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Commission des affaires économiques

Séance du 18 mai 2011 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • ONF
  • bois
  • forestier
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  • forêt
  • propriétaire

La séance

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La commission a auditionné M. Hervé Gaymard, président du conseil d'administration de l'Office national des forêts et M. Pascal Viné, directeur général de l'Office national des forêts.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Nous avons le plaisir d'accueillir ce matin notre collègue Hervé Gaymard, dans sa fonction de président du conseil d'administration de l'Office national des forêts (ONF), et M. Pascal Viné, directeur général de l'ONF, pour évoquer avec eux l'avenir de cet établissement et celui de la politique forestière.

Monsieur le président, vous avez remis en octobre dernier un rapport au Président de la République dans lequel vous avez formulé de nombreuses propositions, tendant à faire de l'ONF l'instrument d'une politique volontariste en faveur de la filière bois. Monsieur le directeur général, vous aviez été auditionné par notre commission en novembre dernier, avant votre nomination.

Nous souhaiterions connaître les orientations qui se dégagent quant à l'évolution de l'ONF, dans la perspective du contrat État-ONF 2012-2016 qui doit être finalisé au mois de juillet. L'audit social qui avait été annoncé a-t-il été mené ? Quelles sont les évolutions envisagées concernant la gouvernance et le modèle financier, compte tenu de la situation financière de l'ONF ?

Comment les relations avec les communes pourraient-elles évoluer ? Vous avez proposé, monsieur le président, une stabilisation du réseau de terrain des agents de l'ONF et une majoration des frais de garderie en fonction de la superficie des forêts gérées.

Sur le plan économique, la France se trouve dans une situation paradoxale : elle bénéficie du troisième massif forestier européen mais son déficit commercial en bois s'élève à 5 milliards d'euros. Au-delà des dispositions adoptées dans la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP), quelles sont les pistes pour mieux mobiliser les forêts et renforcer la filière bois, qu'il s'agisse des forêts domaniales et communales ou des forêts privées ?

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Nous sommes très honorés de votre invitation. Permettez-moi de rappeler tout d'abord quelques données.

Aujourd'hui, la forêt couvre environ un tiers du territoire français. Contrairement à ce que l'on entend parfois, le couvert forestier a plutôt tendance à progresser – même s'il peut s'agir à certains endroits non d'une belle forêt plantée, mais de l'avancement de la friche, consécutive à la déprise agricole dans des zones difficiles : chaque décennie, la forêt gagne en surface l'équivalent d'un petit département français.

Cette forêt est aux trois quarts privée. L'ONF n'intervient, bien entendu, que pour la forêt publique, laquelle représente donc le quart de la forêt française. La forêt publique est composée, pour un quart, de la forêt domaniale et, pour les trois quarts restants, de forêts communales ou départementales relevant du régime forestier – traditionnellement appelées « forêts soumises ». L'ONF, opérateur public de la forêt publique, a deux patrons, l'État et les communes forestières. Cet établissement public industriel et commercial (EPIC) a été créé en 1965 à l'initiative du ministre de l'agriculture de l'époque, Edgard Pisani ; auparavant, l'action en ce domaine était menée par un service administratif du ministère de l'agriculture.

J'en viens aux grandes problématiques actuelles.

Première question : la forêt française est-elle surexploitée ?

Certains observent que la France a le troisième couvert forestier européen mais que le bois est le deuxième poste de notre déficit commercial, après le pétrole et le gaz. Nous avons en fait dans ce domaine une structure de commerce extérieur de pays sous-développé : nous exportons des grumes et nous importons des planches et des meubles. Première et seconde transformations sont insuffisantes et bien moins importantes qu'en Allemagne, en Autriche, en Suisse ou même en Italie.

Sur cette question du niveau d'exploitation de la forêt française, les opinions sont très divisées, mais les débats qui ont eu lieu à l'occasion du Grenelle de l'environnement n'ont pas été suffisamment documentés. Il faut se garder des idées générales et avoir une approche pragmatique. Pour la forêt publique, l'équilibre entre la production et la régénération paraît globalement satisfaisant ; cependant la forêt communale recèle des marges de progression de son exploitation. La forêt privée est globalement – mais les moyennes sont toujours trompeuses – sous-exploitée, avec quelques exceptions notables, notamment dans le Sud-Ouest, où des coopératives puissantes font un travail remarquable. Quand je dialogue avec les associations de protection de l'environnement, comme lorsque je m'adresse à nos deux ministères de tutelle – l'agriculture et l'environnement –, je dis toujours que la question se pose de manière différente selon le type de forêt et selon les massifs ; on ne peut donc adopter de position tranchée.

Deuxième question : le modèle économique qui fonde les activités de l'ONF est-il viable ?

La forêt a trois fonctions : biodiversité, accueil du public, fonction économique. La première est pleinement reconnue, la deuxième un peu moins et la troisième moins encore… Or dans le modèle économique de la forêt publique, « le bois paie le bois et le reste » : la fonction économique finance la fonction « biodiversité » et la fonction « accueil du public ».

On le lit dans les comptes de résultats de l'ONF. Du côté des recettes, la rubrique la plus importante est le chiffre d'affaires de la vente du bois. Son montant varie cependant beaucoup d'une année sur l'autre : de 220 millions d'euros en 2008, il est passé à 157 millions en 2009, pour remonter à 220 millions en 2010, et devrait atteindre d'après nos prévisions 240 millions en 2011. Vient ensuite le chiffre d'affaires des travaux et services, également assez variable car la plupart de nos donneurs d'ordres sont les communes forestières, lesquelles, bien sûr, font moins de travaux quand les recettes de bois sont moins bonnes. Le troisième poste de recettes est la « garderie pour les collectivités » ; ces frais de garderie pour les communes forestières étant couverts à 85 % par l'État, par le biais du versement compensateur, et à 15 % par les communes forestières. Enfin, la rubrique « chasse et concessions » représente une somme non négligeable. Quant à la ligne « contributions publiques », elle correspond pour une grande part à des écritures d'ordre, et notamment à un remboursement de la taxe foncière de la forêt domaniale, longtemps payée par l'ONF mais dont la Cour des comptes a relevé qu'elle devait être payée par le propriétaire, donc par l'État. Du fait de la déchéance quadriennale, l'État ne nous a du reste remboursé que partiellement ce que nous avions payé indûment au cours des dernières années.

