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Séance en hémicycle du 3 juin 2009 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • filière
  • gaz
  • nucléaire
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  • énergétique

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. François de Rugy. Monsieur le ministre de l'écologie, hier encore, pour refuser l'adoption de notre proposition de loi sur la transformation écologique de l'économie, vous avez invoqué le Grenelle de l'environnement. Or la réduction de l'usage des pesticides en a été une des questions centrales. Scientifiques et médecins s'accordent en effet à dire que le développement de certains cancers est directement lié au fait que ces produits chimiques polluent à la fois l'air que nous respirons, l'eau que nous buvons et les aliments que nous mangeons. Ainsi, la pomme que voici a-t-elle sans doute été traitée dix ou quinze fois avant d'arriver à la cantine de l'Assemblée, où je l'ai prise ce midi.

Le Grenelle de l'environnement avait fixé l'objectif de réduire de 50 % l'usage des pesticides. Or, à notre grande surprise, le Sénat a adopté, à l'article 28 de la loi, un amendement qui permet de déroger à cet objectif pour des raisons économiques.

Monsieur le ministre, ne croyez-vous pas qu'il est temps d'agir clairement, non seulement pour protéger l'environnement, mais surtout pour que les consommateurs puissent manger des fruits et légumes en toute confiance ? Ne croyez-vous pas qu'il faille désormais privilégier la santé et l'environnement, plutôt que les intérêts économiques particuliers et à court terme ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. François-Michel Gonnot. Démagogie !

M. François de Rugy. Pour reprendre l'exemple de cette pomme, épargnons à nos concitoyens d'être atteints du syndrome de Blanche-Neige ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Vous avez raison, monsieur le député, réduire l'usage des produits phytopharmaceutiques est une nécessité sanitaire pour les agriculteurs, mais aussi une nécessité économique, si nous voulons réduire notre dépendance : la France est en effet le deuxième consommateur mondial de ces produits.

Ce débat fut au coeur du Grenelle. Les décisions prises par le Président de la République et inscrites dans le projet de loi Grenelle 1 sont, d'une part, la réduction de 50 % de l'usage des produits phytopharmaceutiques, si possible d'ici dix ans ; d'autre part, l'interdiction avant la fin de l'année 2010 des quarante substances les plus préoccupantes, sachant que nous en avons déjà retiré trente.

Avant le vote définitif de la loi Grenelle 1, Michel Barnier a présenté le plan « Objectif terres 2020 » et le plan « Écophyto 2018 », qui traduisent notre engagement de réduire de 50 % l'usage des produits phytopharmaceutiques.

Le plan « Écophyto », financé par l'augmentation de la taxe du même nom, vise à développer un domaine jusqu'à présent négligé de la recherche et à trouver de nouveaux modes de culture nécessitant moins d'intrants, notamment dans le cas des cultures dites mineures, pour lesquelles il est beaucoup plus difficile de trouver des produits de substitution ou de nouveaux itinéraires agronomiques. Le plan « Écophyto » sépare enfin le conseil et la distribution, et la loi Grenelle 2 promeut un meilleur encadrement des pratiques.

C'est la première fois qu'un pays agricole prend l'engagement de réduire à ce point l'usage des produits phytopharmaceutiques. Et si le Sénat a, dans un amendement, conditionné cette réduction par sa soutenabilité économique, c'est qu'elle ne pourra s'effectuer sans l'aide et l'accord de nos agriculteurs, dont dépend notre réussite.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Brigitte Barèges, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Mme Brigitte Barèges. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, ma question, à laquelle j'associe mes collègues Jean-Yves Cousin du Calvados, René Couanau de l'Ille-et-Vilaine, ainsi que tous les autres députés concernés, a trait à la fixation des prix agricoles en général, dans le cadre plus particulier de la crise laitière que subissent les producteurs de lait.

Voilà des années que les pouvoirs publics exhortent les agriculteurs à organiser leurs filières de production et de commercialisation.

Voilà des années qu'on leur explique que cette organisation leur permettra de mieux négocier le prix de vente de leur production face à la grande distribution ou à l'industrie de transformation.

Voilà des années qu'à cet égard la filière « lait » était exemplaire, grâce à un organisme : le Centre national interprofessionnel de l'économie laitière – le CNIEL – qui, réunissant dans trois collèges les producteurs, les coopératives et les industriels, préconisait chaque année des recommandations de prix suivies par l'ensemble de la filière.

Malheureusement, cette année les services de l'État – je veux dire plus particulièrement la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – ont considéré qu'il s'agissait « d'ententes illicites » et ont donc préconisé l'interruption de ces accords interprofessionnels à la date du 31 mars 2009.

Cette dérégulation brutale, associée à une conjoncture défavorable, a entraîné une baisse vertigineuse des prix : 210 euros la tonne en moyenne pour un prix de revient oscillant entre 280 et 300 euros.

Face à un tel paradoxe et à une crise sans précédent, vous avez annoncé, monsieur le ministre, un nouveau cadre de régulation pour le secteur laitier. Notre question est double. Pourriez-vous nous rassurer sur le rôle que sera désormais appelé à jouer le CNIEL dans cette nouvelle approche ? Pourriez-vous nous préciser quelles missions seront désormais confiées à la DGCCRF pour faire en sorte que chacun des acteurs de la filière puisse vivre normalement du fruit de son travail ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Patrick Roy. Et du lait bradé !

Debut de section - PermalienMichel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche

Madame Barèges, la filière laitière est en effet exemplaire. Mais la formule selon laquelle était discuté, jusqu'à maintenant, le prix du lait était juridiquement fragile. Dans le passé, elle n'a pas empêché les crises. Elle ne mettait pas à l'abri les différentes familles de la filière de poursuites ou de sanctions au regard du droit communautaire ou du droit national de la concurrence.

Voilà pourquoi le Gouvernement a pris l'initiative, au mois de décembre dernier – M. le président Le Fur peut en témoigner car il était très actif en séance –, de proposer de sécuriser la situation juridique dans la loi, au moyen d'un amendement qui a été voté par l'ensemble des groupes politiques. Nous travaillons actuellement dans ce cadre. Avec Luc Chatel, nous avons consolidé le nouveau cadre de régulation ; les trois familles – producteurs, industriels et coopératives – sont au travail depuis jeudi. Je suis en pleine discussion avec elles pour trouver le meilleur prix possible dans les heures ou les jours qui viennent.

Les services de la direction de la concurrence sont mobilisés pour examiner sur place comment se forment les prix. Ils iront chercher les informations nécessaires dans les centrales d'achat et les entreprises, y compris chez ceux qui seraient récalcitrants pour les donner.

Toutes ces informations seront communiquées de manière transparente – j'en prends à témoin Luc Chatel, qui suit personnellement cette question – dans le cadre de l'Observatoire des prix et des marges. Car ni les agriculteurs, ni le ministre de l'agriculture n'ont peur de cette transparence. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Gaëtan Gorce. Monsieur le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, vous avez présenté, pendant le week-end, à grands sons de trompes médiatiques – c'était bien normal – la généralisation du RSA.

Comme vous le savez, les socialistes en ont toujours approuvé le principe. Et les départements socialistes ont été à la pointe de l'expérimentation. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous sommes donc parfaitement fondés à nous interroger aujourd'hui, en toute objectivité et sérénité, sur les conditions de cette généralisation.

André Gide disait qu'« on ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments ». Je crains, monsieur le haut commissaire, que l'on ne fasse pas de bonne politique simplement avec de bonnes intentions.

M. Thierry Mariani. Vous l'avez montré !

M. Gaëtan Gorce. Je suis un peu surpris, pour ne pas dire déçu, que vous présentiez le RSA, qui est utile, comme une mesure phare qui permettrait de répondre aux problèmes posés à notre pays en matière de pauvreté, laquelle explose aujourd'hui. Car vous êtes bien placé pour connaître les faiblesses de ce dispositif.

Vous savez que les moyens budgétaires ne vous ont pas été donnés à cause du bouclier fiscal. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Vous savez que les moyens d'accompagnement, notamment autour de Pôle emploi, n'ont pas été mobilisés, ce qui risque de transformer le RSA en trappe à pauvreté.

Vous savez que la CAF ne dispose pas aujourd'hui des moyens humains suffisants pour éviter le bogue que l'on a connu et que l'on connaît encore avec le Pôle emploi.

Vous savez enfin que l'on présente le RSA comme une mesure permettant de répondre, je le répète, à la crise de la pauvreté qui explose dans ce pays, alors qu'il faudrait une politique globale : une grande loi intégrant la santé, le logement, l'emploi, et qui n'oublierait pas les jeunes.

Monsieur le haut commissaire aux solidarités actives, réagissez sans attendre. Je ne mets pas en doute la sincérité de votre engagement. Mais pourquoi cautionnez-vous un RSA au rabais qui n'est que la pâle copie de la mesure qui avait fait l'unanimité lors de la présidentielle de 2007 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse

Monsieur Gorce, vous êtes un parfait spécialiste de ces sujets. J'imagine donc qu'il n'y a que de la bonne foi dans les questions que vous posez. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Vous le savez, je suis fier d'avoir été en 1998, comme conseiller de Martine Aubry et de Bernard Kouchner, l'un de ceux qui ont préparé la grande loi sur les exclusions de 1998, à laquelle vous-même avez participé. Mais j'avais gardé une immense frustration : il était anormal qu'à cette époque on n'ait pas traité la question des minima sociaux, on n'ait mis en place que l'intéressement temporaire et on ait laissé des gens reprendre du travail pour voir, au bout d'un an, leurs revenus baisser.

Depuis dix ans, je me suis promis, pas avec de bons sentiments, mais avec acharnement, que l'on compléterait ce dispositif et que l'on essaierait de mettre tout le monde sur la même longueur d'ondes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)

Que signifie « compléter le dispositif » ? Cela veut dire que l'on s'intéresse aux personnes travaillant à temps partiel. J'entends souvent : « Temps partiel, méchantes entreprises ». Je suis allé voir cette semaine qui étaient les premiers salariés à temps partiel et j'ai constaté qu'il y avait parmi eux beaucoup de dames employées par les caisses des écoles, qui dépendent des collectivités locales. Elles travaillent trois heures par jour pour 250 à 300 euros par mois. Si vous faites passer leur rémunération à 1 500 euros par mois, elles n'auront pas besoin du RSA mais, en attendant, elles en ont besoin. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

J'ai examiné ensuite la situation des personnes qui bénéficient de contrats aidés. Les contrats aidés sont extrêmement utiles. Comment se fait-il que, depuis quelques années, l'allocataire du RMI qui reprend du travail en contrat aidé n'ait pas droit à l'intéressement de 1998 ? Depuis le 1er juin, il a droit au revenu de solidarité active. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Tant mieux pour eux et pour elles !

J'ai considéré enfin la situation des personnes qui percevaient la fameuse prime de 1 000 euros. Elles n'avaient pas besoin de cela, mais d'une aide personnalisée de retour à l'emploi. C'est pour cela qu'une enveloppe de 150 millions d'euros a été prévue.

Comme vous le voyez, il ne faut pas mettre le couvercle sur les trappes à pauvreté, mais au contraire installer des échelles pour en sortir. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Michel Hunault, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Michel Hunault. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, au nom de mes collègues du groupe Nouveau Centre, je voudrais vous interroger à mon tour sur la crise que subissent les producteurs laitiers. Après l'échec des négociations de cette nuit, il est urgent de réagir pour remédier à leur désespoir, car c'est le 5 juin, dans deux jours, que les laiteries vont les payer au prix fixé. Entendez-vous oeuvrer pour que les négociations reprennent très vite ?

Dans l'attente de ces négociations, vous avez expliqué tout à l'heure quel allait être le mécanisme d'établissement des prix, mais certaines situations sont tellement désespérées que le Nouveau Centre souhaiterait que le Gouvernement s'engage sur un plan d'accompagnement des trésoreries des producteurs.

Nous sommes à quelques jours d'une échéance européenne. Le lait est traité dans le cadre d'une politique communautaire. Nous connaissons, monsieur le ministre, votre détermination à défendre les intérêts des agriculteurs en Europe, mais nous savons que l'avenir de la production laitière et de toute la filière dépend de la défense des producteurs, avec l'affirmation des quotas et la limitation des productions, pour assurer un niveau de prix suffisant. Dans le cadre de la mondialisation, il faudrait faire jouer également la préférence communautaire afin que nos marchés ne soient pas inondés de produits qui ne respectent pas les mêmes normes et les mêmes exigences.

Encore une fois, nous connaissons votre détermination, et nous sommes là pour vous aider, mais il est urgent d'apporter des réponses concrètes. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Debut de section - PermalienMichel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche

Monsieur le député, c'est en effet une crise européenne que nous traversons et il faudra, à tout le moins, se battre ensemble pour préserver une vraie politique agricole commune avec tous ses outils de régulation.

Cette crise touche tous les pays européens, y compris la France. Nous avons demandé que tous les outils de protection et de régulation – intervention, stockage, restitution, c'est-à-dire soutien aux exportations – soient utilisés. C'est le cas aujourd'hui. La Commission nous a autorisés, et François Fillon a décidé de le faire, à anticiper au 16 octobre le versement de 70 % des aides agricoles.

Dans le cadre de la politique agricole commune, nous avons également réorienté les aides agricoles en France à partir de 2010. Cela intéresse les producteurs laitiers à travers la prime à l'herbe, dont le montant va être quadruplé, passant à presque 1 milliard d'euros, et dans le cadre d'une aide à la collecte du lait dans les zones de montagne ou de piémont.

Voilà pour l'Europe, et nous restons vigilants.

Mais, face à l'urgence, il faut trouver une solution chez nous à la crise concernant le prix du lait. Nous avons pris nos responsabilités dans le cadre de la loi, je l'ai dit à Mme Barèges, et en confortant le Centre national interprofessionnel de l'économie laitière.

La négociation a repris depuis jeudi. Les trois familles de la filière se réunissent, elles sont d'ailleurs actuellement en concertation avec nous au ministère de l'agriculture. J'espère que chacune de ces trois familles saura prendre ses responsabilités dans les heures ou les jours qui viennent.

Le Gouvernement prendra les siennes, monsieur Hunault, en mettant en place, parallèlement à cet accord sur le prix du lait annuel, un plan d'accompagnement de la filière, en particulier pour soutenir la trésorerie des exploitations qui en ont besoin. Ces deux démarches convergent pour sauvegarder l'économie laitière dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Michel Vergnier, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Michel Vergnier. Madame la ministre de l'économie ou monsieur le ministre du travail, dans le plan de relance que le Gouvernement a mis en place, vous avez exclu la consommation et les salaires. Vous avez également ignoré totalement les propositions que nous avions faites et que notre collègue Alain Vidalies vous a rappelées hier. Pourtant, il ne vous a sans doute pas échappé que les récentes demandes des organisations professionnelles allaient dans notre sens.

Dans votre non-campagne pour les élections européennes, aucune proposition concertée des partis libéraux n'est faite pour relancer la croissance et la consommation, ni par les salaires ni par l'emploi. Vous avez choisi des mesures qui ne fonctionnent pas ou qui fonctionnent mal : je veux parler du soutien aux heures supplémentaires, véritable provocation pour ceux qui sont aujourd'hui licenciés et à la recherche d'un emploi.

M. Patrick Roy. Eh oui !

M. Michel Vergnier. En outre, par votre politique fiscale, vous avez considérablement réduit vos marges de manoeuvre, qui vous auraient été utiles pour mettre en oeuvre une véritable politique associant des exonérations de charges et de cotisations sociales à des offres d'emplois. Rien de tout cela n'a été fait ! Vous, c'est le libéralisme jusqu'au bout, et la pensée unique. Nous la condamnons.

Nous pensons, nous, que ce sont les salaires qui peuvent porter la demande. Or, depuis 2007, le pouvoir d'achat du SMIC est en recul malgré les promesses du candidat Président ou du Président d'aujourd'hui.

Madame la ministre, monsieur le ministre, vous parlez beaucoup de confiance et je conviens que, sur ce point, vous avez raison, car la confiance est essentielle. Une hausse significative du SMIC – lequel concerne, je le rappelle, plus de 2 millions de personnes – montrerait une réelle volonté de votre part de répondre à l'exaspération des salariés, qui ne se contenteront pas de s'entendre dire que la déflation résoudra leurs problèmes. Il ne faudrait pas, non plus, que les emplois aidés, nécessaires, apparaissent comme la seule solution.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Merci, monsieur Vergnier.

M. Michel Vergnier. Alors, oui ou non, le 1er juillet, allez-vous donner un coup de pouce significatif au SMIC ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.

M. Patrick Roy. Et du chômage !

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville

Monsieur le député, vous évoquez un grand nombre de sujets et posez une question simple concernant le SMIC.

Le SMIC concerne aujourd'hui, vous le savez, 2 200 000 de nos compatriotes, soit environ 14 % des salariés de notre pays.

M. Marcel Rogemont. C'est beaucoup trop !

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville

Je vous confirme que le SMIC fera l'objet d'une revalorisation au 1er juillet, comme chaque année.

M. Patrick Roy. De combien ?

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville

Cette revalorisation, le Gouvernement s'y engage, garantira le maintien du pouvoir d'achat en tenant compte naturellement à la fois de l'inflation et du salaire ouvrier moyen.

C'est devant les partenaires sociaux, que je réunirai le lundi 22 juin, et devant la Commission nationale de la négociation collective, que je préciserai les conditions de cette augmentation.

Je vous livrerai deux réflexions, la première historique, la seconde d'ordre économique.

D'abord, je tiens à souligner que le coup de pouce n'est absolument pas la règle. Ni le gouvernement de Laurent Fabius en 1985, ni le gouvernement de Pierre Bérégovoy en 1992, ni le gouvernement de Lionel Jospin en 1998 et 1999, n'ont donné de coups de pouce.

M. Michel Vergnier. Ce n'était pas la crise !

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville

Ensuite, je voudrais vous faire part d'une note – peut-être vous a-t-elle échappé – qui émane de la fondation Terra Nova, laquelle n'est pas si éloignée de l'ensemble des courants du parti socialiste. Cette note, intitulée Le SMIC arme anti-crise, concluait qu'il fallait écarter ce coup de pouce au SMIC parce que cela risquait de pénaliser l'emploi. Or notre préoccupation est précisément de nous battre pour préserver l'emploi, comme nous le faisons dans le cadre du soutien aux familles les plus fragiles qui bénéficie à 10 millions de nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Guénhaël Huet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Guénhaël Huet. Ma question s'adresse à M. Eric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

En octobre dernier, les États membres de l'Union ont approuvé à l'unanimité le pacte européen sur l'immigration et l'asile proposé par la présidence française et excellemment soutenu par votre prédécesseur, Brice Hortefeux. C'est un document politique qui comporte des avancées très concrètes en matière d'immigration, sujet de société dont le Président de la République avait fait l'une des priorités de la présidence française.

