COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES
Mercredi 21 janvier 2009
La séance est ouverte à seize heures quinze.
(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission
La Commission procède à l'audition, ouverte à la presse, de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports, et de Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité, sur le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (n° 1210)
Nous entamons la première étape de l'examen du projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires. Je remercie Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé et des sports, et Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité, de leur présence. Je remercie également mes collègues de la majorité et de l'opposition qui travaillent sur ce texte depuis plusieurs semaines.
Je souhaite que notre commission aborde ce projet important sous deux angles, celui de la vérité et celui de la responsabilité.
Nous devons d'abord nous garder du catastrophisme : notre système de santé reste envié, notre espérance de vie est supérieure à la moyenne des pays de l'OCDE, le taux de prise en charge par le régime général de l'assurance maladie, qui s'élève à 77 %, est constant depuis de longues années, et les effectifs connaissent dans le domaine de la santé une forte progression. Cela étant, le vieillissement de la population et les besoins grandissants de nos compatriotes en matière de santé exigent des adaptations. C'est pourquoi il nous faut reconsidérer tout à la fois les problèmes de gouvernance, d'organisation territoriale, d'accès aux soins, de qualité des soins, de prévention, de dépassements d'honoraires, etc.
En matière de dépenses sociales, nous avons dépassé la Suède et nous nous situons désormais au premier rang des pays de l'ex-Europe des Quinze. Pourtant, les ratios de résultats nous placent souvent dans une position très inférieure, qu'il s'agisse de lutte contre la pauvreté, d'insertion des jeunes dans la vie professionnelle, de chômage ou de santé. Nous avons donc le devoir d'améliorer notre performance sociale. Combien de fois ai-je entendu dire à l'étranger que la France est sur-administrée et sous-organisée ! Combien de fois ai-je entendu des chefs d'entreprise déconseiller de s'implanter dans notre pays au motif que tout y est trop compliqué !
Je le répète, nous devons placer les devoirs de vérité et de responsabilité au coeur de ce débat.
Permettez-moi, pour commencer, d'exprimer ma joie et ma fierté de présenter à votre commission un projet de loi que je porte avec conviction et enthousiasme, et dont je ne doute pas que vous saurez encore l'enrichir.
Si je suis venue pour vous répondre, je serai également très à l'écoute de vos propositions, comme j'ai pu l'être, plus largement, pendant les longs mois de concertation qui ont présidé à l'élaboration de cette réforme. Je remercie les parlementaires de toutes sensibilités qui ont participé à cette oeuvre commune.
Celle-ci n'a de sens que parce qu'elle répond à des besoins et à des attentes : ceux de nos concitoyens, perdus dans des parcours de soins trop cloisonnés et soucieux d'être bien soignés, en toute équité et en toute sécurité ; ceux aussi des professionnels de santé, qui réclament de nouveaux modes d'organisation et d'exercice, plus cohérents et plus efficaces, pour répondre à leurs aspirations comme aux évolutions de la société.
C'est cette approche pragmatique et responsable, inspirée des expériences de terrain, née du dialogue et de la compréhension, qui définit les grandes orientations d'un projet visant à moderniser profondément et durablement notre système de santé. La réforme est indispensable : c'est aujourd'hui que doit se préparer l'avenir de notre édifice de santé.
Notre système a besoin de moyens ; nous les lui donnons et la dernière loi de financement de la sécurité sociale lui a alloué près de 5 milliards d'euros de plus qu'en 2008. Il a aussi besoin d'organisation, et il convient de ne pas opposer ces deux aspects. Face aux défis qui s'annoncent, nous devons nous organiser dès à présent pour utiliser au mieux nos ressources humaines et financières dans une perspective de santé durable et solidaire.
Comment garantir la qualité et la sécurité des soins ? Comment assurer à tous les Français, partout en France, un égal accès aux soins ? Comment offrir aux établissements de santé et aux professionnels les moyens de mieux accomplir leurs missions ? En un mot, comment préserver les principes de qualité, de solidarité et de justice ? Telles sont les questions fondamentales qui nous préoccupent tous et que nous ne pouvons laisser sans réponse.
Guidée par ces impératifs, j'ai voulu un projet tout à la fois ambitieux et réaliste, cohérent et adapté aux situations réelles.
S'adapter, c'est réformer l'hôpital et le moderniser autour d'un projet médical pour renforcer les missions de service public. C'est aussi aménager les structures de soins en fonction des besoins de la population, qui ne sont pas les mêmes dans toutes les régions et pour tous les malades. Les établissements de santé seront ainsi amenés à coopérer davantage les uns avec les autres et à mutualiser leurs moyens humains et financiers pour offrir une réponse plus efficace. Les communautés hospitalières de territoire seront la garantie d'une offre de soins complète et bien visible.
S'adapter, c'est renforcer le dialogue entre l'hôpital, la médecine de ville et le secteur médico-social, en suivant l'évolution des parcours de soins des patients. Les soins et hospitalisations à domicile se développent, la population âgée en maisons de retraite et en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) est de plus en plus nombreuse. Il est donc impératif de faciliter les transferts par un décloisonnement de notre système de santé.
S'adapter, c'est mieux répartir l'offre de soins sur le territoire pour lutter contre les « déserts médicaux », dans le respect de la liberté d'installation des médecins. Les schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS) ambulatoires, définis en concertation avec les professionnels, permettront d'aménager l'offre en fonction des besoins.
S'adapter, c'est aussi favoriser les modes d'exercice plébiscités par les patients comme par les jeunes médecins, qui ne veulent plus travailler de manière isolée mais en coopération les uns avec les autres et en collaboration avec les autres professions de santé, notamment au sein des maisons de santé.
S'adapter, c'est également prendre en compte l'évolution des modes de vie et les désirs croissants d'autonomie et de bien-être de chaque Français.
S'adapter, c'est en outre accorder une importance accrue aux soins préventifs, à côté des soins curatifs. Nos politiques de prévention et de santé publique visent ainsi à promouvoir l'éducation thérapeutique du patient et à protéger la santé de nos concitoyens, en particulier des plus jeunes.
S'adapter, c'est enfin territorialiser nos politiques de santé. Les agences régionales de santé (ARS) auront vocation à renforcer l'ancrage de nos politiques de santé en région, en les déclinant selon les spécificités de chaque territoire. Cela passe par un pilotage unifié et cohérent. En se substituant à sept organismes différents et en investissant l'ensemble du champ de la santé, les ARS amélioreront sensiblement l'efficacité de notre système. Les conférences régionales de santé, instances de la démocratie sanitaire, seront le lieu de concertation entre les agences et tous les acteurs régionaux, notamment les élus.
Vous l'aurez compris, cette réforme d'envergure est destinée à simplifier notre système et à lui rendre toute sa lisibilité. Replacer le patient au coeur de nos préoccupations et faire reposer l'édifice sur l'engagement responsable des professionnels : cette double exigence, choisie et revendiquée, procède d'une logique de confiance tout autant que d'efficacité.
C'est à ces conditions que nous maintiendrons, sur le long terme, un système de santé solidaire. Ce projet collectif requiert la mobilisation de tous. Je crois beaucoup à la richesse du débat parlementaire que nous ouvrirons très prochainement et qui nous permettra d'avancer ensemble vers cet objectif ambitieux. Je serai, soyez-en sûrs, très attentive à vos propositions, qui seront écoutées et discutées.
Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir associée à cette audition. Si la plus grande partie du projet de loi relève, naturellement, des compétences de Mme Roselyne Bachelot, le titre IV, qui crée les agences régionales de santé, aura un impact direct sur le champ du secteur médico-social puisque, comme cela avait été envisagé depuis de nombreuses années sans jamais être réalisé, les futures ARS piloteront conjointement les politiques sanitaire et médico-sociale. Ce changement est d'importance et je n'ignore pas plus que vous, qui avez certainement été sensibilisés par les différents acteurs de ce secteur, les inquiétudes qui se sont exprimées ici ou là.
Ces interrogations sont compréhensibles au regard de l'ampleur et de la complexité du chantier. Cependant, l'ensemble des acteurs a bien saisi que la création des ARS offre une chance de décloisonner, enfin, les approches des différents champs de la santé afin d'améliorer le service rendu à nos concitoyens.
C'est la raison pour laquelle je me réjouis d'être parmi vous aujourd'hui pour évoquer les points qui méritent d'être expliqués et ceux qui appelleront des garanties, notamment au moment où s'élaboreront les décrets d'application. Je ne doute pas que le travail approfondi de votre rapporteur, M. Jean-Marie Rolland, dont je tiens à saluer l'extrême implication, vos travaux en commission et le débat que nous aurons en séance publique permettront d'apporter des améliorations sensibles au projet.
Tout le dispositif ne relevant pas du champ législatif, je veillerai à ce que le volet réglementaire prenne systématiquement en compte les problématiques médico-sociales. Cette sensibilité devra aussi transparaître dans le recrutement des directeurs d'ARS et de leurs équipes. C'est un point sur lequel Roselyne Bachelot et moi-même sommes parfaitement en phase.
Avec Brice Hortefeux, je voudrais abonder dans le sens de la ministre et confirmer que cette réforme se fera, pour ce qui concerne le secteur médico-social, en suivant trois lignes de force : premièrement, la pleine prise en compte des enjeux médico-sociaux dans les politiques conduites par l'agence, au même rang que les enjeux sanitaires ; deuxièmement, la pleine association du secteur – associations et collectivité locales – à la définition des priorités de la politique régionale de santé et à ses conditions de mise en oeuvre ; troisièmement, la mise en oeuvre effective de la « fongibilité asymétrique ».
Rien de constructif ne pourra se faire sans l'implication dans ce grand chantier des personnels – ceux de l'État, ceux de l'assurance maladie, mais aussi ceux des départements. La création des ARS n'est pas qu'une réforme administrative, c'est aussi, en matière médico-sociale, une véritable « révolution culturelle ». Il s'agit de passer d'une administration centrée sur la santé entendue comme la prise en charge des soins aigus et de la maladie, à un service public qui impulse une conception globale de la santé envisagée, selon la définition de l'OMS, comme « un état de complet bien-être physique et mental ». À ce titre, l'accompagnement des personnes en situation de perte d'autonomie sera bien, tout comme la prévention, au coeur du projet des ARS.
Je l'ai dit aux différents acteurs, je considère que les ARS sont une chance pour le secteur médico-social. Mais cela suppose que l'on préserve les acquis, comme la prise en charge globale et personnalisée ou la place privilégiée des usagers et des associations. Telle est précisément l'intention du Gouvernement. L'ARS, ce n'est pas la domination d'un secteur sur un autre mais l'addition de toutes les forces pour assurer la cohérence des actions en matière de santé, qu'il s'agisse de prévention, de soins aigus, ou d'accompagnement au long cours. Naturellement, cette création dote le secteur médico-social d'un cadre nouveau, notamment avec la nouvelle procédure d'appel à projets et avec la définition collective et transversale des besoins, via le projet régional de santé et le schéma médico-social.
