La Commission a examiné, sur le rapport de M. Philippe Goujon, le projet de loi, adopté par le Sénat, instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté (n° 114).
, a rappelé que l'Assemblée nationale est saisie en première lecture d'un projet de loi, adopté par le Sénat le 31 juillet dernier, créant une nouvelle autorité indépendante chargée d'exercer un contrôle extérieur, indépendant et effectif de l'ensemble des lieux de privation de liberté, qui comprennent notamment les établissements pénitentiaires, les locaux de garde à vue, les dépôts des palais de justice, les centres hospitaliers spécialisés ou les centres de rétention administrative. Innovation du projet de loi, ce contrôle est confié à une autorité unique, qui aura ainsi une vue d'ensemble des lieux de privation de liberté dans notre pays.
Le rapporteur a indiqué que ce texte fait l'objet d'une attente forte, y compris des administrations en charge de ces lieux et des personnels de surveillance, comme il a pu le constater, de même que certains de ses collègues qui l'accompagnaient, lors des auditions auxquelles il a procédé pour la préparation de l'examen de ce texte.
Il a fait valoir que l'entrée d'un nouveau regard extérieur dans un lieu clos présente le double intérêt de prévenir d'éventuels abus, les lieux de privation de liberté étant par nature des lieux de violence – une violence légitime, institutionnelle, mais aussi une autre violence, non légitime celle-là, entre les personnes privées de liberté – et de lever la suspicion sur les conditions de traitement des personnes enfermées.
Le rapporteur a rappelé que si le projet de loi s'inscrit dans un contexte international, puisqu'il permet à la France de respecter les stipulations du Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, signé en septembre 2005 et qui doit être ratifié avant septembre 2008, il est surtout la marque d'une volonté forte du Gouvernement de mettre en place rapidement un tel contrôle. Le protocole prévoit en effet la mise en place d'un « mécanisme national de prévention » indépendant dans un délai maximum d'un an après la ratification du protocole. La France prend donc un peu d'avance avec ce projet de loi puisque le mécanisme national sera mis en place avant même que les accords internationaux ne l'y obligent. L'inscription de ce texte à l'ordre du jour des deux sessions extraordinaires du Parlement, qui aura permis un examen dès les tout premiers jours de la législature, souligne le volontarisme gouvernemental que le rapporteur a tenu à saluer.
Le rapporteur a indiqué que le projet de loi a été adopté par le Sénat en première lecture le 31 juillet dernier, sans qu'aucune voix ne se prononce contre le texte. Il a rendu hommage à l'excellent travail réalisé par la Haute Assemblée, qui a notablement amélioré, précisé et enrichi le texte : pas moins de 26 amendements parlementaires ont été adoptés, certains émanant de l'opposition. Les garanties accompagnant le statut du Contrôleur général ont été accrues, notamment sur le fondement des recommandations du rapport de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation présenté en 2006 par M. Patrice Gélard sur les autorités administratives indépendantes.
Le rapporteur a souligné qu'en matière de contrôle extérieur, l'état de la réflexion est déjà bien abouti dans notre pays. L'excellent rapport de la commission présidée par M. Guy Canivet, qui avait été chargée en 1999 par Madame Elisabeth Guigou, alors Garde des Sceaux, « d'étudier les manières d'améliorer le contrôle extérieur des prisons », plaidait pour l'instauration d'un contrôle extérieur des prisons indépendant, distinct des fonctions de médiation et chargé de contrôler les conditions générales de la détention. Ce même rapport dénonçait également l'éclatement des contrôles existants.
Le rapporteur a rappelé que les lieux d'enfermement sont d'ores et déjà soumis à de nombreux contrôles qui apparaissent cependant dispersés et limités. Il a jugé de ce point de vue paradoxale la situation des établissements pénitentiaires : peu d'administrations sont en effet soumises à un nombre aussi élevé de contrôles et pourtant ceux-ci apparaissent insuffisants, du fait de leur éclatement.
Le rapporteur a ensuite présenté les dispositions du projet de loi. Il a indiqué que le Contrôleur général sera nommé pour un mandat unique de 6 ans, par décret du Président de la République, le Sénat ayant introduit par amendement un avis préalable des commissions compétentes du Parlement. Le Contrôleur général sera assisté de contrôleurs qui seront recrutés en raison de leur compétence dans les domaines se rapportant à leur mission, les fonctions de contrôleur étant incompatibles avec l'exercice d'activités en relation avec les lieux contrôlés.
Le rapporteur a appelé l'attention des commissaires aux Lois sur l'importante distinction entre les deux modes de saisine du Contrôleur général. Le projet de loi prévoit en effet que toute personne physique, ainsi que « toute personne morale s'étant donnée pour objet le respect des droits fondamentaux » peut porter de tels faits ou situations à la connaissance du Contrôleur général, qui appréciera l'opportunité des suites à donner à cette information, étant entendu que la loi lui donne le pouvoir de s'autosaisir. Certaines autorités politiques et certaines autorités administratives indépendantes pourront quant à elles véritablement saisir le Contrôleur général : il s'agit du Premier ministre, des membres du Gouvernement, des Parlementaires, du Médiateur de la République, du Défenseur des enfants, du Président de la CNDS et du Président de la HALDE.
Le Contrôleur général exercera un contrôle étendu : tous les lieux de privation de liberté sont visés par le contrôle. L'absence de liste permet d'éviter tout risque d'oubli. Ainsi, les véhicules servant au transport des personnes privées de liberté devraient également relever de ce contrôle, étant rappelé que le Sénat a par ailleurs complété le premier alinéa de l'article 6 pour prévoir expressément la compétence du Contrôleur général en matière d'hospitalisation sous contrainte dans les hôpitaux privés.
Rappelant que la question de la compétence territoriale du Contrôleur général a été soulevée au Sénat, le rapporteur a indiqué que l'état de sa réflexion le poussait à ne pas vouloir remettre en cause la limitation par le projet des compétences du Contrôleur général au seul « territoire de la République », excluant ainsi les théâtres d'opérations extérieures de l'armée française.
