelles la CNIL veille à juste titre. S'y ajoutent certaines réticences communautaires, notamment relatives au fait que le service externalisé est payé par le demandeur en plus des frais de dossier, ce qui représente une vingtaine d'euros en sus des frais fixés à 60 ou à 35 euros selon les pays.

Au cours du débat budgétaire de novembre dernier, il avait été indiqué aux rapporteurs pour avis concernés que des expérimentations allaient être menées en 2009 dans trois postes – Istanbul, Alger et Londres – qui délivrent à eux trois entre 500 000 et 600 000 visas par an. Or j'ai justement effectué une mission à Alger, il y a quelques jours, qui m'a donné l'occasion de mesurer l'avancée de la réflexion sur ce sujet et les obstacles que rencontre sa mise en oeuvre.

Depuis la réouverture du consulat général d'Oran, en septembre 2007, les trois consulats généraux français en Algérie traitent plus de 210 000 demandes par an et accordent de l'ordre de 130 000 visas. À Annaba et Oran, sont délivrés des visas biométriques depuis, respectivement, juin 2005 et décembre 2007. Ce sont donc des agents du consulat qui suivent l'ensemble de la chaîne, de l'accueil des demandeurs à la remise du visa accordé, en passant par le recueil des données biométriques. À Alger, en revanche, depuis l'automne dernier, a été mise en place, à la satisfaction générale, une gestion extérieure des rendez-vous et des dépôts de dossiers. Cette procédure permet d'accorder un rendez-vous au demandeur dans les quarante-huit heures, d'obtenir une réponse sous huitaine et de traiter environ 80 000 dossiers par an, mais les visas ne sont pas encore biométriques. Les locaux du consulat d'Alger ne permettent pas d'y loger l'opérateur extérieur. Or la France est propriétaire d'un bâtiment actuellement inoccupé qui conviendrait parfaitement à ce regroupement. Il apparaît pourtant que l'ambassadeur n'obtient pas le feu vert du Gouvernement au déménagement des services consulaires et de l'opérateur privé. Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous expliquer les raisons de ce blocage, alors que la solution proposée apparaît parfaitement rationnelle, respectueuse des libertés individuelles et des deniers publics ? Par ailleurs, pourriez-vous faire le point sur l'avancée des expérimentations aujourd'hui à Londres et Istanbul ?

J'ai conscience du fait que ces questions dépassent le strict objet des accords sur l'approbation desquels nous sommes amenés à nous prononcer. Elles me semblent néanmoins mériter d'être abordées. Je vous remercie donc par avance, monsieur le secrétaire d'État, des réponses que vous pourrez nous apporter dès aujourd'hui. J'ai, en outre, l'intention de proposer à la conférence des présidents l'organisation d'un débat sur la gestion des flux migratoires et les conditions de délivrance des visas, à l'occasion d'une prochaine semaine consacrée aux activités de contrôle de notre Assemblée, afin de nous donner plus de temps pour revenir sur ces différents points.

En attendant, et s'agissant des projets en question, je recommande, bien entendu, chers collègues, que nous les approuvions en séance, comme nous l'avons fait en commission. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cousin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les textes que nous examinons aujourd'hui s'inscrivent dans une série d'accords qui mettent en place une nouvelle politique de la France en matière de gestion des flux migratoires.

Cette nouvelle volonté politique, initiée par le Président de la République dès la campagne présidentielle, est fondée sur une approche globale qui souhaite lier à la fois les politiques de développement, la gestion des migrations légales et la lutte contre l'immigration irrégulière.

Elle résulte d'une longue réflexion sur le sujet et le choix d'envisager autrement les politiques migratoires. Aussi, elle s'appuie sur une constatation simple qui a mis du temps à arriver à maturation dans les opinions des décideurs, des citoyens français mais aussi européens, c'est que l'immigration zéro n'est ni possible ni souhaitable.

Cette réflexion s'accompagne immédiatement d'un autre aspect : l'Europe, donc la France, ne peut accueillir sur son sol tous ceux qui voient en elle un nouvel Eldorado. Elle s'est traduite, dès le mois de mai 2007, par la création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, devenu par la suite développement solidaire.

La conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement de Rabat en juillet 2006 avait déjà posé les fondements de cette approche globale et concertée. La notion de partenariat avec les pays d'origine est au coeur de cette nouvelle approche. L'Afrique est en effet le principal continent source de migration, 65 % des flux migratoires réguliers vers la France proviennent d'Afrique du Nord ou d'Afrique subsaharienne.

C'est d'ailleurs au nom de ces principes et forte de l'expérience des accords que nous ratifions aujourd'hui avec nos partenaires africains que la France a proposé dès juillet 2008 à ses partenaires européens, lors de la Présidence française de l'Union, l'élaboration d'une nouvelle politique de l'immigration.

Le Conseil européen a adopté, lors du conseil des 15 et 16 octobre 2008, le fameux Pacte sur l'immigration et l'asile, qui, selon les conclusions du Conseil, constitue désormais « pour l'Union et les États membres le socle d'une politique commune de l'immigration et de l'asile guidée par un esprit de solidarité entre les pays membres et de coopération avec les pays tiers ».

Ce Pacte est, rappelons-le, un succès incontestable pour la France, qui en avait fait l'une des priorités de sa présidence. En effet, le Président de la République en avait fait l'une des priorités de la Présidence française de l'Union européenne afin de répondre à la fois aux défis de notre intégration toujours plus approfondie et à l'attractivité toujours plus forte de notre continent développé et pacifié.

À la suite du premier accord signé en juillet 2007 avec le Gabon, que notre Assemblée a ratifié en avril 2008, d'autres accords ont été signés, que nous examinons aujourd'hui : un en octobre 2007 avec le Congo, qui l'a d'ores et déjà ratifié ; un en novembre 2007 avec le Bénin, ce pays, déstabilisé par des troubles politiques, ne l'ayant pas encore ratifié ; en février 2008, les avenants à l'accord avec le Sénégal, accord ratifié par les deux chambres sénégalaises ; enfin, en avril 2008, l'accord avec la Tunisie.

Dès le lendemain de la signature du premier accord sur les flux migratoires avec le Gabon, Brice Hortefeux, alors ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, déclarait que cette signature exprimait « l'intention de la France de maîtriser les flux migratoires tout en participant parallèlement à l'indispensable effort de développement des pays d'origine des migrants. Ce n'est pas l'un ou l'autre, ni l'un sans l'autre, c'est l'un avec l'autre. »

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cousin

Nos rapporteurs ont fort bien décrit les différents aspects techniques de ces accords, mais aussi les relations étroites qui lient la France avec ces différents pays.

Je voudrais pour ma part insister sur l'un des aspects de ces accords qui me semble important.

Au-delà des articles techniques mettant en place l'organisation des flux migratoires entre nos pays – visas, étudiants, regroupements familiaux, cartes « compétences et talents », lutte contre l'immigration irrégulière –, je souhaite revenir sur les différents articles concernant le soutien aux actions sur le terrain qui me semble initier une véritable politique de codéveloppement concertée.

Ces initiatives, aussi diversifiées que l'appui aux diasporas ou le cofinancement de projets dans des domaines variés – agriculture, pêche, système bancaire, réinsertion professionnelle des professions de santé – démontrent notre volonté d'aide au pays d'origine.

Nous réfutons avec force la polémique stérile qui nous accuse de vouloir piller les cerveaux africains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

C'est pourtant vrai ! Les médecins, par exemple.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cousin

Bien au contraire, dans le respect de notre tradition d'accueil et de formation des élites, nous souhaitons former des étudiants afin qu'ils puissent faire bénéficier leur pays d'origine de leur compétence au service de son développement. Une partie de ces initiatives seront financées par les mécanismes de fonds de solidarité prioritaire.

Monsieur le secrétaire d'État, nous avons maintenant un an de recul depuis que nous avons ratifié le premier accord avec le Gabon. Êtes-vous en mesure de nous donner des informations sur sa mise en oeuvre, sur les actions de co-développement envisagées, leur mise en place, leur financement ?

Parce que ces accords initient une nouvelle manière d'aborder les flux migratoires, parce qu'ils s'inscrivent dans la logique du pacte européen voté avec nos partenaires, parce qu'ils instituent un véritable partenariat avec les pays d'origine, enfin parce qu'ils abordent les questions migratoires dans leur ensemble de façon lucide et concertée, le groupe UMP votera en leur faveur. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, c'est avec une certaine satisfaction que nous abordons l'étude de ces quatre accords de gestion concertée avec le Sénégal, le Congo, le Bénin et la Tunisie.

Depuis l'installation du ministre de l'immigration, de l'intégration et de l'identité nationale, si mal nommé, nous avons beaucoup entendu parler de cette politique de partenariat, qui consiste à conclure de tels accords avec les pays d'origine des migrants.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Ce que vous n'avez pas fait quand vous étiez au pouvoir !

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Nous ne pouvons qu'être favorables à cette méthode consistant à lier développement et flux migratoires et, surtout, à mettre en oeuvre des partenariats avec les pays d'origine. Effectivement, la meilleure manière d'éviter des migrations non totalement volontaires, c'est de favoriser le développement des pays d'origine, la fin des conflits armés et la consolidation de la démocratie dans ces pays. Nous sommes pour de vrais partenariats.

De même, une politique mettant en avant le rôle des migrants dans le développement de leur pays s'appuie sur un constat juste puisque les fonds transférés par ces migrants sont quasiment équivalents, voire, parfois, supérieurs, au montant de l'aide publique au développement.

Nous approuvons aussi ce qui est prévu pour les visas à entrées multiples de manière à faciliter des allers retours entre les pays d'origine et notre pays, ainsi que la possibilité de favoriser une migration circulaire, utilisant dans les pays d'origine les compétences des migrants, notamment de ceux qui sont très bien formés.

Ce qui nous gêne, c'est que ces accords sont déséquilibrés car c'est le fort qui impose sa loi au plus faible et lui demande de collaborer à une politique qu'il ne peut accepter. En d'autres termes et plus franchement, on parle de codéveloppement mais on demande aux pays du Sud de collaborer à la politique de sécurisation des frontières de l'Europe. Quelque part, on leur sous-traite un certain nombre de politiques désagréables comme la lutte contre la migration non choisie.

On voit donc bien que ce que vous souhaitez, c'est déplacer les objectifs de police des frontières. Comme l'a fait observer un orateur précédent, il est intéressant de voir où sont les crédits affectés à ces accords de gestion.

Nous parlons de codéveloppement – et cela relève de la fonction de M. Joyandet – mais un certain nombre de mesures déjà adoptées en la matière sont restées lettre morte. Ainsi, le compte épargne développement, prévu par une loi de 2006, et le livret d'épargne pour le codéveloppement, créé par une loi de 2007, n'ont toujours pas été mis en oeuvre et commercialisés. Comme le rappelle M. Terrot, ces retards sont dommageables. Mme Martinez souligne même que de tels mécanismes ne tiennent pas compte des pratiques culturelles et économiques des migrants africains, de sorte qu'on a beaucoup de mal à les rendre séduisants.

Aujourd'hui, les fonds qu'envoient les migrants africains dans leurs pays servent plus à la survie et à la lutte contre la pauvreté qu'au développement à proprement parler. Là encore, une bonne idée n'est pas correctement mise en oeuvre.

Plus grave, l'écart entre vos propos sur l'importance du développement, que nous partageons, et la mise en pratique est considérable. Quand on regarde les crédits, et je me réfère à l'excellent rapport de M. Emmanuelli pour le projet de loi de finances pour 2009, on voit que l'on a quasiment renoncé à atteindre les objectifs du Millénaire. Or ce sont des objectifs auxquels nous avions souscrit.

Nous avons parlé l'année dernière des émeutes de la faim. Nous connaissons l'importance – nous en avons discuté dans le cadre du Grenelle – de la question de l'eau. C'est dans tous ces domaines qu'il aurait fallu faire des efforts considérables. Or les fonds sont ridicules.

De plus, en contrepartie des efforts de développement annoncés, vous demandez aux pays du Sud de mettre en oeuvre des politiques contestables de reconduite à la frontière. Pour avoir quelques crédits pour le développement, pour que ce soit un peu plus facile d'obtenir des visas, ils doivent être coopérants sur le retour des ressortissants. Or, dans de nombreux pays, au Mali, par exemple, même les migrants en situation irrégulière en France jouent un rôle considérable dans la survie de nombre de villages. Un tel chantage ne me semble donc pas satisfaisant.

Au lieu de donner des fonds pour le développement, on affecte énormément d'argent – et je sais bien que cela ne relève pas principalement de votre responsabilité, monsieur le secrétaire d'État – aux reconduites à la frontière. Selon M. Pierre Bernard-Reymond, qui n'est pas socialiste, cela coûte environ 20 000 euros par personne. Si de tels crédits étaient utilisés pour faciliter des projets de développement, nous n'en serions pas là.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Rééquilibrons les crédits entre l'aide au développement et les reconduites à la frontière. Alors que l'objectif est de prononcer 28 000 éloignements cette année, on sait très bien qu'à peine un quart d'entre eux seront effectifs. Il faut faire du chiffre mais, dans de nombreux cas, pour les tribunaux, et même par simple humanité, on ne peut pas les mettre en application.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Dans le 20e, RESF et un grand nombre d'associations et même de parents d'élèves sont extrêmement positifs…

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

…avec ces gens qui vivent dans le 20e arrondissement et qui sont parfois bien intégrés dans les écoles et le quartier.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Pour donner quelques fonds au titre de la coopération et du codéveloppement, vous demandez aux pays concernés de reprendre non seulement leurs ressortissants mais également ceux d'autres pays. Or une telle attitude n'est ni raisonnable ni respectueuse de notre conception des droits de l'Homme.

Amnesty International, dans l'un de ses rapports, a souligné la situation dramatique de migrants renvoyés en Mauritanie, exposés à des mauvais traitements et à une détention prolongée.

Ce sont des manières de faire qui ne peuvent pas être acceptées par le groupe socialiste.

