Cet amendement instaure le plafonnement global. Il comprend deux aspects. Le premier est l'assiette : quelles dépenses fiscales dérogatoires inclut-on dans ce plafond ? Le second aspect, ce sont les différents taux, les modalités de calcul.
S'agissant de l'assiette, comme nous l'avions fait en 2005, nous ne mettons pas dans ce plafonnement l'ensemble des avantages fiscaux qui résultent de situations subies par le contribuable, par exemple la prise en charge de la dépendance ou du handicap, ou encore la déduction des pensions alimentaires.
Nous ne mettons pas non plus sous ce chapeau les déductions fiscales sans contreparties. Par exemple, les dons : la déduction d'impôt peut aller jusqu'à 66 %, voire 75 %, mais il n'y a aucune contrepartie.
Nous ne mettons pas sous plafond, et je rassure en particulier notre collègue Hervé Mariton, ce qui fait maintenant partie du barème de l'impôt : le quotient familial. Mais nous n'y mettons pas non plus, monsieur le président Méhaignerie, monsieur le président Migaud, la prime pour l'emploi, qui fait presque partie, aujourd'hui, du barème de l'impôt sur le revenu.
Et puis, il y a un certain nombre de déductions fiscales qui se font sur l'impôt sur le revenu ou sur l'impôt sur les sociétés selon que l'entreprise est sous forme individuelle ou sous forme de société. Bien entendu, on ne va pas mettre sous le chapeau « impôt sur le revenu » des avantages qui peuvent être consentis dans le cadre de l'impôt sur les sociétés. Tout cela est logique.
Nous reprenons donc le dispositif de 2005. Mais nous sommes très créatifs en matière de dépenses fiscales. Depuis 2005, nous en avons créé de nouvelles. Il est proposé, parmi celles-ci, d'inclure le crédit d'impôt pour les intérêts au titre de l'acquisition du logement, qui était l'une des mesures phares de la loi TEPA, une mesure particulièrement adaptée, je le dis au passage, à cette période de crise immobilière.
Un texte récent a également prévu une réduction d'impôt pour les travaux réalisés sur des objets classés.
À partir de là, quelles sont les modalités ? Elles consistent à combiner une valeur absolue, en l'occurrence 25 000 euros, et un pourcentage du revenu, 10 %. Pourquoi cela ? Parce que si nous avions adopté, comme nous pensions le faire au départ, dans le cadre des travaux de la mission, un système alternatif – soit une valeur absolue, soit un pourcentage du revenu –, cela aurait pénalisé un certain nombre de contribuables dont l'impôt réellement acquitté aurait été supérieur à la valeur absolue retenue mais inférieur à 10 % du revenu. Avec une formule de ce type, au contraire, il y a un lissage continu.
Je vais vous donner quelques exemples, madame Mazetier, qui vous montreront qu'il ne s'agit pas de 1 000 euros.
Prenons un couple sans enfant qui gagne 250 000 euros. C'est un revenu important. Il doit payer, selon le barème, un impôt de 76 000 euros. Avec ce dispositif de plafonnement global, il aura droit à une réduction de 25 000 euros en valeur absolue, plus 10 % de son revenu, soit au total 50 000 euros. Il aura donc à payer la différence entre les 76 000 euros dus au titre du barème et les 50 000 euros plafonnés de réduction d'impôt, dans l'hypothèse où il aura utilisé tous les dispositifs de défiscalisation possibles pour y parvenir. Ce ménage, qui aurait pu défiscaliser la totalité des 76 000 euros, aura ainsi à acquitter environ le tiers de l'impôt normalement dû, soit 26 000 euros.
Ce même ménage, avec 500 000 euros de revenu, devrait avoir une cotisation d'impôt de 176 000 euros. Mais avec le plafond de 25 000 euros plus 10 % du revenu, soit 75 000 euros, il aura à acquitter 101 000 euros, c'est-à-dire la différence entre 176 000 et 75 000. Ce qui est très intéressant, c'est que cela représente pour ce ménage 57 % de ce qu'aurait été sa cotisation s'il n'avait pas du tout défiscalisé.
On voit là que le dispositif est très progressif, et je m'inscris en faux contre les affirmations selon lesquelles il est dégressif. L'impôt sur le revenu est progressif. En prenant 10 % du revenu, on prend un taux proportionnel, alors que l'impôt ne grimpe qu'au fur et à mesure de la progressivité des tranches.
Dernier exemple : le ménage dispose d'un million d'euros. La cotisation d'impôt s'élève à 376 000 euros, le plafond applicable est de 25 000 euros plus 10 % d'un million, ce qui donne 125 000 euros. Le contribuable aura à sa charge la différence entre 376 000 et 125 000, soit 251 000 euros. Grâce à cet amendement de plafonnement global, là où il aurait payé zéro en défiscalisant totalement, il devra payer les deux tiers de l'impôt qu'il aurait normalement dû.
J'en viens maintenant aux « athlètes » les plus performants en matière de défiscalisation, ceux que Didier Migaud et moi-même avons découverts lors d'un contrôle sur pièces et sur place il y a un an à la DLF. Les vingt contribuables qui défiscalisent le plus ont en moyenne un revenu de 2 millions d'euros. Ils devraient payer beaucoup d'impôts. Eh bien, en moyenne, l'État leur rembourse 751 euros, tout simplement parce qu'ils ont réussi à cumuler en moyenne plus de 800 000 euros de réductions d'impôt. Comme ils devraient payer 795 000 euros, l'État leur rend la différence à la fin de l'année.
Avec le plafond global que nous proposons, que se passera-t-il pour ces recordmen de la défiscalisation ? Ils auront droit à un plafond en valeur absolue de 25 000 euros, plus 200 000 euros équivalant à 10 % de leurs revenus, soit 225 000 euros de plafond de défiscalisation. Il leur restera donc à payer la différence entre 800 000 et 225 000 euros. Ces contribuables, au lieu de recevoir un chèque de 751 euros, contribueront donc à hauteur de 575 000 euros. Qu'on ne nous dise pas, monsieur le président de la commission des finances, que notre dispositif de plafonnement n'est pas efficace !
Depuis vingt ans, aucune majorité, aucun gouvernement n'avait osé mettre en oeuvre le plafonnement global parce que c'est un dispositif puissant de vraie justice fiscale. Comme l'a très bien dit Jérôme Chartier, la majorité peut être très fière de réaliser enfin ce qu'aucune autre avant elle n'avait réussi à faire.