Abordant l'important sujet des visites sur place, qui constitueront la modalité principale du contrôle, le rapporteur a jugé que le Sénat avait utilement supprimé l'information préalable des autorités responsables des lieux que le projet de loi prévoyait dans sa version initiale : les visites pourront être planifiées à l'avance ou inopinées, les deux ayant leur intérêt propre. À l'issue de chaque visite, le Contrôleur général établira un rapport faisant état de ses observations et des réponses de l'administration, dont le Sénat a rendu la publication systématique.
S'agissant des suites données aux contrôles, le rapporteur a indiqué que le Contrôleur général pourra émettre des avis et formuler des recommandations à l'administration. Il n'est en revanche pas doté d'un pouvoir d'injonction, l'objectif du projet de loi étant d'instaurer un climat de confiance avec les autorités responsables des lieux contrôlés. L'« arme » la plus puissante dont dispose le Contrôleur général réside in fine sans doute dans la publicité qu'il peut donner à ses avis et recommandations et dans son rapport annuel public.
Le rapporteur a ensuite fait part des trois préoccupations majeures qui ont guidé sa réflexion sur le projet de loi. La première a trait au statut du Contrôleur général et des contrôleurs auxquels il pourra déléguer ses pouvoirs. Le Sénat a apporté de très nombreuses garanties quant à l'indépendance du Contrôleur général, notamment au travers d'un régime complet d'immunités, d'incompatibilités et d'inéligibilités. Le décret en Conseil d'État qui sera pris en application de la loi devra conférer ce même type de garanties aux contrôleurs et devra réussir la difficile conciliation de l'exigence de leur indépendance et leur nécessaire compétence.
La seconde préoccupation concerne le contexte international dans lequel s'insère cette nouvelle autorité : le législateur doit veiller à ce que la loi respecte au mieux les stipulations du protocole facultatif de l'ONU que la France devra prochainement ratifier, avec les nécessaires adaptations aux spécificités de notre droit.
La troisième préoccupation majeure concerne la nécessaire mise en cohérence des différents contrôles qui vont coexister. Si la pluralité des mécanismes de contrôle n'est pas une mauvaise chose en soi, puisqu'elle garantit des visites régulières des différents lieux, il n'en est pas moins nécessaire de clarifier les compétences des différents organes de contrôle, pour éviter leur déresponsabilisation, et de les coordonner, pour éviter la démobilisation des administrations en charge des lieux contrôlés, confrontées à une multiplication désordonnée des contrôles.
Cette coordination ne passe sans doute pas par la loi, mais par des sortes de protocoles que les différentes instances pourraient passer entre elles pour éviter les doublons. La suggestion du rapport de M. Guy Canivet de créer, en remplacement de la commission de surveillance de chaque établissement pénitentiaire, une « conférence d'établissement », qui se réunirait chaque année dans chaque établissement pour confronter les différents contrôles entre eux et assurer un réel suivi mérite également d'être prise en compte.
Après avoir rappelé qu'un projet de loi pénitentiaire serait prochainement débattu au Parlement, qui serait l'occasion d'évoquer à nouveau ces sujets, le rapporteur a invité les commissaires aux Lois à adopter le projet de loi au bénéfice des amendements qu'il a déposés.
s'est félicité que l'examen de ce projet de loi ait pu être inscrit à l'ordre du jour de la seconde session extraordinaire. L'idée de mettre en place un contrôle des lieux de privation de liberté avait déjà été abordée non seulement dans le rapport de M. Guy Canivet cité par le rapporteur, mais aussi dans plusieurs propositions de loi antérieures.
Si le projet de loi s'inspire visiblement de l'expérience britannique dans ce domaine, il aurait été souhaitable de mentionner également d'autres expériences louables qui ont été conduites dans divers pays européens. Ainsi, le précédent Garde des Sceaux, M. Pascal Clément, s'était inspiré du système en vigueur en République tchèque pour envisager de confier des pouvoirs étendus au Médiateur de la République.
Le projet de loi soumis à la représentation nationale est ambitieux, mais la crédibilité de la nouvelle institution qu'il crée dépendra largement des moyens dont elle disposera pour remplir la mission qui lui est assignée. L'article 3 du projet de loi prévoit que le Contrôleur général sera assisté de contrôleurs recrutés en raison de leurs compétences ; dans le même esprit, il serait utile de préciser que le Contrôleur général pourra disposer d'un délégué dans chaque région française.
Par ailleurs, s'il est prévu que le Contrôleur général dispose du droit de visiter, à tout moment, tout lieu de privation de liberté, on peut s'interroger sur la portée réelle et la prise en compte, en particulier par l'administration pénitentiaire, du rapport et des observations qu'il formulera. À cet égard, il serait utile de faire référence aux règles pénitentiaires européennes, qui ont été adressées récemment à tous les détenus, ainsi qu'aux parlementaires.
a jugé positif l'examen de ce projet de loi, en dépit des incertitudes pesant sur son contenu, et a souligné que l'opposition s'efforcerait d'enrichir ce dernier, comme elle l'a fait au Sénat.
Il est toutefois regrettable que le champ de compétences du nouveau Contrôleur général reste imprécis, ne serait-ce qu'en raison des chiffres discordants évoqués pour le nombre de lieux susceptibles d'être contrôlés.
L'idée de créer un Contrôleur général des lieux de privation de liberté n'est pas nouvelle, puisque Mme Elisabeth Guigou, alors Garde des Sceaux, avait déjà lancé des investigations à ce sujet en 1999, et que des rapports avaient été rédigés non seulement par M. Guy Canivet, mais aussi par M. Jacques Floch.
Par ailleurs, il est regrettable que, malgré l'importance des exigences internationales dans ce domaine, le Gouvernement n'ait pas saisi la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) sur le contenu de ce projet de loi. De même, il aurait été plus sage de reprendre d'emblée les exigences du Protocole facultatif des Nations unies à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
On peut en outre s'interroger sur le caractère effectif du futur contrôle, car les modalités de nomination du Contrôleur général sont perfectibles et l'importance des crédits qui lui seront accordés sera déterminante.
