L'amendement n° 115 vise à supprimer les alinéas 2 à 6 de l'article. Nous en avons déjà évoqué les motifs en faisant apparaître que le Sénat s'était lancé dans une démarche quelque peu aventureuse en essayant de dresser la liste des perturbations dites prévisibles. Démarche ambitieuse dans laquelle il a manifestement échoué parce que soit la liste prétend être exhaustive et il nous sera facile de trouver des perturbations qui n'y figureraient pas, soit elle ne l'est pas et la voie est ouverte aux interprétations diverses et aux contentieux.
Ainsi, le premier type de perturbation « prévisible » retenu est celui résultant des grèves. Seulement, certaines ne sont pas prévisibles. Ainsi, lorsque surviennent ces situations que vous avez tous vécues, qu'il s'agisse de ce qu'on appelle pudiquement un « accident voyageur », ou de l'agression d'un passager ou d'un contrôleur, à la suite desquelles les personnels se mettent en grève. Or tout le monde partage les motivations de tels mouvements appelés « grèves émotionnelles » puisqu'elles sont la conséquence d'accidents justement imprévisibles.
Ensuite, certaines grèves, nous en avons parlé hier, résultent de mouvements interprofessionnels sur des sujets dont l'enjeu dépasse le simple cadre du fonctionnement de l'entreprise : nous avons notamment évoqué le CPE, la réforme des retraites, on pourrait tout aussi bien penser aux réformes que vous envisagez. De tels mouvements non plus, ne sont pas forcément prévisibles.
Le caractère prévisible des incidents d'origine climatique pose quant à lui des difficultés. Les services météorologiques cherchent à se couvrir en émettant une surabondance d'informations – je vois des élus locaux opiner du chef. Ainsi, les avis d'alerte pleuvent – sans vouloir faire de jeu de mots – sur le bureau des responsables d'autorités administratives de transport. Dès lors, tout le monde veut se protéger, au point que des perturbations – qui peut-être, d'ailleurs, ne se produiront pas – auront été annoncées par simple précaution.
J'ai déjà évoqué, par ailleurs, l'état de délabrement avancé des voies ferrées en province, voies sur lesquelles on ne peut rouler qu'à vingt-cinq ou trente kilomètres par heure. Ces ralentissements tout à fait prévisibles ne sauraient être pris en compte au titre de cet article.
Aussi, la démarche du Sénat paraissant inaboutie et compliquant considérablement la situation, il nous paraît raisonnable de supprimer ces dispositions.