Vous savez que nous sommes fondamentalement attachés à la construction européenne. L'idée de définir une politique européenne de l'immigration nous semble donc plutôt positive, et nous pourrons tout à fait poursuivre cette orientation. Mais ce qui est choquant, c'est de créer, comme le fait le Pacte européen sur l'immigration, une solidarité des pays européens contre les pays du tiers-monde et contre des gens qui viennent sur notre continent parce qu'ils cherchent à survivre. C'est quelque chose qui est difficilement acceptable.

Nous avons tous fêté le 8 mai 1945 récemment et nous nous sommes rappelé à cette occasion que, lorsque l'Europe a été menacée dans sa liberté, les peuples du Sud, notamment ceux d'Afrique, sont venus à son secours.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Il faut aujourd'hui s'en souvenir.

Quand l'Europe a adopté le Pacte européen sur l'immigration, les pays d'Amérique du Sud ont rappelé qu'en d'autres temps, on ne leur avait pas demandé de visas pour s'installer chez eux. Par conséquent, aujourd'hui, l'Espagne a décidé d'accorder la nationalité espagnole aux descendants de républicains espagnols qui se sont battus pour la liberté.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Cela signifie qu'ils pourront entrer en Europe librement. Ce sont des orientations que nous devrions méditer, afin que les accords que nous conclurons avec les pays du Sud soient respectueux à la fois de nos droits et libertés mais aussi de la solidarité que nous souhaitons, dans un monde qui soit moins égoïste, plus fraternel. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Nous sommes saisis ce matin de quatre conventions internationales concernant la gestion concertée des flux migratoires et du codéveloppement avec la Tunisie, le Congo, le Bénin et le Sénégal.

Ne nous y trompons pas : la question des flux migratoires est l'un des défis majeurs du XXIe siècle, au même titre que l'enjeu climatique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Il risque d'ailleurs de lui être corrélé.

Écoutons un instant un expert de l'OCDE, dans un fort intéressant rapport de cette organisation sur les flux migratoires rendu public en 2007 : « L'accélération récente des flux renforce le besoin d'une coopération accrue entre les pays d'origine et les pays d'accueil afin de mieux partager les bénéfices de la mobilité internationale. » Il s'agit d'un commentaire de M. John Martin.

Voilà donc un constat et une proposition. Le constat, c'est l'accélération des flux migratoires. Les experts estiment que des dizaines de millions d'individus seront en mouvement dans les années à venir, en flux Sud-Nord mais aussi Sud-Sud. Si ces mouvements ne sont pas contrôlés, ils seront extrêmement déstabilisateurs et porteurs de conflits douloureux pour tous. Le choc des cultures est inévitable compte tenu d'une telle quantité de personnes.

D'où la proposition de maîtriser les flux par la coopération entre les pays d'immigration et les pays d'émigration. C'est une nécessité absolue.

Tel est le sens de ces conventions. On peut peut-être les critiquer sur tel ou tel point, mais il n'en demeure pas moins que l'économie de ces textes constitue la réponse la plus adaptée à une question complexe.

Cette complexité nous contraint d'agir sur toutes les données du problème, et en particulier sur la source même de l'immigration – c'est le sens du codéveloppement –, en mobilisant tous les moyens de l'État, avec l'aide publique au développement. À cet égard, je partage pleinement le point de vue de Michel Terrot sur la nécessité de l'instrument bilatéral ; la France a trop valorisé le multilatéralisme, provoquant une déperdition totale de moyens, alors que ces États attendent un dialogue direct avec nous.

Il convient également de mobiliser l'épargne des immigrés dans de mini projets économiques, même si tout n'est pas parfait aujourd'hui. J'avais proposé dans le passé une sorte de plan d'épargne pour les immigrés souhaitant investir dans leur pays. C'est un outil que nous devons développer, et je me félicite que ces accords comportent des dispositions à cet effet.

Toutefois, je suis convaincu qu'il ne peut y avoir de développement sans maîtrise de la croissance démographique. Tous les experts mondiaux affirment qu'une croissance démographique au-delà de deux points par an empêche tout décollage. Je regrette donc que la France ne propose pas de programmes en ce sens. Le seul pays, parmi les quatre concernés, qui soit en transition démographique est la Tunisie, qui a justement pris des mesures pour maîtriser la croissance démographique de la population, ce qui n'est malheureusement pas le cas de nombreux autres États. Vous savez très bien que la croissance démographique de l'Afrique va poser un problème rédhibitoire pour ces pays.

S'il est exact qu'il n'existe pas de muraille de Chine qui puisse arrêter les flux migratoires – ce serait parfaitement illusoire –, il n'en demeure pas moins qu'il faut établir clairement et fermement que toute personne étrangère en situation irrégulière a vocation à repartir chez elle. Cette position doit être publique et, comme telle, connue au-delà de nos frontières. Tout laxisme ne manquera pas de fonctionner comme un appel à l'immigration débridée.

Les diverses dispositions portant sur la coopération pour le rapatriement vont dans ce sens, en respectant naturellement les notions d'humanisme et d'humanité.

Si l'immigration illégale doit être clairement combattue, en revanche, il faut donner une base stable aux allers et retours légitimes de nombreux professionnels. C'est le sens des dispositions concernant les jeunes professionnels : carte « compétences et talents », statut des travailleurs salariés… Cette stabilité reconnue par les accords doit être au bénéfice des deux parties.

Je conclurai mon propos en évoquant les conditions politiques de l'intégration. On ne s'intègre pas à un corps mou, sans colonne vertébrale. Les Anciens avaient coutume de dire qu'il faut défendre ses lois et ses principes plus fortement que ses propres murailles. Eh bien, nous devons être fermes sur nos principes. Je le dis sans ambages : ceux qui bafouent l'égalité entre les hommes et les femmes, et recommandent que l'on batte sa femme, ceux qui pratiquent la polygamie, de manière concomitante, ceux qui violent la laïcité n'ont pas leur place sur notre territoire.

C'est à ce prix de fermeté que nous resterons une terre d'accueil et que nous maintiendrons les principes de notre vouloir vivre ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Soyez aussi bon que M. Myard, monsieur Rochebloine !

Debut de section - PermalienPhoto de François Rochebloine

Comme il arrive souvent lors de discussions portant sur la ratification de traités internationaux, on ne peut manquer d'observer, aujourd'hui, un certain décalage entre l'objet juridique du débat auquel le Parlement est convié et ses enjeux politiques immédiats ou plus ou moins lointains.

Il suffit d'un regard d'ensemble sur les accords bilatéraux soumis à notre examen pour constater que d'importantes différences formelles existent entre eux dans l'articulation des documents qui les composent et leurs stipulations. Ces différences sont naturellement le fruit des négociations et des compromis politiques qui ont abouti aux rédactions que nous avons sous les yeux. Je remercie nos deux rapporteurs d'avoir, par une présentation synthétique, permis de surmonter l'obstacle posé par cette complexité formelle à la compréhension des enjeux politiques immédiats de ces négociations.

Il faut cependant garder présente à l'esprit la leçon qui se dégage de cette diversité : on ne peut pas traiter le problème de l'immigration comme un tout, sous le seul aspect de la menace qu'elle représenterait pour notre société et notre économie.

Il y a autant de problèmes à traiter que de situations bilatérales, même si l'on peut observer, conformément à l'histoire de nos relations avec les pays dits du Sud, la persistance d'approches communes entre les pays d'Afrique du Nord, d'une part, et les pays d'Afrique au sud du Sahara, d'autre part. La France, État souverain, a traité avec des États souverains ; c'est manifestement la raison pour laquelle les objectifs de notre politique d'accueil des étrangers subissent, ici ou là, des adaptations, relevées par nos rapporteurs, à savoir l'insistance sur la notion de partenariat dans l'accord avec la Tunisie, mais aussi l'interprétation plus ou moins qualitative du principe de l'immigration choisie mis en avant par le président Nicolas Sarkozy. C'est à mes yeux une marque de sagesse.

Sur la question de l'immigration, le bon sens consiste à passer d'une logique de barrière à une logique de régulation. C'est, d'une certaine manière, ce que traduit l'adjonction fort opportune du mot « codéveloppement » à l'intitulé du ministère responsable des conditions d'entrée et de séjour en France. Il ne peut y avoir de codéveloppement que s'il y a concertation permanente entre la France et ses interlocuteurs.

Nos deux rapporteurs ont eu raison de revenir sur les années 70 et l'évolution, à cette époque, de la perception de l'immigration, à travers l'instauration du regroupement familial. Auparavant, la politique de l'immigration était fortement déterminée par deux objectifs : réussir la décolonisation et réussir l'aménagement du territoire. Les rapports des députés qui nous ont précédés dans cet hémicycle témoignent du lien établi entre ces deux objectifs. De même que la souveraineté de la France supposait de mettre en avant le caractère essentiellement précaire et réversible de l'immigration, une certaine vision impérative présidait à la vision des mouvements de population, française comme étrangère, consécutifs à l'aménagement du territoire.

Le regroupement familial est la marque de la fin de cette doctrine, qui ne résistait pas à l'épreuve des faits. On peut se demander, en effet, si les circonstances de la décision initiale ne sont pas, pour une bonne part, à l'origine du décalage que l'on peut observer ici entre la réalité sociale et le traitement idéologique du problème de l'immigration. Là encore, la politique illustrée par les accords que nous examinons fait partie des moyens permettant de revenir à une approche rationnelle, permanente de ce problème.

Cette approche me paraît d'autant plus nécessaire que la réalité internationale des mouvements migratoires a évolué, comme l'ont bien rappelé nos rapporteurs. Il n'y a plus seulement une immigration du Sud vers le Nord, mais également des déplacements de population significatifs qui se produisent, entre autres, à l'intérieur du continent africain.

L'ouverture et la globalisation des échanges ne vont pas sans une pression accrue des mouvements migratoires, souvent au prix d'une exploitation plus grande des personnes. La crise économique a parfois imposé le retour au pays que ne parvenait pas à réaliser la répression de l'immigration clandestine. On l'a vu, ces derniers mois, avec le retour vers leur pays d'origine de Mexicains auxquels l'économie américaine en crise n'offrait plus de perspectives de subsistance.

Un autre facteur déterminant de la politique de l'immigration a singulièrement évolué en vingt ans : je veux parler de l'approche européenne. Nos rapporteurs ont eu raison de faire référence au Conseil européen de Tampere, qui, en 1999, faisait de cette question un objectif commun de l'Europe. On sait ce que la capacité spontanée d'intégration des institutions européennes implique dans un tel cas : nous ne pouvons pas, dans notre politique, ignorer ou négliger l'impact non seulement des décisions mais aussi des discussions communes et des conceptions qui s'en dégagent.

Je ne reviendrai pas sur les détails que donnent les rapports écrits sur le développement de ces décisions et conceptions. Il me semble en revanche important de rappeler qu'une certaine doctrine européenne, prenant acte du dépérissement démographique de nombreux États membres, voit dans l'immigration une chance, voire une nécessité, pour restaurer le dynamisme collectif de l'Europe.

On ne peut négliger l'impact de cette doctrine sur la formulation des normes communes relatives à l'immigration, fussent-elles restrictives en la forme. On sait bien que, dans le passé, l'empire de la nécessité a conduit certains de nos partenaires – je pense en particulier à l'Espagne – à des choix contradictoires avec les principes d'action retenus alors par la France ; nous nous souvenons tous de l'émotion impuissante que ces décisions avaient provoquée. L'entrée dans l'Union européenne de nouveaux pays encore plus affectés par le déclin démographique a accentué la difficulté. C'est un autre ensemble de raisons qui viennent à l'appui de la logique de relation que j'ai défendue.

Cette même logique inspire mon interprétation de la notion d'immigration choisie, dont j'ai rappelé qu'elle était au coeur de la politique des pouvoirs publics. Elle a souvent été interprétée de manière polémique, comme si immigration choisie était nécessairement synonyme d'immigration sélectionnée – sous-entendu : sélectionnée par le partenaire dominant de la négociation – ou encore d'immigration diplômée. Je récuse une telle interprétation, d'abord parce qu'elle n'est pas réaliste.

Je vois, pour ma part, dans les accords bilatéraux du type de ceux que nous examinons des instruments permettant de pratiquer ce choix en commun, dans l'intérêt bien compris des deux parties en présence. La notion de « partenariat » mise en avant, à bon droit, dans l'accord avec la Tunisie, me paraît pouvoir être tout autant utilisée dans la mise en oeuvre des trois autres accords. C'est à ce prix que se justifient les mesures de répression de l'immigration clandestine que comporte inévitablement le droit de l'entrée et du séjour des étrangers en France.

C'est également pourquoi, conformément à la tradition constante de notre droit, je plaide, une fois encore, pour une application intelligente des normes et pour la prise en considération des situations personnelles et familiales.

Je ne m'attarderai pas sur l'impérieuse nécessité, unanimement admise, de lutter encore et toujours contre les passeurs, les trafiquants, les profiteurs de tous ordres de l'immigration clandestine.

Je ne voudrais pas conclure sans dire un mot du codéveloppement.

J'ai noté les observations peu encourageantes de nos rapporteurs sur les instruments économiques du codéveloppement créés par la loi de 2007. I1 faut sans doute attendre encore un peu pour savoir si cette impression pessimiste va se confirmer, en ayant en mémoire les difficultés d'une approche trop dirigiste dans un tel domaine. Il faut aussi se rappeler que le codéveloppement est aussi, et depuis longtemps, ce que pratiquent, sans le dire, de nombreuses personnes et associations qui, par-delà les fluctuations de la politique, financent et réalisent des projets, en partenariat avec des institutions et des associations des pays bénéficiaires. Je suis heureux de saisir cette occasion pour leur rendre hommage. Les dispositions des quatre accords qui mentionnent le codéveloppement sont, d'une certaine manière, un nouvel hommage officiel à cette inspiration généreuse ; elles ont leur importance dans un domaine où l'affirmation symbolique est souvent un déterminant décisif des comportements personnels.

Sous le bénéfice de ces observations, le groupe Nouveau Centre votera les projets de loi qui autorisent la ratification des quatre accords bilatéraux. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les quatre accords présentés aujourd'hui devant notre assemblée sont la traduction politique de la stratégie d'immigration choisie voulue par Nicolas Sarkozy. Ils visent, pour les quatre pays concernés, à assortir l'aide au développement et l'organisation de l'immigration légale d'une condition : ces États devront lutter contre l'immigration illégale. Ainsi, ils prévoient la réadmission des ressortissants en situation irrégulière, la coopération policière en vue de la surveillance des frontières, le démantèlement des filières de passeurs et la lutte contre la fraude documentaire. Le véritable enjeu de ces accords, pour votre gouvernement, est bien de verrouiller les frontières et de stopper les immigrations.