Ce pacte est une bonne illustration de l'Europe qui protège, grâce à la maîtrise des flux migratoires. Il est aussi le symbole d'une Europe fidèle à ses traditions, grâce à la mise en place d'une Europe de l'asile. Il est enfin le révélateur d'une Europe qui s'ouvre grâce aux négociations avec les pays sources d'immigration. En clair, ce pacte est tout le contraire des postures idéologiques dans lesquelles le parti socialiste s'enferme depuis de nombreuses années. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le ministre, vous participerez demain, à Luxembourg, à un conseil des ministres de l'intérieur, de la justice et de l'immigration. Je vous remercie, d'une part, de nous rappeler les grands principes du pacte européen…

M. Claude Bartolone. Grands principes : faut pas charier !

M. Guénhaël Huet. …et, d'autre part, de nous indiquer les propositions que vous formulerez demain à Luxembourg au nom de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Daniel Paul. Ce n'est pas une question, c'est de la propagande !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Avec votre autorisation, monsieur le président, je voudrais d'abord dire un mot à Christophe Caresche qui m'a interrogé hier. On vient en effet de me faire parvenir une dépêche précisant que le Conseil d'État avait annoncé mercredi avoir rejeté la demande d'annulation par la Cimade du décret du 22 août 2008. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Vous voyez, monsieur le député, que ne n'avais pas entièrement tort quand je vous invitais hier à prudence et modestie dans votre pronostic. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Monsieur Huet, vous avez raison. Le pacte qui a été signé par les vingt-sept pays de l'Union européenne et qui avait été négocié par mon prédécesseur, Brice Hortefeux, vise à accepter l'immigration légale parce qu'elle favorise l'intégration, à lutter contre l'immigration illégale et les filières de l'immigration clandestine, et à permettre aux pays d'émigration de se doter des outils de ce que l'on appelle le développement solidaire, autrement dit de la capacité à créer de l'activité et de l'emploi sur place.

Vous m'interrogez sur le Conseil dit « JAI » – Justice et affaires intérieures – qui se réunira demain à Luxembourg. J'y soutiendrai, au nom du Gouvernement, quelques thèses simples.

D'abord, nous avons besoin d'une harmonisation de l'asile en Europe. Il n'est pas normal que le spectre de nos décisions soit si large qu'un demandeur d'asile puisse « choisir » le pays dans lequel il a intérêt à aller. Nous avons besoin d'une coordination et d'une harmonisation européenne.

Ensuite, il faut dissuader les personnes qui veulent quitter leur pays de risquer leur vie pour venir demander protection ou asile en Europe. Nous devons travailler avec les pays de transit et je ferai des propositions en ce sens demain.

Enfin, nous devons nous doter d'une police européenne aux frontières et faire en sorte que l'Europe se protège mieux. Nous avons besoin de cette protection parce que nos frontières, aujourd'hui, c'est Malte, Lampedusa, Gibraltar. L'espace Schengen est un espace de liberté ; il doit en même temps être un espace de protection. C'est ce que je dirai demain à mes collègues ministres de l'intérieur et de l'immigration. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, vous avez accueilli, il y a quelques jours, la réunion du Forum des économies majeures, étape essentielle dans la négociation de l'après-Kyoto. Cette réunion a permis de poursuivre un dialogue ambitieux afin de faciliter, en décembre prochain, un accord global à la mesure du défi climatique, à l'occasion de la conférence de Copenhague.

En adoptant, en décembre dernier, le paquet énergie-climat, priorité de la présidence française de l'Union européenne, l'Europe, conduite par la France, a choisi de se situer à la pointe de la communauté internationale sur les questions énergétiques et environnementales. Elle s'est engagée aux « 3 fois 20 » d'ici à 2020 : 20 % d'augmentation de l'efficacité énergétique, 20 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre et 20 % d'énergies renouvelables dans la consommation énergétique de l'Union – 23 % exactement pour la France.

À ce titre, l'Europe et la France ont désormais une responsabilité particulière qu'elles doivent pleinement assumer. Sur ces bancs, nous sommes tous convaincus de l'urgence d'agir. Un accord au niveau mondial lors de la conférence de Copenhague est à ce titre indispensable.

Ma question sera double.

Quelles sont, en l'état actuel des négociations, les chances d'aboutir à un accord ambitieux au niveau mondial à Copenhague ?

La France est encore bien loin de cet objectif du « 3 fois 20 ». Elle se doit, dans la foulée du Grenelle de l'environnement, d'être exemplaire tout de suite. Monsieur le ministre, 2020, c'est loin, et l'ensemble de notre organisation politique et administrative fonctionne de manière annuelle. Comment l'adapter en profondeur pour atteindre nos objectifs en 2020 et ainsi tenir la parole donnée par la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur Dionis du Séjour, votre question porte à la fois sur l'action de la France en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre et sur la négociation de Copenhague.

Grâce au programme Grenelle – vous le savez puisque vous l'avez voté – qui a été validé par les statistiques d'Eurostat, notre pays aura réduit d'un quart ses émissions de gaz à effet de serre en 2020. Dès cette année, la réduction sera de 3 à 3,5 %, soit la plus forte des pays européens industrialisés, alors que nous partions déjà d'un niveau relativement bas par rapport aux autres. La France est donc au rendez-vous.

Sur le plan international, c'est parce que la France a fait le Grenelle qu'elle a pu jouer un rôle décisif dans l'accord européen. L'Europe – 450 millions de personnes – est le premier ensemble de pays à avoir pris l'engagement de réduire de 20 ou 30 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020, mais elle n'est pas seule au monde. Nous sommes dans une négociation mondiale et devrons composer, notamment, avec nos amis américains, canadiens, australiens et japonais. Nous avons co-présidé la semaine dernière, à Paris, une réunion de travail avec eux. Les États-Unis ont changé ; leur attitude est maintenant positive, mais ils sont pour l'instant très en retrait par rapport aux engagements français et européens. Cela dit, n'ayez aucun doute sur le souhait du Président de la République d'amener l'administration américaine à un engagement beaucoup plus fort pour Copenhague.

Et puis nous discuterons évidemment avec nos amis chinois, et il nous faudra, par ailleurs, financer ce qui est aujourd'hui irréversible : l'adaptation des pays victimes du réchauffement, de l'Afrique notamment. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP et du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Paul Giacobbi, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Paul Giacobbi. Monsieur le président, permettez-moi d'indiquer tout d'abord à M. Besson que, s'agissant d'un débat juridique, il n'est pas courtois de parler d'immodestie.

J'en viens à ma question, qui s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Deux ans après le début de la crise provoquée essentiellement par les folies de la sphère financière, nous ne sommes toujours pas en état d'évaluer le montant, dans les banques, des actifs dits « toxiques ».

Les chiffres disponibles donnent le vertige. Le FMI a avancé successivement celui de 1 000, puis de 2000, puis de 4 000 milliards de dollars, tandis qu'en Allemagne les montants officiellement reconnus se comptent en centaines de milliards d'euros. Malgré les bouffées d'optimisme hallucinatoires dont beaucoup de commentateurs semblent victimes ces jours-ci, force est de constater que, tant que le problème ne sera pas totalement réglé, aucune reprise significative n'est sérieusement envisageable.

Jusqu'à présent, la réponse a consisté, pour les banques centrales, à fournir des liquidités sans limites, sans contreparties réelles et à un taux proche de zéro, et, pour les États, à apporter des fonds propres qu'ils empruntent eux-mêmes aux marchés.

Si ces mesures ont eu l'immense vertu d'éviter un effondrement général, elles ne peuvent évidemment pas tenir lieu de solution durable. Le Trésor public américain lui-même en est réduit, malgré la déflation, à emprunter à plus de 5 %. Les banques centrales présentent désormais des bilans surréalistes, au point que l'on commence à s'inquiéter pour les monnaies et l'inflation. Tel est précisément l'objet des critiques émises par plusieurs présidents de branches régionales de la Réserve fédérale américaine et, ce matin même, par la chancelière allemande.

Avec le Crédit Lyonnais, la France a connu l'expérience d'une bad bank avant la lettre et nous espérons tous qu'elle n'est pas prête à la renouveler. Peut-être appartient-il donc aux banques elles-mêmes, à leurs actionnaires et à leurs créanciers, d'organiser sous une forme ou sous une autre, peut-être de manière mutualisée, un assainissement sincère et exhaustif de leurs comptes. Pouvez-vous éclairer la représentation nationale quant aux conceptions et aux projets du Gouvernement sur cette question fondamentale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

M. Patrick Roy. Et de la faillite !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Monsieur le député, la France a très rapidement pris des mesures exceptionnelles, au moment où la crise financière a affecté l'ensemble des économies du monde. Dès le 16 octobre, l'Assemblée nationale a voté un plan, imité ensuite par un certain nombre d'autres pays, qui se décline autour de deux institutions : la Société de financement de l'économie française et la Société de prise de participation de l'État.

À ce jour, la première a émis 66 milliards d'euros – dont 6 hier – à des conditions extrêmement favorables, ce qui a permis de réactiver le crédit interbancaire. La Société de prise de participation de l'État a investi pour sa part plus de 14 milliards d'euros pour renforcer les fonds propres des six grandes banques françaises. Ces deux institutions, grâce aux plans que votre assemblée a votés, nous ont ainsi permis d'éviter une crise de confiance qui aurait pu être dramatique pour notre économie.

En contrepartie, vous vous en souvenez, nous avons exigé des banques qu'elles financent l'économie française. Si l'on compare la situation de mars 2009 à celle de mars 2008, on constate une augmentation des encours de 6,3 %.

Vous m'avez demandé s'il convenait ou non de mettre en place une bad bank, c'est-à-dire une structure de défaisance, comparable à celle, de sinistre mémoire, qu'avait représentée le CDR pour le Crédit Lyonnais. La réponse est non. En effet, les banques françaises possèdent moins d'actifs illiquides que leurs voisines. De plus, elles sont mieux provisionnées. Enfin, les tests de résistance, qui sont conduits de manière extrêmement régulière dans notre pays depuis 2004, montrent que, même dans des conditions de croissance bien plus détériorées que celles que nous connaissons actuellement, les banques françaises tiennent le coup et conservent suffisamment de fonds propres. Pour ces trois raisons, il n'est pas nécessaire de faire appel à une bad bank. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Claude Mathis, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Jean-Claude Mathis. Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, lorsque l'industrie, particulièrement le secteur automobile, a été durement touchée par la crise mondiale, le Gouvernement a très rapidement pris la mesure de la situation.

Dès le mois de janvier, vous avez organisé les états généraux de l'automobile, qui ont rassemblé l'ensemble de la filière, des constructeurs aux sous-traitants. Sur cette base, le Président de la République a initié un ambitieux plan pour l'automobile destiné à sécuriser ce secteur et les emplois y afférents et, même si quelques esprits chagrins continuent à douter de son efficacité, on constate d'ores et déjà des résultats sur le terrain.

Ce plan a également permis de redéfinir les relations à l'intérieur de la filière, afin de promouvoir un véritable code de bonnes pratiques. Encore une fois, la France a pris l'initiative et, devant le succès de ce plan, qui prévoyait notamment la prime à la caisse, elle a été suivie par ses voisins européens.

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez dévoilé hier les derniers chiffres du secteur, qui sont excellents. Pouvez-vous détailler ces résultats, ainsi que les perspectives du marché de l'automobile ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation.

M. Patrick Roy. Et des voitures en panne !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Monsieur le député, comme vous l'avez souligné, les résultats du marché automobile français au mois de mai sont très encourageants. Ils valident a posteriori la stratégie menée par le Gouvernement au début de la crise pour répondre aux difficultés rencontrées par ce secteur.

M. Maxime Gremetz. Ah oui ?

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Dès novembre, nous avons pris des mesures fortes. En décembre, la prime à la casse a été mise en place, dans le cadre du plan de relance annoncé par le Président de la République à Douai.

Ensuite, nous avons installé le comité stratégique pour l'avenir de l'automobile, réunissant ainsi pour la première fois l'ensemble des acteurs de la filière, qui ne s'étaient jamais concertés sur l'avenir de ce secteur. Le 20 janvier, ils se sont retrouvés dans le cadre des états généraux, pour construire ensemble un plan d'accompagnement de la filière automobile. Enfin, début février, la France a été le premier pays européen à annoncer un train de mesures très fortes destinées à la soutenir.

Quatre mois plus tard, on perçoit les premiers résultats de nos efforts. En mai, le marché a enregistré une progression de 12 % par rapport à mai 2008 et, si l'on établit un relevé en nombre de jours comparable, elle se monte même à 18 %. Sur les cinq mois cumulés, on constate que le marché est quasiment stable, puisqu'il ne connaît qu'un léger recul de 1,4 %.

M. Frédéric Cuvillier. Mais combien d'emplois ont été détruits ?

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Autant dire que le marché automobile français résiste beaucoup mieux que ses voisins européens, puisque l'Espagne connaît un recul de 42 % et l'Italie de 15 %. Vous le voyez, mesdames, messieurs les députés, face à la crise, il n'y a pas de fatalité. Le volontarisme du Gouvernement porte ses fruits. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Jacqueline Maquet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Mme Jacqueline Maquet. Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, ma question porte sur la très inquiétante dégradation du service public de l'emploi.

M. Patrick Roy. Eh oui !

Mme Jacqueline Maquet. Avec un rythme de 3 000 chômeurs de plus chaque jour, et plus de 250 000 demandeurs d'emploi supplémentaires ces trois derniers mois, notre pays court à la catastrophe sociale.

Nous sommes confrontés à la détresse de ces personnes. La question de leur accompagnement dans la recherche d'un emploi est cruciale.

Sur le terrain, des chômeurs inquiets me disent qu'ils n'ont toujours pas été indemnisés ; leur situation est dramatique. D'autres me disent qu'ils ont du mal à obtenir un rendez-vous avec leurs conseillers, faute de pouvoir les joindre directement – le 39 49 sature.

Les chômeurs subissent les dysfonctionnements et les échecs de Pôle emploi : dossiers en attente, justificatifs maintes fois demandés, manque de suivi et, pis encore, perte de dossiers. Pourtant, c'est dans ces moments de grande détresse que ces personnes ont le plus besoin d'un service public de grande qualité.

Aujourd'hui, en moyenne on compte un conseiller pour quatre-vingt-cinq demandeurs. Mais le plus souvent, un conseiller suit en fait deux cents personnes.

En mars dernier, vous aviez promis une augmentation des effectifs du Pôle emploi pour faire face à cette forte hausse du nombre de chômeurs. Aujourd'hui la situation ne semble pas évoluer ; c'est même un échec sur toute la ligne. Ainsi, les agents de Pôle emploi sont surchargés, pas toujours bien formés faute de temps, et ils doivent faire face à un afflux de demandes. Ces employés travaillent sous tension, certains sont même au bord de la crise de nerfs. Dans ce contexte de crise, l'effectif de 45 000 agents n'est pas suffisant : il en faudrait 60 000.

Les chômeurs et les entreprises font face à un interlocuteur qui s'éloigne au moment même où il devrait se rapprocher. Nous sommes très loin du « meilleur service public de l'emploi européen » que Nicolas Sarkozy avait promis lorsqu'il présidait l'Union européenne, en octobre 2008.

Vous privilégiez la logique comptable et non l'intérêt général. (« Deux minutes ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Ma question est simple : quand allez-vous donner à Pôle emploi les moyens de faire son travail ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

M. Patrick Roy. Et du chômage !

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Madame Maquet, chaque semaine, nous nous rendons auprès des agents de Pôle emploi, sur le terrain, pour évaluer la situation avec eux, et essayer de trouver ensemble des solutions. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Frédéric Cuvillier. Pôle emploi, c'est le bazar !

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Je ne cherche pas à vous raconter des histoires : la situation est difficile parce que nous devons réussir à accompagner un nombre croissant de demandeurs d'emplois.

M. Patrick Roy. À qui la faute !

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Cependant, chaque fois que des difficultés se sont présentées, nous avons tenté, avec les équipes de Pôle emploi, de trouver des réponses le plus rapidement possible.

Je citerai trois exemples précis.

À la fin de l'année 2008, il y a effectivement eu des retards et des risques de retards quant au traitement de l'indemnisation des demandeurs d'emploi. Les équipes de Pôle emploi ont immédiatement réagi, et grâce à leur dévouement et à leur engagement, nous avons réussi à corriger le tir : nous sommes aujourd'hui revenus à une situation normale.

Je prendrai aussi l'exemple du numéro d'appel 39 49. Comme plusieurs députés présents aujourd'hui dans l'hémicycle, Arnaud Robinet nous avait déjà interpellés, Christine Lagarde et moi-même, à ce sujet. Ce numéro faisait, il est vrai, l'objet d'une surtaxation de la part des opérateurs téléphoniques. Nous avons fait pression sur ces derniers et, aujourd'hui, le 39 49 est devenu le moins cher des numéros d'appel payants des services publics. Par ailleurs, grâce à l'engagement des agents, alors que le taux de décrochage était de seulement 50 %, il atteint aujourd'hui 80 %.

Enfin, j'évoquerai les renforts en effectifs, puisque vous m'interrogez sur ce point. La décision a été prise concernant ces renforts : 1 800 agents supplémentaires sont en train d'être déployés – cela représente à peu près deux conseillers de plus par agence.

Madame la députée, permettez-moi, pour conclure, de faire un petit rappel. En 1993, alors que la situation de l'emploi était beaucoup moins difficile qu'aujourd'hui, les files d'attente s'allongeaient devant l'ANPE, les délais d'inscription dépassaient quatre semaines, et des agences ASSEDIC qui ne pouvaient pas faire face étaient parfois obligées de fermer.

Je ne dis pas que la situation soit parfaite actuellement, loin s'en faut : nous devons continuer à travailler pour l'améliorer constamment, et je souhaite profiter de cette occasion pour rendre hommage à l'engagement des agents de Pôle emploi sur le terrain. Je ne doute pas que cette démarche sera partagée par tous les députés. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Richard Dell'Agnola, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Richard Dell'Agnola. Madame la ministre de la culture et de la communication, la vaste réforme de l'audiovisuel que vous avez souhaitée est en marche.

Après quatre semaines de débat au sein de notre assemblée à la fin de l'année 2008, et deux semaines de discussion au Sénat en janvier dernier, la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision a été validée par le Conseil constitutionnel le 4 mars 2009.

Si l'on en croit les sondages, la fin de la publicité sur France Télévisions, voulue par le Président de la République, est plébiscitée par les Français. Ils sont 78 % à apprécier qu'en soirée les programmes du service public commencent à vingt heures trente-cinq.

M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !

M. Richard Dell'Agnola. Ils sont ainsi nombreux à apprécier de pouvoir profiter d'une deuxième partie de soirée qui débute aux alentours de vingt-deux heures quinze.

Dans une période de marasme du marché publicitaire, la fin de la publicité est aussi une chance pour France Télévisions Alors qu'en 2009 une baisse historique des ressources publicitaires a été enregistrée par les chaînes privées, votre réforme permet de substituer à des revenus aléatoires des ressources budgétaires de 450 millions d'euros garanties par l'État.