Globalement, la variabilité des recettes d'une année à l'autre rend difficile l'établissement du budget.

Du côté des charges, le principal poste est la masse salariale, correspondant à la rémunération de 9 500 agents, dont 6 300 fonctionnaires et assimilés et les 3 200 contractuels de droit privé que sont les ouvriers forestiers.

Quelle est la viabilité de ce modèle économique ?

Pour certains, l'ONF dans son organisation actuelle a vécu, l'État doit garder un opérateur pour sa seule forêt domaniale, les communes forestières doivent reprendre leur autonomie pour exploiter leurs forêts, les travaux doivent être privatisés ou éventuellement transférés à d'autres agences publiques. Autrement dit, il faudrait dépecer l'ONF.

D'autres, dont je suis, considèrent que le modèle est viable, mais sous certaines conditions. Le préalable est de se souvenir de ce qui s'est passé depuis 1965 : le prix du bois a progressé assez régulièrement jusqu'en 1981-1982, puis il est redescendu assez régulièrement ; les effectifs de l'ONF ont suivi la même courbe, avec un ou deux ans de décalage, ce qui les met aujourd'hui quasiment au même niveau qu'en 1965. La période écoulée depuis la création de l'ONF a donc été assez contrastée : il n'y a jamais eu d'âge d'or, et les contraintes que nous subissons aujourd'hui ne sont pas nouvelles.

Dès lors, la première condition de la viabilité me paraît être que, lorsque le prix du bois progresse, on permette à l'Office de constituer des réserves pour passer le cap des années difficiles. Si d'aventure nous pouvions en constituer, aujourd'hui l'État nous les prendrait. Lors de la rédaction du nouveau contrat d'objectifs, je rappellerai que l'ONF doit disposer d'une autonomie de gestion. Je propose d'ailleurs dans mon rapport de transformer l'Office en entreprise publique.

La deuxième condition est de régler le problème du « CAS pensions », compte d'affectation spéciale des pensions civiles de l'État. L'ONF est un établissement public industriel et commercial qui emploie surtout des fonctionnaires – c'était aussi le cas de la Poste, comme de la RATP – mais au moment de la réforme des retraites de 2004, sa situation particulière n'a été examinée par personne. Il a signé un contrat d'objectifs quinquennal en 2006 et deux ans plus tard, il lui a été demandé d'augmenter les taux de cotisation pour ses fonctionnaires. De ce fait, au sein de la masse salariale, la ligne « pensions civiles des fonctionnaires » est passée de 48 millions d'euros en 2006 à 91 millions d'euros en 2010, ce qui n'est pas sans conséquence sur le résultat net. Il faut donc traiter ce problème, comme je l'ai écrit dans mon rapport en octobre dernier. Je sais que des discussions interministérielles difficiles ont lieu à Matignon mais pour l'instant, nous n'avons pas de réponse. Je déposerai un amendement à ce sujet à l'occasion d'un prochain projet de loi de finances rectificative ou initiale, d'autant que la charge n'a pas fini de progresser : il est prévu que le taux de cotisation atteigne 71 %, ce qui la portera à 120 ou 130 millions d'euros…

Enfin, il y a un non-dit en matière de fiscalité de l'environnement et du patrimoine : les « aménités positives » ne sont pas rémunérées. En ce qui concerne la fonction sociale, on imagine mal des péages à l'entrée des forêts. Mais s'agissant de la fonction « biodiversité », la forêt jouant son rôle dans le cycle de l'eau, il ne serait pas absurde que, sur les milliards d'euros de redevances que perçoivent les agences de l'eau, une très modeste part bénéficie à l'ONF. Si vous avez d'autres idées, je suis preneur !

L'ONF est une formidable maison, servie par des agents qui ont la passion de la forêt publique et, depuis toujours, de l'environnement. Le mauvais climat social qui y règne depuis la fin des années 90 résulte de nombreuses restructurations et, sûrement, de maladresses. J'ai proposé dans mon rapport de lancer très rapidement un audit social ; le directeur général et moi-même travaillons à mettre fin à cette situation.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Merci, monsieur le président. Nous en venons aux questions, en commençant par les représentants des groupes.

PermalienPhoto de François Brottes

Merci à Hervé Gaymard pour son propos et pour son rapport. La fonction de président de l'ONF a longtemps été occupée par le secrétaire général de l'Elysée en place mais la motivation n'était pas toujours au rendez-vous chez certains d'entre eux, à l'exception notable de Jean-Louis Bianco qui avait conduit en son temps une action remarquable.

La situation actuelle n'est pas nouvelle. Lorsque Jean-Pierre Raffarin était Premier ministre, le transfert aux régions des compétences de l'ONF avait été envisagé. Certaines le souhaitaient et d'autres non, la forêt française n'offrant pas partout le même niveau de rentabilité. La force du dispositif existant est de permettre la péréquation.

Comme le président Gaymard, je suis très inquiet de ce qui va se passer. Une fameuse note blanche a proposé de supprimer le versement compensateur, Bercy essayant de rogner sur les dépenses de l'État ; or la solidarité nationale est nécessaire pour entretenir les forêts publiques communales, qui n'arrivent pas à vivre de leurs seules ressources. La question du financement des fonctions non marchandes est donc posée : reconnaît-on à la forêt des missions d'intérêt général et admet-on que le financement de ses missions ne peut être assuré par la seule vente de bois, d'autant que le Grenelle conduit à limiter les coupes ?

Un autre problème concerne le service « restauration des terrains de montagne » (RTM), fort utile là où se produisent des crues torrentielles. Il est hébergé par l'ONF, plutôt avec bonheur car cela permet des échanges de compétences ; mais on fait ainsi dépendre de financements fragiles un service qui remplit une mission régalienne. La pérennisation de ce service est indispensable.

Je suis par ailleurs un peu inquiet de voir, dans le débat sur l'énergie, des associations nous expliquer qu'il y a surexploitation de la forêt pour la biomasse. De la même façon, on entend demander de réduire la production d'hydroélectricité : on prône le développement des énergies renouvelables, mais pour chacune d'entre elles des contestations se manifestent. Concernant la biomasse, les premières critiques sont venues des papetiers, au motif qu'ils utilisaient le même type de résidus forestiers, dont le prix allait donc monter. Il est un fait que les acteurs de la filière ont longtemps considéré que le bois ne valait rien ; ce n'était pas une bonne façon de mobiliser les propriétaires forestiers, qu'il s'agisse des collectivités publiques, de l'État ou des propriétaires privés. Je fais partie de ceux qui pensent qu'il faut revaloriser la ressource, afin de les motiver. Par ailleurs, je ne conteste pas qu'il puisse y avoir surexploitation pour la biomasse dans certaines zones ; il faudrait certainement réguler le prélèvement et éviter de l'opérer toujours au même endroit.