C'est donc un projet globalement équilibré que nous proposons. Il apportera toutes les garanties nécessaires en termes de représentation des acteurs et de possibilités laissées aux promoteurs de proposer des projets innovants. Le secteur s'est inquiété que la logique de l'appel à projets n'empêche les intervenants de terrain de demeurer des forces de proposition faisant progresser nos réflexions. La réforme permettra au contraire de mettre fin à l'allongement constant des listes d'attente qui découragent d'autant plus les porteurs de projet que la procédure actuelle ne permet pas une réelle expression des priorités.
Il faut permettre enfin au secteur médico-social de se doter de mécanismes efficaces pour garantir que les projets répondant le mieux aux besoins de la population soient autorisés. À ce propos, Brice Hortefeux, Roselyne Bachelot et moi-même avons la ferme intention de mettre effectivement en oeuvre la fongibilité asymétrique, qui permettra de transférer des moyens du sanitaire vers le médico-social et non l'inverse. Il s'agit, en quelque sorte, de sécuriser le champ du médico-social dans le nouveau dispositif commun. Cette démarche a aussi un sens pour le secteur sanitaire puisqu'elle offre de nouvelles perspectives de développement dans le champ médico-social à des établissements de proximité et qu'elle permet d'améliorer le fonctionnement des services de court séjour, pour lesquels le manque de places médico-sociales en établissement et à domicile représente une difficulté permanente.
Nous avons déjà commencé à mettre en oeuvre cette orientation : au titre de la fongibilité, l'enveloppe médico-sociale augmente de plus de 300 millions d'euros en 2009, du fait de la transformation de structures sanitaires en établissement médico-sociaux. La fongibilité asymétrique concerne également l'enveloppe de la prévention, elle aussi très importante pour donner tout son sens à cette approche globale et moderne de la santé que doivent impulser les ARS. Un amendement vous sera présenté afin de donner une base législative au principe de fongibilité asymétrique.
Pour peu que nous sachions faire vivre ce projet en mobilisant tous les acteurs, les ARS permettront de décloisonner, d'assurer la participation de tous les acteurs à une programmation coordonnée et de rendre plus rapides et plus efficaces les procédures de création de places. Pour cela, il faut réaffirmer l'engagement que la création des ARS ne s'accompagnera pas de mutations forcées pour le personnel des services déconcentrés.
Afin d'assurer la continuité de la prise en compte de la proximité, le projet prévoit des délégations territoriales de l'ARS dans chaque département. Si l'on a pris le soin de parler de « délégations » et non d'« antennes », c'est bien pour signifier que cette structure départementale disposera d'un mandat pour mettre en oeuvre la stratégie de l'agence et qu'elle pourra ainsi être un véritable interlocuteur local pour le préfet et pour les différents partenaires de l'ARS.
Comme Roselyne Bachelot, je suis certaine que vos propositions permettront d'enrichir un texte qu'il est nécessaire de construire avec le terrain.
L'affluence à cette audition montre combien ce texte était attendu. Pour répondre aux attentes de nos compatriotes, le projet de loi propose une réorganisation générale de notre système de santé, fondée sur la régionalisation et la responsabilisation. Il aborde la santé dans son ensemble : prévention, soins de ville, soins en établissement, intervention médico-sociale. Il prend en compte les particularités régionales et vise à permettre des coopérations entre tous les acteurs, professionnels, collectivités ou associations. Surtout, il introduit de la souplesse. Le directeur général de l'ARS deviendra un véritable aménageur du territoire en matière de santé.
Cela dit, un texte d'une telle ampleur soulève bien entendu des questions.
Quelle sera la coordination des ARS au niveau national ? Comment s'organisera le lien entre le directeur général de l'agence et le conseil de surveillance ?
Concernant les établissements de santé, comment le Gouvernement conçoit-il la délégation de missions de service public ? Quel est son sentiment sur l'équilibre au sein du directoire entre les médecins d'une part et le directeur et les « managers » d'autre part ? Quelles formes pourront prendre les coopérations sanitaires ? Envisage-t-on d'ores et déjà des mesures incitatives, en faveur de ces projets de coopération ?
Le titre III du texte traite des questions de santé publique. Il aborde les sujets de l'éducation thérapeutique, du tabac et de l'alcool, mais pas celui de la santé mentale. Quels sont les projets du Gouvernement en ce domaine ?
Par ailleurs, l'accès de tous à des soins de qualité est une préoccupation essentielle pour les Français. Pourriez-vous, madame la ministre, préciser ce que le Gouvernement entend faire pour ce qu'il est désormais convenu d'appeler les « déserts médicaux » ? Quelle est votre position concernant les refus de soins illégitimes, thème sur lequel nous sommes souvent interrogés ? Quelles indications pouvez-vous aujourd'hui nous donner concernant la qualité des soins ?
Madame la secrétaire d'État, comment envisagez-vous la présence des acteurs médico-sociaux dans les ARS ? Comment concilier les schémas régionaux d'organisation médico-sociale et les politiques départementales élaborées par les conseils généraux ? Par ailleurs, la notion d'appel à projets n'est pas connue des associations et des différents intervenants. Qui lancera ces appels, qui pourra y répondre, qui sélectionnera les projets ? Est-il envisageable que les ARS délèguent aux conseils généraux la responsabilité de certaines procédures ?
Je vous remercie, mesdames les ministres, pour votre présentation. J'ai apprécié la précision des propos de Mme Létard. Quant à la concision de ceux de Mme Bachelot, signifie-t-elle que le texte que nous avons entre les mains va évoluer donc que celui dont nous discuterons dans quelques semaines sera, comme on le dit, sensiblement différent ?
Je voudrais néanmoins exprimer notre relative déception. Les attentes sont fortes, tant dans la population que chez les professionnels de santé. Comme nous, ceux-ci savent bien que les résultats acquis au cours des dernières décennies sont excellents pour ce qui est de l'état de santé et de l'espérance de vie, mais que les inégalités existent toujours et qu'elles se creusent même. Aux yeux de beaucoup, le système de soins actuel est à bout de souffle.
Le texte comporte quelques éléments positifs, malheureusement trop isolés. Nous déplorons en particulier l'aspect « peau de chagrin » du dispositif consacré à la santé publique et à la prévention : le projet aborde à peine le premier aspect et pas du tout le second. Je n'imagine pas, madame la ministre, que la santé publique se réduise pour vous au problème – certes important – des cigarettes bonbons et de l'alcoolisme des jeunes.
S'il est exclu de s'engager par principe dans une course à l'augmentation des moyens, nous ne pouvons admettre que l'on impute les problèmes rencontrés par le système hospitalier aux seuls problèmes d'organisation. Le Président de la République l'a rappelé, les moyens alloués à l'hôpital ont fortement progressé : 26 milliards en dix ans. Mais, dans le même temps, 30 milliards ont été alloués à la médecine ambulatoire... La dernière loi de financement de la sécurité sociale fixe un objectif national de dépenses de santé (ONDAM) hospitalier beaucoup plus strict que l'ONDAM de la médecine de ville, ce qui traduit bien une restriction des moyens. Pourquoi ce projet ne s'accompagne-t-il pas d'un grand plan d'investissement – y compris immobilier – pour l'hôpital ?
De nombreux personnels hospitaliers, notamment des médecins, ont le sentiment que leur pratique est de plus en plus soumise à des contraintes administratives et financières. C'est pourquoi nous souhaiterions connaître votre position sur certaines mesures précises. Est-il ainsi raisonnable de poursuivre dans la voie de la convergence tarifaire intersectorielle entre l'hôpital public et le secteur privé alors que le premier assure des missions de service public extrêmement coûteuses dont certaines, comme la prise en charge de la précarité, ne sont pas financées au sein de l'enveloppe dédiée aux missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC) ? Si l'on ne veut pas d'une gestion purement financière de l'hôpital, est-il raisonnable de proposer de diminuer les pouvoirs de la commission médicale (CME) ? Ne vaudrait-il pas mieux redonner aux médecins un pouvoir sur l'élaboration du projet médical d'établissement, dont votre texte transfère la responsabilité au pouvoir administratif ? Enfin, est-il raisonnable d'ouvrir la possibilité de transférer au cas par cas des missions de service public aux établissements privés ? Ne serait-il pas plus judicieux d'aborder la question sous l'angle d'un bloc de compétences de missions de service public ? Ce qui coûte cher à l'hôpital, c'est de devoir assumer ces missions dans leur globalité et non pas ponctuellement.
Une de vos priorités, madame la ministre, est de mieux répartir l'offre de soins sur le territoire et de la rendre plus accessible aux Français. À cette fin, vous souhaitez prendre en compte les aspirations des jeunes médecins à de nouvelles pratiques. Malheureusement, rien dans le texte ne va dans ce sens, qu'il s'agisse du contenu des études médicales, de l'encouragement à l'exercice en groupe ou de la possibilité de s'orienter vers une rémunération forfaitaire. Or c'est la clé de l'amélioration de l'offre de soins sur le territoire.
De même, quelles mesures incitatives fortes êtes-vous prête à mettre en oeuvre pour favoriser l'installation de jeunes médecins dans les territoires « sous-denses en offre de soins » ? Le texte n'apporte pas de réponse. Seriez-vous favorable à un plafonnement pur et simple de l'installation de nouveaux médecins dans les zones « sur-denses » ?
Enfin, si nous approuvons pleinement – et cela depuis plusieurs années – le principe de la mise en place d'agences régionales de santé, nous avons le sentiment que, telles que le texte les conçoit, elles s'inscriront dans un « tuyau d'orgue » supplémentaire, au lieu de rassembler l'ensemble des acteurs de la santé. La caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) continue d'exister sans modification. Pourquoi ne pas créer une agence nationale de santé qui pourrait coordonnerait un minimum le travail des ARS ?
Enfin ce projet de loi très attendu arrive à l'Assemblée ! Le débat, qui sera à coup sûr constructif, prendra un certain temps car le sujet suscite un intérêt considérable. Merci, madame la ministre, d'avoir préparé le texte très en amont en vous rendant sur le terrain pour écouter tous les acteurs.
J'aimerais obtenir dès maintenant quelques précisions sur des points qui susciteront sans doute un débat.
Tout d'abord, pourra-t-on régler la situation de certains médecins étrangers ? Une délibération de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) contredit en effet quelque peu les dispositions que nous avons votées lors de la loi du 21 décembre 2006 du financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Peu à peu se mettent en place de nouvelles conditions d'exercice, en médecine de premier recours comme en médecine spécialisée. Le développement des maisons de santé et des pôles de santé multidisciplinaires répartis sur le territoire est une orientation fondamentale, appréciée de tous. C'est une véritable réforme, si ce n'est une révolution. En matière de médecine ambulatoire, le projet aborde la question de la permanence des soins. Comment faire respecter cette authentique mission de service public ? Quelles parts faudra-t-il accorder au volontariat et à l'obligation, cette dernière risquant d'être contreproductive et d'entraîner une certaine désaffection des médecins vis-à-vis des soins de premier secours ?
