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Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

Séance du 10 juin 2009 à 14h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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  • chambres des métiers
  • compétitivité
  • métiers
  • pôle de compétitivité
  • pôles de compétitivité

La séance

Source

PermalienPhoto de David Habib

Après de nombreuses auditions destinées à apprécier la pertinence de la politique des pôles de compétitivité, la Mission d'évaluation et de contrôle a le plaisir d'accueillir M. François Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat. Avant de laisser notre rapporteur vous interroger, je salue M. Jean-Yves Marquet, conseiller référendaire à la Cour des comptes.

PermalienPhoto de Alain Claeys

L'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat est un observateur précieux, et, je l'espère, un acteur important des pôles de compétitivité. À l'origine, la création de ceux-ci répondait à deux ambitions du Gouvernement : la première, territoriale, consistait à ancrer localement des interfaces entre la recherche et les entreprises autour de thématiques précises de façon à favoriser le développement des PME-PMI ; la seconde, plus globale, était d'améliorer notre compétitivité. Quel bilan dressez-vous de cette politique ? Et que pensez-vous de l'audit qui a été commandé par le Gouvernement ? Enfin, de quelle façon l'APCM s'implique-t-elle dans cette politique ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Avant de vous répondre, je voudrais vous dire que nous sommes honorés d'être auditionnés car, en France, quand on parle des PME, le P de « petites » reste très virtuel. Le réseau des chambres des métiers est au service de 920 000 entreprises qui ne relèvent pas toutes d'un pôle de compétitivité. Seule une petite partie d'entre elles – plusieurs dizaines de milliers tout de même – peuvent y prétendre.

J'éprouve à l'égard des pôles de compétitivité un sentiment très contrasté dans la mesure où leur organisation elle-même n'est pas adaptée aux PME. Beaucoup d'efforts ont été faits en termes de gouvernance, de cohérence, mais une PME artisanale ne peut tout simplement pas participer à la gouvernance car le responsable qui aurait fait ce choix ne pourrait plus s'occuper de son entreprise. Il arrive cependant que des petites entreprises soient impliquées dans les pôles de compétitivité, mais grâce à des charnières que nous avons mises au point, c'est-à-dire des structures de regroupement ou de soutien de nature professionnelle ou consulaire. Certaines chambres des métiers ont en effet regroupé les entreprises concernées de leur secteur dans des pôles de compétitivité. Et, visiblement, cela fonctionne plutôt bien.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Quelle différence faites-vous entre une structure de regroupement et une structure de soutien ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Par exemple, la chambre des métiers de Haute-Savoie fait partie du bureau de l'association Arve Industries, ce pôle spécialisé dans le décolletage. C'est un premier type d'intervention. Ce ne sont pas les entreprises qui sont présentes, mais la chambre des métiers. En Basse-Normandie, un partenariat a été établi avec le pôle de compétitivité pour la filière équine, et la chambre des métiers fait partie de la gouvernance du pôle Transactions électroniques sécurisées.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Une telle démarche, nouvelle pour nous, vous a-t-elle conduit à engager des moyens nouveaux ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Non. Dans la plupart des cas, les subventions sont destinées aux entreprises elles-mêmes et ce sont plutôt les chambres qui ont pris l'initiative d'aller chercher auprès des régions une partie du financement nécessaire. À ma connaissance, il n'y a pas de dispositif ad hoc. J'utilise le terme de « soutien » quand nous portons des potentialités d'entreprises.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Un pôle de compétitivité peut servir une petite entreprise à trouver des débouchés commerciaux, à participer à de la recherche-développement sur des niches et, peut-être, à partager une propriété intellectuelle. Concrètement, dans les pôles où vous êtes impliqué, qu'est-ce qui domine ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Outre les débouchés commerciaux, qui sont un objectif classique, le pôle de compétitivité peut aussi servir à mettre au point des technologies ou des outils adaptés à la production, par exemple avec le Centre européen de recherche et de formation aux arts verriers en Lorraine. En maîtrisant mieux l'outil de production, l'entreprise a pu mieux anticiper la production, et mieux s'adapter au marché.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Avez-vous été sollicité par les auditeurs mandatés par le Gouvernement ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Au niveau national, pas que je sache.