PermalienPhoto de Michel Raison

Peut-être les communes forestières trouvent-elles qu'elles versent déjà beaucoup à l'ONF, mais c'est en réalité une goutte d'eau dans le budget de l'Office. La question essentielle est celle de la rentabilité des forêts. Nous avons en France, de longue date, un problème de valeur ajoutée : à l'époque où certains se plaignaient de voir du lait arriver d'Allemagne pour être transformé en France, on leur disait déjà que c'était mieux que de voir des hêtres partir en Italie pour être transformés en meubles… Les acteurs de la filière bois ont souvent des relations assez conflictuelles avec l'ONF ; il faudrait que les communes et l'ONF travaillent avec les transformateurs, comme cela se fait pour diverses productions agricoles, afin d'élaborer ensemble un plan de valorisation du bois français. Le bois, comme toutes les matières premières, devrait finir par prendre de la valeur du fait de sa raréfaction, d'autant que son utilisation progresse pour le chauffage – biomasse – et pour les constructions ; mais le dialogue au sein de la filière est à construire.

Par ailleurs, a-t-on analysé la productivité des agents de l'ONF ? C'est un critère intéressant, notamment en comparaison de ce qui se passe pour la forêt privée, en particulier là où existent des coopératives forestières.

Concernant les possibilités de financement, quid des forêts privées ? Elles aussi, même si elles sont parfois insuffisamment ou mal exploitées, remplissent une mission de biodiversité et une mission sociale. L'ONF, dont le savoir-faire, en dépit de certaines critiques, est incontestable, a-t-il des propositions à faire pour aider à améliorer leur gestion ?

PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Il me semble qu'il y a un certain accord sur les trois piliers qui sous-tendent l'action de l'ONF. Je pense également que le problème des dépenses de retraites doit être réglé et j'aimerais savoir où en est l'audit social.

Je reprends volontiers à mon compte la notion d'aménités positives : les riverains des forêts périurbaines y sont du reste particulièrement sensibles. Le fait est que les coupes à blanc opérées dans ces forêts soulèvent de vives protestations de la part du public. Les techniques utilisées sont très dévastatrices et l'image des personnels de l'ONF en pâtit.

Comme Michel Raison, je m'interroge enfin sur les moyens d'agir sur l'exploitation de la forêt privée. Il faut aussi réfléchir aux moyens de recréer des filières de transformation sur notre territoire. Je pense surtout au bois d'oeuvre, sans doute parce que je suis la fille d'un menuisier ébéniste – qui achetait le bois en Belgique alors que nous étions en pleine forêt ardennaise…

PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Dans le Sud-Ouest, la tempête Klaus a fait des ravages. Où en sont les promesses de l'État ? Quel bilan tirez-vous de cet événement pour les accidents météorologiques majeurs ?

Non seulement la forêt des Landes a été spécialement touchée, mais des problèmes sanitaires, notamment liés aux chenilles, ont suivi. Était-ce inévitable ? Est-ce une conséquence de la mobilité des personnes ? Comment réagit-on ? Est-ce un vrai danger pour la forêt ? Avez-vous des liens avec la recherche agronomique sur cette question ?

On nous dit que le foncier agricole recule et que la forêt avance. Qu'en est-il précisément ?

PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Comme je peux le constater dans le Perche, nous exportons nos grumes, en particulier de chêne, vers la Chine, ce qui évite de renvoyer des conteneurs vides et coûte moins cher qu'un transport à l'intérieur de notre pays ; de Chine, le bois revient transformé.

Quelle peut être l'action de l'ONF pour porter la parole de tous les forestiers, publics ou privés, auprès du Gouvernement et des autorités européennes, afin de parvenir à une réglementation des prix ? Il est vraiment dommage que nos exploitants forestiers et scieurs se retrouvent aujourd'hui de ce fait sans matière première.

La LMAP comporte des dispositions visant à éviter d'aggraver le morcellement en cas de succession. Que suggérez-vous pour favoriser une meilleure exploitation des nombreuses petites parcelles privées ?

On ne peut pas dire que l'exploitation des forêts privées est moins bonne que celle des forêts publiques. J'aimerais qu'un audit soit réalisé : les forêts privées qui ont une taille suffisante sont, au moins autant que les forêts publiques, exploitées avec rationalité.

Quant à l'éventuelle rémunération de la fonction de biodiversité, elle doit s'appliquer le cas échéant aussi aux forêts privées, qui doivent respecter les mêmes règles en ce domaine.

PermalienPhoto de Daniel Paul

La note de la direction du Trésor sur les pistes de réforme de la politique forestière propose de déléguer la gestion des forêts communales à des prestataires privés. Pourriez-vous nous en dire un peu plus et nous expliquer comment vous entendez – je l'espère – vous opposer à cette idée ?

En ce qui concerne la situation sociale à l'ONF, les organisations syndicales font état de quatorze suicides au cours des quatre dernières années. Deux d'entre eux ont fait l'objet d'une reconnaissance par la direction générale. Avez-vous engagé des actions spécifiques, sans attendre l'audit ? Ces événements dramatiques ne sont-ils pas dans la droite ligne de l'évolution constatée à l'ONF depuis quelques années, à savoir une accentuation des pressions sur les salariés dans un objectif de rentabilité ?

PermalienPhoto de Francis Saint-Léger

En Lozère, l'année dernière, lors de la révision des baux de location des sociétés de chasse, qui a lieu tous les cinq ans, l'ONF a voulu imposer des augmentations atteignant parfois 100 %. L'annonce de telles hausses, de nature à mettre à mal la chasse populaire, a provoqué des tensions violentes. Finalement, les augmentations ont été limitées à environ 30 %.

Ce qui s'est passé à propos de la chasse se produit également avec les collectivités locales, dans le cadre d'échanges ou de ventes de foncier : l'ONF fait valoir sa position de force et impose des conditions exorbitantes, à tel point que les collectivités sont parfois obligées de renoncer.