Nous avons tous beaucoup réfléchi à la question des « déserts médicaux ». Comment attirer les jeunes médecins et faire revenir les autres tout en respectant le sacro-saint principe de liberté d'installation qui fait l'unanimité parmi les syndicats d'étudiants et de professionnels de santé ?
En ce qui concerne les dépassements d'honoraires, certains points font encore débat. Le futur secteur optionnel verra-t-il le jour et sous quelle forme ? N'est-ce pas une bonne solution pour en finir avec les dépassements exagérés, dès l'instant où des contraintes seront posées ?
Enfin, quelle place réservez-vous à la télémédecine ? Il s'agit à mon sens d'un élément important dans les nouvelles orientations de l'exercice médical, dans les zones rurales mais aussi en matière de diagnostic précoce et de prise en charge. La technique est opérationnelle. Le projet de loi peut-il intégrer cet aspect ?
Notre souhait commun est de permettre sur l'ensemble du territoire l'accès de tous nos concitoyens à des soins de qualité, à des tarifs remboursables. Or, en dépit des réformes récentes, notre système de santé rencontre de grandes difficultés organisationnelles, morales et financières. Ce texte très attendu permettra des améliorations mais, vous l'avez reconnu, madame la ministre, il n'est peut-être pas encore parfait et vous comptez sur nos propositions pour l'améliorer. J'espère donc que vous accepterez ma contribution et mes amendements.
Ce ne serait pas la première fois que j'accepterais vos amendements !
Je me bats depuis longtemps contre les coupures absurdes entre la prévention et le soin, la ville et l'hôpital, le sanitaire et le médico-social, et je ne puis que me réjouir de la création des agences régionales de santé. Je considère néanmoins que l'on n'aura pas résolu complètement le problème. En étant un peu excessif, je dirai que le système que vous proposez me semble quelque peu pyramidal, jacobin et centralisateur.
Comment instaurer une coordination nationale efficace qui ne soit pas une tutelle trop stricte sur les ARS ? Comment faire fonctionner ensemble les directions du ministère, la CNAMTS et les assurances complémentaires, puisque ces dernières souhaitent être associées au dispositif ? Placer les ARS sous une triple commande ne risque-t-il pas de se révéler inopérant ?
J'ai bien entendu l'argument de Mme la secrétaire d'État sur la fongibilité asymétrique mais, je le dis depuis longtemps, le véritable enjeu est celui de la fongibilité entre les enveloppes de la médecine de ville, de la médecine hospitalière, du sanitaire, du médico-social, du médicament. Si les ARS doivent mettre en oeuvre les sous-objectifs fléchés que nous votons actuellement, comment pourront-elles résoudre les problèmes d'arbitrage ? La logique voudrait que l'on fixe des objectifs régionaux sous la responsabilité du directeur général de l'agence.
Le texte confie en outre la présidence du conseil de surveillance au préfet de région. « Deux crocodiles dans le même marigot », c'est une formule que l'on a rarement vu fonctionner !
Enfin, on s'accorde à reconnaître le relatif insuccès des conférences régionales de santé. Sauf dans certaines régions – dont celle des Pays de la Loire –, elles se réduisent à des sortes de grand-messes. J'aimerais que le texte leur confère un vrai pouvoir leur permettant d'avoir leur mot à dire sur les schémas d'organisation de la prévention des soins et sur le budget de l'agence et sur l'adéquation de l'offre et des besoins. Je ne doute pas, madame la ministre, que vous accepterez les amendements que j'ai déposés en ce sens.
La réforme récente de l'hôpital est à peine digérée. Que les établissements de santé disposent d'un patron est une bonne chose mais j'aurais plutôt souhaité que l'on renforce les pouvoirs du conseil d'administration, qui devient d'ailleurs dans le texte un conseil de surveillance. Pourquoi celui-ci n'aura-t-il à se prononcer ni sur le plan d'investissement ni sur l'adhésion à des communautés hospitalières de territoires, sujets pourtant éminemment stratégiques ? Je m'inquiète également du fait que l'ARS puisse nommer mais aussi révoquer le directeur s'il ne respecte pas les contrats d'objectifs et de moyens – dont j'espère qu'ils prendront en compte les besoins de la population et ne seront pas purement financiers. L'ARS ne se retrouvera-t-elle pas, dans les faits, investie de la véritable direction de l'hôpital, ce qui équivaudrait à instituer des assistances publiques (AP) régionales ? J'aurais souhaité davantage de démocratie participative.
Il est par ailleurs prévu que les établissements publics de santé ne pourront adhérer qu'à une seule communauté hospitalière de territoire (CHT), ce qui ne convient pas aux hôpitaux d'une certaine importance qui souhaitent s'associer aux hôpitaux locaux de leur secteur tout en constituant parallèlement une communauté hospitalière de territoire avec le centre hospitalier universitaire (CHU) le plus proche.
L'évolution vers un nouveau régime d'emploi contractuel plus attractif pour les praticiens hospitaliers est un sujet sensible mais important si l'on souhaite qu'une rémunération liée à la pénibilité, à la responsabilité et à l'engagement permette un recrutement de qualité. Je m'étonne que le texte prévoie d'en limiter annuellement le nombre alors que ce devrait être au contraire un mode de recrutement privilégié.
Contrairement aux préconisations d'avril 2008 de la Commission de concertation sur les missions de l'hôpital présidée par M. Gérard Larcher, le projet de loi n'aborde pas la question de l'assouplissement des procédures de passation des marchés publics. Quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet ?
Pour réguler la démographie des professions de santé intervenant dans les soins ambulatoires, nous sommes nombreux à penser que des mesures incitatives sont préférables à des mesures coercitives qui pourraient avoir des effets pervers. L'idée d'une taxe imposée aux médecins installés en zone sur-dense qui refuseraient d'aider leurs confrères en zone sous-dense est en débat dans les négociations conventionnelles. Si les partenaires ne parviennent pas à un accord, allez-vous, madame la ministre, déposer un amendement pour inscrire cette mesure dans le texte ? Je souhaiterais pour ma part que l'on mette en place des rémunérations différenciées selon les zones d'exercice des praticiens.
Vous le voyez, je soutiendrai quelques amendements qui permettront d'améliorer ce texte par ailleurs excellent.
Ce texte était en effet très attendu mais je suis au regret de vous dire, Madame la ministre, que son contenu nous déçoit et que plusieurs dispositions nous semblent même préoccupantes. Notre système de santé traverse une crise grave. Au lieu de le moderniser, l'empilement de lois successives l'a déstructuré. Faute d'avoir formé des médecins et des professionnels de santé en nombre suffisant, on a provoqué une pénurie. Le projet de loi ne s'appuie sur aucun bilan des textes précédents et ne répond à aucune des problématiques essentielles qui se présentent à nous.
Les ARS auraient pu être un élément intéressant d'organisation et de décloisonnement. Mais le dispositif est perverti : en réalité, il instaure un autoritarisme étatiste qui me semble caricatural. Le directeur de l'ARS aura tous les pouvoirs et, pour que le système soit bien bordé, il sera flanqué du préfet de région ! On fait fi des professionnels de santé, des élus, des usagers. Nous trouvons ces dispositions atterrantes et nous ferons tout pour les amender et pour tenter de faire progresser un peu la démocratie.
Aucune mesure incitative n'est prévue pour favoriser le recrutement de médecins à l'hôpital public. À l'inverse, le texte consacre l'entrée du secteur privé, y compris pour exercer des missions de service public. Comment conserver dans ces conditions des équipes structurantes de médecins hospitaliers dans les établissements publics ? Tout est en place pour faire prospérer davantage le privé au détriment du public.
J'attendais beaucoup en matière de prévention et d'éducation à la santé. Alors que des difficultés nouvelles apparaissent – l'obésité infantile, par exemple – et que notre pays est en retard, les mesures proposées se réduisent à la limitation des ventes d'alcool et de cigarettes aromatisées. Rien sur la santé scolaire, rien sur la santé au travail !
Pourquoi les articles relatifs aux sages-femmes, qui figuraient dans certains avant-projets et la question des dépassements d'honoraires ont-ils disparu ? Pourquoi le texte est-il silencieux au sujet des CHU ? Quelle est la compétence réelle des conseils de surveillance institués à l'article 5 ? Il est prévu à l'alinéa 3 qu'ils « délibèrent » sur certaines matières. Quelle est la signification juridique de ce verbe ? Est-ce espérer un simple avis ou s'agit-il d'un véritable pouvoir de décision ?
L'article 3 exclut les soins palliatifs des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) qui doivent être conclus entre l'ARS et les établissements de santé. Pourquoi ? De même, je ne comprends pas pourquoi l'article 15 supprime certains enseignements – prise en charge de la douleur et soins palliatifs, effets de l'alcoolisation sur le foetus, médecine du sport, santé publique –, ni pourquoi l'on fait disparaître le conseil de la démographie médicale alors que cette instance permet de disposer d'une vision globale et d'une évaluation des avancées et des difficultés.
Enfin, alors que l'article 19 traite des dispositions relatives à la formation professionnelle conventionnelle des différentes professions de santé, les professionnels des centres de santé ne sont pas mentionnés. Est-ce un oubli ?
Le texte initial comportait en effet plus d'articles, madame Fraysse. Considérons que cela laisse plus de liberté au Parlement pour le compléter. En vous écoutant, je constate d'ailleurs qu'il peut exister des convergences au-delà des formations politiques.
Si mon intervention liminaire était brève et générale, c'est que je préférais répondre à vos questions plutôt que de vous asséner par le menu les attendus d'un texte que beaucoup d'entre vous connaissent.
Je me réjouis que le débat s'engage sur un mode de proposition et non d'opposition systématique. C'est un point important lorsqu'on traite un tel sujet.
Cela dit, nous n'examinons pas ici un texte ayant pour objet l'allocation de moyens financiers comme nous le faisons chaque année lors de la discussion du PLFSS. Il s'agit ici d'un texte d'organisation où il est normal que l'on ne retrouve pas certains points relatifs au financement. Même si les deux aspects retentissent l'un sur l'autre, il ne faut pas les mélanger.
M. le rapporteur, Mme Touraine et M. Préel m'ont interrogée sur la coordination nationale des ARS. Même si certains sont allés jusqu'à évoquer la création d'une agence nationale de santé, le principe de la création d'agences régionales est un point de consensus, ce qu'il convient de saluer. L'idée d'un pilotage national à l'image du pilotage régional est intéressante. Nous devons néanmoins garder à l'esprit qu'une agence nationale ne saurait se concevoir comme une instance technocratique destinée à faire sortir la santé du champ politique : aucun d'entre nous ne le souhaite ! On ne peut fonder le système de santé que sur un choix de société dont il nous appartient de dessiner les contours. Le pacte de 1945, le choix d'un financement solidaire, le choix de l'égalité d'accès aux soins et le choix d'un système de santé libéral font l'objet d'un large consensus : nous nous reconnaissons dans ces principes. Aussi, dès lors que le financement de la santé est largement socialisé, les décisions qui lui sont relatives – notamment en matière de rémunération des professionnels de santé – engagent la collectivité et seul le politique a la légitimité nécessaire pour les prendre. Du reste, le fait que les Français nous rejoignent dans ce choix est bien la preuve que la politique inclut le champ de la santé.