Par ailleurs, le choix de limiter la compétence géographique du Contrôleur général au seul territoire français est contestable, car les Nations unies préconisent d'inclure les espaces qui, à l'étranger, sont placés sous le contrôle militaire du pays concerné.
Les membres du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche proposeront une série d'amendements visant à lever les nombreuses restrictions qui, dans le projet de loi, limitent les pouvoirs du Contrôleur général à de simples constats. En effet, si le fait de dénoncer et de rendre publiques les situations les plus inacceptables est indispensable, il est également nécessaire de donner au Contrôleur général un pouvoir d'injonction pour les atteintes les plus extrêmes aux droits de l'Homme, faute de quoi il sera réduit à l'impuissance. L'effectivité du contrôle dépendra également des conditions de publicité des observations formulées par le Contrôleur général.
Plus généralement, la création de cette institution doit conduire le législateur à s'interroger sur la prolifération, depuis plusieurs années, des autorités administratives indépendantes (AAI), dont il est d'ailleurs impossible d'établir une liste précise et consensuelle. Cette situation devrait conduire à une réflexion profonde sur le rôle du Médiateur de la République, ainsi qu'à la mise en place de mécanismes de coordination de l'activité de ces différentes autorités.
a estimé que le Médiateur de la République aurait pu assurer les missions que le projet de loi propose de confier au Contrôleur général des lieux de privation de liberté et qu'une telle solution permettrait d'éviter de multiplier les structures administratives. Il a ainsi souligné que cinq institutions étaient déjà compétentes en matière de prisons. Outre le Contrôleur général dont la création est proposée, il s'agit de l'Inspection des services pénitentiaires, du Médiateur de la République, de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité ou encore du Défenseur des enfants. Il a estimé que, même si leurs missions étaient différentes, la multiplication des organismes intervenant en matière de détention constituait une difficulté pratique pour l'administration pénitentiaire. Il a également ajouté que confier les missions du Contrôleur général au Médiateur de la République permettrait une économie de moyens. En effet, celui-ci dispose d'ores et déjà de moyens importants, alors que la création d'une nouvelle autorité administrative suppose des dépenses nouvelles, ne serait-ce que pour mettre à sa disposition des locaux. Rappelant que certains objectent que les missions de médiation et de contrôle ne peuvent être confondues, il a estimé au contraire que le rapport de M. Guy Canivet admettait qu'un organisme puisse cumuler ces deux missions, ainsi d'ailleurs qu'une fonction d'inspection. Il serait parfaitement envisageable que deux services distincts soient créés au sein de la médiature de la République. Soulignant que l'actuel Médiateur de la République avait accompli un important travail d'expertise sur les compétences de ses homologues étrangers, il a précisé que dans de nombreux pays, la mission de contrôle des lieux de privation de liberté est confiée au Médiateur. Il s'est enfin demandé si le choix du Gouvernement de ne pas étendre les compétences du Médiateur de la République n'était pas lié à la personnalité même du titulaire du poste.
Répondant aux différents orateurs, le rapporteur s'est félicité de constater l'unanimité qui s'est faite sur l'intérêt d'instaurer un Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Il a aussi rendu hommage aux travaux et rapports rendus sur ce sujet.
Répondant à M. Michel Hunault, il a indiqué que le présent projet de loi est plus ambitieux que l'exemple britannique, dont il a pu se faire une idée précise, lorsqu'il a accompagné le Garde des Sceaux à Londres. Lors de cette visite, l'Inspectrice chef des prisons s'est montrée impressionnée par l'ambition du texte français qui permettra au Contrôleur général, contrairement à son homologue britannique, de contrôler l'ensemble des lieux de privation de liberté et non les seuls établissements pénitentiaires.
Abordant la question des moyens budgétaires, le rapporteur a rappelé qu'elle relève de la loi de finances. Le Garde des Sceaux a indiqué devant le Sénat que les crédits alloués au Contrôleur général seront appelés à croître au cours du temps avec la montée en charge progressive des contrôles. À ce sujet, le rapporteur a rappelé qu'en Grande-Bretagne, lorsque l'Inspecteur chef des prisons a commencé son activité en 1981, il n'était accompagné que de six collaborateurs.
Pour ce qui est de la proposition de créer des contrôleurs régionaux, le rapporteur a émis un avis défavorable, considérant que, si la loi doit fixer avec précision le statut et les garanties d'indépendance du Contrôleur général, elle ne doit en revanche pas enfermer dans des contraintes trop strictes les modalités pratiques d'organisation du contrôle, qui relèvent de la compétence du Contrôleur général, autorité indépendante.
Le rapporteur a rappelé également qu'en matière de pouvoirs d'investigation, le Sénat avait apporté une avancée importante en supprimant l'obligation, contenue dans le projet de loi initial, d'information préalable des autorités responsables du lieu contrôlé.
S'agissant de l'importante question du pouvoir d'injonction, évoquée tant par M Jean-Jacques Urvoas que par M. Michel Hunault, le rapporteur a indiqué qu'il ressortait clairement des auditions qu'il avait menées qu'il n'était pas souhaitable de doter le Contrôleur général de ce pouvoir. En la matière, la persuasion doit être préférée à la contrainte et la confiance à la conflictualité, sur le modèle britannique. Il a en revanche indiqué avoir déposé un amendement qui instaure une procédure d'urgence et constitue à ses yeux un bon compromis entre cette nécessaire culture de la confiance et la nécessité de mettre un terme rapide aux situations jugées les plus inacceptables.
Le rapporteur a aussi tenu à rappeler que le Contrôleur général aura la possibilité de rendre publics ses avis et recommandations. S'il ne faut sans doute pas rendre cette publication systématique, il est en revanche souhaitable que cette publication soit la plus fréquente possible, car elle constituera un moyen de pression très fort du Contrôleur général sur l'administration.