Les bénéfices pour les pays concernés sont, eux, minimes, comme l'a démontré ma collègue socialiste. Une aide au développement, rebaptisée « développement solidaire », leur est promise, alors même que les crédits alloués dans ce domaine sont en diminution constante – le rapporteur nous l'a montré.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Certes, la migration légale est censée être organisée, mais elle est si strictement limitée que l'objectif semble être, non pas l'immigration choisie, mais l'immigration zéro. À titre d'exemple, le dispositif de la carte « compétences et talents » présenté dans ces accords, qui ne diffère en rien de celui déjà prévu par le CESEDA, est plafonné à 150 cartes par an pour le Bénin ou le Congo. Il n'y a évidemment nulle obligation d'atteindre ou de s'approcher de ce plafond, la France peut très bien n'accorder aucune carte. Ainsi, quarante-quatre cartes ont été délivrées entre janvier et juin 2008 quand l'objectif était de 2 000 pour l'année. Autre exemple : seulement quinze métiers ouvrent le droit à une carte de séjour temporaire pour les Béninois, et neuf pour les Gabonais. Il s'agit évidemment de métiers nécessitant une haute qualification, ce qui ne peut que tarir les flux migratoires et encourager un phénomène de fuite des cerveaux dommageable pour les pays concernés. De plus, plusieurs observateurs soulignent que la France a des besoins en main-d'oeuvre peu qualifiée, main-d'oeuvre que les dispositifs « talents et compétences » ne risquent pas de faire venir.

Ces mesures, qui permettent au Gouvernement de donner l'illusion qu'il garantit les échanges migratoires avec des pays soucieux de l'accueil qui est fait à leurs ressortissants en France, n'auront en réalité qu'un impact très faible. Ainsi, je rappelle que le projet d'accord franco-malien prévoit 1 500 régularisations maximum par an, ce qui est un chiffre dérisoire rapporté au nombre de ressortissants maliens résidant en France en situation irrégulière.

Restrictifs pour les conditions d'entrée sur notre territoire, ces accords sont, en revanche, très expansifs quand il s'agit de lutter contre l'immigration irrégulière. Comme on le sait, le Gouvernement s'est fixé des objectifs d'airain en matière d'expulsion : 26 000 personnes en 2008, 27 000 en 2009. C'est le seul objectif chiffré que le Gouvernement a tenu l'année passée, en dépit des drames qu'il a occasionnés, notamment pour les enfants, faisant fi de la Déclaration internationale des droits de l'enfant. Plusieurs dossiers concernant ces drames ont été transmis au ministre de l'immigration.

Dans le cadre de cette politique, ces quatre accords introduisent une nouveauté : le Congo et le Bénin devront non seulement réadmettre leurs ressortissants expulsés de France, mais aussi des citoyens de pays tiers. C'est doublement absurde : comment le Congo et le Bénin pourront-ils gérer convenablement ces nouveaux flux ? Et comment les victimes de ce nouveau système, expulsées vers un autre pays avec, le plus souvent, quasiment pas de ressources, vont-elles pouvoir rentrer chez elles, ?

Ces accords instituent également un système de présomption de nationalité qui permettrait de faciliter considérablement les réadmissions. Énorme paradoxe : les états-civils des pays sources sont réputés défaillants dès lors qu'ils induisent le regroupement familial – chacun se souvient des débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle à l'occasion de la loi Hortefeux – ; en revanche, ils deviendraient fiables dès lors qu'ils induisent la réadmission des expulsés. Il y a deux poids, deux mesures.

Il n'y a plus de doutes sur la conception que ce gouvernement se fait des migrations et du codéveloppement. Ces quatre accords, qui durcissent les conditions d'entrées et facilitent les expulsions, entérinent et prolongent sa politique de fermeture et de violence. C'est cette même politique qui a conduit le ministre de l'immigration à signer dimanche soir, à vingt et une heures quarante-six, les contrats liant les associations au Gouvernement pour l'aide juridique apportée aux étrangers dans les centres de rétention. Le ministre veut rendre plus difficile l'intervention de la CIMADE, association jugée trop critique à l'égard des centres de rétention, et sans doute trop compétente. À l'inverse, l'une des associations nouvellement habilitée – le Collectif Respect – a été fondée par un cadre de l'UMP qui a eu pour mission de promouvoir la candidature de Nicolas Sarkozy dans les banlieues lors de l'élection présidentielle. Cette orientation n'est pas neutre, loin de là : elle participe de la même volonté gouvernementale de bétonner nos frontières et de restreindre la liberté de circulation des êtres humains.

Monsieur le secrétaire d'État, il faut envisager d'urgence de régulariser les jeunes qui, arrivés, enfants, dans notre pays, ont passé leur diplôme, mais sont aujourd'hui expulsables parce qu'ils sont majeurs. Une délégation de ces jeunes a été reçue, hier, par le ministère de l'immigration. Ils ont, apparemment, sensibilisé M. Besson, qui a décidé la création d'un groupe de travail, qui donnera ses conclusions en juillet. D'ici là, nous vous demandons expressément, monsieur le secrétaire d'État, de suspendre les expulsions des jeunes majeurs.

C'est pour toutes les raisons que j'ai exposées que les députés GDR voteront contre la ratification de ces quatre accords. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, messieurs les rapporteurs, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, je veux d'abord rendre hommage au travail qu'a réalisé M. Terrot.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Je pense surtout à la première partie de son rapport qui montre que les faits sont têtus. Ainsi, il souligne que les migrations sont un phénomène contemporain, mondial et planétaire, et qu'elles s'effectuent, pour l'essentiel, du Sud vers le Sud. Il rappelle aussi qu'elles concernent 3 % de la population mondiale, mais qu'un dixième seulement des migrants sont en situation irrégulière. Il précise qu'en 2006, 60 % des flux à destination des pays européens étaient originaires d'Europe, et que 60 % des flux en provenance d'Afrique sub-saharienne se sont tournés vers des pays non européens de l'OCDE.

Ce rappel des faits, très honnête, est utile car il conduit à relativiser très largement le phénomène migratoire et à ne pas prendre au sérieux des expressions couramment utilisées par certains de mes collègues de l'UMP et par des membres de ce gouvernement, telles que « chaos migratoire », « pression aux frontières ». Le simple rappel de la réalité et des chiffres montre que ce type d'expressions relève de l'idéologie et de l'intoxication.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Monsieur Terrot, je vous remercie donc de contribuer à la désintoxication de notre assemblée.

Je vous sais gré aussi de rendre compte du changement de vision et de l'émergence d'un consensus international sur la manière d'évoquer la question des flux migratoires. Vous rappelez, dans votre rapport, que l'idée que ces flux contribuent au développement des pays développés et des pays en développement est certes nouvelle, mais désormais partagée par tous, et que la problématique des migrations devrait s'analyser à partir d'une telle approche. Vous soulignez qu'il est possible, souhaitable et souhaité de rendre avantageux et profitables les migrations, non seulement pour les migrants, mais aussi pour leur pays d'origine et pour les sociétés qui les accueillent.

Je vous remercie, encore une fois, pour tous ces rappels, mais qu'elle ne fut pas mon étonnement en lisant les conclusions que vous et le rapporteur Jean-Claude Guibal en tirez. Nos conclusions ne sont pas du tout les mêmes, et pour cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Si on suit votre logique, monsieur Terrot, il faut constater que la démarche européenne constitue aujourd'hui un contresens historique face à l'évolution mondiale des flux migratoires. En effet, désormais, tous les pays du monde étant des pays à la fois d'immigration et d'émigration, ce qui les différencie, c'est leur capacité à faire de ce phénomène mondial contemporain une réussite partagée. Or la démarche européenne vise à un nivellement par le bas. C'est une démarche de fermeture, marquée par l'obsession sécuritaire et par l'absence de regard positif sur le phénomène migratoire. Un tel regard serait pourtant profitable à tous.

Dans votre rapport, vous évoquez le dialogue mené à un au haut niveau sur les migrations internationales et le développement. Ce dialogue porte sur trois axes de réflexion : l'importance des migrations internationales, leur contribution au développement des pays d'origine et des pays d'accueil, le caractère essentiel du respect des droits et libertés fondamentaux des migrants et l'importance de l'intensification de la coopération internationale en ce domaine. Or les quatre accords qui nous sont présentés sont en totale contradiction avec ces axes de réflexion et les objectifs affichés. En effet, ces accords sont caractérisés par le déséquilibre, le manque d'équité et l'alignement vers le bas, avec toujours la même obsession : la fermeture, la restriction, et le pillage de cerveaux.

Le déséquilibre tient à la posture adoptée dans ces accords. Vous l'avez reconnu, et même le président Poniatowski l'a constaté : il n'y a rien sur le codéveloppement et le développement solidaire ! Ce n'est visiblement pas le sujet. Aborder ces domaines devant M. Joyandet en serait presque gênant, tant le secrétariat d'État à la coopération est évacué des accords. Il n'y a rien sur les échanges, rien sur les apports et l'enrichissement mutuels. Pourtant, certains de nos partenaires de l'Union européenne mesurent l'apport de l'immigration à leur croissance économique. L'Espagne, par exemple, estime que 30 % de sa croissance des dix dernières années est due à l'apport de l'immigration. Les Britanniques, eux aussi, ont mesuré cet apport. Chez nous, il n'y a rien : on n'évalue pas l'apport des flux migratoires, on ne mesure pas la substantifique moelle que tire notre pays de ceux qui nous rejoignent et nous apportent leur énergie, leur compétence, leur envie de vivre et leur envie d'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Ces accords ne disent rien du grand nombre de nos ressortissants qui vivent dans les pays d'où sont originaires les immigrants. Cela n'est pas du tout pris en compte. Pourtant, lors de l'examen du projet de loi de ratification de l'accord avec le Gabon, notre collègue Serge Blisko avait souligné qu'il y avait plus de ressortissants français au Gabon que de ressortissants gabonais en France.

Et puis il faut déplorer la focalisation excessive sur les métiers les plus qualifiés alors que les métiers moins qualifiés sont en surnombre dans les pays d'origine et que c'est précisément de ceux-là que la France a besoin. Il faut aussi déplorer les mesures de restriction sur la circulation des compétences.

Par ailleurs, monsieur Terrot, dans votre rapport, vous décrivez les accords avec le Sénégal, le Congo et le Bénin en constatant que leurs caractéristiques migratoires sont assez proches : caractère marginal de la migration professionnelle et part importante du regroupement familial. Vous expliquez qu'il faut rééquilibrer tout cela, conformément à la politique du Gouvernement. Mais il y a deux manières de rééquilibrer : soit on baisse la part du regroupement familial, soit on augmente la part de la migration professionnelle. Mais, dans ces accords, c'est évidemment le choix de la restriction qui prévaut.

Le manque d'équité caractérise aussi le volet sur l'immigration professionnelle de ces accords. La grande disparité entre le nombre de titres consentis à chacun de ces pays est frappante, par exemple dans le cas de la carte de séjour « compétences et talents » : 1 500 pour la Tunisie ; 150 seulement pour le Bénin ou le Congo. N'y aurait-il que 150 personnes compétentes et talentueuses au Bénin, quand il y en aurait 1 500 en Tunisie ? Nous sentons bien que tout cela n'a pas de sens.

Nous pouvons faire le même constat sur la liste des métiers concernés : neuf métiers pour le Gabon, seize pour le Bénin, quinze pour le Congo, cent huit pour le Sénégal, soixante-dix-huit pour la Tunisie. Nous voyons bien qu'il n'existe aucune égalité de traitement entre nos pays partenaires, aucun critère lisible et compréhensible.

Le manque d'équité soulève des questions. Sur le champ d'application de cette liste un peu baroque de métiers, je m'adresse autant aux rapporteurs qu'à vous, monsieur le secrétaire d'État. Correspond-elle uniquement à la procédure d'introduction de main-d'oeuvre ou aussi à la procédure d'admission exceptionnelle au séjour, comme c'est le cas notamment dans l'avenant à l'accord franco-sénégalais ?

La précision est importante, en particulier en ce qui concerne les Tunisiens qui sont exclus de la procédure d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail. Si ce n'était pas compris dans l'accord que vous nous présentez, nous serions dans une situation absurde : cet accord prévoirait de faire venir des Tunisiens compétents dans les soixante-dix-huit métiers indiqués, alors que, dans le même temps, des Tunisiens présents en France depuis de nombreuses années et exerçant ces métiers seraient expulsés. Vous allez certainement lever cette ambiguïté, cette absurdité, monsieur le secrétaire d'État.

L'alignement vers le bas est probablement ce qui choque le plus…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

…parce ce que ces accords prévoient la réadmission non seulement de leurs ressortissants, mais aussi de ressortissants de pays tiers, au Bénin et au Congo. Nous sommes donc en train d'inventer, en France, la rétention off shore.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

De ce point de vue, nous nous inspirons d'autres exemples qui ont été dénoncés dans des rapports d'Amnesty International ou de la CIMADE. Toutes ces raisons expliquent la résistance de certains pays, notamment le Mali, à signer ces accords. On comprend aussi pourquoi certains pays ont signé.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Le Gabon et le Congo ont signé et la Guinée va probablement le faire. Ce n'est pas étonnant car ces trois pays sont présidés par des personnes qui ont été mises en cause…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

…par la justice. Une plainte a été jugée recevable, la semaine dernière, par la doyenne des juges d'instruction, et le paquet est très clairement intervenu pour que MM Sassou Nguesso et Omar Bongo ne soient pas inquiétés en France…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

… probablement pour les remercier d'avoir accepté de signer ces accords…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

…très peu équitables, très disproportionnés, et qui n'honorent pas notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Et si on parlait de la Côte d'Ivoire ? Dans le cas de la Côte d'Ivoire, son président a même été salarié ici, en plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Vous le défendez parce qu'il est socialiste !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, nous examinons ce matin un projet de loi relatif à différents accords passés entre la France et la Tunisie, le Sénégal, le Congo et le Bénin, qui sont censés favoriser le développement de ces pays et, par voie de conséquence, la régulation des flux migratoires vers la France.

