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Commission de la défense nationale et des forces armées

Séance du 6 février 2008 à 16h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • PSDC
  • lisbonne
  • militaire

La séance

Source

Ratification du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne, le traité instituant la Communauté européenne et certains actes connexes (avis)

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné, pour avis, sur le rapport de M. Michel Sordi, le projet de loi (n° 690) autorisant la ratification du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne, le traité instituant la Communauté européenne et certains actes connexes.

PermalienPhoto de Michel Sordi

a rappelé que l'Union européenne joue depuis maintenant plusieurs années, aux côtés des autres acteurs internationaux, un rôle important pour la préservation de la paix et de la sécurité dans le monde. Face à la complexité croissante des enjeux stratégiques, des menaces et des crises, le renforcement de la politique européenne de sécurité et de défense apparaît néanmoins comme une nécessité, tant pour l'Union que pour ses vingt-sept États membres. Le traité de Lisbonne introduit dans les traités sur l'Union européenne et sur le fonctionnement de l'Union européenne un dispositif détaillé qui fait de la politique de sécurité et de défense commune – la PSDC – une démarche cohérente, volontariste, souple et progressive. En offrant aux États membres une nouvelle base d'engagement politique et militaire, le traité européen simplifié constitue donc une véritable opportunité de relancer la politique européenne de sécurité et de défense. C'est pour cette raison que la commission de la défense a souhaité se saisir pour avis du projet de loi autorisant la ratification du traité de Lisbonne.

Il a rappelé que le traité européen simplifié permet tout d'abord de bien clarifier les deux objectifs de la PSDC : assurer à l'Union une capacité opérationnelle pour ses interventions extérieures et préparer la définition progressive d'une politique de défense commune. L'objectif capacitaire s'appuie sur des moyens d'action civils et militaires fournis par les États membres, qui doivent constituer un réservoir unique de forces. La PSDC repose donc sur l'implication déterminée des États membres : elle est essentiellement volontariste. Le deuxième objectif témoigne de l'ambition européenne d'atteindre dans le futur un niveau élevé d'intégration en matière de sécurité et de défense. La mise en place d'une défense commune n'est cependant pas pour demain puisqu'elle doit être décidée par le Conseil européen à l'unanimité des 27 États membres.

Les nouvelles dispositions du traité de Lisbonne n'ont donc pas vocation à faire de la PSDC une alliance militaire alternative à l'Alliance atlantique, mais plutôt à organiser une complémentarité, dans le respect des spécificités et des engagements de chacun. Elles ouvrent également des perspectives pour l'avenir de la défense européenne, en cohérence avec l'évolution du contexte stratégique depuis la fin de la guerre froide.

Le traité simplifié élargit également le champ des interventions extérieures de l'Union en ajoutant aux missions de gestion de crises qu'elle a menées jusqu'à présent la possibilité de conduire des missions de conseil et d'assistance militaires ainsi que de prévention des conflits et de stabilisation post conflits. Toutes ces actions, et c'est également une nouveauté, peuvent concourir à la lutte contre le terrorisme. Le traité insiste également sur la dimension collective de la sécurité et de la défense de l'Union, avec l'insertion d'une clause de solidarité en cas de catastrophe naturelle ou d'attaque terroriste et d'une clause d'aide et d'assistance en cas d'agression armée d'un État membre. Sans aller jusqu'à un engagement de défense mutuelle, ces clauses ont une forte signification symbolique et politique. C'est en effet la première fois que les traités fondateurs de l'Union européenne comprennent des dispositions aussi engageantes en matière de solidarité militaire et de lutte contre le terrorisme.

Le rapporteur a ensuite précisé que pour mieux assurer la relance et le succès de la PSDC, le traité de Lisbonne avait fait le choix de la souplesse et du pragmatisme afin de prendre en compte la diversité croissante existant entre les vingt-sept États membres de l'Union. Cette volonté de souplesse s'exprime dans la confirmation du rôle et du fonctionnement de l'Agence européenne de défense, créée en 2004. Il s'agit en effet d'une structure ouverte à tous les États membres, qui participent aux projets selon leurs besoins, leurs compétences et leurs choix militaires et industriels. Elle permet donc une coopération à la carte, adaptable aux capacités et besoins de chacun. Toujours dans un esprit de souplesse et d'efficacité, le Conseil aura la faculté de confier une mission de gestion de crise à un groupe réduit d'États membres et pourra établir une coopération structurée permanente entre des États membres remplissant des critères élevés de capacités militaires et ayant souscrit des engagements contraignants en vue de missions exigeantes. L'objectif de cette coopération est de permettre aux États membres qui le souhaitent d'aller un peu plus vite dans la résorption des lacunes capacitaires et un peu plus loin dans le développement d'une action commune. Comme pour tout le reste de la politique de sécurité et de défense commune, son succès dépendra donc, avant tout, de la volonté d'implication des États et de leur capacité à dépasser les égoïsmes nationaux.

