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Intervention de Marc-Philippe Daubresse

Réunion du 3 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2010 — Politique des territoires

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc-Philippe Daubresse :

Monsieur le ministre, le budget que vous nous présentez s'inscrit dans la continuité de l'action de vos prédécesseurs. Cette année, cependant, derrière ce que d'aucuns pourraient considérer comme une petite mission comparée à d'autres domaines budgétaires, il y a, en réalité, de grandes ambitions.

En effet, le Président de la République a décidé de faire du ministère de l'espace rural et de l'aménagement du territoire un ministère de plein exercice. Il y a, par ailleurs, affecté un homme dont nous connaissons depuis longtemps l'enracinement dans son territoire, un élu local chevronné qui maîtrise tous les problèmes en question. Enfin, le 27 octobre dernier, le Président de la République a prononcé dans le Jura un discours refondateur qui a mis en avant les enjeux agricoles mais aussi ceux de la ruralité, avec tout ce que sous-tend ce concept.

Monsieur le ministre, au nom du groupe UMP, je vous parlerai du budget que nous examinons mais, comme l'a fait mon prédécesseur à cette tribune, Thierry Benoit, je veux surtout vous faire part de quelques réflexions relatives aux chantiers que vous engagez, et notamment aux assises du monde rural.

La feuille de route de votre budget est très claire. La coordination des interventions en matière de politique d'aménagement des territoires est confiée à la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, qui dispose de moyens d'actions et de fonctionnement propres, regroupés dans le périmètre du programme 112 au sein de la mission « Politique des territoires ». Pour 2010, ce programme, pivot de la mise en oeuvre de cette politique des territoires, disposera de 345 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 341 millions d'euros en crédits de paiement. Nous pouvons nous en réjouir car nous n'avons pas toujours connu une situation aussi favorable.

Le Gouvernement a tenu à maintenir les lignes de crédit et à rendre visible une politique nationale inscrite dans l'espace européen alors que le contexte économique est peu favorable. Cette volonté de ne pas reculer et de préserver des budgets essentiels pour l'avenir, l'aménagement et la compétitivité de nos territoires mérite d'être saluée.

À l'heure des mutations démographiques, alors que les mouvements de migration tendent à la concentration de la population à l'extérieur des villes pour y vivre, et à l'intérieur pour y travailler, il est de notre devoir de nous adapter, de faire évoluer nos services publics, d'organiser un nouveau maillage territorial, et d'être créateurs d'intelligence, d'ingéniosité et d'attractivité.

Parce que des dizaines de milliers de personnes font chaque année le choix de l'attractivité des territoires ruraux pour une meilleure qualité de vie, pour des services publics plus accessibles, mais aussi parce que les problèmes de cohésion sociale qui s'y posent sont très forts, l'État, avec ce budget, anticipe ces mouvements et favorise le rééquilibrage par régions.

Le programme 112 vise trois objectifs : le soutien à l'attractivité des territoires ; l'accompagnement des mutations économiques et le renforcement de la cohésion sociale et territoriale ; la conception et le pilotage de l'action publique en matière d'aménagement du territoire.

C'est bien un contrat « gagnant-gagnant » que vous nous proposez, monsieur le ministre, à travers les lignes principales de ce budget. Ainsi, la nouvelle génération de pôles d'excellence rurale, pour les projets de l'espace rural d'ici à l'été 2010, va dans le bon sens en aidant les territoires ruraux à bâtir des stratégies spécifiques et diversifiées de développement durable, et en valorisant leurs atouts propres pour renforcer leur attractivité, notamment par l'accueil de nouvelles populations et la valorisation des bio-ressources.

Trois cent soixante-dix-neuf pôles d'excellence rurale ont été labellisés en 2005, 35 000 emplois ont été créés et 1,2 milliard d'euros d'investissement ont été générés : si certains ont pu contester les objectifs qui ont présidé à la création de ces pôles, il est clair que les résultats sont au rendez-vous.

Autre exemple : le soutien au développement des pôles de compétitivité et aux grappes d'entreprises. Soixante et onze pôles, regroupant près de 7 000 entreprises ont été labellisés depuis 2005. L'annonce que vous avez faite, le 29 octobre dernier, d'un appel à projets pour le soutien des grappes d'entreprises est un élément majeur du renforcement de la compétitivité des entreprises, et notamment des PME, ainsi que de leur ancrage territorial. Cet appel sera doté d'un budget spécifique de 20 millions d'euros en 2010 et 2011.