Répondant à M. Michel Hunault, le rapporteur a rappelé que les règles pénitentiaires européennes sont contenues dans une recommandation du Conseil de l'Europe. Si elles constituent un texte de référence, très largement diffusé par l'administration pénitentiaire, elles n'ont en revanche pas de valeur contraignante en droit français. Elles ont par ailleurs un champ d'application bien moins large que le présent projet de loi.
Répondant à M. Jean-Jacques Urvoas, le rapporteur a indiqué qu'il était souhaitable que le projet de loi ne fournisse pas de liste des lieux de privation de liberté visés par la loi, dans le but de prévenir tout risque d'oubli. Tout lieu où des personnes sont privées de la liberté d'aller et de venir relève de ce cadre. Il en va ainsi des fourgons cellulaires servant aux transfèrements, comme des Centres éducatifs fermés.
S'agissant des opérations extérieures de la France, le rapporteur a indiqué s'être beaucoup interrogé sur cette question. Le projet de loi limite le champ de compétence du Contrôleur général au seul « territoire de la République ». Une telle solution se justifie pour plusieurs raisons : ces lieux sensibles posent des problèmes de sécurité évidents ; la réforme du régime disciplinaire des armées intervenue en 2005 a par ailleurs supprimé les locaux des arrêts ; enfin, la nature même des opérations militaires dans lesquelles l'armée française est engagée, qui sont essentiellement des opérations de maintien de la paix sous l'égide de l'ONU, rendent ce contrôle inutile puisque dans ce cadre, les conventions prévoient un contrôle international de ces lieux.
Répondant à l'objection relative à la conformité partielle du projet de loi au protocole facultatif de l'ONU, le rapporteur a indiqué que le projet s'inspire très largement des dispositions du protocole et reprend même directement certaines formulations employées. Certains amendements seront défendus qui rapprocheront encore le texte des stipulations du protocole. Pour autant, la loi ne doit pas être la copie du protocole car elle doit tenir compte des spécificités de notre législation. Certaines traductions de termes anglais sont par ailleurs étrangères à notre culture juridique.
Répondant à la critique liée à la multiplication des autorités administratives indépendantes, le rapporteur a estimé que le législateur devrait à terme faire un choix entre une multiplicité d'autorités indépendantes, chargées de veiller au respect des droits fondamentaux dans certains secteurs, et la création d'un réel Ombudsman qui serait chargé de remplir ces différentes fonctions. Le rapporteur a jugé qu'il s'agissait d'un débat important qui ne pouvait être tranché à l'occasion de l'examen de ce texte.
Répondant à M. Christophe Caresche qui s'interrogeait sur l'opportunité de confier la mission de contrôleur au Médiateur de la République, le rapporteur a rappelé que ces deux fonctions sont distinctes, le contrôle étant une évaluation des conditions générales de la privation de liberté alors que la médiation recouvre l'instruction des plaintes individuelles. Il a aussi rappelé que le rapport de M. Guy Canivet préconisait en son temps la création de deux entités distinctes et qu'en Grande-Bretagne, les fonctions de contrôle et de médiation sont distinctes, ces dernières étant assurées par le Médiateur des prisons.
La Commission est ensuite passée à l'examen des articles.
Article 1er : Statut et champ de compétence du Contrôleur général :
La Commission a adopté un amendement de précision du rapporteur.
Elle a examiné un amendement présenté par M. Michel Hunault prévoyant, afin de renforcer le rôle du Contrôleur général et de l'inscrire dans une perspective européenne, que celui-ci s'assure du respect, par l'administration pénitentiaire, des règles pénitentiaires établies par le Conseil de l'Europe. L'auteur de l'amendement a donné pour exemple la nécessité pour le Contrôleur général de s'assurer qu'un chef d'établissement n'abuse pas du « mitard », dont l'usage est désapprouvé par le Conseil de l'Europe.
Le rapporteur ayant précisé que les règles visées n'avaient pas de force juridique contraignante et rappelé que ces recommandations avaient été largement diffusées aussi bien auprès des personnels pénitentiaires que des détenus, la Commission a rejeté l'amendement.
Puis, elle a adopté deux amendements identiques de simplification rédactionnelle présentés respectivement par le rapporteur et par M. Jean-Jacques Urvoas.
Elle a rejeté l'amendement rédactionnel n° 1 de M. Jean-Frédéric Poisson, puis adopté l'article 1er ainsi modifié.
Article 2 : Conditions de nomination et garanties d'indépendance du Contrôleur général :
La commission a examiné cinq amendements relatifs aux conditions de nomination du Contrôleur général, le premier présenté par M. Jean-Jacques Urvoas prévoyant que la nomination du Contrôleur général par le Président de la République a lieu sur avis conforme, acquis à la majorité des trois cinquièmes de la commission compétente de chaque assemblée, le deuxième présenté par le rapporteur disposant que le choix du Contrôleur général est subordonné à ses « compétences et connaissances professionnelles », le troisième également présenté par le rapporteur prévoyant que cette nomination a lieu « après consultation du Parlement dans les conditions prévues par la Constitution », le quatrième présenté par M. Michel Hunault imposant un avis parlementaire à la majorité des trois cinquièmes, le cinquième présenté par le même auteur précisant les compétences requises pour être désigné Contrôleur général.
a relevé que la procédure qu'il propose garantirait à la fois l'indépendance et la compétence du futur Contrôleur général par le caractère consensuel qu'implique nécessairement le choix d'une majorité qualifiée, ce qui permettrait de dépasser l'assertion de Voltaire selon laquelle « l'amitié d'un grand homme est un bienfait des dieux ».
s'est interrogé sur les craintes du rapporteur qui pourraient justifier d'inscrire dans le texte, comme il le propose, la subordination de la nomination du Contrôleur général à ses compétences et connaissances professionnelles. Il a ajouté que le calendrier de la révision constitutionnelle était incertain et qu'il était défavorable à la suspension, dans l'intervalle, de la nomination d'un Contrôleur général.