Je voudrais d'abord faire une remarque générale sur ces accords avant de m'attarder plus particulièrement sur le cas de la Tunisie. À la page huit de son rapport, notre collègue Jean-Claude Guibal indique clairement qu'il existe désormais un consensus sur le fait de considérer que les migrations contribuent au développement des pays d'origine. Ces propos dont je me réjouis sont illustrés par des chiffres assez impressionnants donnés pour l'année 2007, à la page suivante : « les transferts des migrants vers leur pays d'origine ont représenté plus de 337 milliards de dollars », soit trois plus que le montant de l'aide publique au développement.

Je m'étonne un peu que vous mettiez en avant cette conception des choses, dans la mesure où elle me paraît assez contradictoire avec la politique actuelle du Gouvernement en matière d'immigration, qui est beaucoup plus fondée sur la restriction des flux migratoires à destination de la France.

Je voulais intervenir plus précisément sur l'accord signé avec la Tunisie lors de la dernière visite du Président de la République en Tunisie en avril 2008. À cette occasion, Nicolas Sarkozy avait déclaré qu'il n'avait pas de leçon à donner au président tunisien, M. Ben Ali, en matière de droits de l'homme. Cette phrase avait choqué de nombreux militants des droits de l'homme, français ou tunisiens.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Nous en reparlerons, monsieur Raoult.

Il existe pourtant des agissements extrêmement précis…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

D'ailleurs Bertrand Delanoë est d'accord avec moi !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je ne suis pas Bertrand Delanoë, monsieur Raoult, adressez-vous à lui si vous n'êtes pas content de ses positions. Ce n'est d'ailleurs pas le lieu, car il n'est pas député.

Pour en revenir aux agissements du régime tunisien, je considère que la France devrait les condamner fermement, contrairement à ce qu'a fait le Président de la République au travers d'une formule excessive – comme souvent – et d'autant plus choquante que la situation des droits de l'homme en Tunisie n'est pas nouvelle.

Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais surtout attirer votre attention sur des événements qui ont eu lieu récemment dans la région de Gafsa au sud-ouest de la Tunisie, et plus particulièrement dans la ville de Redeyef.

En janvier 2008, des manifestations pacifiques – syndicales – ont débuté dans le bassin minier de Gafsa. Les manifestants réclamaient des mesures pour l'emploi et l'amélioration des conditions de vie et de travail notamment dans les mines de cette région où le chômage est très supérieur à la moyenne nationale. Le 6 juin 2008, la répression policière et militaire s'est abattue sur cette région, causant un mort et plusieurs dizaines de blessés. Des pillages ont ensuite été déplorés dans cette ville véritablement en état de siège du fait de la présence militaire et policière.

Ces événements ont donné lieu à des procès que l'on peut qualifier d'iniques, puisque de nombreux militants syndicaux – les principaux leaders de cette contestation – ont été condamnés à plusieurs années de prison en février 2009. En novembre 2008, une délégation internationale conduite par le Comité pour le respect des libertés et des droits de l'homme en Tunisie, et impliquant des responsables politiques français y compris des membres de notre assemblée, s'est rendue dans la région de Gafsa. Elle a pu constater à quel point la situation était préoccupante.

Plus de 2000 Tunisiens de Redeyef habitent à Nantes et dans l'agglomération nantaise. Lorsque je les ai rencontrés, à plusieurs reprises, ils m'ont expliqué qu'ils avaient fui leur pays après cette répression, uniquement pour cette raison, et qu'ils n'avaient d'autre souhait que de rentrer en Tunisie pour y vivre paisiblement – nous sommes donc bien dans le sujet de cet accord – mais que la situation politique instaurée par le régime du président Ben Ali les en empêche.

C'est pourquoi il ne me paraît pas possible de passer des accords tels que ceux que vous nous proposez de ratifier ce matin avec des pays comme la Tunisie, en fermant les yeux sur le non-respect des droits de l'homme, comme l'a fait Nicolas Sarkozy lors de sa visite d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Monsieur le secrétaire d'État, j'aimerais que le gouvernement français exprime clairement sa position sur cette situation en Tunisie, notamment dans la région de Gafsa. À mon sens, votre politique dite de co-développement n'est pas crédible au regard de la situation des droits de l'homme, puisqu'elle ne la prend pas en compte. Pour cette raison et parce que nous n'approuvons pas votre politique migratoire, mes collègues Vert et moi-même voterons contre ces accords.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, messieurs les rapporteurs, je ne monte pas à cette tribune pour parler de la démocratie avec Simone et son époux en Côte d'Ivoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

C'est scandaleux parce qu'il est socialiste ? Vous ne parlez pas de la démocratie ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Vous n'avez pas le droit d'attaquer un chef d'État élu démocratiquement !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Je n'attaque pas un chef d'État ! J'ai simplement dit que vous avez accepté M. Laurent Gbagbo ici pendant des années. Il avait même un bureau, sous la présidence de M. Emmanuelli. C'est vrai ou pas ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Ce matin, nous sommes appelés à débattre concrètement non pas de la situation dans certains pays africains, mais de la nouvelle politique française la nouvelle politique française en matière de maîtrise de l'immigration.

Il s'agit d'examiner quatre accords, relatifs à la gestion concertée des flux migratoires et au co-développement solidaire, signés entre la France, le Bénin, la Tunisie – qui est un pays démocratique, cher collègue François de Rugy –, le Sénégal et le Congo.

Le monde change de plus en plus vite ; la mondialisation exige une circulation croissante d'hommes et de femmes ; notre pays affronte la crise, comme le reste du monde. Dans ce contexte, nous ne pouvons plus penser les questions migratoires avec les mêmes concepts qu'autrefois.

La question des migrations s'est autrefois gérée uniquement aux frontières de notre pays, puis à celles de l'Europe. Maintenant, vous nous proposez d'aller plus loin, en travaillant plus en amont, en partenariat avec les autorités gouvernementales des pays d'origine.

Cette nouvelle politique pour une immigration choisie et concertée a été souhaitée et initiée par le Président de la République. Exposée dès la campagne présidentielle, elle est fondée sur une approche globale des questions migratoires qui souhaite lier à la fois les politiques de développement, la gestion des migrations légales, et la lutte contre l'immigration irrégulière.

C'est du bon sens, monsieur le secrétaire d'État. Lorsque vous ne gérez pas ces dossiers, nous devons le faire dans nos quartiers urbains, dans nos quartiers populaires, dans nos banlieues. Mes deux collègues socialistes ont oublié de le dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Attendez, je vais parler de vous dans quelques instants !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Cette nouvelle politique de la gestion des flux migratoires va dans le bon sens, car en matière la lutte contre l'immigration clandestine, elle rappelle des principes fondamentaux et quelques vérités qui, lorsqu'elles ne sont pas suffisamment évoquées, font le bonheur des passeurs, des fraudeurs et des marchands de sommeil.

J'évoquerai un point sur lequel nous serons peut-être d'accord : les situations dramatiquement inhumaines que nous gérons à Clichy-sous-Bois, à Paris dans le XIIe ou dans le XXe arrondissement. Monsieur le secrétaire d'État, vous gérez ce dossier, vous ne l'instrumentalisez pas. Il vaut mieux proposer des textes que de jouer avec l'émotion des parents, quand des enfants ont des parents sans papiers.

Chers collègues socialistes, je vais vous dire ce que j'ai sur le coeur : vous oubliez parfois les prolos qui votent pour vous, au profit des bobos à qui vous voulez faire plaisir.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Plusieurs principes fondamentaux sont donc rappelés par cette nouvelle politique de gestion des flux migratoires. D'abord, un principe de souveraineté : comme tout pays, la France a le droit de choisir qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire. Ensuite, un principe de justice : les étrangers en règle ont droit à l'égalité des chances et à un parcours d'intégration pouvant aller jusqu'à la citoyenneté française – il faut insister sur ce point. Enfin, un principe d'égalité : dans un État de droit comme la France, avoir des papiers ou ne pas en avoir, ce n'est pas et ce ne peut être la même chose.

À ceux qui dénoncent que ces accords souhaitent restreindre la venue de travailleurs étrangers, je souhaite rappeler que derrière la signature de ces textes, la France s'engage à accorder plus de visas de circulation, ce qui correspond à une demande très forte des pays partenaires.

La France s'engage aussi à mieux accueillir les étudiants et à développer l'accueil de travailleurs migrants.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Pendant des années, on a fait croire aux candidats à l'immigration que l'illégalité était le préalable à la respectabilité. Désormais, monsieur le secrétaire d'État, vous inversez la tendance.

Ces accords signés avec les pays d'origine sont donc l'engagement de l'État à mieux favoriser la mobilité, mais aussi à mieux organiser et respecter l'immigration légale, en favorisant l'intégration des immigrés légaux. À mon sens, c'est une avancée considérable.

Ce sont aussi des accords de bon sens : dans une forme de contrepartie, les États signataires sont dans une relation gagnantgagnant. Ces accords ont fait l'objet de plusieurs rencontres, de plusieurs discussions dont la conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement de Rabat qui, en juillet 2006, avait déjà posé les fondements de cette approche globale et concertée.

Elle avait abouti à la définition d'un partenariat assorti d'un plan d'action.

Ce plan lance les bases du développement solidaire. Les accords favorisent les différentes actions bilatérales et multilatérales, mais ils profitent aussi, compte tenu des diasporas, aux pays d'origine. Beaucoup de ces diasporas sont présentes dans le département de la Seine-Saint-Denis. Très diverses selon les pays, elles insistent essentiellement sur la formation et la réinsertion professionnelle dans le pays d'origine, dans des domaines aussi variés que l'agriculture et la pêche – pour le Sénégal – le système bancaire – pour le Sénégal et la Tunisie –, la santé ou le tourisme, pour la Tunisie.

Enfin, ces accords prévoient la mise en place d'un comité de suivi chargé d'évaluer les résultats des différentes actions. Monsieur le secrétaire d'État, vous sollicitez l'autorisation de l'Assemblée nationale pour ratifier quatre de ces conventions bilatérales, dont celle avec le Sénégal, signée en 2006 par Nicolas Sarkozy, alors ministre d'État, ministre de l'intérieur. Parce que ces textes proposent un plan de bon sens, les élus de l'UMP seront à vos côtés pour relever le défi de la gestion des flux migratoires, qui est au coeur de vos propositions. En effet c'est aussi un espoir pour le développement solidaire des pays d'origine et pour la France. Avec Brice Hortefeux, qui a montré le chemin, et Éric Besson, qui est issu des rangs socialistes, (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC)…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

…vous gérez un dossier humain et sensible avec pragmatisme et réalisme.

Les parlementaires de l'UMP, notamment celles et ceux qui, élus en banlieue, n'ont qu'un seul langage – n'est-ce pas, chers collègues socialistes ? –, voteront ces textes et vous aideront, monsieur le secrétaire d'État, à les mettre en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le 17 février dernier, les députés SRC de la commission des affaires étrangères avaient, par la voix de François Loncle, souhaité un examen en séance publique de quatre accords relatifs à la gestion des flux migratoires et au co-développement. Ces accords, inscrits à notre ordre du jour ce matin, concernent, par ordre alphabétique, le Bénin, le Congo Brazzaville, le Sénégal et la Tunisie. Ils posent tous les quatre une question de portée générale qui dépasse le cas particulier de ces pays.

La mondialisation a multiplié les contacts et les échanges ; les marchandises, les services, mais aussi les hommes en sont de plus en plus affectés. Si ces mouvements croisés favorisent souvent le développement, ils sont aussi à l'origine de déséquilibres. Nous sommes les uns et les autres interpellés, comme responsables politiques et comme citoyens.

L'identification des questions posées par la mondialisation des mouvements humains ne pose pas de problème particulier ; la réalité en impose le constat. Les pays en développement exportent les éléments souvent les plus dynamiques de leur population en mal de travail ou de survie. Le phénomène est ancien et universel. Hier, et jusque dans les années cinquante, des millions d'Européens ont déferlé sur l'Amérique du Nord et l'Amérique du Sud, poussés par la faim, le chômage et la misère. Aujourd'hui, des centaines de milliers de Centraméricains et de Mexicains ont émigré aux États-Unis, et des centaines de milliers d'Africains tentent leur chance en essayant de se faire une place en Europe.

Les réponses apportées, en revanche, diffèrent.

Certains privilégient la contention, la construction de murs virtuels, maritimes, ou de barbelés, les solutions militaires et policières. Cette voie-là est celle que préfèernt les forces les plus conservatrices, de droite et d'extrême droite. Elle fait du migrant un délinquant. Depuis 1986, et à chaque alternance, les gouvernements conservateurs ont multiplié les lois Maginot, les machines juridiques à refouler les hommes du sud, à l'exception notable de ceux qui, occupant des fonctions d'autorité, agissent en prédateurs pour leurs peuples et ont toute latitude pour investir chez nous le fruit de biens plus ou moins bien acquis.

Les socialistes, avec d'autres, mettent l'accent sur la nécessité de prendre le problème dans sa globalité, de traiter non seulement le ressac négatif des migrations, mais aussi d'en tarir la source. Cela ne peut se faire que dans un dialogue qui place sur un pied d'égalité les pays du nord et les pays du sud, les pays récepteurs et les pays émetteurs de flux humains. Or les accords qui nous sont proposés aujourd'hui sont inégaux et déséquilibrés. Ils s'inscrivent dans une logique policière de contention, ne sont pas à la hauteur de l'enjeu et répondent sans doute à des engagements électoralistes. Je note qu'ils viennent en discussion alors que le ministre de l'identité nationale écarte des centres de rétention administrative la Cimade, organisation qui, depuis la Deuxième guerre mondiale, mène une action exemplaire et reconnue auprès de populations déplacées.

Avec ces accords et cette dernière décision, le Gouvernement et sa majorité répondent aux voeux de la fraction la plus droitière de leur électorat. Les députés socialistes ne sauraient donc approuver les conventions soumises à l'appréciation de l'Assemblée nationale ce matin ; c'est pourquoi ils voteront contre.

