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Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Séance du 31 octobre 2007 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de M. Gérard Cherpion, les crédits pour 2008 de la mission « Travail et emploi ».

PermalienPhoto de Gérard Cherpion

, après avoir indiqué que la mission « Travail et emploi » disposera pour 2008 de 12,3 milliards d'euros en crédits de paiement, a souhaité axer son propos sur un dispositif spécifique : le contrat de transition professionnelle (CTP). Si ce dispositif a certes une incidence budgétaire modeste, avec 8,5 millions d'euros budgétés pour 2008, il paraît néanmoins important d'en présenter les éléments de bilan déjà disponibles.

Le contrat de transition professionnelle, établi par une ordonnance du 13 avril 2006, est une disposition expérimentale applicable pour une durée de deux ans dans sept bassins d'emplois : Charleville-Mézières, Montbéliard, Morlaix, Saint-Dié, Toulon, Valenciennes et Vitré. Dans ces bassins, il se substitue à la convention de reclassement personnalisé (CRP), mesure nationale prévue depuis 2005 pour favoriser le reclassement des salariés des entreprises de moins de mille salariés menacés par un licenciement économique.

D'autres mesures, congés de reclassement ou de mobilité, existent en effet pour les salariés des entreprises ou groupes de mille salariés et plus, tous ces dispositifs ayant en commun de s'adresser aux salariés qui perdraient à défaut leur emploi dans le cadre d'un licenciement économique. En fait, il s'agit de remplacer ce licenciement par de nouvelles modalités de rupture aménagée offrant plus de sécurité, un accompagnement plus important et une indemnisation supérieure au droit commun du licenciement et de l'assurance chômage.

Le développement de ce type de mesures s'inscrit dans la recherche d'une meilleure sécurisation des parcours professionnels, question qui est devenue un sujet très important de préoccupation des pouvoirs publics comme des partenaires sociaux et se trouve désormais au coeur du dialogue social. La convention de reclassement personnalisé est ainsi issue de ce dialogue et la question des parcours professionnels sera nécessairement à nouveau traitée dans la négociation interprofessionnelle engagée actuellement sur la modernisation du marché du travail et la sécurisation des parcours professionnels. Par ailleurs, la remise à plat de l'assurance chômage et la réforme du service public de l'emploi qui sont prévues obligeront à revoir la convention de reclassement personnalisé, qui est mise en oeuvre dans le cadre de l'Unédic.

L'expérimentation du contrat de transition professionnelle doit s'achever en mars 2009, un an après l'entrée dans la mesure des derniers bénéficiaires en mars 2008, et il est prévu que le gouvernement remette un rapport d'évaluation avant le 1er juin 2008. Cependant, au regard de ces perspectives de réformes, il convient d'anticiper cette échéance, afin que les leçons que l'on peut d'ores et déjà retirer du CTP puissent être utilement valorisées.

L'avis présentera de manière détaillé les différences entre les différents régimes destinés aux licenciés économiques, régime de droit commun, convention de reclassement personnalisé et contrat de transition professionnelle. Pour simplifier, on peut dire que, du point de vue des salariés, la CRP présente par rapport au droit commun plusieurs avantages, à savoir une indemnisation plus généreuse bien que dégressive pendant huit mois, un statut favorable pour la conservation des droits sociaux (celui de stagiaire de la formation professionnelle) et des mesures d'accompagnement qui sont en principe renforcées.

Le contrat de transition professionnelle obéit assez largement aux mêmes règles que la convention. Il s'en distingue cependant sur plusieurs points. Il est tout d'abord ouvert à tous les salariés dont le licenciement économique est envisagé, même à ceux qui ne pourraient pas bénéficier des allocations de l'assurance chômage du fait d'une durée d'affiliation préalable insuffisante. Le délai de réflexion pour l'acceptation est en ensuite plus long, puisqu'il est de 21 jours au lieu de 14, et la durée maximale d'accompagnement est également plus longue, douze mois au lieu de huit. Dans le cadre de cet accompagnement, il est permis d'insérer des périodes de travail rémunérées dans des entreprises pour s'essayer à de nouveaux postes ou de nouveaux emplois. Enfin, l'indemnisation est plus élevée, non dégressive et comporte aussi une possibilité de « capitalisation » en cas de reprise d'emploi avant le terme du contrat, c'est-à-dire de versement d'une prime, plafonnée à trois mois de prestations, à hauteur de 50 % des indemnités dues pour les mois restant à courir. En contrepartie de ces avantages, le bénéficiaire d'un contrat de transition professionnelle doit prendre et tenir des engagements de suivre les actions qui lui seront proposées et doit donner suite à toute offre d'emploi correspondant aux orientations du projet professionnel défini avec lui.

Le CTP offre aussi un accompagnement beaucoup plus intensif puisqu'il comporte notamment un taux d'encadrement d'un référent pour 30 bénéficiaires contre un pour 110 s'agissant de la CRP.

Grâce à un suivi quantitatif et qualitatif remarquable, des éléments substantiels du bilan du CTP sont déjà disponibles. L'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a ainsi rendu deux rapports d'évaluation à mi-parcours. Pour ce qui est des chiffres, les données au 30 septembre 2007 font apparaître que 2 533 personnes sont entrées dans le système depuis mai 2006. A la même date, les cinq premières cohortes mensuelles de bénéficiaires, entrés jusqu'en septembre 2006, étaient sorties intégralement d'un dispositif qui ne dure au plus qu'un an. Si cela représente un échantillon encore restreint de 573 personnes, il reste néanmoins suffisant pour dégager certains enseignements.

Le second rapport de l'IGAS relève « un fonctionnement global satisfaisant » du dispositif, qui donne des résultats « du niveau d'une bonne cellule de reclassement, mais avec des incertitudes et des difficultés d'interprétation », et les auditions menées ont confirmé ce jugement.

Le CTP est ainsi très attrayant pour ses bénéficiaires potentiels, avec un taux d'adhésion proche de 80 % de ceux auquel il est proposé, alors que ce taux n'est que de l'ordre de 40 % pour d'autres mesures optionnelles telles que la CRP.

S'agissant du retour à l'emploi, il est certes très délicat de comparer l'efficacité en termes de reclassement des différents régimes d'accompagnement des demandeurs d'emploi et ce pour plusieurs raisons. Les notions de taux de reclassement, de retour à l'emploi, d'emploi durable ou d'accès à l'emploi employées par les uns et les autres ne sont tout d'abord pas harmonisées et renvoient à des définitions quelque peu différentes. Ensuite, il est difficile de comparer un dispositif expérimental couvrant quelques milliers de personnes, comme le CTP, avec des mesures au champ national comme la CRP, qui a concerné un peu plus de 100 000 personnes depuis deux ans. Enfin, il faudrait, pour ce type de comparaisons, faire entrer en ligne de compte et quantifier des facteurs tels que le taux de chômage des bassins d'emploi en cause, l'âge moyen ou la qualification des demandeurs d'emploi concernés, ce qui demeure assez complexe.

Sous ces réserves, les résultats du contrat de transition professionnelle sont très au-dessus de tous les autres dispositifs de reclassement. Le taux de retour à l'emploi, en intégrant toutes les périodes travaillées de plus d'un moins, s'élève à plus de 70 % au terme des douze mois de CTP. En s'en tenant aux sorties dites « en emploi durable », c'est-à-dire en contrat à durée indéterminée et contrat à durée déterminée ou mission d'intérim de plus de six mois, ce taux est encore de 60 %.

S'agissant de l'ensemble des chômeurs, une enquête de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) sur le devenir d'un échantillon de demandeurs d'emploi ayant eu leur premier entretien en mai 2004 montre que, sur ceux qui s'étaient inscrits suite à un licenciement économique, 39 % travaillaient douze mois après et 53 %, au total, travaillaient ou avaient travaillé durant ces douze mois. Pour ce qui est de la convention de reclassement personnalisé, 55 % des allocataires, douze mois après leur entrée, ne sont pas inscrits à l'agence, ce qui doit correspondre en général à un reclassement dans l'emploi. Enfin, s'agissant des cellules de reclassement dans le cadre des plans de sauvegarde de l'emploi, une analyse a posteriori conduites sur 230 plans entre 2002 et 2004 fait état de 35 % environ de sorties en emploi durable.

L'analyse des emplois occupés par les anciens bénéficiaires d'un contrat de transition professionnelle est également intéressante puisque plus de 42 % ont changé de métier, ce qui traduit un mouvement significatif de reconversion, et près d'un tiers ont amélioré leur salaire, tandis que 8 % sont sortis en création d'entreprise.

