La convergence dont je parle est purement économique – il s'agit de celle des fondamentaux de l'économie, croissance, emploi, inflation, productivité –, indépendamment du caractère hautement souhaitable de la convergence fiscale ou sociale. A mon avis, y voir le résultat des seules politiques économiques serait une erreur. Les économies de la zone euro connaissent chacune des problèmes distincts, ce qui devrait conduire à mener des politiques différenciées en vue de les faire converger vers un objectif commun. Sur ce point, je suis parfaitement d'accord avec Pierre-Alain Muet. La convergence des politiques économiques ne fait qu'accentuer la divergence des économies. Une coordination par objectifs serait bien préférable à une convergence des instruments.
Monsieur Myard, en août et en septembre, mon laboratoire a estimé les transferts nécessaires pour maintenir la zone euro. Depuis, avec la récession qui s'annonce, les montants se sont encore accrus. Il faudrait fournir, d'ici à 2018, environ 218 milliards d'euros par an, soit, si l'on prend la clef de répartition retenue pour le FESF, la nécessité, pour l'Allemagne – qui pèse entre les deux tiers et 70 % dans le dispositif – de verser environ 140 milliards par an. Si l'Allemagne recourait partiellement à l'emprunt, sa dette publique dépasserait les 100 % du PIB à l'horizon 2018. L'hypothèse selon laquelle la France pourrait contribuer à hauteur de 25 % n'est plus crédible.
Ensuite, non, la Grèce n'a pas été d'abord victime de son indiscipline. Les ressources de l'économie grecque sont particulièrement sensibles à la hausse de l'euro : le tourisme et les produits de l'affrètement de la flotte, libellés en dollars, et des exportations hors zone euro, elles aussi comptabilisées en dollars. À partir de 2003-2004, avec la hausse importante de l'euro, le gouvernement grec a été confronté à un effondrement des ressources de l'économie et, partant, des recettes fiscales. Qu'il ait triché est une évidence. Et je sais, pour avoir été associé à toute une série de travaux effectués à Bruxelles, que les autorités de l'Union étaient parfaitement au courant de ces falsifications : elles les ont même couvertes à partir de 2004. On peut parler seulement d'indiscipline contrainte par les circonstances.
On peut considérer que la dévaluation de l'euro aurait des conséquences négatives. Je rappelle seulement que, si l'euro dévaluait de 20 %, à charge fiscale constante, la hausse des carburants serait de 3 %.
Oui, nous sommes dans la même situation qu'en 1945. A l'époque, notre dette publique avoisinait 150 % du PIB. La seule solution possible, à mes yeux, est le retour à une croissance élevée couplée à une inflation élevée, pour obtenir un croît important du PNB nominal. Ainsi, la Russie a enregistré l'année dernière un déficit public de l'ordre de 6 % du PIB ; comme la hausse du PIB nominal a tourné autour de 11 %, la dette publique rapportée au PIB a baissé.