Parce que je recherche avant tout l'efficacité, j'accorde la priorité à un dispositif assurant le pilotage, la coordination et la cohérence de l'action des ARS. Le comité de coordination prévu par le texte est le point de validation obligé de toutes les instructions concernant les agences. Cette solution suppose une adaptation de l'organisation actuelle, elle ne la bouleverse pas. Demain peut-être – alternance oblige ! –, d'autres privilégieront l'idée d'une agence nationale de santé s'inscrivant dans une organisation nationale plus intégrée. Pour les raisons que je viens d'exposer, ce n'est pas ce que je souhaite.
M. le rapporteur et Mmes Touraine et Fraysse ont soulevé la question de l'exercice de missions de service public par des établissements de santé quelle que soit leur nature publique ou privée, relayant la crainte que j'entends parfois d'une « privatisation » de la santé. Pour la première fois en effet, ce projet définit dans un même article les missions que les établissements de santé, quels qu'ils soient, doivent remplir. Les missions relevant du service public sont désormais précisées.
Tous peuvent constater les progrès de la chirurgie, de l'imagerie médicale, des conditions d'exercice des professionnels. Le système de soins a évolué et continuera d'évoluer. Plus technique pour certains actes, il doit aussi être plus proche d'une population qui vieillit. Dans ce contexte, il est nécessaire de s'assurer que les missions de service public sont garanties sur l'ensemble du territoire en fonction des besoins de la population. C'est ce constat qui a conduit à distinguer, dans les missions des établissements de santé, celles qui relèvent du service public. L'agence régionale de santé, par son rôle de pilote de l'organisation des soins et de garant de l'accès aux soins, identifiera les territoires où il convient, en cas de carence ou d'insuffisance de certaines activités, de déléguer de telles missions de service public à des établissements privés. Aux termes de l'article 1er, quand une mission de service public n'est pas assurée dans un territoire donné, l'agence désigne en effet l'établissement qui en sera chargé. Ce n'est donc qu'en cas de carence qu'elle pourra demander à un établissement privé d'exercer une mission de service public et le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens de l'établissement précisera ces missions. Par ailleurs, l'autorisation qu'elle accorde crée des droits, mais surtout des devoirs. Des établissements privés qui ont développé une excellence dans un domaine pourront par exemple, sous le contrôle des CHU, accueillir des internes. Notre objectif est de garantir une adéquation optimale entre les besoins des populations et l'offre de soins, et non de réduire le rôle de l'hôpital public. Les obligations, je le répète, portent sur la participation à la permanence des soins, l'accueil des populations défavorisées, en particulier celles qui bénéficient de la couverture maladie universelle (CMU) et de l'aide médicale d'État (AME), ainsi que sur l'offre d'un pourcentage de prestations à tarif opposable.
En matière de gouvernance, le texte crée un statut unique pour les établissements publics de santé en vue de simplifier leur gestion et d'améliorer leurs capacités d'adaptation. Un mode de gouvernance et un système de ressources communs régiront désormais ces établissements. Un conseil de surveillance remplace le conseil d'administration. Ses attributions sont centrées sur une double compétence : la définition des orientations stratégiques, notamment dans le projet d'établissement, et le contrôle de la gestion et du fonctionnement de l'établissement. Le conseil de surveillance exerce ainsi un contrôle sur l'ensemble de l'activité de l'établissement et délibère sur le compte financier. À cette fin, son président a accès aux informations concernant le fonctionnement de l'établissement.
Dans ce cadre, j'ai souhaité laisser un espace important au pouvoir d'initiative de la représentation nationale pour qu'elle puisse préciser sa conception des attributions du conseil de surveillance dans le cadre de deux principes auxquels je suis attaché : que la composition de ce conseil respecte les trois collèges prévus et soit limitée en nombre.
Le texte propose également que le président du conseil de surveillance soit élu parmi les membres des collèges des élus et des personnalités qualifiées. Je ne doute pas que l'on retrouvera dans ces fonctions les maires ayant fait preuve de charisme et d'autorité.
Le mode de désignation des directeurs des établissements publics de santé est modifié pour donner plus d'importance au niveau régional. C'est en effet le directeur général du centre national de gestion (CNG) qui nommera les directeurs des hôpitaux sur proposition du directeur général de l'agence régionale de santé et après avis du président du conseil de surveillance. Dans les communautés hospitalières de territoire (CHT), c'est le directeur de l'établissement siège qui proposera au centre national de gestion la nomination des autres chefs d'établissement. Si l'intérêt du service le commande, le directeur d'un établissement public de santé pourra être mis en position de recherche d'affection. Enfin, les établissements publics de santé pourront créer une ou plusieurs fondations hospitalières pour concourir à des missions de recherche dans une plus grande transparence.
M. Préel et Mme Fraysse ont exprimé des inquiétudes quant à l'importance des pouvoirs du directeur général de l'ARS. Le pilotage des hôpitaux publics doit bien entendu s'appuyer sur un chef d'établissement disposant de l'autorité et de l'autonomie qui conviennent à de telles structures. Président du directoire, le directeur se voit confier la pleine responsabilité de l'établissement de santé. Ses compétences accrues supposent que l'on fasse évoluer sa relation avec le directeur général de l'ARS. En effet, seul le niveau régional est à même d'apprécier la pertinence des actions engagées par l'établissement tant en interne qu'en coopération avec les autres acteurs de santé. Il appartient donc au directeur de l'ARS de renforcer sa tutelle en utilisant les supports de contractualisation qui lient les hôpitaux et l'agence. De plus, je l'ai dit, l'ARS aura un rôle renforcé dans la nomination des directeurs des centres hospitaliers.
C'est précisément pour renforcer l'attractivité de l'hôpital public pour les praticiens que nous avons souhaité, madame Fraysse, ouvrir la possibilité d'un nouveau régime d'emploi contractuel. Dans certaines spécialités comme l'imagerie médicale, les établissements publics ont du mal à faire face à la concurrence du secteur libéral, compte tenu de l'écart des rémunérations. Le nouveau contrat offre de nouvelles perspectives d'exercice et de rémunération aux praticiens désireux de s'impliquer activement dans la vie de l'établissement. Le directeur de l'hôpital dispose ainsi d'un outil incitatif de recrutement et de valorisation. Pour autant, il n'est pas question de développer une logique productiviste qui serait incompatible avec la déontologie médicale. Nous voulons seulement permettre à des praticiens de devenir, s'ils le souhaitent, de véritables partenaires de la direction de l'établissement, leurs revenus étant fonction d'engagements déterminés dont la réalisation sera contrôlée. Le statut des praticiens hospitaliers n'est nullement remis en cause. Ce nouveau mode de recrutement sera ouvert aux praticiens titulaires dans le cadre d'un détachement d'une durée limitée à deux ans. À l'issue de cette période, ils pourront soit réintégrer le statut classique, soit faire le choix de poursuivre leur exercice sous ce mode contractuel.
M. le rapporteur m'a interrogée sur la doctrine des CHT. Précisément, elles ne sont pas conçues de manière doctrinaire, elles s'inscrivent dans un continuum d'outils mis à la disposition des établissements. Il ne s'agit ni de constituer des complexes hospitaliers – des Assistances publiques (AP) en réduction, qui seraient ingérables – ni de faire avaler les petits poissons par les gros. La CHT doit permettre de mieux répondre aux besoins de la population. C'est pourquoi elle se construit autour d'un projet médical visant à donner à des établissements publics de santé de taille moyenne la possibilité de se développer et de mettre en place une stratégie territoriale commune avec les autres établissements, ce qui permettra d'éviter la dispersion des moyens et les redondances.
Le modèle que j'ai en tête – mais qui est susceptible, bien entendu, d'être modifié par toutes les propositions innovantes émanant des territoires – est un groupement d'établissements présentant une certaine taille critique, gérant au mieux les autorisations d'activité tout en gardant la capacité de travailler ensemble efficacement. Ce pourrait être une coopération étroite entre deux ou trois centres hospitaliers disposant au total de 400 à 600 lits autour d'un plateau technique, auxquels il serait possible d'adjoindre un hôpital local, un établissement de soins de suite et de réadaptation ou un établissement de long séjour.
Quoi qu'il en soit, les établissements pourront choisir leur degré d'intégration. Sur le modèle des coopérations communales, il existera un bloc commun de compétences mais aussi d'autres éléments « à la carte ». Des formes fédératives laissant à chaque établissement l'autonomie de gestion sont possibles, mais il peut aussi y avoir des CHT plus intégrées reposant sur une structure juridique commune. Ce sont les acteurs de terrain qui en décideront : rien ne sera imposé par le ministère de la santé ou l'ARS.
Si j'ai voulu instaurer ces communautés hospitalières de territoire – qui ne concernent que les établissements publics – c'est précisément pour préserver le statut de l'hôpital public. Mais la coopération entre établissements ne se résume pas aux CHT. Dans ce but, le texte clarifie le droit applicable aux groupements de coopération sanitaire (GCS) et les rend plus opérationnels sans pour autant fragiliser les GCS existants.
Nous avons déjà largement évoqué les questions de financement lors de la discussion du dernier PLFSS. Je rappelle que la tarification à l'activité (T2A) est un mode de financement juste. Tous les partenaires du système hospitalier condamnaient l'injustice de l'ancienne formule de dotation globale, qui reposait sur des bases historiques qui ne tenaient pas compte de l'évolution des établissements. Bien souvent, la négociation avait d'ailleurs lieu dans le bureau du ministre de la santé et dépendait plus de liens d'amitié que de la constatation des besoins de santé réels…
Le modèle de financement par la T2A a vocation à être sans cesse ajusté. Nous avons déjà amélioré le financement des missions d'enseignement et de recherche (MERRI). La classification commune des actes médicaux (V11), qui entrera en vigueur au 1er mars prochain, prendra également mieux en compte la précarité des patients et la sévérité des affections, tandis que la réalisation d'études nationales de coûts dans les secteurs publics et privés permettra l'ajustement des tarifs sur la réalité des coûts de production. Je l'ai dit lors de l'examen du PLFSS et je le répète : la convergence tarifaire n'est pas l'égalité.
Par ailleurs, il est exact que la réforme que je propose renforce le pilotage par le directeur de l'établissement public de santé, qui est également le président du directoire. Cependant, le président de la commission médicale d'établissement (CME) devient vice-président du directoire et coordonnateur de la politique médicale de l'établissement. C'est la première fois qu'un texte législatif consacre le rôle de la CME. Quelle autre structure, publique ou privée, place-t-elle ainsi aux côtés de son directeur un professionnel élu par ses pairs ? L'hôpital, par ses missions, son fonctionnement et son financement, constitue une exception dans notre paysage institutionnel, ce qui implique une double exigence de qualité : les médecins sont responsables du projet médical, auquel ils associent les personnels paramédicaux – j'ai tenu à ce que le texte précise bien que les cadres et les directeurs de soins font partie du directoire –, tandis que la responsabilité de la gestion de l'établissement et de la mise en oeuvre du projet d'établissement incombe à l'équipe de direction formée par le directeur et le directoire.