La plupart des personnes auditionnées s'accordent à reconnaître plusieurs points forts au contrat de transition professionnelle qui expliquent ses bons résultats.

L'aspect institutionnel est tout d'abord particulièrement intéressant dans la perspective du prochain débat sur la nouvelle organisation du service public de l'emploi. Le dispositif est en effet géré par une filiale ad hoc de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) et associe des personnels issus de cet organisme et de l'ANPE avec un fonctionnement entrepreneurial. Ces cellules sont dirigées par des chefs de projet détachés de l'AFPA et fortement impliqués. L'intérêt du regroupement dans une même structure des compétences des personnels de l'ANPE et de l'AFPA a été souligné par la plupart des interlocuteurs, les uns amenant leur expérience du placement en emploi, les autres leurs compétences dans la construction de parcours de reconversion professionnelle, la prescription de formation adaptées et la recherche de stages.

Le délai de trois semaines, plutôt que deux dans la convention de reclassement personnalisé, laissé aux salariés pour opter est un second point jugé très positivement. Il ne faut pas oublier que beaucoup de personnes mettent du temps à se décider.

La durée du contrat de transition professionnelle, douze mois, l'est également. Dans les statistiques de retour à l'emploi durable, le taux bondit de 33 % à 60 % entre huit et douze mois d'ancienneté dans le dispositif. Bien sûr, il existe sans doute quelques bénéficiaires qui attendent la fin du contrat pour reprendre un emploi, mais ce genre de comportement n'explique pas les résultats obtenus car le choix des douze mois est plutôt bien calibré et certainement plus adéquat pour mener un projet de reconversion professionnelle que les huit mois de la CRP.

L'accès aux formations constitue une autre réussite du dispositif. Pour les cohortes qui en sont sorties, il atteint presque 67 % alors que le taux d'accès aux formations ne serait que de 25 % pour la CRP et de 10 à 20 % pour l'ensemble des demandeurs d'emploi. Il faut aussi être conscient que ces résultats sont en grande partie liés à l'implication d'un organisme paritaire collecteur des fonds de formation, l'AGEFOS-PME, qui a financé jusqu'à présent plus de la moitié des formations. L'implication des collectivités locales et en particulier des conseils régionaux, compétents pour la formation professionnelle, est en revanche inégale selon les territoires et reste globalement limitée.

Les périodes travaillées qui peuvent s'intercaler dans le contrat de transition sans l'interrompre représentent un dernier élément très positif de la démarche de conversion propre au contrat de transition professionnelle. Ce mécanisme permet de s'essayer à un nouvel emploi, voire un nouveau métier, sans risque statutaire.

D'autres aspects du dispositif ont en revanche fait débat, comme, en premier lieu, la question des coûts et du financement. Le financement de l'expérimentation, initiée par les pouvoirs publics, repose sur une contribution importante de l'Etat, qui serait proche du tiers des dépenses totales, à la différence de ce qui se passe pour la CRP, où la contribution est marginale. Cela s'explique par le niveau d'indemnisation plus élevé qui est prévu, les mesures d'accompagnement plus importantes, mais aussi et surtout par un engagement moindre de l'assurance chômage.

Si l'on regarde le seul coût unitaire du dispositif, il n'est pas certain qu'a posteriori, il soit très différent pour le contrat de transition professionnelle et la convention de reclassement personnalisé, dans la mesure où les surcoûts a priori du premier peuvent être compensés par les économies d'indemnisation tenant au fait que les personnes retrouvent en moyenne plus vite un emploi, sans compter que, pendant les périodes travaillées qui s'intercalent dans le contrat, elles sont rémunérées par leur employeur temporaire et pas par le dispositif. Selon certaines évaluations, les différences de coût unitaire final moyen entre les deux mesures pourraient être seulement de 5 %.

De surcroît, il existe des marges d'ajustement des coûts. D'une part, il n'est pas certain qu'un taux d'encadrement d'1 pour 30 soit nécessaire, 1 pour 40 ou 50 pourraient suffire selon les personnes interrogées. D'autre part, le niveau d'indemnisation des bénéficiaires pourrait être réexaminé car, dans certains cas, les indemnités excédent l'ancien salaire net. Avec en outre le système de prime en cas de reprise d'emploi rapide, le contrat de transition professionnelle est ainsi tellement attractif qu'il entraîne sans doute des effets d'aubaine, c'est-à-dire qu'y adhèrent des salariés qui, compte tenu de leur métier, pourraient retrouver rapidement un emploi sans aide particulière.

Le critère d'entrée par le licenciement économique est aussi une autre règle du contrat de transition professionnelle qui est discutée.

Si d'un côté, proposer le dispositif à tous ceux dont le licenciement pour motif économique est envisagé peut entraîner des effets d'aubaine, dans d'autres cas, cela n'a peut-être guère de sens s'agissant de salariés proches de la retraite qui ont besoin d'une solution d'attente ou de salariés dont les graves problèmes personnels, de santé notamment, exigent d'autres formes d'accompagnement qu'une aide centrée sur le retour à l'emploi.

Dans l'autre sens, on sait que les licenciements économiques sont en recul continu et sont devenus un motif très minoritaire d'entrée en chômage, avec moins de 5 % des inscriptions à l'ANPE. Les organisations syndicales rencontrées souhaiteraient couvrir plus largement les ruptures de nature économique, notamment les salariés temporaires non reconduits des entreprises procédant à des licenciements économiques. Des réflexions portent également sur une éventuelle distinction entre les droits à indemnisation et ceux à accompagnement. L'IGAS considère ainsi que dans le cadre d'un licenciement collectif, il est délicat de justifier des conditions d'indemnisation différentes, alors que des modalités d'accompagnement variables, adaptées à chacun, seraient utiles.

La question de l'articulation du contrat de transition professionnelle avec les autres mesures de reclassement existantes, et en particulier les plans de sauvegarde de l'emploi que doivent mettre en oeuvre les entreprises, est souvent soulevée. Certains craignent un appauvrissement du contenu de ces plans dans les bassins couverts par le contrat de transition professionnelle. Si l'expérience devait être poursuivie, les hypothèses d'une exclusion des entreprises tenues de proposer un plan de sauvegarde ou d'une contribution obligatoire de ces entreprises au financement du CTP devraient être étudiées.

Que faire dès lors du CTP dont l'expérimentation va se fermer en mars prochain ? Une généralisation à tout le territoire, qui en ferait le régime de droit commun, paraît complexe avec les paramètres actuels du dispositif, qu'il s'agisse de sa clef de financement ou du niveau d'indemnisation.

Pour autant, il y a dans ce dispositif des éléments très positifs qui devraient inspirer la configuration future des dispositifs d'accompagnement des demandeurs d'emploi. Dans le contexte actuel d'une remise à plat de tout le système d'accompagnement et d'indemnisation du chômage, c'est dans ce cadre de réforme d'ensemble que les enseignements du contrat de transition professionnelle doivent être utilisés, soit pour inspirer un dispositif de prise en charge des licenciés économiques qui prendrait la suite de la convention de reclassement personnalisé, soit même pour inspirer un système global d'indemnisation du chômage refondé.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

s'est étonné que le rapporteur ait centré son avis sur l'évaluation d'une expérimentation mobilisant seulement 8,5 millions d'euros de crédits quand le budget de l'emploi dépasse les 12 milliards. Certes, le travail d'évaluation est intéressant mais il l'aurait été plus s'il avait porté sur un champ plus large, par exemple tout ce qui relève du Plan de cohésion sociale.

Trois aspects de la politique de l'emploi mériteraient une évaluation approfondie : la fusion de l'ANPE et de l'Unédic, qui soulève des interrogations demeurées sans réponse jusqu'à présent, telles que le gel des maisons de l'emploi, le financement de la fusion, la baisse des subventions de l'Etat à l'ANPE et aux maisons de l'emploi ; l'emploi des jeunes qui mobilise des crédits dispersés et en baisse, qu'il s'agisse du fonds d'insertion professionnelle des jeunes (FIPJ), du contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS), des missions locales, des contrats de professionnalisation, etc. ; l'emploi des seniors qui est mis en avant mais pour lequel aucune ligne budgétaire n'est visible.

On peut également s'interroger sur la baisse du nombre de contrats aidés. Certes, il sera répondu que le chômage baisse et que le gouvernement prépare de nouveaux types de contrats, notamment le contrat unique d'insertion. On constate pourtant qu'un coup de frein est donné aux contrats aidés dans l'attente des réformes ; une fois encore, on risque d'avoir à supporter un « trou d'air » entre deux générations de mesures.