L'attractivité des territoires passe également par l'intervention de l'AFII, l'Agence française pour les investissements internationaux, à travers ses missions de prospection et d'animation. Elle recherche à l'étranger des projets d'investissement et suit, en lien avec les agences régionales de développement, les modalités de leur implantation sur le territoire national.

Il reste qu'à nos yeux votre action la plus importante, monsieur le ministre, est le grand chantier des assises des territoires ruraux. Vous avez proposé dans ce cadre l'élaboration d'un programme d'actions visant à développer l'attractivité des territoires. Ces assises, qui se déroulent en ce moment et dureront jusqu'en janvier 2010, rassemblent différents acteurs afin de dégager certaines lignes de force.

Je m'abstiendrai d'insister longuement sur la question de la fracture numérique et sur la nécessité de ne pas laisser subsister de zones blanches : Thierry Benoit vient de le faire remarquablement. Je me contente d'associer l'UMP aux propos qu'il a tenu : les préoccupations dont il vous a fait part sont en effet partagées sur tous les bancs de la majorité présidentielle. Nous ne doutons pas que vous nous apporterez des réponses qui, à défaut d'être techniquement opérationnelles immédiatement, pourront nous donner une visibilité pour l'avenir.

J'en viens à d'autres enjeux. En effet, tout le monde sait que le monde rural, à l'image du monde agricole, est divers – les problèmes du Vexin ne sont pas ceux du Quercy – et qu'il appelle toute une série d'évolutions.

Au passage, monsieur le ministre, je vous soumets une idée qui n'a sans doute pas été abordée pour l'instant aux assises du monde rural. Je l'évoque aussi en tant que président de l'Agence nationale de l'habitat, même si je m'exprime d'abord comme parlementaire. Nous devons réfléchir à la nécessité de construire de plus en plus de logements sociaux dans les zones tendues urbaines. Nous devons faire un effort afin de « reconcentrer » ces logements là où le besoin est le plus grand. En France, de nombreuses zones accueillent des logements neufs alors qu'elles ne sont pas celles où le besoin est le plus important.

Mais il nous faut aussi mieux utiliser le parc locatif ancien en zone rurale. Nous pourrions ainsi engager une action vigoreuse – c'est une piste de réflexion que je vous soumets –, en utilisant des outils existants, tels ceux qui ont été créés par la loi de cohésion sociale, à laquelle j'ai contribué. Je pense à des opérations programmées d'amélioration de l'habitat, à des opérations coordonnées liées à une thématique précise – par exemple, le maintien à domicile des personnes âgées, qui est un sujet important – ou encore à des actions de lutte contre la précarité énergétique. C'est en effet plutôt dans les zones rurales, où l'on trouve beaucoup de petites maisons mal isolées, de véritables passoires thermiques, que l'on peut obtenir les gains énergétiques les plus importants. Nous serions ainsi fidèles aux engagements du Grenelle de l'environnement, auquel Christian Jacob a beaucoup travaillé, en contribuant à l'amélioration de l'efficacité énergétique.

Ces actions se trouveraient donc au barycentre de trois politiques : politique d'aménagement du territoire, politique sociale et politique environnementale. Au reste, si vous fixiez ce cap, un certain nombre d'organismes, notamment l'Agence nationale de l'habitat, y participeraient volontiers, de sorte que nous pourrions recentrer plusieurs aides sur ces actions. Je sais également, pour lui en avoir parlé, que le secrétaire d'État au logement partage cette idée. La problématique du logement doit donc s'ajouter à celle de la fracture numérique.

Quant aux services publics, nous sommes évidemment soucieux qu'ils desservent mieux certains points du territoire, dont la survie dépend de leur présence. Toutefois, nous devons réfléchir à la forme qu'ils doivent revêtir – je pense, par exemple, à la polyvalence des points poste. Il en va de même pour la problématique des personnels de santé : la volonté d'améliorer l'efficacité financière et sanitaire d'un certain nombre d'équipements stratégiques doit s'accompagner de l'implantation de centres médicaux dans les secteurs reculés du territoire, selon des conditions qui ont été définies dans toute une série de dispositions législatives. Sur ces différents sujets, il nous manque une vision cohérente et territorialisée.

De ces assises, nous attendons bien entendu que des objectifs soient définis et que les engagements pris depuis longtemps par le Président de la République soient concrétisés. Mais nous attendons également que des pistes de réflexion innovantes cherchent à mettre en cohérence les outils et les moyens existants, qui, parce qu'ils ne bénéficient pas des effets de levier et de la territorialisation de ces politiques, n'ont pas forcément toute l'efficacité nécessaire.

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