En effet, les revenus publicitaires des chaînes hertziennes se sont sensiblement modifiés depuis la réforme. À cet égard, trois phénomènes de report publicitaire peuvent être observés. Le premier concerne TF1 et M6, dont les chiffres d'affaires sont en recul après vingt heures. La situation profite surtout aux chaînes de la TNT, dont le chiffre d'affaires augmente de 71 % pour la même plage horaire. Enfin, France 2 enregistre une hausse de ses revenus publicitaires de 8 % en journée.

M. René Dosière. Parlez-nous plutôt des licenciements !

M. Richard Dell'Agnola. En outre, la nouvelle loi fait de France Télévisions une entreprise unique qui va pouvoir moderniser son organisation interne et renforcer ses missions qui consistent à instruire, informer et divertir les Français.

Enfin, cette réforme permet de moderniser notre audiovisuel extérieur en regroupant sous une seule entité Radio France internationale, France 24 et TV5 Monde. C'est le regard français sur le monde…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Monsieur Dell'Agnola, votre temps de parole est écoulé.

La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Monsieur Dell'Agnola, vous avez raison : cette réforme de l'audiovisuel est la plus importante que nous ayons faite depuis vingt ans.

Grâce à la suppression de la publicité, les horaires sont différents et les spectateurs sont ravis que les programmes de soirée commencent à vingt heures trente-cinq. Ils peuvent ensuite suivre le journal de France 3 et, souvent, le programme suivant.

Cette réforme, c'est aussi plus d'exigence. Actuellement 70 % de la fiction française est portée par France Télévisions. Des pièces de théâtre sont diffusées en première partie de soirée – et vous avez vu l'audience enregistrée tout récemment par La Reine morte de Montherlant –, mais aussi des documentaires, des émissions de vulgarisation scientifique, plus d'émissions politiques et des émissions littéraires.

M. Marcel Rogemont. Cela n'a rien à voir avec la suppression de la publicité. Ces programmes étaient déjà prêts, ils n'ont pas été préparés en si peu de temps !

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

La réforme a également permis d'opérer une restructuration dont il avait beaucoup été question. Une société unique a été créée, avec sept grands domaines d'activité, sans que l'identité de chacune des chaînes ne soit perdue – les Français y sont véritablement attachés. Cette évolution permettra de créer des synergies afin de faire face à la nécessité de diffuser sur tous les supports et de devenir un média global.

M. René Dosière. Et les suppressions d'emplois ?

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Tout cela est possible parce que l'État garantit les ressources du service public.

M. Patrick Bloche. Mais l'audience chute !

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Loin de vouloir tuer France Télévisions, comme cela a été souvent répété lors des débats dans cette assemblée, je crois que nous l'avons sinon sauvé, du moins préservé.

M. Patrick Roy. L'audience chute !

Debut de section - PermalienChristine Albanel, ministre de la culture et de la communication

Aujourd'hui, 90 % des recettes de France Télévisions sont garanties par l'État : évidemment, cela change tout.

Si l'on ajoute à ces éléments la refonte de l'audiovisuel extérieur, de nouvelles « fenêtres » données aux chaînes privées pour traverser la crise, et des accords signés entre les producteurs et les auteurs pour conforter la production française, nous pouvons dire que nous portons avec la loi audiovisuelle un très grand projet culturel. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Daniel Boisserie, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Daniel Boisserie. Madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, le 5 février 2009, le Président de la République annonçait la suppression de la taxe professionnelle. Cette déclaration qui, dans un premier temps, a réjoui les entreprises, a immédiatement inquiété les élus. En effet, la taxe professionnelle constitue 100 % des recettes fiscales des EPCI, 60 % de celles des communes et 40 % de celles des départements.

Au même moment, vous avez demandé à ces collectivités de s'inscrire dans le plan de relance, et elles le font. Vous les avez incitées à investir plus grâce à une récupération plus rapide du FCTVA, et elles le font. Alors que le Gouvernement se désengage et réduit leurs dotations, elles investissent, souvent au-delà de leurs possibilités financières, de sorte qu'elles sont contraintes d'augmenter les taxes sur les ménages et de recourir fortement à l'emprunt.

De leur côté, les entreprises – non pas celles qui licencient malgré des bénéfices records, mais celles qui courbent le dos pour résister à la crise – sont inquiètes. Taxe sur la valeur ajoutée, taxe sur le foncier, taxe carbone : autant de motifs d'inquiétude qui ralentissent leurs investissements et n'encouragent pas l'embauche.

Des entreprises qui attendent avec impatience, des élus qui se demandent si, demain, leur collectivité aura les ressources nécessaires pour continuer à investir tout en remboursant les emprunts d'aujourd'hui ou, tout simplement, pour assurer leur fonctionnement : vous ne pouvez laisser plus longtemps les uns et les autres dans cette situation fortement préjudiciable pour notre pays.

Madame la ministre, vous nous devez maintenant la vérité sur votre réforme ; vous la devez aux entreprises comme vous la devez aux Français et à tous leurs élus. Pouvez-vous aujourd'hui, enfin, nous dire toute la vérité sur la nouvelle taxe professionnelle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Monsieur le député, le Président de la République a annoncé, en février 2009, la suppression de la taxe professionnelle sur les investissements productifs. Pourquoi a-t-il pris cette décision ? Non pas parce que c'est un « impôt imbécile », comme aurait dit François Mitterrand, ou parce que son assiette n'est pas bonne, comme aurait dit Dominique Strauss-Kahn,…

M. Jean Glavany. Qui l'a créée ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

…mais parce qu'elle nuit à la compétitivité des entreprises françaises et à l'attractivité du site France. Nous sommes en effet, avec le canton de Genève, le seul pays à taxer les investissements ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Glavany. C'est de l'idéologie !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Quels sont les principes que nous entendons appliquer ? Premier principe, sur lequel tout le monde s'accorde : il nous faut impérativement maintenir un lien fiscal entre les entreprises et le territoire.

Le deuxième principe a été réaffirmé avec force par le Premier ministre : la ressource doit être maintenue pour toutes les collectivités locales. En effet, ainsi que vous l'avez souligné à juste titre, le produit de la taxe professionnelle finance l'ensemble de ces collectivités et il est nécessaire pour la pérennité de leurs investissements et la stabilité de leur environnement. Je les remercie, du reste, d'utiliser la facilité du FCTVA remboursé de manière accélérée, car elles participent ainsi au plan de relance.

Nous avons donc entrepris un travail de collaboration. Avec Mme Michèle Alliot-Marie et M. Éric Woerth, nous avons rencontré les associations de collectivités locales en avril, puis en mai, et nous tiendrons une troisième réunion en juin. J'ai également demandé aux présidents des commissions des finances de l'Assemblée et du Sénat que trois députés participent à cet exercice, et je suis heureuse que M. le rapporteur général Carrez, M. Laffineur et M. Balligand aient été désignés. Nous continuerons à mener ensemble la réflexion et la concertation, pour aboutir à des mesures qui figureront dans le projet de loi de finances pour 2010. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Patrice Debray, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Patrice Debray. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes ; j'y associe mes collègues des Landes, de la Gironde et des départements alentour.

En janvier dernier, la tempête Klaus a durement touché le sud-ouest de notre pays en causant de sévères dommages. Elle a provoqué la mort de douze personnes et en a blessé quatre cents autres. Au total, trente et un départements ont été affectés et l'état de catastrophe naturelle a été déclaré dans neuf d'entre eux : l'Aude, la Haute-Garonne, le Gers, la Gironde, les Landes, le Lot-et-Garonne, les Pyrénées-Atlantiques, les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Orientales.

Les dommages les plus importants ont été concentrés dans la région Aquitaine, tout particulièrement dans le département des Landes, dont la forêt a été durement touchée.

Très rapidement, le Président de la République et le Gouvernement se sont mobilisés pour apporter l'aide de la nation aux victimes de cette catastrophe naturelle. Très rapidement aussi, le Gouvernement a fait appel à la solidarité européenne, en demandant à la Commission européenne de débloquer des crédits du Fonds de solidarité de l'Union européenne.

Cinq mois après ces événements, monsieur le secrétaire d'État, pouvez-nous dire si cette demande a été entendue par les autorités européennes ? En cette semaine d'élections européennes, quel message pouvez-vous nous transmettre sur la capacité de l'Union européenne à protéger nos concitoyens et à contribuer à une Europe de la solidarité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Bruno Le Maire, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Monsieur le député, la tempête Klaus a en effet été un drame pour beaucoup de départements du sud-ouest et pour des milliers de familles en France.

Dès le lendemain, je me suis rendu à Bruxelles pour rencontrer la commissaire chargée de la politique régionale, Mme Danuta Hübner, et lui demander de débloquer en urgence des crédits du Fonds de solidarité de l'Union européenne, afin de venir en aide à ces départements. Aussi, je suis heureux de vous annoncer que la Commission débloquera 109 millions d'euros pour les départements touchés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je suis également heureux de vous annoncer qu'elle vient de donner son feu vert au plan de soutien à l'industrie et au secteur forestiers, voulu par le Premier ministre et le Président de la République. Une aide de 800 millions d'euros, apportée directement par l'État français au secteur forestier, sera donc versée très rapidement.

J'ajoute que, face à la crise économique actuelle, nous devons utiliser tous les instruments de la solidarité européenne pour répondre aux attentes de nos concitoyens. Je pense au Fonds d'ajustement à la mondialisation : 500 millions d'euros sont disponibles, mais 20 millions seulement ont été dépensés en 2008. Avec Christine Lagarde, nous avons demandé que ces instruments soient simplifiés et que les fonds soient immédiatement disponibles. Ceux-ci seront donc mobilisés plus rapidement en faveur des salariés touchés par les licenciements et la crise économique.

Je pense également aux fonds structurels, dont nous avons besoin rapidement. Avec l'aide de Christine Lagarde et de Patrick Devedjian, nous avons obtenu de la Commission la possibilité de débourser à l'avance 357 millions d'euros, pour tenir les engagements pris par l'État dans le cadre du plan de relance.

Ces différentes mesures correspondent à l'Europe que nous souhaitons : une Europe qui décide rapidement face à la crise économique, une Europe de la solidarité et de l'engagement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Albert Facon, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Albert Facon. Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, vous étiez le 23 mars dernier à l'École des Mines de Douai, dans le Nord, afin de présenter, devant les acteurs économiques de la filière automobile et les élus, les mesures prises dans le cadre du pacte automobile. Trois mois plus tard, comme les salariés des entreprises concernées, nous nous interrogeons sur les contreparties, notamment en termes de maintien des sites, de préservation de l'emploi, de formation professionnelle et de salaires.

Avec plus de 50 000 emplois dans l'automobile, le Nord-Pas-de-Calais est la deuxième région de France et la troisième d'Europe dans ce secteur. Les sommes du pacte automobile sont importantes : 6,5 milliards d'euros de prêts pour les constructeurs, 2 milliards d'euros pour les banques internes des constructeurs et la création d'un fonds de modernisation des équipementiers automobiles.

Malgré ce plan de relance, des entreprises sous-traitantes licencient. Dans ma région, c'est Faurecia à Auchel – 200 emplois –, La Française de Mécanique à Douvrin, Valeo à Étaples, Bosal, Visteon, Inoplas, et bien d'autres. Il en est de même dans toute la France – je pense notamment à la Picardie avec Continental et Goodyear-Dunlop. Nous en venons donc à nous demander si l'argent de ce plan de relance n'a pas servi aux grands groupes pour se restructurer et licencier une partie du personnel.

M. Frédéric Cuvillier. Tout à fait !

M. Albert Facon. Ma question est simple, monsieur le secrétaire d'État : où est parti l'argent de ce plan de relance ? Existe-t-il des comités de suivi de ce plan au niveau national et régional ? En période de crise, il est urgent que les salariés, les élus et tous nos concitoyens soient informés de l'utilisation de l'argent public. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation.

M. Frédéric Cuvillier. Où est l'argent ?

M. Patrick Roy. Rendez les sous !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Monsieur le député, la réponse à votre question est très simple : l'argent investi dans le plan de relance de l'automobile est passé dans le marché automobile, qui est en augmentation de 12 % au mois de mai par rapport à l'année dernière.

Je me suis effectivement rendu à Douai il y a trois mois pour présenter l'ensemble des mesures mises en oeuvre pour l'ensemble de la filière, et je suis en mesure de vous indiquer aujourd'hui quels en sont les résultats concrets.

M. Maxime Gremetz. Il n'y en a pas !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Les garanties Oseo, qui constituaient une priorité, ont donné lieu à l'ouverture de 630 dossiers permettant de soutenir le financement de projets de PME de la filière de la sous-traitance automobile.

M. Frédéric Cuvillier. Pourquoi licencie-t-on, alors ?

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Par ailleurs, le dispositif des prêts aux constructeurs automobiles, que vous avez évoqué, a été mis en place, et les constructeurs ont pris des engagements forts en termes de maintien des sites industriels dans notre pays.

M. Jacques Desallangre. Lesquels ?

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Monsieur Facon, nous n'avons jamais caché que la conjoncture résultant de la crise actuelle, mais aussi de la situation structurelle du marché automobile, passait par quelques restructurations. C'est la raison pour laquelle nous avons engagé des mesures d'accompagnement social sans précédent.

M. Maxime Gremetz. Les propositions de travail en Inde ?

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de l'industrie et de la consommation

Laurent Wauquiez et moi-même avons signé une convention spécifique sur le chômage partiel et exigé des mesures de formation – dix jours de formation obligatoire – pour toute entreprise de l'automobile recourant à des mesures de chômage partiel.

Comme vous le voyez, monsieur le député, il y a un suivi extrêmement précis de la mise en oeuvre du pacte automobile. Lundi prochain, je réunirai encore le comité stratégique pour l'avenir de l'automobile, qui suit, avec l'ensemble des acteurs de la filière, la mise en oeuvre du pacte, qui commence à se traduire par des résultats chiffrés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Maxime Gremetz. Ah oui, ça se voit !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Étienne Mourrut, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Étienne Mourrut. Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, la production de sel sur notre territoire traverse des difficultés dues à une forte concurrence mondiale. Aujourd'hui, afin de sauvegarder sa compétitivité, le groupe Salins, premier producteur national, a annoncé un plan social particulièrement important, qui va toucher près de 140 emplois sur les 733 aujourd'hui répertoriés. Les sites de Dax, dans le sud-ouest, Varangéville, dans l'est, et surtout Aigues-Mortes, au bord de la Méditerranée – où la suppression de 60 emplois est prévue –, sont particulièrement concernés.

En Camargue, où la production de sel marin date de l'époque romaine, l'inquiétude est grande, d'autant plus que l'avenir réservé au maintien et au développement de l'activité salinière en Camargue est incertain. Aujourd'hui, c'est l'emploi qui est touché. Demain, nous ne pourrons pas tolérer un affaiblissement de l'outil de production qui constituerait une menace pour notre autosuffisance alimentaire et qui aurait sans aucun doute des conséquences graves en matière environnementale.

Le groupe Salins possède en effet plusieurs milliers d'hectares en Camargue et petite Camargue. Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, qu'en tant qu'ancien salinier je m'engage avec force pour la défense de la pérennité de cette activité qui est partie intégrante de notre patrimoine. Aussi, je souhaite que vous m'indiquiez quelles mesures notre gouvernement pourrait prendre au sujet de la situation sociale des salariés, mais aussi pour assurer la pérennité de l'activité salinière dans le sud et en Camargue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Monsieur le député, je sais à quel point cette question vous tient à coeur, vous qui êtes un ancien salinier. Vous avez d'ailleurs été le premier à nous faire part de vos inquiétudes concernant la situation de la compagnie des Salins du Midi et ses conséquences sur les sites d'Aigues-Mortes et de Giraud, dans les Bouches-du-Rhône.

Un plan social portant sur 122 postes, dont une soixantaine à Aigues-Mortes, a été mis en oeuvre par le groupe, qui met en avant les problématiques de concurrence, notamment avec l'Espagne, la baisse des commandes liée au dessalage des routes, ainsi que la concurrence des pays étrangers. Christine Lagarde et moi-même avons été très vigilants, avec nos services, sur deux points fondamentaux. Premièrement, comment préserver au mieux l'outil industriel tout en tenant compte des enjeux en matière de biodiversité et d'environnement que vous avez rappelés. Deuxièmement, comment accompagner au mieux les salariés qui risquent, à cette occasion, de perdre leur emploi.

Nous avons mis en place une nouvelle convention de reclassement personnalisé, permettant aux personnes ayant perdu leur emploi de faire l'objet d'un véritable accompagnement que nous pouvons préparer à l'avance afin de déterminer quels sont les métiers offrant de réels débouchés dans votre secteur géographique. Nous allons nous engager à vos côtés afin de faire en sorte que ce nouvel outil soit particulièrement impliqué sur votre territoire, grâce à la vigilance des services de Pôle emploi et de l'ensemble des services de la direction du travail. Je vous propose que nous suivions, avec l'ensemble des élus locaux, et particulièrement avec vous comme relais au niveau national, la situation au fur et à mesure de ses nouveaux développements.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Je vais suspendre la séance, qui reprendra à dix-sept heures trente.

Groupe Salins

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à dix-sept heures cinquante, sous la présidence de M. Rudy Salles.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

L'ordre du jour appelle le débat sur la politique énergétique.

L'organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe Nouveau Centre, la parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, mes chers collègues, en matière de politique énergétique, la France a fait preuve, sur la longue durée, de pragmatisme et d'intelligence.

Il y a trente ans, nos pères ont fait le choix courageux du nucléaire.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

En 2005, nous avons voté une loi d'orientation sur l'énergie qui, pour la première fois, prenait en compte les enjeux liant santé publique et énergie.

En 2007, grâce au Grenelle de l'environnement, nous avons commencé à rattraper notre retard en matière de développement des énergies renouvelables et, grâce aux travaux de la commission Champsaur, nous disposons enfin de pistes…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

…pour organiser le partage de la rente nucléaire et sortir de cet entre-deux : tarifs réglementés d'un côté et concurrence de l'autre.

Nous avons su faire de la politique énergétique un atout national mais, étant donné les défis qui nous attendent, cette position forte ne doit pas nous empêcher de regarder nos faiblesses en face et d'agir pour les corriger. C'est pour cela que le Nouveau Centre a souhaité ce débat.

La première faiblesse concerne la planification à moyen terme, couvrant la période 2020-2040. Nous n'avons encore qu'une vision à court terme de notre politique énergétique alors que les changements qui s'annoncent nécessitent une véritable programmation à moyen terme. Il y a là, monsieur le ministre, un non-dit qui, même si l'on en comprend les raisons initiales, n'est plus acceptable sur les perspectives nationales en matière d'énergie nucléaire, d'énergies renouvelables, de production et de consommation énergétiques alors même que nous avons besoin de perspectives à dix, vingt ou trente ans.

