Projet de loi de finances pour 2011 – mission Défense
La séance est ouverte à onze heures.
La commission des affaires étrangères examine pour avis, sur le rapport de M. Jean-Michel Boucheron, les crédits de la mission Défense du projet de loi de finances pour 2011.
Avec 38,4 milliards d'euros en crédits de paiement pour 2011, le budget de la mission « Défense » annonce une baisse de 3,6 milliards d'euros sur trois ans. En effet, le ministère compte sur des recettes exceptionnelles pour équilibrer le niveau des crédits d'ici 2013. Toutefois, ces ressources, tirées de la vente d'immeubles et de fréquences, n'ont pas été au rendez-vous en 2010, seulement 100 millions d'euros ayant été encaissés par rapport à une prévision de 700 millions d'euros. En l'absence de garanties sur ces recettes exceptionnelles, une baisse du budget est donc à prévoir.
Dès lors, les engagements pris au titre de la loi de programmation militaire pour 2009 – 2014 et du livre blanc sur la sécurité et la défense nationale de 2008 ne seront pas tenus. Par rapport aux promesses du livre blanc, qui s'étendaient jusqu'en 2020, ce sont 25 milliards d'euros qui manqueront.
Une telle évolution n'est pas choquante si on la compare à celles que connaissent nos voisins européens, qui subissent des baisses très significatives de leurs budgets de défense : réduction de 8 % au Royaume-Uni, de 14 % en Allemagne dès l'année prochaine, et de 8,6 milliards d'euros en trois ans, soit quasiment 40 % des dépenses d'investissement qui seront réduites.
Nous assistons donc à un recul de l'Europe en matière d'équipements de défense. Les Etats-Unis se maintiennent, avec un budget de défense représentant environ 50 % des dépenses mondiales. La Chine, quant à elle, fait croître son budget militaire entre 15 % et 30 % par an depuis plusieurs années. A ce rythme, elle aura rattrapé le budget américain dans dix ans. Par ailleurs, le niveau technologique des armées chinoises est également en progression constante. La Chine a ainsi réussi un essai d'arme anti-satellite, et développe des missiles de haute précision capables d'atteindre des porte-avions, ce qui touche directement la suprématie militaire américaine.
Le face-à-face qui se met en place est donc celui de la Chine et des Etats-Unis, et le coeur stratégique du monde est désormais en Asie. L'Europe, elle, baisse la garde sur le plan militaire et technologique.
Pour la France, la réduction des crédits budgétaires consacrés aux armées pose un problème sérieux. En effet, les programmes qui seront le plus affectés sont ceux n'ayant pas encore fait l'objet d'une décision définitive, c'est-à-dire les plus récents, donc les plus adaptés au contexte stratégique contemporain, et la recherche, qui sont, pourtant, des dépenses d'avenir.
Dans cette situation, le réflexe est souvent de compter sur la solution européenne, mais celle-ci est en panne. L'agence européenne de défense est totalement inactive. La coopération structurée permanente ne fonctionne pas, tétanisée par une bureaucratie insidieuse où chacun a le droit de veto sur tout.
Si la coopération européenne est morte, vivent les coopérations en Europe ! Le sommet franco-britannique d'hier est très positif, car il permet de travailler avec ceux qui veulent vraiment travailler avec nous. Portons nos efforts sur le bilatéral, c'est de cette manière que nous ferons avancer la défense de l'Europe.
Concernant les questions industrielles, j'avais alerté la commission l'an dernier sur la situation d'EADS. Le programme A400M devrait se régler dans les prochaines années, mais il faut s'attendre à une baisse des commandes allemandes de cet appareil, ce qui nécessitera de nouvelles négociations. Dans le domaine des hélicoptères, en revanche, la situation est devenue à peu près normale. C'est en matière de drones que la situation industrielle en Europe est la pire.
Dans trois domaines, l'excellence industrielle européenne, et notamment française, permet de rivaliser avec les Etats-Unis : l'espace, le nucléaire et les missiles.