Ne pensez-vous pas que des relations un peu plus souples, fondées sur le dialogue, doivent s'instaurer entre l'ONF et ses partenaires ?

PermalienPhoto de Frédérique Massat

La note de la direction générale du Trésor constate que le modèle actuel de l'ONF est discutable et remet en cause le régime forestier. Elle propose notamment de déléguer l'activité d'accueil du public aux communes, mais également de déléguer la gestion des forêts communales à des prestataires privés, ainsi que de limiter le rôle de l'ONF à une activité de contrôle et de régulation. Quelle est votre position ?

S'agissant du malaise social à l'ONF, je partage le sentiment que l'engagement des agents sur le territoire est sans faille et répond aux attentes des populations et des élus ; mais ces agents nous font part d'un malaise dans l'entreprise, qui paraît aussi important que celui qui touche France Télécom ou La Poste. Monsieur le directeur général, où en êtes-vous sur ce sujet, dont vous nous aviez parlé en novembre dernier ?

Monsieur le président, que vous inspire le vote des eurodéputés sur le Livre vert de la Commission, visant à rendre obligatoires des mesures pour la gestion durable de la forêt ?

Enfin, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'ONF à verser à la commune d'Auberive le montant de la taxe professionnelle. À l'avenir, l'Office versera-t-il chaque année la contribution économique territoriale ?

PermalienPhoto de Michel Lejeune

Que faudrait-il faire pour ne plus assister au triste spectacle de belles grumes partant sur des camions immatriculés en Belgique, pour revenir ensuite sous forme de meubles ?

Quelle est la part de la production qui est vendue aux industries papetières ? J'observe qu'il est fort bien considéré de se chauffer au bois ou d'avoir des meubles en bois, mais fort mal d'utiliser un arbre pour fabriquer du papier…

PermalienPhoto de William Dumas

À Urmatt, le 19 mai 2009, le Président de la République a souligné que la filière bois était le deuxième poste déficitaire dans notre balance commerciale. Il a également indiqué que cette filière pouvait apporter l'équivalent de l'énergie produite par six centrales nucléaires et que, pour parvenir à cet objectif, il faudrait sortir 21 millions de mètres cubes de bois supplémentaires de nos forêts d'ici à 2020. Quelle politique avez-vous mis en place dans ce but ?

Quel concours pourriez-vous apporter aux propriétaires privés, souvent peu organisés, pour mettre en place avec eux une véritable filière ?

Dans les Cévennes, j'ai rencontré le même problème que notre collègue Francis Saint-Léger lors du renouvellement des baux de chasse. En proposant des augmentations plus raisonnables, on aurait évité de créer un mauvais climat.

Dans mon département, le Gard, comme dans la région méditerranéenne, le risque incendie est très important. Les élus locaux, surtout les maires des petites communes, ont beaucoup de mal à faire respecter les obligations de débroussaillement imposées par la loi. L'ONF pourrait-elle les aider, ne serait-ce qu'en envoyant des courriers à son en-tête ?

S'agissant de la situation du personnel, où en êtes-vous ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Nicolas

On ne peut rester indifférent au fait que la filière bois soit le deuxième poste de notre déficit commercial. Ne faut-il pas créer un maillage des compétences privées et publiques ? Les compétences de l'ONF sont reconnues, sa compétitivité peut-être un peu moins. Pourquoi ne garde-t-on pas en France la valeur ajoutée ? N'est-ce pas tout simplement parce que l'on choisit la facilité, c'est-à-dire parce que l'on privilégie la filière énergétique ?

Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le climat social ? La dégradation observée depuis dix ans correspond-elle à des dispositions législatives sur la durée hebdomadaire du travail ?

Quelle expertise avez-vous apportée aux sylviculteurs du Sud-Ouest après la tempête Klaus ? Avez-vous donné suite aux suggestions que j'avais faites dans mon rapport parlementaire de juillet 2009 ? Les sylviculteurs me paraissent être toujours dans l'expectative.

PermalienPhoto de Kléber Mesquida

Dans l'Hérault, plus de 40 % des communes sont classées forestières. La forêt est incontestablement un patrimoine collectif, en termes de production mais aussi de services rendus à la société et de contribution à la protection de l'environnement.

La note de Bercy intitulée « Pistes de réforme de la politique forestière » contenait quatre propositions : démanteler le régime forestier et les modalités de financement de l'ONF ; multiplier par cinq ou six les frais de garderie payés par les communes ; déléguer une partie de ses activités de l'Office au secteur privé, via des concessions ; recentrer à long terme l'ONF sur les missions de service public.

Comment peut-on agir pour le maintien du régime forestier, garant d'une gestion durable et multifonctionnelle, et pour le maintien de l'opérateur unique – l'ONF assurant une mission de service public, principalement au bénéfice des communes ?

PermalienPhoto de Philippe Armand Martin

Les communes forestières commencent à s'inquiéter du manque de personnel qui résultera des nombreux départs prévus. Pouvez-vous les rassurer ?

PermalienPhoto de Patrick Lebreton

Monsieur le président Gaymard, dans votre récent rapport vous avez regretté la confusion et les coûts supplémentaires qui résultent de la superposition des compétences des différents organismes gestionnaires d'espaces forestiers. Votre argumentation se fonde notamment sur la situation de la Réunion, dont je suis élu, où coexistent le parc national de la Réunion et l'ONF. J'ajoute que le conseil général est un acteur supplémentaire, propriétaire de la forêt domaniale depuis les lois de décentralisation.

Le département, qui aujourd'hui travaille en bonne intelligence avec l'ONF, avait souvent regretté de ne pas pouvoir mener la politique qu'il souhaitait en matière de gestion et d'aménagement des espaces boisés. Dans la situation économique et sociale de notre île, il y a nécessité de rechercher les moyens d'un développement économique, notamment à travers le tourisme. Ne pourrions-nous pas envisager une évolution du cadre juridique, notamment pour permettre une certaine autonomie de la collectivité propriétaire ?

PermalienPhoto de Josette Pons

La forêt méditerranéenne, qui elle aussi progresse, est très fragile car elle brûle. Elle coûte très cher à toutes les collectivités. Dans le Var, où le conseil général est le plus grand propriétaire forestier, la protection contre les incendies est très coûteuse mais la forêt ne rapporte rien. Les communes forestières varoises sont toutes d'accord pour continuer à travailler avec l'ONF car elles sont très attachées aux services qu'il rend ; mais elles sont très inquiètes de la taxe dont elles ont entendu parler.