L'esprit des lois est toujours un fil conducteur éclairant. Quel est celui des textes d'aujourd'hui ?

Répondent-ils au souci du développement et du co-développement, lequel est en effet mentionné dans le titre, mais de manière floue, après l'expression de « gestion de flux migratoires » ? Certes pas : le lien de causalité ainsi établi est révélateur d'une pensée et d'une volonté de conditionner la coopération française avec les pays en développement au fait qu'ils acceptent refoulements et expulsions. L'aide est ainsi conçue comme un moyen complémentaire de la police de l'air et des frontières. Il y a longtemps que la majorité en est convaincue.

De vieux souvenirs gaulliens avaient, jusqu'en 2007, empêché l'irrémédiable ; cette source historique est restée active jusqu'à la fin du dernier quinquennat. En 2007 – hélas ! – Nicolas Sarkozy a rompu avec l'héritage de la décolonisation, laquelle, entamée sous la IVe République, s'est poursuivie sous la Ve. Dans la lignée de la proposition de loi visant à réhabiliter la colonisation et la sujétion des Africains à des migrants européens et français, proposition défendue par le groupe UMP, Nicolas Sarkozy a imposé une rupture philosophique. La préférence nationale a pris le dessus sur toute autre considération.

Le chef de l'État a voulu un ministère insolite, dit de l'identité nationale, qui fut perçu à l'étranger comme un signal d'agressivité à l'égard des plus faibles, alors qu'étaient réservées aux plus forts les normes idéologiques d'un occident incarné par l'OTAN. Ce ministère de l'identité nationale est venu coiffer l'aide aux pays d'Afrique, le ministère de la coopération étant rayé d'un trait de plume et, avec lui, une politique et une conception du rapport à l'Afrique.

Cette disgrâce a été publiquement validée et revendiquée le 26 juillet 2007 à Dakar par Nicolas Sarkozy, qui déclarait devant des étudiants sénégalais : « Le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire. […] Dans [son] imaginaire où tout recommence toujours, il n'y a de place ni pour l'aventure humaine, ni pour l'idée de progrès. […] Jamais il ne s'élance vers l'avenir. »

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Quelle honte ! (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

« Le problème de l'Afrique », poursuivait Nicolas Sarkozy, « c'est qu'elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l'enfance. » Cette accumulation de perles, dont je pourrais continuer l'énumération, serait amusante…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Et le discours du Cap ? Pourquoi ne le citez-vous pas ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Ces propos sont hors sujet ! M. Bataille est commis d'office !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

…si elle ne provenait de celui qui a la responsabilité exécutive de la France, même si l'on invoque aujourd'hui l'inexpérience d'alors.

En fait que pouvait-on espérer d'un Président qui, cultivant la nostalgie du paradis perdu de l'enfance jusqu'à aller à Eurodisney (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), veut ignorer la pesanteur de l'histoire et de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

C'est nul ! Ce n'est pas vous qui avez écrit votre texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Le fil conducteur des accords soumis aux suffrages de la représentation nationale ce matin s'exprime à travers ce prisme. Mépris de l'Afrique, préférence nationale, effacement de la coopération, mise en place d'un ministère de l'identité nationale chargé de faire du chiffre et d'expulser au minimum 27 000 personnes par an, ont constitué le cadre de la négociation. Le Gabon, qui n'exporte pas de main d'oeuvre hors de ses frontières, s'est prêté au jeu. Il est vrai – on a pu encore le constater ces derniers jours – qu'existent des connivences au sommet de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Et la Côte-d'Ivoire ? Pourquoi n'en parlez-vous pas ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Dès le mois de mai 2007, le président Bongo avait été reçu à l'Élysée et, en juillet de la même année, le Président de la République française avait rendu la politesse à son homologue gabonais. De Libreville, le Président français avait reconnu, dans un entretien accordé au quotidien L'Union le 27 juillet 2007, que le Gabon permettait de montrer la voie en matière de « gestion des flux migratoires », alors qu'il n'était pas concerné. Interrogé sur le caractère insolite de la signature, le 5 juillet 2007, d'un accord de régulation des flux migratoires entre la France et le Gabon, le Président français a exprimé sa pensée de la façon suivante : « Dans le cas du Gabon il ne s'agit pas vraiment de maîtriser des flux migratoires. Le Gabon est plus un pays d'immigration que d'émigration. » CQFD !

Mes collègues socialistes ont précédemment détaillé les aspects pervers d'accords imposés par la France à ses partenaires africains ; je n'y reviens pas. La logique du pot de fer et du pot de terre, qui, sous couvert d'un zeste de subventions de la France, gardera pour la postérité la marque des accords Hortefeux, prétend contraindre un certain nombre de pays à une coopération policière contre ses propres ressortissants et ceux de pays voisins.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Et si l'on parlait de Jean-Christophe Mitterrand, alias « Papamadi » ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Le groupe socialiste, je le répète, votera contre l'adoption de ces traités inégaux ; il souhaite en outre tirer la sonnette d'alarme et inviter à la réflexion, tant qu'il en est encore temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Le Mali refuse avec raison de signer les termes de l'accord que la France veut lui imposer ; d'autres pays feront de même.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Je vous ai entendu, monsieur le président.

Des puissances émergentes ont déjà contesté les éléments d'un débat que la France, longtemps soucieuse de concertation et de dialogue, est en train d'oublier. La presse, d'ailleurs, reste silencieuse sur la lettre ouverte adressée l'an dernier par les gouvernements d'Amérique latine, lettre dont je vous épargne, monsieur le président, les extraits que je voulais citer.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Cette lettre nous sort de la vision médiocre et rétrograde d'une fraction ultraconservatrice de la majorité ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

…elle nous remet dans une perspective de longue durée, celle de l'histoire des peuples et de leur circulation, perspective qui aurait dû être le fondement de notre politique.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre les propositions qui nous sont soumises ce matin. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

J'ai quatre questions à vous poser, monsieur le secrétaire d'État.

En premier lieu, c'est vous, ou le ministre des affaires étrangères, qui nous présentez ces accords signés par M. Hortefeux lorsqu'il était ministre de l'immigration. Pourquoi ce ministre n'est-il pas présent sur les bancs du Gouvernement ce matin ?

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Deuxième question : pourquoi ne nous soumettez-vous qu'une partie des accords signés ? Nous n'allons pas renouveler tous les trois ou six mois le débat que nous avons ce matin, au gré des signatures ! Il serait intéressant de savoir pourquoi deux accords, notamment, ne sont pas soumis à notre approbation.

Troisième question : pourquoi certains pays n'ont-ils pas signé d'accord ? Je pense en particulier à ceux avec lesquels nous entretenons des liens étroits et dont les travailleurs immigrés constituent des communautés importantes dans notre pays : le Maroc, l'Algérie, le Burkina-Faso, le Cameroun, Haïti, l'Égypte et le Mali, pays sur lequel je m'arrêterai un instant.

Ma quatrième question porte sur le Mali. Les négociations engagées avec ce pays par M. Hortefeux, lesquelles n'ont pas abouti, prévoyaient que nous nous engagions à accueillir 1 500 Maliens supplémentaires. Mais pourquoi ne pas commencer par régulariser les Maliens qui vivent sur notre territoire en situation irrégulière ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

À Bamako comme en France, les représentants des associations maliennes ont indiqué au Gouvernement et aux parlementaires que, en signant ces accords, ils auraient l'impression de vendre leurs parents en France. En effet, les flux financiers entre les pays d'où viennent les populations immigrées et le nôtre permettent à des milliers de familles africaines de vivre.

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Ces transferts représentent le double de l'aide au développement !

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Oui, l'aide au développement est bien moins importante, et ces flux financiers fixent au Mali les familles, qui, grâce à eux, n'ont pas besoin de venir en France.

Telles sont, monsieur le secrétaire d'État, les quatre questions que je souhaitais vous poser. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Mesdames et messieurs les députés, j'ai écouté attentivement tous les orateurs, dont je salue les interventions mesurées.

Le Gouvernement recherche en permanence, dans la gestion très difficile de ces dossiers, des critères qui permettent de se déterminer avec modération et humanité. Dans ce contexte, je remercie M. Guibal d'avoir souligné que les accords avec la Tunisie intègrent clairement le double souci des intérêts de la France et du développement de la Tunisie.

M. Terrot s'est demandé pourquoi le secrétariat d'État à la coopération n'était pas intervenu dans ses accords. Ceux qui craignent que la réflexion sur le développement soit trop fortement soumise aux critères d'immigration y verront la preuve que nous avons trouvé un équilibre. Le fait que les accords soient conclus sans l'intervention du secrétaire d'État à la coopération atteste de leur indépendance.

M. le président de la commission m'a posé plusieurs questions précises.

En ce qui concerne l'évolution des flux migratoires familiaux et professionnels, la politique que nous avons engagée est nouvelle. Pour l'instant, les flux ne se sont pas inversés – sur ce point, son analyse est donc tout à fait juste –, mais certaines progressions sont à l'oeuvre, de manière mesurée, il est vrai, puisque nous n'avons pas fait le choix de la brutalité.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Il faudra donc attendre un certain temps avant que nous observions une augmentation notable des flux professionnels et une modération des flux familiaux.

Je veux rassurer le président de la commission sur un autre point.

Il est vrai que la crise est survenue après la signature des accords, mais ceux-ci prévoient que leur contenu peut être renégocié en fonction des besoins, notamment professionnels. La crise nous imposera sans doute d'affiner nos chiffres pour certaines filières, mais les accords bilatéraux offrent la possibilité d'ouvrir des discussions nouvelles et d'intégrer de nouveaux avenants.

Enfin, le président de la commission a évoqué l'installation de certains services du consulat d'Alger dans de nouveaux locaux.

Le bâtiment pressenti se prêterait parfaitement à l'installation d'une administration mixte, en partie externalisée. Reste quelques problèmes à régler : identification, logistique, statut juridique du bâtiment. Néanmoins quand ces questions d'intendance auront été résolues, tout blocage ayant disparu, j'espère vivement que le dossier progressera rapidement.

Je précise à M. Alain Cousin que les accords avec le Gabon sont entrés en vigueur le 1er septembre 2008. Là encore, il faudra attendre un peu avant d'en constater les effets, puisque nous avons fait le choix d'une politique progressive. En outre, au moment de leur signature, nos engagements financiers en matière de co-développement n'étaient pas encore chiffrés. Il ne m'est donc pas possible de lui fournir dans ce domaine des données très précises.

Mme Pau-Langevin a prononcé à plusieurs reprises le mot « partenariat ». C'est le thème central des politiques que nous conduisons, non seulement en matière d'immigration, mais aussi dans le cadre plus large des nouvelles relations que le Président de la République souhaite construire avec l'Afrique. Qu'il s'agisse de l'immigration, du développement économique ou de la renégociation de nos accords militaires, le Président entend en effet mettre en oeuvre des partenariats stratégiques marqués par la recherche d'une relation d'égal à égal et d'une appropriation des problèmes africains par les Africains. Je vous remercie, madame la députée, d'avoir ainsi analysé la manière dont nous travaillons.

Par ailleurs, pour mesurer notre contribution aux objectifs du millénaire, je vous demande de ne pas considérer uniquement notre politique en matière d'immigration et les crédits que ce ministère consacre au co-développement, mais de porter un regard plus général sur l'ensemble des chiffres. M. Terrot l'a souligné : l'action du secrétariat d'État à la coopération représente la part la plus importante de notre politique dans ce domaine.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

M. Lecoq s'est inquiété de la fuite des cerveaux, mais on ne peut vouloir tout et contraire. Ainsi on ne peut pas craindre que la France ne vide l'Afrique de ses cerveaux et regretter en même temps que l'immigration des talents soit plafonnée par pays et par an, puisque la limitation des cartes compétence et talent est le seul moyen d'éviter la fuite des cerveaux.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Nous essayons de prendre en compte ce problème, mais je le répète : pour limiter la fuite des cerveaux, il n'y a pas d'autre solution que de réduire le nombre de cartes disponibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Laissez les médecins chez eux, ils en ont besoin !

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Que M. de Rugy, qui m'a interrogé sur la Tunisie, sache que le ministère des affaires étrangères suit avec la plus grande attention l'évolution de la situation dans le bassin de Gafsa, qui a fait l'objet de nombreux échanges avec les autorités tunisiennes. À plusieurs reprises, la France leur a rappelé l'importance d'adopter une approche modérée et respectueuse des droits de l'homme. Au niveau national comme à l'échelon européen, notre pays est intervenu au sujet de certaines situations individuelles, notamment dans le cadre du sous-comité Droits de l'homme et démocratie, dans lequel nous sommes représentés.

Plus largement, nous agissons chaque fois que des problèmes concernant les droits de l'homme se posent dans un pays avec lequel nous sommes liés par des accords de coopération. Nous obtenons ainsi des résultats : en Côte-d'Ivoire, où je me suis rendu dernièrement, la France a obtenu la libération de Jean-Paul Ney, qui était emprisonné depuis des mois.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Vous le voyez : nous défendons continuellement les droits de l'homme, comme l'a souligné M. Raoult. Loin de renoncer à aucune de ses exigences, la France a fait savoir au président Gbagbo qu'elle ne reprendrait sa politique de coopération que lorsque des élections démocratiques et transparentes auraient été organisées dans son pays. Ainsi, nous ne cédons pas.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Cela étant, nous devons veiller aux intérêts de la France dans le monde, conserver notre politique d'influence et protéger dans tous les pays les ressortissants français.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Ainsi, notre politique étrangère doit maintenir un équilibre entre ses exigences démocratiques et les intérêts du pays et des citoyens que nous devons défendre.

Je remercie Mme Mazetier de son intervention. La première partie en était particulièrement équilibrée et objective. Quant à la suite, elle manifestait une position personnelle que je respecte. Dans les accords conclus, les différents pays ne peuvent être traités de façon uniforme puisque chaque cas est examiné de manière spécifique et que les solutions sont trouvées au cas par cas. Comment pourrait-on soumettre à la représentation nationale des accords totalement uniformisés ? Chaque pays a ses contraintes, dont tiennent compte les accords de partenariat signés de manière bilatérale, et le bon sens recommande de signer des accords différents correspondant à chaque situation.

