Ce dernier rend en effet des comptes au Parlement et permet ainsi l'exercice de la responsabilité, et le contrôle parlementaire afférent.
Imaginez que le Président de la République capte au détour d'un projet de loi constitutionnelle une part de cette responsabilité : comment le Premier ministre pourrait-il alors être responsable de la politique en question ? Il viendrait devant les parlementaires leur dire : « Ce n'est pas moi le responsable, c'est le Président de la République. » Nous entendons déjà trop souvent cette réponse, mais cette fois, l'irresponsabilité du Premier ministre trouverait une consécration juridique et constitutionnelle. Ce serait, selon nous, une dépossession de la possibilité pour le Parlement d'exercer ses fonctions de contrôle dans leur plénitude. Voilà pourquoi nous nous sommes élevés vigoureusement contre cette modification.
Par ailleurs, en cas de cohabitation, s'il y a discordance politique entre les orientations portées par le Président de la République et celles choisies par le Premier ministre, soutenu par une majorité différente de la majorité présidentielle, le texte de la Constitution, tel qu'il aurait pu être modifié, contenait les ingrédients d'une crise de régime et d'une conflictualité institutionnelle.
Pour toutes ces raisons, nous nous sommes battus contre l'article 8 du projet de loi constitutionnelle. Nous avons donc été heureux que le Premier ministre, François Fillon, annonçât à la tribune que cette affaire était terminée. Pour nous, il ne s'agit pas d'un progrès – car l'article 21 de la Constitution ne change pas –, nous avons seulement la chance que le statu quo ait été préservé. Le danger d'une augmentation des pouvoirs du Président a été surmonté : c'est cela que nous redoutions, c'est ce que nous combattions ! Nous sommes heureux de cette issue, mais nous nous battons pour que les choses avancent, et nous devons nous contenter, en l'état, du fait qu'elles ne reculent pas !