Permettez-moi par ailleurs d'évoquer les ouvriers forestiers rapatriés d'Afrique du Nord (OFRAN), déçus que l'on ne puisse pas embaucher leurs fils.

PermalienPhoto de Marie-Lou Marcel

En ce qui concerne le climat social, une enquête avait été diligentée en 2004 ; la direction avait promis d'en tirer les leçons. Où en est-on ?

Quelles précisions pouvez-vous nous apporter au sujet du maillage territorial de l'ONF évoqué dans le rapport remis en octobre ?

L'Aveyron relève d'une agence interdépartementale de l'ONF. Dans le département, on compte dix postes vacants, dont deux seraient susceptibles d'être supprimés. Il y a trois postes vacants de garde forestier. Où en est-on du recrutement ? Par ailleurs, il n'y a pas d'ouvriers forestiers et les tâches sont confiées à des organismes privés. Envisage-t-on des recrutements ?

La loi Grenelle II annonce un futur rapport sur l'évaluation des puits de carbone retenu par les massifs forestiers et leur possible valorisation financière pour les territoires. Où en est-on ?

Enfin, dans les comptes de résultats de l'ONF, pourquoi observe-t-on une augmentation de la ligne « Sous-traitance et charges externes » ?

PermalienPhoto de Michel Piron

Serait-il possible d'avoir, par type de propriété, quelques données permettant d'apprécier l'organisation ou l'inorganisation de la filière, et notamment le partage de la valeur ajoutée ?

Les partages qualitatifs, notamment entre les essences, sont-ils voulus, maîtrisés ou subis ?

Une dernière question sur un thème qui m'est cher : l'émiettement communal permet-il d'assurer une bonne gestion de la ressource ?

PermalienPhoto de Pascale Got

Dans le bêtisier des mesures desservant la forêt exploitée dans le Grand Sud-Ouest, on va pouvoir ajouter le nouveau référentiel du Programme de reconnaissance des certifications forestières (PEFC). Il tendrait à interdire les coupes rases de plus de 10 hectares d'un seul tenant. L'ONF s'est dit favorable à cette décision. Pourtant, n'est-elle pas en contradiction avec la volonté affichée tant par la France que par l'Europe de développer la production de la filière bois ? Qu'est-ce qui empêchera d'abaisser à nouveau ce seuil, au risque de remettre en cause l'activité sylvicole ?

Quelle est votre position sur le transfert du contrôle des exploitants forestiers aux organismes certificateurs, venant donc remplacer des entités régionales ?

Enfin, ne serait-il pas nécessaire de réfléchir, au niveau européen, à la possibilité de développer la prévention pour limiter les conséquences des tempêtes ?

PermalienPhoto de Jean-Louis Léonard

En tant qu'exploitant forestier, j'ai une vision un peu critique de l'ONF. C'est une institution qui répondait à un besoin à une époque où il fallait un organisme à la fois opérationnel et normalisateur. La situation a évolué. Les compétences des propriétaires, tant publics que privés, sont plus grandes.

En second lieu, la forêt domaniale fait une concurrence déloyale aux propriétaires privés, du fait des prix extrêmement bas pratiqués pour certaines tâches, l'exploitation du bois de chauffe par exemple.

Enfin, on fait l'erreur d'assimiler l'ONF à la gestion globale des forêts et à la définition d'une politique. La forêt française croît de manière un peu anarchique ; les propriétaires privés souhaiteraient organiser une régulation, notamment avec les Centres régionaux de la propriété forestière (CRPF). Malheureusement, la réforme des CRPF est une mauvaise réforme, qui va démunir les propriétaires privés de cet outil de gestion, sans que l'ONF vienne remplir son rôle.

Concernant les droits de chasse, non seulement on a créé un climat déplorable, mais on s'oriente dans une très mauvaise direction, celle de la chasse de riches.

PermalienPhoto de Louis-Joseph Manscour

La forêt domienne représente environ 50 % de la forêt française. Elle couvre 6 millions d'hectares, sur un territoire domien qui représente 20 % du territoire français. La forêt biologique représente outre-mer environ 100 000 hectares, soit près de 50 % de la forêt biologique française. Ce patrimoine doit être géré, mais l'ONF en a-t-il les moyens ? Chaque année, notamment aux Antilles, les moyens diminuent considérablement. Les collectivités, en particulier départementales, font beaucoup d'efforts, mais si nous n'y prenons pas garde, nous connaîtrons beaucoup de difficultés dans les années à venir. Outre-mer, la forêt constitue un enjeu majeur pour la biodiversité et la protection de l'environnement.

PermalienPhoto de Thierry Benoit

S'agissant des ressources humaines, la décision hasardeuse de réduction du temps de travail hebdomadaire ne vient-elle pas se télescoper avec la nécessité d'une gestion plus exigeante ?

La forêt publique, qui représente seulement 25 % de la forêt française, couvre près de 40 % de l'approvisionnement annuel en bois. La marge de progression est donc importante du côté des propriétaires privés. Comment l'ONF peut-il agir en ce sens ?

Comment expliquer que la balance commerciale française de la filière bois soit si déficitaire, au vu de notre potentiel de production ?

Enfin, l'ONF ne pourrait-il jouer un rôle stratégique dans la structuration de la filière bois-énergie ?

PermalienPhoto de Louis Cosyns

Je m'associe aux propos de mes collègues sur la chasse.

Il semble que l'ONF ait l'intention de s'investir dans la gestion de la forêt privée. Ne serait-ce pas injuste à l'égard des gestionnaires privés qui travaillent sans aides publiques ? Il y aurait concurrence déloyale.

PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Avez-vous prévu un budget pour expliquer aux citoyens que la forêt n'est pas un endroit sacré mais qu'elle se cultive ?

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

L'ONF ne concerne que la forêt publique ; Le directeur général et moi n'avons donc pas à nous exprimer au sujet de la forêt privée. D'autre part, nous n'avons pas à nous substituer à nos ministres de tutelle – de l'agriculture et de l'environnement – pour répondre à certaines questions. Ce n'est pas l'ONF qui fait la politique forestière ; il en est le vaisseau amiral, mais il n'est pas le décideur. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé dans mon rapport qu'il y ait au moins une fois par an, avec les ministères de tutelle et les commissions compétentes des deux assemblées, une sorte de grand conseil de la forêt française. Déjà actuellement, les réunions du conseil d'administration de l'ONF sont extrêmement intéressantes car tous les sujets concernant la forêt française sont abordés, y compris ceux qui ne sont pas de la responsabilité de l'ONF.