PermalienPhoto de Francis Vercamer

a rappelé l'intérêt du groupe du Nouveau Centre pour le budget de l'emploi. Le présent budget peut être qualifié de budget de transition, car il reste ancré dans la politique de l'emploi du précédent gouvernement en attendant le déploiement des nouvelles mesures (revenu de solidarité active, réforme des minima sociaux, fusion ANPE-Unédic). On ne peut certes qu'en approuver les grandes orientations mais, pour ce qui est des moyens, il est légitime de rappeler que la stabilité et la cohérence des politiques de l'emploi sont nécessaires.

La fusion de l'ANPE et de l'Unédic sera une bonne chose, dès lors qu'elle s'effectuera en accord avec les élus locaux, notamment au regard de la mise en place des maisons de l'emploi. Ces maisons de l'emploi sont à leur début ; il ne faut pas donner un signal de remise en cause ; on peut donner acte au gouvernement de continuer à financer les maisons déjà installées.

Le nombre de contrats aidés qui seront proposés est en baisse. Or ces contrats sont destinés aux publics les plus éloignés de l'emploi ; on ne peut pas justifier leur évolution par rapport aux seuls chiffres du chômage et de la croissance ; en outre, il existe quand même des incertitudes sur la poursuite de la croissance économique. Il y a aussi une dimension territoriale à prendre en compte : la France possède de nombreux bassins d'emploi fragiles où l'application d'une politique nationale unique de l'emploi n'est pas adaptée ; les contrats aidés sont utiles pour garder une cohésion sociale dans ces bassins.

Concernant la suppression de l'allocation équivalent retraite (AER) par l'article 57 du projet de loi de finances, il serait préférable d'attendre le « Grenelle de l'insertion » et la réforme globale des minima sociaux pour envisager une telle mesure. Quant à la présenter comme une conséquence du Plan national d'action concerté pour l'emploi des seniors, il faut être prudent quand on constate que seuls 20 contrats à durée déterminée seniors ont été signés alors que plus de 62 000 allocations équivalent retraite sont servies. Il faut enfin rappeler que l'AER constitue une mesure d'équité en faveur des demandeurs d'emploi par rapport au personnes en emploi qui, dans le cadre de la réforme des retraites mise en oeuvre par la loi du 21 août 2003, peuvent prendre leur retraite avant 60 ans si elles ont cotisé assez longtemps.

En matière d'accompagnement économique, il faut soutenir les PME et dans ce cadre les exonérations de charges sociales sont indispensables. Le groupe Nouveau Centre a déposé des amendements en ce sens, notamment au bénéfice de l'hôtellerie et de la restauration et des contrats de professionnalisation. Rappelons qu'un objectif de 500 000 contrats a été assigné pour les contrats en alternance et que l'on en est à un peu moins de 300 000 contrats signés.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

a souhaité avoir des informations sur le devenir des contrats d'avenir, les conseils généraux ayant été informés de l'impossibilité de reconduire des contrats en cours en raison du manque de crédits.

PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

a insisté sur la nécessité d'une stabilité, d'une cohérence et d'une lisibilité des politiques de l'emploi. C'est une demande forte des collectivités publiques, des entreprises, des salariés et des agents du service public de l'emploi. Une caractéristique de la politique de l'emploi doit également être de s'adapter à chaque territoire et à chaque bassin d'emploi. À l'écoute du rapporteur pour avis, on constate que l'approche territoriale propre au CTP recueille un consensus et constitue un facteur de succès ; on doit s'en féliciter.

M. Jean-Frédéric Poisson a déclaré approuver la fusion de l'ANPE et de l'Unédic aussi bien en tant que député qu'en tant que président d'une maison de l'emploi. Ce dossier doit cependant être traité avec une approche de développement territorial et non en fonction de la définition d'un statut, d'un budget ou des modalités administratives d'une fusion. Ce qui fonctionne pour le CTP doit pouvoir être adapté à l'ensemble des politiques de l'emploi. La fusion sera d'autant plus saine qu'elle constituera une mesure de justice et d'équité pour les agents du service public eux-mêmes ; des dispositions d'adaptation et d'équité devront donc être mises en oeuvre à leur bénéfice.

L'accompagnement des salariés représente un enjeu considérable de la politique de l'emploi ; on multiple les dispositifs d'accompagnement. Mais il y aussi l'accompagnement des agents du service public chargés d'appliquer les réformes. Trop souvent, on leur demande de changer très rapidement de méthodes sans prendre le temps de l'adaptation ; il faut changer de méthodes de direction et d'organisation. Il conviendrait également d'associer davantage en amont les entrepreneurs et les salariés pour la sécurisation des parcours professionnels. Il ne suffit pas de voter une loi ; il faut mettre en oeuvre des moyens d'accompagnement avec les collectivités locales et les entreprises. Les enjeux humains sont importants car derrière chaque politique de l'emploi il y a des êtres humains.

PermalienPhoto de Denis Jacquat

s'est étonné des réticences suscitées chez certains par les contrats aidés alors que ceux-ci sont indispensables pour la réinsertion professionnelle des personnes très éloignées de l'emploi du fait de leurs difficultés sociales.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

s'étant étonné de ces propos, M. Denis Jacquat a confirmé qu'il n'y a pas de consensus sur la nécessité de disposer de contrats aidés destinés aux personnes en situation de grande précarité. Au plan local, de multiples obstacles existent lorsqu'une association ou une collectivité publique veut recruter du personnel avec des contrats aidés. Il conviendrait d'ailleurs de mieux préciser quels sont les publics bénéficiaires pour chaque type de contrat aidé et d'insister sur le fait que les contrats aidés ne concernent que les activités non lucratives.

Il en est de même pour le revenu minimum d'insertion (RMI) : certains considèrent ce minima social comme une sorte de « guichet automatique » qui n'implique aucune obligation de la part de celui qui en bénéficie. Au contraire, il faut insister sur l'obligation d'insertion professionnelle du bénéficiaire qui doit se préparer, en participant à des activités associatives ou en se recevant une formation professionnelle, à revenir sur le marché du travail « de droit commun ».

La fusion de l'ANPE et de l'Unédic doit être approuvée car elle permettra de faciliter les démarches administratives des demandeurs d'emploi, qui pourront ainsi se consacrer plus facilement à sa démarche de réinsertion professionnelle.

PermalienPhoto de Monique Iborra

a déploré que le projet de loi de finances pour 2008 remette en cause le Plan de cohésion sociale alors même que de gros moyens publics ont été mobilisés et qu'aucune évaluation n'a été faite de ce dispositif. Pour ce qui est de la question de la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC, la précipitation du gouvernement est condamnable. En dehors des aspects strictement juridiques, cette fusion ne présente pas d'enjeu essentiel pour le service qui doit être rendu au demandeur d'emploi : l'important, ce sont les moyens disponibles pour l'accompagnement des personnes. A cet égard, il semble y avoir une contradiction entre les ambitions affichées par le gouvernement et les moyens proposés dans le projet de loi de finances, et il est peu vraisemblable que les collectivités locales soient prêtes à se mobiliser financièrement pour compenser le désengagement de l'État, alors qu'elles ont déjà rencontré quelques déboires quand elles se sont lancées dans la mise en place de maisons de l'emploi. Le gouvernement doit être interpellé sur cette question des moyens.

PermalienPhoto de Frédéric Reiss

a observé que le gel de la création de nouvelles maisons de l'emploi pose localement de vrais problèmes, même s'il est vrai que la mise en place de ces structures a pu être l'occasion de créations anormales de postes supplémentaires : les maisons de l'emploi n'ont pas pour objet de créer des emplois dans les maisons ! Il doit plutôt s'agir de mutualiser les moyens existants. Plus généralement, le Plan de cohésion sociale a créé une dynamique qui doit être préservée.

La fusion de l'ANPE et de l'Unédic aura certainement des effets positifs car elle évitera aux demandeurs d'emploi de suivre un « parcours du combattant » pour trouver les moyens de se réinsérer professionnellement.

L'analyse du rapporteur pour avis sur le contrat de transition professionnelle est intéressante, car cette mesure est peu connue des décideurs politiques et gagnerait à l'être au regard des résultats obtenus en termes de reclassement. Quant on s'intéresse à la réinsertion professionnelle des salariés peu qualifiés qui sont licenciés après avoir travaillé plus de vingt ans dans la même entreprise, on peut s'étonner que les pouvoirs publics ne cherchent pas à inciter ces salariés à la mobilité géographique. En effet, il paraît très difficile dans certains bassins d'emplois de trouver de nouveaux débouchés professionnels à des salariés peu qualifiés à la suite de plans sociaux massifs.

