Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Commission des affaires européennes

Séance du 8 février 2011 à 16h15

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • compagnies
  • détachement
  • travailleur

La séance

Source

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES

Mardi 8 février 2011

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président de la Commission

La séance est ouverte à 16 h 15

Le Président Pierre Lequiller. Je tiens à remercier les membres de la Commission et l'équipe administrative des très nombreux messages de sympathie reçus à l'occasion de mon interruption d'activité pour raison de santé. Je remercie en particulier les vice-présidents pour avoir pris le relais de la présidence pour les réunions de la Commission qui se sont tenues en mon absence.

Je suis à présent tout à fait remis et très heureux de présider à nouveau aux travaux de la Commission.

PermalienPhoto de Anne Grommerch

La Commission européenne a annoncé une initiative législative pour la fin de l'année sur la question du détachement des travailleurs dans l'Union européenne. Un projet de texte est, en effet, inscrit dans son programme de travail pour 2011. Il s'agit d'améliorer le dispositif prévu par la directive 9671CE du 16 décembre 1996. Le travailleur détaché est celui qui est temporairement envoyé par son entreprise dans un autre Etat membre que celui où il travaille habituellement, dans le cadre d'une prestation de services, dans le cadre d'un chantier.

Il est donc utile de cerner d'ores et déjà les questions à envisager.

Le détachement des travailleurs est un sujet important. Il concerne plusieurs centaines de milliers de personnes chaque année. La sécurité sociale a recensé en France 280 000 cas de travailleurs partant faire une mission pour une durée variable allant jusqu'à deux ans. Pour le schéma inverse, celui des salariés extérieurs qui viennent en France, les déclarations, qui sont en forte augmentation, font apparaître 106 000 salariés en 2009, venant pour l'essentiel des pays membres de l'Union européenne, mais on estime que seul un cas sur trois est déclaré. Ce sont le BTP et le travail temporaire qui sont les principaux utilisateurs du détachement. Les pays de provenance sont essentiellement la Pologne, l'Allemagne, le Portugal, la Belgique et la Roumanie.

Le détachement des travailleurs est également un sujet sensible, sur le plan politique et économique. Il s'agit de répondre à la question des règles de droit social applicables et de choisir entre celles du pays d'origine et celles du pays d'accueil, ou pays d'exécution du travail. Il faut en effet éviter le dumping social et respecter le principe de la loyauté de la concurrence, et ainsi toute diffraction majeure entre les obligations qui s'imposent aux entreprises établies dans un Etat membres donné et celles qui viennent simplement y effectuer des prestations de services.

Au niveau européen, le détachement des travailleurs est régi par deux corps de règles : il y a d'abord un volet sécurité sociale, le plus ancien, longtemps fixé par le règlement de coordination de 1971, mais qui vient d'être remplacé, ce qui a permis quelques améliorations, avec l'entrée en vigueur en mai dernier du nouveau règlement de 2004 ; il y a ensuite la directive de 1996 en matière de droit du travail, intervenue assez tard, pour pallier les manques des décisions antérieures de la Cour de Justice en la matière.

L'existence de ces deux corps de règles est l'une des difficultés du sujet, difficulté d'ailleurs redoublée, car la solution retenue en droit de la sécurité sociale n'est pas la même qu'en droit du travail.

Le règlement de coordination des régimes de sécurité sociale repose sur le choix de la simplicité administrative pour les entreprises, et ainsi du maintien du rattachement au régime du pays d'origine. Ce n'est pas illogique, car, en cas de maladie pendant un détachement, c'est la caisse du pays d'origine qui règle la dépense correspondante, en remboursant le montant des soins engagés par le régime du pays de travail. Pour le droit du travail, la directive de 1996 repose sur un certain équilibre entre les règles du pays d'origine et celles du pays hôte. Il y a obligation pour l'entreprise qui détache son salarié dans un autre Etat membre d'appliquer pour les matières les plus importantes le droit du pays d'accueil, à savoir un « noyau dur » ou un « socle minimal » de règles impératives.

Ce socle minimal comprend les salaires minima, notamment sur les heures supplémentaires, le temps de travail, le temps de repos, les congés, les règles de santé et de sécurité au travail, ainsi que la non discrimination et le respect du principe de l'égalité des femmes et des hommes.

Les règles concernées sont soit les obligations légales et règlementaires, soit les dispositions prévues par les conventions et accords collectifs étendus. En matière de salaires, ainsi, l'obligation ne porte pas en France sur le seul SMIC, mais sur les minima prévus par métier par les conventions ou accords étendus.

Cette obligation ne joue qu'en faveur des salariés. Si les règles du pays d'origine sont plus favorables que celles du pays d'accueil, ce sont naturellement elles qui s'appliquent.

Par ailleurs, la directive prévoit pour les Etats membres, en contrepartie, l'obligation d'informer les entreprises extérieures sur les règles qu'elles devront respecter, ainsi qu'une coopération entre Etats membres, avec des procédures d'assistance mutuelle pour le cas où les contrôles impliquent de faire des vérifications dans le pays d'origine.

Ce cadre actuel n'est pas en l'état satisfaisant, pour plusieurs raisons.

D'abord, comme l'a relevé la Commission européenne, la coopération entre Etats membres fonctionne assez mal, l'information délivrée aux entreprises extérieures n'est pas satisfaisante et il y a en outre de nombreuses difficultés pratiques, notamment celles dues à la barrière de la langue.

En outre, la Cour de Justice est venu limiter les capacités des Etats membres à deux points de vue : d'abord, elle ne leur permet pas de prendre beaucoup de mesures, au-delà du noyau dur, au titre des dispositions d'ordre public ; ensuite, elle a une interprétation très stricte de la libre prestation de services et a limité les exigences documentaires des Etats d'accueil vis-à-vis des entreprises prestataires, notamment dans l'arrêt Luxembourg en 2008.

Ensuite, dans ses arrêts Laval et Viking de 2007, la Cour a estimé pouvoir contrôler les actions collectives des syndicats pour amener les employeurs à la négociation et a aussi dénié dans l'arrêt Laval leur droit de le faire en l'absence de convention collective erga omnes, ce qui a gêné la Suède, et a dénié dans l'arrêt Rüffert de 2008 le droit aux collectivités publiques, lorsqu'elles passent un marché, d'exiger le respect des salaires minimum, lorsque juridiquement la convention n'a pas été étendu. Depuis, les Etats membres où l'essentiel du droit social repose sur la négociation collective ont rectifié leur cadre juridique, mais l'alerte a été entendue.

Les difficultés ressenties sur le terrain sont en France immenses. Les vérifications sont très difficiles, notamment pour s'assurer que les salaires français et les heures supplémentaires sont bien versés, et les temps maxima de travail respecté et il y a d'emblée la barrière de la langue, ne serait-ce que pour identifier un responsable. Il y a aussi des cas d'optimisation ou de fraude impliquant des montages compliqués, avec des cas d'abus de sous-traitance, des cas de faux indépendants ou des détachements successifs injustifiés.

