Les auteurs du projet de loi sont tellement convaincus que la suspension de l'abonnement à Internet pose des problèmes techniques qu'ils ont dû adapter les trois sanctions applicables.
La première des sanctions, la suspension de l'accès au service pour une durée d'un mois à un an, va de soi. Elle s'appliquera aisément, en tout cas dans les grandes villes. Mais les deux autres sanctions ?
Je voudrais notamment citer celle prévue par l'alinéa 77 de l'article 2, qui nous avait fait sourire en commission, car il est dit qu'il y aurait une application « en fonction de l'état de l'art ». Voilà une notion extraordinaire ! On prévoit en fait que, dans certains cas, il ne sera techniquement pas possible de suspendre l'abonnement. Mais qu'est-ce que « l'état de l'art » ? Nous sommes tout de même réunis ici pour faire des lois et des choix clairs. Ils ne peuvent pas reposer sur un « état de l'art » que nous ne savons pas définir.
L'alinéa 77 prévoit donc une sanction en ces termes : « En fonction de l'état de l'art, la limitation des services ou de l'accès à ces services, à condition que soit garantie la protection des oeuvres et objets auxquels est attaché un droit d'auteur ou un droit voisin. » Je note qu'aucune limitation n'est prévue dans le temps et il s'agit à mon sens d'un lourd motif d'inconstitutionnalité. Par ailleurs, cette formulation, issue d'un amendement du Sénat, montre que les sénateurs ne savent pas si c'est possible mais souhaitent que cela soit juridiquement faisable si c'est techniquement possible. Bonne chance !