Ne nous y trompons pas : la nouvelle donne stratégique et militaire nous fait entrer dans un nouveau monde. Les principes fondamentaux qui faisaient reposer notre stratégie de défense, depuis De Gaulle et Mitterrand, sur trois éléments – indépendance nationale, Europe, axe franco-allemand – doivent être revisités. En effet, il est désormais totalement impossible de concevoir une indépendance nationale dans le domaine technologique, et même le niveau européen pourrait ne pas suffire. De plus, les institutions européennes ne fonctionnent pas. Enfin, le partenariat franco-allemand ne saurait avancer, en l'absence de volonté de nos alliés allemands.
Concernant l'Alliance Atlantique, suite au départ de l'organisme chargé de la transformation de l'armée américaine, JFCOM, il est nécessaire d'obtenir le transfert du commandement allié à la transformation, en charge de la modernisation à l'OTAN et dirigé par un français, de Norfolk à Washington, afin de le maintenir auprès des instances décisionnelles américaines.
Les 19 et 20 novembre aura lieu un sommet des chefs d'Etats et de gouvernements de l'Alliance Atlantique à Lisbonne. Un débat aura lieu sur l'opportunité de lancer un programme de défense anti-missiles financé par l'OTAN. Les propositions américaines actuelles, si elles sont assez différentes des projets faits en son temps par l'administration Bush, sont critiquées. Un rapport au Pentagone mentionnait ainsi que les missiles d'interception actuellement développés ne fonctionnaient pas, et, même si leur fonctionnement était assuré, ils ne pourraient permettre de défendre un territoire contre des frappes saturantes.
Malgré ces incertitudes, le secrétaire général de l'OTAN Anders Fogh Rasmussen, prétend que le développement d'une défense anti-missiles efficace pour l'Alliance ne coûterait que 110 millions d'euros sur cinq ans. Ce chiffre est manifestement en dessous de la réalité, les coûts de développement des programmes anti-missiles se chiffrant en dizaine de milliards de dollars. Il s'agit, en réalité, du coût de raccordement d'un système OTAN au système américain. Dans ce cas, la décision d'utiliser la défense anti-missiles relèverait des seuls Etats-Unis.
Tout n'est pas à rejeter pour autant dans les projets de défense anti-missiles. Le développement d'un système de protection du territoire reposant sur un système de commandement et des missiles intercepteurs américains doit être refusé. Il va totalement à l'encontre de notre doctrine de dissuasion, et laisse les seuls Américains maîtres du déclenchement de la riposte.
En revanche, la mutualisation des systèmes de reconnaissance par radar afin de couvrir le flanc sud du continent européen me paraît une bonne chose. Cela permettrait de partager les connaissances sur l'origine et la direction d'une éventuelle attaque balistique, ce qui n'est pas contradictoire avec la dissuasion nucléaire, au contraire. La dissuasion implique en effet de savoir précisément qui est l'auteur d'une éventuelle agression.
Ainsi, le sommet de l'OTAN à Lisbonne doit être l'occasion d'approuver le principe d'un programme de détection avancée contre les attaques balistiques, mais de refuser le développement d'un bouclier anti-missiles pour l'OTAN.
L'anti-missiles conduit nécessairement à évoquer la dissuasion. Dans ce domaine, le discours américain sur l'opportunité d'un monde sans armes nucléaires est totalement contradictoire avec la réalité stratégique. Les Etats-Unis peuvent compter sur 5 000 têtes nucléaires, contre 300 pour la France. De plus, les Américains ont réalisé, en septembre de cette année, une explosion sub-critique dans le Nevada, quelques semaines seulement après la conclusion de la conférence sur le traité de non prolifération nucléaire. En matière de dissuasion nucléaire et de désarmement, la France n'a donc de leçon à recevoir de personne.
Concernant les éléments clés du budget de la défense français pour 2011, les moyens de notre outil de renseignement sont renforcés dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, ce qui est nécessaire. 150 nouveaux personnels devraient ainsi rejoindre la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Les outils technologiques du renseignement font également l'objet d'efforts bienvenus, notamment le programme d'imagerie spatiale MUSIS, bien que d'autres éléments, comme le programme CERES d'interception électromagnétique depuis l'espace, doivent malheureusement être retardés.