On a eu récemment une alerte avec l'implantation d'entreprises de travail temporaire au Luxembourg, uniquement tournées vers la France et n'ayant pas d'activité réelle dans le Grand duché.

Face à cette situation, une évolution est nécessaire.

La Commission européenne l'a annoncée à partir de 2009, mais cette idée d'une inscription du détachement à l'agenda européen est antérieure, car, dès 2008, la Confédération européenne des syndicats s'est jointe aux voix qui le demandaient, dont celle du Parlement européen.

Sur le fond, les modifications à apporter au cadre juridique européen du détachement ne concernent pas le règlement de coordination de sécurité sociale, puisque les textes d'application du nouveau règlement, celui de 2004, comprennent différents dispositifs anti-abus. La révision à opérer ne concerne donc que la directive de 1996. Ce n'est pas le noyau dur qui est en cause, que différents autres éléments de la directive.

A l'issue des travaux, plusieurs orientations se dégagent, sur les améliorations à apporter au dispositif actuel.

La première consiste à compléter les obligations des employeurs étrangers en leur donnant l'obligation d'assurer, lorsqu'ils s'en chargent, ce qui est souvent le cas, un logement salubre et décent à leurs salariés détachés. Nous avons tous présent à l'esprit des cas inacceptables.

La deuxième consiste, pour éviter les abus de la sous-traitance et pallier l'impossibilité de saisir l'employeur, notamment lorsque les salaires n'ont pas été payés, à introduire une clause de solidarité avec le cocontractant. C'est ce qu'a prévu la directive sur les employeurs de ressortissants irréguliers des pays tiers, pour les clandestins. Il existe déjà parfois de telles obligations en droit national, mais l'intérêt est de systématiser le principe de solidarité.

La troisième grande piste de réforme ne concerne pas le dispositif de 1996, mais la législation européenne sur les marchés publics, qui est d'ailleurs en cours de révision. Il s'agit de permettre à l'autorité adjudicatrice d'introduire un critère social, dans ses critères de choix pour l'attribution du marché. Lors de son audition par notre commission le 1er décembre dernier, le commissaire Michel Barnier nous en a parlé.

Les autres pistes de réforme de la directive de 1996 sont plus techniques, avec une meilleure articulation de la directive de 1996 avec le règlement de coordination des régimes de sécurité sociale, de manière à introduire en droit du travail européen les mesures anti-fraude prévues en droit de la sécurité sociale et avec un renforcement de la coopération entre les Etats membres, en s'appuyant sur les efforts en cours, notamment de circulation de l'information entre les Etats membres et de formation commune des personnels, d'harmonisation des méthodes, en allant jusqu'à l'interconnexion des registres des sociétés.

Il s'agit enfin de rappeler et préciser les conditions dans lesquelles les Etats membres donnent aux entreprises prestataires, comme aux salariés détachés, et à leurs cocontractants une information sur les conditions du détachement et les règles du « noyau dur ».

En complément, trois éléments peuvent être prévus sur le plan national.

Il s'agit, d'une part, de poursuivre l'approche intégrée de la lutte contre les fraudes qui est déjà engagée depuis plusieurs années, avec notamment la création de la Délégation nationale à la lutte contre les fraudes, ainsi que le développement des procédures conjointes entre les services de contrôle et le partage de l'information.

Il s'agit, d'autre part, d'améliorer l'information des entreprises européennes et de leurs salariés, et de faciliter leurs formalités. En la matière, deux objectifs doivent être atteints. Le premier, c'est celui de la déclaration en ligne de détachement. Actuellement, ce n'est possible qu'à titre expérimental, puisque le futur système FRAMIDE, n'est pas encore opératoire.

Le deuxième objectif est encore plus lointain, mais il est indispensable. C'est l'amélioration de l'information en ligne. L'Institut du travail de Strasbourg a dressé un constat assez négatif sur la France et ses principaux partenaires, mais il ne faut pas se cacher que certains font nettement mieux, comme la Belgique.

L'objectif à atteindre est pourtant clair : un site unique, ou un site pilote renvoyant sur des sites correspondants, comprenant des informations dans les langues de nos principaux partenaires en matière de détachement, et en tout état de cause dans les langues de nos voisins, ces informations devant être fiables, complètes et régulièrement mises à jour sur les obligations qui s'imposent aux entreprises étrangères. La carence la plus difficile à corriger du système actuel concerne le droit conventionnel.

On doit aussi songer à engager une concertation avec les réseaux des chambres consulaires et les organismes professionnels, qui peuvent servir de relais.

Enfin, la troisième réforme à opérer consiste à modifier le régime des sanctions en cas de non respect des règles relatives au détachement.

Le premier volet concerne l'absence de respect de l'obligation de déclaration préalable. Actuellement, une contravention pénale est prévue. Il paraît opportun de prévoir en remplacement une amende administrative, qui aurait l'avantage d'être exigible in situ, de l'employeur, sans que son montant soit nécessairement très élevé.

Le deuxième volet concerne les sanctions pénales en cas d'infractions lourdes. Actuellement, ce sont celles applicables au travail dissimulé, au travail illégal, qui sont applicables. Ces procédures impliquent pour les entreprises étrangères des opérations très lourdes et qui souvent ne débouchent pas. Dans une telle situation, une réflexion s'impose, et c'est le minimum, sur la création d'une infraction spécifique sur le détachement. C'est une question cependant délicate car elle doit se faire dans le respect du principe de non-discrimination.

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je remercie la rapporteure pour son excellent travail sur une question qui se pose en permanence, le statut social des travailleurs. Je souhaiterais savoir si les règles évoquées couvrent bien la situation des travailleurs qui viennent avec leurs entreprises prestataires de services. En effet, la question n'est pas tant celle des salariés extérieurs recrutés individuellement dans notre pays mais celle des salariés qui séjournent pour un temps court, pour le compte d'entreprises dont on dit souvent qu'il est difficile de les poursuivre en cas d'irrégularité. Il y a en quelque sorte un no man's land juridique pour ces salariés employés sur la base des règles de leur pays d'origine.