M. Michel Sordi a ensuite évoqué les défis qui restent à relever pour donner toute son amplitude à la PSDC, trois contraintes déjà existantes n'étant pas levées par le traité de Lisbonne. Il s'agit tout d'abord de la contrainte institutionnelle de l'unanimité puisque, malgré une évolution des règles de majorité dans de nombreux domaines, l'unanimité est restée la règle pour le deuxième pilier de l'Union, et donc pour la PSDC. L'intérêt de la coopération structurée permanente, qui sera quant à elle constituée à la majorité qualifiée, n'en est que plus grand. La contrainte financière demeure également puisque, malgré une petite avancée pour la préparation des missions de gestion de crise, l'essentiel des dépenses relatives à des opérations ayant des implications militaires ou intervenant dans le domaine de la défense continuera à ne pas relever du budget de l'Union et à dépendre des contributions, et donc du bon vouloir, des États membres. Enfin, il a souligné l'existence d'une forte contrainte politique induite par le fait qu'il n'existe pas au sein de l'Union d'accord sur les objectifs, voire l'utilité de la PSDC. De nombreux États membres sont satisfaits par le système de défense et de sécurité collectives garanti par l'OTAN et considèrent le développement d'une politique européenne de sécurité et de défense autonome comme, au mieux, une redondance inutile et coûteuse et, au pire, une concurrence dangereuse pour l'Alliance atlantique.

Pour relancer la dynamique vertueuse de la PSDC, il convient donc avant tout de clarifier les objectifs et les ambitions de l'Union dans ce domaine et de lever toute ambiguïté sur son articulation avec l'Alliance atlantique. Car celle-ci a beaucoup à gagner d'une Union européenne mieux dotée en capacités militaires et plus autonome dans la conduite d'interventions extérieures. L'intérêt est bien sûr capacitaire, puisque l'OTAN traverse aujourd'hui, comme l'Union, une véritable crise de la génération de forces, mais il est également politique, diplomatique et stratégique, car l'existence même de la PSDC multiplie les options d'interventions pour les acteurs internationaux. Même aux États-Unis, la reconnaissance de l'Union comme un acteur international possible et utile a fait son chemin… Reste donc à en persuader nos partenaires les plus atlantistes !

Le rapporteur a estimé qu'au-delà des textes et des évolutions institutionnelles, seule une volonté politique claire et partagée par plusieurs États membres pourra relancer la politique de sécurité et de défense commune. Du côté français, le gouvernement est déterminé à agir dans ce sens et fera de l'Europe de la défense l'un des dossiers phares de sa présidence de l'Union, au deuxième semestre 2008. D'ores et déjà, la France a adopté sur ce sujet une position constructive et dynamique en clarifiant sa position par rapport et au sein de l'OTAN, en proposant de rénover la stratégie européenne de sécurité et en s'impliquant dans les programmes d'équipement conduits en coopération.

La présidence française de l'Union sera ainsi l'occasion, après la ratification du traité simplifié par l'ensemble des États membres, d'engager la constitution de la coopération structurée permanente dans un esprit d'ouverture et avec l'objectif d'en faire un outil de renforcement capacitaire et de coopération industrielle. Elle devrait également permettre de mener à bien la révision de la stratégie européenne de sécurité, afin d'assurer son adéquation aux enjeux stratégiques actuels et au nouveau champ de mission de la PSDC, et d'avancer sur le dossier du commandement européen intégré, gage d'une plus grande efficacité de l'Union dans ses missions de gestion de crise et d'une meilleure complémentarité avec l'OTAN et l'ONU.

En conclusion, M. Michel Sordi a rappelé que la construction de l'Europe de la défense était indissociable de l'ambition d'une Europe responsable et crédible sur la scène internationale. Il n'y aura pas de vraie diplomatie européenne sans une Union disposant des moyens d'agir, y compris sur le plan militaire quand cela est nécessaire. Bien sûr, la France ne fera rien toute seule. Mais elle doit agir dans un esprit d'ouverture et de souplesse pour persuader ses principaux partenaires de se saisir des avancées du traité de Lisbonne.

Il a ensuite proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des dispositions relatives à la politique de sécurité et de défense commune du projet de loi autorisant la ratification du traité de Lisbonne.

Le président Guy Teissier a estimé qu'en matière de défense, le Traité de Lisbonne ressemblait à une forme d'auberge espagnole. Les États membres peuvent apporter à l'Union les moyens qu'ils choisissent, lorsqu'ils le désirent.

PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

a confirmé que tel était bien l'état d'esprit qui avait présidé à l'élaboration du traité. Il a ajouté qu'il se consacrait actuellement avec plaisir, conjointement avec M. Gilbert Le Bris, au groupe de travail sur l'Europe de la défense constitué au sein de la commission. Deux axes de réflexion ont été choisis. Le premier porte sur les aspects institutionnels de la politique de sécurité et de défense commune. À ce titre, le groupe de travail a notamment rencontré le nouveau directeur de l'AED afin d'évaluer les progrès potentiels. La seconde préoccupation concerne les questions de coopérations et de consolidations industrielles. Il s'agit d'un domaine complexe, où les avancées ne peuvent être obtenues qu'à la suite d'un travail patient. En tout état de cause, la volonté des États est déterminante dans la dynamique de l'Europe de la défense. Le groupe de travail présentera une communication d'étape à la commission au cours du printemps.

Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption des dispositions relatives à la politique de sécurité et de défense commune du projet de loi autorisant la ratification du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne, le traité instituant la Communauté européenne et certains actes connexes.