Le résultat de l'audit ne fait que mettre en lumière les difficultés propres aux petites entreprises à trouver des financements et à maîtriser la propriété intellectuelle. Il faudrait pouvoir les accompagner dans le droit de la propriété intellectuelle car, généralement, elles ont du mal à s'y retrouver.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Il me semble qu'en France, deux étapes de la vie de l'entreprise sont particulièrement délicates : la naissance, bien sûr, et la transformation de la petite entreprise en une entreprise moyenne capable d'exporter. Les pôles de compétitivité peuvent-ils aider à passer ce cap ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Le pôle ne permettrait que de mieux maîtriser le processus de production, ce qui serait déjà une bonne chose. Je ne suis pas sûr que les difficultés auxquelles se heurtent les petites et moyennes entreprises françaises par rapport à leurs homologues allemandes viennent de l'accès à la technologie.

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

À des raisons fiscales et sociales. Il faut savoir que 70 % à 80 % des PME allemandes sont des entreprises individuelles. En France, on fait tout pour qu'elles deviennent des sociétés et on a une politique du « tout salarié » depuis quarante ans. Peut-être cela n'encourage-t-il pas les entrepreneurs à être plus actifs.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Si la croissance repart, les PME en seront le moteur.

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Notre réservoir d'ouvriers qualifiés ne suffit pas pour répondre à une demande accrue des entreprises spécialisées. L'autre jour, un de nos constructeurs aéronautiques me disait que les délais de son programme risquaient d'être compromis par l'absence de câbleurs hautement qualifiés et de chaudronniers. Le dispositif de formation professionnelle a été régionalisé au nom de la proximité. Mais il arrive qu'un pôle de production ne trouve pas sur place de quoi satisfaire ses besoins en main-d'oeuvre qualifiée : les jeunes qui veulent s'orienter vers les métiers de base de l'aéronautique ne sont pas assez nombreux dans l'Ouest.

PermalienPhoto de Alain Claeys

C'est un point important, et vous êtes le deuxième à mettre l'accent sur le problème de la formation. Considérez-vous qu'il n'est pas pris suffisamment en compte par les pôles de compétitivité ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Je ne suis pas en mesure de vous répondre.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Pour vous, qu'apporte un pôle de compétitivité ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

La possibilité d'enrichir en technologies les entreprises d'une même filière et de permettre à des entreprises clientes de trouver sur le même site plusieurs fournisseurs qui peuvent, du coup, répondre à des commandes plus importantes. Et ça marche. Par exemple, la Bourgogne possède des pôles de pointe et d'autres qui ne le sont pas. À côté des pôles spécialisés dans l'énergie et les technologies numériques, il y a aussi des pôles spécialisés dans les filières bois ou alimentation. Les objectifs sont différents, selon la nature des entreprises.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Même si vous nous avez dit qu'une petite entreprise n'avait pas sa place dans un pôle de compétitivité.

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Directement, non. À ce propos, nous nous demandions s'il ne faudrait pas obliger les pôles de compétitivité à s'ouvrir un minimum aux petites entreprises, par le biais d'une charte par exemple. Ce serait souhaitable, ne serait-ce que pour les aider à passer le cap dont vous parliez : avant de devenir moyenne, une entreprise a d'abord été petite, forcément. Obliger les pôles à entretenir une pépinière de petites entreprises serait cohérent avec l'approche globale.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Avez-vous eu l'occasion d'en parler à des représentants de l'exécutif ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Non, mais la représentation nationale peut assurer la médiation.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Les grandes entreprises sont-elles sensibles à cet aspect ? En prenant l'exemple d'Airbus, l'avionneur s'est-il entendu avec ses sous-traitants pour pallier les difficultés de formation de la main-d'oeuvre ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

La sous-traitance ne me paraît pas une dimension qui soit intégrée dans la stratégie des grandes entreprises.