PermalienPhoto de Anne Grommerch

Ces entreprises sont tenues de respecter les règles de la directive. Toute le problème est qu'elles ne le font pas. La lutte contre les irrégularités est très difficile, car elle est en partie mise en oeuvre sur la base de déclarations initiales et on estime à un tiers seulement le nombre des déclarations effectives. Par ailleurs, les moyens, notamment en termes d'échanges des fichiers, sont limités. Avec certains pays voisins comme l'Allemagne, l'Espagne ou le Luxembourg, les échanges fonctionnent bien. Nous avons ainsi des bureaux de liaison. Par contre, c'est beaucoup plus difficile avec des pays plus éloignés, d'autant que la barrière de la langue est importante. Toutes ces raisons font qu'il est souhaitable que le texte évolue de façon à ce qu'il y ait plus de contraintes tant pour les entreprises extérieures que pour celles qui accueillent les travailleurs concernés. Afin de responsabiliser ces entreprises d'accueil, il est important de mettre en place une sanction administrative financière, qui serait plus efficace qu'une sanction pénale qui n'aboutit pas dans la mesure où au terme d'une procédure longue, les entreprises sont déjà reparties !

PermalienPhoto de Philippe Armand Martin

Je remercie également la rapporteure pour son exposé. Je souhaiterais savoir s'il existe une cohérence entre la situation de ces salariés venant temporairement et celle des travailleurs transfrontaliers ! La directive aboutira-t-elle à une simplification ?

PermalienPhoto de Anne Grommerch

La situation des travailleurs transfrontaliers est juridiquement très différente. Ces salariés vivent dans leur pays et traversent la frontière tous les jours pour aller travailler dans un autre pays alors que les autres viennent très temporairement dans un pays tout en restant rattachés à leur pays d'origine.

S'agissant de la simplification des contrôles, le problème est de pouvoir travailler sur des fichiers informatiques communs. Or, dans certains pays, comme en France avec la CNIL, il y a des contraintes. Si on a de bons résultats en Belgique, c'est grâce à un accès plus aisé aux informations. Aujourd'hui tout est encore en France traité sur papier, ce qui représente une charge de travail considérable en termes de contrôle. Par ailleurs, une bonne coopération entre les différents Etats membres est nécessaire. Avec certains pays, cela se passe très bien, il existe par exemple des formations communes afin de voir comment fonctionnent les différents systèmes. Par contre, la coopération est moins aisée avec d'autres.

Un problème tient à ce que les informations présentes en France sur le site du ministère du travail sont souvent incomplètes ou non mises à jour. On ne peut dans ces conditions pas reprocher aux entreprises de ne pas avoir fait les déclarations nécessaires.

PermalienPhoto de Régis Juanico

Nous avons effectué un déplacement hier à Bruxelles afin de faire un premier tour d'horizon sur la question de l'Acte pour le marché unique. Il a ressorti du dialogue, que nous avons eu avec la Commission européenne, qu'il faut absolument que les propositions nombreuses et variées qui seront faites montrent que l'Union européenne n'est seulement un ensemble de règles de concurrence mais constitue un moyen pour le citoyen européen d'être protégé. Cette directive est l'une des occasions à valoriser afin de montrer que des mécanismes protecteurs peuvent être mis en place pour se rapprocher des préoccupations quotidiennes des travailleurs sur leurs conditions de vie.

Sur proposition de la rapporteure, la Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

La Commission des affaires européennes,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la directive 9671CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services,

Vu le règlement (CE) no8832004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale,

Vu la communication de la Commission européenne du 25 juillet 2003 relative à la mise en oeuvre de la directive 9671CE dans les Etats membres (COM [2003] 458 final),

Vu la communication de la Commission européenne du 4 avril 2006 « Orientations concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services » (COM [2006] 159 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions « Détachement de travailleurs dans le cadre de la prestation de services : en tirer les avantages et les potentialités maximum tout en garantissant la protection des travailleurs » (COM [2007] 304 final),

Considérant que, selon un constat largement partagé, la directive précitée de 1996 fait l'objet de difficultés d'application qui se traduisent, entre autres, par des insuffisances et fraudes inacceptables pour les Etats membres, car destinées à faire échec à l'application sur leur territoire de dispositions de droit du travail protectrices des salariés, mais aussi garantes d'une concurrence loyale entre les entreprises établies dans un Etat membre et les prestataires extérieurs qui n'y sont pas établis,

Regrettant qu'une partie de ces difficultés, fortement préjudiciables aux salariés concernés issus d'autres Etats membres, comme aux entreprises et salariés domiciliés en France, provienne de l'application très stricte du principe de la libre prestation de services par la Cour de justice des Communautés européennes, devenue depuis Cour de justice de l'Union européenne, en dépit de sa reconnaissance de la pertinence de l'objectif de protection sociale des travailleurs,

Considérant que la Commission européenne a inscrit dans son programme de travail pour l'année 2011 une initiative législative pour améliorer la mise en oeuvre des dispositions sur le détachement des travailleurs,

Constatant que la directive de 1996 fait l'objet d'une demande de révision de la part de la Confédération européenne des syndicats (CES),

1. Estime nécessaire d'apporter au dispositif de la directive de 1996 des améliorations, complément et ajouts, dans le respect du modèle social européen et de sa diversité, selon les modalités suivantes :

a) la création d'une obligation de logement salubre et décent du travailleur salarié détaché,

b) l'adjonction d'une clause de solidarité du cocontractant avec l'employeur du travailleur détaché, notamment pour ses obligations en matière de salaires et ses obligations sociales, avec, de manière liée, un droit de ce même contractant à se voir communiquer certains éléments relatifs à la régularité des conditions d'emploi du salarié,

c) un renforcement de la coopération entre les Etats membres pour une plus grande efficacité de leurs procédures d'assistance mutuelle,

d) une amélioration de la coordination entre la directive précitée et le règlement de coordination de 2004, également précité, de manière à donner davantage de force et de cohérence aux dispositions intervenues en application du second pour faire échec à certains cas d'abus et de fraude,

e) une amélioration de l'information délivrée aux salariés détachés, sur leurs droits, et aux entreprises prestataires de services, par l'ensemble des Etats membres ;

2. Juge également opportun d'ajouter d'un critère social dans les règles européennes relatives aux marchés publics, actuellement en cours de révision ;

3. Considère que ces initiatives doivent intervenir sans préjudice d'améliorations du dispositif national en vigueur en France et relatif au détachement des travailleurs, selon trois orientations :

a) la poursuite de la lutte contre les fraudes selon une approche intégrée,

b) l'amélioration des informations, notamment des informations en ligne, à destination des entreprises prestataires établies dans les autres Etats membres et de leurs salariés,

c) une adaptation des sanctions, avec essentiellement une amende administrative pour défaut de déclaration préalable du détachement.

PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Après deux réunions en 2009 et la visioconférence avec le Parlement européen en janvier 2010, c'est la quatrième fois que notre Commission doit se pencher sur ce texte aux enjeux importants car la matière concerne très concrètement la vie quotidienne et il faut l'adapter notamment aux nouvelles possibilités transfrontalières ouvertes, entre autres, par Internet.