S'agissant de la note blanche du ministère des finances, je suis opposé à ses conclusions mais là n'est pas l'important : le ministre de l'agriculture, dans une déclaration au Sénat, a clairement dit qu'il s'agissait d'hypothèses de travail et qu'elles n'avaient pas été retenues. Il a confirmé l'ONF et le régime forestier dans leur configuration actuelle. En revanche, la question à régler est celle du financement pérenne du régime forestier. C'est pourquoi je me suis permis de tester quelques pistes. À ce propos, je n'ai pas dit qu'il fallait créer une taxe au profit de l'ONF. J'ai simplement évoqué la possibilité de dégager un financement dédié à la politique forestière publique et privée à partir des milliards d'euros brassés par les agences de l'eau. Au-delà, se pose la question générale du financement des aménités positives.

Le président de l'ONF n'a pas à porter de jugement sur la manière dont la forêt privée est gérée. En revanche, force est de constater que la forêt publique, avec 25 % de la surface, réalise 40 % de la production. En réalité, la forêt privée est très bien exploitée dans certaines zones, mais ailleurs elle souffre du morcellement de la propriété – question qui est soulevée à chaque loi agricole mais qui n'a jamais été résolue.

L'ONF entretient de bonnes relations avec la forêt privée. Notamment dans les zones difficiles, l'Office travaille en partenariat avec les coopératives forestières. Doit-il intervenir en forêt privée ? Il n'est pas demandeur. Si ponctuellement, ici ou là, on considère que sa participation est souhaitable, pourquoi pas, mais il n'a pas de volonté expansionniste.

De même, certains acteurs privés se sont émus de la création d'une filiale de l'ONF dédiée au bois-énergie alors qu'il s'agit simplement d'individualiser cette activité dans nos comptes.

Quant à la forêt ultramarine, nous avons bien conscience de son importance. Mais je préfère parler « des » forêts ultramarines, tant il est vrai qu'il faut avoir une approche spécifique dans chacun des territoires concernés. Je compte me rendre prochainement à La Réunion car il faut réfléchir ensemble aux solutions les plus efficaces. Par ailleurs, comme l'a souligné Louis-Joseph Manscour, nos forêts ultramarines sont incontestablement un réservoir de biodiversité qu'il faut préserver.

J'en viens à la question des relations de l'ONF avec les communes forestières.

Tout d'abord, j'ai proposé dans mon rapport que l'on ait, au niveau du conseil d'administration de l'ONF, avec le président de la Fédération nationale des communes forestières, une structure ad hoc qui suive en permanence les activités de la forêt communale : c'est désormais chose faite. Localement, il faut absolument organiser le dialogue sur le meilleur moyen d'exploiter la ressource, peut-être sur une base intercommunale ou encore au niveau d'un massif.

Enfin, je voudrais souligner, en réponse à Louis Cosyns, que l'ONF n'est pas financé par l'impôt ; la seule ressource publique que nous ayons est le versement compensateur, mais c'est en réalité une aide de l'État aux communes forestières. Celles-ci devraient la recevoir et nous la reverser pour payer les frais de garderie, mais par commodité de gestion l'aide est versée directement à l'Office. Je le répète, l'ONF ne touche pas de subventions publiques et il n'y a donc pas de distorsion de concurrence. Concernant le calcul des frais de garderie et du versement compensateur, une réflexion est en cours avec les communes forestières ; le système actuel est injuste, mais il ne sera réformé que si les communes se mettent d'accord.

Je vais désormais passer la parole au Directeur général qui pourra apporter des réponses aux autres questions qui ont été posées.

PermalienPascal Viné, directeur général de l'ONF

Tout d'abord, merci à tous de l'intérêt que vous portez à l'ONF.

En réponse à Jean-Louis Léonard, l'Office a énormément évolué au cours des dix dernières années : ses effectifs ont baissé de 20 % et son organisation a profondément changé. Nous sommes passés d'une organisation très hiérarchique à un maillage territorial et des structures métiers. Les activités ont été professionnalisées : les 3 000 ouvriers forestiers précédemment répartis sur le territoire relèvent aujourd'hui d'agences internes de l'Office, les agences travaux, et des objectifs clairs de rentabilité leur sont donnés ; des bureaux d'études ont été créés, des services bois sont chargés de vendre le bois – car c'est un réel métier –, des personnels sont chargés des questions d'environnement. En revanche, la réforme engagée en 2001 n'a pas été totalement « digérée » : à mon arrivée, j'ai constaté qu'il y avait au sein de l'établissement beaucoup d'interrogations sur sa finalité, en particulier au sujet du maillage territorial et s'agissant de l'articulation entre les anciens gardes forestiers devenus « agents patrimoniaux » polyvalents et les structures de métiers verticales. Cette situation a provoqué un malaise social au sein de l'Office.

Depuis six mois, je me suis rendu dans presque tous les sites de l'ONF – dans les neuf directions territoriales et les départements d'outre-mer, à l'exception de la Corse et de la Réunion, où je me rendrai prochainement avec Hervé Gaymard – ainsi qu'à Mayotte. En Guadeloupe, à titre d'exemple, on n'avait pas vu un directeur général de l'ONF depuis une trentaine d'années.

Parallèlement, l'audit social a été lancé. Les personnels et moi-même avons souhaité que ce soit un audit « socio-organisationnel ». À mon arrivée, il m'a paru nécessaire de le faire très vite, mais les représentants syndicaux m'ont demandé d'éviter toute précipitation et ils ont réclamé une analyse de fond. J'ai mis en place un groupe de travail pour établir le cahier des charges ; les choses devraient se faire avant la fin de l'année. J'ai par ailleurs lancé un audit informatique, étant entendu que les problèmes rencontrés en ce domaine contribuent aussi au malaise social.

