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Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 2 juillet 2008 à 21h30
Rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail — Avant l'article 16, amendements 171 276 277 278 279 282 281 283 284 285 286 287 288 289 290

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

Dans notre pays, on choisit pour la première fois le niveau de l'entreprise comme étant prioritaire. L'accord de branche n'intervient plus que de manière supplétive. Je crois comprendre que, même en présence d'un accord de branche comportant des dispositions plus favorables pour les salariés, l'accord d'entreprise s'appliquera d'abord. Le principe de faveur n'existera donc plus.

C'est une véritable révolution du point de vue de la hiérarchie et de l'organisation des normes sociales dans notre pays. Vous avez décidé d'imposer votre vision des choses de manière intempestive.

Vous choisissez le moment où les deux plus grandes organisations syndicales en termes d'influence, particulièrement la CGT, ont signé pour la première fois un accord à propos d'une négociation interprofessionnelle, pour leur donner un très mauvais signe. Peu vous importe que ces deux organisations syndicales aient accepté, pour répondre à votre commande, de prévoir que l'on pourra dépasser le contingent d'heures supplémentaires par accord majoritaire. Cela ne vous a pas suffit. Il vous faut aller au-delà. Vous estimez que l'on peut faire « un bon coup », parce que les organisations syndicales sont divisées sur la première partie du texte.

J'ai abordé l'exception d'irrecevabilité, en défendant hier deux questions de nature juridique, mais vous ne m'avez pas répondu sur ces points. Confronter votre initiative à la jurisprudence de la Cour de justice européenne, notamment à l'arrêt Rüffer, n'est pas la moindre des difficultés. La Cour de justice européenne a considéré que les normes sociales nationales sont opposables aux entreprises qui viendraient sur notre territoire avec la volonté d'y appliquer leurs propres règles, à condition qu'elles soient « d'application générale », pour reprendre la terminologie de la Cour.

Tous les commentateurs estiment qu'il est dangereux pour nous de n'avoir à opposer à ces démarches que des accords d'entreprise. C'était la situation à laquelle étaient confrontés les Allemands dans l'arrêt Rüffer. Je pense que vous prenez un risque très important. Si, demain, des accords d'entreprise fixent les modalités que nous évoquons, nous ne pourrons contraindre les entreprises étrangères à appliquer ces normes.

Après la défense de l'exception d'irrecevabilité, ni le Gouvernement ni le rapporteur n'ont répondu à mes arguments sur le repos compensateur. Nous allons naturellement discuter des 35 heures, mais ce n'est pas la question majeure. En supprimant le repos compensateur et en en faisant un élément de négociation à l'intérieur de l'entreprise, on ne s'attaque pas à des règles issues des lois sur les 35 heures mais à des lois antérieures, datant des années 1975-1978. On touche aux règles de protection de la santé des travailleurs, ce qui est bien différent. Le Conseil constitutionnel, dans une décision rendue en 2004, a considéré que le législateur ne pouvait pas déléguer à la négociation collective des questions de santé publique, dès lors qu'elles entraient dans le champ d'application du onzième alinéa du Préambule de la Constitution. Il s'agit donc bien d'un cas d'inconstitutionnalité, d'un cas d'incompétence négative, auquel il vous appartient de répondre.

Nous considérons, pour toutes ces raisons, politiques et juridiques et compte tenu des dangers qu'il représente pour l'avenir, que le titre II ne mérite pas d'être examiné. Il ternit le résultat de l'accord. Nous y sommes donc radicalement opposés.

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