La situation vient de connaître d'importantes évolutions, récemment. D'une part, après le COREPER, le 8 décembre, le Conseil a avalisé un accord le 24 janvier dernier, avec néanmoins des réserves de l'Allemagne, de l'Espagne, de Malte et de la Slovénie. D'autre part, la Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs IMCO du Parlement européen a pris position le 1er février dernier. Même si la perspective d'un accord en première lecture, qui est esquissée, n'est pas avérée en raison de l'importance des questions encore en débat, notre Commission doit exercer son rôle d'alerte et de vigilance.

Pour ce qui concerne le Conseil, les travaux préparatoires ont abouti à un texte centré sur l'essentiel des enjeux du marché intérieur, c'est-à-dire sur la vente à distance et la vente hors établissements commerciaux, et ne traitant que de l'information précontractuelle sans plus interférer, ce qui est positif, avec le droit national des contrats. Dans ce cas, les questions de garantie et de clause abusive ne seraient plus abordées.

Ensuite, le Conseil propose de retenir le principe de l'harmonisation ciblée, à savoir une application limitée de l'harmonisation maximale de manière à permettre aux Etats membres, dont la France, de conserver d'importantes spécificités protectrices pour les consommateurs, tels que l'interdiction de tout paiement pendant la période de rétractation pour les ventes hors établissements commerciaux. Enfin, le Conseil propose aussi un texte clarifié offrant davantage de sécurité juridique grâce à une articulation précise avec les autres textes européens applicables, notamment les textes sectoriels et un champ d'application plus clair.

En outre, le texte du Conseil prévoit plusieurs avancées importantes, notamment une définition claire aux consommateurs qui peut en outre être appliquée à d'autres personnes, telles que les associations ou les petites entreprises, un droit de rétractation équilibré avec une information dans tous les cas, que ce droit soit ou non applicable, un avis standardisé d'information, ainsi qu'un formulaire type à caractère facultatif pour exercer ce droit. Il faut également mentionner la faculté pour le consommateur de demander en toutes situations un écrit ainsi que son information sur la garantie commerciale et sur le service après-vente.

Par ailleurs, le texte du Conseil lève certaines incertitudes et menaces sur des dispositions du droit français auxquelles les consommateurs sont très attachés.

Pour la suite, il est essentiel que ces acquis soient préservés et figurent dans le texte qui sera définitivement adopté par le législateur communautaire. Toutefois, le dispositif retenu par le Conseil appelle quelques rectifications qui pourraient être introduites au cours de la discussion avec le Parlement européen, dans le cadre du débat entre les deux branches du législateur. Ces rectifications concernent d'abord ce qu'on peut appeler des difficultés résiduelles. Il faut prendre en compte clairement le cas des contrats mixtes sur des biens ou services à usage à la fois professionnel et personnel. Il faut assurer aussi la pérennité des dispositions de la loi Chatel sur le numéro de téléphone auquel on peut joindre effectivement le professionnel. Il faut également éviter de faire une distinction dans la liste des informations dont l'omission implique une prolongation au-delà de quinze jours du délai de rétractation. Enfin, il faut donner une meilleure solution à la question de la dépréciation des biens résultant de manipulations du consommateur lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation. Une question particulièrement sensible est celle de l'inclusion des abonnements de presse dans le champ de droit de rétractation. Une telle insertion est assez contestable car ne prenant pas en compte les spécificités du secteur et notamment le besoin d'information essentiel auquel il répond. Aucune étude d'impact n'est donc fournie. Or ce serait indispensable pour pouvoir prendre une décision aussi lourde que celle proposée.

Il est également une disposition sur lequel le texte du Conseil doit être fortement restructuré, celle des conséquences du défaut de livraison par le professionnel. Le dispositif retenu prévoit un recul de la protection du consommateur français avec deux formalités , alors que nous n'en avons actuellement qu'une seule.

Pour sa part, en dépit du caractère parcellaire et incertain des informations dont on peut disposer, puisque le site du Parlement européen ne donne pas d'éléments suffisants et exhaustifs, plusieurs modifications proposées par la commission IMCO peuvent être retenues, notamment sur l'exclusion des services sociaux ou les conditions de prise en charge du retour du bien en cas d'exercice du droit de rétractation par le consommateur.

La question la plus lourde qui va faire l'objet d'un débat entre le Parlement européen et le Conseil, est celle, selon le point de vue que l'on choisit, du maintien ou de la réintégration des chapitres IV sur la garantie des biens et V sur les clauses abusives dans la future directive. S'appuyant sur l'avis du BEUC, le Parlement européen semble s'orienter sur un maintien. Dans l'hypothèse où la réintégration se ferait, il convient de rappeler les conditions que nous avions posées à l'origine sur le futur texte, notamment la nécessité de n'entraîner aucun recul dans la protection du consommateur, entre autres sur la garantie des vices cachés.

Enfin, pour être exhaustif, il faut mentionner l'hypothèse d'un vingt-huitième droit, optionnel, avancé par la Commission européenne dans le cadre du Livre vert relatif aux actions envisageables en vue de la création d'un droit européen du contrat pour les consommateurs et pour les entreprises. En dépit de son caractère séduisant et de son intérêt citoyen, cette hypothèse soulève beaucoup de questions et recèle quelques risques notamment celui de divergences d'application dans les 27 Etats membres, de même que celui de la marginalisation du droit national dans certains Etats membres mais pas dans d'autres et celui d'un transfert de la totalité de la maîtrise de la matière au niveau européen, en contradiction avec le principe de subsidiarité.

Sur proposition de la rapporteure, la Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux droits des consommateurs (COM [2008] 646 finalnoE 4026),

Vu l'accord intervenu au sein du Conseil sur le texte intitulé « proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur les droits des consommateurs applicables aux contrats de vente à distance et hors établissement » avalisé par le Conseil,

Rappelant que la future directive doit prévoir pour l'ensemble des consommateurs des Etats membres de l'Union européenne le niveau élevé de protection prévu par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tel que le commande sur le plan juridique, philosophique et humain, la place de la protection européenne,

Saluant les avancées du texte précité avalisé par le Conseil par rapport à la proposition initiale, notamment les progrès pour la protection des consommateurs et la levée d'incertitudes inacceptables sur la pérennité de dispositions nationales auxquelles les consommateurs sont en France très attachés, grâce au recours, pour les ventes à distance et les ventes hors établissement commerciaux, à des règles d'harmonisation ciblée s'appliquant à un champ clarifié et sans interférence avec le droit national des contrats,

1. Estime néanmoins que l'adoption définitive de la proposition de directive ne peut intervenir en l'état, dans la mesure où certaines rectifications sont encore indispensables, les plus substantielles portant sur le droit de rétractation, avec la nécessaire prise en compte de la spécificité du secteur de la presse, et la clarification juridique des conséquences du défaut de respect du délai de livraison par le professionnel et le transfert de risque ;