Le rapporteur, tout en affirmant rejoindre les préoccupations de M. Jean-Jacques Urvoas et de M. Christophe Caresche sur l'indépendance du Contrôleur, a dit sa préférence pour les amendements qu'il propose dès lors qu'ils permettent, pour l'un, qualifié d'amendement « d'attente », de ne pas préjuger de la très prochaine révision constitutionnelle qui pourrait prévoir une procédure d'association du Parlement à certaines nominations assortie d'une liste d'instances dans laquelle devrait figurer le Contrôleur général − auquel cas il ne serait pas rationnel de définir une procédure spécifique dans cette loi pour la désignation du Contrôleur général − et, pour l'autre, de faire référence explicitement aux termes de l'article 18-2 du protocole facultatif se rapportant à la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en application duquel « les États parties prennent les mesures nécessaires pour veiller à ce que les experts du mécanisme national de prévention possèdent les compétences et les connaissances professionnelles requises ».
a craint que la réserve relative au calendrier constitutionnel n'interdise l'entrée en vigueur rapide d'une loi inscrite à l'ordre du jour de la présente session extraordinaire et fige a priori le travail d'une institution attendue par tous.
a observé que l'amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas non seulement protège et amplifie le rôle du Parlement, ce qui est unanimement souhaité, mais évite aussi tout risque de dérive médiatique au profit d'une personne qui n'aurait pas de compétences professionnelles admises par tous. Il a jugé qu'une modification de la loi serait toujours possible, si jamais la révision devait aboutir après la désignation du premier Contrôleur général.
Le président Jean-Luc Warsmann, après avoir rappelé que l'urgence n'avait été pas déclarée sur le projet de loi qui sera, dès lors, soumis une nouvelle fois aux assemblées en deuxième lecture, a précisé que l'amendement du rapporteur instituant une « consultation du Parlement dans les conditions prévues par la Constitution » présentait un caractère d'attente et qu'il sera toujours possible, si la révision de la Constitution n'est pas acquise au moment où s'achèvera la navette sur le présent projet de loi, d'en tirer les conséquences à l'occasion de la deuxième lecture ou de la réunion de la commission mixte paritaire.
La Commission a rejeté l'amendement de M. Jean-Jacques Urvoas. Puis, elle a adopté les deux amendements du rapporteur et rejeté, en conséquence, les amendements de M. Michel Hunault.
Elle a rejeté l'amendement n° 2 rectifié de précision de M. Jean-Frédéric Poisson.
La Commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.
Article 2 bis : Régime d'inéligibilité du Contrôleur général :
La Commission a adopté l'article 2 bis sans modification.
Article 3 : Recrutement de contrôleurs :
La Commission a rejeté un amendement présenté par M. Michel Hunault tendant à instituer des contrôleurs régionaux des lieux de privation de liberté et l'amendement n° 3 de M. Jean-Frédéric Poisson autorisant le Contrôleur général à recourir à tout moment à l'assistance d'experts et d'interprètes. Elle a aussi rejeté un amendement présenté par M. Michel Hunault précisant le rôle et le statut des contrôleurs régionaux, de même que l'amendement n° 4 de M. Jean-Frédéric Poisson interdisant à un contrôleur qui exercerait un emploi public d'exercer sa mission dans la région administrative où il est affecté.
La Commission a ensuite adopté un amendement de précision du rapporteur.
Après que le rapporteur a estimé nécessaire de laisser le dispositif monter en charge en fonction de l'évolution de l'institution, la Commission a rejeté un amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas précisant que le statut, le nombre et les conditions de nomination sont déterminés par décret en Conseil d'État.
La Commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.
Article 4 : Secret professionnel :
La Commission a rejeté un amendement présenté par M. Michel Hunault relatif aux contrôleurs régionaux.
Elle a adopté trois amendements de précision rédactionnelle du rapporteur, avant d'être saisie d'un amendement rédactionnel présenté par M. Jean-Jacques Urvoas. Après que le rapporteur eut précisé que cet amendement était satisfait par la rédaction que la Commission venait d'adopter, M. Jean-Jacques Urvoas a retiré son amendement.
La Commission a rejeté l'amendement n° 5 de portée rédactionnelle de M. Jean-Frédéric Poisson, ainsi que l'amendement n° 6 du même auteur imposant l'anonymisation des cas personnels mentionnés dans les communications orales du Contrôleur, le rapporteur ayant précisé qu'il serait favorable à ce dernier amendement sous réserve de sa transformation en sous-amendement à son propre amendement de rédaction globale de l'alinéa 2 de cet article.
La Commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.
Article 5 : Modalités d'information et de saisine du Contrôleur général :
La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.
Puis elle a été saisie d'un amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas permettant au Contrôleur général de saisir le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, le président de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) et le président de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité. Le rapporteur ayant indiqué qu'il présenterait à l'article 5 bis un amendement permettant au Contrôleur général de saisir le Médiateur de la République, M. Jean-Jacques Urvoas a estimé que l'objectif principal de son amendement était satisfait par celui qui sera présenté par le rapporteur, et a retiré le sien en se proposant de cosigner celui du rapporteur.
La Commission a adopté l'article 5 ainsi modifié.
Article 5 bis : Saisine de la CNDS par le Contrôleur général :
La Commission a adopté un amendement présenté par le rapporteur, cosigné par M. Jean-Jacques Urvoas, ouvrant la saisine directe du Médiateur de la République au Contrôleur général et adopté l'article 5 bis ainsi modifié.
Article 6 : Pouvoirs d'investigation du Contrôleur général et des contrôleurs :
La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.
Elle a ensuite été saisie d'un amendement, présenté par M. Jean-Jacques Urvoas, étendant le champ de compétence du Contrôleur général à tous les lieux placés sous la juridiction ou sous le contrôle de l'État, y compris hors du territoire de la République. Son auteur a précisé que cette disposition était conforme aux stipulations du protocole facultatif des Nations Unies contre la torture et permettrait de contrôler, par exemple, les lieux utilisés par les troupes françaises en opération extérieure.
a déclaré partager ce point de vue qui vient d'être exprimé et a fait par ailleurs observer qu'au regard de la rédaction proposée dans le projet de loi, le statut des centres éducatifs fermés était incertain, dès lors, d'une part que les jeunes concernés pouvaient être autorisés à en sortir temporairement pour effectuer des mesures de mise à l'épreuve, d'autre part que les centres étaient souvent gérés directement par des associations.