Enfin, les dispositifs de formation par alternance ont largement fait la preuve de leur efficacité et il convient donc que les pouvoirs publics continuent à les soutenir financièrement.

Le président Pierre Méhaignerie a souhaité apporter des éléments de clarification sur la question des maisons de l'emploi. Lors de l'audition de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, par les commissions des affaires sociales et des finances au sujet de la fusion de l'ANPE et de l'Unédic, une certaine équivoque a été créée sur le devenir de ces structures, critiquées car leur mise en place s'est accompagnée de créations de postes d'emplois publics alors qu'elles devaient être créées en mutualisant les moyens existants. En fait, les maisons de l'emploi ne sont pas condamnées mais elles devront être mises en place à effectif constant ; dans l'attente de la réorganisation des services locaux de l'emploi consécutive à la fusion, la création de nouvelles maisons est suspendue.

Pour ce qui est des contrats aidés, il y a une inflexion des politiques. Il est normal que l'on tienne compte des modifications de la situation du marché du travail. Outre que le chômage diminue, on a toujours dans notre pays 450 000 offres d'emplois non pourvues.

La suppression de l'AER prévue par le projet de loi de finances s'inscrit dans la « stratégie de Lisbonne ». La France reste dernière de la classe pour le taux d'emploi des seniors ; il faut évoluer.

Le contrat de transition professionnelle a donné des résultats plutôt positifs. Il présente toutefois un point faible : les règles sont les mêmes pour tous alors qu'il conviendrait d'accompagner différemment le demandeur d'emploi non qualifié qui a été licencié après cinquante ans et le salarié qualifié de moins de trente ans, dont les difficultés de réinsertion professionnelle sont très différentes. Il conviendrait plus généralement de mieux cibler les contrats aidés selon les difficultés de reclassement des bénéficiaires.

Enfin, la fusion de ANPE et de l'Unédic doit être rapide et doit s'accompagner de l'intégration des missions locales afin de travailler au mieux pour l'insertion professionnelle des jeunes.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur pour avis a apporté les précisions suivantes :

– Concernant la distinction des publics auxquels peut s'adresser le contrat de transition professionnelle, il est exact qu'il serait souhaitable de mieux différencier le dispositif d'accompagnement social du demandeur d'emploi. En effet, actuellement ce contrat bénéficie aussi bien à de jeunes salariés titulaires, par exemple, d'un BTS qui peuvent facilement retrouver un emploi qu'à des salariés âgés sans qualification qui doivent entreprendre une démarche de reconversion professionnelle supposant une longue période de formation.

– Quant aux maisons de l'emploi, il convient de rappeler qu'elles devaient être créées en mutualisant les moyens existants de l'ensemble des acteurs locaux agissant pour l'accompagnement des demandeurs d'emploi, non en créant des emplois publics supplémentaires. L'intérêt de tels rapprochements est clair. Dans le cas des contrats de transition professionnelle, une partie de leur réussite tient à l'excellente coopération entre l'ANPE et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

– Pour ce qui est des contrats d'avenir, le projet de loi de finances en programme plus de 76 000 nouveaux en 2008.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

a fait part de ses inquiétudes sur la pérennité des contrats d'avenir. La vraie question n'est pas leur nombre dans le projet de budget, mais la possibilité effective d'en conclure. Les rumeurs sur le sujet tendent à indiquer qu'il n'y aura plus d'argent pour financer ce dispositif au début de l'année prochaine. L'Etat s'était engagé à mettre en oeuvre autant de contrats d'avenir pour les publics relevant de sa responsabilité que les départements en mettraient en oeuvre pour les bénéficiaires du RMI relevant de le leur ; or, en Ille-et-Vilaine notamment, force est de constater que le département a signé avec ces derniers 77 % du total des contrats jusqu'à présent.

Le rapporteur pour avis a estimé qu'il y a probablement, pour ce qui est des contrats d'avenir, un effet « d'accordéon » lié à l'approche de la fin de l'année.

Puis, la commission est passée à l'examen des amendements.

Article 53 : Suppression des exonérations de cotisations patronales spécifiques attachées aux contrats de professionnalisation

La commission a examiné deux amendements identiques, présentés respectivement par M. Francis Vercamer et M. Jean-Patrick Gille, supprimant l'article 53 du projet de loi de finances.

PermalienPhoto de Francis Vercamer

a jugé que la suppression de l'exonération spécifique attachée au contrat de professionnalisation ne va pas aider à le développer. On constate que cette aide est très utile pour les entreprises recherchant des salariés qui ont un besoin de formation, en particulier dans le domaine du bâtiment. Il est paradoxal de vouloir développer certains métiers tout en supprimant les dispositifs qui contribuent à cet objectif.

Le rapporteur pour avis a indiqué que l'objectif suivi par le gouvernement est de simplifier les mesures d'exonérations en considérant que le dispositif de droit commun sur les bas salaires (dit « Fillon ») suffit. Cependant, les contrats de professionnalisation sont très utiles et justifient un effort particulier.

PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

a estimé que cet article ne va pas sans susciter certaines inquiétudes. On peut d'ailleurs se demander si l'objectif caché n'est pas de faire glisser le contrat de professionnalisation vers le contrat d'apprentissage, du moins de l'aligner en termes de contributions financières respectives des différentes collectivités publiques. De plus, le dispositif du contrat de professionnalisation est très utile aux groupements d'employeurs qualifiants, dont l'existence serait mise en péril. Enfin, il est regrettable que, d'une manière générale, les contrats de cette nature ne cessent d'être modifiés : les entreprises demandent de la stabilité.

Le président Pierre Méhaignerie a souligné l'importance de la stabilité des dispositifs et donc de leur lisibilité pour les entreprises et observé que l'amendement proposé s'inscrit dans la philosophie générale de la politique de l'emploi qui se met en place ; la professionnalisation des jeunes est une priorité.

Le rapporteur pour avis ayant donné un avis favorable, la commission a adopté les amendements.

Article 54 : Suppression des aides au remplacement de salariés partis en formation ou en congé maternité ou d'adoption

La commission a examiné un amendement de suppression de l'article présenté par M. Jean-Patrick Gille.

PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

a estimé que la suppression de deux dispositifs à l'enjeu financier modique est quelque peu mesquine.

Le rapporteur pour avis a convenu qu'effectivement ces mesures ne mobilisent que 4 millions d'euros et n'ont que quelques milliers de bénéficiaires. Ces chiffres tendent à indiquer que ces aides constituent des « micro-dispositifs » qui ne bénéficient pas à l'ensemble du public ciblé et s'apparentent à un saupoudrage.

Le président Pierre Méhaignerie ayant approuvé les propos du rapporteur pour avis, M. Jean-Patrick Gille a retiré l'amendement.

PermalienPhoto de Martine Billard

a regretté cette décision en considérant que le dispositif de l'aide au remplacement des femmes en congé maternité ou d'adoption est récent et n'a pas été en mesure de donner tous ses effets. Il aurait été souhaitable de donner à cette mesure le temps d'exister, en lui accordant une année de plus avant de trancher définitivement.

Article 56 : Prorogation des aides à l'emploi en faveur des employeurs du secteur des hôtels, cafés et restaurants

La commission a examiné un amendement présenté par M. Francis Vercamer visant à supprimer la limitation à 30 par entreprise des emplois susceptibles de bénéficier des aides au secteur des hôtels, cafés et restaurants (HCR).

PermalienPhoto de Francis Vercamer

a contesté que l'État puisse fixer un tel seuil alors qu'il n'a pas été négocié avec les professionnels. Il a rappelé qu ces aides sont liées à une contrepartie, à savoir l'augmentation des salaires et des emplois dans le secteur HCR. Tout laisse à penser que des entreprises vont être pénalisées, ce qui aura un effet négatif sur l'emploi.

Le rapporteur pour avis a déclaré comprendre la position exprimée par M. Francis Vercamer. Cependant, l'amendement ne peut être adopté. D'abord, il convient d'attendre le résultat des négociations salariales actuellement en cours. Ensuite, le seuil de 30 salariés n'est pas arbitraire, mais a été pris sur le fondement de la règle de minimis fixée par la Commission européenne : il est souhaitable d'attendre la fin des discussions européennes sur la faculté d'abaisser le taux de TVA sur la restauration de 19,6 % à 5,5 % avant d'ouvrir un nouveau front en étant obligé de notifier à la Commission un autre dispositif.