2. Salue par conséquent, au titre des améliorations à apporter, certaines de celles envisagées à ce stade au sein du Parlement européen, notamment la clarification du champ d'application du texte par l'exclusion, conformément au principe de subsidiarité, de la totalité des services sociaux, et non uniquement de certains d'entre eux, ainsi que l'élargissement de la prise en charge par le professionnel des frais de renvoi du bien faisant l'objet d'une rétractation de la part du consommateur et la prise en compte des produits numériques ;

3. Considère que le maintien du chapitres IV, relatif aux biens, notamment aux garanties, et du chapitre V ne peut intervenir que s'il n'entraîne aucun recul dans la protection du consommateur en France, en particulier pour ce qui concerne tant la garantie des vices cachés que le choix des remèdes, lors de la mise en jeu de la garantie, et les clauses abusives, ce qui implique le recours à des dispositions d'harmonisation minimale largement fondées sur celle de la directive 9313CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs et la directive 199944CE sur la vente et les garanties des biens de consommation et n'offrant le cas échéant que des protections supplémentaires au consommateur ;

4. Exprime en tout état de cause ses réserves quant à l'opportunité de prévoir d'ores et déjà, à ce stade de la construction européenne, un 28e régime, optionnel, pour le droit européen des contrats pour les consommateurs et pour les entreprises, en dépit de son intérêt, au premier abord, pour le développement de la citoyenneté européenne. »

Le caractère exceptionnel des évènements neigeux ne souffre guère de contestations, le mois de décembre 2010 a connu 20 jours de neige, ce qui ne s'était pas vu depuis quarante ans. 35 000 vols - soit davantage que sur l'ensemble de l'année 2009 - ont été annulés, obligeant plusieurs milliers de voyageurs à passer la nuit dans les aéroports, dans toute l'Europe et même dans d'autres parties du monde. La politique de « hub » fragilise considérablement le système aéroportuaire en cas de crises et amplifie les problèmes. Cette politique, qui consiste à centraliser les vols longs courriers sur une plate forme recevant les passagers en correspondance par l'avion ou le train, conduit à un développement déséquilibré du territoire. Le fait de privilégier en cas de diminution de la capacité des aéroports les longs courriers, trouve vite ses limites : des dizaines de milliers de passagers européens ont pu accomplir leur vol en long courrier mais ont dû dormir à l'aéroport, car les correspondances courts et moyens courriers avaient été annulées.

Cette situation a également généré d'énormes problèmes de manutention des bagages. Dans certains aéroports, des inquiétudes concernant une pénurie de liquide de dégivrage ont également nuit aux opérations aériennes.

La France a refusé la facilité de la fermeture totale des aéroports, car ce choix est le plus pénalisant in fine pour les passagers, dans la mesure où il implique un délai de plusieurs jours avant que la situation redevienne normale. Les Britanniques ont eu recours à cette option, l'aéroport d'Heathrow a été fermé et Aéroports de Paris (ADP) a dû, de ce fait, accueillir 4 à 5 000 passagers, dépourvus de toute solution de transport, dont les avions avaient été dérouté sur Charles de Gaulle. Cela illustre les désordres qui peuvent naître de l'absence de coordination européenne en matière de déroutement.

Avec la mise en place de la politique de « ciel unique », un contrôle aérien en voie d'unification avec la mise en place des FABEC, des aéroports dont l'élaboration de la réglementation et la certification sont en cours de transfert vers les compétences communautaires, l'intervention de l'Union européenne est non seulement légitime mais indispensable.

Si nous nous plaçons du point de vue des passagers la situation vécue en décembre est inacceptable, même l'annulation d'un vol aérien pour cause d'intempéries appartient aux aléas normaux de ce mode de transport ; ce qui est inacceptable est le manque d'informations fiables à destination des passagers, le fait que 5 000 passagers soient obligés de dormir sur place, ou que treize avions d'Air France aient embarqués leurs passagers pour ensuite les débarquer après plusieurs heures passées à bord, sans être véritablement informés.

Du point de vue des opérateurs, il ressort des travaux d'investigation que j'ai conduits que ce chaos européen ne résulte pas de la faillite des autorités responsables de l'aviation civile, des compagnies aériennes ou des aéroports : nous sommes en présence d'une défaillance collective résultant d'abord d'une mauvaise remontée des informations venant du terrain, d'un sous dimensionnement incontestable des moyens nécessaires pour faire face à des évènements climatiques exceptionnels et probablement d'une insuffisante sensibilité au sort des passagers. Les acteurs de terrain, comme de commandement, ont eu le sentiment d'avoir fait le maximum pour assurer le plus de vols possibles, et ils n'ont pas à rougir de leur action, mais étant « le nez dans le guidon », l'information du passager n'a pas été l'objectif prioritaire, et cela constitue bien sur la défaillance majeure du système aéroportuaire mise en évidence par des événements d'une ampleur exceptionnelle.

La situation française s'est caractérisée par deux traits principaux :

- la volonté de ne pas fermer les aéroports et d'assurer un maximum de trafic. Sur ce point, la mobilisation de l'ensemble des acteurs et en particulier des personnels permet de parler de succès ;

- des carences incontestables dans l'information, la communication et la prise en charge des passagers.

Avec le recul, la difficulté constatée n'est pas venue d'une rupture des stocks de glycol, qui auraient été insuffisants, mais de la crainte de manquer de produits, qui a conduit à l'annulation préventive de plus de vols que nécessaire et d'une insuffisante capacité de dégivrage sur Roissy. Je voudrais vous préciser qu'à Amsterdam le dégivrage se fait avec de l'eau et qu'à Bruxelles il est procédé au recyclage de ces produits.

Il convient de rendre justice à ADP, qui a été au-delà de son rôle pour se substituer à certaines compagnies désinvoltes ou n'assumant pas leurs responsabilités. Sur ce plan ADP a été injustement mis au pilori et les contraintes commerciales ne lui ont pas permis de répondre publiquement à des accusations non fondées.

L'information des passagers a été gravement déficiente lors des épisodes neigeux car les conséquences des incidents antérieurs, climatiques ou sociaux, n'ont visiblement pas été tirées. L'information transmise aux passagers, que ce soit par Internet ou sur les écrans des aéroports, était soit erronée soit imprécise en ne mentionnant que « retardé » mais n'indiquait pas aux passagers le moment où des renseignements pourraient véritablement leur être communiqué.

Cela s'explique par une mauvaise organisation qui n'a pas permis une remontée satisfaisante de l'information qui aurait évité à des milliers de passagers le désagrément d'être embarqué puis débarqué après des heures d'attente dans l'avion.

Le Gouvernement a réagi au chaos du mois de décembre en diligentant une mission d'inspection et des mesures ont été annoncées le 13 janvier 2011. Elles sont bien entendu indispensables, mais elles reflètent une dérive enregistrée ces dernières années, qui a privilégié la rentabilité financière au détriment des besoins du passager et du service public.