Le rapporteur, tout en soulignant la difficulté d'application de l'extension proposée dans l'amendement au regard notamment du droit international et en précisant que la réforme du régime disciplinaire des armées intervenue avec la loi du 25 mars 2005 avait supprimé les locaux dans lesquels les militaires étaient placés « aux arrêts », a reconnu qu'il serait nécessaire, au cours des débats en séance publique, d'interroger le Gouvernement sur le champ exact couvert par les termes du premier alinéa de cet article. Il a par ailleurs indiqué que les CEF relèvent de la catégorie des lieux privatifs de liberté.
La Commission a rejeté l'amendement.
Elle a été saisie d'un amendement présenté par M. Michel Hunault autorisant le Contrôleur général à exercer son contrôle sans préavis, ni autorisation préalable. Le rapporteur ayant rappelé que le Sénat avait supprimé toute procédure d'information préalable et permis, ainsi, l'organisation de visites inopinées, l'amendement a été retiré par son auteur.
La Commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas supprimant la possibilité pour les autorités responsables d'un lieu de privation de liberté de s'opposer à la visite du Contrôleur général pour des motifs graves liés à la défense nationale, à la sécurité publique, à des catastrophes naturelles ou à des troubles sérieux dans l'établissement où la visite doit avoir lieu.
L'auteur de l'amendement a estimé que la notion de « troubles sérieux » figurant dans le projet de loi était suffisamment imprécise pour justifier tout refus de visite du Contrôleur général et qu'en conséquence, il était plus efficace de lever toutes les limites imposées, laissant à la libre appréciation du Contrôleur général l'opportunité d'effectuer sa visite.
, souhaitant éviter d'inscrire dans la loi des dispositions superfétatoires, a fait remarquer que les réticences compréhensibles de l'administration pénitentiaire à l'encontre des visites du Contrôleur général ne devaient pas se traduire par des dispositions législatives qui encadreraient par trop sa mission. En tout état de cause, ce dernier devrait disposer de suffisamment de compétences et de connaissances professionnelles pour ne pas intervenir, par exemple en cas de mutinerie.
, après avoir indiqué que le directeur de l'administration pénitentiaire, auditionné à l'occasion de l'examen du présent projet de loi, s'était déclaré tout à fait favorable à l'action du Contrôleur général, a souligné qu'il n'avait émis de réserve qu'à l'encontre des plans d'intervention d'urgence de l'administration pénitentiaire en cas d'émeute dans la prison, dont le caractère secret devait être maintenu. Il a relevé, en outre, que certains lieux de détention, comme celui situé dans une base sous-marine, doivent rester soumis au secret de la défense nationale. Il a jugé qu'en conséquence le hiatus entre la généralité du texte proposé et le peu d'hypothèses justifiant des exceptions mériterait d'être résorbé.
Le rapporteur, après avoir relevé qu'il avait entendu les inquiétudes exprimées par M. Jean-Jacques Urvoas mais aussi par nombre de ses interlocuteurs lors des auditions préparatoires, a estimé souhaitable de préciser le texte du projet de loi en prenant appui sur les termes de l'article 14-2 du protocole facultatif des Nations Unies précité et en disposant que les motifs pouvant justifier un report d'une visite du Contrôleur général doivent être non seulement « graves », mais aussi « impérieux ». Il a ajouté que le rôle du Contrôleur général n'est, en aucun cas, de faire cesser des troubles de cet ordre en faisant office de médiateur entre détenus et administration pénitentiaire et doit s'inscrire, au contraire, dans une mission plus globale d'amélioration des conditions de détention.
Après avoir fait remarquer que le Sénat a supprimé toute restriction relative aux plans d'intervention d'urgence, et jugé que l'ensemble des autres secrets devaient être maintenus dans le texte, il a proposé de prévoir explicitement l'obligation pour le responsable du lieu que le Contrôleur général souhaite visiter d'avertir ce dernier dès la cessation des troubles, ce qui permettra, ainsi, d'accélérer l'intervention de sa visite.
La Commission a rejeté l'amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas, puis elle a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur ainsi qu'un amendement du même auteur précisant que les troubles susceptibles d'empêcher la visite du Contrôleur général doivent être « impérieux ».
Elle a rejeté l'amendement n° 7 de M. Jean-Frédéric Poisson, puis adopté un amendement rédactionnel présenté par le rapporteur.
La Commission a été saisie d'un amendement du rapporteur précisant les conditions du report de visite. M. Jean-Jacques Urvoas a regretté que l'initiative du Contrôleur général puisse être bridée par les éventuelles réticences des responsables de lieu de privation de liberté. Le rapporteur soulignant de nouveau l'avancée que représenterait de ce point de vue l'adoption de son amendement, la Commission l'a adopté. La Commission a rejeté, en conséquence, l'amendement n° 8 de M. Jean-Frédéric Poisson prévoyant que le Contrôleur général retrouve son droit de visite dès que les circonstances à l'origine des troubles graves ont cessé, ainsi que l'amendement n° 9 du même auteur organisant la transmission d'informations au Contrôleur général durant les troubles.
La Commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur, avant de rejeter l'amendement n° 10 de M. Jean-Frédéric Poisson.
Elle a été ensuite saisie d'un amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas supprimant toute limitation à la communication des informations et pièces dont le Contrôleur général demande la transmission. Son auteur a précisé que le secret professionnel auquel est soumis le Contrôleur général suffit à garantir les droits des personnes concernées au regard, notamment, du secret médical.