J'ai réuni le 11 janvier dernier un comité central d'hygiène et de sécurité. C'était la première fois qu'un directeur général de l'ONF en présidait un. Au cours des dernières années, un plan avait été établi et je ne peux pas laisser dire que rien n'avait été fait en matière de risques psycho-sociaux, mais tout plan de ce type est difficile à appliquer et crée beaucoup de frustrations. J'ai demandé aux organisations syndicales d'identifier les dix mesures prioritaires à mettre en oeuvre immédiatement dans le cadre de ce plan, ce qui a été fait. Lors de la réunion du comité d'hygiène et de sécurité en juillet, nous ferons le point sur les actions mises en oeuvre.

J'ai également engagé, à la demande des syndicats représentatifs de la fonction publique, des négociations sur l'organisation de l'établissement. Nous avons eu plus de soixante heures de discussion en mars-avril. Nous avons échangé sur le statut d'EPIC, sur la structuration en catégories C, B et A, sur le maillage territorial et sur le rôle des agents patrimoniaux. Trois organisations syndicales, représentant 57 % des personnels de l'établissement, ont signé un protocole ; celui-ci est donc valide et va servir de base à nos travaux, en vue d'établir d'ici le 31 juillet 2011 le prochain contrat d'objectifs.

J'ai clairement dit au personnel de l'établissement que je ne reviendrai pas sur les réformes qui ont été faites au cours des dernières années. Cela me paraît indispensable, notamment pour répondre aux attentes de la filière bois. J'ai également indiqué qu'il y aurait encore des baisses d'effectifs. Nous avons un dialogue sur l'enjeu essentiel du maillage territorial et je réunirai d'ailleurs tous les responsables intermédiaires de l'établissement – plus de 500 personnes – à Lyon, les 21 et 22 juin prochains, pour leur expliquer notre démarche. Bien entendu, il faut aussi associer les communes forestières à cette réflexion : je vois tous les mois les responsables de leur association nationale. Dans certains sites, et notamment en zone périurbaine, particulièrement en région parisienne, on ne peut pas aller plus loin en termes de réduction d'effectifs car nous n'avons plus suffisamment de personnel pour expliquer, pour faire comprendre nos actions sur le terrain. Nous faisons en effet beaucoup d'efforts en ce sens, qui doivent encore être approfondis. Ainsi allons-nous bientôt lancer, avec le directeur territorial de l'Île-de-France, un travail spécifique sur l'exploitation du bois en zone périurbaine, prenant en compte les attentes des riverains. La question de la communication de l'ONF a d'ailleurs été posée plus largement par les élus, notamment dans les départements d'outre-mer, qui réclament davantage de transparence. Nous réfléchissons donc aux moyens de faire évoluer, au moins localement, nos dispositifs de gouvernance.

Autre sujet majeur : la politique en matière de production de bois. Aujourd'hui, produire du bois n'est pas une tâche facile en France car la tendance est plutôt à la préservation. Le protocole du Grenelle de l'environnement, qui visait à produire plus tout en préservant mieux la biodiversité, signé par les propriétaires forestiers privés, les communes forestières, l'ONF et France nature environnement, n'a pas été compris. J'ai organisé les 7 et 8 mars à l'ONF un débat interne entre 200 personnes de tous niveaux de responsabilités ; Hervé Gaymard et moi-même avons participé à un colloque organisé par France nature environnement début avril sur ces questions. Nous avons également conduit une étude sur la capacité de la forêt publique à produire du bois dans les prochaines années.

L'analyse de l'ONF est la suivante. Dans la forêt domaniale, depuis une vingtaine d'années, nous exploitons l'accroissement annuel ; nous sommes pratiquement au maximum de ce que nous pouvons prélever. Notre objectif pour 2016 est de 6,8 millions de mètres cubes, contre 6,3 aujourd'hui, soit un accroissement de 10 %. En forêt communale, nous avons un peu plus de marge : au cours des dernières années, l'accroissement a été d'environ un mètre cube par hectare et par an ; nous pensons que nous pouvons augmenter le prélèvement de 30 %, ce qui ferait passer de 8,4 millions à 10,5 ou 11 millions de mètres cubes. Nous ne pouvons pas dépasser ces seuils de prélèvements si nous voulons pratiquer une gestion durable des forêts et en préserver la multifonctionnalité. Dans ce contexte, nos recettes sont plafonnées dès lors que les prix n'augmentent pas. Avec les communes forestières, nous sommes donc d'accord pour dire que dans les cinq prochaines années, la production pourra être augmentée de 200 000 mètres cubes par an.

Cette politique doit s'accompagner d'investissements : pour aller chercher davantage de bois dans les forêts communales, il faut faire des routes, des chemins forestiers, peut-être du câblage en zone de montagne. Or les communes forestières n'ont pas l'argent pour investir. Le Fonds forestier national (FFN) a disparu. Pour l'ONF, les 80 millions d'euros d'investissements réalisés annuellement pour assurer la gestion durable des forêts sont partiellement supportés par de la trésorerie. Si le niveau de trésorerie de l'établissement est aujourd'hui à moins 280 millions d'euros, c'est parce que nous finançons une partie de nos investissements avec de l'emprunt à court terme.

Que fait-on du bois produit ? La priorité pour l'ONF consiste à faire du bois d'oeuvre pour la construction. Les coproduits – bois industrie, bois énergie – viennent ensuite. Il est clair que des problèmes d'approvisionnement se profilent, notamment pour le bois énergie. Il faut donc essayer de mieux mobiliser les communes, sur les volumes et sur la durée. Nous travaillons à un protocole avec la Fédération nationale du bois sur le sujet. J'en profite pour répondre à Marie-Lou Marcel sur l'augmentation des « charges externes » dans les comptes de résultats de l'ONF : cette augmentation vient en partie du fait que nous façonnons nos bois ; cela étant posé, la vente aux industriels de bois préparé apporte à l'Office des marges nettes plus importantes.

Nous travaillons également avec la filière pour valoriser le bois et nous sommes partie prenante du « Fonds stratégique bois ». Mais l'existence de deux interprofessions, l'une d'aval et l'autre d'amont, ne facilite pas le dialogue. Il s'agit pourtant de relever des défis aussi importants que la construction en bois – pour laquelle le bois français ne représente que 2 % du marché, notre forêt étant aux deux tiers constituée de feuillus, et seulement pour un tiers de résineux. Par ailleurs, l'ONF n'a pas à faire tout le travail d'exploitation du bois ; nous devons faire appel aux entreprises de travaux forestiers.

