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Intervention de Philippe Folliot

Réunion du 13 janvier 2010 à 21h30
Délimitation des circonscriptions des députés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Folliot :

En effet, toute marge de manoeuvre ne saurait être utilisée pour satisfaire des intérêts purement catégoriels, purement électoralistes, de clientélisme : il y aurait là une forme de détournement de pouvoir qui pourrait tenter le Gouvernement, d'où un contrôle, aussi bien par le Conseil d'État que par le Conseil constitutionnel, étant d'ailleurs observé que c'est justement pour éviter ces formes de dérive que la Constitution a déjà prévu une commission indépendante, étant observé que de surcroît – on voit ici à quel point la procédure est rigoureuse et minutieuse –, le Conseil d'État est également saisi pour avis sur les points les plus délicats, où un arbitrage peut encore être possible afin d'éviter toute forme de dérive antinomique avec nos principes républicains les mieux assurés, qui doivent être la référence absolue.

Le quatrième alinéa du II du 1° de l'article 2 de la loi du 13 janvier 2009 autorise, pour permettre la prise en compte d'impératifs d'intérêt général, des écarts de population entre les circonscriptions dans la limite de 20 % par rapport à la population moyenne des circonscriptions du département ou de la collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution.

Le Conseil constitutionnel estime dans son considérant 26 « qu'en elle-même, chacune de ces trois dispositions ne méconnaît pas la Constitution ; que les deux premières peuvent être utilement employées pour garantir l'égalité devant le suffrage ; qu'elles pourraient, toutefois, par leur cumul ou par les conditions de leur application, donner lieu à des délimitations arbitraires de circonscription ou aboutir à créer des situations où le principe d'égalité serait méconnu ; qu'en conséquence, la faculté de ne pas constituer une circonscription en un territoire continu, celle de ne pas respecter certaines limites communales ou cantonales lorsque les conditions précitées le permettent, ainsi que la mise en oeuvre de l'écart maximum mentionné au quatrième alinéa du 1° du II de l'article 2 doivent être réservées à des cas exceptionnels et dûment justifiés ; qu'il ne pourra y être recouru que dans une mesure limitée et en s'appuyant, au cas par cas, sur des impératifs précis d'intérêt général ; que leur mise en oeuvre devra être strictement proportionnée au but poursuivi ; que toute autre interprétation serait contraire à la Constitution ».

Ces motifs de l'arrêt donnent le ton, en quelque sorte, du respect des règles et principes qui s'appliquent à la matière. Tout d'abord, il faut examiner les situations au cas par cas ; il y a ici un principe de réalité qui s'impose. De plus, doivent être respectés des impératifs précis d'intérêt général, ce qui exclut toute autre considération qui ne serait pas tirée de l'intérêt général.

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel rappelle un principe de proportion par rapport au but poursuivi. Là encore, on voit à quel point la matière est strictement encadrée, justement pour éviter toute forme de dérive, toute prise en compte d'intérêts qui seraient en total décalage avec ce que postule l'intérêt général.

Bref, le Conseil constitutionnel, dans sa grande sagesse, a donné en quelque sorte une feuille de route, un cadre d'interprétation pour que le redécoupage soit démocratiquement sain et durable.

La commission Guéna a raisonné en tenant compte de ces principes directeurs, dans la mesure où la Constitution, dans sa version issue de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, a limité le nombre de députés à 577 et prescrit que les Français établis hors de France seront désormais représentés à l'Assemblée nationale. La commission a travaillé par rapport à une répartition des sièges qui doit s'opérer sur des bases essentiellement démographiques, fondées sur les résultats du dernier recensement connu.

Compte tenu des principes ainsi rappelés, la commission a validé le nouveau chiffre de la population moyenne par circonscription, établi en divisant la population totale à représenter par le nombre de sièges à pourvoir et fixé par le Gouvernement à 127 000 habitants. Sur le plan de la méthode de travail, la commission Guéna a cherché à réaliser une synthèse harmonieuse entre une règle de calcul reposant sur des critères essentiellement démographiques et une approche tenant compte également de la réalité historique et humaine. Je vous renvoie à cet égard à la page 51 du Journal officiel, lois et décrets du samedi 27 juin 2009, annexe n° 147.

Il ressort encore de l'avis public de la commission consultative prévue par l'article 25 de la Constitution qu'elle s'est notamment souciée, même lorsque l'équilibre démographique pouvait apparaître satisfaisant, « de la pertinence et de l'objectivité des projets qui lui étaient soumis ». Ainsi, cette commission indépendante s'est montrée particulièrement rigoureuse dans sa méthode, justement dans le but d'éviter toute forme de clientélisme, mais aussi de subjectivité purement politique, dans la mesure où – faut-il le rappeler ? – la tentation peut être grande pour le Gouvernement de faire pencher çà et là le fléau au gré de considérations politiciennes parfaitement contraires aux exigences de l'intérêt général. Or, ces exigences doivent également être omniprésentes dans des opérations aussi délicates que le sont les redécoupages : un redécoupage – faut-il, là encore, le rappeler ? – a vocation à perdurer, cependant que les clientèles politiques passent.

Ayant eu connaissance des intentions du Gouvernement s'agissant du redécoupage des circonscriptions dans le département du Tarn, et n'ayant malheureusement pas pu me faire entendre, spécialement de vous-même, monsieur le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales…

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