M. Raoult a lui aussi parlé de bon sens. Je lui donne acte que rien ne serait pire que de ne rien faire.

Puisque M. Bataille a souhaité connaître certains chiffres, je précise que la France consacre chaque année 3,166 milliards d'euros à l'aide publique au développement. Bercy verse 1,342 milliard au titre l'aide économique, le secrétariat d'État chargé de la coopération plus de 2 milliards, et le ministère de l'immigration 26,5 millions dans le cadre des accords de co-développement ou de développement solidaire.

Vous le voyez, notre pays recherche en permanence un juste équilibre entre développement et immigration. Il faut faire ce que nous avons à faire en ce qui concerne les flux migratoires, mais surtout, plusieurs d'entre vous l'ont souligné, la véritable solution est dans la politique de développement : il convient d'atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement ; c'est tout ce que nous faisons dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'emploi, du développement économique.

Je le répète de façon solennelle : le Président de la République nous a donné une feuille de route très claire ; il nous a demandé de tout faire pour aider l'Afrique à se développer économiquement, à créer de la valeur ajoutée et des emplois. C'est ce que nous faisons en permanence. À cet égard des moyens importants ont été mis en place, notamment grâce à l'agence française pour le développement qui va consacrer un milliard d'euros supplémentaire au développement économique. Deux fonds de 250 millions ont été mis en place pour aider les jeunes Africains à créer des entreprises. En effet, nous en sommes convaincus, la solution de fond est le développement économique sur place.

En attendant, il faut nous occuper des questions de migration de la manière la plus juste possible. C'est ce à quoi nous tendons au quotidien. Créer un monde meilleur, madame Mazetier, restaurer l'équilibre entre le Nord et le Sud, cela a été le souci constant du Président de la République lorsqu'il a demandé que soit réuni un sommet du G20 et que les pays en voie de développement y soient mieux représentés. Les résultats des réunions de ce G20 à Washington puis à Londres nous laissent espérer que, grâce à l'insistance de la France et de l'Europe, il nous sera possible de construire ce monde meilleur en réformant les institutions de Bretton Woods. C'est la solution de fond à laquelle nous travaillons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Vous n'avez pas répondu à M. Pinte ! C'est scandaleux !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous allons passer au vote sur l'article unique de chacun des quatre projets de loi autorisant la ratification d'accords relatifs aux flux migratoires, respectivement avec la Tunisie, le Sénégal, le Congo et le Bénin.

(Les articles uniques de chaque projet de loi, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Discussion générale commune

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures cinquante, est reprise à onze heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Bernard Accoyer.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de résolution tendant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale (1630).

Discussion des articles

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 22 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Cet article ne fait l'objet d'aucun amendement.

(L'article 22 bis est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Marc Laffineur pour défendre l'amendement n° 373 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Cet amendement tend à préciser que c'est le Président de l'Assemblée qui convoque la conférence des présidents, ce qui est de droit à la demande d'un président de groupe et non plus de deux.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour donner l'avis de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Paul Lecoq pour soutenir l'amendement n° 141 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Il est défendu.

(L'amendement n° 141 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)

(L'article 23, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Aucun amendement n'a été déposé sur cet article.

(L'article 24 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Cet article fait l'objet de plusieurs amendements.

L'amendement n° 349 de la commission est de précision.

(L'amendement n° 349 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Paul Lecoq pour défendre l'amendement n° 204 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Lors du débat de cette nuit, j'ai eu l'impression que nous entrions dans une zone anticyclonique. Cela nous permet de débattre dans une sérénité qui sera peut-être propice à l'adoption de l'amendement n° 204 .

Ce dernier propose en effet que le règlement mentionne clairement les questions crible, utiles sur le fonds comme par leur forme ; que, dans la logique de partage de l'ordre du jour entre le Gouvernement et l'Assemblée, chaque groupe politique puisse décider, selon une rotation régulière, quel ministre sera invité à la séance de questions crible ; que tout député puisse participer librement à cette séance de questions crible dans la limite du temps de parole imparti à son groupe.

Cet amendement renforce de façon bien modeste le rôle des groupes dans la fixation conjointe de l'ordre du jour et reconnaît le droit imprescriptible d'un député, représentant du peuple, de prendre part à toute discussion dans l'enceinte de l'Assemblée, y compris lors de ces séances.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Lecoq, vous pourriez peut-être défendre également les amendements nos 205 et 206 dont l'objet est proche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Si vous voulez, monsieur le président.

L'amendement n° 205 , de repli, laisse à la conférence des présidents le soin de fixer la ou les séances consacrées aux questions des députés et aux réponses du ministre et également de fixer le mode de rotation du choix des ministres par les groupes politiques, tout en instituant le principe de cette dernière. Cette règle peu contraignante garantirait bien les droits de l'opposition et des groupes minoritaires, y compris les groupes minoritaires de la majorité.

L'amendement n° 206 vise à satisfaire l'exigence de pluralisme qui fonde notre démocratie.

En effet, rien n'est précisé dans le règlement sur la manière dont sont choisis les ministres invités pour la séance des questions cribles. Or il paraît légitime que le choix des ministres invités revienne aux groupes, selon une rotation fondée sur leur importance numérique. En effet à quoi reviendrait une mesure de contrôle de l'action du Gouvernement, si le choix du ministre sur lequel s'exerce ce prétendu contrôle n'appartenait pas aux députés eux-mêmes, à tous les députés selon une juste rotation ?

La proposition de résolution modifiant le règlement reste floue quant à la question de l'organisation de la tenue de ces séances de questions. À notre sens, elle laisse ainsi un trop grand pouvoir à la conférence des présidents. C'est pourquoi nous proposons de fixer ensemble des règles qui assureront une représentativité proportionnelle et garantiront d'un vrai pluralisme, au-delà d'une simple alternance bipartiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

La commission est défavorable aux trois amendements.

Constitutionnellement, le choix du ministre qui représente le Gouvernement dans l'hémicycle ne peut pas relever des députés, d'un groupe ou d'un président de groupe. Le Gouvernement est un : il lui revient de décider comment il se fait représenter.

(Les amendements nos 204 , 205 et 206 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Paul Lecoq pour présenter l'amendement n° 207 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Partant du constat selon lequel le texte de la proposition de résolution ne comporte aucune disposition précise concernant la semaine de contrôle parlementaire, nous nous proposons de combler cette lacune avec l'amendement n° 207 .

En effet, il vise à préciser les compétences de la conférence des présidents en matière de fixation de l'ordre du jour, notamment pour les séances consacrées au contrôle parlementaire. Il prévoit aussi de prévoir que, dans le cadre de la semaine de contrôle parlementaire, chaque débat sera introduit par une discussion générale permettant à chaque groupe de s'exprimer pendant dix minutes.

Outre la fixation formelle des séances consacrées au contrôle parlementaire, il nous semble pour le moins cohérent de faire débuter chaque séance de contrôle par l'expression des groupes politiques dans une perspective critique de l'action gouvernementale.

(L'amendement n° 207 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas pour défendre l'amendement n° 227 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Cet amendement, comme ceux qui le suivent, concerne la semaine mensuelle de contrôle, dont on peut légitimement penser qu'elle va devenir un moment intéressant de l'activité du Parlement.

En effet, même si, depuis 1958, la vocation du Parlement à assumer une fonction de contrôle a toujours été proclamée, jusqu'à maintenant, cela ne s'est guère traduit dans la réalité.

Depuis le début de cette discussion mon groupe revendique l'application du principe de parité, que ce soit pour les temps de parole, ce qui semble acquis, ou pour les sujets abordés et le calendrier de nos discussions. À l'heure qu'il est, l'organisation des séances pour les prochaines semaines de contrôle a déjà été arrêtée par la conférence des présidents : elle a travaillé en se fondant sur un certain nombre de conventions.

Pour notre part, nous avions, par exemple, déposé des amendements en commission visant à exclure par principe que les questions orales sans débat doivent se tenir lors de la semaine de contrôle. Elles sont certes utiles pour le travail des députés dans leurs circonscriptions, mais considérer qu'elles participent du contrôle de l'action du Gouvernement relève tout de même d'une interprétation extensive.

L'amendement n° 227 vise à libérer une séance dans la semaine de contrôle pour la mettre à la disposition d'un président de groupe de l'opposition.

Je veux bien supprimer dans l'amendement toute référence à la majorité pour anticiper la remarque du président Warsmann qui me dira que le règlement de l'Assemblée nationale ne comporte pas de notion de « majorité ». Elle aurait pu y être introduite hier soir, mais la majorité, précisément, a refusé l'amendement en question ; je pense qu'elle reviendra sur cette décision un jour ou l'autre.

On pourrait peut-être ajouter aux présidents des groupes de l'opposition, ceux des groupes minoritaires. En tout cas il est essentiel qu'ils puissent librement disposer d'un moment au cours de la semaine de contrôle pour inscrire à l'ordre du jour des sujets qui leur paraissent importants et que la majorité n'aurait pas jugés digne d'intérêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

La commission est défavorable à cet amendement.

Au-delà des raisons techniques qui motivent cet avis, je viens de déposer un amendement n° 386 qui va dans le sens souhaité par M. Urvoas.

Monsieur le président, hier soir, après la séance, vous avez souhaité réunir les présidents de groupe. Les présidents des groupes SRC, GDR et Nouveau Centre ont été unanimes pour demander à leur profit un pouvoir d'initiative en matière de contrôle. Le président du groupe UMP, Jean-François Copé a fait savoir qu'il n'avait aucune objection à ce que l'initiative en matière de contrôle soit partagée entre les différents groupes.

En conséquence, peut-être M. Urvoas, pourrait-il retirer son amendement au profit de l'amendement n° 386 qui prévoit : « Chaque président de groupe d'opposition ou de groupe minoritaire obtient de droit l'inscription d'un sujet d'évaluation ou de contrôle à l'ordre du jour de la semaine prévue à l'article 48, alinéa 4, de la Constitution. » Pour être très clair, je précise que cette disposition jouerait pour chacune des semaines de contrôle.

Il s'agit là d'un geste extrêmement fort. Nous avons toujours défendu l'idée que, en matière de contrôle, les groupes minoritaires et les groupes d'opposition devaient avoir un rôle important. Avec cet amendement qui répond aux attentes de l'ensemble des groupes, il me semble que nous atteignons un point d'équilibre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Après cette avancée substantielle, monsieur Urvoas acceptez-vous de retirer cet amendement n° 227 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Oui, monsieur le président.

(L'amendement n° 227 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Nous avons levé la séance hier soir, vers minuit moins le quart, après des déclarations successives de MM. Copé et Ayrault, respectivement présidents des groupes UMP et SRC. Les groupes devaient alors se réunir avant que ne se tienne, sous votre autorité, monsieur le président de l'Assemblée, une réunion de concertation entre les présidents de groupe.

Je suis arrivé ce matin dans l'hémicycle après que nous avons repris l'examen de la proposition de résolution, mais Jean-Paul Lecoq m'a confirmé que personne n'avait fait état des résultats de cette réunion. J'aimerais donc que les parlementaires puissent être informés de ce qui s'est passé hier soir, d'autant que je crois savoir que la réunion en question a duré assez longtemps. On ne peut tout de même pas reprendre nos travaux sur ce texte comme s'il ne s'était rien passé hier.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Effectivement, monsieur Braouzec, une réunion s'est tenue hier soir. Tous les groupes y ont participé ; et le vôtre était représenté par M. Roland Muzeau.

Un certain nombre d'avancées ont été possibles. L'amendement dont vient de nous parler le président de la commission des lois, qui a donné satisfaction à l'amendement n° 227 de M. Urvoas, est d'ailleurs la traduction de l'une d'entre elle.

La parole est à M. René Dosière.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Monsieur le président, le groupe SRC s'associe à la demande de M. Braouezec.

Votre présentation des conclusions de la réunion d'hier soir a été pour le moins succincte. Pour la poursuite de nos débats, il me semble utile que nous sachions dans quel état est le chemin sur lequel nous nous engageons.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

S'agit-il d'un chemin où nous pourrons avancer paisiblement, ou la route sera-t-elle pavée d'embûches et d'obstacles ? Cela fait tout de même une différence.

Nous avons été un peu surpris par la précipitation avec laquelle cette séance a repris. Il était semble-t-il convenu, sans qu'il y ait de texte écrit, que l'examen de la proposition de résolution ne reprendrait que cet après-midi. Le découpage du débat en tranches ne me semble pas une bonne formule.

Finalement, Jean-Jacques Urvoas a défendu un amendement pour s'entendre répondre par le rapporteur que sa demande était satisfaite. Or au moment ou Jean-Jacques Urvoas a pris la parole nous n'avions pas connaissance de l'amendement du rapporteur : il n'a été distribué que pendant son intervention !

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Tout cela est un peu précipité, et puisque, précisément, nous discutons de la façon dont nous légiférons, il est souhaitable que nous puissions délibérer correctement.

Contrairement aux apparences, Jean-Jacques Urvoas ne réclamait pas ce qu'il avait déjà obtenu ; il ne pratiquait pas l'obstruction : il ne faisait que son travail. Nous sommes heureux que le président de la commission des lois se soit finalement rendu à nos arguments. Nous avons retiré notre amendement, et nous sommes satisfaits de cette petite avancée. Toutefois, monsieur le président, pour la sérénité et la clarté de nos débats, il me semble qu'il nous faut prendre les quelques minutes d'explications nécessaires à la suite de nos échanges.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Je veut d'abord profiter de mon intervention pour remercier l'ensemble de mes collègues du groupe UMP qui sont très présents et très attentifs à ces sujets difficiles. J'apprécie leur soutien solide dans cette période où la mode consiste à expliquer que tout ce que nous faisons est mal, alors que tous les refus des socialistes, des communistes et des centristes (Sourires) – je ne saurais les oublier, malgré leur absence – seraient extraordinaires.

Chers collègues des groupes SCR et GDR, rien de ce qui concerne la réunion d'hier soir autour du président de l'Assemblée nationale n'est caché. À cette occasion, j'ai répété la liste des avancées proposées par les députés UMP, que j'avais présentée en séance vers vingt-trois heures, dans un rappel au règlement.