En matière de guerre cybernétique, la France se met enfin en route. L'agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), en charge de ces questions, sera dotée de 150 personnels à court terme. La question de la guerre informatique a pris une grande ampleur ces dernières années. Récemment, une attaque cybernétique paralysante contre l'Iran, ciblant les sites impliqués dans le programme nucléaire, a été menée avec un certain succès. Le cyber-espace s'imposera bientôt, avec la terre, la mer, l'air, l'espace comme une nouvelle dimension de la guerre.
Grâce à l'apport de 3,1 milliards d'euros de crédits, notre outil de dissuasion nucléaire est maintenu à niveau, dans toutes ses composantes : têtes nucléaires, vecteurs aériens et maritimes, appareils de transport (sous-marins nucléaires lanceurs d'engin, Rafale F3, Mirage 2000N rénovés).
Les exportations militaires françaises, hormis quelques échecs spectaculaires, se tiennent dans l'ensemble à un haut niveau, qui pourrait même s'améliorer au vu des prévisions de commandes futures.
Enfin, l'examen du budget de la mission « Défense » pour 2011 ne peut être fait sans prêter une attention particulière à l'événement majeur intervenu hier, 2 novembre, dans ce domaine, lors du sommet franco-britannique de Londres.
En premier lieu, un accord concernant une force expéditionnaire franco-britannique a été signé. Cela permettra de dégager d'importantes économies puisque, sauf en Irak, la France et la Grande-Bretagne sont militairement présentes partout ensemble, et peuvent donc partager entre autres de nombreuses fonctions de soutien.
En matière nucléaire, la modernisation de l'arsenal britannique sera réalisée en France, en Bourgogne précisément, un site relais étant situé en Grande-Bretagne. L'ensemble de la recherche dans ce domaine sera mené en partenariat à partir de 2011.
Dans le domaine aéronaval, les Britanniques se doteront d'un porte-avions conforme aux standards français (catapultes), ce qui va dans le sens d'une meilleure coopération.
Sur le plan industriel, de nombreux accords sont passés, notamment pour les sous-marins et les drones. En matière de drones, les deux coopérations choisies, drone de surveillance moyenne altitude – longue endurance et drones de combat, sont très importantes. Les drones sont un outil fondamental pour les guerres du futur.
En effet, il n'y aura plus de guerre entre Etats à l'avenir, du fait de l'existence de la dissuasion nucléaire et du niveau d'organisation auquel est parvenu la communauté internationale. Nous devons donc nous focaliser sur les outils permettant de combattre des guerres asymétriques et lointaines, qui seront les conflits auxquels nous seront confrontés demain.
Un autre programme commun permettra de faire émerger, à terme, un missilier européen unique, allant dans le sens d'une restructuration efficace.
L'accord franco-britannique du 2 novembre a été rendu nécessaire par la panne de la coopération structurée permanente. Il y a tout lieu de se réjouir du résultat obtenu.
Je remercie M. le rapporteur dont je partage l'essentiel des conclusions, sauf en ce qui concerne l'OTAN. Je crois personnellement que l'accord que nous venons de signer avec le Royaume-Uni n'aurait pas été possible sans notre retour dans les structures militaires intégrées de l'OTAN.
Je remercie la présentation du rapporteur qui a été très réaliste. Quelle est l'évolution des CP pour 2011 ? La somme paraît en augmentation, mais qu'en est-il exactement, dans la mesure où nous n'avons pas le compte précis, les documents budgétaires n'étant pas suffisamment détaillés. Les chiffres de 37,4Mds€ en 2011 contre 37,14Mds€ que j'obtiens sont-ils exacts ? En ce qui concerne la place des Etats-Unis, il ne faut pas oublier la dimension monétaire et le fait que la chute programmée du dollar va entraîner leur affaiblissement, à la différence de la Chine. Les Etats-Unis deviennent une puissance relative, il ne faut pas se tromper ; la description que nous a faite le rapporteur sera amplifiée par cet aspect essentiel. Quant à l'accord avec le Royaume-Uni, je crois qu'il serait intervenu de toute façon, car l'OTAN est trop américain pour les Britanniques. Nous n'avons rien à attendre des Etats-Unis, qui sont nos concurrents et veulent tout contrôler comme dans les années 1960. Cela étant, l'accord franco-britannique d'hier ne peut fonctionner que si l'on investit. Or, les crédits sur cet aspect sont à la baisse. Il s'agit de prendre conscience que l'on doit maintenir un haut niveau d'équipement. Si les guerres changent, deviennent asymétriques, comme le rapporteur l'a dit, elles nécessitent néanmoins un haut niveau de recherche et des équipements performants.