Il va de soi que ce texte concerne également les centres hospitaliers universitaires (CHU). Ceux-ci ne constituent pas un État dans l'État. La mission que le Président de la République a confiée à la commission, présidée par le professeur Jacques Marescaux, chargée de concevoir la réforme des centres hospitaliers, ne refera pas le travail d'élaboration de la commission présidée par Gérard Larcher. Les CHU sont les « navires amiraux » de l'hôpital public et il n'y a aucune contradiction entre la réforme que je mène et les réflexions engagées. La mission complétera notre travail sur certains aspects d'enseignement et de recherche, elle complétera également la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, mais ses travaux n'ont pas forcément vocation à connaître une traduction législative. La carrière des professeurs des universités praticiens hospitaliers (PU-PH), le suivi des missions d'enseignement, de recherches, de références et d'innovation (MERRI) ou la participation des universités à la gouvernance des CHU relèvent en effet plutôt du domaine réglementaire.
S'agissant de la procédure d'autorisation d'exercice des praticiens à diplômes hors Union européenne (PADHUE), 6 000 médecins à diplôme étranger exerçaient il y a deux ans, dans nos établissements de santé. Une procédure transitoire, qui prendra fin en 2011, a été mise en place afin de permettre à tous ces praticiens de passer la procédure d'autorisation, ce qui a déjà été le cas pour 1 500 d'entre eux.
L'article 10 du projet de loi prévoit un certain nombre de mesures à ce propos qui vont dans le sens d'une facilitation des conditions d'exercice de ces praticiens :
– passage de deux à trois du nombre de possibilités de se présenter aux épreuves de vérification des connaissances et de solliciter l'autorisation d'exercice ;
– demande aux chirurgiens-dentistes et aux sages-femmes de justifier de l'exercice de fonctions hospitalières pendant un an avant de pouvoir obtenir l'autorisation d'exercice, ce qui répond à une forte demande des commissions d'autorisation d'exercice de mieux évaluer les pratiques professionnelles ;
– remplacement de l'épreuve anonyme de vérification de la langue française, dont un certain nombre de contre-performances ont montré qu'elle n'était pas adaptée, par le diplôme d'aptitude à la langue française, reconnu internationalement, qui devra être fourni pour l'inscription à l'examen ou au concours.
Un certain nombre de mesures réglementaires seront également prises, toujours dans un but de facilitation.
Jean-Luc Préel s'est demandé pourquoi confier la présidence du conseil de surveillance des ARS au préfet de région. J'assume complètement ce choix. Les compétences exercées par l'ARS étant des compétences de l'État, je m'étonne que certains, qui sont tout aussi attachés que moi à ce que le politique demeure le garant de notre système de santé, s'offusquent de ce que le représentant de l'État joue tout son rôle dans les ARS pour ce qui a trait à la politique de santé publique, la veille et la sécurité sanitaires, l'organisation des soins, le médico-social. L'État apportera d'ailleurs plus de 80 % des moyens humains aux ARS.
S'il est légitime que l'État ait sa place au sein du conseil de surveillance, cela ne fait pas pour autant de l'ARS une « chose » étatique. Elle unifie le service régional de santé, elle est une maison commune à l'État et à l'assurance-maladie et je considère que cette double culture est indispensable à son succès. L'État sera minoritaire au sein du conseil de surveillance. Le préfet de région ne le présidera pas pour représenter les intérêts des services de l'État mais pour être le garant du respect des principes du service public : impartialité, égalité de traitement sur l'ensemble du territoire, continuité de l'action publique. Il sera aussi, bien évidemment, le garant de l'articulation de l'ensemble des politiques publiques au sein de la région.
Il ne faudrait pas fermer la porte à d'autres personnalités, d'autant que c'est en leur donnant des responsabilités que l'on rend les gens responsables. S'ils ont le sentiment que l'État s'occupe de tout, il y a un risque qu'ils se sentent assistés.
Comme le montre le fonctionnement de la CNAMTS, des représentants des syndicats ou des employeurs peuvent avoir un rôle important d'explication. Si toute la pédagogie repose à l'avenir sur l'État, les résultats ne seront peut-être pas ceux que l'on escompte. Mais nous aurons l'occasion d'y revenir lors du débat.
Nous savons bien que l'amélioration de la santé de nos concitoyens ne résulte pas seulement des soins médicaux qu'ils reçoivent. Certains spécialistes affirment même que 20 % seulement des énormes progrès de l'espérance de vie sont liés à la médecine, le reste tenant à l'amélioration des conditions de vie et, globalement aux autres politiques publiques. Or, je le répète, le préfet est le garant de l'articulation des politiques de santé avec l'ensemble des autres politiques publiques qui y concourent. De même que la santé scolaire ou la santé au travail ne relèvent pas du ministre de la santé, l'ARS ne porte pas seule l'action publique dans ce domaine et je juge donc important que le préfet soit à la tête du conseil de surveillance.
Qui plus est, je ne vois pas quel autre acteur de la région, quelle que soit d'ailleurs son appartenance politique, jouirait de la même légitimité et apporterait les mêmes garanties.
J'en viens à la médecine de ville et aux soins ambulatoires. Chacun reconnaît que la situation de la démographie médicale n'est pas satisfaisante. Notre objectif est de garantir sur tout le territoire une offre de soins de premier recours pérenne, tout en répondant aux attentes des jeunes professionnels, qui ne souhaitent pas exercer en cabinet individuel comme leurs aînés le faisaient – d'où les difficultés de ces derniers pour trouver des repreneurs à leur départ à la retraite – et donc ne reprendront pas les cabinets tels qu'ils avaient été conçus par leurs aînés.
Mon action repose sur un faisceau de mesures cohérentes qui contribuent à l'organisation et à la modernisation de l'offre de soins ambulatoires. Il s'agit d'abord, afin de rééquilibrer les flux démographiques de la profession, d'adapter les capacités de formation des médecins dans les régions en fonction des besoins de la population. Cela aura des effets presque immédiats sur l'offre de soins dans ces régions car ces médecins pourront effectuer des remplacements de deux ans et s'installer au bout de quatre ans.
Afin de définir un volet ambulatoire du SROS, véritable schéma d'aménagement de l'offre de soins de ville sur le territoire régional, je me suis appuyée sur des expérimentations comme celles qui ont été conduites en Mayenne – M. Marc Bernier a suivi attentivement ces initiatives – et en Basse-Normandie. Ce schéma sera établi en lien avec les professionnels, les patients et les élus. Il fera converger les financements et les subventions vers les priorités définies de façon cohérente et consensuelle. Il ne sera pas juridiquement opposable.
L'incitation à un exercice coordonné au sein de pôles ou de maisons de santé permettra de pérenniser, de moderniser et d'optimiser l'offre de soins de proximité. La généralisation des coopérations entre professionnels de santé libérera du temps médical. L'organisation et la gestion de la permanence des soins ambulatoires, qui sont pour l'instant éclatées entre le préfet, l'URCAM et l'ARH, seront désormais exercées, en cohérence avec la prise en charge hospitalière des urgences médicales, au sein de l'ARS.
En complément de ces mesures structurelles, les négociations conventionnelles définiront des mesures de régulation conformes aux propositions qui ont été faites lors des états généraux de l'organisation de la santé (EGOS) et au concept de justice intergénérationnelle auquel je suis profondément attachée. Je ne puis envisager un échec des négociations sur un sujet d'une telle importance.
Comme le Président de la République s'y est engagé en décembre dernier, je présenterai au printemps prochain un projet de loi sur la psychiatrie et la santé mentale. Le débat ne fait donc que commencer. Il s'agira en premier lieu de réformer la loi du 27 juin 1990 sur les soins et les hospitalisations sans consentement des personnes atteintes de maladies mentales. Le texte comportera également un volet sur l'organisation de la santé mentale et de la psychiatrie. Édouard Couty, à qui j'ai confié la présidence d'une commission sur les missions et l'organisation des soins de la psychiatrie et de la santé mentale doit me rendre son rapport demain. En complément, je lui demanderai de préparer les dispositions législatives nécessaires à une meilleure prise en compte de la spécificité de la psychiatrie, de l'entourage des malades et des professionnels de santé, afin de mener une politique de la santé mentale ambitieuse.
De nombreux rapports, en particulier ceux de MM. Jean-Yves Grall et Philippe Boënnec, montrent l'importance de la permanence des soins et la nécessité de réunir en une seule main l'organisation et le financement de ce dispositif très complexe. C'est ce que nous faisons avec ce projet, qui souligne qu'il s'agit d'une mission de service public, assurée par les médecins libéraux et les établissements de santé, et organisée par l'ARS après avis du représentant de l'État territorialement compétent. L'ARS réunit au niveau régional les compétences d'organisation et de financement du dispositif. Elle regroupe en son sein les acteurs jusqu'à présent impliqués dans les Comités départementaux de l'aide médicale urgente et de la permanence des soins (CODAMUPS). L'organisation de la permanence des soins gagne ainsi en souplesse pour mieux s'adapter aux spécificités locales. On pourra dans ce cadre s'affranchir du paiement à l'acte et mettre en place des modes de rémunération forfaitaire. La responsabilité civile professionnelle des médecins libéraux participant à la régulation des appels téléphoniques sera couverte par la responsabilité administrative, afin d'inciter les professionnels à participer à cette activité.
Cette régulation pourra se faire à partir d'un numéro d'appel national accessible sur l'ensemble du territoire…
…et auquel pourront être associés en cas de besoin d'autres numéros d'appel.
Enfin les pénalités en cas de refus de déférer à des réquisitions seront accrues, afin de garantir à la population une réponse à ses besoins de santé aux heures de fermeture des cabinets médicaux. Mais je reste ouverte à la discussion à propos de cette augmentation.
Je suis extrêmement attachée aux modes de rémunération des professionnels de santé libéraux alternatifs au paiement à l'acte, mais cette question a déjà été traitée dans les lois de financement de la sécurité sociale pour 2008 et pour 2009. Elle n'avait donc pas sa place dans une loi relative à l'organisation du système de santé.
C'est assez complexe, mais nous sommes en train de faire un travail important pour aboutir aux maquettes.
L'article 18 du projet reprend les pénalités encourues par les professionnels de santé pour les dépassements excessifs d'honoraires et le défaut d'information préalable. Les dépassements non conformes à la convention seront également pénalisés, notamment ceux qui sont facturés à un bénéficiaire de la couverture maladie universelle (CMU). Je demanderai à l'UNCAM de rappeler aux assurés les principes de la tarification ainsi que les droits de recours dont ils disposent à l'encontre des praticiens dont ils estiment qu'ils ont pratiqué des dépassements irréguliers. L'Ordre des médecins s'est également saisi du problème et il a rappelé aux médecins leurs obligations déontologiques. Je rappelle également l'existence d'Info soins. Enfin, le secteur optionnel, en cours de négociation, a pour objectif de renforcer l'offre de soins à tarif opposable.