PermalienPhoto de David Habib

Pourtant, dans ma région, l'Aquitaine, comme en Midi-Pyrénées, il y a une tradition d'essaimage. Se serait-elle interrompue récemment ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Non, mais les relations sont asymétriques. Les initiatives des petites entreprises ne reçoivent pas d'écho. Nous avons, par exemple, un centre de formation de chaudronniers qui a été mis au point par une entreprise sous-traitante d'Airbus, mais, bien que l'offre soit insuffisante, il n'y a aucune coordination.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Bien que la chaudronnerie propose des métiers bien payés, les sections de formation ne sont jamais pleines et il manque des chaudronniers sur le marché. Comment faites-vous pour impliquer les petites entreprises ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Nous avons contribué à changer l'image de l'apprentissage. Aujourd'hui, nous essayons d'entrer en contact avec l'éducation nationale, qui offre un réservoir de potentialités. L'apprentissage possède désormais une bonne image, l'apprenti un peu moins. Il y a encore du travail à faire. En outre, la quasi-totalité des adolescents n'a aucune idée de ce à quoi ressemble une entreprise. Il faut faire un travail de fond, et nous discutons avec l'éducation nationale car il faut absolument que l'entreprise entre dans les comités d'orientation pour informer sur le contenu de l'activité professionnelle future des élèves.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Avez-vous l'impression que l'éducation nationale est réceptive ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Aujourd'hui, oui. Des progrès considérables ont été accomplis, même s'il en reste à faire. Ainsi, subsiste le problème de la régionalisation : il faudrait pouvoir former à la chaudronnerie dans des régions dépourvues d'entreprises de chaudronnerie pour envoyer ensuite dans des régions qui en possèdent les élèves qui auraient été formés, mais il n'est pas facile d'obtenir des régions qu'elles financent des formations sans que des entreprises de la branche correspondante soient implantées localement. Le problème est le même aussi bien pour les métiers rares que pour les métiers répandus.

Ensuite, une formation d'apprenti mobilise trois acteurs : un apprenti, un maître d'apprentissage et un centre de formation. Ce n'est pas toujours facile.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Vous pilotez tout de même d'importants crédits de formation. À ce titre, vous pesez sur leur orientation.

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Il ne semble pas qu'elle soit décidée en fonction des pôles de compétitivité.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Serait-ce souhaitable ? Avez-vous évoqué cette possibilité avec certaines régions ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Nous avons évoqué le sujet du développement des pôles, mais non celui de la formation.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Avez-vous connaissance que certaines chambres régionales des métiers participent au financement de projets de pôles de compétitivité ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

On dénombre une dizaine de cas, mais les chambres de métiers mobilisent davantage de crédits qu'elles n'en utilisent. Les ressources propres du réseau des chambres de métiers permettent d'assurer les missions régaliennes.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Les chambres des métiers sont tout de même des acteurs importants des plans régionaux de formation.

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Nous sommes au coeur du dispositif. Sur environ 380 000 apprentis, 180 000 relèvent du réseau des chambres des métiers.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Considérez-vous que les chambres des métiers doivent évoluer pour mieux s'adapter à l'existence des pôles de compétitivité ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

Nous avons, depuis une bonne dizaine d'années, une politique de pôles d'innovation qui avait pour but de mettre en commun des ressources intellectuelles pour soutenir le développement d'une filière. Nous en avons une vingtaine et nous travaillons à renforcer la cohérence entre les deux types de structure, le pôle d'innovation plus axé sur l'artisanat pouvant servir de relais avec les pôles de compétitivité.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Faudrait-il désigner une personne au sein de la gouvernance des pôles de compétitivité qui s'occuperait spécifiquement des TPE ?

PermalienFrançois Moutot, directeur général de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat

C'était en quelque sorte ce que je suggérais avec la charte. Elle contraindrait les pôles à se préoccuper des potentialités de coopération avec les petites entreprises, en particulier artisanales, voire à créer des pépinières autour du pôle. Une telle organisation favoriserait et structurerait le développement local.