Sur la question des crédits, je suis d'accord avec Jacques Myard. Le problème ne porte pas sur le montant global des dépenses mais sur leur financement donc sur la question des recettes exceptionnelles que l'on a fixées à 1Md€ dans ce budget et dont je rappelle que, par rapport à ce qui était annoncé l'an dernier, nous n'avons réalisé que 10 %. Je n'ai pas de commentaire à faire sur les aspectes monétaires. En ce qui concerne l'OTAN, l'Union européenne vient de décider d'ouvrir ses marchés militaires aux entreprises américaines qui ont des filiales en Europe, selon une directive adoptée il y a quelques semaines. C'est une décision très grave, prise sans aucune réciprocité, nos entreprises européennes ne pouvant concourir sur les marchés du Pentagone. Rappelons que pour 40 % de notre technologie, nous sommes au niveau des Etats-Unis, mais que sur les 60 % restants, nous sommes en retard.
Je suis heureux de constater que même avec les baisses de crédits annoncées, qui sont au demeurant sans comparaison avec ce qui se passe chez nos voisins, comme le rapporteur l'a rappelé, nous maintenons un effort qui garantit notre sécurité, comme en témoigne le montant des crédits consacrés à la lutte contre le terrorisme. Cette priorité doit être maintenue, car les menaces stratégiques des années 2010 ne sont pas celles des années 1980. Voterez-vous ce budget, M. le rapporteur ?
Sur le terrorisme, les crédits sont effectivement au rendez-vous et sur le plan technologique, les options prises sont les bonnes. J'espère que cela sera efficace. Quant au deuxième point, je m'en remettrai à la sagesse de la commission…
Quand on prépare un budget militaire, il faut des objectifs et avoir identifié ses adversaires. Quels sont-ils ? Le rapporteur a parlé du renforcement des efforts de la Chine sans la considérer comme un ennemi. Il a aussi parlé du bouclier antimissiles et des risques venant de l'Iran. C'est effectivement une zone sensible, mais il a aussi dit qu'il n'y aurait plus de guerres d'Etats. Je partage cette opinion. Cela étant, avant d'être en mesure de répondre à la mise en cause de notre sécurité, sans doute serait-il préférable d'accorder davantage d'aide à certains Etats pour qu'il ne soit plus nécessaire pour eux de se mettre dans une situation d'agression. On a parlé de cette question hier lors de l'examen des crédits de l'APD et de la question de la baisse de contributions aux organisations internationales. Sur un autre plan, nous sommes en guerre en Afghanistan. Tous ceux qui sont allés sur le terrain ont constaté que nos matériels ne sont pas au niveau et que nos soldats ne sont pas en sécurité, par exemple pour se protéger contre les engins explosifs improvisés. C'est la raison pour laquelle nous avons beaucoup de victimes. On ne sent pas dans ce budget que le nécessaire soit fait pour la protection de nos soldats sur les théâtres où nous intervenons. Quant à la question de la guerre technologique, nous ne pouvons pas la soutenir. Il nous faut soutenir notre action contre la pauvreté. Je note aussi que le rapporteur a démontré que ce que nous disions depuis toujours sur l'OTAN était fondé et que, plus largement, l'Europe que l'on nous impose n'est pas celle qu'il nous faut. Tous les arguments le montrent, les uns après les autres, budget après budget. Nous voterons bien sûr contre ce budget qui est contraire à notre philosophie.
Je vous demande pardon de poser une question annexe : y a-t-il une lisibilité des moyens donnés à l'armée pour la sécurité intérieure du pays, pour intervenir, le cas échéant, sur le territoire national ?
Pour répondre à Monsieur Jean-Paul Lecoq, je ne crois pas du tout à la menace militaire iranienne. Les tensions autour de l'Iran consistent en un jeu de rôles : le Président Ahmadinejad se présente en leader du monde musulman contre l'Occident, Israël affirme que son existence est menacée, et les Etats-Unis souhaitent que les monarchies sunnites du Golfe continuent de se placer sous leur protection. J'estime que la France n'a pas d'intérêt dans l'embargo sur l'Iran.