Jean-Luc Préel m'a également interrogée sur les difficultés financières d'accès aux soins. En effet, un certain nombre de nos concitoyens rencontrent des difficultés : 7 % de la population ne bénéficient pas d'une couverture complémentaire, essentiellement pour des raisons financières. La CMU complémentaire, qui compte à 4,5 millions de bénéficiaires, a marqué incontestablement une avancée. Elle peut être complétée par des dispositifs comme l'aide à la souscription d'une assurance maladie complémentaire. Nous avons déjà revalorisé fortement son montant, en particulier pour les plus de 60 ans. Nous avons simplifié son accès par un chèque. Les bénéficiaires potentiels ont reçu une information individuelle. Tout ceci a porté ses fruits puisque nous avons observé, par rapport à août 2007, une augmentation de 34,5 % du nombre des bénéficiaires de l'aide, soit 410 155 personnes de plus. Nous sommes favorables au développement de l'accès à une complémentaire santé. Je regarderai donc avec une particulière bienveillance l'amendement que le président Méhaignerie a l'intention de déposer afin de porter à 500 € l'aide aux plus de 50 ans.
Jean-Pierre Door a évoqué la télémédecine, qui ouvre des perspectives considérables pour l'accès aux soins comme pour leur qualité et leur sécurité ainsi que pour l'organisation de ressources médicales de plus en plus rares. Pour consolider la base légale que constitue la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie, la définition de la télémédecine doit permettre de distinguer la pratique médicale du champ beaucoup plus vaste ouvert par la télésanté. Une typologie des actes de télémédecine sera arrêtée par voie réglementaire. Nous fixerons également le minimum des précautions techniques et organisationnelles indispensables à la sécurité et à la qualité de la télémédecine. Les modalités de financement devront également être précisées
S'agissant de la formation médicale continue (FMC), nous avons voulu, à l'article 19 du projet, simplifier le parcours du praticien qui est tenu de respecter l'obligation de formation, et rationaliser les circuits de gestion administrative, lesquels sont pour l'instant particulièrement complexes. L'obligation de formation continue des professions médicales est réaffirmée, mais le dispositif institutionnel est simplifié par le regroupement des trois conseils nationaux de la FMC en un conseil national unique compétent pour tous les médecins, quel que soit leur mode d'exercice. Ce dispositif repose avant tout sur les professionnels de santé, en particulier sur les conseils de l'Ordre, les membres des futurs conseils de formation continue, les collèges de bonnes pratiques, la HAS, l'UNCAM. La gestion des fonds de la formation continue est regroupée dans un nouvel organisme gestionnaire. Sur la base des propositions faites par un récent rapport de l'IGAS, les éléments qui fonctionnent seront reconduits et complétés pour améliorer la lisibilité des procédures.
Un certain nombre de nos collègues doivent malheureusement nous quitter pour prendre leur train avant le début de la grève. Si cela est nécessaire, nous ferons ultérieurement en sorte que les ministres puissent répondre aux questions qu'ils souhaitaient leur poser.
Marc Bernier, qui a beaucoup travaillé sur ces sujets, se trouvant précisément dans cette situation, je me permets d'interrompre Mme la ministre pour qu'il puisse lui poser sa question.
Merci, madame la ministre, d'avoir cité la Mayenne en exemple...
Je rappelle l'important travail que nous avons accompli, avec Christian Paul, dans le cadre de la mission d'information parlementaire sur l'offre de soins. Pour moi, un des principaux problèmes tient à l'attractivité du métier de médecin généraliste car on constate une désaffection pour cette profession.
Il nous faut également répondre à l'attente des Français en instituant, sinon des mesures coercitives, du moins des mesures garantissant que la permanence des soins est bien assurée sur l'ensemble du territoire.
J'espère que le débat nous permettra d'enrichir le texte sur ces points et sur quelques autres.
Nous nous sommes largement inspirés des préconisations de votre excellent rapport pour tout ce qui a trait dans ce texte à l'offre de soins.
Christian Paul et Marc Bernier ont montré qu'il s'agit de sujets qui transcendent les positions politiques.
Nous avons fait un important travail – salué d'ailleurs par l'ensemble du secteur – pour la mise en place de la filière universitaire de médecine générale à laquelle nous avons donné un statut législatif. De plus, avec la loi du 8 février 2008 relative aux enseignants de médecine générale. Ces enseignants, titulaires et non titulaires, se sont vus doter d'un statut universitaire. La commission d'intégration compétente est en cours de constitution et nommera les premiers professeurs titulaires à la rentrée 2009. Dès la rentrée 2007, 40 postes de chef de clinique de médecine générale ont été créés. Un décret définira les modalités de leur activité libérale. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a institué un contrat spécifique aux enseignants en médecine générale, sur la base duquel les URCAM leur versent une rémunération complémentaire.
Mme Touraine s'est demandé en substance pourquoi le titre III, consacré à la santé publique, était aussi maigre. Mais les questions de santé publique, de prévention, d'éducation thérapeutique baignent l'ensemble du texte. Ainsi, la création des ARS, auxquelles des missions spécifiques sont confiées en la matière, consacre l'implication du secteur dans des politiques de santé publique qui seront particulièrement adaptées aux réalités du terrain.
Nous allons en outre être bientôt appelés à réviser la loi de santé publique du 9 août 2004 puisqu'il s'agit d'une loi quinquennale. Pour sa part, la loi d'organisation ne reflète pas l'ensemble des politiques de santé. Le Haut conseil de santé publique va commencer à évaluer la loi de 2004, qui fixait cent objectifs particulièrement ambitieux. À partir de là, nous avancerons ensemble vers la définition des prochaines priorités de santé publique.
L'encombrement du calendrier parlementaire explique aussi pourquoi ce titre III peut sembler modeste. Il est néanmoins essentiel car il porte sur des sujets majeurs de notre politique de prévention : le poids toujours croissant des maladies chroniques, qui concernent pas moins de 15 millions de personnes, et l'éducation thérapeutique des patients, à laquelle je donne, pour la première fois, toute la place qu'elle mérite. Il convient également d'agir, en amont, sur deux déterminants majeurs de la santé, l'alcool et le tabac, en particulier chez les jeunes. Je reviendrai si vous le souhaitez sur les mesures très concrètes que nous prévoyons pour lutter contre l'alcoolisation des jeunes. Quant au tabac, si la lutte contre le tabagisme passif est considérée comme un succès, nous devons poursuivre nos efforts pour réduire encore la consommation de tabac.
Le Président de la République m'a fixé l'objectif très important de porter les dépenses de prévention de 7 à 10 % des budgets de nos politiques de santé. Les ARS et la future loi de santé publique y contribueront fortement.
S'agissant des problèmes de nutrition, je rappelle que deux de nos collègues ont rédigé un rapport et que Valérie Boyer reprendra par voie d'amendements un certain nombre des propositions qu'elle a faites en matière de lutte contre l'obésité. De façon plus générale, je me réjouis que ce texte reprenne bon nombre de préconisations de nos missions d'information dont les rapports, rédigés en commun, aboutissent souvent à des convergences permettant de préparer les réformes de façon plus consensuelle.
Je me pose beaucoup de questions en ce qui concerne l'hôpital et plus particulièrement la délégation de missions de service public à des établissements privés. Etes-vous favorable, madame la ministre, à la définition d'un socle de missions de service public ? Pensez-vous qu'il devrait être obligatoire de s'acquitter de certaines missions, comme la permanence des soins, pour en exercer d'autres, comme l'enseignement ?
N'est-il pas d'ailleurs contradictoire d'indiquer que les délégations de missions de service public n'interviendront qu'en cas de carence, puis de parler de l'excellence de certains établissements privés ?
Je pensais plus particulièrement à l'enseignement dans des domaines comme la chirurgie cardiaque.
Nous insisterons beaucoup, lors du débat en séance publique, sur la question de la gouvernance. Il ne s'agit pas pour nous d'opposer de façon stérile la communauté médicale et la communauté administrative, mais nous considérons que, même s'il est le maître à bord, la position du directeur sera fragilisée en raison de ses liens avec l'ARS qui feront de lui un « Hercule au pied d'argile », assis sur un siège éjectable. Nous regrettons en outre qu'il soit appelé à arrêter le projet médical, qui, selon nous, relève de la compétence de la communauté soignante.
Entre l'hospitalisation mutualiste, l'actionnariat des acteurs et l'intervention des fonds de pension, le secteur de l'hospitalisation privée est très hétérogène. M. Gérard Larcher a fait part de son inquiétude quant au poids croissant des fonds de pension dans les établissements privés de santé et il a souhaité qu'on mette en place des dispositifs de protection. Or, rien n'est prévu pour cela dans le texte.
Donner un statut aux médecins contractuels revient en fait à reconnaître le recours à ce que l'on a coutume d'appeler des « mercenaires ». S'ils font un travail de qualité, ces médecins ne participent toutefois pas au projet médical. Pourtant, ils bénéficient de contrats beaucoup plus intéressants que le statut de praticien hospitalier. Tout ceci instaure un climat de concurrence déloyale au sein des établissements. Mieux aurait mieux valu revoir le statut des praticiens hospitaliers, mais votre texte est muet sur ce point.
Nous nous interrogeons par ailleurs sur l'articulation entre les dispositions relatives aux centres hospitalo-universitaires et les propositions que fera la mission dirigée par le professeur Marescaux, qui devraient aboutir à ce qu'il appelle lui-même « une révolution » dans le fonctionnement des CHU.
Comme beaucoup de mes collègues, je suis très attaché à ce que chaque Français ait un véritable accès à la santé. Force est de constater que tel n'est pas le cas. Nos concitoyens sont confrontés aux franchises médicales, auxquelles je demeure résolument hostile ; au non-remboursement de certains médicaments, que la récente épidémie de gastro-entérite a encore mis en évidence ; à des honoraires parfois excessifs ; aux conséquences de la politique sociale du Gouvernement, les personnes en situation difficile renonçant d'abord aux soins. Un sous-préfet m'a dit un jour combien il avait été choqué de l'état des dents d'une partie de la population de ma circonscription, qui est ainsi victime d'une injustice de plus.
Vous avez eu raison de souligner, madame la ministre, que les zones rurales n'étaient pas les seules concernées par la désertification médicale. Dans ma circonscription très urbanisée, il faut plusieurs mois, voire une année, pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste… Je serai donc très attentif, lors du débat, à tout ce qui aura trait à ce sujet.
Je m'intéresse aussi de près aux dégâts causés par l'amiante. Si cela relève certes de la santé au travail, il faut également penser au risque environnemental lié à l'amiante résiduel, auquel tous les Français sont exposés. Or, votre texte ne comporte aucune mesure favorisant la prévention en la matière.
