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Intervention de Dominique Raimbourg

Réunion du 22 février 2012 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg :

Nous nous opposons vigoureusement à ce texte.

Tout d'abord, il sera examiné en séance publique le 1er mars et n'a donc aucune chance d'être adopté avant la fin de la législature. Que d'efforts pour rien !

Ensuite, pour apporter la preuve que la délinquance des étrangers a augmenté, l'exposé des motifs se réfère aux chiffres publiés dans son dernier rapport par l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Or celui-ci avait indiqué que ces données devaient être interprétées avec prudence dans la mesure où elles reflètent également l'efficacité des services de police dans leur lutte contre certaines formes de délinquance ; par exemple, les arrestations de voleurs à la tire sont relativement fréquentes, ce qui peut avoir des conséquences sur la répartition en fonction des nationalités.

En réalité, ce texte n'a pas trait à la délinquance des étrangers en général, mais bien à celle de deux catégories particulières : les Roumains et les ressortissants de l'ex-Yougoslavie. S'agissant des premiers, leur délinquance est rapportée au nombre de Roms séjournant en France. Or la situation faite à ces derniers est absurde puisque, jusqu'au 1er janvier 2014, ils ont le droit de s'installer en France, mais pas d'y travailler ; la liste de 150 métiers qui leur étaient autorisés a été réduite à 75 et, pour travailler, ils doivent obtenir une autorisation et leur employeur doit s'acquitter d'une taxe. Quant aux mineurs isolés, la convention qui devait être passée avec la Roumanie a été annulée par le Conseil constitutionnel au motif qu'elle autorisait leur rapatriement sur la seule décision du procureur de la République. C'est à la Roumanie de les prendre en charge, mais cela suppose qu'un dispositif légal permette leur reconduction dans leur pays d'origine. Une fois encore, on ne dispose pas de l'outil nécessaire, et l'on attend du droit pénal qu'il règle des questions qui ne relèvent pas de sa compétence.

La délinquance itinérante est le fait de bandes qui réalisent des cambriolages « à la commande » ; or il n'y a eu aucun contact avec l'Office central de lutte contre la délinquance itinérante pour connaître les besoins en la matière !

Par ailleurs, pour qu'une peine soit juste, il faut qu'elle soit nécessaire. Mais est-il vraiment nécessaire de prévoir une augmentation des peines et une peine plancher alors que l'échelle actuelle des peines permet de condamner en conséquence ceux qui l'ont déjà été ? Tous ceux qui ont fréquenté les tribunaux savent que les juges tiennent compte du casier judiciaire !

Je terminerai par deux questions techniques.

D'une part, il me semble qu'en matière criminelle, la notion de « réitération » est superfétatoire, dans la mesure où la récidive criminelle a une portée générale : de crime à crime, il y a nécessairement récidive – mais j'observe que vous avez déposé un amendement sur ce point.

Ensuite, vous ne rendez obligatoire le prononcé de la peine d'ITF que dans les articles généraux consacrés au sujet, et non dans ceux qui traitent des différentes catégories de délit, ce qui posera certainement des difficultés d'application. Par exemple, pour la plupart des cambriolages, qui ne sont punis d'une interdiction de séjour que lorsque la peine encourue est de dix ans, la disposition prévue ne pourra pas s'appliquer, contrairement à votre souhait !

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