Le président Pierre Méhaignerie a jugé que cet amendement crée une charge publique, ce qui serait contraire à l'article 40 de la Constitution. Sur le fond, l'effort fait par l'État en faveur du secteur HCR est déjà très important, d'autant que ce secteur n'est pas exposé à la concurrence internationale et qu'il faut bien payer des cotisations sociales dans le contexte actuel ; cette politique devrait être évaluée avant d'être étendue.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

a émis des doutes sur l'utilité des aides accordées au secteur HCR en considérant que les contreparties demandées en matière d'amélioration des conditions de travail tardent à venir. Il a constaté par ailleurs que ce secteur est un secteur économique abrité de la concurrence internationale et qu'un abaissement du taux de TVA ne changerait pas le comportement des personnes fréquentant ces établissements.

PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

a observé que le projet de loi de finance procède moins à une prorogation du dispositif, selon l'intitulé officiel de l'article, qu'à une pérennisation de celui-ci.

PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

a estimé qu'il y aurait beaucoup de choses à dire sur les avantages durables accordés au secteur HCR. Cependant, ce secteur se caractérise par la diversité de ses acteurs, ce qui a conduit à l'adoption de comportements très variables en ce qui concerne le recrutement de nouveaux employés ou l'amélioration des conditions de travail.

PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

a considéré que la vraie question est de savoir si oui ou non le secteur de la restauration va bénéficier d'une TVA à 5,5 % car cela bloque toute une série de réflexions sur la politique de l'emploi dans le secteur.

Le rapporteur pour avis a rappelé quelques chiffres concernant le secteur HCR : près de 13 000 emplois supplémentaires créés en 2005 et plus de 17 000 en 2006 ; une augmentation des salaires de l'ordre de 5 % pour les salariés bénéficiant de la suppression du « SMIC hôtelier ».

PermalienPhoto de Francis Vercamer

a retiré l'amendement.

Article 57 : Suppression de l'allocation équivalent retraite (AER)

La commission a examiné deux amendements identiques de suppression de l'article présentés respectivement par M. Jean-Patrick Gille et M. Francis Vercamer.

PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

a souligné que l'AER constitue une mesure de justice sociale et qu'elle permet de verser 950 euros à des personnes ayant travaillé toute leur vie, puisqu'elles ont validé 40 années d'affiliation à la sécurité sociale.

PermalienPhoto de Francis Vercamer

a insisté sur le fait que les bénéficiaires ont travaillé très longtemps et ont un âge qui rend la reprise d'un autre emploi difficilement envisageable. En outre, le dispositif s'adresse souvent à des personnes ayant travaillé dans des bassins d'emploi caractérisés par la disparition de certaines industries, comme le textile. Leurs chances de retour à l'emploi sont réellement très faibles.

Le rapporteur pour avis a convenu qu'il s'agit d'un sujet difficile. Toutefois, la disposition proposée ne concerne que les futurs entrants et n'affectera pas, par conséquent, l'aide qui est versée aux bénéficiaires actuels. De plus, le gouvernement présente cette mesure comme étant couplée avec la politique d'encouragement à l'emploi des seniors. L'AER a représenté en 2006 une dépense de 566 millions d'euros, en forte croissance, avec 74 000 bénéficiaires. L'enjeu est significatif ; il semble que le gouvernement ainsi que des membres de la commission des finances, de l'économie générale et du plan recherchent une solution.

Le président Pierre Méhaignerie a qualifié de délicat et difficile le sujet abordé par cet amendement. D'un côté, il faut prendre en compte la situation des personnes en cause, qui ont très longtemps travaillé. De l'autre, les entreprises doivent être incitées à ne plus se séparer de leurs seniors, ce qu'elles font aujourd'hui, parfois avec l'accord tacite des intéressés, en utilisant les dispositifs publics généreux. Peut-on continuer à financer l'AER quand le gouvernement met en place une véritable politique en faveur des salariés les plus âgés ? La France doit agir en la matière : c'est le pays où le taux d'activité des personnes âgées de 16 à 65 ans est le plus faible d'Europe.

PermalienPhoto de Francis Vercamer

a regretté que la suppression de l'allocation équivalent retraite soit envisagée alors qu'un « Grenelle des minima sociaux » doit avoir lieu. En effet, cette allocation fait partie de ces minima. Par conséquent, il ne faut pas prendre une décision qui pourrait s'apparenter à de la précipitation.

Le président Pierre Méhaignerie a estimé que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales doit adopter des positions cohérentes avec le Plan national d'action concerté pour l'emploi des seniors.

PermalienPhoto de Martine Billard

a déclaré que la suppression de l'AER est injuste. Elle revient en effet à créer une inégalité entre les salariés ayant validé 160 trimestres de cotisations qui sont encore en entreprise – qui pourront prendre leur retraite – et ceux au chômage parce que victimes d'une décision prise par l'entreprise, seule responsable du licenciement.

Le rapporteur pour avis ayant émis un avis défavorable, la commission a rejeté les amendements.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2008 de la mission « Travail et emploi ».

Puis la commission a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Martine Billard, les crédits pour 2008 de la mission « Sécurité sanitaire ».

PermalienPhoto de Martine Billard

, a indiqué que, conformément aux usages de la commission, les questions financières, qui relèvent par nature davantage du champ de compétence de la commission des finances, ne font l'objet que d'une brève présentation dans le présent avis.

Par rapport au précédent exercice 2007, les crédits de la mission augmentent globalement. Cette hausse des crédits masque néanmoins des tendances différentes selon les deux grands programmes constituant la mission.

En ce qui concerne le programme « Veille et sécurité sanitaires », la progression importante des crédits s'explique principalement par la dotation faite au nouvel établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) chargé des actions de prévention et de gestion des moyens de lutte contre les risques sanitaires exceptionnels. Ce nouvel établissement mobilise en effet à lui seul 75 millions d'euros cette année sur le programme. Il ne faut également pas oublier que, depuis 2004, les moyens attribués avaient sensiblement diminué et avaient été compensés par l'utilisation des fonds de roulement. Cette technique comptable a aujourd'hui épuisé ses effets. L'État se devait donc d'intervenir de manière plus conséquente. On peut en revanche regretter que les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », qui concerne le ministère de l'agriculture, soient cette année en diminution.

Sans entrer dans le détail des crédits affectés aux six opérateurs qui relèvent du programme « veille et sécurité sanitaires », il faut souligner que les agences ont toutes demandé que les moyens dont elles sont dotées leur permettent de répondre dans les meilleures conditions aux exigences fortes qui s'expriment en matière de recherche et d'investissements.

S'agissant du thème développé dans l'avis, celui-ci s'inscrit pleinement dans le cadre de la mission de veille et sécurité sanitaire de l'État : il s'agit en effet de la question de la sécurité sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine.

Le choix de ce sujet se justifie pleinement dans la mesure où des signaux inquiétants de dégradation de la qualité des ressources en eau utilisées pour la production d'eau potable – qu'il s'agisse par exemple de nappes d'eau souterraines ou de rivières – se sont fait jour, avec la mise en évidence de pollutions diffuses de produits comme les nitrates et les pesticides, dont les effets sur la santé liés à l'ingestion de faibles doses pendant de longues périodes ne sont pas encore parfaitement établis. De plus, l'accroissement de la sensibilité des appareils d'analyse de l'eau fait qu'il est aujourd'hui possible de mettre en évidence dans l'eau des substances comme des médicaments ou des perturbateurs endocriniens par exemple, dont la présence dans l'eau ne laisse pas d'inquiéter.

Au regard de ces éléments et des inquiétudes qui y sont liées, il est dès lors apparu nécessaire de faire un état des lieux de la sécurité sanitaire de ce qu'on appelle couramment « l'eau du robinet », ou encore « l'eau potable », mais que la terminologie consacrée dans les textes réglementaires désigne par « eau destinée à la consommation humaine ».

Le champ retenu exclut donc délibérément les eaux minérales, les eaux thermales et les eaux de loisirs (eaux de baignade et piscines) mais à l'évidence, l'étendue extrêmement grande du sujet, sa haute technicité et ses très importants enjeux sanitaires mériteraient à eux seuls des investigations plus approfondies que celles, forcément limitées, qu'autorise le cadre d'un avis budgétaire.