Plusieurs problèmes de nature différente ont été posés par ces évènements neigeux qui impliquent différemment les responsables du secteur aérien.

Lors de la paralysie de l'Ile de France début décembre, un des problèmes essentiels a été l'incapacité des équipages à gagner les aéroports ; ni ADP ni les compagnies aériennes n'ont prise sur cette situation.

Par contre, le fait de ne pas avoir été capable d'indiquer aux passagers aériens le moment où une information leur serait délivrée n'est pas acceptable.

Il est clair également que les évènements survenus à partir du 22 décembre ont touché un « hub » déjà désorganisé, par exemple au niveau des bagages. Il convient aujourd'hui d'engager une réflexion sur l'intérêt qu'il y aurait à laisser se développer encore le « hub » de Roissy qui lorsqu'il est confronté à des problèmes peut entraîner une cascade de défaillances. Les problèmes posés par la saturation de Londres Heathrow qui fonctionne à 93 % de ses capacités, n'offrant ainsi aucune souplesse en cas de problème significatif, risquent de se rencontrer dans peu d'années à Roissy.

La question dite des « buttées d'équipage » n'est pas réglée. Lors de la crise de nombreux passagers ont du débarquer car les équipages après quatre ou cinq heures d'attente dans l'avion cloué au sol avaient atteint leur durée maximal de vol.

Les mesures retenues par le Gouvernement illustrent pour certaines d'entre elles les dysfonctionnements du secteur aérien.

Par exemple, le fait d'inviter un représentant d'ADP à la cellule de crise d'Air France sur le hub signifie sans doute que cela n'était pas le cas jusqu'à présent. Il en est de même pour les mesures destinées à éviter que les clients ne fassent la queue debout devant un guichet.

Il apparaît au vu des propositions gouvernementales -que nous ne pouvons qu'approuver- qu'il convient d'aller au-delà et de faire intervenir des textes réglementaires plus précis afin que le passager du transport aérien ne puissent pas être traité avec désinvolture par certaines compagnies aériennes qui n'ont pas assumées leurs obligations.

J'ai rencontré des responsables de la Commission européenne et d'Eurocontrol hier, lundi 7 février. Il est apparu que les autorités européennes tirent quelques enseignements de cette crise, en plaçant au centre de leurs préoccupations le passager.

A leurs yeux, il y a de la neige tous les ans et il n'est pas correct de parler de surprise. Le « business plan » des aéroports, qui vise à obtenir une rentabilité financière se situant aux environs de 15 %, soit le double de celle des compagnies aériennes, a conduit à faire des impasses sur les surcapacités de moyens nécessaires pour faire face aux évènements climatiques exceptionnels, auxquels peuvent être confrontés les aéroports. Il n'est donc pas acceptable pour la Commission européenne de mettre le chaos enregistré en décembre sur le dos de circonstances exceptionnelles.

Les fortes chutes de neige ont touché des plateformes aéroportuaires européennes qui fonctionnent presque à la limite de leurs capacités, et à un des moments les plus chargés de l'année. Heathrow, l'une des plateformes où le trafic est le plus intense dans l'UE, a été fermé durant plusieurs jours. Cette fermeture a entraîné celle d'autres aéroports en cascade, car les aéroports forment un système. Aussi, la Commission européenne proposera-t-elle en juin prochain, dans le cadre du paquet aéroportuaire, une réflexion sur le modèle économique des compagnies aériennes. En effet la gestion commune de l'espace aérien va permettre de dégager des sillons aériens supplémentaires qui pourraient conduire assez rapidement à l'asphyxie des grands aéroports européens, si la politique de « hub » demeurait au centre de la stratégie des compagnies européennes.

La Commission présentera des mesures spécifiques pour résoudre certains des problèmes les plus importants dans un paquet «Aéroports» qui sera publié vers le mois de juin. Il devrait comporter trois points : les créneaux horaires, les services aéroportuaires et la capacité des aéroports, en particulier des « hubs » à faire face à l'accroissement de la demande.

Faute d'engagement sérieux des sociétés de maintenance et des aéroports en ce sens, la Commission européenne envisage de légiférer pour les y forcer en imposant un service minimum en termes de nombre de décollages. En effet en raison de l'effet de cascade, les aéroports doivent être davantage intégrés et travailler en réseau. Ils ne peuvent travailler en étant isolés les uns des autres.

J'ai pris note de la volonté de la Commission européenne d'éviter le recours à une législation européenne et, dans un premier temps, de faire confiance à l'autorégulation par les acteurs.

Elle souhaite que ces derniers mettent en place des plans d'urgence mais, souligne que ce que la Commission peut faire, c'est renforcer, si besoin est, le cadre réglementaire et, en particulier, garantir un service minimum et imposer le respect de critères de qualité dans les aéroports européens dans l'intérêt des passagers.

Ce service minimum poserait des problèmes juridiques s'il conduisait à limiter le droit de grève dans les services aériens. La réponse de la Commission ne m'est pas apparue très claire sur ce point.

L'Acte pour le marché unique, porté par le commissaire Michel Barnier, comporte une proposition 43 qui indique que : « La Commission adoptera en 2012 une proposition de modification du règlement relatif aux droits des passagers aériens, notamment à la lumière des effets de la récente crise du volcan Islandais».

Je propose d'utiliser ce cadre pour demander à la Commission européenne la mise en place généralisée des moyens permettant de traiter dignement les passagers devant dormir dans les aéroports. Il convient en outre que les normes d'agrément des aéroports intègrent les plans d'urgence et imposent des normes minimales pour l'accueil des passagers. Une décision de fermeture d'un aéroport local doit aujourd'hui prendre en compte l'effet sur le réseau. De ce fait il est indispensable qu'Eurocontrol soit informé en temps réel de la situation pour mieux gérer les déroutements d'appareils.

PermalienPhoto de Jean-Claude Fruteau

Je salue tout d'abord le travail de notre rapporteure, qui connaît très bien son domaine.

Deux remarques.

Cet épisode neigeux venant après celui du volcan islandais a vérifié la faiblesse, l'insuffisance ou l'absence d'Europe. Dans ces deux cas, la désorganisation a prévalu alors qu'il faudrait plus d'Europe dans la mesure où nous allons vers l'organisation d'un ciel unique européen. Il est donc indispensable que l'Europe intervienne plus dans ce domaine.

En matière de communication, l'accent doit être mis sur la responsabilité des compagnies aériennes. Deux situations se présentent. En effet si les compagnies traditionnelles ont toutes un système d'information des passagers, il n'en est pas de même des compagnies à bas coût qui abandonnent leurs passagers. On atteint alors la limite de leur modèle économique.

