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Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Réunion du 26 janvier 2012 à 9h30
Prévention du surendettement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

Cette proposition de loi comprend deux articles et deux principes.

L'article 1er pose le principe de la coresponsabilité dans l'emprunt. Il est normal que quelqu'un qui prête de l'argent ait la responsabilité de vérifier la solvabilité de l'emprunteur ; celui-ci ne peut pas être le seul responsable. Monsieur le secrétaire d'État, imaginons que je veuille vous emprunter 10 000 euros : si vous en disposez, je suis certain qu'avant de me les prêter, vous vérifierez que je suis capable de vous rembourser. Pourquoi un organisme de crédit ne serait-il pas dans la même situation ?

L'article 1er inscrit donc dans la loi, plutôt que de le laisser à la jurisprudence, le principe de la coresponsabilité du prêteur et de l'emprunteur. Sous la précédente législature, cet article avait d'ailleurs déjà été adopté par notre assemblée.

Nous n'avons pas voulu, monsieur le secrétaire d'État, fixer de seuil d'endettement maximal, car nous pensons que puisqu'il y a coresponsabilité, il appartient au prêteur de vérifier les capacités de remboursement de la personne concernée, de prendre une décision, et d'en assumer les risques. Fixer un seuil arbitraire ne correspondrait à rien.

Je voudrais, enfin, faire observer, pour répondre à un argument qu'on nous oppose souvent, qu'à côté du coût social que j'évoquais, il y a un coût économique. Le Président de la République Jacques Chirac l'avait expliqué : 40 % des Français ne peuvent pas avoir accès au crédit, car au lieu d'examiner leur situation, on utilise des techniques de credit scoring, c'est-à-dire que l'on ne s'intéresse pas au dossier individuel de la personne mais uniquement à la catégorie statistique à laquelle elle appartient. On prive ainsi quatre Français sur dix d'un crédit, alors que 20 % d'entre eux au moins pourraient y accéder, et cela aboutit à la situation que je décrivais tout à l'heure, quand surviennent les drames sociaux que l'on connaît.

À l'article 2, nous nous donnons les moyens de l'application du principe de la coresponsabilité : les moyens, c'est le répertoire national du crédit.

Vous disiez, monsieur le secrétaire d'État, qu'en Europe, certains fichiers posent problème. Je le conçois volontiers, je le reconnais même, et c'est ce qui nous a permis, en travaillant, d'améliorer notre proposition. Nous évitons ainsi les écueils rencontrés par les autres pays européens.

Comme Jean Dionis du Séjour l'a rappelé tout à l'heure, ce que nous proposons, c'est un fichier public, géré par la Banque de France, et non pas un fichier privé. Il ne pourra donc pas servir à faire de la prospection commerciale, puisque ça n'est évidemment pas souhaitable. Il n'est consultable qu'à la demande de l'emprunteur : les sociétés de crédit ne peuvent pas s'en servir pour connaître l'endettement de quelqu'un qui n'a rien demandé, qui ne sollicite pas un crédit. Le consommateur se voit donc protégé contre toute intrusion dans sa vie privée. Enfin, les données numérisées recueillies ne peuvent pas être conservées : il faut seulement que le prêteur conserve une trace papier de sa consultation pour pouvoir, en cas de défaut de paiement, démontrer sa bonne foi devant le juge.

Il n'y a pas de coût pour les dépenses publiques, comme l'a montré notre rapporteur, puisque c'est l'utilisateur qui paiera sa consultation. J'observe, d'ailleurs, que cela lui coûterait moins cher qu'aujourd'hui, puisque les techniques de credit scoring sont plus chères que les cinquante centimes par dossier mentionnés par notre collègue Jean Dionis du Séjour.

Monsieur le secrétaire d'État, vous disiez qu'aucun fichier aussi important n'a été créé dans notre pays. Pardon, mais les 44 millions d'électeurs sont recensés dans un fichier : cela passe par l'INSEE, quand il y a des inscriptions et des radiations. Ce fichier existe, tout comme celui de la sécurité sociale. Je me souviens qu'en d'autres temps, dans d'autres fonctions, monsieur le secrétaire d'État, vous et moi étions d'accord pour créer un fichier des cartes nationales d'identité, ce qui aurait été très utile à bien des égards.

Voilà la réalité, et c'est une évidence pour tous les praticiens du crédit – et de plus en plus d'organismes de crédit approuvent notre proposition. C'est d'ailleurs ainsi qu'ils agissent à l'étranger, dans les autres pays européens ! Pourquoi ne le feraient-ils pas en France ?

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