Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes un spécialiste en remodelage de circonscriptions et avez une connaissance experte de notre carte électorale. Aussi vais-je vous faire part de quelques observations concernant le découpage prévu pour le département du Tarn.
Je ne reprendrai pas l'intégralité du propos de M. Philippe Folliot, que je connais bien pour l'avoir côtoyé au conseil général.
Il convient, paraît-il, de ramener de quatre à trois le nombre total des circonscriptions du Tarn. Pour y parvenir, vous êtes tenu de proposer un découpage délimitant des circonscriptions sur des bases essentiellement démographiques, respectant au mieux l'égalité devant le suffrage.
Vous nous expliquez que la délimitation proposée tente de répondre à un équilibre démographique des populations. Ce devrait être simple à réaliser. Or Bruno Le Roux a démontré, hier, que votre découpage ne répond pas à ce simple critère d'équilibre démographique.
Le rapport de la commission des lois précise, page 195, les écarts démographiques entre circonscriptions. Les nouveaux écarts par rapport à la moyenne départementale vont de moins 9,27 % à plus 6,05 %. La différence entre la circonscription la plus peuplée et la circonscription la moins peuplée est de 18 663 habitants.
Ce n'est donc pas le critère démographique qui a motivé le remodelage proposé pour le Tarn.
Vous avez consulté, sous l'égide du préfet, les groupes politiques du département. Ils ne vous ont pas suggéré ce remodelage, à l'exception de l'UMP, mais j'y reviendrai.
Vous avez transmis pour avis votre projet à l'examen approfondi de la commission indépendante de contrôle sur le redécoupage électoral, dite « commission Guéna ».
Dans son avis public du 23 juin dernier, celle-ci déclare à propos de votre projet : « Le projet de redécoupage détermine un écart démographique […] qui, sans être considérable, s'avère significatif dans un département dont le nombre de circonscriptions est ramené à trois. […] La commission propose d'approcher au mieux l'objectif d'équilibre démographique par un redécoupage qui, reprenant les grandes lignes de celui de 1958, repose sur la distinction traditionnelle des bassins de vie d'Albi et Carmaux, Castres et Mazamet, et enfin Gaillac, Graulhet et Lavaur. » Je m'arrête là, monsieur le secrétaire d'État, car la commission énumère ensuite les cantons autour desquels s'articulerait le remodelage proposé.
Vous ne tenez pas compte de la proposition de la commission Guéna.
Avez-vous retenu, alors, des critères géographiques pour appuyer votre proposition ? Il n'en est rien, puisque vous rattachez le canton d'Albi-Ouest aux cantons d'Albi-Nord-Ouest et Albi-Nord-Est, antérieurement séparés par la rivière Tarn, frontière entre les deux circonscriptions. Il devient donc impossible de se repérer entre les deux nouvelles circonscriptions, puisque vous rattachez trois cantons d'Albi à deux cantons de Castres. Même votre prédécesseur M. Pasqua, qui était un expert, et dont vous étiez alors le collaborateur, n'avait pas osé faire cela !
Avez-vous retenu un critère historique ? Il n'en est rien. Le département du Tarn a été créé en 1790 en regroupant trois évêchés : Albi, Castres et Lavaur.
Avez-vous retenu un critère économique, respectant la cohérence des bassins de vie et des communautés d'agglomération ? Il n'en est rien. Vous partagez les deux communautés d'agglomération, distantes de 40 kilomètres, et regroupez une partie de celle d'Albi avec une partie de celle de Castres-Mazamet en retenant trois cantons d'Albi sur six et deux cantons de Castres sur quatre, qui ne sont même pas reliés par une route départementale, car vous avez rattaché les deux autres cantons de Castres – Castres-Nord et Castres-Ouest – à une autre circonscription, formant ainsi un barrage entre les circonscriptions nouvelles.