Je prendrai deux exemples et d'abord celui de la gestion des besoins. Le Grenelle érige la maîtrise de la demande énergétique en axe prioritaire de notre politique énergétique. C'est bien. Mais où en sont exactement nos besoins en énergie et où en est la demande d'électricité ? Est-elle en baisse ? Si c'est le cas, de combien ? Monsieur le ministre – ainsi que je l'ai déjà évoqué au cours de la séance des questions au Gouvernement –, quelle démarche entendez-vous adopter pour réduire la demande et augmenter l'efficacité énergétique, au-delà de l'objectif très général d'une amélioration de 20 % ?

Second exemple : celui de nos ressources, notamment nucléaires, sur lesquelles reviendra plus précisément Raymond Durand. Dans dix ans, les premières centrales construites dès le milieu des années 1970 arriveront en fin de vie. Nous devons donc décider maintenant du sort que nous allons leur réserver. Notre électricité continuera-t-elle de provenir à hauteur de 80 % de l'énergie nucléaire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Est-ce bien compatible avec nos objectifs politiques d'améliorer l'efficacité énergétique et de porter à 23 % la part des énergies renouvelables ?

De ces choix découleront des décisions sur le renouvellement du parc nucléaire qui, pour nous, n'est pas la priorité mais doit rester une variable d'ajustement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Allons-nous prolonger la durée de vie de nos centrales ? Si oui, de combien de temps ? Avec quels travaux de sécurisation ? Quelle part sera dévolue à la technologie EPR ? Quelle part à la troisième génération ? Cette question est restée taboue pendant trop longtemps. Nous n'en avons pas parlé lors de l'examen du projet de loi d'orientation sur l'énergie en 2005. Nous n'en avons pas parlé non plus – ou si peu – lors du Grenelle de l'environnement. Je veux bien admettre que le sujet était alors de nature polémique ; toutefois, le groupe Nouveau Centre estime que le pays est désormais prêt pour un débat apaisé. Il est temps de l'organiser ; il est temps que le Gouvernement montre la voie dans ce domaine décisif.

La seconde faiblesse est celle du réseau de distribution de l'électricité. La tempête Klaus de janvier 2009 en a rappelé cruellement la fragilité et la vétusté. Nous n'avons pas investi dans le réseau de 1999 à 2005 pour des raisons de coût, certes. Reste que cette politique illustre le problème d'arbitrage auquel doit faire face EDF en matière d'affectation de ses bénéfices annuels.

Il faut le dire : EDF est une entreprise qui rapporte beaucoup d'argent. Son résultat net atteint 3,4 milliards d'euros en 2008. Sa politique de partage des bénéfices doit néanmoins être révisée entre, d'une part, les actionnaires et les consommateurs, et, d'autre part, les fonctions de production – toujours favorisées – et celles de distribution – toujours sacrifiées. Nous attendons vos réponses à ce sujet, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Ne disposer que de cinq minutes pour parler de la politique énergétique de la nation, c'est bien peu, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Je sais bien, mais le règlement est ainsi fait, monsieur Dionis du Séjour. Vous allez de toute façon avoir l'occasion de vous exprimer lorsque vous poserez vos questions.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

N'avez-vous pourtant pas voté le nouveau règlement, monsieur Dionis du Séjour ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Il me semble qu'en prenant l'initiative d'un débat sur l'énergie nucléaire et la fragilité de notre réseau, le Nouveau Centre pose deux questions utiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Je suis donc heureux de pouvoir aborder ces deux questions et vous remercie, mes chers collègues et vous, monsieur le ministre, de bien vouloir vous prêter à cet exercice assez spécial. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, je préfère, à la différence de M. Dionis du Séjour qui a analysé nos faiblesses, mettre l'accent sur nos points forts.

La politique du Gouvernement en matière de développement durable est exemplaire et nous la soutenons. Certes, la question énergétique touche les politiques du transport, de l'automobile, du logement, de la compétitivité des industries, du pouvoir d'achat, des gisements d'emplois, de la protection de l'environnement… L'énergie est au coeur de notre quotidien. Mais la France est à la pointe du progrès en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

L'énergie est aussi au coeur de notre diplomatie. Je pense à la conférence de Copenhague qui se tiendra en décembre prochain, mais aussi à tout ce qui est mis en place pour faire en sorte que le protocole de Kyoto, valable jusqu'en 2012, connaisse une bonne fin.

Deux chiffres m'inquiètent : l'ONU estime à 250 millions le nombre de réfugiés climatiques en 2050, cependant que, selon l'ancien secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, le réchauffement de la planète cause déjà la mort de 300 000 personnes par an. Voilà des sources réelles d'inquiétude.

Nous devons pouvoir affronter une hausse durable de la demande mondiale même si nous parvenons à réaliser d'importantes économies d'énergie. Comment résoudre cette véritable quadrature du cercle ? La France a pris ses responsabilités en votant la loi d'orientation sur l'énergie. Vous avez été l'un de ses initiateurs, monsieur Dionis du Séjour et je rends hommage au travail constructif que vous avez réalisé en 2005.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Le Grenelle 1, dont nous allons poursuivre la deuxième lecture la semaine prochaine, reprend les principes alors affirmés, notamment celui de la division par quatre des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050.

L'Agence internationale de l'énergie prévoit une hausse de la consommation d'énergie de l'ordre de 45 % d'ici à 2030.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Pour satisfaire la demande, le monde devrait alors produire quatre fois plus de pétrole qu'aujourd'hui et la consommation de gaz et de charbon devrait augmenter de 40 % à 50 %. Voilà les réalités d'un monde qui évolue.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

…à mettre en place les éléments de substitution permettant d'éviter l'aggravation de cette fracture mondiale.

Comment d'ailleurs produire plus de pétrole alors que les réserves sont amenées à s'épuiser ? Compte tenu des prévisions, nous considérons qu'il convient d'agir tant en matière de transports avec les biocarburants, la recherche innovante, l'hydrogène… tant sur le plan de l'électricité, avec le développement du nucléaire, monsieur Cochet,…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

…et je n'oublie pas l'énergie éolienne, monsieur Cochet, dont je ne suis pas un adversaire fanatique, contrairement à ce que vous prétendez, mais dont je souhaite que le développement soit contrôlé pour éviter la dégradation des paysages.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Bref, nos initiatives doivent être équilibrées.

Enfin, en ce qui concerne la chaleur, favorisons l'énergie renouvelable, notamment solaire, et la biomasse.

Monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, je tiens à rappeler que c'est à l'initiative de notre commission – M. Poignant, rapporteur du texte, se le rappelle certainement – que nous avons fait passer de 20 % à 23 % la part d'énergies renouvelables dans la consommation globale d'énergie finale. Quel reproche, quel procès peut-on faire au Gouvernement comme à nous ?

Plusieurs députés du groupe de l'UMP. Aucun !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Nous nous orientons vers une production d'énergies renouvelables plus importante que celle que l'Europe nous demande.

Monsieur le ministre d'État, la politique que vous mettez en oeuvre en la matière est vertueuse et nous la soutenons avec résolution.

Sans entrer dans les détails,…

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

D'autant qu'il ne vous reste que quinze secondes, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Vous devez en remercier le nouveau règlement de l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Les propositions de la commission des affaires économiques sont judicieusement équilibrées. Nos réflexions sont fondées sur la réalité de la situation et sur les prévisions pour les trente prochaines années. Nous nous donnons avec courage les moyens de les affronter. Discutons des mesures que le Gouvernement a prévu de prendre en matière énergétique afin de le soutenir dans ses ambitions. Nous ferons ainsi oeuvre utile pour l'énergie et pour le développement durable. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Vous savez bien que le Gouvernement a plus de liberté. Mais il n'en abusera pas.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le président de l'office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord de vous dire le plaisir que j'ai à me retrouver ici pour ce débat parlementaire inédit,…

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

…puisqu'il s'agit du premier débat de ce type depuis la réforme constitutionnelle du mois de juillet 2008, qui offre l'occasion à la représentation nationale d'échanger…

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

…avec le Gouvernement sur la politique énergétique de la nation. Je remercie le groupe Nouveau Centre et son président François Sauvadet, qui sont à l'origine de ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Le hasard du calendrier fait qu'il a lieu le jour même où j'ai présenté devant le conseil des ministres la feuille de route des infrastructures énergétiques de la France pour les douze prochaines années – jusqu'en 2020 –, document de synthèse qui sera prochainement transmis au Parlement. Nous nous trouvons donc à un moment crucial.

En matière énergétique, les choses sont assez simples puisque nous avons à procéder, et nous procédons, à une triple rupture. La première rupture concerne l'émission de CO2 : l'ensemble des mesures qui ont été adoptées ou sont en cours d'adoption par la France permettent, si l'on s'en réfère aux modèles statistiques d'Eurostat, d'affirmer que notre pays est sur le chemin d'une réduction de 22,8 % des émissions de gaz à effet de serre entre 2005 et 2020. Dois-je rappeler que pour permettre à l'Europe de diminuer, dans un premier temps du moins, c'est-à-dire dans l'hypothèse où les autres grandes nations ne participeraient pas à un accord à Copenhague, ses émissions de gaz de 20 % au minimum – tel est l'objet de l'accord initial de décembre mais la baisse envisagée pourrait aller jusqu'à 30 % –, les engagements que l'Europe demandait à la France, compte tenu de sa structure énergétique, s'élevaient à 14 % ? Une baisse de 22,8 % permettrait donc à l'Europe de diminuer ses émissions de gaz à effet de serre de plus de 30 % des engagements globaux dans le cadre, évidemment, d'un accord à Copenhague. De plus, la France est un des rares pays qui, ayant signé et ratifié le protocole de Kyoto, l'a non seulement honoré mais a fait même un peu mieux ! En effet, alors que ce protocole envisageait une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre, nous sommes, si je puis dire, en avance de 5,6 %. Si nous partons d'un niveau raisonnablement bas pour un pays industriel, je tiens à le répéter, nous faisons un peu mieux que d'honorer le protocole de Kyoto et notre courbe, validée par Eurostat, est la plus importante de toute l'Europe occidentale en matière de baisse des émissions de gaz à effet de serre.

Plusieurs députés de l'UMP. Très bien !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Si l'émission des gaz à effet de serre met en cause d'autres enjeux que l'énergie elle-même, en matière strictement énergétique, la deuxième rupture porté sur la tendance qui caractérisera l'Occident d'ici à 2020, à une augmentation constante des besoins énergétiques. Or la programmation française est en rupture par rapport à cette tendance puisqu'elle prévoit une baisse de l'ordre de 10 %, alors même que si l'on prolongeait notre tendance historique, en l'absence des mesures prises il y a un an, l'augmentation aurait été de plus de 25 %. Il s'agit donc d'une rupture énergétique majeure, rendue possible grâce à une politique de meilleure efficacité énergétique. Vous en connaissez les principaux aspects puisque vous les avez adoptés en première lecture et entièrement validés dans le cadre des projets de lois de finances et des projets de lois de finances rectificatives – je pense notamment au plan de rénovation thermique des bâtiments.

La France est donc engagée de manière très précise dans la voie d'une amélioration de l'efficacité énergétique et de la réduction de ses besoins énergétiques. Vous pourrez prendre connaissance dans le dossier qui vous sera transmis de l'intégralité des informations en valeur absolue et en pourcentage.

La troisième rupture repose sur le développement des énergies renouvelables. La France recourait historiquement à trois types d'énergie : l'énergie hydraulique ou le bois en matière d'énergies renouvelables – le recours à d'autres types d'énergies renouvelables demeurant marginal –, l'énergie nucléaire et, enfin, le charbon, le pétrole et le gaz. Il faut reconnaître que si la France, en valeur absolue par habitant, fait presque aussi bien que l'Allemagne en matière d'énergies renouvelables – elle est en la matière, contrairement aux idées reçues, un des meilleurs pays d'Europe –, c'est grâce à l'énergie hydraulique puisque le développement des autres énergies renouvelables était, je le répète, jusqu'à ces dernières années, marginal. La baisse tendancielle de l'énergie hydraulique et de l'énergie-bois ne fait donc que rendre encore plus considérable la stratégie actuelle de la France : alors que les énergies renouvelables, centrées sur l'hydraulique et le bois, représentent aujourd'hui 11 % de notre consommation, elles doivent passer à 23 % grâce au doublement de la production de bois-énergie ainsi qu'à la multiplication par six de la géothermie, par douze des réseaux de chaleur et par 400 du solaire photovoltaïque – chiffre, il est vrai, peu significatif, compte tenu de l'extrême faiblesse de la production photovoltaïque actuelle.

Si nous nous sommes engagés dans cette politique pour respecter à la fois les orientations du Grenelle de l'environnement et le paquet « climat-énergie » européen, nous devons la poursuivre non seulement pour assurer notre équilibre énergétique mais également pour répondre au développement de la recherche et des grandes filières professionnelles sur un sujet majeur de la compétitivité mondiale.

Si on prend l'âge moyen des députés, à l'époque de leur naissance, les Français consommaient près de quarante fois moins d'énergie qu'aujourd'hui : une véritable rupture s'impose donc. Du reste, le débat sur l'énergie carbonée est devenu le débat mondial.

Toutes les économies fonctionnent à l'énergie, du moins toutes les industries, ce qui explique le drame de l'Afrique, puisque un quart des Africains seulement ont accès à l'énergie primaire. Nul d'entre vous n'ignore les conséquences que ce fait a en matière de développement, de santé et d'alimentation, sans oublier la dévastation des forêts pour le bois de chauffe. L'essentiel de la compétitivité de demain suppose donc qu'on parvienne à l'économie verte, laquelle se jouera sur les cinq ou six énergies localisées de substitution. Tel est l'objet des mesures que vous avez adoptées récemment, visant notamment à simplifier les démarches administratives en matière de raccordement à l'énergie photovoltaïque, jusque-là véritable parcours du combattant en raison du nombre des autorisations à recevoir, des délais – jusqu'à quatorze mois –, de l'inscription au registre du commerce ou de la déclaration de TVA, le déclarant étant considéré jusqu'alors comme un producteur d'électricité. Les mesures que vous avez adoptées sont si efficaces que le nombre des raccordements mensuels équivaut désormais quasiment au parc installé il y a seulement dix-huit mois ! D'ici à la fin de l'année, le chiffre des raccordements sera quadruplé, voir quintuplé, ce qui explique le chiffre exceptionnel de progression que j'ai cité.

Nous avons par ailleurs réorganisé la recherche appliquée en mettant en place un comité stratégique des grands talents français – l'IFP, le BRGM, l'INES, le CEA et le CNRS – afin de travailler de manière très rapide sur le stockage et le transport de l'énergie ainsi que sur les rapports entre les différents systèmes technologiques, ce qui permettra de développer les capacités d'intelligence entre les différents réseaux et de rendre bientôt préhistoriques les systèmes primaires de distribution d'énergie.

Les autorisations de programme sont désormais données conjointement par le ministère de la recherche et le ministère du développement durable, ce qui est une nouveauté, avec à la clé deux fois un milliard d'euros, sans oublier 400 millions d'euros dans le cadre de l'ADEME, ce qui permet d'augmenter les capacités d'intervention sur ce type de recherches énergétiques.

Enfin, nous conservons notre capacité intellectuelle, scientifique et technologique en matière nucléaire afin d'être capables, le moment venu, de renouveler le parc.

Un document approfondi, je le répète, vous sera communiqué mais la stratégie et les idées sont d'ores et déjà parfaitement claires : nous nous orientons vers une politique de rupture en matière d'émission de CO2 et d'augmentation des besoins énergétiques : alors que ceux-ci augmentaient de 3 % par an jusqu'à l'heure actuelle, nous nous orientons vers une diminution du même ordre, ce qui représente 40 % de la facture pétrolière sur la période. Dans le même temps, nous conservons nos capacités scientifiques tout en nous efforçant de rendre la filière des énergies renouvelables aussi puissante que nous avons rendu, dans le passé, les autres filières énergétiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Claude Birraux, président de l'office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Birraux

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, j'évoquerai essentiellement les travaux de l'office parlementaire dont vous savez combien ils ont structuré la politique énergétique française.

Je commencerai par ce qui fâche : la commission nationale d'évaluation financière, innovation que j'avais introduite dans la loi de 2006 afin de juger si les producteurs de déchets radioactifs consacrent bien à la gestion des déchets les provisions et actifs dédiés nécessaires, est restée lettre morte alors que, je tiens à vous le rappeler, elle devait rendre son premier rapport avant le 30 juin 2008 !

En ce qui concerne les travaux de l'office sur la stratégie nationale de recherche en énergie, l'évaluation nous en est confiée par la loi d'orientation sur la politique énergétique de 2005. Je ferai un constat sur la forme : il s'agit plus d'une compilation de l'existant que de la définition d'une véritable stratégie, incluant objectifs, voies et moyens. Bref, c'est tout sauf une véritable feuille de route engageant la responsabilité politique du Gouvernement, sous couvert de la signature des ministres de l'environnement et de la recherche, et présentée en conseil des ministres. Nous regrettons également l'absence d'un pilote stratégique.

Nous proposons de transformer le haut-commissaire à l'énergie atomique en haut-commissaire à l'énergie, la réduction de son titre contribuant à élargir ses compétences. Chacun des projets aura également un chef de file.

Enfin, pour l'évaluation, on pourrait s'inspirer de l'exemple de la commission nationale d'évaluation des recherches dans le domaine de la gestion des déchets radioactifs. Une telle commission, indépendante et comprenant des bénévoles, serait très positive.

Sur le fond, nous avons dégagé quatre sujets : les polymères minéraux, qu'il faudrait mieux étudier en vue de les substituer aux polymères issus de l'industrie chimique ou pétrochimique ; le photovoltaïque, pour lequel nous souhaitons développer une filière française, en particulier dans le domaine des plastiques photovoltaïques ; le gaz carbonique, son captage et sa séquestration, mais surtout sa valorisation en carburants liquides qui est très intéressante.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Birraux

La séquestration occasionnera les mêmes problèmes que tous les autres déchets, lorsqu'il s'agira d'enfouir le gaz carbonique profondément sous terre.

Enfin, les biocarburants de deuxième génération, auxquels nous sommes très favorables parce qu'ils utilisent la biomasse. Nous sommes attachés à la création du pilote dans la région de Meuse-Haute-Marne conformément aux engagements pris.

S'agissant du stockage d'énergie par pompage, nous souhaiterions que soit étudiée la faisabilité d'atolls de stockage en mer, qui pourraient apporter une réponse à l'intermittence des énergies renouvelables, en particulier de l'éolien, et qui permettraient, au lieu d'utiliser des appareils à flamme qui dégagent du CO2, de turbiner.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Birraux

Nous souhaitons que la pile à combustible soit d'abord consacrée aux usages mobiles. C'est pourquoi il faut se concentrer sur sa miniaturisation, domaine dans lequel les recherches profiteront aussi à des usages plus industriels et plus lourds.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Birraux

En conclusion, à la suite du débat énergétique de 2003, de la loi Énergie de 2005, des débats nationaux sur la gestion des déchets radioactifs, de la loi sur les déchets radioactifs, nous avons trouvé l'ensemble des acteurs extrêmement mobilisés. À l'office parlementaire, nous travaillons, avec Christian Bataille, sur la modulation des consommations des bâtiments neufs autour de 50 kilowattheures par an et par mètre carré. Nous nous sommes engagés à rendre nos conclusions avant la fin du mois de novembre.

