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Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du 9 février 2012 à 9h30
Accord france-inde sur la répartition des droits de propriété intellectuelle dans les accords d'utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

C'est d'ailleurs également le cas des Rafale qui équipent notre armée et dont Dassault est en passe de vendre les plans et les technologies à l'Inde. Tout cela pour seulement 18 avions produits en France sur les 126 prévus. Et dire que Nicolas Sarkozy et François Fillon ont osé se vanter de la signature de ce contrat et qu'ils continuent de parler de la réindustrialisation de la France.

Si la coopération entre les États est un objectif que nous approuvons, le fait de brader nos technologies les plus innovantes pose de lourdes questions.

Autre point important évoqué par l'accord que nous examinons : la question de la responsabilité civile. Je rappelle que le récent rapport de la Cour des comptes sur le coût de la filière nucléaire en France – un rapport datant de janvier 2012 –, souligne le poids financier des régimes d'assurance et la difficulté de déterminer précisément le volume des extensions nécessitées par le vieillissement du matériel ou par un accident.

Il pointe le « manque de transparence » du système assurantiel français, « conduisant à s'interroger sur la capacité du système à couvrir les risques futurs. »

La législation indienne fait reposer la totalité de la responsabilité non sur l'exploitant, l'État indien, mais sur le fournisseur, en l'espèce Areva, autrement dit l'État français. Cette piste semble intéressante, une telle responsabilité illimitée impliquant une exigence d'excellence du constructeur – un accident est si vite arrivé.

Quoi qu'il en soit, l'accord débouchera vraisemblablement sur une édulcoration de la législation indienne. Ici encore, il s'agit de faciliter le chantier en rapprochant le cadre juridique du droit commun dans lequel c'est l'exploitant qui est responsable. La question peut légitimement être posée : à travers Areva, la France sera-t-elle appelée, un jour, à assumer de lourdes et coûteuses responsabilités en cas d'accident sur un EPR ?

Si l'on peut comprendre l'intérêt pour notre industrie d'exporter ses technologies, il faut aussi s'interroger sur le bien-fondé du contrat dont nous discutons. La zone d'implantation des EPR, Jaitapur – que mon collègue Giacobbi connaît sans doute bien –, est particulièrement mal choisie. Le Gouvernement indien a manifestement sous-estimé la résistance de la population locale à ce chantier. Les paysans ne veulent pas vendre leurs terrains malgré la hausse des contreparties proposées par l'État indien.

Les Indiens dénoncent ce projet, appelé à être « le plus grand site nucléaire au monde », d'après les dirigeants indiens, qui se trouve en zone sismique et proche du littoral. La révolte est telle qu'à l'occasion d'une manifestation, en avril dernier, un des manifestants a été assassiné par la police locale et le commissariat mis à sac.

Après la catastrophe de Fukushima, comment peut-on prendre de tels risques ? Difficile de choisir pire territoire, exposé aux séismes et aux tsunamis. Les populations ont besoin d'être rassurées, pas d'être provoquées. Rester sourd à la colère populaire n'est pas une bonne stratégie, ni pour les gouvernements ni pour les entreprises.

Cela a été dit, les besoins de l'Inde en matière d'énergie sont énormes. Pour y répondre, le recours à la coopération internationale est justifié. Le choix de la France présente un avantage par rapport à d'autres pays fournisseurs spécialistes du nucléaire low cost, à bas prix, à bas niveau de sûreté. Mais cet accord France-Inde ne peut pas se faire à n'importe quelle condition. C'est la raison pour laquelle les députés communistes, républicains, citoyens, du parti de gauche ne voteront pas ce texte.

Sur les questions du nucléaire, le Front de Gauche et son candidat, Jean-Luc Mélenchon, sont les seuls à proposer que le peuple puisse se prononcer par référendum, afin de conserver une totale souveraineté sur cette technologie à grands enjeux.

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