Après avoir procédé à de nombreuses auditions extrêmement enrichissantes, on peut établir le double constat suivant : la sécurité sanitaire de l'eau, fortement encadrée par des normes exigeantes, fait l'objet de nombreux contrôles qui assurent globalement une qualité de l'eau destinée à la consommation humaine conforme à la réglementation ; cependant, la persistance de certaines difficultés, comme l'émergence de nouveaux défis encore mal évalués, requièrent certaines adaptations.

L'eau destinée à la consommation humaine est susceptible d'être contaminée par deux vecteurs principaux : d'une part, par des micro-organismes pathogènes (bactéries, virus ou parasites) qui peuvent être à l'origine de maladies infectieuses, essentiellement des gastro-entérites, et qui constituent le principal risque direct et immédiat pour la santé lié à la pollution de l'eau ; d'autre part, par des polluants chimiques (pesticides, nitrates, hydrocarbures, métaux lourds, etc.), qui peuvent affecter la santé à long terme sachant que, sauf pollution accidentelle massive pouvant avoir des effets immédiats, c'est l'ingestion sur de longues périodes de substances présentes en faibles quantités qui peut poser problème.

C'est ainsi que conformément à certaines directives communautaires – pour l'essentiel la directive cadre du 23 octobre 2000 qui fixe un objectif général de « bon état écologique et chimique de l'eau » et la directive du 3 novembre 1998 qui fixe le cadre réglementaire européen en matière d'eau potable –, le code de la santé publique détermine des critères de qualité pour la composition de l'eau afin d'éviter sa contamination par des micro-organismes pathogènes ou des polluants.

Par ailleurs, la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et le Plan national santé environnement (PNSE) ont également fixé des objectifs ambitieux en matière de sécurité sanitaire de l'eau.

La loi du 9 août 2004 relative à la santé publique a défini ainsi 100 objectifs de santé publique dont l'un vise à diminuer par deux, d'ici 2008, le pourcentage de la population alimentée par une eau de distribution publique dont les limites de qualité ne sont pas respectées pour les paramètres microbiologiques et les pesticides. Le Plan national santé environnement 2004-2008 définit parallèlement comme objectif prioritaire (action n° 10) la protection de la totalité des captages à l'échéance 2010 et fixe l'objectif intermédiaire de 80 % des captages protégés fin 2008. Aujourd'hui, 60 % seulement des captages sont protégés.

L'eau fait l'objet d'un contrôle sanitaire strict qui fait intervenir de nombreux acteurs – au premier rang desquels les directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS) et les responsables de la distribution – , depuis sa source jusqu'à son utilisation, en passant par son traitement, son stockage et sa distribution.

Ce cadre réglementaire strict et les multiples contrôles tout au long de la chaîne font que l'eau distribuée en France est globalement conforme à la réglementation.

Cependant, le respect de la réglementation nécessite parfois des traitements coûteux qui se répercutent sur les consommateurs et entraîne parfois certaines interdictions de consommation. Cela n'empêche pas en outre de s'interroger sur les risques que font courir à la sécurité sanitaire de l'eau certains problèmes persistants ou émergents et ne doit pas conduire à éluder la question des nécessaires adaptations.

Tout d'abord, certaines difficultés déjà identifiées comme les pesticides et les nitrates continuent de retenir l'attention.

Concernant les pesticides, l'Institut français de l'environnement (IFEN) relève que « les niveaux de contamination sont souvent significatifs ». En 2006, la consommation de l'eau du robinet a dû être restreinte à cause des pesticides dans 19 départements ; ces situations anormales ont concerné environ 110 600 personnes en 2006, soit 0,18 % de la population. La connaissance de l'action à long terme de ces pesticides sur la santé humaine reste incomplète. Certains pesticides sont suspectés d'avoir des effets à long terme sur la santé : toxicité vis-à-vis des fonctions de reproduction, en particulier pour la faune aquatique, potentiel mutagène et potentiel cancérigène dans plusieurs espèces, etc.

Deux exemples sont, à cet égard, particulièrement édifiants. D'une part, celui du chlordécone : une étude récente du cancérologue M. Dominique Belpomme a conclu au constat d'un « désastre sanitaire aux Antilles ». D'autre part, celui du Roundup, principal herbicide utilisé au monde, et sur lequel l'équipe à l'Université de Caen du professeur Gilles-Eric Séralini – entendu par la rapporteure pour avis au cours des auditions – a publié au printemps 2007 une étude sur les effets toxiques jusqu'alors inconnus de ce produit sur les cellules embryonnaires humaines. Cette étude met en évidence « les actions délétères du Roundup ». De plus, le Roundup, tel qu'il est vendu, est beaucoup plus toxique que le produit qui est connu et homologué pour être son principe actif, le glyphosate.

Enfin, plus globalement, on ne peut qu'être inquiet desdéclarations surprenantes du Président de la République lors de la présentation du résultat du Grenelle de l'environnement, dans la mesure où celui-ci propose des objectifs en deçà de ceux prévus par le plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides (PIRRP) de 2006 et de ceux fixés au niveau européen.

S'agissant des nitrates, qui proviennent essentiellement de la pollution d'origine agricole, l'Institut français de l'environnement (IFEN) indique que, depuis le début des années 1970, la qualité des cours d'eau se dégrade, même si elle semble s'être stabilisée au cours de la dernière décennie. Or de fortes teneurs en nitrates dénotent l'état d'une ressource fortement dégradée. La lutte contre la pollution par les nitrates est donc devenue un enjeu pour la qualité des eaux de surfaces et des eaux souterraines. Les nitrates constituent par ailleurs l'un des domaines où la France manque à certaines de ses obligations européennes.

À côté des difficultés déjà identifiées que constituent les pesticides et les nitrates, il faut désormais mentionner l'apparition de nouveaux risques émergents, moins connus et plus difficile à traiter, qui requièrent donc une attention particulière.

Il en va ainsi notamment desrésidus de médicaments, car plus de trente classes de médicaments sont présentes dans les eaux superficielles. Certains scientifiques évoquent désormais le fait que des composés présents à l'état de traces dans l'eau sont susceptibles d'effets sur la santé, par exemple de perturbation de l'activité endocrinienne. Certains médicaments comme les hormones de synthèse utilisées dans les contraceptifs agissent en effet comme de véritables hormones sexuelles et vont perturber les fonctions endocriniennes des poissons.

Dans ce cadre, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) est chargée, d'une part, de la réalisation d'une étude, en liaison avec l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) et les industriels du médicament, concernant l'identification et la hiérarchisation des molécules d'intérêt et, d'autre part, de la réalisation (à travers ses divers laboratoires d'analyses) d'un inventaire des niveaux de contamination des eaux destinées à la consommation humaine sur un panel de molécules.

Le cas particulier des antibiotiques et des bactéries antibiorésistantes dans les eaux doit aussi être évoqué car la thématique des gènes de résistance aux antibiotiques est un problème sérieux encore mal connu en France.

L'utilisation d'antibiotiques chez l'animal comme agents thérapeutiques ou comme promoteurs de croissance peut en effet entraîner une réduction de l'efficacité de ces produits en médecine vétérinaire mais aussi en médecine humaine. Le développement d'une résistance chez certains micro-organismes pathogènes peut également s'accompagner de l'apparition d'un « déterminant de résistance » chez un autre micro-organisme et constitue à ce titre un danger non négligeable. L'AFSSA a certes conclu en 2006 que les eaux destinées à la consommation humaine en France ne peuvent pas être considérées comme un milieu favorisant l'augmentation de l'antibiorésistance bactérienne. Toutefois, l'agence recommande que l'utilisation raisonnée des substances antibiotiques reste une priorité d'action et suggère de maintenir une veille constante sur la problématique générale de l'antibiorésistance.

Au total, il semble donc bien que des adaptations restent nécessaires pour renforcer la sécurité sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine. C'est pourquoi un certain nombre de propositions peuvent être avancées.

L'état des lieux réalisé en 2004 par les agences de l'eau, les directions régionales de l'environnement et le bureau de recherche géologique et minière (BRGM) montre clairement qu'à l'échelon national, 50 % des masses d'eau souterraine risquent de ne pas atteindre le bon état fixé par la directive cadre sur l'eau en 2015. Les actions d'amélioration des ressources en eau doivent donc être poursuivies et confortées, voire engagées dans certaines zones du territoire. En particulier, les efforts de mise en place de périmètres de protection engagés doivent être amplifiés pour atteindre l'objectif fixé par le Plan national santé environnement (PNSE) de 100 % des captages protégés à échéance de 2010.

