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Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 1er décembre 2008 à 16h00
Nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

L'article 2 marque un nouveau développement, d'ordre législatif, cette fois, dans la réorganisation de notre audiovisuel extérieur. Le sujet n'est pas nouveau : il a déjà été traité par plusieurs gouvernements. Comme d'autres collègues sans doute, j'ai participé à une mission d'information parlementaire sous la précédente législature, qui avait remis au gouvernement de l'époque des conclusions qui, c'est le moins que l'on puisse dire, n'ont pas été suivies d'effets. En l'occurrence, ce gouvernement avait confié à l'un d'entre nous une mission parallèle dont les conclusions allaient à l'encontre de celles que la mission d'information parlementaire, composée de tous les groupes de notre assemblée, avait – le fait n'est pas courant – adoptées à l'unanimité.

Pour avoir été, pendant de longues années, rapporteur du budget des relations culturelles internationales et de la francophonie – ce que, depuis la LOLF, on appelle l'action extérieure de l'État – j'ai été moi-même auditionné par M. Benamou, alors chargé de mener une réflexion par le Président de la République. Je l'avoue, la montagne a accouché d'une souris, et d'une souris à pâle figure au regard des enjeux qu'est censé relever l'audiovisuel extérieur de notre pays.

Faut-il rappeler que la France, qui fut jadis une des plus grandes puissances mondiales, a toujours pensé qu'elle avait pour mission de transmettre un message au monde ? On peut en sourire, en rire même, au XXIe siècle, se dire que c'est une idée dépassée et que la globalisation conduit à une banalisation du message de la France ; sans doute les peuples du monde attendent-ils moins de la voix de la France qu'en d'autres siècles, mais l'idée demeure que nous devons exprimer un point de vue, et surtout, permettre que des idées diverses, des débats, des opinions différentes puissent s'exprimer par les canaux audiovisuels dont nous disposons et qui ont une histoire.

C'est la raison pour laquelle nous avons un audiovisuel extérieur, avec deux piliers historiques RFI et TV5, cette dernière étant le produit d'un traité international – reconnaissons au passage que nous avons fait preuve d'une incorrection caractérisée à l'égard des pays signataires de ce traité, coresponsables avec nous de la gestion et de l'animation de TV5.

De fait, et là est le paradoxe, au moment où le Gouvernement prétend construire la télévision publique du XXIe siècle – je parle en l'occurrence de France Télévisions, et donc de notre audiovisuel intérieur –, on nous propose de brader l'audiovisuel extérieur de la France, et de réserver, par cet article 2, une place de choix aux intérêts privés. Le caractère public de Radio France Internationale va être mis en cause, puisque la société, intitulée avec tant d'imagination « audiovisuel extérieur de la France » – AEF, cela fleure bon le néo-colonialisme ! – sera ouverte aux capitaux privés.

Plus inquiétant encore, l'intégration de RFI au sein de AEF, comme cela vient d'être excellemment dit par les orateurs précédents, s'accompagnera de la fermeture programmée de la plupart des filiales de RFI à l'étranger. C'est donc à la fusion-absorption de RFI que nous assistons, ce qui, de notre point de vue, éteint toute ambition publique en ce domaine.

Si l'article 2 devait être adopté, il nous faudrait prendre acte du fait que la France ne souhaite pas que la conduite de son audiovisuel extérieur se fasse par le biais d'une société publique.

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