L'amendement n° 262 vise à supprimer les alinéas 75 à 83, ceux qui ont trait à la sanction.
Comment peut-on encore prétendre que ce texte, qui propose de suspendre l'abonnement à Internet pour une durée pouvant aller jusqu'à un an, est dissuasif et pédagogique ? Il est avant tout répressif. Internet est devenu, pour nos concitoyens, un indispensable outil de travail, d'information et de communication. Il est frappant de découvrir, à la lecture des mails que nous envoient les internautes qui suivent notre débat, les mille façons dont Internet s'est introduit dans leur vie. Pour des raisons d'économie, les pouvoirs publics eux-mêmes ont incité nos concitoyens à déclarer leurs impôts sur Internet, et ils sont de plus en plus nombreux à le faire. C'est un moyen de communiquer avec sa famille, par mail ou par webcam. C'est la possibilité de suivre des cours par correspondance. Dans certains cas, c'est la seule façon d'accéder à une formation ou de rechercher un emploi. C'est aussi, tout simplement, le moyen de travailler en envoyant des mails professionnels. Et c'est encore la possibilité d'inscrire son enfant dans son lycée. Je ne vais pas dresser un inventaire à la Prévert : on le sait, Internet tient désormais une place essentielle dans la vie de chacun d'entre nous.
D'ailleurs, aujourd'hui même, le ministre de l'éducation a rappelé quelle place il tenait à l'école et dans l'effort général pour que nos plus jeunes concitoyens accèdent aux nouvelles technologies. Ce sont d'ailleurs les termes mêmes du rapport Lambrinidis que le Parlement européen vient d'adopter à une très large majorité et qui pose que l'accès à Internet est un droit fondamental pour chacun de nos concitoyens, notamment en matière d'éducation.
Couper l'accès à Internet pour une durée pouvant atteindre une année peut donc avoir de très graves conséquences : c'est priver nos concitoyens de libertés essentielles. Non seulement ce texte est répressif, autorisant une sanction disproportionnée, mais il n'apporte aucune réponse à la vraie question, qui est celle de la juste rémunération des ayants droit à l'ère numérique.
Puisque vous avez à de nombreuses reprises évoqué l'Allemagne, madame la ministre, je voudrais vous citer le propos de la ministre de la justice allemande, Brigitte Zypries, qui s'est intéressée de près à la riposte graduée : « Je ne pense pas que la riposte graduée soit un schéma applicable à l'Allemagne ou même à l'Europe. Empêcher quelqu'un d'accéder à Internet me semble être une sanction complètement déraisonnable. Ce serait hautement problématique d'un point de vue à la fois constitutionnel et politique. Je suis sûre qu'une fois que les premières déconnexions se produiront en France, nous entendrons le tollé jusqu'à Berlin. » Y a-t-il meilleure condamnation d'un dispositif répressif dont nous répétons, une nouvelle fois, qu'il est à la fois dangereux pour nos libertés, inefficace et inutile ?