Il faut donc prévoir des obligations en la matière pour ces compagnies même si elles vendent des billets moins chers. Car, sinon, leur logique est de transporter à moindre coût quand tout va bien et d'être absentes en cas de difficultés.

Il faut donc une législation pour garantir les droits des usagers.

PermalienPhoto de Michel Delebarre

Je rends hommage au travail de notre collègue. Mais, finalement, je me demande où est le drame. Je trouve même plutôt rassurant et normal que les avions ne volent pas en cas d'intempéries de cette importance. Je ne pense pas que l'on puisse revenir sur la politique des hubs, il faut faire avec.

L'information est indispensable mais on peut se poser des questions quand on voit les gens se précipiter vers les aéroports quel que soit le temps. Qui doit alors être considéré comme responsable ? Si on estime que cela doit être les compagnies, alors on n'aura plus de low cost car elles ne se sentent pas responsables des passagers se trouvant hors de leurs avions et on se retournera donc vers les compagnies traditionnelles.

Le problème est, en fait, de savoir quoi faire quand des milliers de personnes sont dans un aéroport. J'estime que dans ce cas, la responsabilité est du ressort du gestionnaire de l'infrastructure et non des compagnies aériennes. Mais nos infrastructures ne sont pas équipées pour faire face à de tels évènements et leur personnel n'y est pas entraîné.

Dans ce domaine, par exception, je ne serai pas européen, car que pourrait faire l'Europe, sauf à adopter une directive sur les services dans les aéroports, qui relèvent plutôt de la subsidiarité ?

La neige peut revenir. Aussi faudrait-il s'enquérir de ce qui est fait dans les régions fortement enneigées de façon régulière, comme par exemple, le Nord-Est des Etats-Unis, où les perturbations dans le trafic aérien sont minimes.

PermalienPhoto de Gérard Voisin

Le rapport de notre collègue est excellent. Les hubs sont un mal nécessaire et il n'est pas possible de revenir en arrière. Mais cela doit nous amener à nous interroger sur la centralisation outrancière des aéroports en France par rapport à l'étranger.

Les compagnies low cost n'ont en effet pas très bien marché à leurs débuts mais, en tant qu'utilisateur régulier, j'estime qu'elles se tiennent maintenant bien compte tenu des avantages présentés en matière de services, de rapidité et de prix par rapport aux compagnies traditionnelles. Il faut d'ailleurs faire attention à ce modèle car il arrivera bientôt dans les transports ferroviaires.

Il y a eu, en effet, une pagaille abominable qui a révélé des fautes de gestions incompréhensibles. Les intempéries en question n'ayant pas été les plus graves qui peuvent arriver, se pose la question de savoir s'il faut changer toute cette organisation.

Le Président Pierre Lequiller. Ayant dû prendre l'avion à cette époque, je me suis rendu compte à quel point l'information des passagers a pu être absente.

PermalienPhoto de Odile Saugues

Je ne pense pas que la distinction entre low cost et compagnies traditionnelles soit pertinente dans ce cas car ce sont surtout les longs courriers qui ont été bloqués.

Les deux évènements récents ont montré la fragilité du transport aérien et cette situation pourra se répéter. Il faut surtout, dans ces situations, penser aux plus fragiles comme les personnes âgés et les enfants. Il faudra prendre des décisions au niveau européen pour la gestion des aéroports après la prise de position récente de la Commission concernant l'information.

Il y a un ciel unique en Europe avec un contrôle aérien unique. Le problème réside dans le fait que l'on a deux organismes l'un à côté de l'autre. D'un côté, l'Agence européenne de sécurité aérienne, dotée de moyens, gère la sécurité de 27 pays. De l'autre, Eurocontrol, rassemble 39 pays, donc au-delà de l'Union européenne, et a, seul, la vision globale lui permettant de dérouter des avions.

Les hubs présentent des avantages et des limites à la fois en matière d'environnement et en capacités d'absorption des passagers. L'Allemagne a trois hubs. Il faudrait être moins centralisateur en France et exploiter les possibilités des aéroports du sud et de l'ouest. La neige remet en question certaines fonctions du transport aérien mais on ne peut adopter en Europe que des mesures limitées car Eurocontrol ne peut pas imposer de règles. L'harmonisation ne pourra se faire qu'avec des crises. La France traite mieux les passagers mais il y a quand même eu ce spectacle indigne des queues interminables dans les aéroports. Les compagnies low cost sont différentes entre elles et ont certainement une contribution positive en matière d'aménagement du territoire, même si on ne peut pas en dire autant concernant le traitement de leur personnel.

Des aéroports n'ont pas rencontré de problèmes de dégivrage des avions comme celui d'Amsterdam, qui emploie de l'eau chaude, ou celui de Munich qui récupère les produits employés.

La crise a révélé beaucoup de carences mais il faut prendre garde à ne pas mal considérer les clients quand le trafic aérien augmente de 5%. Il faut donc arriver à que ce genre d'évènements soit considéré normalement comme dans le reste de l'Europe en utilisant un certain nombre de moyens comme le réseau des RER ou les matériels militaires.

Le Président Pierre Lequiller. Les trois communications de ce jour ont concerné des problèmes européens concrets auxquels nos concitoyens sont très sensibles. Elles illustrent très positivement comment notre commission, grâce à un travail mené dans la durée par les rapporteurs, peut exercer une influence sur la formation et l'évolution du droit européen. C'est une excellente chose.

Sur proposition de la rapporteure, la Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

La Commission des affaires européennes,

Vu l'Acte pour le marché unique, « vers une économie sociale de marché hautement compétitive », proposé par la Commission européenne,

Vu les désordres enregistrés dans le transport aérien européen au mois de décembre 2010,

1. Souhaite que la Commission européenne inclue dans la révision du règlement relatif aux droits des passagers aérien prévu dans la proposition no 43 de la communication sur l'approfondissement du marché unique les points suivants :

a) l'obligation, pour les compagnies aériennes de disposer d'un responsable dans chaque aéroport majeur ;

b) l'obligation pour les compagnies aériennes de prévoir des plans d'urgence pour l'accueil des passagers dont les vols ont été annulés et une indemnisation significative en cas d'absence d'hébergement hôtelier ;

2. Demande à ce que les normes élaborées par l'Agence européenne de la sécurité aérienne intègrent l'obligation pour les aéroports de disposer d'un plan en cas de crise permettant d'assurer un service minimal aux passagers dont le vol a été annulé ;

3. Demande qu'Eurocontrol soit informé en temps réel des difficultés rencontrées par les aéroports et soit chargé d'une mission de coordination des déroutements consécutifs à la fermeture d'un aéroport.

Sur le rapport du Président Pierre Lequiller, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

l Textes « actés »

Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a approuvé les textes suivants :

Ø Commerce international

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil abrogeant le règlement (CEE) no 42973 fixant les dispositions particulières applicables lors de l'importation dans la Communauté de certaines marchandises relevant du règlement (CEE) no 105969, originaires de Turquie, et le règlement (CE) no 2152000 portant reconduction en 2000 des mesures prévues au règlement (CE) no 141695 établissant certaines concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires en 1995 pour certains produits agricoles transformés (documentE 5975) ;

- proposition de décision du Conseil définissant la position à adopter, au nom de l'Union, au Conseil international du sucre, en ce qui concerne la prorogation de l'accord international de 1992 sur le sucre (documentE 5976) ;

- proposition de décision du Conseil définissant la position à adopter, au nom de l'Union, au Conseil international des céréales en ce qui concerne la prorogation de la convention sur le commerce des céréales de 1995 (documentE 5977).

Ø Environnement

- projet de décision de la Commission établissant les critères écologiques pour l'attribution du label écologique de l'UE aux détergents pour lave-vaisselle (documentE 5986) ;

- projet de décision de la Commission établissant les critères écologiques pour l'attribution du label écologique de l'UE aux détergents textiles (texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)(documentE 5987) ;

- projet de règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) no 10132006 du Parlement européen et du Conseil concernant les transferts de déchets afin d'ajouter certains mélanges de déchets à l'annexe III A (documentE 5992).

Ø Espace de liberté, de sécurité et de justice

- projet de décision du Conseil portant mise à jour de la liste des personnes, groupes et entités auxquels s'appliquent les articles 2, 3 et 4 de la position commune 2001931PESC relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme (documentE 5972) ;

- projet de règlement d'exécution du Conseil mettant en oeuvre l'article 2, paragraphe 3, du règlement (CE) no 25802001 concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, et abrogeant le règlement d'exécution (UE) no 6102010 (documentE 5973).

Ø Pêche

- recommandation de la Commission au Conseil visant à autoriser la Commission à ouvrir des négociations au nom de l'Union européenne en vue du renouvellement du protocole à l'accord de partenariat dans le secteur de la pêche avec le Mozambique (documentE 5947).

Ø Politique sociale

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) no 2152008 portant règlement financier applicable au 10e Fonds européen de développement en ce qui concerne le service européen pour l'action extérieure (documentE 5931) ;

- proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des États membres (documentE 5978).

Ø Sécurité alimentaire

- projet de règlement de la Commission du modifiant le règlement (CE) no 18812006 portant fixation de teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires (documentE 5966) ;

- projet de règlement de la Commission modifiant les annexes II et III du règlement (CE) no 3962005 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les limites maximales applicables aux résidus d'aldicarbe, de bromopropylate, de chlorfenvinphos, d'endosulfan, d'EPTC, d'éthion, de fenthion, de fomesafène, de méthabenzthiazuron, de méthidation, de simazine, de tétradifon et de triforine présents dans ou sur certains produits (texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)(documentE 5968) ;

- projet de règlement de la Commission concernant le refus d'autoriser certaines allégations de santé portant sur les denrées alimentaires, autres que celles faisant référence à la réduction du risque de maladie ainsi qu'au développement et à la santé des enfants (documentE 5969) ;

- projet de règlement de la Commission du relatif à l'autorisation et au refus d'autorisation de certaines allégations de santé portant sur les denrées alimentaires et se rapportant au développement et à la santé infantiles (documentE 5991).

Ø Transports

- proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord entre l'Union européenne et le Royaume d'Arabie saoudite sur certains aspects des services aériens (documentE 5945) ;

- recommandation de la Commission au Conseil en vue d'autoriser la Commission à ouvrir des négociations visant à modifier l'accord de transport aérien entre la Communauté européenne et la Confédération suisse (documentE 5981).

l Point B

La Commission a approuvé les textes suivants :

Ø Pêche

- proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un nouveau Protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l'accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République démocratique de São Tomé e Principe (documentE 5907) ;

- proposition de décision du Conseil relative à la signature au nom de l'Union européenne et l'application provisoire du Protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l'accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République démocratique de São Tomé e Principe (documentE 5908) ;

- proposition de règlement(UE) du Conseil relatif à l'attribution des possibilités de pêche au titre de l'accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République démocratique de São Tomé e Principe (documentE 5909) ;

- recommandation de la Commission au Conseil visant à autoriser la Commission à ouvrir des négociations au nom de l'Union européenne en vue du renouvellement du protocole à l'accord de partenariat dans le secteur de la pêche avec le Mozambique (documentE 5947).

Ø Energie

- projet de décision de la Commission du définissant des règles transitoires pour l'ensemble de l'Union concernant l'allocation harmonisée de quotas d'émission à titre gratuit conformément à l'article 10 bis de la directive 200387CE (documentE 5989).

Ø Espace de liberté, de sécurité et de justice

- proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers dans le cadre d'un détachement intragroupe (documentE 5514).

Ø Transports

- projet règlement (UE) de la Commission portant application et modification du règlement (CE) no 5952009 du Parlement européen et du Conseil relatif à la réception des véhicules à moteur et des moteurs au regard des émissions des véhicules utilitaires lourds (Euro VI) et à l'accès aux informations sur la réparation et l'entretien des véhicules (documentE 5857).

l Accords tacites de la Commission

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines nominations), la Commission a pris acte des documents suivants approuvés tacitement :

- conseil d'administration de l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes: - Nomination de Mme Judit Gazsi, membre titulaire hongroise, en remplacement de Mme Zsuzsa Sebestyen, membre démissionnaire (documentE 5994) ;

- conseil d'administration de l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes : - Nomination de Mme Anna Orosz, membre suppléant hongrois, en remplacement de Mme Katalin Kissné Bencze, membre démissionnaire (documentE 5995) ;

- comité consultatif pour la libre circulation des travailleurs - Nomination de Mme Eleni Kalava, membre suppléant chypriote en remplacement de Mme Carola Theodusiou, membre démissionnaire (documentE 5996) ;

- comité consultatif pour la libre circulation des travailleurs - Nomination de M. Stefan Strässer, membre de l'Allemagne en remplacement de Mme Angela Schneider-Bodien, membre démissionnaire (documentE 5997) ;

- proposition de règlement du Conseil clôturant le réexamen intermédiaire partiel des mesures antidumping applicables aux importations de certains types de polyéthylène téréphtalate originaires, entre autres, de la République de Corée (documentE 6000) ;

- proposition conjointe de règlement du Conseil concernant des mesures restrictives à l'encontre de certaines personnes, entités et organismes au regard de la situation en Tunisie (documentE 6001) ;

- projet de décision du Conseil mettant en oeuvre la décision du Conseil concernant des mesures restrictives à l'encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Tunisie (documentE 6002).

La séance est levée à 17 h 45.