…tout juste réintroduit par Catherine Trautmann, rapporteure du Paquet Télécom en deuxième lecture, et qui, faut-il le rappeler, madame la ministre, vous a précédée rue de Valois.
Outre cet amendement qui vous dérange tant, la Commission européenne reste très réticente à l'idée de laisser à un organe administratif un tel pouvoir de suspension, soulignant très justement que « la réalité de l'utilisation actuelle d'Internet dépasse largement l'accès aux contenus ». En effet, la Commission vous a rappelé, comme nous le faisons aujourd'hui, qu'un nombre grandissant de services au public est fourni par Internet, moyen qui se substitue de plus en plus aux canaux traditionnels de communication.
Je vous invite à lire ou à relire la résolution du Parlement européen, adoptée par 586 voix contre 36, le 10 avril 2008, sur les industries culturelles en Europe. Cette résolution met en avant deux principes intéressants. Tout d'abord, les députés européens ont souligné que « la criminalisation des consommateurs qui ne cherchent pas à réaliser des profits ne constitue pas la bonne solution pour combattre le piratage numérique ». Le Parlement européen a également engagé « la Commission et les États membres à éviter l'adoption de mesures allant à l'encontre des droits de l'homme, des droits civiques et des principes de proportionnalité, d'efficacité et d'effet dissuasif, telles que l'interruption de l'accès à Internet ». Jusqu'à quand le Gouvernement va-t-il faire comme si ces recommandations européennes n'existaient pas ?
La suspension de l'abonnement constitue une sanction disproportionnée. Cette appréciation est visiblement partagée jusque dans les rangs de la majorité, comme en témoigne l'adoption en commission d'un amendement visant à ce que la sanction de suspension relève de l'unique autorité judiciaire saisie par la commission de protection des droits, ainsi que d'un amendement remplaçant la procédure de la suspension par une amende.
Face à l'expression de ces doutes, vous avez, madame la ministre, lors de votre audition en commission, affirmé avec quelque légèreté qu'il ne s'agissait absolument pas d'une atteinte aux libertés, dans la mesure où l'internaute dont l'abonnement aura été suspendu aura toujours la possibilité de se rendre chez des voisins ou de la famille pour se connecter à Internet.