Quant aux missions d'intérêt général, notamment la restauration en terrain de montagne et la défense contre les incendies, l'ONF a dû, dans le contrat 2007-2011, en réintroduire une partie dans ses comptes. Mais le conseil d'administration, son président et moi-même pensons que ce n'est pas une bonne méthode car cela fait reporter sur l'ONF une partie des investissements. Nous considérons qu'une politique publique de ce type doit être entièrement financée par l'État. Nous avons proposé qu'il en soit ainsi dans le prochain contrat d'objectifs.

Dans les départements d'outre-mer, notre activité « bois » est très réduite – quelques milliers de mètres cubes. Nous avons une activité essentiellement conventionnelle ou concurrentielle. S'agissant de l'articulation de l'ONF avec les autres institutions, notamment les parcs nationaux, les choses se passent bien à la Réunion et sont parfois plus difficiles dans d'autres départements.

La chasse est un autre sujet majeur. Il est vrai que nous avons augmenté les tarifs des baux de chasse dans le sud de la France car ceux-ci étaient très bas. Dans le nord de la France, au contraire, les prix sont très élevés – du fait d'un système d'adjudications. Je ne cache pas qu'aujourd'hui, les tensions sont assez fortes entre les chasseurs et l'ONF, mais aussi, d'une manière plus générale, entre les chasseurs et les propriétaires forestiers. Les communes et les propriétaires privés connaissent des problèmes identiques aux nôtres, notamment avec le développement des grands cervidés. Il y a quelques jours, le président de la Fédération nationale de la chasse est venu débattre avec nous en compagnie des présidents territoriaux. Nous inscrirons dans notre contrat d'objectifs un volet cynégétique. J'ajoute que j'ai été récemment auditionné par votre collègue David Douillet, chargé d'une mission sur cette question.

Je rappelle par ailleurs à Francis Saint-Léger que la forêt domaniale est inaliénable ; nous ne pouvons procéder que par échanges, donnant lieu à des procédures très lourdes.

Concernant les suites de la tempête Klaus, je redis après le président Gaymard que nous ne portons pas la politique gouvernementale. La forêt publique ne représente que 10 % du massif aquitain. L'ONF a pris toutes ses responsabilités au moment de la tempête ; il est intervenu auprès des communes pour stocker du bois, il a limité ses ventes et accompagné de manière très solidaire les propriétaires privés. Il continuera à jouer son rôle. Nous avons aussi pris des mesures de précaution à l'égard des scolytes.

S'agissant du changement climatique, nous sommes en relation étroite avec l'INRA. Une cinquantaine de personnes travaille sur ce sujet évidemment majeur. Nous rencontrons des problèmes très concrets : la forêt de Vierzon, qui était une chênaie, a été détruite ; nous nous demandons s'il ne faut pas réintroduire du pin à la place. Dans ce contexte, il est important de mettre en place des procédures de régénération naturelle, donc d'effectuer des coupes progressives.

En réponse à Pascale Got, tous les propriétaires forestiers, qu'ils soient publics ou privés, sauf peut-être dans le Sud-Ouest où la problématique est particulière, ont validé le dispositif « PEFC », avec la limitation des coupes rases à 10 hectares. C'est en effet une contrainte mais il est bien d'être arrivé à un accord. Le travail que nous faisons avec France nature environnement nous paraît équilibré et utile. Quant au fait de labelliser nos forêts, nous le regardons comme un avantage concurrentiel pour les prochaines années, notamment dans le contexte du dispositif européen « FLEGT » (Forest Law Enforcement Governance and Trade) de lutte contre l'importation de bois illégal. À terme, ces processus peuvent encourager la relocalisation de la production de bois.

S'agissant enfin de l'affaire de la taxe professionnelle, nous sommes actuellement en discussion avec la Direction générale des finances publiques (DGFiP).

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Frédérique Massat a posé une question importante à propos du Livre vert, sujet sur lequel je travaille par ailleurs dans le cadre de la Commission des affaires européennes. Ce Livre vert contient beaucoup de bonnes choses et constitue un vrai pas en avant, d'autant que pendant des années il n'y a pas eu d'approche européenne de la politique forestière. Une conférence sur la forêt se tiendra d'ailleurs en juin prochain à Oslo.

Merci à tous de nous avoir écoutés. Nous sommes évidemment à votre disposition pour vous aider à régler les problèmes concernant la forêt dans vos circonscriptions.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Merci beaucoup pour cet échange très intéressant. Je retiens l'idée d'une réunion annuelle sur le thème de la forêt.

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Cela me paraît indispensable, mais j'ajoute que la présence du ministère de l'industrie serait nécessaire : on parle trop peu de l'aval de la filière.

◊ ◊

Informations relatives à la commission

La Commission a nommé :

– M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis sur la proposition de loi pour le développement de l'alternance, la sécurisation des parcours professionnels et le partage de la valeur ajoutée (n° 3369).

– M. Alain Suguenot et Mme Pascale Got, co-rapporteurs sur une proposition de résolution européenne sur le régime des droits de plantation de vigne (sous réserve de sa transmission)

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 18 mai 2011 à 10 heures

Présents. - M. Jean Auclair, M. Thierry Benoit, M. Christian Blanc, M. François Brottes, M. Louis Cosyns, Mme Catherine Coutelle, M. Jean-Pierre Decool, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Claude Gatignol, M. Jean Gaubert, M. Bernard Gérard, Mme Pascale Got, M. Jean-Pierre Grand, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Louis Guédon, M. Henri Jibrayel, Mme Laure de La Raudière, M. Michel Lefait, M. Jacques Le Guen, M. Michel Lejeune, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Louis Léonard, M. Louis-Joseph Manscour, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Kléber Mesquida, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Daniel Paul, M. Germinal Peiro, M. Michel Piron, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. François Pupponi, M. Michel Raison, M. Franck Reynier, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Francis Saint-Léger, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alfred Trassy-Paillogues, M. René-Paul Victoria, M. François-Xavier Villain

Excusés. - M. Daniel Fasquelle, M. Yannick Favennec, M. Pierre Gosnat, Mme Conchita Lacuey, M. Jean-Marc Lefranc, M. Jean-Claude Lenoir, M. François Loos, M. Jean-René Marsac, M. Bernard Reynès

Assistaient également à la réunion. - M. Hervé Gaymard, M. Patrick Lebreton, M. Jean-Claude Leroy, Mme Anny Poursinoff