Quant au bouclier de radars dont j'ai parlé, il est utile pour notre politique de dissuasion, car il permet de déterminer l'origine d'une agression. Je ne cible pas pour autant des Etats en particulier.
Quant à l'exhortation à combattre la misère que vous avez formulée, je suis d'accord avec vous. Prenez l'exemple de l'immigration turque : avant les Turcs venaient en Europe pour trouver du travail, aujourd'hui les Turcs établis en Europe retournent en Turquie chercher un emploi. Avec une croissance annuelle de dix pour cent (contre un pour cent pour l'Europe), la Turquie est bien plus attractive. Notre position vis-à-vis de ce pays et de sa place en Europe pourrait d'ailleurs être discutée.
Quant à l'équipement de nos troupes en Afghanistan, je ne me fais aucun souci majeur. La mise en place prochaine du système Félin est rassurante.
Au sujet des guerres technologiques que vous évoquiez, je pense qu'il faut trouver un juste équilibre entre le nombre d'hommes et les performances des armes nouvelles. Du fait des contraintes budgétaires que j'ai évoquées, il faudra, à court terme, revoir le format de nos armées.
Quant à l'Europe, je pense qu'on peut être, comme moi, un militant européen tout en émettant des critiques sur la méthodologie de la construction européenne. Toute coopération bilatérale entre Etats membres consolide l'Union européenne. Il y a deux moyens de renforcer l'Union européenne : soit par les institutions communautaires soit par des actions bilatérales. Il faut choisir la méthode la plus efficace.
Je me permets de vous interrompre pour préciser ma question : je n'ignore pas que la police et la gendarmerie sont en charge du maintien de l'ordre à l'intérieur de nos frontières. Mais il figure, dans le programme n°178 du projet de loi de finances pour 2011, programme intitulé « Préparation et Emploi des forces », une action n°7 dédiée au financement des missions intérieures (MISSINT). Y a-t-il une action de l'armée dans le cadre de la lutte anti-terroriste, notamment dans nos banlieues ?
L'armée n'intervient sur le territoire national que pour deux types d'actions : d'une part, les opérations de sécurité civile en cas de catastrophes naturelles, comme la pollution des plages par une marée noire, et, d'autre part, le plan Vigipirate.
Monsieur le rapporteur, je vous remercie pour ces précisions utiles et complètes. Je mets maintenant les crédits de la mission Défense aux voix.
Le rapporteur pour avis s'en étant remis à la sagesse de la commission, la commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Défense pour 2011.
Projet de loi de finances pour 2011 – Vote sur les crédits de la mission Ecologie, développement et aménagement durables
Je vous rappelle que les crédits de la mission Ecologie ont été examinés en commission élargie, avec la Commission du développement durable, le mardi 12 octobre dernier.
Je donne la parole à Monsieur Jean-Jacques Guillet pour quelques rappels.
J'évoquerai un premier point d'actualité.
Tout d'abord, au sujet de la Conférence de Nagoya sur la biodiversité, les résultats sont plus positifs que ce à quoi on s'attendait. Néanmoins, les résultats des élections américaines font peser des incertitudes sur l'avenir. La période de cohabitation qui s'ouvre aux Etats-Unis va certainement avoir un impact sur les négociations climatiques, et notamment sur les résultats de la prochaine Conférence de Cancun. L'opposition américaine à des avancées en matière de lutte contre le réchauffement climatique est appelée à se renforcer avec une majorité républicaine à la Chambre des représentants, et une minorité démocrate qui n'est pas toujours convaincue.
Les crédits alloués à l'action européenne et internationale en matière de développement durable (action n°6 du programme n°217 du projet de loi de finances pour 2011) sont d'environ dix millions d'euros. Cette somme est exclusivement consacrée d'une part, à la participation de nos délégations aux négociations multilatérales, et, d'autre part, aux contributions de la France aux organismes multilatéraux de protection de l'environnement.
Quant à notre participation aux négociations multilatérales, elle est importante. La secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie, Mme Chantal Jouanno, a joué un rôle de médiatrice lors de la Conférence de Nagoya, qui a contribué à son succès. Certes, il y a eu quelques déconvenues, comme à Copenhague, l'an dernier. Mais, globalement, avant la création en 2007 du MEEDDM (Ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement Durable et de la Mer), notre pays était peu représenté dans les négociations multilatérales, si ce n'est souvent par des experts. Depuis 2007, la France est mieux représentée.