J'invite ceux qui trouveraient que cela ne va pas assez vite à réfléchir à ce proverbe chinois : mieux vaut allumer une bougie que de maudire l'obscurité. (Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous en arrivons aux questions des groupes. Je rappelle que chaque question est limitée à une durée de deux minutes, de même que la réponse du ministre.

Nous prendrons les questions par groupe de trois, ce qui laissera au ministre six minutes pour y répondre.

Nous commençons par le groupe UMP.

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Monsieur le ministre d'État, l'ouverture des marchés suppose des règles et induit une régulation. Contrairement à la majorité précédente, qui avait ouvert sans précaution les marchés de l'énergie (Protestations sur les bancs du groupe SRC), notamment de l'électricité, en 2000, nous ne l'avons pas oublié et, à partir de 2002, nous avons mis en place des tarifs pour protéger les consommateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

C'est une économie soviétique que vous proposez !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Je rappelle pour mémoire : un tarif social pour l'électricité et le gaz, un tarif d'ajustement du marché pour les entreprises qui avaient quitté les tarifs régulés pour ceux du marché et qui avaient vu leurs factures d'électricité augmenter de façon impressionnante, et un tarif pour les nouveaux sites, après que le Conseil constitutionnel eût biffé une disposition de la loi de décembre 2006 rendant difficile l'accès des nouveaux logements, mais aussi des entreprises, à un tarif régulé à partir de l'année 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Lenoir, ce n'est pas l'obscurité, c'est l'obscurantisme !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Les systèmes mis en place étaient provisoires. Le fameux Tartam devait durer deux ans et a été prolongé.

Aujourd'hui, nous avons à légiférer sur des dispositions de protection des usagers de l'électricité et du gaz. La commission que vous avez mise en place, présidée par Paul Champsaur et à laquelle j'ai appartenu avec certains de mes collègues, vous a fait part de ses recommandations. Qu'entendez-vous en faire ?

Plus précisément, quelles sont les propositions qui vous paraissent susceptibles d'être retenues ? Par quel véhicule législatif passeraient-elles ? Quel calendrier envisagez-vous de nous proposer ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Aujourd'hui, dans tous les forums nationaux ou internationaux, une seule classification des énergies est valable et incontournable : les carbonées et les non carbonées. Dans cette dernière catégorie figurent l'hydraulique et le nucléaire. Soyons donc sérieux définitivement, nous qui, en France, possédons une électricité à 95 % sans gaz carbonique.

Dans le domaine de l'hydraulique, allez-vous, monsieur le ministre d'État, remettre de l'ordre à certaines dérives activistes et idéologiques allant jusqu'à exiger la déconstruction de certains barrages alors qu'il en faudrait de nouveaux ?

Nous disposons d'un potentiel nucléaire, hérité des cinquante-huit réacteurs du plan Messmer, dont trente-deux ont été construits sous la seule présidence de Valéry Giscard d'Estaing. Une chose est sûre : cela ne suffira pas demain. Nous n'avons en fait qu'une capacité de 50 000 mégawatheures disponible à un instant « T », alors que notre pic de consommation atteint 95 000 mégawatheures. Certes, c'est un pic de quelques heures, mais il nécessite d'importer à un prix « spot » très élevé.

Exporter de l'excédent n'est pas une mauvaise solution pour les finances nationales, le Président de la République lui-même l'a dit lors de sa visite du chantier EPR de Flamanville.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

D'ailleurs, après avoir confirmé l'EPR n° 2 à Penly et constaté que la consommation d'électricité croissait avec la démographie – et le développement des appareils électriques dans les sphères domestique et hospitalière, mais aussi voitures, numérique, pompes à chaleur, – il a aussi parlé du troisième. Un bon calendrier permettrait de le situer à Flamanville.

Confirmerez-vous cette décision rationnelle et logique ?

Nous avons aussi, en France, les meilleurs dans ces technologies : à côté d'EDF, GDF Suez, Alstom, RTE et ERDF exportent leur grand savoir-faire. Mais il y a aussi un leader bien particulier : le groupe Areva, créé en 2001. L'État actionnaire a-t-il aujourd'hui la volonté de l'accompagner dans son expansion internationale, et comment ? La bonne architecture industrielle sera-t-elle conservée ? Dans quel délai l'État envisage-t-il de donner le feu vert à l'opération d'augmentation du capital, chiffrée à 4 millions d'euros ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Diard

Monsieur le ministre, le 17 novembre 2008, le Gouvernement a présenté le plan de développement des énergies renouvelables de la France issu du Grenelle de l'environnement. Ce programme a pour objectif de porter à au moins 23 % la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie à l'horizon 2020, grâce à une augmentation de 20 millions de tonnes équivalent pétrole de la production annuelle d'énergie renouvelable.

Le plan Énergies renouvelables, qui est le « volet énergie » du Grenelle de l'environnement, marque à la fois un changement de modèle et un changement d'échelle. Il s'agit de passer d'un modèle essentiellement fondé sur le carbone et sur des ressources inégalement réparties sur la planète à un modèle totalement décarboné, où chaque maison, chaque entreprise et chaque collectivité devient son propre producteur d'énergie.

La mise en place, dès le 1er janvier 2009, d'un fonds chaleur renouvelable, doté d'un milliard d'euros pour la période 2009-2011, conformément à l'engagement n° 56 du Grenelle de l'environnement, a pour objectif de développer très fortement, à partir de sources renouvelables – bois, géothermie, solaire –, la production de chaleur dans le tertiaire et l'industrie, et d'améliorer et diversifier les sources de chauffage dans l'habitat collectif.

Ce plan comprend cinquante mesures opérationnelles qui concernent l'ensemble des filières : bioénergies, éolien, géothermie, hydroélectricité, solaire, énergies de la mer. Il a pour ambition un changement complet d'échelle, notamment sur le photovoltaïque, avec une production multipliée par quatre cents.

Pour cela, il est nécessaire de dynamiser très fortement le marché français, d'accélérer la recherche et l'innovation, et de bâtir une véritable industrie solaire en France. Comment comptez-vous atteindre cet objectif ?

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur Lenoir, vous m'avez interrogé sur un sujet, que vous connaissez bien pour avoir apporté vos lumières à la commission Champsaur, et qui est à la fois simple dans sa présentation et complexe dans sa solution.

Nous avons la chance d'avoir historiquement une électricité qui, en système fermé, était sensiblement moins chère que dans d'autres pays. L'électricité est un élément de la compétitivité industrielle et de pouvoir d'achat des ménages. Le développement des échanges internationaux d'énergie a transformé cette matière. Elle connaît aujourd'hui des pics qui nécessitent des échanges, lesquels créent des distorsions.

Clairement, nous souhaitons pouvoir continuer à assurer aux ménages français et aux entreprises stratégiques des conditions de prix électriques conformes à l'avantage particulier que nous avions. La commission Champsaur a réfléchi à un système inversé en quelque sorte, un système d'offre contrôlée et de distribution plus ouverte, de façon à garder l'avantage compétitif.

Le sujet est techniquement complexe. Il faut se méfier des effets rebond, qui peuvent poser problème. Nous y travaillons sur la base du rapport Champsaur. Une réunion interministérielle sera convoquée à la rentrée pour faire des propositions, probablement à l'automne, dans un véhicule qui n'est pas encore défini, car il dépendra de la solution adoptée. Nous veillerons très attentivement à ce qu'il n'y ait pas de perdant, je pense notamment à une des sources d'électricité à laquelle faisait allusion M. Gatignol : l'hydraulique.

La France, qui a inventé les barrages, a historiquement une puissance hydraulique majeure. Nous avons décidé le renouvellement global des concessions selon trois critères d'attribution : la sécurité, la performance et surtout les enjeux environnementaux. Grâce à cela, nous sortirons des affrontements souvent inutiles entre des contradictions qui font partie simplement de la vie. Ainsi, une partie de l'amélioration de la compétitivité des turbines sera affectée à la performance et une autre partie à l'amélioration environnementale des dispositifs, qui ont toute leur légitimité, à condition de rester dans des proportions mesurées et raisonnables. Nous avons besoin de toutes les formes d'énergies renouvelables dans notre pays.

S'agissant de la notion d'énergie carbonée et non carbonée, je dois dire que les choses évoluent à une vitesse étonnante. Lors de mon premier Conseil européen dans les fonctions que j'occupe actuellement, il y a moins de deux ans, le mot « décarbonée » prononcé par un Français était considéré comme une quasi-provocation. Et puis, à la fin du processus du paquet Climat-Énergie, l'Europe a décidé de rentrer vraiment dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Je me souviens d'une séance ici, dans une salle du deuxième étage, avec tous mes homologues et avec les parlementaires. Les Bulgares, les Hongrois, les Tchèques, un certain nombre de pays nous demandaient : « Pourquoi avez-vous accepté de ne pas utiliser le mot “décarbonée”, car nous avons besoin, pour honorer les engagements européens de ce type de filière énergétique ? »

C'est vous dire combien nous avons déjà évolué – c'est la vie qui est comme ça ! Pour autant, prétendre que le nucléaire représenterait la réponse à tous les enjeux européens serait une erreur profonde : on peut être fiers de notre technologie sans être déraisonnables.

Inaudible il y a peu, cette logique d'évaluation en termes d'énergies carbonées et décarbonées est aujourd'hui devenue acceptable dans le débat européen.

Quant à Areva, l'entreprise a besoin de ces fonds propres. Elle est suivie, comme vous le savez, par les agences de notation financière internationale. Elle a aussi dû financer le retrait de Siemens, prévue par un protocole. Le Président de la République, parfaitement au courant de ce dossier, nous a demandé de faire en sorte qu'Areva soit dotée des fonds propres qui lui permettent de se développer.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

En ce qui concerne le « fonds chaleur », la vraie rupture est que nous finançons la chaleur maintenant, grâce aux « fonds chaleur renouvelable ». Les appels d'offres « biomasse » 1, 2 et 3 sont achevés ; cela représente 300 mégawatts à chaque fois. Les centrales solaires régionales ont été lancées : nous sommes donc dans la logique des « fonds chaleur ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous en arrivons à trois questions du groupe SRC.

La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Vous nous indiquez vouloir développer les énergies renouvelables. Nous avons, pour notre part, voté en ce domaine les orientations du Grenelle de l'environnement.

Vous nous dites aussi que vous voulez maintenir les capacités technologiques de la France en matière de nucléaire – je rappelle que cette filière a été restructurée par Lionel Jospin. Je partage ce que vient de dire notre collègue Gatignol : c'est une filière importante, complémentaire des énergies renouvelables et non en contradiction avec elles.

Ma première question porte sur la biomasse de deuxième génération, dont il a été question lors de la première lecture du projet de loi Grenelle 1. Vous nous avez dit que deux unités de démonstration seraient construites en France : l'une, qui utilise la technologie de l'hydrolyse enzymatique et de la fermentation de la biomasse, est déjà en cours d'installation en Champagne ; l'autre, qui utilise la voie thermochimique, devrait se faire à Bure. Mais on attend toujours : nous souhaitons entendre vos explications.

Mon autre question porte sur le nucléaire. La filière nucléaire a été structurée de l'amont à l'aval, de l'extraction, de la concentration et de l'enrichissement des combustibles vers le traitement et le recyclage, l'assainissement des installations, la logistique, et les services – avec l'amélioration du fonctionnement des réacteurs. C'est une exceptionnelle réussite française.

Mais votre réponse sur Siemens a été très diplomatique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Ce départ n'a pas été expliqué. Quelles en sont les raisons ?

D'autre part, pensez-vous vraiment que le démantèlement de la filière de transmission et de distribution d'électricité – avec un Bouygues tout-puissant, roi du béton et désormais prince du nucléaire – soit une bonne solution française ? Pour ma part, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une façon souhaitable de financer le développement de cette filière.

Debut de section - PermalienPhoto de William Dumas

Je voudrais appeler votre attention, monsieur le ministre d'État, sur le vide juridique qui entoure les centrales photovoltaïques au sol.

En effet, les élus des communes rurales sont aujourd'hui assaillis de démarchages pour des projets surdimensionnés. Il s'agit d'une ruée vers l'or : dans nos régions du sud, très ensoleillées, les opérateurs s'engouffrent dans la brèche et montent des projets en espérant que ceux-ci verront le jour avant que le législateur ne réagisse. Par précaution, les préfets ralentissent les dossiers comme ils le peuvent. Dans mon département, le préfet a pris une ordonnance demandant une étude d'impact pour tout projet dépassant 1,9 millions d'euros.

Certains élus sont bien sûr intéressés par cette manne financière, et lancent des procédures de révision des plans d'occupation des sols, afin de pouvoir accueillir des fermes solaires. Quant aux agriculteurs, et surtout aux viticulteurs, effrayés par la maigre retraite qui les attend, ils se laissent séduire par ce business lucratif. Une fois de plus, l'argent est le nerf de la guerre ; et pourtant, nous sommes censés parler d'environnement !

Ces terres agricoles, rebaptisées zones constructibles, seront souillées pour des décennies par le béton, qui augmentera encore les risques d'inondation dans certaines régions. Nos paysages, qui attirent les touristes, seront dénaturés – sans même parler du problème du recyclage, lorsque ces panneaux montreront des signes de faiblesse et que leur rendement diminuera.

Sachant qu'il nous faut préserver la surface utile agricole dans le but de subvenir à nos besoins alimentaires, et maintenir une ceinture verte, donc un puits de carbone, il est totalement absurde de développer l'énergie solaire par le sacrifice de terres arables.

Quand allez-vous légiférer pour imposer une réglementation claire en matière de construction de fermes photovoltaïques ? Quand allez-vous faire inscrire dans le code de l'urbanisme des règles qui permettront de freiner cette ruée vers l'or, qui pourrait avoir des conséquences désastreuses ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je voudrais vous interroger, monsieur le ministre d'État, sur les interminables négociations autour de la fixation du tarif d'utilisation des réseaux publics, en particulier pour ERDF. Elles durent depuis au moins six mois ; des propositions ont déjà été faites, mais elles sont restées sans réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Où en est-on ? et surtout, que veut-on faire ? S'agit-il de faire des travaux, puisqu'on sait que peu de travaux ont été réalisés depuis une dizaine d'années ? S'agit-il d'entretenir l'existant, puisque la tempête a montré que l'entretien avait été insuffisant ? Ou bien ne s'agirait-il pas, tout simplement, de gagner de l'argent pour la maison mère ?

Car enfin – je le tiens de M. de Ladoucette, président de la Commission de régulation de l'énergie – il y a bien un contrat entre ERDF et EDF, qui oblige le premier à faire 10 % de bénéfice net et à rendre 75 % de ce bénéfice à la maison mère. La vraie question est donc : l'augmentation du tarif d'utilisation des réseaux publics sert-elle uniquement à augmenter les bénéfices d'EDF ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

L'État est d'ailleurs lui-même concerné, puisqu'il est le principal actionnaire d'EDF. Il est important que vous nous répondiez ; car si tel était le cas, la question se poserait – pour ERDF comme pour RTE, gestionnaire du réseau de transport d'électricité français – de la séparation complète des entreprises. Car ici, la situation n'est pas celle d'une pompe à chaleur, mais d'une pompe à fric : ce sont les consommateurs d'énergie qui payent tout cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Je réponds d'abord à M. Le Déaut : nous attendons la proposition de validité totale pour Bure ; nous l'espérons dans les semaines qui viennent, en tout cas avant l'été.

S'agissant de T&D, je vous fais remarquer que l'entreprise a eu une longue vie – elle a notamment appartenu à Schneider. Elle n'est donc pas un enfant du dispositif nucléaire français, ce qui ne veut pas dire que ce ne soit pas une belle entreprise. Les opinions des salariés divergent d'ailleurs beaucoup sur ces questions. Je voudrais surtout, ici, dédramatiser le sujet et ramener un peu de sérénité dans ce débat : il ne s'agit en rien de démanteler Areva, et en tout état de cause la décision finale n'a pas été prise.

Monsieur Dumas, vous avez absolument raison : il y a un vide juridique. Un décret est actuellement examiné en conseil d'État, conformément à ce qui est prévu dans le plan « énergies renouvelables » du mois de novembre. J'espère qu'il sera rapidement prêt : le débat sur ces questions doit s'organiser. À partir de 250 mégawatts, il nous paraît naturel qu'un débat public et un permis soient nécessaires. Nous nous sommes également penchés sur les conflits d'usage et sur l'interdiction de transformer des terres agricoles pour installer ce type de dispositifs. Vous aurez donc totalement satisfaction.

Monsieur Gaubert, sur le tarif d'utilisation des réseaux publics, les choses sont très claires : j'ai refusé au mois de décembre la proposition qui m'a été faite, parce qu'elle ne comportait pas d'engagement clair en matière d'efficacité et de sécurisation des réseaux. Une nouvelle copie vient d'arriver, qui répond à ces questions. Ce tarif d'utilisation a bien pour raison d'être l'efficacité et la sécurisation des réseaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous en venons aux questions du groupe GDR.

La parole est à M. Daniel Paul.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Ma question portera sur le projet de terminal méthanier à Antifer, en Seine-Maritime. Le développement du gaz naturel liquéfié est présenté comme devant sécuriser l'approvisionnement de notre pays, compte tenu de l'instabilité de plusieurs zones de production de gaz et de l'alternative que peuvent offrir les méthaniers aux gazoducs.

On sait aussi que l'intérêt du gaz naturel liquéfié est qu'un méthanier peut être dérouté en fonction des cours du gaz sur tel ou tel marché – ce qui est évidemment plus difficile avec un gazoduc. Ne soyons donc pas dupes des intérêts en présence.

Cinq projets de ports méthaniers – à Fos, au Verdon, à Montoire, à Antifer et à Dunkerque – ont été déposés. À Antifer, il est porté par un groupe privé lancé par Poweo, et au sein duquel se mêlent des intérêts divers.

Une forte opposition à ce projet s'est exprimée lors du débat public, non seulement de la part des élus et habitants de la région de Saint-Jouin-Bruneval où se trouve Antifer, mais aussi de la part d'élus et d'associations au-delà de ce secteur précis. Un projet alternatif, pouvant cohabiter avec l'actuel port pétrolier, mais ouvrant la voie à une évolution que l'on sait aujourd'hui inéluctable, est porté par la nouvelle équipe municipale de Saint-Jouin-Bruneval.