Le rapporteur, s'appuyant sur l'avis des spécialistes auditionnés par lui à l'occasion de la préparation de son rapport, s'est déclaré défavorable à cet amendement au motif qu'il paraît inopportun de porter atteinte, de quelque manière que ce soit et sans plus de précaution, au secret médical. Il a ajouté que les autres cas prévus dans le projet de loi, tels que le secret de la défense nationale ou le secret de l'instruction ou encore le secret professionnel applicable aux relations entre un avocat et son client méritent également d'être protégés.
La Commission a rejeté l'amendement de M. Jean-Jacques Urvoas ainsi qu'un amendement présenté par M. Michel Hunault imposant au Contrôleur de respecter ces différents secrets, sans que ceux-ci puissent donc lui être opposés.
Elle a adopté un amendement rédactionnel et un amendement de précision du rapporteur.
Elle a examiné un amendement présenté par M. Michel Hunault autorisant la levée du secret médical sous réserve du consentement libre et éclairé de la personne concernée. Le rapporteur ayant rappelé ses réserves concernant les atteintes au secret médical, M. Michel Hunault a estimé que le rejet quasi systématique des amendements présentés risquait de ne pas donner au texte la consistance suffisante, seule susceptible de répondre à des attentes qui s'expriment depuis plus de dix ans à travers nombre de rapports et de propositions. Il a exprimé sa crainte que cette attitude limite le rôle du Contrôleur général à celui d'un simple visiteur de prison, sans pouvoir réel de sanction et d'injonction, et ne pouvant s'appuyer sur des règles internationales et européennes, au détriment in fine de la dignité des personnes enfermées, à l'encontre desquelles la privation de liberté devrait être la seule sanction admissible.
Le rapporteur a rappelé que les missions définies par le projet de loi n'étaient pas limitées à celle décrite par l'auteur de l'amendement et que le nombre d'amendements adoptés au Sénat et proposés par lui ne permettait pas de conclure à l'absence de renforcement du rôle du Contrôleur général. De surcroît, il a remarqué que le représentant du Conseil de l'Europe qu'il avait auditionné avait fortement souligné que l'attribution aux contrôleurs des prisons d'un pouvoir d'injonction − qui n'est d'ailleurs pas prévu par les textes internationaux − conduit inéluctablement, à l'expérience, à des situations de blocages rendant impossible l'exercice de toute mission de contrôle à l'intérieur des prisons et que seule la concertation entre tous les acteurs peut se révéler efficace. Il a conclu son propos en rappelant que le présent projet de loi, par le champ couvert par le Contrôleur général, s'étendait bien au-delà de ce qui est prévu par nombre de textes en vigueur dans les pays européens.
La Commission a rejeté l'amendement de M. Michel Hunault, puis a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.
Elle a rejeté un amendement présenté par M. Michel Hunault relatif à l'institution de contrôleurs régionaux, puis adopté l'article 6 ainsi modifié.
Article 7 : Suites données aux visites :
La Commission a adopté un amendement de précision du rapporteur ainsi qu'un amendement du même auteur prévoyant que les observations formulées par les ministres en réponse au Contrôleur général pourront l'être soit sur demande expresse de ce dernier soit lorsqu'ils l'estimeront utile.
Le rapporteur a présenté un amendement ayant pour objet de créer une procédure d'urgence, permettant au Contrôleur général de communiquer sans délai aux autorités compétentes ses observations en cas de constat de violations graves des droits fondamentaux de personnes privées de liberté et de fixer à ces autorités un délai de réponse. Il a expliqué que le Contrôleur général, dans le cadre de cette procédure, bénéficiera d'un droit de suite, afin de vérifier que la violation constatée a cessé et pourra également rendre publiques ses observations, ainsi que les réponses reçues. La Commission a adopté cet amendement.
a présenté un amendement supprimant la disposition prévoyant que le Contrôleur général doit porter sans délai à la connaissance du procureur de la République les faits laissant présumer l'existence d'une infraction pénale dont il aurait connaissance, cette précision semblant inutile au regard de la jurisprudence constante du Conseil d'État. Après que le rapporteur eut fait observer que cette précision figurait dans le statut des autres autorités administratives indépendantes et jugé par conséquent préférable de l'introduire dans le présent projet de loi, l'amendement a été retiré par son auteur.
a présenté un amendement tendant à confier au Contrôleur général un pouvoir d'injonction en cas d'atteinte aux droits fondamentaux des personnes privées de liberté. Il a rappelé que la crédibilité de la plupart des autorités administratives indépendantes dépend de leur pouvoir d'injonction et que le sénateur Patrice Gélard, dans son rapport au nom de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation sur les autorités administratives indépendantes, préconisait également de confier à ces autorités un pouvoir de prescrire. Le rapporteur a estimé que la publicité donnée aux avis et recommandations du Contrôleur général est suffisante. Il a cité l'exemple du Royaume-Uni où 80 % des recommandations formulées par l'Inspecteur en chef sont prises en compte par l'administration pénitentiaire. La Commission a alors rejeté cet amendement.
Elle a ensuite rejeté deux amendements n° 11 et n° 12 de M. Jean-Frédéric Poisson imposant de tenir le Contrôleur général des lieux de privation de liberté informé des suites données à son intervention, d'une part lorsqu'il avise le procureur de la République de faits laissant présumer l'existence d'une infraction, d'autre part lorsqu'il saisit les autorités ou personnes investies du pouvoir disciplinaire de faits de nature à entraîner des poursuites disciplinaires.
La Commission a alors adopté l'article 7 ainsi modifié.
Article 8 : Avis et recommandations :
La Commission a adopté un amendement de précision du rapporteur.
Elle a ensuite été saisie d'un amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas prévoyant que le Contrôleur général pourrait proposer des modifications des dispositions applicables aux lieux de privation de liberté non seulement au Gouvernement mais également aux parlementaires. Après que le rapporteur a signalé que, dans le silence de la loi, le Contrôleur général pourra s'il le souhaite tenir informé les parlementaires de toutes les modifications qu'il proposera au Gouvernement, la Commission a rejeté cet amendement.