Nous considérons que ces avancées sont extrêmement significatives mais, comme nous l'avions prévu, vous les avez balayées d'un revers de main, amicalement mais clairement. Vous avez qualifié nos propositions de « toutes petites avancées », de « petits gestes », de « petits signes ». Nous n'attendions rien ; nous n'avons donc aucune déception.

Monsieur Dosière, je vous rappelle que, même s'il vous a été distribué tardivement, vous connaissiez le contenu de l'amendement du rapporteur depuis hier soir puisque j'en ai parlé moi-même.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Vous pouvez vous référer à mes propos d'hier soir : tout ce que nous proposons correspond aux annonces faites.

Je le répète : le contrôle et l'évaluation des politiques publiques et des politiques gouvernementales doit se faire à parité entre la majorité et l'opposition. C'est normal, et c'est ainsi que fonctionnement toutes les grandes démocraties.

Ne prenez pas cela pour une avancée ; cela vous obligerait à en dire du bien. (Sourires sur les bancs du groupe UMP.) Ne prenez tout de même pas cela pour un recul ; il ne faut pas charrier. Considérez simplement que, puisque nous avons compris que, de toute façon, quoi qu'il arrive, vous ne voterez pas ce texte, nous faisons ce que nous croyons être bon pour notre assemblée ; pas seulement pour la majorité, mais pour l'ensemble de notre assemblée.

Sur la question du temps de parole des présidents de groupe, j'ai proposé une autre avancée très significative. Elle va même au-delà de ce que certains demandaient ; je pense à nos amis centristes. Pour nous, les choses sont acquises et nous voterons dans le sens de ma proposition ; nous espérons que vous ferez de même, mais nous savons que ce n'est pas garanti.

Nous avons également proposé une très belle avancée concernant les commissions d'enquête ; là encore j'ai compris que l'opposition passait cela par pertes et profits. Malgré tout, nous tiendrons notre engagement.

Monsieur Dosière, monsieur Urvoas, monsieur Braouzec, je m'adresse à vous, comme à tous ceux qui suivent ce débat : nous avons tout à fait bonne conscience quant au travail que nous accomplissons pour prendre en compte un certain nombre de vos demandes.

Nous sommes philosophes ; nous savons que vous ne le saluerez pas outre mesure, mais nous travaillons dans cet esprit, car nous estimons que c'est l'intérêt de notre assemblée.

Je me félicite, du reste, que nos travaux se déroulent dans un climat apaisé et constructif. Je ne me fais pas d'illusions sur les déclarations publiques qui seront faites à la sortie de l'hémicycle, mais j'apprécie que nos débats aient lieu dans une atmosphère cordiale. C'est, après tout, la moindre des choses lorsque l'on cherche, non pas à signer la paix des braves, mais à travailler dans un climat plus apaisé que celui qui a été logiquement provoqué par l'affaire dite « du rideau », laquelle pourrait d'ailleurs faire l'objet d'une suite à Un député, ça compte énormément. En tout état de cause, grâce au temps global, ces manoeuvres d'obstruction ne seront bientôt plus qu'un très mauvais souvenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Monsieur le président, mes chers collègues, nous souhaitons tous que le débat se poursuive dans un climat apaisé et constructif, mais nous ne pouvons pas ne pas nous poser un certain nombre de questions.

Hier soir, la séance a été levée afin de permettre aux groupes de se réunir et au président Accoyer de rencontrer leurs présidents. Or je constate que beaucoup de nos collègues, qui sont pourtant membres d'un groupe – et a fortiori les députés non-inscrits, dont je suis – n'ont pas d'informations sur ce qui s'est dit lors de cette rencontre.

Nous ne pouvons pas travailler dans ces conditions. Si des accords ont été conclus, il faut que nous en connaissions exactement la substance, car le point de vue que l'on peut avoir sur les articles et les amendements dont nous discutons en dépend en grande partie. Nous avons donc besoin que l'on nous apporte un minimum d'éclaircissements.

Par ailleurs, je souhaite évoquer une question qui suscite mon inquiétude. J'ai en effet le sentiment que ce qui était avant tout en cause hier soir, c'est le temps de parole des présidents de groupe. Certes, il s'agit d'un point très important, mais je fais observer que l'autre question qui hante ce débat est celle du droit d'expression individuelle des députés. Or je ne voudrais pas qu'une sorte de Yalta parlementaire ait été conclu hier soir, qui consisterait à apporter des solutions aux présidents de groupe, au détriment du droit d'expression individuelle des députés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Garrigue, il appartient aux présidents de groupe d'expliquer l'appréciation qu'ils portent sur les échanges qui ont eu lieu hier soir, voire sur les avancées qui ont été obtenues, s'ils jugent que ce sont des avancées ; un échange vient de le montrer. La présidence n'a pas à se substituer à eux dans ce travail politique, interne à chaque groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Mais comment ceux qui n'appartiennent à aucun groupe peuvent-ils être informés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Quant à la possibilité de travailler dans la sérénité, vous pouvez constater qu'elle existe, et je m'en félicite.

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je veux rassurer notre collègue Daniel Garrigue, car je comprends très bien sa préoccupation.

Hier, dans un climat plus détendu, le président Copé a fait un certain nombre d'ouvertures. J'ai donc demandé à réunir mon groupe, puis le président Accoyer a souhaité réunir les présidents des quatre groupes. Lors de cette rencontre, qui fut brève, chacun a rappelé ses positions ainsi que ses exigences prioritaires, et nous en sommes restés là.

En tout état de cause, je continue à dire que la proposition de résolution du président Accoyer est une bonne base de travail pour parvenir, non pas à un Yalta conclu entre quelques personnalités, mais à un compromis. J'estime que nos discussions doivent avoir lieu dans l'hémicycle, en toute transparence, car elles concernent tous les députés, qu'ils soient ou non membres d'un groupe, le droit d'expression individuelle des députés étant en effet l'un des enjeux de nos débats. Néanmoins, il est important que des échanges aient lieu. Au demeurant, les présidents de groupe assument, de toute façon, une responsabilité spécifique.

C'est dans cet esprit que j'ai accepté cette rencontre, et je remercie le président Accoyer de l'avoir organisée. Elle a porté notamment sur le temps programmé, en particulier sur la question, centrale, de la procédure d'urgence. Toutefois, j'ai également insisté – et je sais que vous y êtes extrêmement attentif, monsieur Garrigue – sur le droit individuel des députés à défendre leurs amendements, au-delà de la règle du temps global.

Tel est notre état d'esprit. Il nous faut maintenant continuer à discuter. S'agissant de l'examen des prochains articles – notamment celui concernant le temps programmé –, je souhaite que nous ayons suffisamment de temps pour aller au fond des choses. Cela suppose que nous n'abordions pas cette question quelques minutes avant que la séance soit levée.

Encore une fois, monsieur Garrigue, les choses ne peuvent se passer qu'ici, car il s'agit bien d'adopter un règlement qui deviendra notre règle à tous, notre code de bonne conduite dans lequel seront inscrits nos droits et nos devoirs.

Article 25

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous reprenons l'examen des amendements à l'article 25.

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas pour défendre l'amendement n° 229 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Cet amendement a pour objet de réserver par principe – mais je préférerais parler de priorité, afin que cette disposition ne soit pas assimilée à une injonction – la semaine de contrôle du mois de juin à la discussion et à l'adoption du projet de loi de règlement.

En effet, si la LOLF – cet acte parlementaire par essence, dont la conception et les résultats illustrent la manière dont le Parlement peut améliorer son travail – a considérablement enrichi le contenu comptable du projet de loi de règlement et créé un chaînage vertueux, en imposant que celui-ci soit déposé au mois de juin, de façon à nous permettre d'en prendre connaissance avant l'élaboration du projet de loi de finances, il nous semble que l'Assemblée devrait consacrer à l'examen du projet de loi de règlement le temps nécessaire en séance publique.

Certes, la commission des finances, sous la présidence de Didier Migaud, produit une analyse nettement plus substantielle de ce texte, qui est, en définitive, le seul acte de vérité en matière de comptabilité publique. Cependant nous passons beaucoup de temps, peut-être trop parfois – même si nos méthodes de travail évoluent dans le bon sens puisque tout ne se passe plus dans l'hémicycle – à discuter, en séance publique, d'une intention – le projet de loi de finances – et pas assez à débattre du projet de loi de règlement, qui nous permet de savoir ce qui s'est vraiment passé.

Nous proposons donc d'améliorer encore ce chaînage vertueux, en consacrant par priorité, la semaine de contrôle du mois de juin à l'examen du projet de loi de règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je suis ennuyé, car, si, sur le fond, je suis d'accord avec M. Urvoas, je crains que son amendement ne pose un problème d'ordre constitutionnel. En effet, la Constitution, qui prévoit que l'Assemblée arrête son ordre du jour, ne permet pas que le règlement réserve une semaine à l'examen d'un projet de loi déterminé. La commission a donc rejeté cet amendement, pour des raisons juridiques.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

M. le rapporteur pourrait peut-être préciser davantage sa pensée ; cela nous inspirerait. Quoi qu'il en soit, nous pourrions convenir, sans l'inscrire dans le règlement, qu'il revient à la conférence des présidents de décider que la semaine de contrôle du mois de juin sera consacrée à la discussion du projet de loi de règlement.

Il s'agit en effet d'une question majeure au regard du contrôle budgétaire permis par la LOLF. Actuellement, la discussion budgétaire, qui reste encadrée par les délais fixés dans la Constitution, a perdu beaucoup de son intérêt, compte tenu de la globalisation et de la fongibilité des crédits. Nous avons voulu que les politiques ministérielles soient jugées sur les résultats. Or, depuis la mise en oeuvre de la LOLF, nous n'avons pas encore trouvé le moyen de le faire.

Certes, le calendrier électoral n'a pas facilité les choses, mais, même s'il faut souligner que la commission des finances a fait des efforts très sensibles pour que, sur un certain nombre de points, le contrôle soit davantage effectif lors de l'examen de la loi de règlement, beaucoup de progrès restent à faire. C'est en effet à ce moment-là que l'on peut véritablement évaluer la politique qui a été menée. Il nous faudrait donc du temps pour le faire, c'est-à-dire pour rédiger des rapports et auditionner les ministres.

S'agissant de la réponse que le président du groupe « le plus important qui n'est pas dans l'opposition » a bien voulu m'apporter, je fais simplement remarquer à ce dernier que l'amendement n° 386 de M. Warsmann porte sur un sujet qu'il n'a pas évoqué dans son intervention d'hier. C'est la raison pour laquelle j'estimais que cet amendement aurait pu être porté à notre connaissance un peu plus tôt. Je ne cherche pas à lui donner mauvaise conscience ; c'est d'ailleurs un sentiment qu'il doit rarement avoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Il me faut de bonnes raisons, pour cela !

(L'amendement n° 229 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi de trois amendements, nos 316 rectifié , 386 et 228 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Le rapporteur ayant retenu l'amendement que j'avais déposé en commission et qui avait pour objet de réserver une séance de contrôle à l'examen des questions européennes, je retire l'amendement n° 316 rectifié au profit de l'amendement n° 228 .

En effet, cet amendement vise à ce que l'initiative des thèmes de cette séance de contrôle prioritairement réservée aux questions européennes revienne alternativement à l'opposition et au « parti le plus nombreux qui n'est pas de l'opposition » ; je suis obligé d'employer cette formule, puisque le rapporteur ne veut pas entendre parler de majorité dans l'hémicycle.

(L'amendement n°316 rectifié est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. rapporteur, pour présenter l'amendement n° 386 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 228 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

La commission est défavorable à l'amendement n° 228 , satisfait en très grande partie par mon amendement n° 386 .

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Je veux également insister sur l'importance de la décision alternative des sujets traités dans le cadre de la semaine de contrôle réservée aux questions européennes.

Ainsi, le bilan de six mois de présidence française à la tête de l'Union européenne paraît, en matière de santé, extrêmement décevant, puisque l'on n'a pas même commencé l'élaboration d'une directive santé (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Ce n'est qu'un exemple !

Il aurait pourtant été bon de s'intéresser aux passages transfrontaliers entre des professionnels de santé et des patients ou à la veille sanitaire, sujet également très important. Tant que la directive Santé n'existe pas, les pays de l'Union européenne font ce qu'ils veulent de leur système de soins ; on voit ce que cela donne en France. En inscrivant par principe le choix du thème, l'opposition aurait pu revenir à la charge régulièrement pour suivre l'élaboration de la directive européenne, dès lors que le Parlement européen, avec une majorité favorable, en aurait la volonté.

Je regrette que M. Copé ait quitté cet hémicycle. Nous ne sommes pas là pour demander l'aumône au sujet du règlement de l'Assemblée nationale. Nos amendements ont pour objectif de permettre un bon débat démocratique. Si M. Copé a oublié les fondements mêmes de cette Assemblée, je lui rappelle ce que disait Albert Camus : « La démocratie, ce n'est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité ».

(L'amendement n° 386 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

En conséquence, l'amendement n° 228 tombe.

La parole est à M. Jean Mallot pour soutenir l'amendement n° 91 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Monsieur le président de la commission des lois, L'alinéa 10 de l'article 25, tel qu'il est issu des travaux de la commission prévoit : « Les groupes d'opposition et les groupes minoritaires font connaître les affaires qu'ils veulent voir inscrire à l'ordre du jour de cette journée au plus tard lors de la Conférence des Présidents qui suit la précédente journée réservée sur le fondement de l'article 48, alinéa 5 ». C'est donc un délai de trois semaines qu'il faudra respecter avant la conférence des présidents qui arrêtera l'ordre du jour de ladite journée.

Ce très long délai va empêcher les groupes d'opposition et les groupes minoritaires de tenir compte de l'actualité, de l'évolution des débats, de l'activité politique du pays, voire à l'étranger, et de l'activité gouvernementale. Or chacun aura noté que l'ordre du jour, y compris dans la partie fixée par le Gouvernement via la conférence des présidents, varie beaucoup ; il suffit de se référer à celui d'aujourd'hui pour s'en convaincre. Chaque semaine, le Gouvernement modifie l'ordre du jour. Il faut donc que les parlementaires, notamment ceux des groupes d'opposition et des groupes minoritaires, puissent suivre l'actualité et indiquer quelles sont les affaires qu'ils veulent voir inscrites à l'ordre du jour sans avoir à respecter un délai trop long jusqu'à la conférence des présidents.