Que notre pays importe plus de gaz naturel liquéfié et équilibre ainsi ses approvisionnements n'est pas de mauvaise politique. Mais l'existence de cinq projets répond à l'évidence à d'autres intérêts que ceux de sécuriser les besoins de notre pays. C'est ce qui se dit au Verdon, et c'est ce qui se dit à Antifer.

Il n'est pas acceptable, monsieur le ministre d'État, alors que le débat public avait mis en évidence une forte contestation, et l'existence d'un projet alternatif, que le 24 mars, la décision ait été prise en catimini de déclarer le projet de port méthanier d'Antifer d'intérêt général, que cela ne soit rendu public que deux mois après, et que le maire de la commune concernée n'ait pas été officiellement informé de cette décision, dont les modalités laissent par ailleurs perplexe.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Le forcing effectué interroge, y compris certains qui n'étaient pas opposés au projet. Quels intérêts se cachent derrière cette décision ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Ma question portera sur le nucléaire. Il y aurait beaucoup à dire sur les propos de M. le ministre d'État concernant la stratégie de politique énergétique de la France, mais je n'en ai pas le temps.

Je lis une dépêche de l'agence Bloomberg – peu susceptible d'être tenue par des écologistes extrémistes, comme il paraît que je pourrais l'être.

M. Barack Obama, nouveau président des États-Unis – que tout le monde aime en Europe et que nous allons recevoir très bientôt – a nommé un nouveau président pour la Commission fédérale de la régulation de l'énergie, qui dispose à peu près des pouvoirs de notre Commission de régulation de l'énergie, mais donne aussi les autorisations pour les centrales. Ce nouveau président, M. Jon Wellinghoff, a tenu une conférence de presse le 22 avril dernier. Interrogé par un journaliste sur la question de savoir si, comme en Europe ou en Chine, les États-Unis allaient connaître un renouveau du nucléaire, il répond : « les centrales nucléaires sont bien trop chères. Le dernier prix que j'ai vu pour un tel équipement dépassait 7 000 dollars le kilowatt installé de puissance, soit un coût supérieur à celui des systèmes solaires décentralisés ».

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il me reste vingt-et-une secondes, monsieur le président !

Ma question est la suivante. Il y a aux États-Unis vingt-six projets de nouveaux réacteurs ; il est aujourd'hui probable qu'aucun d'entre eux n'aboutira. Ce pays ne sera donc pas en mesure de fournir, notamment à Areva, un marché pour l'expansion du nucléaire. Allons-nous continuer à faire en France autant de nucléaire, avec des possibilités d'exportation, ce qui est aussi mauvais économiquement qu'écologiquement ?

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je voudrais évoquer les énergies renouvelables, et le léger décalage que l'on observe entre vos discours et vos actes.

Dans le projet de loi Grenelle, qui n'est toujours pas adopté, est inscrit l'objectif de 23 % d'énergies renouvelables dans l'énergie consommée en France. Mais on voit bien, amendement après amendement, proposition de loi après proposition de loi, que le passage à l'acte se révèle toujours très compliqué.

C'est particulièrement vrai pour l'énergie éolienne. Je crois qu'il faut le dire franchement : je ne sais pas si vous le reconnaîtrez, monsieur le ministre d'État, mais vous avez un problème avec l'éolien – en tout cas, la majorité UMP a un problème avec l'éolien.

C'est patent depuis longtemps, notamment depuis le débat sur la loi de 2005 et l'incroyable proposition de notre collègue Serge Poignant qui a tenté de faire passer l'idée que les Français et les élus locaux étaient hostiles à l'éolien. Fort heureusement, cette proposition avait été rejetée.

Aujourd'hui, la demande d'éolien est forte et l'initiative vient de la base : élus locaux, entrepreneurs, citoyens ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Poignant

Faire de l'éolien oui, mais pas n'importe comment !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

J'en veux pour preuve une étude publiée, en avril 2009, par votre ministère, monsieur Borloo, et intitulée : « L'acceptabilité sociale des éoliennes : des riverains prêts à payer pour conserver leurs éoliennes ». (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Dans mon département, en Loire-Atlantique, sur vingt-sept projets d'implantations d'éoliennes, vingt et un sont actuellement bloqués par l'administration.

Quand allez-vous donner, monsieur le ministre, des instructions très précises afin que votre propre circulaire soit respectée par les préfets et qu'ils fassent sauter les verrous qui empêchent l'installation des éoliennes dans notre pays ? (M. Yves Cochet applaudit.)

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Un peu de mesure, monsieur de Rugy ! Je sais que dans votre circonscription, certaines associations de défense de l'environnement s'opposent aux projets que vous soutenez ! Mais, nous devons tous gérer des contradictions... (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

Les avis sont partagés : dans certaines régions, la population soutient les projets d'installations d'éoliennes et, dans d'autres, c'est le contraire.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Et dans certains endroits, même les associations – celles qui vous sont proches – y sont opposées. Posez, par exemple, la question à la ligue pour la protection des oiseaux !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Les entrepreneurs, les élus et les habitants y sont favorables.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur de Rugy, je ne peux pas vous laisser tenir des propos inexacts. L'éolien est actuellement en plein développement. Les préfets de la République, je peux vous rassurer, font respecter la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est pour cela qu'il y des contentieux devant le tribunal administratif !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Certes, ils peuvent parfois se tromper. Cela étant, nous souhaitons développer l'éolien, mais nous voulons éviter le mitage. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.) Il me semble que vous pouvez admettre que le mitage peut poser problème dans certains paysages. De grâce, sortons de ces faux débats. Depuis deux ans, l'évolution de l'éolien, dans notre pays, suit une courbe ascensionnelle, et il se pose plus de problèmes d'acceptation des éoliennes dans le nord de l'Europe qu'en France.

Certes, nous devons développer l'éolien de manière organisée et regrouper les éoliennes en parcs, mais nous devons éviter le mitage afin de préserver les hauts lieux du paysage français.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Il me semble que c'est ce que nous souhaitons tous.

Monsieur Paul, vous êtes favorable au développement du gaz.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

C'était ce que j'avais cru comprendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Vous aurez mal compris, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Soit. Vous êtes contre le gaz… (Rires.)

En tout état de cause, nous avons, pour des raisons de sécurité énergétique, décidé de déclasser un certain nombre de centrales à charbon qui sont dans un état inacceptable. Permettez-moi de citer l'exemple de la Corse. Les élus corses ont, à l'unanimité, demandé un raccordement par voie terrestre depuis Olbia afin de pouvoir fermer les centrales à charbon du côté d'Ajaccio et de Bastia, parce qu'elles sont extrêmement polluantes. Le gaz étant moins polluant que les centrales à charbon, il faut développer des infrastructures – et Antifer en fait partie – qui seront soumises à un certain nombre de règles. Il peut y avoir un projet d'intérêt général, et dans ce cas l'État sera impliqué. Mais l'État devra, au même titre que les opérateurs privés, respecter les obligations figurant dans le Grenelle de l'environnement.

Vous avez cité les propos de Jon Wellinghoff, monsieur Cochet. Permettez-moi de vous faire remarquer que le secrétaire d'État à l'énergie américain, Steven Chu, est plus nuancé. J'observe, du reste, que les États-Unis ont le projet de réaliser près d'une trentaine de centrales nucléaires. Alors prétendre que c'est de là-bas que doit « venir la lumière » alors que les Américains n'ont pas renoncé à l'énergie nucléaire et que nous débattons avec eux sur les émissions de gaz à effet de serre…

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Vous nous avez dit que selon certains, cela coûte cher ; d'autres prétendent le contraire pour l'électro-intensif. L'énergie n'est pas uniforme et n'a pas les mêmes fonctions partout. Admettez, monsieur Cochet que les opinions peuvent être diverses et que pour certaines personnes, ce n'est pas la réponse universelle. L'urgence absolue, aujourd'hui, c'est la course contre la montre que nous menons pour lutter contre les gaz à effet de serre.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Au demeurant, la France n'est pas dans une phase d'augmentation de sa capacité nucléaire, mais dans une phase de stabilisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous en venons maintenant aux questions du groupe Nouveau Centre.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

La tempête Klaus de janvier 2009 a rappelé, en provoquant des coupures de courant qui ont touché 1,7 million de foyers, que l'enfouissement des lignes à moyenne tension doit être une priorité.

Déjà, en 1999, après la tempête de décembre, la question de la sécurisation des réseaux de distribution s'était déjà posée. Des décisions avaient alors été annoncées d'enfouir 90 % des nouvelles lignes à moyenne et basse tension. Entre 2000 et 2008, 62 500 kilomètres de lignes à moyenne et basse tensions, seulement, ont été enfouies. Mais il reste le problème des 1,3 million de kilomètres de lignes de tension aériennes.

Oui, les investissements sont lourds, EDF estimant à 100 milliards d'euros le coût d'un enfouissement total des lignes restantes, mais ils sont nécessaires ; le bilan de la tempête Klaus en est la preuve. Nous sommes encore 25 % à 30 % en dessous du niveau d'investissement nécessaire.

EDF prévoit d'enfouir 5 000 kilomètres par an. À ce rythme, il faudrait deux cents ans pour enfouir l'ensemble du réseau !

Qu'allez-vous donc faire, monsieur le ministre, pour accélérer le processus d'enfouissement des lignes électriques ?

Quel financement supplémentaire allez-vous envisager ? Nous avons eu un débat intéressant avec notre collègue Jean Gaubert sur le tarif d'utilisation des réseaux publics. Une hausse trop importante de ce tarif ne peut être envisagée car son coût est supporté par les consommateurs. Comment, dans ces conditions, comptez-vous faire, pour assurer un partage équitable du financement entre les consommateurs et les actionnaires d'une part et, d'autre part, des investissements entre les quatre métiers d'EDF, la production, le transport, la distribution et la commercialisation ? Le réseau est le parent pauvre : quand cela va-t-il changer ?

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Le Grenelle de l'environnement, qui progresse, dans son parcours législatif, affiche de nombreuses ambitions, notamment celle de donner une impulsion nouvelle aux énergies renouvelables. Leur part dans la consommation énergétique doit ainsi être portée à 23 % d'ici à 2020, comme notre collègue François de Rugy le rappelait tout à l'heure à sa façon.

L'objectif est ambitieux, certes, mais il est à la mesure des défis que nous devons relever en matière de lutte contre le changement climatique.

Il est d'autant plus ambitieux que nous sommes à la traîne en matière d'équipements en énergies renouvelables, surtout si l'on ose la comparaison avec nos voisins allemands ou nordiques qui ont, depuis plusieurs années, fait preuve d'une volonté politique généreuse et tenace.

Les objectifs ont été fixés – c'est une première étape. Un suivi régulier de la progression de la part des énergies renouvelables dans notre bouquet énergétique est essentiel pour permettre à ces filières de se structurer et de devenir compétitives.

Cette construction, trop lente à mes yeux, a certes un intérêt environnemental, mais également un intérêt économique et il est important de ne pas toujours opposer les deux. Des milliers d'emplois ont été créés et des dizaines de milliers d'autres le seront d'ici dix à quinze ans.

Pour atteindre cet objectif, il faut absolument accompagner la structuration des filières, que ce soit pour l'éolien, le photo-voltaïque, le géothermique et, bien entendu – on ne comprendrait pas que le président du groupe d'études sur les biocarburants ne l'évoque pas –, la biomasse.

Pouvez-vous nous donner, monsieur le ministre, votre sentiment sur l'évolution de ces filières pour les dix à vingt ans qui viennent ?

Pouvez-vous également éclairer la représentation nationale sur les modalités d'accompagnement, actuelles et à venir, pour favoriser la nécessaire structuration de ces filières ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Durand

Dans le contexte actuel de raréfaction des sources d'énergie fossile et de changement climatique, le choix du nucléaire n'est pas à remettre en question, d'autant que les progrès de la recherche en la matière en feront l'énergie de demain. Aujourd'hui, la France dépend à 80 % du nucléaire pour son électricité, ce qui lui vaut d'être compétitive par rapport à ses voisins européens et représente un réel avantage pour les consommateurs.

Pourtant, il existe de vraies zones d'ombre quant à la question du renouvellement du parc nucléaire. Nous avons aujourd'hui cinquante-huit tranches pour une puissance installée de soixante-trois gigawatts et nous avons déjà décidé la création de deux EPR.

Que va-t-il se passer pour les réacteurs les plus anciens dont la durée de vie est initialement fixée à trente ans, mais dont nous savons qu'elle peut être prolongée si les investissements de maintenance correspondants sont réalisés ? Le débat à l'horizon 2020-2030 est occulté. Pourtant, c'est maintenant qu'il faut savoir si l'on s'achemine vers un renouvellement à l'identique du parc actuel ou si on décide de l'augmenter, avec un nouvel EPR, par exemple, ou, au contraire, de le diminuer avec des énergies renouvelables que le Grenelle souhaite porter à 23 % du total ? Conjointement à cette stratégie, se pose l'inévitable question du financement.

Merci de nous éclairer, monsieur le ministre, sur votre vision en la matière. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Contrairement à une idée reçue, le taux d'enfouissement des lignes en France est très élevé.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

L'un des plus élevés d'Europe !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

J'ai dit l'un des plus élevés. Sachez que 900 kilomètres supplémentaires ont été enfouis. C'est d'ailleurs dans cette optique que nous avions refusé la première proposition de tarif d'utilisation des réseaux publics. Cela étant, l'enfouissement n'est pas la réponse de sécurisation optimale partout. Ce serait une erreur que de le penser. Dans certains endroits, il représente indéniablement une amélioration, mais dans d'autres, c'est l'inverse. Toujours est-il que nous y consacrons 200 millions d'euros par an.

S'agissant de la biomasse, monsieur Demilly, nous devons maintenir les engagements dans ce domaine et consacrer les investissements à la biomasse de deuxième génération.

Quant aux EPR, la position du Gouvernement est claire : le premier est en construction, le second se construira à Penly car nous avons besoin de garantir nos capacités dans la filière industrielle nucléaire, car il faudra bien construire un jour de nouvelles centrales, en raison notamment du démantèlement des anciennes, cela me paraît tout à fait clair.

C'est l'Autorité de sûreté nucléaire, organisme indépendant, qui donnera le feu vert et indiquera le rythme d'évolution. La France garde donc les marges de manoeuvre suffisantes pour faire face à tous les aléas et prendre la décision qui s'impose, compte tenu de la position de l'ASN.

Nous n'avons fixé aucune date, contrairement à ce qu'on a pu lire ici ou là sur l'échéance de 2020. Nous nous tenons prêts, forts de nos compétences, pour nous adapter le moment voulu. À l'heure actuelle, il est certain qu'il n'y a pas de besoins immédiats massifs à satisfaire. Grâce au développement des énergies renouvelables et à l'amélioration de l'efficacité énergétique, la France garde sa capacité de décider de la construction d'EPR, en fonction des nécessités et des aléas.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous en revenons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. François-Michel Gonnot.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Michel Gonnot

La France fait figure de modèle en matière de politique énergétique, comme le rappelait à juste titre le président Ollier. Pour le gaz comme pour l'électricité, elle a su imposer des opérateurs forts, intégrés, alliant plusieurs énergies. Elle a su également, notamment en matière de politique gazière, établir des partenariats diversifiés, ce qui lui a permis de sécuriser ses sources d'approvisionnement. Enfin, elle a su conclure des contrats à long terme, autre élément concourant à la sécurité des approvisionnements.

Toutefois, les politiques énergétiques sont aujourd'hui de moins en moins nationales. En Europe, elles sont avant tout communautaires ; nos opérateurs sont en concurrence mais la nécessité de parler d'une même voix se fait de plus en plus ressentir, particulièrement en matière gazière. C'est là toute l'ambiguïté et la difficulté de notre situation. Ce sont aussi autant de défis que nous avons à relever pour demain.

La question est de savoir comment trouver, au niveau des Etats et au niveau de l'Union européenne, une meilleure façon de s'organiser et de dialoguer, notamment avec les principaux États fournisseurs de gaz : Russie, pays du Golfe.

Le Président de la République a émis une idée originale qui s'appuie sur le projet fort de mutualiser les contrats de fourniture de gaz. Cela signifie-t-il qu'il faille travailler à la création d'une agence européenne ? Faudra-t-il encourager les fournisseurs européens de gaz à travailler avec les grandes régions productrices ? Dans cette perspective, il m'apparaît important de savoir, monsieur le ministre, quelles initiatives la France pourrait continuer à prendre au niveau européen pour porter cette politique ambitieuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Nicolas

Dans la lutte contre le réchauffement climatique, dont chacun s'accorde à dire qu'elle est essentielle pour l'avenir de notre planète, la France est en pointe, comme en témoignent plusieurs dispositions qu'elle a déjà prises. Parmi celles-ci figure un dispositif particulièrement innovant, institué par la loi de programme du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique : les certificats d'économie d'énergie. Fondés sur un principe de bon sens – la meilleure des énergies est celle que l'on ne consomme pas –, ils contraignent certains acteurs du monde énergétique à réaliser des économies d'énergie soit pour leur propre compte, soit pour leurs clients. En l'absence d'économies, les obligés – vendeurs d'électricité, de gaz, de chaleur, de froid ou de fioul domestique – sont tenus de verser une pénalité libératoire par kilowattheure manquant. Ce dispositif connaît un réel succès puisque l'objectif national d'économie d'énergie, fixé à 54 térawattheures pour la période du 1er juillet 2006 au 1er juillet 2009, semble avoir été d'ores et déjà atteint, voire dépassé, ce qui atteste l'implication des fournisseurs d'énergie en faveur de la promotion de la maîtrise de la demande énergétique dans notre pays.

Toutefois, si nous voulons respecter les objectifs de baisse de l'intensité énergétique – 2 % en 2015 et 2,5 % en 2030 – confirmés tant par le Grenelle de l'environnement que par l'Union européenne dans le cadre du paquet « climat énergie », il faudra aller au-delà du seuil de 54 terawattheures et prendre de nouvelles mesures.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous dresser un bilan de la mise en oeuvre des certificats d'économie d'énergie et nous préciser les perspectives d'évolution du système telles qu'elles sont envisagées par l'article 27 du projet de loi portant engagement national pour l'environnement, dit « Grenelle 2 » ?

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur Gonnot, comme nous avons pu le constater avec la crise ukrainienne, l'indépendance énergétique passe par une solidarité énergétique, enjeu européen majeur. Cela nécessite de la transparence, des systèmes intégrés et des réseaux de transport d'énergies allant dans un sens comme dans l'autre, ce qui suppose des modifications technologiques car, actuellement, ils ne sont orientés que d'Est en Ouest. À cela s'ajoutent des systèmes de stockage et des infrastructures reposant sur des approvisionnements diversifiés, ce qui nous ramène à la problématique évoquée à propos des ports méthaniers.

