Le groupe SRC a choisi de consacrer sa séance réservée du 9 juin à l'examen d'une proposition de loi, qui avait déjà été déposée en 2006, sous la précédente législature, avant de l'être à nouveau en 2008, sous la législature actuelle. Nous vous proposons, en adoptant ce texte, de franchir une nouvelle étape vers l'égalité des droits, de supprimer une discrimination et, douze ans après l'adoption de la loi sur le PACS, d'élargir la liberté des couples de même sexe pour déterminer le choix de leur vie commune.
La loi sur le PACS a permis, outre la reconnaissance, non seulement symbolique, mais aussi légale, des couples de même sexe, leur entrée dans le code civil. Le 1er janvier 2010, on comptait un million de pacsés et, cette année-là, 203 882 PACS ont été signés, preuve qu'en douze ans le PACS s'est installé dans la société, répondant à une véritable demande. En 2010, trois PACS ont été signés pour quatre mariages, 6 % des pacsés étant de même sexe.
La proposition de loi vise à inscrire notre pays dans une évolution générale. L'Union européenne, qui participe au mouvement de lutte contre les discriminations, promeut depuis longtemps la reconnaissance du mariage homosexuel. Elle l'a fait notamment en 1994, en 2001 et en 2003, par le biais de résolutions du Parlement européen, qui ne revêtent certes pas de caractère contraignant. Sept États membres ont reconnu le mariage homosexuel, le premier ayant été les Pays-Bas en 2001 et, le dernier, l'Islande en 2010. À travers le monde, d'autres pays ont effectué la même démarche, comme le Canada en 2005, l'Afrique du Sud en 2006 et l'Argentine en 2010. C'est aussi le cas de cinq États des États-Unis, et de la ville de Mexico. Des sociétés comparables aux nôtres, certaines de tradition catholique marquée, n'ont pas été ébranlées par la reconnaissance du mariage homosexuel.
La proposition de loi vise à ouvrir un droit supplémentaire aux uns sans réduire celui des autres. En l'adoptant, la France, pionnière en 1999, cesserait d'être à la traîne des pays européens. Elle résoudrait en outre le problème né de la libre circulation au sein de l'Union de couples binationaux ou de couples de Français de même sexe ayant contracté dans un pays de l'Union un mariage non reconnu en France.
Je salue le rôle qu'a joué Noël Mamère, qui a ouvert le débat en célébrant le 5 juin 2004, à Bègles, un mariage entre deux hommes. Quand celui-ci a été annulé le 13 mars 2007 par la Cour de cassation, l'avocat général a déclaré : « Abandonner à la seule autorité judiciaire le soin de se prononcer (…) paraît exiger du juge qu'il accomplisse une tâche excédant les limites permises de son action », ce qui revient à pointer notre responsabilité de législateurs.
Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel a adopté le 28 janvier 2011 une position comparable. Considérant que l'interdiction du mariage entre deux personnes de même sexe n'est pas contraire à la Constitution, il a néanmoins précisé qu'il est « à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d'adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité ». C'est à ce titre que Jean-Marc Ayrault, président du groupe SRC, a choisi d'inscrire l'examen de ce texte à l'ordre du jour de la séance du 9 juin. Nous devons effectuer un choix politique, au sens le plus noble du terme, en ouvrant le mariage aux couples de même sexe sans modifier les règles qui régissent le mariage hétérosexuel.
La proposition de loi compte quatre articles. Le premier rétablit dans le code civil un article 143, selon lequel le mariage peut être contracté par deux personnes de sexes différents ou de même sexe. Le deuxième en tire les conséquences en matière d'interdiction du mariage au sein des familles. Le troisième vise à maintenir la présomption de paternité prévue par l'article 312 du code civil, en la réservant explicitement aux seuls couples mariés composés d'un homme et d'une femme, qui en bénéficient actuellement. Le quatrième procède au toilettage des termes utilisés dans différents articles du code civil.
Je remercie tout particulièrement ceux de nos collègues qui m'ont écouté avec attention, et un peu moins ceux qui, en bavardant continuellement, ont provoqué un bruit de fond particulièrement pénible.