L'amendement n° 91 vise donc à ce que ce délai soit ramené de trois semaines à sept jours francs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Défavorable. Le délai de trois semaines se justifie par la nécessité, lorsqu'il s'agit d'une proposition de loi, de désigner un rapporteur, de laisser à celui-ci le temps de procéder à des auditions, de travailler à la rédaction de son rapport et de faire en sorte que le droit d'amendement puisse s'exercer. Un délai de sept jours nous paraît totalement incompatible avec ces exigences.

Par ailleurs, en dehors de la procédure accélérée, les propositions de loi exigent un délai de six semaines entre leur dépôt et leur inscription à l'ordre du jour. Le délai de trois semaines qui est proposé ici étant inférieur, je ne vois pas où est le problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Vous avez vous-même dit, monsieur le président de la commission des lois – à juste titre, me semble-t-il –, que cette question était en phase d'adaptation, puisque nous allons bénéficier de plus en plus de capacités d'initiative parlementaire. Votre exposé des motifs indiquait d'ailleurs que la référence que vous preniez découlait de la conférence des présidents qui se tenait le 10 juillet.

Nous souhaitons attirer l'attention de l'Assemblée sur le fait que, jusqu'à présent, les séances d'initiative parlementaire ont toujours été nourries par des propositions de loi. J'entends l'argument de notre rapporteur qui, dans cette optique, prend tout son sens : il est évident que l'on ne peut discuter d'une proposition de loi sans délais, puisqu'il faut nommer un rapporteur et laisser le temps à la commission de procéder à ses travaux. Toutefois, demain, les séances d'initiative parlementaire pourraient être nourries par d'autres choses que des propositions de loi, par exemple une déclaration que l'opposition aurait demandée au Gouvernement, ou une audition publique. Dans ce cas, les vingt et un jours deviendraient incroyablement longs et ne permettraient pas de coller à l'actualité.

Par exemple, si nous avions pu disposer d'une séance d'initiative parlementaire ces derniers temps, nous aurions beaucoup aimé entendre en séance publique le contrôleur général des lieux de privation de liberté, qui vient de rendre son rapport et que le président de la commission des lois a auditionné hier. Compte tenu de l'état de surpopulation des prisons, il nous semble qu'il aurait été intéressant d'entendre ce contrôleur en séance publique, sans avoir pour cela à respecter un délai préalable de vingt et un jours.

J'attire l'attention de notre assemblée sur la nécessaire souplesse des mécanismes si l'on veut que tout le monde puisse en profiter et que l'Assemblée soit en mesure de jouer pleinement son rôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je partage ce que vient de dire M. Urvoas, mais j'appelle son attention sur le fait que l'amendement n° 386 lui donne satisfaction. Si le groupe SRC avait voulu entendre le contrôleur général des prisons, il aurait indiqué, au titre de sujet de la semaine de contrôle, l'audition du contrôleur. Ce dispositif permet d'obtenir la réactivité souhaitée.

(L'amendement n° 91 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Patrick Braouezec pour défendre l'amendement n° 142 .

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Cet amendement, comme bon nombre d'autres déposés par le groupe GDR – ainsi que par le groupe Nouveau Centre –, vise à renforcer, dans le cadre du règlement intérieur, les droits des groupes minoritaires au sein de la majorité ou de l'opposition. Nous proposons ainsi de passer d'un jour à deux jours pour permettre à ces groupes de pouvoir défendre des propositions de loi.

Cet amendement correspond à l'état d'esprit du groupe de travail que vous avez mis en place, monsieur le président de l'Assemblée, et à l'engagement que vous aviez pris pour que la réforme de notre règlement intérieur permette aux oppositions et minorités – y compris celles existant au sein de la majorité – de débattre de propositions de leur choix.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je rappelle que, avant la révision constitutionnelle, la répartition des séances d'initiative parlementaire était la suivante : dix pour le groupe UMP, six pour le groupe SRC, une pour le groupe GDR et une pour le groupe Nouveau Centre. La révision constitutionnelle prévoit un jour – donc trois séances par mois – réservé aux groupes minoritaires ou d'opposition. Le groupe GDR passe ainsi à trois séances, de même que le groupe Nouveau Centre ; quant au groupe SRC, il passe de six à vingt et une séances par an. C'est donc une augmentation extrêmement importante.

Deuxièmement, le fait de passer à deux jours provoquerait vraiment un déséquilibre proportionnel entre les groupes GDR et Nouveau Centre d'une part et le groupe SRC d'autre part.

Troisièmement, si l'on prévoit deux séances par groupe et qu'il y a plus de quatre groupes minoritaires ou d'opposition, le système ne peut plus fonctionner. Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

(L'amendement n° 142 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 82 et 104 .

La parole est à M. Patrick Braouezec, pour soutenir l'amendement n° 82 .

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Cet amendement vise à faire en sorte que l'on porte à cinq minutes le temps de parole pour les explications de vote. Une explication de vote réduite à deux minutes ne nous paraît pas avoir beaucoup de sens, car elle ne permet pas aux rapporteurs et aux présidents de groupe d'exposer convenablement leurs arguments. Une durée de cinq minutes me semble beaucoup plus raisonnable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. René Dosière, pour soutenir l'amendement n° 104 .

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

La décision prise par la commission des lois au sujet du temps imparti pour les explications de vote s'inscrit dans une démarche de réduction drastique et systématique de tous les temps de parole – en dehors du temps programmé.

Donner deux minutes pour une explication de vote, me paraît être une erreur résultant d'une conception que l'on ne peut partager : le Parlement ne doit pas être un lieu où l'on pratique l'abattage ! C'est un lieu où chaque élu, de la majorité comme de l'opposition, doit pouvoir exprimer ce que ses concitoyens lui ont confié. D'ailleurs, à partir du moment où l'on s'engage dans la voie d'une réduction du temps de parole, pourquoi s'arrêter à deux minutes ? Pourquoi ne pas réduire ce temps à une minute, voire à trente secondes ?

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Monsieur Apparu, je ne plaisante pas avec ce qui est la fonction centrale du Parlement, et nous discutons là d'un principe important. Vous irez dire à vos électeurs qui vous auront demandé d'intervenir en séance que vous n'avez que deux minutes de temps de parole et que vous ne pouvez approfondir la question !

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Notre assemblée doit pouvoir s'exprimer et, si l'on peut comprendre le souci, dont on reparlera à propos du temps programmé, de réguler les débats et d'éviter les dérives, réduire tous les temps de parole à deux minutes procède d'une démarche systématique qui n'est pas de bon aloi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

La commission a évidemment donné un avis défavorable à ces amendements puisqu'elle s'est prononcée sur un temps de parole de deux minutes.

Je rappelle qu'il s'agit ici des explications de vote sur l'ordre du jour de l'Assemblée, lequel a été débattu en conférence des présidents. Deux minutes suffisent donc largement. La liberté de parole est totale dans l'hémicycle, mais elle se double d'un autre principe qui est le respect de ceux qui écoutent. Les orateurs doivent donc apprendre à construire une argumentation sans délayage. L'efficacité d'une démonstration n'est pas fonction de sa longueur.

Quant à la position de la commission des lois sur le temps de parole, elle n'a rien de systématique, puisque, pour les explications de vote sur les textes, le temps imparti à chaque orateur reste de cinq minutes ; il est évident en effet que, dans ce cas, ce temps est nécessaire pour aborder l'ensemble des sujets couverts par le texte.

Pour le reste, la règle des deux minutes est en vigueur dans de nombreuses assemblées étrangères ; quant au Sénat, il s'apprête, dans un quasi-consensus, à réduire les temps d'intervention à trois minutes. Notre proposition n'a donc rien d'exceptionnel. Elle rendra les débats plus intéressants et plus vifs.

Monsieur le président, vous avez vous-même tracé la voie en limitant le temps d'expression à deux minutes dans les questions d'actualité, ce dont tout le monde se félicite, car les échanges sont plus vivants, plus construits et plus intéressants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Brillante démonstration a contrario du président Warsmann, qui vient de parler plus de deux minutes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Nous allons retrouver à huit reprises cette proposition de la commission des lois qui modifie le texte original de votre résolution, monsieur le président. À huit reprises donc, là où les parlementaires disposent aujourd'hui de cinq minutes pour s'exprimer – ce qui n'a rien de considérable ! –, nous n'aurons demain que deux minutes.

D'un tempérament conciliant, je veux bien concéder que tout ne se vaut pas et que, sur l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, évoqué ici, deux minutes peuvent suffire. Cependant nous saisissons l'occasion de ce premier amendement pour attirer l'attention sur ce que signifie cette règle des deux minutes.

L'excellent ministre Karoutchi – puisqu'il s'est absenté, nul ne verra de flagornerie à ce que je le qualifie ainsi – déclarait l'autre jour au Figaro que le Parlement gagnerait à retrouver les grandes envolées oratoires d'antan et réclamait le retour de députés comme Blum ou Jaurès. Or, quand Jean Jaurès intervenait dans cet hémicycle pour demander la réhabilitation de Dreyfus, il ne pouvait pas le faire en deux minutes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Je veux bien qu'on construise une argumentation rigoureuse, mais cela nécessite un minimum de temps. Certes, une explication de vote peut se faire en moins de deux minutes : il suffit de dire : « Notre groupe est pour – ou contre », ce qui ne prend que dix secondes. Ce que nous voulons souligner, c'est que les propositions de la commission manquent un peu d'élégance à notre égard en rognant systématiquement notre temps d'expression.

Cela n'aboutira nullement à davantage de concision, mais à une caricature des positions de chacun. La petite phrase, qui fait déjà florès dans les médias, va devenir la règle dans l'hémicycle. Eh bien, je ne suis pas devenu député pour résumer la complexité des problèmes qui me sont soumis par des petites phrases ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Le rapporteur nous a fait une brillante démonstration en argumentant pendant plus de deux minutes…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

…pour tenter de nous convaincre ; il s'est appuyé du reste pour ce faire sur un exemple caricatural.

J'ajoute qu'il serait assez paradoxal que les députés, qui représentent le peuple et parlent en son nom, disposent d'un temps d'expression inférieur à celui des sénateurs, qui représentent les collectivités territoriales. Puisque vous ne voulez pas entendre parler des cinq minutes, alignons-nous donc sur les trois minutes du Sénat pour les explications de vote.

Reste que les cinq minutes que nous réclamons pour des explications de vote ne seraient pas du temps perdu. Il est de notre responsabilité d'entendre les arguments développés par les uns et les autres, et il n'est tout de même pas si fastidieux pour la majorité d'écouter l'opposition pendant cinq minutes, et vice-versa.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Deux minutes, ça suffit pour marquer un but ! Et même dix secondes !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Vous avez parlé une minute et cinq secondes, monsieur Braouezec.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Ce dont nous discutons n'a rien à voir avec les discours de Jaurès ou de Blum ! Chacun peut s'exprimer dans la discussion générale et chaque groupe peut organiser son temps, privilégiant, s'il le souhaite, un grand orateur. Le temps global, quant à lui, donne encore plus de liberté.

Je persiste donc dans ma position concernant les explications de vote sur l'ordre du jour.

Pour ce qui est des explications de vote des groupes sur un texte, la commission a maintenu un temps de parole de cinq minutes, ne réduisant que le temps imparti aux explications de vote individuelles. Je veux bien faire un geste en revenant à cinq minutes toutes les explications de vote, qu'il s'agisse des explications individuelles ou des explications de groupe.

Je vous proposerai donc d'adopter l'amendement socialiste qui le propose, quand il viendra ne discussion. (Approbation sur les bancs du groupe UMP.)

(Les amendements identiques nos 82 et 104 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas pour soutenir l'amendement n° 293 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

L'alinéa 12 de l'article 25, qui concerne la modification de l'ordre du jour, est actuellement ainsi rédigé : « Si, à titre exceptionnel, le Gouvernement, en vertu des pouvoirs qu'il tient de l'article 48 de la Constitution, demande une modification de l'ordre du jour, le président en donne immédiatement connaissance à l'Assemblée. La conférence des présidents peut être réunie. »

Sans être en désaccord sur le fond, nous proposons un amendement qui vise à intégrer le fait que, l'ordre du jour de l'Assemblée nationale étant dorénavant partagé entre le Gouvernement et l'Assemblée nationale, il peut arriver qu'il soit modifié à la demande d'un président de groupe ou d'une commission. Nous suggérons donc de rédiger l'alinéa 12 dans les termes suivants : « L'ordre du jour peut être modifié à la demande du Gouvernement, d'un groupe ou de la commission compétente. Si cette modification a une incidence sur l'ordre du jour autre que celui résultant des inscriptions prioritaires du Gouvernement – nous respectons donc avec beaucoup de scrupules les prérogatives constitutionnelles de ce dernier –, la conférence des présidents est réunie à la demande du président, d'un président de commission ou d'un président de groupe. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Avis défavorable. L'alinéa 12 est la transcription des droits constitutionnels du Gouvernement concernant l'ordre du jour.

(L'amendement n° 293 rectifié n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Patrick Braouezec pour défendre l'amendement n° 143 .

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Cet amendement procède du même souci que celui de M. Urvoas. Nous proposons également de modifier l'alinéa 12, en le terminant non pas par « peut être réunie » mais par « est réunie », dès lors que la modification de l'ordre du jour à une incidence au-delà des inscriptions prioritaires du Gouvernement.

Sans s'éloigner de l'esprit de votre texte, nous donnons à la conférence des présidents un pouvoir que le nouveau règlement de notre assemblée devrait conforter. Nous considérons en effet qu'elle doit assumer pleinement le rôle qui lui a été assigné et se réunir de plein droit dès que cela est nécessaire, ce qui est le cas en l'occurrence. J'y insiste pour obtenir de M. Warsmann une réponse précise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Par cohérence, avis défavorable, comme précédemment.

(L'amendement n° 143 n'est pas adopté.)

(L'article 25, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la proposition de résolution tendant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma