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Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 12 octobre 2010 à 21h30
Gestion de la dette sociale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

J'observe que, lorsque nous étions au pouvoir, la question du financement des déficits ne se posait pas : pendant deux ans, les comptes étaient à l'équilibre ou en très léger déficit, à tel point que ce n'était pas une question se posant dans le débat public pour les années suivantes.

Notre responsabilité, à l'époque, était de prendre en compte le déséquilibre démographique annoncé comme devant intervenir à partir de 2020 par les travaux du COR. Nous avons donc créé le fonds de réserve des retraites que vous avez quasiment cessé d'abonder depuis 2003 et qui constitue néanmoins, aujourd'hui, une épargne collective de 31 milliards d'euros.

Par votre projet, qui s'inscrit dans le cadre de la réforme des retraites, vous proposez d'avaliser le siphonnage immédiat de ce fonds sur la période 2012-2018, en laissant sans réponse la question du déséquilibre démographique à partir de l'année 2020.

Au contraire, nous avons, nous, dans le projet défendu par le Parti socialiste, comme objectif de maintenir le fonds de réserve des retraites, car le pic démographique sera une réalité quoi que l'on fasse, et de l'abonder à nouveau par une recette dédiée provenant d'une majoration de l'impôt sur les sociétés payé par les banques.

Sur cette première question, nous avons donc deux réponses politiquement très différentes. Nous estimons que la vôtre relève de la fuite en avant, dans la mesure où le problème démographique n'aura pas disparu à l'horizon 2020.

Le deuxième échec que constate ce projet de loi est celui de la loi organique du 27 août 2005. Déjà, en 2005, des voix s'étaient élevées dans vos rangs pour s'insurger de ce report de la dette sur les générations futures. Les principes alors retenus dans la loi, reconnue par décision du conseil constitutionnel comme étant une loi organique, avaient permis d'emporter la conviction de la majorité, puisque – c'était juré – ce report était le dernier auquel vous consentiez.

Or, aujourd'hui, le Gouvernement nous propose tout simplement de renier cet engagement et d'allonger à nouveau de quatre ans la durée d'amortissement de la CADES. Nous avons bien noté les discussions et les réactions exprimées lors du travail en commission.

Sauf à déformer les propos des rapporteurs, c'était bien le principe même de ce nouveau report qui était combattu, nous partagions les critiques et les arguments exposés. Le débat en commission, comme – pour partie – le débat dans notre hémicycle, portait bien sur le principe même de ces quatre années d'amortissement supplémentaires, et pas uniquement sur le caractère pérenne ou non des nouvelles ressources affectées à la CADES.

La solution que vous envisagez aujourd'hui, qui fait l'objet d'un amendement déposé par la commission des finances, est, en réalité, un jeu de bonneteau. Transférer des ressources pérennes à la CADES pour affecter aux régimes sociaux des recettes incertaines est un tour de passe-passe qui ne trompe personne et auquel la majorité ne pourra se rallier que par pure discipline et certainement pas par conviction.

La fuite en avant que constituent le siphonnage du fonds de réserve des retraites et le renvoi aux générations futures de la dette accumulée est, vous en conviendrez, une solution de facilité que le mot de « courage » dont vous vous prévalez pour justifier votre politique ne saurait qualifier. Il n'y a en effet aucun courage à renvoyer à demain le paiement de la dette sociale et à faire payer immédiatement le prix de la crise aux victimes de la crise. (Mme Marylise Lebranchu applaudit.)

Vous évacuez ainsi un débat fondamental : celui du financement de notre modèle social et beaucoup, me semble-t-il, y compris dans la majorité, partagent l'idée que ce débat est urgent et que la pire des solutions est de le renvoyer à demain, c'est-à-dire – on le voit bien en filigrane de ce texte – après les grands rendez-vous démocratiques avec le peuple, après l'année 2012.

Or le texte dont nous débattons est une loi organique, non une loi ordinaire, et c'est bien parce que c'est une loi organique qu'elle a été examinée par la commission des lois : elle touche aux principes. Une loi ordinaire ne pourrait faire cela, et c'est bien toute la difficulté de votre démarche, puisque vous êtes obligés, aujourd'hui, de défaire par une loi organique ce que vous aviez vous-même fait par une précédente loi organique qui fixait les principes. Vous nous invitez donc, en quelque sorte, à bafouer les principes que le Parlement avait entendu fixer dans une autre loi.

Si nous avions un débat sur notre modèle social et sur les modes de financement, nous aurions, j'en suis certain, des désaccords profonds avec M. Warsmann, avec M. Bur et avec une partie des députés de la majorité qui les soutiennent aujourd'hui, mais il ne s'agit pas, en l'occurrence, de savoir quelle réponse apporter : il s'agit de savoir si l'on pose même la question.

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