Enfin, je me réjouis qu'une prime de 500 euros soit envisagée, ce qui semble montrer que vous commencez à faire vôtre le plan de relance que vient de présenter le parti socialiste…
J'insisterai plus particulièrement sur le secteur médico-social. Vous avez reçu les associations, madame la secrétaire d'État, et vous savez qu'elles considèrent que le texte ne leur accorde pas une place suffisamment importante. Nous ferons un certain nombre de propositions pour la renforcer, pour lever leurs craintes en ce qui concerne les appels d'offres et pour leur donner la possibilité de continuer à mener des expérimentations innovantes sur le terrain, afin que le mouvement ne soit pas seulement descendant mais aussi ascendant.
Envisagez-vous par ailleurs de prendre des dispositions particulières pour la représentation des CHU au sein des conseils de surveillance ou faudra-t-il pour cela attendre les conclusions de la mission Marescaux ?
Je souhaite revenir sur le titre III. J'ai bien entendu que l'on procéderait prochainement à la révision de la loi de santé publique de 2004, mais le président de la Commission a aussi laissé entendre que des amendements relatifs à la prévention de l'obésité seraient déposés. Je m'étonne que l'on tronçonne de la sorte la santé publique, mais aussi que la santé environnementale soit totalement absente de ce titre.
J'ai par ailleurs l'impression qu'à l'article 22, relatif à l'éducation thérapeutique des patients, vous cherchez à faire entrer par la fenêtre les programmes d'observance de la thérapie suivie par des patients souffrant de pathologies lourdes. Or, nous nous étions tous retrouvés pour faire barrage à ces programmes, auxquelles les associations de patients sont hostiles, lorsque les laboratoires avaient cherché, à l'occasion d'un PLFSS antérieur, à les faire entrer par la porte principale. La rédaction de l'article L. 1161-4 qui évoque « une assistance et un soutien aux malades dans la prise en charge de leur maladie » nous inquiète d'autant plus que l'article 22 dispose que les précisions seront apportées par décret.
Il me semble également que le titre III et l'article 22 appellent des précisions. Il faudra en particulier nous apporter des éclaircissements quant au financement de cette éducation thérapeutique dans le cadre de la T2A. Nous nous interrogeons aussi sur ce qui se cache derrière le mot « promoteurs » : il ne faut pas confondre, au regard de la définition de l'OMS de 1998, éducation thérapeutique et observance des traitements. Nous nous inquiétons vraiment de la place grandissante que prennent les industries pharmaceutiques, auxquelles un décret paru le 24 décembre dernier permet désormais de sponsoriser des émissions de télévision afin de promouvoir leur nom.
Nous sommes par ailleurs déçus que le titre III, relatif à la santé publique, ne traite ni de l'obésité, ni de la prévention à l'école, au travail ou dans le monde carcéral, ni de l'accès des jeunes à la contraception.
Pourquoi en revanche tant de précipitation à traiter la question de l'alcoolisme chez les jeunes alors que l'on va réviser la loi de santé publique ?
Pourquoi avoir renoncé aux dispositions relatives à la recherche clinique sur les personnes, pourtant contenues dans l'avant-projet ? Si elles ne présentent plus de caractère d'urgence, pourquoi nous reviennent-elles par l'intermédiaire d'une proposition de loi du groupe Nouveau centre ? Pourquoi ne les examinons-nous pas plutôt dans le cadre de la révision des lois bioéthiques ?
Toutes les associations intervenant dans le secteur médico-social craignent que la formule de l'appel à projet ne les empêche d'innover. Il faudra les rassurer.
Je m'inquiète par ailleurs des difficultés que rencontrent certaines petites structures associatives d'hospitalisation à domicile pour accéder aux médicaments de la réserve hospitalière. Nous chercherons par voie d'amendement à faciliter les délégations de pharmacies hospitalières.
Cela a été dit, il faut se méfier de l'opposition entre les médecins hospitaliers statutaires et les médecins sous contrat. Ce sont des problèmes que nous avons déjà rencontrés en anesthésie avec le recours aux « mercenaires ».
Ne peut-on vraiment pas envisager qu'un établissement public de santé puisse devenir membre, par dérogation, d'au moins deux CHT ? Il peut parfois advenir qu'en fonction de leur implantation géographique, certains hôpitaux portent des projets médicaux différents dans deux territoires différents.
Enfin, jeune député mais vieux médecin, je souhaite pousser un « coup de gueule » contre les propos démagogiques du docteur Pelloux, qui a affirmé devant nous que les médecins hospitaliers sont débordés et qu'il suffirait de faire travailler les médecins libéraux la nuit et le week-end pour que tout s'arrange. Si l'on veut trouver des solutions, comme vous vous efforcez de le faire, madame la ministre, en créant les ARS, il faut éviter de monter les gens les uns contre les autres. Soyons donc vigilants face à cette démagogie !
Il est difficile de ne pas réagir quand on affirme que l'on travaille de plus en plus et que l'on gagne de moins en moins. Ceux qui président des conseils d'administration d'hôpitaux savent que c'est loin d'être la vérité.
Il ne faut pas caricaturer les propos de Patrick Pelloux : 70 % des accueils en milieu hospitalier ne devraient pas relever de l'hôpital.
Il ne faut donc pas faire du Dr Pelloux un bouc émissaire facile alors qu'un certain nombre de ses alarmes sont justifiées, on l'a encore vérifié cet hiver.
Ma première question porte sur l'offre de soins. Nous sommes tous d'accord pour faciliter le travail du médecin de premier recours par des mesures d'organisation et par des incitations, mais on parle aussi beaucoup ces derniers temps d'une taxe qui frapperait les médecins installés en zones bien dotées lorsqu'ils refuseront de mener des actions en direction des zones moins dotées. Devons-nous nous attendre à des amendements à ce propos lors de la discussion ?
S'agissant des abus en matière de dépassements d'honoraires et de refus de soins, l'Ordre des médecins dit qu'il ne reçoit pas de plaintes. Ne conviendrait-il pas de permettre non seulement aux patients mais aussi aux associations de saisir les caisses ou les conseils de l'Ordre ?
J'ai été par ailleurs frappé au cours des auditions réalisées par le rapporteur par les craintes que suscitent dans les milieux médico-hospitaliers vos propositions en matière de gouvernance de l'hôpital, ce dernier étant vu comme une entreprise et son directeur comme un patron. Vous laissez ainsi de côté le projet médical et vous revenez en arrière par rapport à l'organisation en pôles. Les représentants des praticiens sont pour le moins réticents. Ce matin encore, le président des commissions médicales d'établissement de centres hospitaliers, le docteur Fellinger, a fait part de son inquiétude face à un tel changement de logique au moment où la précédente réforme commence à produire ses effets, même si de nombreux directeurs sont encore réticents à déléguer des tâches de gestion aux chefs de pôles. De nombreux praticiens hospitaliers ont d'ailleurs adressé une lettre au Président de la République pour critiquer cette nouvelle réforme de la gouvernance.
Sans remettre en chantier l'ensemble du titre premier – notamment ce qui a trait aux communautés hospitalières et à la facilitation des appels d'offres –, ne pensez-vous pas qu'il serait opportun, compte tenu de cette inquiétude et dans l'attente du rapport de M. Marescaux sur les CHU, de retirer du texte les articles relatifs à la gouvernance ? À défaut, je crains que le couvercle ne finisse par sauter, tant l'hôpital ressemble aujourd'hui à une marmite qui bout.
M. Bapt devrait conseiller à M. Pelloux de ne pas se laisser aller à la caricature, car il a tenu vis-à-vis de notre ministre, dont le courage n'est plus à souligner, des propos véritablement inadmissibles.
Il a demandé ma démission à la suite du décès d'un enfant dans un service de pédiatrie générale à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris…
Par ailleurs, il me semble que la crainte du secteur médico-social concerne moins la formule de l'appel à projet que l'application de la directive européenne sur les services d'intérêt général, qui pourrait remettre en cause les subventions aux associations en les assimilant à des aides d'État. Il conviendrait donc de rechercher l'adoption d'une directive spécifique, offrant une sécurité aux associations, en particulier à celles qui interviennent dans le champ de la solidarité vis-à-vis de la dépendance et du handicap.
Jean-Marie Rolland m'a interrogée sur la place des acteurs du monde médico-social dans les ARS. Des représentants des partenaires associatifs et des usagers – personnes âgées comme handicapées – seront présents dans le conseil de surveillance. Ils participeront à la commission plénière de la conférence de santé, c'est-à-dire à l'élaboration du plan stratégique, ainsi qu'aux commissions spécialisées, en vue de l'élaboration du schéma régional médico-social, et aux commissions d'appel à projets. Le nombre des représentants dans ces différentes instances sera précisé par des décrets qui seront préalablement soumis à la concertation.
Pour leur part, les gestionnaires seront présents dans la conférence régionale, dans les commissions spécialisées et dans les commissions d'appel à projets. Ils sont donc assurés de pouvoir construire, en partenariat, l'offre qui sera proposée dans le champ médico-social.
Le rapporteur s'est également demandé comment concilier le schéma régional de l'organisation médico-sociale et les schémas départementaux. Le projet clarifie la situation actuelle, qui voit coexister de nombreux plans, schémas et programmes sectoriels qui ne sont pas assez articulés entre eux et ne permettent donc pas une organisation et une régulation efficaces du système. Dans le cadre des ARS, le plan stratégique régional de santé fixera les objectifs et les orientations ainsi que les schémas régionaux qui définissent les mesures destinées à mettre en oeuvre les objectifs, notamment en matière d'organisation médico-sociale, et les programmes qui précisent les modalités spécifiques d'application des schémas. À la différence des dispositifs actuels, peu coordonnés, la loi prévoit que ce schéma régional et les programmes qui l'accompagneront seront « élaborés et arrêtés au terme d'une procédure concertée avec les collectivités locales concernées ». C'est grâce à cette concertation que sera assurée, au niveau régional, la prise en compte des schémas départementaux, lesquels restent bien évidemment de la pleine compétence des départements.
Les appels à projets permettront d'organiser de façon plus efficace la sélection des projets de création d'établissements. L'objectif est d'aller plus vite et de mettre fin aux listes d'attente. Il faut également sélectionner les projets présentant les meilleures caractéristiques, ce qui devrait rassurer le milieu médico-social. Le cahier des charges des appels à projets sera défini par décret. Il permettra de mettre en valeur l'innovation et des critères qualitatifs dans les procédures de sélection.
Il convient également d'inciter les promoteurs à présenter des projets là où ils ne le font pas spontanément aujourd'hui. Nous voulons par exemple éviter le dépôt d'un trop grand nombre de projets d'EHPAD et d'un trop petit nombre de projets de CIAD alors que c'est là que les besoins sont les plus importants. C'est dans ce cadre que la logique d'appel à projets prendra tout son sens et prouvera toute son efficacité.
La décision de lancer l'appel à projets sera prise par les autorités publiques. La commission de sélection placée auprès de chaque autorité qui délivre l'autorisation – ARS et président de conseil général – se réunira à l'initiative de cette dernière. Lorsque l'établissement bénéficie d'un financement conjoint – c'est notamment le cas des EHPAD et des foyers médicalisés d'accueil pour personnes handicapées – il y aura une commission mixte.