S'agissant des certificats d'économie d'énergie, monsieur Nicolas, je vous confirme que cette procédure de bon sens rencontre un réel succès. Selon les estimations de l'ADEME, les économies potentielles s'élèveraient actuellement à 70 terawattheures. Nous pensons pouvoir atteindre 100 terawattheures d'ici à deux ans. Des dispositions seront prises dans le cadre du prochain Grenelle 2 afin d'augmenter les capacités d'économies de l'ordre de 2 % à 3 % et d'établir des assises plus larges.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Philippe Plisson.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Monsieur le ministre, permettez-moi tout d'abord de souligner que la réponse que vous avez faite à mon collègue Jean Gaubert était incomplète.

Pour en venir à ma question, je soulignerai que nous soutenons l'engagement affiché dans la loi dite « Grenelle 1 » de porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation d'ici à 2020. Cependant force est de constater l'écart entre cet affichage fort et la mise en oeuvre de cet objectif sur le terrain.

En matière d'énergie solaire, comme l'a montré William Dumas, on constate le déploiement de développeurs vautours, qui fondent sur les territoires fragilisés – régions viticoles du Sud de la France victimes de la chute des cours ou massifs forestiers des Landes dévastés par la tempête Klaus – afin de négocier l'achat de vastes terrains avec les propriétaires aux abois, dans la plus grande anarchie. La mise en place d'un cadre réglementaire s'impose ici pour éviter le mitage désordonné des paysages.

L'installation d'éoliennes est à l'inverse très encadrée. La procédure de la zone de développement éolien – la ZDE – définit les règles d'installation par arrêté préfectoral à l'issue d'un long processus de concertation. Paradoxalement, sans doute sous la pression de puissants lobbies énergétiques que chacun connaît, la surenchère réglementaire prévaut en ce domaine : outre l'étude d'impact et l'enquête publique, le législateur prévoit la soumission des parcs éoliens à une procédure d'autorisation relevant du régime des installations classées pour la protection de l'environnement – ICPE –, complètement disproportionnée par rapport à l'impact des parcs éoliens puisque les pylônes des lignes à haute tension en sont exonérés. Il s'agit à l'évidence de privilégier les parcs les plus vastes, et donc les plus gros opérateurs, ce qui aboutira dans les faits à porter un coup d'arrêt à cette filière énergétique.

Trop de laxisme ici, trop de règlements là : il apparaît indispensable de mettre à plat la politique de développement des énergies renouvelables en lui fixant pour objectif une organisation efficace, rationnelle et objective qui tienne compte de la spécificité des territoires.

Monsieur le ministre, si vous voulez que les engagements du Grenelle ne restent pas des voeux pieux, il faut donner les moyens d'agir à la puissance publique à la hauteur des objectifs affichés. Comptez-vous agir en ce sens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvia Pinel

Monsieur le ministre, à l'heure où l'état de notre planète impose une transformation profonde de nos modes de vie, la France doit se doter d'une politique énergétique puissante. Il est par conséquent indispensable de concevoir une véritable politique européenne de l'énergie. Mais force est de constater que la politique menée par l'Union européenne en ce domaine a été jusqu'à présent pour le moins insuffisante. La Commission européenne s'est en effet lancée dans une vaste entreprise de libéralisation des marchés de l'énergie. Censée accroître la concurrence et entraîner par là même une diminution des tarifs pour les consommateurs, cette dérégulation a conduit au démantèlement de notre service public de l'électricité et du gaz, de sa distribution particulièrement, au profit de quelques grandes entreprises, désormais privées. Les radicaux de gauche souhaiteraient savoir quelles actions vous comptez entreprendre pour éviter que la politique énergétique européenne ne sacrifie, au nom du libéralisme, l'égal accès de tous au service public de l'électricité.

Mon second point concerne un secteur qui se trouve au coeur des préoccupations énergétiques de notre pays : le nucléaire civil. Les cinquante-huit réacteurs dont la France dispose produisent plus de 80 % de notre électricité, en fournissant une énergie pauvre en carbone dont le prix n'est pas lié aux fluctuations des énergies fossiles. Maillon essentiel de notre indépendance énergétique, les centrales nucléaires contribuent en outre au développement économique des territoires sur lesquels elles sont implantées, comme je le constate dans ma circonscription de Tarn-et-Garonne.

Cependant, notre réseau nucléaire gagnerait à davantage de transparence. À cet égard, l'absence d'une autorité de contrôle véritablement indépendante des opérateurs et des pouvoirs publics est d'autant plus inquiétante que notre parc atomique vieillit et que la sécurité est la principale problématique de ce secteur. Je veux parler bien sûr de la prévention d'éventuels accidents, mais également et surtout du traitement des déchets radioactifs dont le stockage pour un temps indéfini ne saurait constituer une solution satisfaisante.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur la politique menée en matière de gestion et de développement du parc nucléaire français ?

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur Plisson, je comprends votre position : non au mitage, oui au développement. Mais il faut veiller à trouver un juste milieu entre l'absence de réglementation et un régime d'ICPE alourdi. Dès lors que l'on se situe dans un climat consensuel, dans le cadre du schéma régional, il importe donc de trouver une procédure ad hoc, qui encourage la concertation et évite le mitage. Nous sommes dans une phase de transition dont l'aboutissement vous donnera, je pense, satisfaction.

S'agissant de la politique énergétique européenne, madame Pinel, sachez que la France, lors des divers conseils européens consacrés à l'énergie, s'est prononcée contre le découplement des réseaux de distribution et de la production au sein de notre grand opérateur qu'est EDF tout en assurant une concurrence parfaitement loyale dans l'accès aux réseaux, avec la possibilité offerte d'acquérir l'électricité produite en France.

Pour ce qui est du nucléaire civil, la France conserve ses atouts stratégiques. Elle doit pouvoir répondre à tout moment aux demandes formulées par l'ASN concernant la construction de centrales de nouvelle génération. Je le dis et le répète car il semblerait que des interprétations ambiguës, volontaires ou pas, soient faites : nous avons une capacité nucléaire, nous souhaitons continuer à la maintenir, l'ASN nous dira quand le renouvellement de nos équipements s'imposera.

Pour ce qui est des déchets, nous continuons à développer des solutions, notamment s'agissant des déchets de faible activité à vie longue. Une procédure est engagée pour les deux à trois ans qui viennent. Certaines collectivités se sont déclarées prêtes à accueillir ce type de déchets. Des décisions seront prises en ce domaine dans les vingt-quatre mois à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Pour le groupe GDR, la parole est à M. Jacques Desallangre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Desallangre

Monsieur le ministre, avec mon collègue Jean-Jacques Candelier, nous souhaiterions obtenir du Gouvernement des éclaircissements sur sa politique à l'égard d'Areva et sur les dissonances fréquentes en matière de conduite de la stratégie industrielle avec la direction de ce groupe.

Comme tant d'autres, je suis attaché à la sauvegarde de notre relative indépendance énergétique et au renforcement de la sécurité de nos approvisionnements. Depuis 1945, les gouvernements successifs avaient conservé le caractère public de nos grands opérateurs. Hélas, la privatisation de GDF et l'ouverture du capital d'EDF sont survenues. Qu'en sera-t-il demain pour Areva ?

Areva en tant qu'opérateur nucléaire intégré, maîtrisant l'ensemble du cycle du combustible, est un atout indispensable pour la nation. Le défaut que vous lui trouvez ne serait-il pas d'être une entreprise publique rentable, dynamique, une structure qui remplit une réelle mission de sécurité économique publique tout en étant leader sur son marché et profitable ?

Vous n'avez cessé de négliger ce bel édifice public au risque de le livrer aux prédateurs, il est vrai amis du Président de la République. Areva vous y a parfois aidé en n'assurant pas le succès de son partenariat avec Siemens.

Aujourd'hui, Areva a besoin d'investissements pour assurer son développement. L'État, actionnaire principal – 93 % – ponctionne plusieurs milliards par an au titre des dividendes qu'il reçoit. Aura-t-il la correction de jouer son rôle et d'investir ou en profitera-t-on pour démembrer le groupe ?

Les dirigeants d'Alstom et Bouygues souhaitent élaborer un montage commun, mais Mme Lauvergeon n'en veut pas, arguant d'un défaut de stratégie industrielle.

Dans le même temps, Areva vend ses participations dans GDF Suez et Total alors que la Bourse est dans ses eaux basses et que cette opération ne couvrira même pas le tiers de ses besoins de financement.

Enfin, puisque vous n'avez pas pu marier Alstom et Areva, vous cherchez maintenant à imposer un démantèlement en forçant la vente d'Areva T&D,...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Desallangre

..dernière absurdité industrielle refusée à nouveau par Mme Lauvergeon. Areva T&D représente 40 % du chiffre d'affaires et la moitié de son résultat opérationnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Desallangre

Ma question est la suivante : monsieur le ministre, quelles vont être vos décisions ? Nous avons besoin de le savoir car nos craintes sont réelles.

Monsieur le président, avec une telle procédure, on frôle vraiment le ridicule !

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Monsieur Desallangre, il faut respecter cette procédure qui vaut pour tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Vous en avez le droit, mais le règlement, c'est le règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le ministre, ce que je contestais tout à l'heure, c'est le projet de cinq ports méthaniers quand trois, c'est-à-dire un sur chaque façade maritime, suffiraient à l'approvisionnement de notre pays.

J'en viens à ma question.

La baisse de 11,3 % du prix du gaz au 1er avril 2009 a été très insuffisante. Le prix du gaz étant indexé sur celui du pétrole, les deux ont vu leur montant exploser jusqu'en juillet 2008.

Les charges de chauffage ont grimpé de 40 à 50 % pour certains foyers, pour couvrir l'hiver dernier. Or depuis, le prix du pétrole a baissé de 70 %, mais pas celui du gaz.

Certes, les tarifs réglementés évoluent en fonction des coûts, notamment d'approvisionnement en gaz naturel, et ces derniers sont indexés sur les prix du pétrole. Certes, l'indexation n'est pas instantanée, mais il est abusif de vouloir expliquer la baisse insuffisante du prix du gaz, comme vous le faites, par le fait que les contrats d'approvisionnement de GDF Suez avec les pays producteurs comportent des clauses de lissage qui induisent un effet retard de l'ordre de six mois.

Il est inacceptable de continuer à faire payer la facture aux usagers, afin de préserver les bénéfices des sociétés gazières, sachant accessoirement que l'État, actionnaire de GDF Suez, en profite largement.

Puisque le Gouvernement avait décidé de geler les tarifs réglementés cet hiver, il est essentiel que l'État agisse fortement à nouveau. Je demande donc que le tarif régulé soit maintenu et que les ménages obtiennent, comme les entreprises, une baisse de 20 % avec effet rétroactif au 1er janvier 2009. Avec près de 7 milliards d'euros de profits en 2008 pour GDF Suez – mais ce n'est qu'un exemple de fournisseur – les moyens existent.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur Desallangre, nous sommes très attachés à la structure intégrée du nucléaire français et nous souhaitons qu'Areva ait les moyens de son développement. Pour le moment, il n'est pas question d'autres opérations.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

S'agissant du gaz, monsieur Paul, je me permets de vous rappeler que nous sommes revenus au tarif de 2008 et qu'il y a effectivement un effet de lissage à la hausse, ce qui entraîne une hausse moins rapide. C'est ainsi que nous avions refusé les augmentations massives qui nous avaient été demandées au moment où, indexé sur le prix du baril, le prix du gaz explosait. Le même phénomène de lissage à la baisse existe bien évidemment. En conséquence, la baisse est moins forte, ce qui ne nous a pas empêchés de mettre en place et de développer le tarif social du gaz.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Pour le groupe NC, la parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

En matière énergétique, l'Europe produit des directives, et c'est utile. Elle sait donner des orientations, fixer des objectifs, imposer des contraintes, harmoniser des situations. Mais l'Europe de l'énergie ne peut-elle pas être autre chose que cet espace juridique et ces contraintes ?

L'Europe de l'énergie a de grands défis à relever, notamment celui de l'interconnexion des réseaux nationaux d'électricité, interconnexions qui sont aujourd'hui insuffisantes et inefficaces alors même qu'elles pourraient résoudre une partie des besoins en sécurisation des sources d'approvisionnement, tout en favorisant la concurrence et en permettant l'émergence d'un nouveau marché européen de l'énergie.

C'est là aussi que doit jouer l'action d'harmonisation de l'Europe : pas seulement dans le domaine juridique, pas seulement dans la fixation d'objectifs mais aussi dans la réponse concrète à des problèmes d'organisation qui pénalisent in fine le consommateur.

À quand un véritable budget européen de l'énergie ? Sur les 128 milliards d'euros du budget de l'Union européenne, il est temps, au regard des défis qui s'annoncent, de prévoir un budget réservé à l'énergie. Le Gouvernement est-il prêt à porter haut cette idée d'une Europe de l'énergie avec les moyens budgétaires correspondants ?

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Monsieur le ministre, ma question porte sur la protection tarifaire du marché européen de l'éthanol dans les négociations internationales.

Comme vous le savez, nous avons des objectifs européens et nationaux à atteindre en matière d'incorporation de biocarburants. Des investissements très importants, de l'ordre du milliard d'euros, ont été enclenchés par les filières pour doter notre pays d'un outil industriel performant de production d'énergie verte.

Or, aujourd'hui, pour la filière alcool, les importations croissantes d'éthanol sud-américain causent un préjudice important aux opérateurs européens. Nous assistons effectivement, et ce depuis plusieurs années, à un véritable déferlement de « l'or vert brésilien », pour reprendre l'expression du Président Lula.

Les importations ont été multipliées par quatorze depuis 2000. Or les conditions de production sont déséquilibrées, tant les producteurs brésiliens cumulent de nombreux atouts concurrentiels : importantes aides à l'investissement versées par l'État ; situation comptable d'outils industriels plus qu'amortis puisque les premières politiques sur les biocarburants ont plus de trente-cinq ans au Brésil ; montant des salaires versés aux coupeurs de canne qui n'ont rien à voir avec les salaires européens ; parité entre le réal brésilien et l'euro très favorable au premier. Bref, vous l'avez compris, nous ne sommes pas dans le même univers économique et social.

Dans ces conditions, la préférence communautaire est vitale pour préserver notre outil français et européen naissant, et pour réduire cette nouvelle forme de dépendance énergétique. Il faut donc que l'éthanol reste sous le régime douanier actuel, avec un droit de 19,20 euros à l'hectolitre, et il convient de s'opposer fermement à toute utilisation de la procédure dite de transformation sous douane.

Monsieur le ministre, quelles initiatives sont envisagées par le Gouvernement pour défendre la filière française et européenne de l'éthanol ?

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Monsieur Dionis du Séjour, je considère comme vous qu'une politique énergétique européenne est indispensable. À cette fin, nous disposons déjà d'un outil juridique : les cinq directives et le règlement, et il faut y aller, maintenant que nous sommes au clair sur le mix énergétique européen. L'Europe de l'énergie est d'autant plus nécessaire que la situation énergétique de chaque pays est différente, ce qui nécessite une coordination, étant entendu que, dans le cadre des cinq directives et du règlement, nous avons une solidarité financière internationale pour ces mutations.

Monsieur Demilly, il faut défendre bien entendu la filière française et européenne de l'éthanol, et je vous renvoie à mes propos sur le 7 %. Cependant, nous voulons sortir de la naïveté totale. Voilà pourquoi l'une des cinq directives prévoit la validation environnementale des produits concernés – sur ce point, le Parlement européen a été très offensif –, ce qui sera de nature à apaiser vos craintes.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. François Brottes pour un rappel au règlement, que j'espère authentique...

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Il est fondé, monsieur le président, sur l'article 58, alinéa 1. Je souhaite faire dès à présent un commentaire sur l'organisation de ces débats d'initiative parlementaire, et non dans le cadre de mon intervention en tant que porte-parole du groupe, car ce serait hors sujet.

Nous essuyons les plâtres d'une nouvelle formule qui, très franchement, n'est pas à la hauteur de ce qui nous était annoncé.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Je veux bien qu'on donne le même temps de parole aux groupes qui comptent 200 députés et à ceux qui en comptent 20, mais il est tout de même difficile, dans ces conditions, d'organiser les débats au sein de chaque groupe.

Par ailleurs, mélanger les questions et les réponses n'est vraiment pas la formule idéale, ni pour le ministre, ni pour les députés. Au final, on n'y comprend plus rien, car les sujets s'emmêlent et s'enchaînent. Dans le cadre de la discussion des lois de finances, la formule retenue, celle de la question-réponse, est bien plus claire.

Enfin, quand on veut développer des sujets qui sont relativement techniques et complexes, le temps contraint est extrêmement frustrant tant pour celui qui explique que pour celui qui tente de comprendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous essuyons en effet les plâtres, chacun essayant de faire pour le mieux.

Le principe du groupage des questions existe pour d'autres débats qui ont déjà eu lieu ici même. Pour ma part, je vais transmettre vos observations à la Conférence des présidents qui pourra s'en saisir pour voir s'il faut continuer à grouper ou non les questions.

J'ajoute qu'il doit vraiment s'agir d'un exercice de question-réponse. Or j'observe que la présentation de la question est plus un discours qu'une simple introduction et qu'elle occupe les quatre cinquièmes du temps. Finalement, il ne reste que quelques secondes pour la question proprement dite. Il faudrait, je crois, que chaque député fasse un effort pour poser sa question au ministre de façon très directe, et que le ministre réponde à son tour de façon très directe au député.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

C'est un peu ce qui se passe dans certains parlements anglo-saxons dont nous avons essayé de nous inspirer.

En tout cas, en deux minutes il est impossible de faire un discours et de poser une question. Je demande donc aux uns et aux autres de revoir leur façon de procéder. Il est inutile de faire un historique, nous ne sommes pas là pour cela : il faut aller directement au but.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Quant au groupage, je le répète, je veux bien que ce problème soit abordé en Conférence des présidents. Je demande donc à l'administration de bien vouloir le mettre à l'ordre du jour. Puis, nous verrons ce que la Conférence des présidents décidera.

La parole est à M. Jean Gaubert, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Monsieur le président, j'ai bien compris ce que vous venez de dire, mais il se trouve que j'ai posé trois questions en une minute cinquante et que je n'ai obtenu qu'une réponse. Aussi vaut-il peut-être mieux délayer, afin d'obtenir une réponse à une seule question.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Monsieur le député, les questions sont parfois très proches et le ministre y répond de façon globale.

Je demande que la Conférence des présidents évoque cette question. Puis elle tranchera. En tout état de cause, cela ne changera rien ni pour le président de séance, ni pour le ministre, ni pour le député. Ce qui demeurera, c'est deux minutes pour la question et deux minutes pour la réponse. J'avoue que nous ne sommes pas très bons à cet exercice. Nous en restons aux vieilles interventions qui duraient cinq minutes et où l'on posait la question dans les trente dernières secondes. Mais là nous n'avons plus le temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous en venons maintenant aux interventions des porte-parole.

Pour le groupe UMP, la parole est à M. Serge Poignant pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Poignant

Monsieur le président, je vais essayer, en cinq minutes, de balayer la question de l'énergie. C'est une gageure !

