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Intervention de Yves Cochet

Réunion du 14 octobre 2009 à 15h00
Délimitation des circonscriptions des députés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Cochet :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, je commencerai par quelques propos convenus : bien sûr, nous n'entendons pas remettre en cause la nécessité du redécoupage. Il en fallait un, afin de remédier aux écarts démographiques entre des circonscriptions qui datent de 1986. Nous élisons nos députés à partir d'une carte électorale et d'une répartition démographique vieilles de plus de vingt ans. Depuis, il y a eu deux recensements – l'un en 1990, l'autre en 1999 – et la France est passée de 54 à 63 millions d'habitants.

Malheureusement, les gouvernements de Lionel Jospin, de Jean-Pierre Raffarin, de Dominique de Villepin et de François Fillon n'ont pas modifié le découpage électoral, malgré l'obligation légale et les recommandations du Conseil constitutionnel, jusqu'à présent. Il fallait donc le faire, car les circonscriptions ont bougé. C'est d'ailleurs une obligation constitutionnelle, puisque l'article 3 impose un suffrage toujours égal. Bien entendu, « égal », c'est de l'arithmétique et de la politique. En fait, il y a peu d'arithmétique et beaucoup de politique.

L'obligation de redécoupage était donc connue, mais la méthode et le résultat n'ont pas du tout été équitables, ce que je vais essayer de démontrer. D'abord, la méthode aurait pu être plus consensuelle ; elle ne l'a pas été, ce qui a provoqué différentes polémiques déjà largement évoquées sur ces bancs, notamment sur ceux de l'opposition. Quelles sont ces polémiques ? Reposent-elles sur des arguments sérieux ?

Première chose que nous pouvons déplorer dans ce redécoupage : une méthode faite d'ambiguïté et de dissimulation. En effet, la méthode fut plutôt silencieuse, mystérieuse, obscure. Pour notre part, en tant que députés écologistes, nous n'avons pas réellement pu influer sur les tracés proposés pour les nouvelles circonscriptions. Le manque de concertation, le caractère définitif de cette carte sont des signes inquiétants qui ne laissent présager rien de bon tant pour la diversité politique que pour la visibilité démocratique.

À ce propos, j'aimerais d'ailleurs citer ceux de M. Marleix, dans le journal Le Monde du 7 octobre dernier. S'adressant sans doute aux députés, il expliquait : « La question qui vous est posée ne porte évidemment pas sur le tracé des circonscriptions. » Ces propos sont tout à fait stupéfiants, car, si l'on ne discute pas du tracé des circonscriptions, si tout est déjà joué, à quoi bon parler ? Cette sorte de négation de la démocratie est très curieuse de la part d'un ministre de la République.

Qu'allons-nous faire aujourd'hui ? En quoi consiste un redécoupage si nous ne discutons pas du contour des circonscriptions ? Certes, la commission Guéna, dont on peut contester la juste représentativité, était constituée de sages – et certains l'étaient vraiment, sans doute –, mais elle était présidée par un homme dont le parcours politique n'est ni neutre ni innocent : bien que grand juriste, il appartint également, à une époque, à la majorité gaulliste.

La commission Guéna nous a consultés de manière informelle afin que vous puissiez dire, monsieur le secrétaire d'État, que vous nous aviez consultés. Mais c'était extrêmement léger. Par exemple, il n'y a pas eu de rencontres officielles avec les chefs de partis politiques, des rendez-vous sérieux qui auraient permis de vraiment examiner les possibilités, département par département. De telles rencontres n'ont pas eu lieu.

Dans le laps de temps qui s'est écoulé entre la publication de la première carte électorale au Journal officiel, fin juin, et celle présentée au conseil des ministres, nous n'avons reçu aucune information.

L'avis du Conseil d'État, rendu pendant cette période, n'a pas été transmis par le Gouvernement. Les députés Verts qui sont allés vous voir au printemps, monsieur le secrétaire d'État, n'ont pas eu de cartes. Vous les aviez ces cartes ! Disons que vous les regardiez un peu de biais, mais nous n'avons pas eu les moyens de discuter sur des tracés réels, bureau de vote par bureau de vote, notamment à Paris – je reviendrai sur cette ville, qui me touche personnellement.

Les décisions se sont donc prises sans les principales parties prenantes. Le Gouvernement n'a tenu compte ni des réserves formulées par la commission consultative sur le découpage électoral, présidée par Yves Guéna, ni des observations du Conseil d'État. En fait, on a l'impression que, depuis plusieurs mois – sinon depuis plusieurs années –, tout était déjà joué. Ce redécoupage s'est donc fait dans l'opacité et dans le seul intérêt de l'UMP.

La deuxième polémique porte sur l'UMP et votre propre rôle, monsieur le secrétaire d'État. En effet, si ce chantier, dont je reconnais les difficultés, vous a été confié, monsieur le secrétaire d'État, c'est parce que vous êtes également expert électoral de l'UMP. Ce double statut de juge et partie ne plaide pas pour l'indépendance de la commission.

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