Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, la sécurité sociale est dans la tourmente.
Tout le monde s'accorde à dire, le gouvernement en premier lieu, qu'à une crise structurelle du financement de la sécurité sociale, qui dure du fait d'un niveau de recettes insuffisant par rapport aux besoins élémentaires à couvrir, s'ajoutent les effets dévastateurs de la crise qui accable tous les budgets publics : chute des rentrées de cotisations et contributions dues à la montée en flèche du chômage, à la précarité, et au blocage des salaires et des prestations.
Un rapport du Sénat de juillet 2009 a qualifié la récession actuelle de « dramatique pour les finances sociales, situation totalement inédite face à laquelle les solutions habituelles seront insuffisantes. La résorption des déficits massifs ne pourra passer que par une croissance des recettes durablement plus forte que la croissance des dépenses. La sécurité sociale ne résistera pas à plusieurs années d'un déficit de 30 milliards d'euros. Sa survie suppose une action rapide, le risque étant réel de voir émerger des solutions qui constitueraient une remise en cause profonde du système actuel auquel la très grande majorité des Français est viscéralement attachée. »
Conscient des causes de la crise sans précédent qui frappe la sécurité sociale, on aurait pu imaginer que les mesures proposées dans ce PLFSS 2010 seraient de nature exceptionnelle et appropriée pour que les assurés sociaux, les familles et les retraités ne payent pas pour une crise dont ils ne sont absolument pas responsables.
Il y a quelques mois, vous avez concocté un plan de sauvetage pour que le secteur bancaire évite la faillite, en mettant à contribution les finances publiques. Aujourd'hui, de ce fait, ce secteur va, paraît-il, beaucoup mieux et renoue par ailleurs avec des pratiques qui ont amené à cette crise.
Dans le même ordre d'idées, n'aurait-il pas été judicieux de conforter les droits des assurés sociaux, des familles et des retraités, et de suivre les préconisations de l'Organisation internationale du travail, qui affirme qu'une protection sociale plus forte, si elle est bien conçue, peut servir des objectifs d'emploi, être plus redistributive et plus égalitaire ?
La protection sociale est un stabilisateur automatique de l'économie, et, par temps de crise, il faut non pas moins, mais plus de protection sociale.
Des mesures légitimes, faciles à réaliser avec un rendement immédiat, auraient ainsi pu être mises en oeuvre. On pourrait citer la révision des exonérations des cotisations sociales, qui sont un facteur majeur de dévalorisation du travail et qui atteignent une trentaine de milliards d'euros dont deux milliards d'euros de pertes sèches pour la Sécu, actuellement non compensées par le budget de l'État. Les compensations par l'État portent atteinte aux finances publiques et sont autant de sacrifices imposés aux salariés.
On aurait pu envisager de s'engager encore plus franchement vers un alignement des taux des cotisations et contributions sociales portant sur les revenus salariaux de toute nature – intéressements, participations, épargnes salariales, retraites chapeaux, stock-options, distributions gratuites d'actions –, en un mot élargir la base de cotisations et de parvenir ainsi à de nouvelles ressources qui permettraient de pérenniser notre système de protection sociale.
Dégager les ressources nécessaires pour garantir des retraites décentes pour tous, contribuerait à la relance de la demande par la consommation, et, par suite à la relance de l'investissement.
Il est aujourd'hui insupportable de voir le faible niveau d'un trop grand nombre de retraites et de ne pas réagir face au désarroi de personnes âgées fragilisées qui souffrent en silence et que nous avons l'occasion de rencontrer de plus en plus fréquemment dans nos permanences.
En fournissant les ressources nécessaires pour se soigner au lieu de chercher à réduire les dépenses médicales en les reportant sur les ménages, on répondrait non seulement à un souci élémentaire de justice sociale, mais aussi au développement d'un secteur – les biens et services médicaux – qui représente environ 10 % du PIB et une contribution majeure au développement de l'innovation et de la recherche.
Enfin, les prestations familiales devraient compenser de manière juste les charges familiales, en favorisant l'articulation entre la vie professionnelle et la vie familiale, et en permettant aux familles d'entretenir et d'éduquer leurs enfants dans de bonnes conditions, ce qui constitue un investissement pour l'avenir.
Quand on regarde de plus près les articles concernant la branche famille de ce PLFSS pour 2010, on constate avec stupéfaction le manque d'ambition des mesures proposées, la stagnation des prestations témoignant d'une absence de soutien d'une vraie politique familiale. Notre santé et notre protection sociale doivent être une priorité de l'action publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)