Les échanges de cet après-midi ont été intéressants et les réponses aux questions nous ont permis de faire le point.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Poignant

Cela dit, je me demande si le présent débat n'est pas un peu redondant après toutes les discussions que nous avons déjà eues : une première loi d'orientation sur l'énergie qui vise à garantir la sécurité de l'approvisionnement de la France et l'accès à l'énergie à prix compétitif, à économiser l'énergie avec la mise en place de certificats d'économie d'énergie, à diversifier le bouquet énergétique français en respectant les engagements de la directive ENR et en maintenant l'option nucléaire ouverte ; la loi Grenelle 1 ; enfin la discussion du projet de loi Grenelle 2 la semaine prochaine.

Et puis, au plan européen, nous avons approuvé et soutenu le paquet climat-énergie, en intégrant les trois fois 20 %, voire 23 %, dans notre législation.

Pour ce qui est de la discussion d'aujourd'hui, la sécurité d'approvisionnement est un objectif important. Nous savons quel est l'état de notre réserve, nous connaissons les prévisions en ce qui concerne l'augmentation démographique.

Je ne reviendrai pas sur le réchauffement climatique. M. le ministre a dit où nous en étions de l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre et a rappelé le nouveau modèle de croissance que nous appelons de nos voeux, un modèle économique, environnemental et social.

Je me contenterai, au nom du groupe UMP, et à l'appui de ce qu'a dit M. le ministre d'État, de balayer quelques sujets actuels, aux plans français, européen et international.

Au plan français, des objectifs ambitieux ont été fixés, et des mesures fortes, notamment financières, ont été prises en ce qui concerne les bâtiments et les transports.

S'agissant du soutien aux EnR, j'ouvrirai une petite parenthèse : pour ce qui est de l'éolien, mon amendement n'a fait qu'anticiper le fait de ne pas aller vers le mitage. Je ne suis pas contre l'éolien.

Sur le solaire, je suis en train de faire un rapport, monsieur le ministre, et je préciserai bien qu'il faut faire attention aux conflits d'usage. Ici comme ailleurs, nous devons à la fois poursuivre un objectif d'efficacité et faire face aux éventuels conflits.

Dans le domaine de la recherche, nous soutenons les technologies d'aujourd'hui, avec le stockage du carbone, et celles de demain, avec l'hydrogène, avec ITER, avec la fusion nucléaire.

Au niveau européen, approbation du paquet climat-énergie, je l'ai dit.

Approbation d'un marché carbone, que j'appelle de mes voeux au plan mondial. Et les États-Unis ont lancé une expérimentation sur cette question, avec les quotas d'énergie.

Approbation d'une deuxième analyse stratégique au plan européen. C'est en grande partie la présidence française de l'Union européenne, au second semestre de l'année 2008, qui se trouve à l'origine de l'analyse prospective que la Commission a présentée en novembre dernier, et que le Conseil européen et le Parlement de Strasbourg ont déjà approuvée dans ses grandes lignes.

Besoin d'infrastructures, diversification des sources d'approvisionnement. Stocks de pétrole et de gaz, et mécanisme de réaction en cas de crise : cela me semble important, le ministre en a parlé.

Interconnexion énergétique : oui, monsieur Dionis du Séjour, c'est dans l'analyse de stratégie européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Poignant

Efficacité énergétique. Développement des énergies renouvelables. Sûreté nucléaire. Coordination des programmes de recherche et développement. Peut-être, monsieur le ministre, pourrions-nous aborder la question de l'éventuelle taxe carbone aux frontières, voire des indicateurs de mesure du développement durable.

Au plan mondial, je mesure combien nos relations avec les grandes puissances sont essentielles, comme l'est la présence de nos grands groupes industriels. Relations avec les États-Unis, le Canada, le Japon, il en a été question hier. Relations avec la Russie, notamment en matière de gaz, voire d'énergie nucléaire. Je suis intervenu dans la commission franco-russe sur cette question de l'énergie, et je mesure, sur les projets Nord Stream et Nabucco, la nécessité d'une position européenne forte.

Relations avec la Chine, l'Inde, le Brésil, tellement demandeurs d'énergie.

Relations avec les pays de l'Union méditerranéenne. Relations avec les pays les plus fragiles face au réchauffement climatique. Et sur cette question fondamentale du réchauffement climatique, la conférence de Bali fixe une feuille de route, celle de Poznan un calendrier, et celle de Copenhague doit impérativement aboutir.

Je n'ai plus que vingt secondes, monsieur le président, je conclus donc.

Mes chers collègues, le monde a besoin d'investissements forts dans les années qui viennent, y compris dans le nucléaire, et je le dis à M. Cochet. C'est un impératif économique : les hommes ont besoin d'une énergie plus propre, plus sûre et plus fiable. C'est une contrainte environnementale, je n'y reviens pas. C'est une chance politique pour aller vers une nouvelle croissance durable.

Monsieur le ministre, la France est bien placée, a des savoir-faire en matière nucléaire, en matière technique, dans le vent, le soleil, comme dans l'atome. Elle s'honore d'être un moteur d'entraînement des prises de décision, tant en Europe que dans le monde. Je veux ici en féliciter le Président de la République, le Gouvernement français, et tout spécialement vous-même, monsieur le ministre d'État. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. François Brottes, pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, d'abord je ne résiste pas au plaisir de rappeler à mon collègue Lenoir que c'est un gouvernement qu'il a soutenu, celui de M. Raffarin, qui a libéralisé le secteur de l'énergie pour les ménages. Qu'il s'en souvienne. Il faut chaque fois lui rafraîchir la mémoire. Mais c'est un peu ancien, effectivement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur le président, veuillez assurer la police dans cette assemblée, parce que je vais avoir du mal à tenir mes cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Monsieur Brottes, je fais ce que je peux, mais vous ne m'aidez pas beaucoup.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Je vous remercie quand même de votre soutien, monsieur le président.

Trois messages, assez simples.

Le premier : M. Lenoir en conviendra, nous sommes en train de perdre durablement l'éthique et l'efficacité du service public de l'énergie dans notre pays. Il s'agit de biens de première nécessité, et ce service public est en train d'être totalement démantelé. J'y reviendrai.

Deuxième message : nous allons malheureusement, je le crois, rater le rendez-vous de l'efficacité énergétique, qui consiste à consommer moins pour consommer mieux. C'est Mme Laperrouze, députée européenne, chargée de ces questions, qui dit qu'en France, quand on regarde le Grenelle, on s'aperçoit que rien ne commence avant 2012. Il sera trop tard.

Troisième message, et la présidence française de l'Union européenne a fait défaut dans ce domaine où elle avait une grande ambition : l'Europe de l'énergie reste à faire.

Nous sommes en train de perdre durablement l'éthique et l'efficacité du service public. Inutile de rappeler que nous n'avons toujours pas de contrats de service public entre l'État, d'une part, et EDF et GDF Suez, d'autre part. Ils n'ont pas été récrits, comme c'était promis.

Inutile de rappeler que les tarifs pénalisent durement le pouvoir d'achat des ménages et l'emploi industriel au niveau des électro-intensifs. Il y a certes des réflexions en cours, mais nous ne savons toujours pas quand nous pourrons voir la sortie du tunnel.

Inutile de dire – et nous l'avions annoncé, cher collègue Lenoir – que la guerre fratricide que se livrent GDF Suez et EDF fait de nombreux dégâts. Le climat social est déplorable, chacun a pu le constater. L'effet de la gestion privée sur le rapport entre les salaires, les rémunérations des chefs d'entreprise et les dividendes nous amène aux limites de l'absurde. Il y a un malaise très profond.

Inutile de rappeler que la boulimie qui consiste à toujours aller chercher ailleurs des investissements nouveaux, ici en Angleterre, là aux Etats-Unis, est aussi une boulimie du surendettement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Qui est allé investir en Italie, au Brésil, en Argentine ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Elle met les opérateurs dans la nécessité de lancer de grands emprunts populaires.

C'est comme au football, c'est le mercato. Areva, EDF, ENEL, EON : chacun vend des parts de son capital. À force d'avoir les yeux plus gros que le ventre, on a effectivement un peu de mal à suivre. C'est extrêmement grave.

D'ailleurs, monsieur le ministre, j'ai lu qu'EDF voudrait ouvrir le capital de RTE. Est-ce au conseil d'administration d'EDF de décider d'ouvrir le capital de RTE ? Je ne crois pas. Lorsque je lis cela, il me semble me souvenir que cela reste une prérogative gouvernementale. Et, en tout cas, la loi encadre les choses. Je ne pense pas que l'on puisse laisser les dirigeants d'EDF faire des annonces qui ne sont pas conformes à la loi.

Je remarque aussi qu'un opérateur comme Poweo prend des parts de marché, achète de l'abonné tout en faisant du déficit, et ensuite vend ses parts parce qu'il trouve un acheteur. Quel acheteur ? L'État autrichien. C'est quand même extrêmement intéressant de remarquer que l'on privatise en partie le dispositif en France pour se faire racheter des parts d'abonnés devenues privées par le public autrichien. C'est assez drôle. C'est en même temps assez désolant. Cela étant, ce n'est pas désolant pour tout le monde, parce qu'il y a de la plus-value au passage.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Impasse sur la maintenance, avec beaucoup trop de sous-traitance dans les centrales nucléaires, on l'a dit.

Impasse sur les investissements du réseau de distribution : mon collègue Jean Gaubert a développé ce point tout à l'heure.

C'est donc effectivement le délitement d'un modèle, celui du service public, dont nous déplorons tous la disparition. Malheureusement, certains ici ont pris une part plus active que d'autres à ce démantèlement.

S'agissant du rendez-vous concernant l'efficacité énergétique, je ne mets pas en question votre volonté, monsieur le ministre. Mais constatons ensemble que la bourse des certificats d'économies d'énergie est finalement un échec. On est passé de 100 euros la tonne à dix euros la tonne. Cela ne marche pas très bien.

Vous avez évoqué une baisse tendancielle. Mais je voudrais apporter une correction : l'industrie est pour 15 % responsable de cette baisse parce qu'il y a eu des défaillances industrielles. Il y a un an et demi, ma circonscription comptait sept papeteries. Il n'y en a plus une seule aujourd'hui. Elles consommaient beaucoup d'électricité. Nous avons tous des exemples de ce genre. Je ne crois donc pas, malheureusement, que la baisse de la consommation d'énergie soit due à un effort d'économie. Elle est liée à la crise économique que nous sommes en train de vivre.

De ce point de vue, il y a une vraie schizophrénie. J'évoquais tout à l'heure la publicité pour l'emprunt d'EDF : il n'y a rien sur l'efficacité énergétique, rien sur les économies d'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Monsieur Brottes, vous avez un compteur devant les yeux.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Je conclus, monsieur le président.

Toujours rien pour lisser les pointes, ce qui est un enjeu majeur.

Un modèle qui panique dès l'instant où il y a une baisse des prévisions de croissance de l'énergie. Cela prouve bien que nous ne sommes pas au rendez-vous.

Sur l'isolation, une grande ambition, mais peu d'actes.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

La grande question qui est devant nous, vous m'autoriserez à conclure ainsi, monsieur le président, est la suivante : quel est le modèle économique qui permet de valoriser l'efficacité énergétique ? Nous ne l'avons pas encore trouvé. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Heureusement que, comme pour les salariés qui vont au travail, le temps de déplacement vers la tribune n'est pas compris dans les cinq minutes. (Sourires.)

Monsieur le ministre, pour compléter les propos de M. Brottes, je dirai que c'est Poweo qui avait déposé le dossier du terminal méthanier d'Antifer. Aujourd'hui qu'il est sur les rails, le président de Poweo annonce sa décision de vendre ses parts à un électricien autrichien public, un des leaders européens de l'électricité hydraulique. Poweo se retire donc. Il y a là un certain nombre de phénomènes, que je n'ai pas pu développer en deux minutes, laissant penser que le dossier est peu clair, c'est le moins que l'on puisse dire. Il mériterait autre chose qu'un PIG, comme vous l'appelez. Il nécessiterait d'être remis sur la table, pour que tous ses aspects puissent être examinés. Mais nous aurons l'occasion d'en reparler.

Compte tenu du temps qui m'est imparti, je n'aborderai qu'une question dans ce commentaire sur la politique énergétique du Gouvernement.

Toutes les analyses et tous les rapports qui se succèdent sur la question de la création d'un marché de l'électricité, et donc sur la concurrence entre les différents opérateurs, se heurtent à la même difficulté : dans notre pays, les prix sont trop bas pour que les nouveaux acteurs puissent entrer sur le marché.

Les prix sont bas car l'électricité est majoritairement d'origine nucléaire et hydraulique. Ces choix, opérés depuis plus d'un demi-siècle, ont prouvé leur pertinence et la France est le pays européen où le kilowattheure est le moins cher pour l'usager domestique et industriel.

Et cela s'est fait sans préjudice pour la sécurité, pour la qualification des salariés, pour la politique sociale dans le secteur.

Pendant un demi-siècle, ces choix furent portés par des entreprises publiques. À présent, l'heure est à la libéralisation ; il faut, à toute force, casser les monopoles publics pour les remplacer par des grands groupes privés et instaurer la concurrence.

C'est ce qui s'est fait avec l'ouverture du capital d'EDF, la privatisation de GDF dans le cadre de la fusion avec Suez, et l'organisation de la concurrence entre ces deux groupes. La même logique menace Areva. Et votre absence totale de réponse à mon ami Jacques Desallangre, monsieur le ministre, ne peut qu'inquiéter.

Reste le problème – car c'en est un pour vous – que constituent les tarifs de l'électricité dans notre pays. Difficile de faire mieux en l'état actuel des choses ! Mais, quand on est libéral, l'objectif n'est pas que les prix soient bas et permettent malgré tout d'assurer les investissements, la sécurité et la sûreté. L'objectif, c'est que cela rapporte ! Or, le prix du kilowattheure en France, avec des tarifs régulés, est un obstacle à la concurrence : il faut donc faire sauter les tarifs régulés.

EDF est convertie : l'entreprise publique, dont le capital est ouvert, milite pour en finir avec les tarifs régulés, comme le veut la Commission européenne et comme l'attendent, en piaffant d'impatience, les autres opérateurs.

Ainsi, la logique libérale consiste à assurer l'augmentation des prix de l'électricité afin de permettre l'entrée de nouveaux opérateurs, en faisant miroiter une très hypothétique baisse liée à la concurrence.

Alors, comme il est difficile d'expliquer à nos concitoyens que les tarifs vont augmenter pour que la concurrence se mette en place, la nouvelle proposition serait que les nouveaux « entrants » puissent acheter du kilowattheure nucléaire à EDF et revendre cette électricité en concurrençant le producteur. Avez-vous imaginé ce que donnerait ce système si on l'étendait à d'autres activités commerciales et si, par exemple, les commerçants de quartier pouvaient avoir accès aux prix des centrales d'achat des grands groupes ?

Derrière tout cela, je le répète, l'objectif est d'en finir avec les tarifs régulés, avec pour conséquence inévitable la hausse des tarifs pour tout le monde.

Évidemment, les producteurs historiques, dans leur nouvelle logique libérale, et les fournisseurs qui veulent entrer sur le marché en bénéficiant de la « rente » nucléaire s'accorderont sur un système qui leur permettra d'accroître leurs marges, mais ce sera au détriment des usagers et de notre économie.

Ainsi, les investissements conduits par une entreprise nationale, dans le cadre d'une politique énergétique ambitieuse et devant servir les intérêts du pays, seraient mis au service d'une tout autre politique : la rente nucléaire irait abonder les profits financiers. Ce n'est pas acceptable.

Notre position dans ce domaine est constante. Nous refusons de laisser les marchés prospérer sur la politique énergétique de notre pays. Nous avons proposé la création d'un pôle public de l'énergie, cette proposition étant d'ailleurs transposable à l'échelle européenne, dans le cadre d'une politique européenne de l'énergie.

Pour nous, les enjeux liés à l'électricité sont incompatibles avec la course à la rentabilité financière, qui est le moteur des opérateurs dans ce secteur. Cette remarque vaut aussi pour le devenir d'AREVA ou pour le gaz, dont on voit bien qu'il est au coeur des stratégies de grands groupes internationaux.

Au moment où les choses s'accélèrent autour de ces enjeux et alors que les orientations européennes pèsent lourdement, ce qui justifie une autre politique à l'échelle du continent, nous tenons à rappeler notre opposition totale à votre politique énergétique, comme à celle de l'Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Il est toujours intéressant pour un ministre d'être sollicité comme je l'ai été par vos questions. J'ai appris des uns et des autres, notamment sur certains dysfonctionnements.

Je tiens tout particulièrement à remercier M. Poignant, qui nous accompagne depuis si longtemps sur ces sujets, à qui l'on doit le rapport sur le développement des énergies renouvelables et qui était présent à Bali, à Poznan, et le sera bientôt à Copenhague.

Monsieur Brottes, nous n'avons pas de vraie réponse concernant les pics. La variation de la production et de la consommation est d'autant plus problématique que les réseaux se comportent de façon neutre et n'ont pas de rôle stabilisateur. L'INES travaille activement sur cette question, et il est indéniable, par ailleurs, que nous devons revoir la gestion financière de ces variations.

En revanche, je ne peux pas vous suivre sur les économies d'énergie. J'en suis confus, compte tenu de l'estime que je vous porte, et je me désole que vous refusiez d'admettre le bien-fondé des dispositifs que nous avons mis en place pour gagner la bataille des économies d'énergie.

Qu'il s'agisse des raccordements, dix fois plus nombreux qu'avant, ou des éco-prêts à taux zéro, dont le nombre s'élevait déjà à cinq mille les trois premières semaines, pour les deux réseaux mutualistes ; qu'il s'agisse encore de l'effet cumulé de l'avantage fiscal et du prêt à dix ans, dispositif auquel personne ne croyait ici et qui s'avère deux fois plus efficace que le système allemand, pourtant efficace et antérieur au nôtre, je ne peux laisser dire que nous ne serons pas au rendez-vous.

Je rappelle que ce sont 205 milliards d'euros qui seront investis, tous opérateurs confondus, pendant dix ans, pour parvenir à ces économies d'énergie, ce qui est un enjeu considérable en termes d'emplois et de PIB. Certes, nous rencontrerons sur notre route telle ou telle difficulté, mais la vie n'est pas une bande dessinée et nous apprendrons à nous adapter.

Monsieur Daniel Paul, je ne peux pas vous convaincre du bien-fondé de toutes les politiques européennes.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Laissez-moi simplement vous dire que nous nous efforçons de défendre une position équilibrée qui assure la pérennité du modèle énergétique français, notamment sur la question de l'unbundling entre les réseaux et la production. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ce n'est pas forcément à EDF de prendre les décisions en matière de propriété de réseaux.

Sachez, quoi qu'il en soit, que nous sommes déterminés à réaliser la triple rupture, et je pense que nous y parviendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion de la proposition de loi pour faciliter le maintien et la création d'emplois.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma