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Délégation pour l’union européenne

Séance du 17 octobre 2007 à 9h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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Le Président Pierre Lequiller a rappelé que, conformément à l'article 190 du traité de Nice, et à l'article 21 du protocole annexé au traité d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, le Parlement européen est aujourd'hui composé de 785 membres, les députés bulgares et roumains ayant été ajoutés à la répartition du Parlement prévalant depuis l'élargissement de 2004. Or, et il ne faut pas l'oublier, le traité de Nice lui-même organise une réduction importante des effectifs du Parlement à compter de 2009. En l'absence de décision nouvelle, le traité instituant la Communauté européenne prévoit que les députés européens passeraient de 785 à 736 en 2009, avec une perte maximale de 6 députés pour la France (de 78 à 72), le Royaume-Uni et l'Italie, tandis que les Etats « moyens » d'un point de vue démographique subiraient une réduction d'un député chacun. Seul l'effectif allemand demeurerait stable à 99.

Le Président Pierre Lequiller a souhaité insister sur ce point : tous les Etats perdraient, à l'exception notable des Allemands, en l'absence d'accord.

Le projet de traité réformateur, qui reprend en l'espèce les dispositions agréées dans le traité établissant une Constitution pour l'Europe, est en effet moins « restrictif » que le traité de Nice en ce qu'il élève le plafond des effectifs à 750, soit 14 membres de plus que prévu aujourd'hui pour 2009.

Dans ce contexte, l'enjeu est de parvenir à une répartition de ce surplus à la fois équitable et politiquement acceptable par tous les Etat membres.

MM. Alain Lamassoure et Adrian Severin, rapporteurs du Parlement européen sur la répartition des sièges au Parlement européen après les élections européennes de 2009, sont venus décrire à la Délégation le 19 septembre dernier l'esprit dans lequel ils ont élaboré leurs propositions. La difficulté de leur mission tient aux imprécisions du principe de « proportionnalité dégressive » selon lequel, aux termes de l'article 9 A du projet de traité réformateur, doit être assurée la représentation des citoyens. Il implique que plus un Etat membre est peuplé, plus ses députés européens représentent un nombre élevé de citoyens. Cette définition est ainsi subjective donc politique. Les rapporteurs se sont dès lors efforcés d'élaborer un compromis satisfaisant.

Leur première préoccupation a été d'éviter toute nouvelle diminution de membres pour chaque Etat, à l'exception de l'Allemagne affectée par la définition d'un plafond de 96 députés par Etat membre explicitement prévu dans le projet de traité réformateur. Pour cela, ils ont choisi, sagement, d'utiliser la faculté d'élever à 750 le nombre des députés élus en 2009.

Compte tenu du fait que le même traité impose une représentation minimale de six membres par Etat membre (ce qui impose d'accorder un député supplémentaire à Malte) et réduit de trois membres les effectifs allemands, ce choix permet concrètement de répartir seize nouveaux sièges. A cet effet, les rapporteurs se sont attachés à corriger les imperfections les plus criantes et tenir compte des données statistiques les plus récentes. Aujourd'hui, un député italien représente 816.000 habitants et un député français ou espagnol 875.000. De même, sept ans après avoir connu la même population, l'Espagne et la Pologne jouissent des mêmes effectifs lorsque l'une a, en raison de sa démographie plus favorable, plus de 3 millions d'habitants de plus que l'autre.

Dans un esprit d'équité, le rapport propose d'accorder quatre sièges supplémentaires à l'Espagne, deux à la France (de 72 à 74), à la Suède et à l'Autriche, et un aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, à la Bulgarie, à la Lettonie et à la Slovénie. En outre, dans un souci louable de pragmatisme politique, il est suggéré d'accorder à la Pologne le siège restant.

Il en résulterait une proportionnalité toute relative mais puissamment dégressive. Un député allemand ou français représenterait ainsi environ 850.000 résidents, un italien ou un espagnol 815.000, un grec ou un belge (comme les Etats « moyens ») 250.000 mais un maltais ou un luxembourgeois 70.000. Cela représente néanmoins un très net progrès. Les représentations des Etats selon les blocs de taille auxquels ils appartiennent sont en effet substantiellement améliorées grâce à des corrections équilibrées au sein de ces blocs. La France a tout lieu de s'en féliciter, en lieu et place d'un compromis de Nice qui lui était défavorable.

Il en résulte un système équitable, sans doute le meilleur compromis possible. En tout état de cause, c'est une avancée réelle par rapport à ce que le traité de Nice impose pour 2009.

Le Parlement européen en est conscient : le rapport Lamassoure-Severin a été adopté à une majorité confortable en commission (77 % pour) puis atténuée mais néanmoins solide en plénière (60 % des votants du Parlement européen avec l'abstention des députés italiens cependant).

Il appartient désormais au Conseil d'adopter une décision à l'unanimité sur la base de la proposition du Parlement européen.

Le Président Pierre Lequiller, estimant que l'appui recueilli par le rapport Lamassoure-Severin au Parlement européen est sans doute le plus fort qu'il soit possible d'obtenir, a déclaré s'y associer à titre personnel.

Pour autant, il a tenu à faire part des réticences qu'a pu soulever la proposition.

La première, inéluctable, tient à l'impossibilité de trouver une formule simple et systématique présidant de manière pérenne à la répartition des membres du Parlement européen, à la manière de la règle de double-majorité enfin mise en place pour le Conseil. Dans ce contexte, les prochains élargissements induiront immanquablement la reprise de discussions serrées, mais il n'apparaît guère possible de trouver une formule mathématique intangible compatible avec le principe de « proportionnalité dégressive » des représentations.

Une deuxième inquiétude peut naître de l'« émiettement » des représentations induit par le seuil élevé d'effectifs minima par Etat membre. Ainsi, par exemple, le plancher de six députés pour les Etats les moins peuplés conduirait à doubler la représentation des sept Etats par rapport à ce qu'aurait été celle de l'ex-Yougoslavie, en considération d'une population d'environ 21 millions d'habitants.

Une troisième difficulté réside dans les regrettables réticences éprouvées par nos partenaires italiens, dont le Sénat devrait examiner cet après-midi une proposition de résolution enjoignant son Gouvernement à refuser la répartition proposée. S'ils ne sont pas objectivement défavorisés par les propositions de MM. Lamassoure et Severin (un député italien représentera 815.000 résidents contre 850.000 pour un français), il importe de prendre la mesure symbolique de la rupture de l'égalité de représentation des « grands » (France, Royaume-Uni, Italie) qu'elles induisent. C'est évidemment cet aspect qui explique la virulence des réactions transalpines, quels que soient les arguments techniques développés pour étayer la remise en question de la proposition. A cet égard, les Italiens avancent que le critère de population résidente à laquelle renvoient les chiffres d'Eurostat – utilisés depuis le traité de Rome – pour calculer la répartition des sièges devrait être remplacé par le critère de citoyens, le Parlement représentant les citoyens européens dont la citoyenneté « s'ajoute » à la citoyenneté nationale. Selon l'Italie, le critère de la population résidente tend à favoriser les Etats à politique résolument nataliste ou connaissant une forte immigration.

Le Président Pierre Lequiller a estimé inopportun, techniquement extrêmement complexe et cerné de redoutables difficultés d'application, de revoir un critère qui remonte à la fondation des Communautés. Pour autant, il a noté l'amertume compréhensible d'un Etat modèle de l'intégration communautaire, toujours enthousiaste dans la marche vers l'Europe unie, en saluant le rôle décisif, constant et toujours empreint de bonne volonté de l'Italie dans la modernisation institutionnelle de l'Union, même après l'abandon d'une démarche constitutionnelle dont elle était l'un des plus ardents défenseurs.

Relevant qu'aucun système n'est parfait, il a cependant rappelé que, même selon la répartition proposée par le Parlement européen, l'Italie est significativement mieux « servie » que la France, par exemple, du point de vue du nombre de députés européens par habitant.

Cette constatation introduit une dernière observation. Le projet de traité prévoit que la décision du Conseil sur proposition du Parlement sur la répartition des sièges soit prise « en temps utile avant les élections parlementaires européennes de 2009 ». D'un point de vue juridique, elle n'impose pas un traitement strictement concomitant à l'adoption du traité réformateur et ne doit surtout pas obérer la conclusion d'un accord au cours du Conseil européen de demain.

L'idéal serait bien sûr de boucler le dossier institutionnel une fois pour toutes et s'atteler désormais à progresser dans la définition et la mise en oeuvre des politiques de l'Union. Mais il ne faut pas pour autant prendre en otage l'avenir de l'Europe pour adopter une décision qui, si les réticences sont trop fortes, peut être opportunément réexaminée plus tard et a d'autant plus de chance de faire l'objet d'un accord que les Etats membres savent qu'ils perdraient tous à ne pas réformer la répartition fixée par le traité de Nice.

PermalienPhoto de Régis Juanico

a rappelé qu'il avait été vivement impressionné, lors de son déplacement récent à Rome, par l'indignation soulevée au sein de toutes les tendances politiques italiennes par la proposition de nouvelle répartition des sièges du Parlement européen. L'Italie, Etat fondateur, perçoit la mesure contestée comme une rétrogradation. Elle critique, en sa position de pays d'émigration, le critère de la population résidente qui la défavorise par rapport au critère de la citoyenneté. Peut-on trouver une solution ? La vraie question est celle de la parité avec la France et le Royaume-Uni. Il est difficile d'envisager la cession d'un siège par notre pays. En revanche, la question essentielle est sans doute celle de la pertinence de l'attribution d'un siège à la Pologne pour des raisons politiques. Est-il, en effet, cohérent de récompenser l'un des Etats les plus réticents dans les négociations institutionnelles, et selon des modalités qui interdisent de se laisser une marge de manoeuvre dans les discussions avec l'Italie ?

En réponse, le Président Pierre Lequiller a rappelé que M. Alain Lamassoure avait effectivement indiqué qu'un siège supplémentaire avait été attribué à la Pologne pour des raisons politiques, puis a estimé qu'il était très difficile de revenir dessus. Le vrai problème est celui de la parité entre les trois grands Etats que sont l'Italie, France et le Royaume-Uni. Faut-il tenir compte de la citoyenneté ? C'est délicat dans la mesure où sa définition est différente d'un pays à l'autre. Ainsi, par exemple, certains Polonais ne jouissent pas de la citoyenneté, mais peuvent quand même voter, dans certaines conditions, en Pologne. L'argument invoqué par l'Italie n'apparaît pas praticable. Par conséquent, il convient de s'en tenir à la population des Etats membres telle qu'elle est calculée par Eurostat. Il en est d'ailleurs ainsi depuis l'origine des Communautés.

La question de la parité de représentation des grands Etats relève du Conseil européen et la solution est entre les mains des gouvernements.

Sous le bénéfice de ces observations, la Délégation a ensuite approuvé la résolution du Parlement européen.

Le Président Pierre Lequiller s'est déclaré heureux d'organiser cette réunion avec la commission temporaire du Parlement européen sur le changement climatique. Cette rencontre se situe dans le cadre des réunions interparlementaires et à un moment où, en France, a été mis en place le « Grenelle de l'environnement », cadre de discussions entre les citoyens, les associations, les élus et les pouvoirs publics, à partir desquelles seront dégagées des propositions. Il faut également souligner que le changement climatique a été introduit dans le traité réformateur qui devrait faire l'objet d'un accord au cours du Conseil européen informel de demain à Lisbonne.

Il serait intéressant de présenter les raisons ayant motivé la création de la commission temporaire, ainsi que ses principaux objectifs. En outre, à quelques semaines de la conférence de Bali sur le climat, qui lancera les négociations sur l'après protocole de Kyoto, on peut s'interroger sur la voie à suivre pour que l'Europe puisse faire prévaloir auprès de ses partenaires internationaux des engagements contraignants de réduction des émissions de gaz à effet de serre et la mise en place d'un marché international du carbone. A cet égard, il serait utile de connaître les enseignements que le Parlement européen a retirés de la rencontre organisée par les Nations unies fin septembre et du sommet des principaux pays pollueurs réunis par la suite à l'initiative des Etats-Unis. Enfin, l'Europe se doit d'accompagner les pays en développement dans l'adaptation au changement climatique, phénomène dont ils pourraient être les principales victimes.

PermalienGuido Sacconi, Président de la commission temporaire du Parlement européen sur le changement climatique

, s'est félicité de cette occasion d'établir un contact direct avec le Parlement français, alors qu'au cours des prochains mois, des décisions stratégiques pour nos économies et pour la vie des citoyens européens devront être adoptées. La rencontre interparlementaire organisée par le Président du Parlement européen, M. Hans Gert Pöttering, les 1er et 2 octobre a déjà permis de tisser un réseau de relations avec les parlements nationaux, collaboration particulièrement utile pour mobiliser nos sociétés civiles sans l'appui desquelles les changements globaux qui nous attendent seront difficiles à faire accepter.

La commission temporaire du Parlement européen sur le changement climatique n'existe que depuis quelques mois. Sa création s'inscrit dans un long processus allant de la présentation du rapport Stern jusqu'à l'attribution du prix Nobel de la paix à Al Gore et au Groupement d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Au niveau européen, ces derniers mois ont aussi été marqués par le Conseil européen de mars 2007 qui a pris des engagements, parfois unilatéraux, pour l'après Kyoto mais également en dehors du cadre de ce protocole avec, en particulier, la « règle des trois 20 » d'ici à 2020 (réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre, fixation à 20 % de la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique totale et accroissement de 20 % de l'efficacité énergétique). Il faut aussi mentionner la réunion, sous présidence allemande, du G8 + 5 qui a permis d'imposer de nouveau l'Organisation des Nations unies comme lieu de négociation pour l'après Kyoto. La création de la commission temporaire résulte de ce contexte et de la volonté du Parlement européen de ne plus se limiter à une approche sectorielle et de mettre en oeuvre une analyse globale. Il existe aujourd'hui une prise de conscience générale que la lutte contre le changement climatique n'est plus seulement un sujet environnemental, mais comporte aussi des aspects économiques ayant trait, notamment, à la compétitivité de notre économie et aux relations entre pays riches, pays pauvres et pays émergents. Cette lutte revêt aussi une dimension relative à la sécurité, puisque des centaines de millions de personnes devraient fuir la désertification et la pénurie d'eau. Cette approche globale devrait permettre à la commission temporaire de fournir aux commissions spécialisées du Parlement européen des éléments guidant leur action. Cela s'impose d'autant plus que, le 5 décembre prochain, la Commission européenne va présenter un paquet législatif visant à concrétiser dans la législation la « règle des trois 20 », et que le Parlement européen s'apprête à examiner des propositions communautaires concernant la réduction des émissions de CO2 par les véhicules automobiles ou encore l'intégration de l'aviation dans le système communautaire d'échanges de quotas d'émissions de gaz à effet de serre. La question de l'adaptation au changement climatique est fondamentale et il faut avoir conscience qu'elle ne se pose pas à long terme, mais qu'elle doit être traitée d'ores et déjà sur notre continent. A titre d'exemple, il sera nécessaire de repenser totalement notre agriculture, ce qui implique un énorme effort de recherche. La première mission de la commission temporaire sera donc de fournir une vision intégrée facilitant la mise en oeuvre des législations sectorielles.

Sa seconde mission touchera à la dimension extérieure de ce problème. Cela implique de soutenir les négociateurs communautaires – le Conseil et la Commission – dans leur action pour aboutir à un traité international applicable de façon proportionnée à tous les pays du monde. La première échéance sera évidemment la réunion de Bali en décembre prochain, même s'il ne s'agit que du début d'une négociation devant s'achever en 2009 pour préparer l'après Kyoto. Cette période sera évidemment marquée par les élections aux Etats-Unis, qui empêcheront ce pays de se déterminer avant les résultats de ce scrutin. La commission temporaire va s'attacher à développer une diplomatie interparlementaire. Elle doit se rendre en novembre à Pékin, où le récent congrès du parti au pouvoir vient de placer la question environnementale au centre de ses préoccupations. Elle établira évidemment des contacts avec le Congrès des Etats-Unis et avec d'autres Etats. Pour le moment, elle participe à la préparation d'une résolution du Parlement européen en vue du sommet de Bali. En tout état de cause, cette commission n'en est qu'au début de ses travaux, et le rapporteur va préciser ses orientations futures.

PermalienKarl-Heinz Florenz, rapporteur

, a souligné que le Parlement européen, mais aussi les parlements nationaux et l'ensemble de la population européenne, avaient compris les risques liés au changement climatique et le fait que notre continent avait un rôle majeur à jouer sur cette question. Il faut insister sur le fait que cette question est un défi mais est également une chance. Elle ne doit pas être traitée dans la panique mais avec une véritable volonté de débattre, d'écouter, permettant de déboucher sur des solutions réalistes. Même si, aujourd'hui, 97 % des émissions de CO2 sont d'origine naturelle et 3 % seulement imputables à des activités humaines, il faut s'attacher à réduire l'impact de l'homme sur le climat de la planète, en développant les énergies durables et en veillant à l'efficacité énergétique. Cela ne doit pas empêcher chaque pays membre d'avoir sa propre approche dans le domaine énergétique, mais il faut rechercher la durabilité grâce à des techniques plus propres et grâce à la coordination des actions des pays frontaliers. Notre continent a des responsabilités essentielles dans ce dossier compte tenu de l'importance de ses émissions de gaz à effet de serre.

Des décisions importantes ont été prises au niveau européen qu'il s'agit d'appliquer. La surenchère en matière de fixation d'objectifs est inopérante. Il est préférable de fixer des objectifs réalistes. Il importe donc d'intégrer dans la législation les chiffres proposés par le Conseil européen afin respecter nos engagements et qu'en 2050, la réduction des émissions de CO2 soit réelle. L'inscription de ces principes dans notre législation doit se faire de manière contraignante. C'est un devoir vis-à-vis de nos enfants comme l'a rappelé le Secrétaire général de l'ONU. Il est sur ce point nécessaire de convaincre les citoyens de l'importance de l'environnement dans le cadre communautaire et dans les relations avec nos partenaires internationaux. Une condition préalable doit être remplie : l'Europe doit faire figure de modèle afin de convaincre les pays les plus pauvres, notamment les pays africains de la suivre dans cette voie.

Concernant les échanges de quotas d'émissions de gaz à effet de serre, les intérêts particuliers ont probablement été excessivement privilégiés, ce qui explique l'échec relatif du dispositif actuel. Il faudrait substituer à cet instrument de sanction qui ne sert à personne, un instrument plus incitatif pour moins polluer. Quoi qu'il en soit, il se posera inévitablement la question du partage des responsabilités afin de parvenir à réduire de 20 % les émissions et d'atteindre l'objectif de 20 % d'énergies renouvelables. Ces questions ne pourront être réglées que par un travail en commun.

L'Europe doit avoir par ailleurs une attitude ouverte concernant les nouvelles technologies, par exemple pour la séquestration du CO2. Si les résultats scientifiques montrent que des techniques sont viables, il faudra prendre les décisions qui s'imposent.

Citant l'exemple de l'Allemagne où 51 millions de véhicules sont en circulation, chacun émettant au moins 130 grammes de CO2par kilomètre parcouru, il a mis l'accent sur l'urgence de la mise en oeuvre de solutions réalistes.

Il a souligné la nécessité de réviser la directive sur l'efficacité énergétique des bâtiments, son application laissant à désirer car trop de concessions ont été faites. Il est possible de réaliser en la matière des économies afin de les réinvestir pour qu'il n'y ait pas de perdants. Pour cela, des appuis doivent être trouvés auprès des industriels et de tous les acteurs souhaitant assumer leurs responsabilités. La hausse du prix de l'énergie est subie par tous et il est indispensable d'être solidaires.

Il a précisé que l'Allemagne, grâce à une politique de gestion des déchets, est parvenue à économiser 46 millions de tonnes d'émissions de CO2. Ces politiques énergétiques, comme par exemple la réduction du méthane, constituent indéniablement une carte de visite pour l'Europe.

Participant depuis 1991 aux négociations de Kyoto, il fait observer qu'on ne peut convaincre que si on est soi-même convaincu.

Il a conclu sur la nécessité d'agir en toute sérénité tout en restant réaliste. Il ne faut pas perdre de temps et adopter rapidement une législation contraignante. C'est notre devoir non seulement pour les Etats membres mais aussi vis-à-vis de tous les autres pays. Si la politique des Etats–Unis ne recueille pas notre accord, il faut toutefois reconnaître que certains industriels américains semblent fermement décidés à développer des industries propres, indépendamment de toute législation.

L'Europe doit être prête et faire tout ce qu'elle peut faire pour protéger le climat et les populations.

PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

s'est réjoui d'entendre MM. Guido Sacconi et Karl-Heinz Florenz sur un sujet qui mobilise de façon prégnante l'opinion européenne et internationale. Les efforts de l'Union européenne et particulièrement ceux du Parlement européen doivent être salués et leurs idées devraient inspirer les politiques nationales des Etats membres et de tous les autres pays.

L'Union européenne a élaboré une feuille de route et posé des objectifs chiffrés : 30 % de réduction des émissions de gaz à effets de serre en 2020 et de 60 à 80 % en 2050 par rapport à 1990. Il a toutefois fait observer que des difficultés apparaîtront après Kyoto quand il faudra négocier sur ce qu'il convient de faire après 2012.

Par ailleurs, la contre offensive des Etats-Unis et des pays alignés est problématique dans la mesure où ils n'ont pas la même approche que l'Europe et ne souhaitent pas élaborer en commun une liste des objectifs à atteindre. Les Etats-Unis se réfugient derrière l'idée que l'on peut laisser faire la technologie et ont une vision du changement climatique qui n'est pas dissociée du contexte global, notamment économique et industriel. Il a souhaité savoir quels contacts ont été pris entre le Parlement européen et les Américains afin de lever ce blocage et a insisté sur la nécessité d'établir des relations non seulement avec l'administration Bush mais aussi avec les Républicains qui pourraient être au pouvoir après les élections de 2008. Ces contacts sont importants dans la perspective de la conférence de Bali en décembre. L'attribution du prix Nobel de la paix à Al Gore doit être saluée et changera peut-être la donne.

PermalienPhoto de Michel Delebarre

s'est également félicité de l'initiative du Parlement européen d'avoir structuré son action sur une question dont les enjeux sont fondamentaux. Le Parlement européen s'est montré optimiste en créant une « commission temporaire » et, dans la mesure où les problèmes seront pérennes, il sera sans doute nécessaire d'ajuster cette appellation.

Il a souligné que même si l'Union européenne se montre exemplaire dans la lutte contre le réchauffement climatique, dans la mesure où il s'agit d'un problème mondial, elle supportera inévitablement les conséquences des politiques des autres pays. En tout état de cause, afin de peser de tout son poids dans les négociations et avoir un effet d'entraînement sur les autres pays, l'Europe se doit d'être un modèle.

Il a indiqué souscrire aux objectifs de l'Union européenne mais a soulevé des interrogations sur les modalités de leur mise en oeuvre. Il a tout d'abord fait remarquer que toutes les déclarations au niveau européen ne seront d'aucun effet si les Etats membres ne participent pas à leur application. Il faudrait aller plus loin dans la subsidiarité et insister sur la responsabilité des collectivités locales en la matière. Une proportion importante de la pollution est le fait du chauffage, des logements et des transports qui relèvent d'une gestion territoriale. Pour plus d'efficacité, il est donc nécessaire d'impliquer chaque niveau de gouvernance.

Par ailleurs, l'Union européenne doit mettre plus de transversalité dans l'élaboration de ses différentes politiques, la main gauche ne pouvant ignorer ce que fait la main droite. On doit veiller à ce que la politique agricole ou la politique de recherche, par exemple, répondent aux critères posés en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

Enfin, mentionnant la diffusion dans la presse d'une carte sur les possibles conséquences de l'élévation du niveau des mers sur les côtes au vingt et unième siècle, il a craint les risques de panique dans la population. La population sera attentive et il sera indispensable de lui donner des informations précises à la fois sur l'exactitude des risques encourus et sur les mesures qui sont envisagées.

Il a souligné le paradoxe américain, pays responsable de la plus grande pollution mais d'où est originaire le prix Nobel de la paix qui donne des leçons de vertus; pays où l'on construit le plus de véhicules mais où les constructeurs ont déclaré leur volonté de fabriquer des voitures propres et où le gouverneur de Californie a officiellement déclaré que ne seraient plus admises des constructions néfastes pour l'environnement.

En conclusion, il a insisté sur la nécessité d'élaborer, au plan international, une fiscalité vertueuse sans laquelle les choses ne pourront pas avancer.

PermalienPhoto de André Schneider

après s'être félicité de cette audition et évoqué le rapport qu'il avait déposé voilà deux ans sur l'Après pétrole en Europe (n° 2839), relatif au Livre vert de la Commission européenne sur l'efficacité énergétique, a constaté que l'on n'en était encore qu'aux recommandations dans ce domaine. Il s'est demandé si celles-ci seront suffisantes pour l'échéance de 2012 et s'il ne serait pas opportun de prévoir des contraintes assorties d'un système d'encouragements et de « bons points ».

Il a estimé que s'occuper de l'Europe seule ne suffisait pas. Il faut se poser le problème de l'aide à apporter à l'Afrique pour que des mesures soient prises dans ce domaine, et, notamment, en matière de préservation et de bonne gestion de la forêt.

PermalienPhoto de Gérard Voisin

a remercié le Parlement européen d'avoir créé cette commission qui va stimuler les actions des parlements nationaux en matière de changement climatique. Même si la majorité des députés français n'est pas en pointe sur ce dossier, un travail important vient cependant d'y être lancé à l'occasion du Grenelle de l'environnement qui a présenté des préconisations fortes dans ce domaine. Celles-ci devraient se concrétiser dans un projet de loi au début de 2008.

Il a ensuite insisté sur la nécessité du travail en amont des commissions des parlements nationaux, qui doivent alimenter la réflexion de la commission temporaire du Parlement européen afin d'éviter que ne soient adoptées des solutions qui seraient mal reçues.

En conclusion, il a considéré que la mission de l'Europe est, d'une part, de montrer qu'elle fait un travail important dans ce domaine, notamment au sein des parlements nationaux et du Parlement européen et, d'autre part, de tirer et d'entraîner les pays qui ne font pas d'effort, y compris les plus puissants d'entre eux.

PermalienPhoto de Jérôme Bignon

a constaté qu'il y avait une alliance entre les Etats-Unis et les pays émergents dans le refus de prendre conscience de la nécessité de lutter contre les gaz à effet de serre. C'est une curieuse entente entre ceux qui polluent le moins et celui qui pollue le plus car ces pays émergents émettent 2 tonnes de CO2par habitantet les Etats-Unis, 23 tonnes, l'Europe en étant à 10 tonnes. Il faut donc que l'Europe, même si elle est développée, se rapproche le plus possible de ces pays.

Il a considéré que le problème climatique ne sera pas résolu sans prendre en compte le modèle économique qu'il sera nécessaire d'adopter pour permettre le ralliement des pays émergents. Car il est difficile, d'une part, de leur expliquer que même si l'Europe a énormément pollué pour se développer, ils ne doivent pas maintenant faire de même et, d'autre part, de les stigmatiser alors que leurs émissions polluantes sont cinq fois moins importantes que les nôtres.

Après avoir évoqué l'action d'une association qu'il préside, associant tourisme et développement durable, il a souhaité que soit menée, afin de trouver l'accord du plus grand nombre, une importante réflexion sur la construction d'un nouveau modèle économique, non seulement pour l'Europe mais aussi pour le reste du monde.

PermalienPhoto de Didier Quentin

après avoir approuvé les propos de M. Jérôme Bignon, a déclaré que les conclusions du Grenelle de l'environnement nourriraient les propositions de la prochaine présidence française. Celles-ci pourraient concerner la recherche dans le domaine de l'environnement, le lien entre libéralisation des marchés et environnement, la fiscalité environnementale, le renforcement de la direction générale de l'environnement, l'élaboration d'une plateforme sur la biodiversité avec la création à Bruxelles d'un poste sur ce thème et la création d'une Union interparlementaire sur les problèmes de l'environnement.

Il a conclu son intervention en souhaitant que la Délégation pour l'Union européenne soit associée à ce mouvement.

En réponse aux intervenants, le Président Guido Sacconi a apporté les précisions suivantes :

- le règlement du Parlement européen permet le renouvellement des commissions temporaires et la proposition de renouveler le mandat de la commission jusqu'à la fin de la législature sera certainement faite;

- il est possible d'établir un lien entre la lutte contre le changement climatique et la modification du modèle économique européen et mondial ;

- il ne sera pas possible d'arriver à une conclusion politique lors des prochaines négociations internationales de Bali si on ne trouve pas de convergence sur une feuille de route entre les anciens pays industriels, les nouveaux et ceux qui ne le sont pas du tout ;

- le Parlement européen est modérément optimiste sur la suite des négociations compte tenu de l'attitude des Etats-Unis, mais la situation a changé car l'opinion publique est maintenant attentive à ces questions ;

- les Etats-Unis ont eux-mêmes modifié leur attitude car, après s'être situés à l'extérieur de l'accord de Kyoto, ils ont maintenant accepté que des objectifs soient définis tout en refusant toujours qu'ils soient obligatoires : la porte peut donc être considérée comme entr'ouverte ;

- la dimension économique est maintenant double car il y a un coût pour l'absence de pollution et un autre pour la réparation des dégâts ;

- il faut faciliter le développement d'un grand marché pour les techniques à faibles émissions, sans nécessairement parler de « nouvelle révolution industrielle ». Celles-ci sont cependant liées à de nouvelles sources d'énergie et il faut aller vers une économie à faible teneur en carbone ;

- ce problème ne peut pas être traité uniquement avec des directives ou des règlements. Tous les niveaux de compétences – national, régional, local – devront être des acteurs ;

- il faut rendre les relations interparlementaires plus étroites. Des informations pourraient être échangées en permanence au niveau des secrétariats avec la possibilité d'un système en ligne ;

- la recherche en environnement est en retard malgré les efforts coordonnés par le GIEC ;

- l'étude des nouvelles sources d'énergie marque le pas et des techniques comme le stockage du CO2,sont quasiment prêtes, mais il y a un désinvestissement dans la recherche de solutions de long terme ;

- il y a des retards pour l'adaptation des projections à moyen terme des conséquences du réchauffement climatique selon les régions.

En tout état de cause, il importe de développer la coopération scientifique afin de parvenir à une voie de développement qui soit différente de la nôtre.

PermalienKarl-Heinz Florenz, rapporteur

a apporté les réponses suivantes :

- le bilan que l'Allemagne peut présenter en matière environnementale est bon grâce aux efforts entrepris après la réunification ;

- il va de soi que l'Europe doit parvenir à convaincre les Etats-Unis et à les amener à la table des négociations, bien qu'il faille aussi y intégrer les économies émergentes et les pays africains. Le débat est surtout de nature scientifique et nécessite une synergie fondée sur la coopération dans les domaines scientifique, technologique et économique ;

- l'énergie nucléaire a un rôle à jouer, même si avec le Président Guido Sacconi, nous n'avons pas des positions similaires ;

- l'Allemagne a déjà pris des mesures d'adaptation dans le domaine de la protection contre les inondations, mais il serait intéressant de connaître l'action de la France dans ce domaine ;

- l'Europe doit encore réfléchir au « partage du fardeau » des quotas d'émission qu'il convient de ne pas accroître, car déjà la question des 20 % n'est pas simple à régler. Ainsi en Allemagne, la perspective du stockage du carbone suscite des protestations car, en ce qui concerne – par exemple – la production de biomasse, les agriculteurs rencontrent des difficultés pour répondre rapidement aux incitations ;

- la politique fiscale est un sujet très sensible au niveau communautaire. C'est pourquoi la taxation des véhicules selon leurs émissions de CO2 pourra être un projet délicat à mettre en oeuvre ;

- on ne peut procéder à des investissements et accroître les dépenses dans le domaine environnemental que si les Etats membres s'engagent dans cette voie, comme c'est le cas aux Etats-Unis ;

- le secteur automobile doit jouer un rôle important mais, pour l'instant, M. Karl-Heinz Florenz n'a pas l'impression qu'existe le soutien nécessaire en vue d'atteindre les objectifs fixés pour 2012 en termes d'émissions de CO2 ;

- en tout état de cause, il n'est pas nécessaire d'attendre la réponse des Etats-Unis, bien que l'on constate que des pays de l'Union européenne refusent également le principe de contraintes et plaident plutôt pour des accords sur une base volontaire conclus entre les Etats. Il convient d'adopter dans la perspective de la conférence de Bali une attitude réaliste, afin de pouvoir obtenir le soutien des Etats tiers et de ne pas suivre l'exemple de M. Jürgen Trittin, alors ministre de l'environnement de l'Allemagne, qui avait plaidé à la conférence mondiale sur le climat de Buenos Aires en faveur de l'intégration de l'objectif des 20 % dans un traité international sous l'égide de l'ONU ;

- on peut comprendre la réaction de certains Africains, qui mettent l'accent sur le développement à tout prix. Mais il est aussi important de réfléchir aux conditions d'un développement technologique tenant compte des exigences environnementales.

Le Président Pierre Lequiller, après avoir remercié MM. Karl-Heinz Florenz et Guido Sacconi, a déclaré qu'il convenait – conformément à leurs propositions – de multiplier les contacts avec le Parlement européen et s'est félicité que cette rencontre ait pu se dérouler au moment même où la France a ouvert un grand débat sur l'environnement.

Le Président Guido Sacconi a dit avoir apprécié les documents qu'il avait pu consulter sur Internet concernant les méthodes employées dans le cadre du « Grenelle de l'environnement ».