En outre, c'est en protégeant de façon globale l'environnement que l'on protégera mieux la santé des consommateurs d'eau, comme l'illustre la mise en place par certaines agences de l'eau, comme l'agence de l'eau Loire-Bretagne, d'actions « de bassins versants » correspondant à des actions contractuelles associant agriculteurs, collectivités et particuliers qui, à partir d'un diagnostic reconnu, définissent des mesures d'actions concrètes (réduction de teneur en nitrates, action sur l'épandage des pesticides) pour améliorer l'environnement dans son ensemble.

On peut aussi noter, comme l'a souligné l'AFSSAPS, les tendances positives qui se déssinent au niveau européen sur l'intégration du suivi des conséquences sur l'environnement dans l'analyse des risques avant une mise sur le marché de médicaments. Une amélioration de la sécurité sanitaire de l'eau ne pourra également pas s'exonérer d'une réflexion sur les moyens de s'orienter vers une agriculture moins consommatrice de produits susceptibles de créer des pollutions diffuses, et c'est là toute la thématique prometteuse de l'agriculture biologique.

Par ailleurs, il serait souhaitable que les petits services locaux de distribution soient regroupés ou que leurs services techniques puissent être mutualisés. Il existe en effet une multiplicité préoccupante des réseaux de distribution en France, avec un grand nombre de petites structures. Il est hautement probable que certains de ces réseaux ne disposent pas de tous les services techniques leur permettant d'assurer toujours dans les meilleures conditions sanitaires une gestion de l'eau ad hoc. À cet égard, la question du regroupement des structures de captage et de distribution mérite d'être étudiée.

Les efforts de recherche sur l'eau doivent surtout être augmentés. Il ressort très nettement de l'ensemble des auditions réalisées qu'il est primordial d'intensifier les travaux de recherche et l'acquisition des connaissances sur les sources de contamination de l'eau. On ne peut en effet que déplorer la diminution du nombre des laboratoires publics et des crédits qui leur sont affectés, la raréfaction de structures publiques, le morcellement de la recherche, ainsi que le déficit du nombre de chercheurs qui travaillent sur l'eau potable, et ce quelle que soit la structure concernée. Au regard de ce constat quasi unanime d'une recherche très dispersée, avec une intervention publique faible, la mission d'impulsion de la recherche et d'évaluation des risques liés à l'eau destinée à la consommation humaine confiée à l'AFSSA est essentielle et doit être encouragée, ainsi que la promotion du laboratoire d'études et de recherche en hydrologie de Nancy comme laboratoire de référence dans le domaine de l'eau. Tout cela suppose bien sûr des moyens beaucoup plus importants que ceux attribués actuellement.

Il convient également d'adopter des mesures simples en matière de risques émergents, telle l'interdiction de l'usage d'antibiotiques comme promoteur de croissance au Danemark en 1995, qui a amélioré les conditions sanitaires dans des proportions importantes avec un effondrement de l'antibiorésistance chez l'homme. Ce type d'exemple pourrait utilement inspirer les politiques publiques françaises.

Il est en outre essentiel que la sécurité sanitaire de l'eau devienne une préoccupation partagée par tous. De nouvelles interventions législatives ou réglementaires ne sont pas forcément nécessaires. Le cadre juridique existant est en effet globalement satisfaisant, même s'il convient de favoriser une évolution de la réglementation pour que les autorisations de mise sur le marché concernent le produit tel qu'il est commercialisé et pas seulement la molécule qui en est le principe de base. Quoi qu'il en soit, le respect des réglementations existantes pourrait être grandement facilité par un travail de sensibilisation de tous les citoyens aux enjeux de la sécurité sanitaire de l'eau.

Il ne faut pas non plus baisser la garde en matière de risque terroriste, même si des mesures ont déjà été prises en matière de sécurisation des réseaux de distribution. Dans le cadre du plan Vigipirate, un contrôle en continu du chlore est ainsi déjà mis en place.

Enfin, la récupération de l'eau de pluie pour une utilisation dans l'habitat exige un certain nombre de précautions tant les risques dits d'« interconnexion des réseaux » mis en évidence dans des pays comme les Pays-Bas ou la Nouvelle-Zélande sont réels. Il est donc important d'être vigilant et d'étudier de plus près ces dispositifs de récupération des eaux.

Un débat a suivi l'exposé de la rapporteure pour avis.

Après avoir fait part de son intérêt tout particulier pour l'étude des risques épidémiologiques, M. Jean-Pierre Door a rappelé qu'il est l'auteur du rapport sur le risque épidémique présenté au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologique (OPECST) et du rapport de la mission d'information sur la grippe aviaire. Le présent avis traite un sujet passionnant et majeur pour la France. De fait, les analyses soumises à la commission sont fort intéressantes.

S'agissant de l'évolution des crédits de la mission, il est important de souligner les efforts accomplis par le gouvernement, avec une progression de l'ordre de 10 % des crédits par rapport à l'année dernière. Il est vrai que ce chiffre est lié au progrès considérable que représente en France la constitution de l'Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), mais c'est l'honneur de la France de s'être désormais dotée, comme seul l'a fait également le Royaume-Uni, d'un établissement public spécifique chargé des actions de prévention et de gestion des moyens de lutte contre les risques sanitaires exceptionnels – avec tous les moyens organisationnels ou en personnels, notamment avec l'organisation de la nouvelle réserve sanitaire, que cela implique – et à même de réagir en cas de risques majeurs (pandémies diverses, chikungunya, fièvres, menaces terroristes, etc.). Cette création récente doit donc être saluée.

Un certain nombre de thèmes auraient dû être abordés dès lors que l'on évoque la question de la sécurité sanitaire. Tout d'abord, il est important que la France, dans le cadre de l'action de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), élabore des mécanismes assurant la traçabilité des médicaments, de l'opération de production jusqu'à la distribution. De tels mécanismes existent déjà en matière vétérinaire. Cela ne serait pas inutile pour les médicaments qui sont aujourd'hui, dans un nombre non négligeables de cas, vendus sur internet ou produits à l'étranger. En outre, la question de la maladie dite de la « langue bleue » pourrait également être évoquée.

S'agissant de ce dernier sujet, le président Pierre Méhaignerie a mis en avant la compétence de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

a estimé que la dimension sanitaire de cette question ne peut êtres sous-estimée. On voit bien que certains produits proviennent de pays atteints par cette maladie et les modes de contamination n'ont que faire des frontières, comme le montre l'exemple des contaminations par les moustiques. Par ailleurs, d'autres thèmes doivent encore être mentionnés : le rôle important joué par l'Établissement français du sang (EFS), la question de la prise en charge par l'Institut de veille sanitaire (InVS) de l'intégralité du financement des groupements régionaux d'observation de la grippe (GROG), réseau de médecins de ville en charge de la surveillance de la grippe, ou encore le problème de la diffusion de la tuberculose.

PermalienPhoto de Martine Billard

a fait remarquer que le choix d'un thème précis développé dans le cadre de la deuxième partie de l'avis budgétaire rend par définition difficile la prise en considération l'ensemble de ces thématiques, au demeurant essentielles.

Revenant à la question spécifique de la qualité de l'eau, M. Jean-Pierre Door en a rappelé les implications multiples. Des campagnes d'information importantes sont nécessaires pour faire face efficacement à des risques médicaux ou bioterroristes. Parfois, des comportements en apparence anodins peuvent avoir des conséquences graves, comme le montre l'exemple des médicaments trop souvent jetés dans les lavabos.

Enfin, l'étude de l'ensemble de ces questions ne saurait faire l'économie d'une réflexion sur leur dimension internationale. Il existe certes un règlement sanitaire international. Mais il importe également de développer la coopération européenne en matière de lutte contre les risques sanitaires (telle la diffusion du virus grippal H5N1) ou bioterroristes, comme cela a déjà été rappelé à la ministre en charge de la santé, afin d'être plus performant.

PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

a souligné à son tour la qualité du rapport et a souhaité apporter deux observations concernant les pollutions liées à l'agriculture ou aux médicaments. Comme le rapport le reconnaît, les agriculteurs ont réfléchi depuis longtemps à la protection des nappes phréatiques et la diffusion d'une politique d'agriculture raisonnée est aujourd'hui bien répandue. Ce n'est d'ailleurs pas l'agriculture qui est la plus responsable de la pollution des eaux. Ce sont les collectivités locales qui continuent d'employer des produits de nettoyage urbains alors qu'il existe des techniques alternatives de désherbage thermique comme le rappelle justement le rapport, et la SNCF dont on parle trop peu mais qui est pourtant le plus gros consommateur français de Roundup, qui doivent être montrées du doigt. Concernant les pollutions liées au rejet de médicaments, les récentes campagnes d'information tendant à limiter la prescription d'antibiotiques (« Les antibiotiques, c'est pas automatique ») vont indéniablement dans le bon sens.

PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

a déclaré partager globalement les huit orientations de la rapporteure pour avis bien qu'il faille reconnaître qu'elles ne sont pas d'importance égale. En matière de pesticide, il faut souligner l'état de connaissances insuffisant des effets sanitaires de la pollution de l'eau par ces produits. Les normes imposées par les directions départementales et des affaires sanitaires et sociales (DDASS) ne sont, de ce fait, pas toujours bien comprises par beaucoup d'élus locaux : pour un nanogramme d'atrazine par mètre cube en trop, une obligation de mise en conformité sous quinze jours peut par exemple être adressée au distributeur de l'eau et son non-respect est sanctionné par un arrêt de la distribution de l'eau. Il serait pourtant indispensable que la connaissance des seuils de tolérance et de risques sanitaires réels liés à la présence des pesticides soit étendue au-delà du cercle des seuls spécialistes.

En effet, le coût du respect des normes devient extrêmement élevé pour le consommateur et peut ainsi atteindre 25 à 30 % du prix du mètre cube d'eau consommé. Le consommateur est donc en droit de se voir expliquer les exigences de protection sanitaire qui sont à l'origine de ce coût. Les collectivités locales, comme les consommateurs, ont besoin de disposer d'informations sur le risque sanitaire réel. Il importe que le prix de l'eau soit stabilisé, ce qui ne pourra se faire que si une information sur les risques sanitaires et une véritable pédagogie du risque sont développées à l'égard de tous.

Le président Pierre Méhaignerie a souligné le rôle crucial de l'eau en matière d'alimentation et de santé puis s'est interrogé sur les conséquences de la multiplicité des établissements publics, sur la dispersion de la recherche et sur les répercussions de normes sanitaires et environnementales strictes, donc nécessairement coûteuses, sur les importations en économie ouverte.

En réponse aux différents intervenants, la rapporteure pour avis a fourni les éléments d'information suivants :

– Les normes de sécurité sanitaire de l'eau destinée à la consommation humaine se placent dans le strict respect des directives européennes et l'action de l'Union européenne dans ce domaine est donc déterminante. La France y prend d'ailleurs toute sa part et le laboratoire d'études et de recherches en hydrologie de Nancy constituera, par exemple, un maillon clef du réseau d'expertise européenne dans le domaine de l'eau.

– Il convient effectivement d'informer les citoyens sur les conséquences des rejets de médicaments dans les canalisations d'eaux usées. A ce sujet, on ne peut que regretter le faible développement de la récupération des médicaments par les pharmacies. Des pistes d'amélioration sont proposées dans le rapport comme la diffusion de techniques utilisant des pastilles désinfectantes pour les malades à domicile qui mériteraient d'être approfondies.

– L'usage des antibiotiques pour les élevages constitue un problème d'une ampleur au moins équivalente et il faut regretter que des études globales sur l'impact de leur rejet dans l'environnement n'existent pas encore.

– L'audition du professeur Gilles-Eric Seralini, président du comité de recherche et d'information indépendantes sur le génie génétique, a bien mis en évidence que l'autorisation de mise sur le marché délivrée pour le Roundup ne portait que sur son principe actif, le glyphosate, qui est bien moins toxique que le produit commercialisé. C'est une lacune de la réglementation européenne relative aux homologations des produits phytosanitaires qui ne prévoit pas l'étude des produits commercialisés. A cet égard, une évolution de la réglementation serait souhaitable, afin que les autorisations de mises sur le marché (AMM) se fassent sur le produit tel qu'il est commercialisé et pas seulement sur la molécule qui en est le principe de base.

– Il serait effectivement intéressant que la SNCF et Réseau ferré de France (RFF) fournissent des réponses sur le changement éventuel de leurs pratiques en matière d'usage du Roundup le long des voies ferrées.

– Une campagne d'information sur l'usage du Roundup et des pesticides devrait être faite auprès des « jardiniers du dimanche ».

– Les normes sanitaires imposées par les DDASS en matière de pesticide sont guidées par le principe de précaution. Il faudrait surtout disposer d'études plus précises sur les effets des pesticides, qui analyseraient notamment dans quelle mesure la pollution varie en fonction des périodes d'épandages.

– Le Roundup est le pesticide le plus vendu au monde : une modification des comportements d'utilisation doit donc être d'ampleur mondiale. La France, qui présidera l'Union européenne en 2008, pourrait porter des propositions tendant à réduire les contaminations par l'utilisation massive des pesticides. Il appartient en outre aux pays développés comme la France d'avoir une attitude responsable vis-à-vis des pays moins développés auxquels ils vendent des produits dangereux, comme on la vu par exemple avec le chloredecone qui est interdit en France métropolitaine depuis 1990 mais qui a continué à être vendu notamment aux Antilles jusqu'en 1993.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

a rappelé à cet égard tout l'intérêt qui s'attache à un règlement sanitaire mondial et a souligné que, si l'atrazine, herbicide de synthèse, est interdit depuis longtemps, les nappes phréatiques n'en seront débarrassées qu'à très long terme.

La rapporteure pour avis a souligné qu'il en va de même pour d'autres produits, tels que le chloredecone et les polychlorobiphényles (PCB). Le plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides, qui recommande de réduire de 50 % d'ici la fin 2009 les quantités de pesticides les plus nocifs employés en France et d'interdire ou, quand ce n'est pas possible, de limiter la mise sur le marché et l'utilisation de produits contenant des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMPR), comporte de bons objectifs. Les déclarations récentes du Président de la république lors de la présentation des résultats du Grenelle de l'environnement, très en retrait par rapport à ces objectifs, n'en sont que plus inquiétantes.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

a fait observer que les collectivités locales sont soumises à des contraintes financières de plus en plus fortes du fait des obligations de remplacement des canalisations d'adduction d'eau en plomb et des exigences de mise en conformité des vieux réseaux.

La rapporteure pour avis a évoqué la polémique récente sur le coût élevé de l'eau et s'est déclarée favorable à la politique de soutien à la consommation de l'eau du robinet, à condition que la qualité de cette eau soit maintenue. Par ailleurs, si le rapport fait apparaître quelques motifs d'inquiétudes, ceux-ci concernent l'ensemble des captages d'eau et donc tout autant la qualité des eaux en bouteille. Il faut veiller en outre à ne pas multiplier les déchets plastiques. L'exemple de la ville de Paris, qui ne met plus de bouteilles d'eau mais des carafes à disposition lors de ses réunions, pourrait utilement être imité, y compris à l'Assemblée nationale.

PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

a souhaité ouvrir un débat de fond sur le principe de précaution. Comme le propose le rapport d'étape de la commission pour la libération de la croissance française présidée par M. Jacques Attali, le principe de précaution devrait être réécrit. Il y a en effet un problème de lisibilité et de cohérence dans la mise en oeuvre de ce principe à l'heure actuelle. Comment peut-on par exemple comprendre que ce principe soit parfois invoqué pour la fixation de normes sanitaires extrêmement sévères en matière d'eau destinée à la consommation humaine alors qu'il est dans d'autres cas tout simplement mis de côté comme à propos du lien entre les vaccins contre l'hépatite B et de la multiplication du nombre des scléroses en plaque, la corrélation entre les deux phénomènes étant pourtant établie ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

a rappelé qu'en matière de sécurité sanitaire les collectivités locales sont tenues d'appliquer les critères de qualité pour la composition de l'eau fixés par les directives européennes. Celles-ci ont par exemple réduit de 50 à 25 mg le seuil de tolérance pour la présence de nitrates, alors qu'on ne sait même pas si une présence de 100 mg présenterait des risques.

La rapporteure pour avis a tenu à rappeler que la fixation de ces seuils résulte aussi de la prise en compte des effets sur de longues périodes de substances présentes même en faible quantité.

Puis, la rapporteure pour avis a indiqué que, compte tenu du manque de crédits destinés aux agences sanitaires, elle ne peut que donner un avis défavorable à l'adoption des crédits pour 2008 de la mission « Sécurité sanitaire ».

Contrairement à l'avis de la rapporteure pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2008 de la mission « Sécurité sanitaire ».