Quant aux contributions de la France aux organismes multilatéraux de protection de l'environnement, comme ceux qui sont rattachés à l'Organisation des Nations Unies, on doit distinguer entre contributions obligatoires et contributions volontaires. Mais globalement le montant de ces contributions est plutôt faible. Notre action de promotion du développement durable au niveau international repose de plus en plus sur un réseau. Il y a en effet, dans nos ambassades, près de cent correspondants du Ministère des Affaires étrangères et européennes et du Ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement Durable et de la Mer. Leur travail est de plus en plus reconnu. A ce réseau s'ajoutent des partenariats public-privé et une forte implication d'organisations non gouvernementales, formes de coopération dont les travaux convergent dans les forums internationaux. C'est une bonne chose.
Je n'insisterai pas davantage sur les différents points qui sont abordés dans mon rapport. Néanmoins, sur la biodiversité, j'avais présenté un avis évoquant une certaine inquiétude quant à l'issue de la Conférence de Nagoya. Cette inquiétude n'est plus de mise au regard des résultats positifs de cette Conférence : deux accords ont été conclus. Le premier a pour objectif de lutter contre la perte de biodiversité d'ici à 2020, à travers l'augmentation de la superficie mondiale des terres protégées et des parcs nationaux. Le second est un protocole additionnel à la Convention sur la diversité biologique, qui, lui, régit l'accès aux ressources génétiques et le partage des bénéfices de leur exploitation.
La Conférence de Nagoya a également abouti à une décision invitant l'Assemblée générale des Nations Unies à voter d'ici la fin de l'année 2010 une décision en faveur de la création de l'IPBES, qui est l'acronyme anglais pour « Plateforme Intergouvernementale science-politique sur la biodiversité et les services écosystémiques », et qui est une sorte de « GIEC de la biodiversité ». La France est à l'initiative de la création de cette plateforme depuis 2005.
Le succès de la Conférence de Nagoya nous amène à constater des avancées en matière de biodiversité qui contrastent avec les retards pris sur les questions climatiques qui seront évoquées lors de la prochaine conférence de Cancun.
Quant au financement français de l'aide publique au développement, il est au même niveau que le financement allemand. Environ cinq cents millions d'euros seront alloués d'ici 2014 aux actions relevant des aspects environnementaux de l'aide publique au développement.
Je donne un avis favorable aux crédits de l'action européenne et internationale en matière de développement durable.
Comme je vous l'ai dit, il n'y aura pas de discussion générale. Y a-t-il des explications de vote ?
Je souhaite émettre une protestation solennelle contre le mode d'examen des crédits de nombreuses missions budgétaires en commission élargie : sont concernées cette année 18 discussions sur 28 ! Or les débats n'y sont pas organisés, à la différence de l'ordonnancement minutieux de la séance publique. Monsieur le Président, je vous demande d'évoquer cette question en Conférence des présidents et dans cette attente, je refuse de prendre part au vote sur ces crédits.
Monsieur Néri, vous avez participé aux travaux sur le Règlement de notre Assemblée, qui sont à la source du problème que vous évoquez. Sur le fond, je crois que nous sommes tous d'accord pour regretter ce mode de travail d'examen du budget en commission élargie. Cette pratique, je le rappelle, a été largement développée – fort logiquement d'ailleurs de son propre point de vue – par le précédent président de la commission des Finances. Mettons donc à profit la « clause de revoyure » prévue lors de la dernière modification de notre Règlement pour rouvrir ce sujet, de même que celui de la prise en compte de l'assiduité aux réunions de commission sur la base du seul mercredi matin ce qui, de mon point de vue, n'est pas du tout satisfaisant.
Conformément à l'avis du rapporteur pour avis, la commission émet alors un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Écologie, développement et aménagement durables pour 2011.
Projet de loi de finances pour 2011 – Vote sur les crédits de la mission Economie (commerce extérieur)
Mes chers collègues, je vous rappelle que la discussion générale sur ces crédits a déjà eu lieu en commission élargie lundi 25 octobre au soir. Je donne donc la parole à notre rapporteur pour quelques minutes avant de passer au vote.