La commission examinera les propositions de tous les promoteurs qui auront répondu à l'appel à projets. Ces derniers seront sélectionnés comme dans une procédure d'appel d'offres. La commission proposera au directeur de l'ARS etou au président du conseil général d'autoriser immédiatement le ou les projets qui répondront le mieux aux besoins définis par le schéma médico-social et qui seront le plus compatibles avec le programme régional d'accompagnement qui fixe les enveloppes financières pour trois à quatre ans. Les promoteurs retenus pourront ainsi lancer immédiatement le recrutement et la construction, l'objectif étant, là aussi, d'accélérer les choses.
Valérie Rosso-Debord et Guy Lefrand ont abordé la question de l'innovation. En préparant le décret, nous chercherons en permanence à faire en sorte que le cahier des charges permette de sélectionner le mieux-disant et soit ouvert à l'innovation. Mais je suis tout à fait ouverte à ce que cela soit davantage affirmé dans le texte. Tous les acteurs ont déjà été consultés et le projet de décret leur sera à nouveau soumis.
S'agissant, toujours dans le champ médico-social, de la délégation de compétences aux conseils généraux, il est vrai que l'on peut se poser la question de l'expérimentation. Les élus sont très partagés, au-delà de leur sensibilité politique, et je pense qu'il faut donc continuer à travailler ensemble avant toute décision. Je me réjouis que cela soit possible dans le cadre du débat parlementaire, dont j'espère qu'il permettra également de rassurer le milieu médico-social.
Je rappelle à Mme Génisson que les missions de service public sont parfaitement définies dans le texte, qui en dresse une liste exhaustive. La possibilité est en effet ouverte, lorsqu'il y a carence du service public dans un territoire de santé, de faire appel, pour telle ou telle mission de service public, à un établissement privé de santé. Il n'y a pas de confusion possible avec l'excellence : l'aide médicale d'urgence n'a rien à voir avec la recherche en santé ou avec l'enseignement universitaire. Certains établissements privés ont acquis une véritable excellence dans certaines techniques, c'est le cas de l'hôpital Marie Lannelongue dans les Hauts-de-Seine, établissement de pointe en chirurgie cardiaque, où il peut être très intéressant d'organiser une formation.
Cette question me permet aussi de tordre le cou à l'idée que la loi ferait disparaître les établissements dits PSPH – participant au service public hospitalier. Les établissements privés sans but lucratif sont un très bon exemple de ces établissements de droit privé qui assurent déjà des missions de service public. Le projet confirme le lien indissoluble entre l'exercice de certaines activités de santé ou certains modes de prise en charge et l'engagement que cette charge représente pour la structure et pour les médecins qui l'exercent. Les établissements PSPH ont montré l'intérêt d'une telle démarche pour les patients, pour les professionnels et pour le système de soins. C'est en fonction des besoins de la population du territoire que les missions de service public doivent désormais pouvoir être attribuées aux établissements de santé et non en fonction du statut de ces derniers. Dès lors, l'appellation « participant au service public » ne peut plus être réservée à une seule catégorie d'établissements. Mais j'insiste sur la nécessité que l'identité des établissements PSPH soit reconnue. Ils pourraient ainsi devenir – je m'en suis entretenue avec le rapporteur Jean-Marie Rolland – des « établissements de santé d'intérêt collectif » dès lors qu'ils choisiraient de s'engager dans des missions de service public et de respecter les obligations d'accueil et de prise en charge qui s'y attachent. Ces établissements continueront de fonctionner selon les mêmes modalités. Les dispositions relatives au financement des établissements PSPH, qui leur permettent de bénéficier de l'échelle tarifaire publique, seront maintenues. Sur le plan juridique, la possibilité de détacher des praticiens hospitaliers et des professeurs des universités-praticiens hospitaliers dans un établissement assurant des missions de service public relève du règlement et cette disposition continue donc à exister. Je veux redire ici à quel point je suis attachée à ces établissements privés à but non lucratif qui continueront à jouer un rôle majeur dans notre paysage hospitalier.
J'indique à Mmes Billard et Lemorton que les dispositions relatives à l'éducation thérapeutique n'ont rien à voir avec une quelconque privatisation. Je l'ai dit à plusieurs reprises...
En particulier devant la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS).
Je l'ai dit aussi lors du Conseil européen de la santé, qui a émis des recommandations sur cette question de l'éducation thérapeutique. J'ai d'ailleurs été très satisfaite de constater que l'ensemble de mes collègues, à l'exception de la ministre suédoise, était sur la même ligne.
Aucune privatisation subreptice n'est donc possible, mais si vous pensez qu'un amendement offrirait davantage de garanties, je suis disposée à le considérer avec bienveillance. Il n'y a donc pas lieu de me faire de procès d'intention à ce propos.
Nous aurons bien évidemment l'occasion de parler de la santé environnementale lorsque nous examinerons les missions assurées par l'ARS, dont l'architecture permettra de bien mieux traiter non seulement cette préoccupation mais aussi la gestion des crises et la veille sanitaire.
Je suis attentivement, monsieur Roy, à la question de l'amiante, en particulier de l'amiante chrysotile, et des nouvelles pathologies qui y sont liées. J'exprime par avance mon intérêt pour un éventuel amendement relatif aux fibres courtes, qui viendrait utilement compléter le texte.
Ayant été le suppléant de Bruno Le Maire, Guy Lefrand, dont je salue l'arrivée dans cette assemblée, sait à quel point les questions européennes, qu'a également évoquées Pierre Morange, sont importantes. Je veille tout particulièrement à ce que le modèle de santé français soit préservé et j'ai eu récemment l'occasion de mener le combat à propos de la directive sur les soins de santé transfrontaliers et de rappeler que les règles du marché intérieur ne sauraient influer sur nos spécificités.
Plusieurs questions relatives à l'hospitalisation à domicile (HAD), à la pharmacie et aux médicaments relèvent du domaine réglementaire, mais j'ai bien pris note de vos observations.
Gérard Bapt m'a interrogée sur la taxe qui pourrait être imposée aux médecins. J'ai lu à ce propos beaucoup de bêtises puisqu'un grand syndicat de médecins est allé jusqu'à dire que je menais une politique de santé digne de l'Union soviétique…
Aucune taxe n'est prévue. On me reproche tout simplement de défendre une mesure consensuelle dont l'idée est apparue il y a six mois à l'occasion des états généraux de l'organisation de la santé (EGOS), et qui a ensuite été soumise à la négociation conventionnelle. Sans doute préfère-t-on attaquer mon projet sur ce qu'il ne contient pas plutôt que pour ce qui s'y trouve.
Il s'agit concrètement de préciser les modalités d'incitation financière dans les zones les moins denses, et celles de la participation des médecins des zones les plus denses à la réponse aux besoins de santé non couverts dans les zones avoisinantes. Cela peut prendre de nombreuses formes – régulation téléphonique de la permanence des soins, actions de prévention, interventions dans des EHPAD – et la consultation en zone sous-dense ne sera pas obligatoire.
Les EGOS ont proposé que les médecins qui souhaiteraient néanmoins s'affranchir de cette obligation bien peu contraignante puissent le faire en acquittant une contribution forfaitaire. Présenter la « taxe Bachelot » comme l'unique réponse à la question des déserts médicaux relève donc de la caricature !
Pour autant, le principe de cette régulation voulue par les EGOS doit être précisé par les partenaires conventionnels. C'est à eux qu'il appartient de négocier, sous l'égide et sous le contrôle du directeur général de l'UNCAM, les conditions de mise en oeuvre de cette mesure au sein de la profession. Le Gouvernement attend des partenaires qu'ils exercent le mandat qui leur a été proposé par les états généraux. Le président de la République et moi-même avons insisté sur la nécessité de trouver des mesures opérationnelles et de parvenir à un engagement responsable des médecins. Les difficultés de nos concitoyens et la situation économique imposent aujourd'hui d'apporter de vraies réponses.
Le projet de loi ne s'inscrit nullement dans une logique de l'hôpital-entreprise ; il s'agit simplement de mettre en oeuvre le projet médical de l'établissement, et la réforme que je propose ne s'oppose nullement à la gestion par pôles, d'autant que le rôle fonctionnel des chefs de pôles est désormais clairement établi. Je m'étonne d'ailleurs, monsieur Bapt, de la façon dont vous avez présenté la position de M. Fellinger, président de la Conférence des présidents de CME des centres hospitaliers, puisque ce dernier a publiquement approuvé la réforme proposée.
Un grand nombre de praticiens ont néanmoins signé la lettre adressée au Président de la République…
N'oublions pas qu'il y a au total près de 40 000 praticiens hospitaliers… Mais il faut bien sûr prendre en considération le point de vue des signataires de cette lettre, comme j'ai entendu hier celui des 12 manifestants présents lors de ma visite à Bordeaux… J'ajoute que l'appel auquel vous faites allusion marque en fait un certain soutien à ce projet puisqu'on y demande des mesures qui sont déjà prévues ou qui pourraient être introduites par des amendements auxquels je ne me montrerai pas hostile.
Vous avez raison, il faut cesser d'opposer les uns aux autres. Ce qui importe, c'est ce que nous voulons faire, c'est-à-dire décloisonner notre système, permettre que la continuité des soins soit assurée, garantir que l'on puisse être soigné en tout lieu et à toute heure sans que l'hôpital s'en trouve encombré, faciliter le passage du médico-social à l'hôpital. Tout cela suppose bien sûr des structures adaptées, mais aussi une nouvelle culture, une culture de la réconciliation. J'en appelle donc à la responsabilité de tous.
Des vies humaines ont été indûment perdues lors des événements dramatiques de la fin de l'année. Je trouve indécente la façon dont certains ont immédiatement instrumentalisé ce qui s'est passé. Pour ma part, j'ai voulu travailler dans le respect des personnels hospitaliers et de notre patrimoine public. Pour que nous puissions connaître la vérité, j'ai demandé que des enquêtes et des inspections soient menées. Elles ont montré que ces critiques n'étaient en rien justifiées puisqu'il s'agissait non pas de problèmes de moyens mais de problèmes d'organisation. En fait, des personnes qui voulaient, peut-être de bonne foi, défendre l'hôpital public, l'ont attaqué. J'ai reçu avant-hier les représentants des huit fédérations de personnels hospitaliers. Tous m'ont fait part des effets désastreux qu'ont eus les polémiques de la fin de l'année ; tous ont déploré la perte de confiance qui s'en est suivie. Bien sûr, la transparence doit être totale et je ne transigerai jamais à ce propos, mais j'appelle solennellement à la réconciliation. Tel est en fait le véritable défi de ce projet.
Merci pour cet effort de pédagogie qui n'a pas duré moins de trois heures…. Je constate que personne ne souhaite prendre la parole, chacun ayant eu tout loisir de s'exprimer pendant l'audition des ministres. La discussion générale est donc close.
La séance est levée à 19 heures 15.