Elle a également rejeté un amendement présenté par M. Jean-Jacques Urvoas tendant à rendre systématique la publicité des avis, recommandations, propositions et observations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, le rapporteur ayant souhaité que toute latitude soit laissée au Contrôleur général en matière de publicité de ses travaux.
a présenté un amendement ayant pour objet de supprimer la précision selon laquelle le Contrôleur général ne peut intervenir dans une procédure engagée devant une juridiction ni remettre en cause le bien-fondé d'une décision juridictionnelle, son auteur ayant estimé que cette précision est superflue au regard du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs. Le rapporteur s'en étant remis à la sagesse de la Commission, cette dernière a adopté l'amendement.
La Commission a alors rejeté deux amendements de M. Jean-Frédéric Poisson n° 13 et n° 14 ainsi qu'un amendement du rapporteur devenus sans objet en raison de l'adoption du précédent amendement.
La Commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.
Article 9 : Rapport annuel public :
La Commission a rejeté l'amendement n° 15 de M. Jean-Frédéric Poisson prévoyant une présentation du rapport d'activité annuel du Contrôleur général des lieux de privation de liberté aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ainsi qu'un amendement de M. Jean-Jacques Urvoas prévoyant une communication de ce rapport au Parlement suivie d'un débat et permettant au Contrôleur général d'être entendu à sa demande par les commissions compétentes des deux assemblées.
La Commission a adopté l'article 9 sans modification.
Article 9 bis : Coopération avec les organismes internationaux compétents :
La Commission a adopté l'article 9 bis sans modification.
Article 10 : Moyens de fonctionnement :
La Commission a rejeté un amendement de M. Michel Hunault ayant pour objet d'allouer 5 millions d'euros au Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
La Commission a adopté l'article 10 sans modification.
Article 11 : Décret en Conseil d'État :
La Commission a adopté l'article 11 sans modification.
Article additionnel après l'article 11 : (art. L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Coordination :
Le rapporteur a présenté un amendement supprimant la mention de la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention et des zones d'attente de la liste des instances joignant leurs observations au rapport du Gouvernement au Parlement sur les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration. Il a précisé que cette commission, créée par voie réglementaire, devrait être supprimée dès lors que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté sera en mesure d'exercer effectivement ses missions de contrôle dans les centres et locaux de rétention administrative et dans les zones d'attente et qu'il était donc cohérent de supprimer la disposition législative faisant référence aux observations formulées par cette commission. Il a indiqué que l'amendement avait recueilli un avis favorable du président de cette commission.
La Commission a adopté cet amendement portant article additionnel.
Article 12 : Application des dispositions du projet de loi dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie :
La Commission a adopté l'article 12 sans modification.
La Commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.
Le Président Jean-Luc Warsmann a fait part aux commissaires de son souhait de voir la commission des Lois s'engager dans des travaux de simplification du droit tout au long de la législature. À cette fin, il a indiqué qu'un site Internet « simplifionslaloi.assemblee-nationale.fr » faisant appel à toutes les suggestions en la matière serait ouvert mercredi 19 septembre 2007. Il a invité les commissaires à se faire le relais de ces préoccupations dans leurs circonscriptions auprès des professionnels du droit. Il a par ailleurs indiqué qu'un appel d'offres sur le thème de la simplification du droit serait prochainement lancé par la commission des Lois et qu'il devrait permettre de bénéficier de l'expertise de cabinets de conseil spécialisés. Il a précisé que ces initiatives, destinées à abroger des dispositions devenues sans objet, à réécrire des dispositions inintelligibles et à simplifier des procédures, devraient déboucher sur une proposition de loi au cours de l'année 2008 et il a souhaité que cette traduction concrète de la démarche de la commission des Lois en faveur de la simplification du droit puisse devenir une habitude annuelle.
Il a par ailleurs invité les commissaires chargés d'un rapport d'application à se poser systématiquement la question de la simplification des mesures législatives évaluées.
Il a enfin signalé qu'une première proposition de loi de simplification serait examinée dans le cadre de la séance d'initiative parlementaire du mois d'octobre réservée au groupe UMP.
a souligné l'importance de la prise en compte de la compréhension de la loi par les citoyens dans le cadre d'un travail général sur la simplification du droit.
a observé que plusieurs organismes ont une activité en matière de simplification, tels le Comité de simplification du langage administratif (COSLA) ou la Commission pour les simplifications administratives, qui travaille à la simplification des formulaires, mais qu'il n'existe pas de coordination entre eux. Au surplus, lorsque ces organismes rencontrent un obstacle de nature législative à une mesure de simplification, le Parlement n'en est pas informé. Les rapports annuels du Médiateur de la République et de la Cour des comptes pourraient être également une source d'inspiration pour de nombreuses mesures de simplification, mais restent peu exploités. La commission des Lois est le lieu idéal pour coordonner ces différentes initiatives.
s'est interrogé dans ce contexte sur le rôle et l'avenir de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation.
a rappelé que, alors que nul n'est censé ignorer la loi, il est impossible de savoir combien de lois sont applicables actuellement en France, le Conseil d'État et le Secrétariat général du Gouvernement donnant des estimations différentes.
a déclaré que les mesures de simplification peuvent parfois avoir pour effet de compliquer l'action de l'administration ou des professionnels. Il a cité l'exemple de la réforme des permis de construire, qui a simplifié les procédures pour les administrés mais crée des difficultés de mise en oeuvre dans les services, son impact n'ayant pas été mesuré.
Le Président Jean-Luc Warsmann a indiqué qu'environ 40 % du droit français a été codifié, et que le président de la Commission supérieure de codification n'envisage pas d'élaborer plus de quatre ou cinq nouveaux codes. L'objectif de codifier la totalité du droit a, en effet, été abandonné. Il a ajouté que, même s'il reste de nombreuses lois tombées en désuétude, elles ne sont pas le principal facteur de complexité du droit pour le citoyen. Il a donc estimé opportun de réfléchir aux simplifications possibles en analysant, un par un, des domaines juridiques précis.
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