En préambule, je souhaite m'associer aux critiques à l'encontre du système des commissions élargies. Cette année, les conditions d'un débat vivant et constructif n'étaient pas vraiment réunies et je le déplore.
Le déficit du commerce extérieur de la France, qui atteignait 56 milliards d'euros en 2008, s'est amélioré en apparence en 2009 à 44 milliards d'euros. Mais il faut en ôter le secteur de l'énergie. Le solde hors énergie est passé de – 12 milliards d'euros en 2008 à – 17,5 milliards d'euros en 2009. Pour les six premiers mois de 2010, il s'établit à – 7 milliards d'euros. En comparaison, l'Allemagne a réussi à inverser une tendance de – 18 % l'an dernier pour retrouver une croissance de ses exportations de 20 % cette année, soit 38 % de variation, dans le même contexte conjoncturel et énergétique que le nôtre et avec la même parité euro dollar. Par conséquent, pour la France, l'explication par la conjoncture n'est pas la bonne, même si les difficultés conjoncturelles ne sauraient être méconnues.
Le marché mondial s'est contracté l'an dernier de 12 % ; mais cette année, la tendance est à la hausse, de l'ordre de + 5 % sans amélioration de notre solde. Le problème est bien plutôt structurel. En particulier, les exportations françaises reposent à 94 % sur de grands groupes. La France compte trop peu d'entreprises exportatrices et de surcroît, trop d'entre elles n'exportent que durant une année ; or c'est la persévérance qui est payante en ce domaine.
Dans ce tableau sombre, je veux toutefois mentionner un point très positif : la réforme ayant conduit à la création d'Ubifrance est un grand succès ; cette véritable réussite a d'ailleurs remobilisé certaines chambres de commerce. Les entreprises, qui s'estimaient parfois insuffisamment écoutées par les missions économiques dans leur ancien format, se disent toutes très satisfaites d'Ubifrance aujourd'hui.
Par contraste, toutes sont mécontentes de l'action de la Coface. Cet établissement qui engrange de confortables profits grâce à ses activités privées – qui représentent 95 % de son activité –, ne remplit pas son rôle pour les 5 % restants, qui consistent à apporter aux entreprises exportatrices la garantie de l'État. Lors de la commission élargie, Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du Commerce extérieur, a exprimé son désaccord sur ce point mais je persiste et signe, et je publierai in extenso les propos tenus en audition par le directeur de cet établissement, qui faisait fort peu de cas, eu égard aux généreux profits de la Coface, de sa mission assumée pour le compte de l'État. C'est la raison pour laquelle je préconise le transfert de la mission de garantie publique à Oseo, qui travaille bien plus à l'écoute des entreprises.
Je veux aussi signaler des disparités territoriales dans les performances du commerce extérieur français, qui reflètent le degré d'implication variable des exécutifs locaux. Parmi les « bons élèves », je citerai le Nord-Pas-de-Calais, la Haute- et la Basse-Normandie, Rhône-Alpes, la Bourgogne ou les Pays de la Loire. En revanche, la Bretagne pourrait progresser.
Enfin, les développements géographiques de mon rapport portent cette année sur l'Allemagne. Je le répète : ce pays a su passer d'une tendance des exportations de – 18 % l'an dernier à + 20 % cette année. Cela s'explique notamment par l'existence d'un tissu de PME beaucoup plus dense qu'en France. Cela s'explique également par la bonne santé financière des PME allemandes exportatrices, qui contraste avec la faiblesse de la trésorerie des entreprises françaises, lesquelles ne se tournent généralement vers l'exportation qu'en cas de difficulté sur leur marché domestique.
En outre, les entreprises allemandes ont clairement fait le choix de l'excellence dans un secteur précis, ce qui est l'assurance de parts de marché impressionnantes à l'échelle mondiale : 60 % pour une seule entreprise dans le domaine des compresseurs, par exemple. Enfin, l'accent mis sur la recherche et développement est très important outre-Rhin. Voilà autant d'atouts dont nous devrions, me semble-t-il, nous inspirer en France.
La commission émet alors un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Économie (commerce extérieur) pour 2011.
Informations relatives à la commission